Clovis le Pestiféré, Grand Prêtre de la Dame Dieu d'Erac [Terminé] -Alric-

Nom/Prénom: Clovis, dit le Rivois ou encore le Pestiféré
Âge: 35ans
Sexe: Masculin
Race: Humain
Faction: Péninsule

Particularité:
Clovis a survécu à la peste qui ravagea Diantra de 994 à 996 du dixième cycle. Il attrapa la maladie lors de son service dans les faubourgs de la capitale un an après son intronisation expéditive comme prêtre.
Le Grand Prêtre est ce qu’on appelle parmi le culte un «homme de foudre» même si il n’en fait pas le moins du monde l’étalage, considérant que ce don ne doit pas être dilapidé. Il a cependant la spécificité d’avoir un grand pouvoir dans ses manifestations une fois passé un certain seuil mais ne le contrôle absolument pas, ce qui pourrait expliquer sa réticence à s’en servir.

Alignement: Loyal Neutre
Métier: Grand Prêtre de Néera d’Erac
Classe d’arme: Magie divine

Equipement:
La soutane et la pèlerine sont les meilleurs alliés d’un homme de foi qui a à cœur de visiter ses fidèles et de faire respecter le dogme. D’un tissu noir sobre qui n’est relevé que de l’ourlet et de l’aile de la Dame-Dieu sur la poitrine des deux vêtements, brodés de fil d’argent, le vêtement vise l’utile plutôt que le faste. Il se voit fendu en arrière depuis le bassin jusqu’au pied et ne se ferme pas sur cette même longueur en avant pour permettre la chevauchée sans handicape, et se complète donc d’un pantalon de toile sombre et rugueuse qui vise à rappeler l’humilité à son porteur. Le choix de pèlerine dépend enfin de l’usage. Là où elle sera simple pour les offices et les représentations officielles, on lui préférera un modèle à capuchon pour les journées de voyage ou d’activités en extérieur par temps maussade.

Le Grand Prêtre ne s’encombre pas de grand-chose, un exemplaire parmi les nombreux en sa possession contenant une partie des Saintes Écritures inhérentes au Culte l’accompagne partout. Si le titre en change régulièrement, sa présentation reste la même, ensemble de parchemins relié de cuir brun et bouclé de sangles permettant de le porter en bandoulière permettant le transport aisé. Il emporte également toujours dans ses bagages un flagellum comportant sept lanières de cuir terminées par des billes d’acier pour d’éventuelles pénitences. Un grand couteau de chasse orne enfin sa cuisse lors des voyages parce qu’il est toujours utile d’avoir une lame sur soi.

La seule marque de luxe qui signe par la même sa fonction est une chevalière d’argent grossière frappée des armoiries du Clergé d’Erac. Elle lui sert à marqué la cire de ses épitres de l’aigle éracien protégeant de ses ailes le calice divin surplombant quatre gouttes d’eau, chacune représentant un des cinq autres dieux ou, selon les interprétations, une des provinces du Médian: Ancenis, Haut-Val, Velteroc et Erac même. Si l’anneau semble représenter une hégémonie du temple d’Erac sur les provinces voisines, le fait est discutable. Il est plutôt une guerre d’influence qui se résume, depuis le pèlerinage de Jasuhin le Humble, à un duel entre le Primepreste d’Ancenis et le dirigeant du Clergé d’Erac. Il ne s’agit cependant pas d’un conflit à proprement parler ou d’une intrigue comme les nobles en ont le secret, les deux dirigeants étant capables de s’entendre sur de nombreux points et plus d’une fois d’agir de concert.

Description physique:
Les traits pâles et acerbe son creusé par la rudesse. Sur un visage taillé à la serpe, on voit les traces d’une vie de rigueur dans les pièces obscures des temples. Nulle couleur autre que le violet léger de quelques cernes ne vient éclairer ce facies austère encadré de cheveux noir comme le corbeau qui dévore les impies pendus à leur gibet. Perché sur un corps tout en tendons et en muscles secs, plus grand que la moyenne et rendu plus amaigri encore par la sobriété de l’étoffe noire, ce masque darde des yeux bruns presque noirs sur ce qui l’entour. Un regard empli de ferveur, de sévérité et d’intelligence, son culte ne reculera pas, cela s’y lit.

Du reste, on ne voit jamais grand-chose parce qu’il ne le dévoile que dans l’intimité de la solitude d’une cellule aussi austère que lui-même. Mais lorsque la soutane est ôtée, on peut contempler la carte des flagellations et pénitence qui se dessine sur son dos livide, entailles passées ou plus récentes faisant d’avantage pensées à de fines brûlure qu’à de réels coups de fouets. Mais cela, nulle ne le voit, car seules ses longues mains blanches paraissent avec sa tête hors de son habit noir. Marquée par le labeur et les châtiments des précepteurs, elles ne brillent que de l’éclat de la chevalière du culte qui semble bien terne au milieu de tant d’ombre et de pâleur.

Description mentale:
«La fin justifie les moyens» Un adage simple qui résume très bien la situation concernant Clovis. Sous son ton doucereux et susurrent qui laisse à peine transparaître une nature de serpent, il cache une volonté incendiaire d’arriver à l’aboutissement de son dessein le plus cher: installer la puissance du Culte sur la Péninsule. Et dans son ambition, il voit même un royaume sans Roy dirigé par le Haut Prêtre de la Dame-Dieu. Il n’hésitera jamais à trahir ou à se salir les mains pour accomplir ses plans.

Ambitieux sous une couverture de piété, il prétend l’humilité en agissant pour le culte tout en souhaitant se forger lui-même une place de Martyr. De la même manière, sous la dévotion au dogme se cache la haine. Une haine dévorante pour son propre peuple en réalité, pour les païens de Rive et par extension pour tout être et chose qu’il considèrera comme hérétique. Magie, superstitions, idoles et même tempérance figurent au nombre des engeances qu’il souhaite éradiquer. Pour un culte fort, pour un culte souverain. Dans sa conception, il n’est pas à douter d’ailleurs que même les quatre autres déités tutélaires sont à évincer.

A coté de cette facette noire du Grand Prêtre, il y a également les principes du culte, même si le dogme se fait intégriste dans la pratique qu’il en fait, il ne manque cependant pas d’en respecter les directive. L’abnégation est donc paradoxalement en ménage avec sa volonté de grandeur. Cette étrange cohabitation est sans doute rendue possible par certaines visées communes de ces deux aspirations, dont l’une et non des moindres restent celle de remettre les nobles sur le chemin de la lumière et leur rappeler que les lois divines ne sont pas à fouler au pied parce qu’elles font barrage à l’ambition et l’égoïsme.

Son caractère se marque encore par quelque chose de sec, rude et stricte. Il vit dans un certain dénuement et conserve sobriété et austérité malgré son rang. Nulle frasque et nul excès. Une discipline de fer et une tendance à la pénitence pour expier, ou justifier, ses ambitions et ses péchés. Mais ne faut-il pas qu’il s’aveugle pour devenir le bras vengeur de la Dame-Dieu qui s’abattra sur les infidèles?

Capacités magiques:
Si un mage avait observé Clovis durant son jeune temps, il aurait dit d’emblée qu’il avait une forte affinité sensorielle avec la magie. C’aurait pu être un surdoué dans cet art si il n’avait pas grandit à l’ombre d’un père par trop croyant dans une région influencée par un autre culte. Un don qui aurait été gâché en quelque sorte si l’enfant n’avait pas fini par en retirer quelque chose quand même. Le culte de Néera prodigue en effet un enseignement sur la manière de manier les dons de la déesse, principalement en matière de guérison. Si l’enfant s’était toujours refusé à en faire usage, il avait découvert autre chose lors d’une pratique solitaire de ces préceptes. Il avait alors treize ans et entamait sa troisième année de noviciat lorsque les étincelles jaillir pour la première fois du bout de ses doigts.

Si au premier abord, il en fut fort confus et même apeuré, le mystère qui entourait cette manifestation qu’il ne comprenait alors pas commença doucement de le faciner. Il essaya de reproduire la chose, encore et encore, jusqu’à maîtriser ce tout petit exploit. Mais il voulait en savoir plus. Aussi, il passa de plus en plus de temps dans la maigre bibliothèque du monastère rivois à la recherche d’un indice, que ce fut de son temps libre ou de ses nuits. Et son assiduité fini par payer lorsqu’il décrouvit le récit de la vie de Saint Lazar d’Erac qui avait asservit les incroyant en usant du don de la foudre que lui avait offert la Dame-Dieu.

Depuis lors, plus aucun doute n’était permis, c’était un don de Néera et ce don était la foudre. Alors il s’entraîna, en secret, parce qu’un don pour l’un est souvent malédiction face à l’autre. Jusqu’au jour où l’Incident lui fit comprendre qu’il ne devait pas trop utiliser ce don. Alors qu’il s’exerçait seul dans les bois entourant le monastère un jour d’orage, il fut surpris par quelqu’un du village. Un gueux errant qui lui fit autant peur que lui ne l’effraya. Sous l’action de cette nouvelle émotion, il utilisa son don pour se défendre selon ce que lui dicta son instinct. La foudre parti, hors de son contrôle ravager la clairière et l’homme qui venait d’y surgir.

Clovis n’en parla jamais mais demeura au fait de cela, son pouvoir était grand mais il lui était interdit de s’en servir sans que le besoin n’en soit urgent. Créer des étincelles a peut-être fini par devenir une sorte de trouble obsessionnel pour lui, mais il n’a jamais vraiment été au-delà. Sauf peut-être pendant ses séances de pénitence où la charge produite par ses doigts remonte jusqu’aux billes d’acier du flagellum pour ajouter à sa douleur et à son repentir.

Cela nous donne un bon exemple de la manière dont Clovis fait appel à son don. Le flux va de paire avec ce que lui procure la prière en quelque sorte. Si il arrive à le réprimer lors des cérémonies publiques, il le laisse apparaître dans son intimité. La chaleur qui l’envahit alors qu’il communique en pensée avec la Dame-Dieu se manifeste alors par les petits étincelles qui danse au bout de ses doigts. Lorsqu’il manie le flagellum, son don s’exprime de manière plus forte parce que la culpabilité s’y mêle et fait grandir le besoin de son expression. Lorsqu’il a dû se servir un jour durant le Voile de son don pour se défendre, c’était la colère qui inspirait la manifestation.

A ce moment, il s’est senti pris d’une colère sourde. Des prêtres cherchaient à l’évincer par égoïsme, prêt à souiller le sol sacré du temple d’Erac. Son meurtre aurait alors été une offense à la Dame-Dieu elle-même et en sa maison. Il utilisa alors le don comme un «châtiment divin». C’est alors que tout mage aurait pu ressentir le désastre du manque de formation. Si manier une telle quantité d’énergie n’était pas tant un problème pour cet homme discipliné, fervent et doté d’une grande sensibilité au don, le manque de formation se démontra par la manifestation de cette magie. Loin d’être précise, la foudre frappa tout ce qui, de près ou de loin, pouvait lui servir de lien vers le sol. Il n’y avait alors que la menace, mais il y a fort à parier qu’en d’autre circonstance, les témoins auraient aussi subit les assauts des griffes électriques. Sans compter que le Grand Prêtre a eu le plus grand mal à enrayer le processus, à endiguer le flux qui le traversait.

En soi, lorsque Clovis utilise sa pleine puissance, le miracle n’est pas dans la manifestation spectaculaire de son don, mais plutôt dans le fait qu’il y survive. Et les raisons qu’il invoque pour ne pas s’en servir sont sans doute celles qui justifient que sa vie puisse encore se poursuivre.

Histoire:

Le Concile s’éternisait. Rien d’étonnant après tout, il s’agissait de décider du devenir du Culte de la Dame-Dieu à travers la Péninsule tout entière. Et ça, même ce barbare venu d’Oesgard et la péronnelle de Soltariel pouvaient le comprendre. D’ailleurs, c’était bien pour ça que cela durait aussi longtemps, chacun cherchait à placer son petit protégé à la tête de Notre-Dame de Deina. L’Archidiacre du dit lieu semblait d’ailleurs fort aise du tournant des discussions. L’appui des suderons lui était sans aucun doute possible acquis. Fort heureusement, ce n’était pas avec leur faible ascendant sur leurs terres que ceux là imposeraient quoi que ce soit.

Clovis regardait plutôt la chose avec une certaine distance, son esprit était fort préoccupé par les nouvelles qu’il avait reçues de sa terre natale. Erac se troublait, Velteroc et Haut-Val semblaient penser que leurs frontières étaient trop étroites. Une autre histoire de nobles que cela. Mais la chose qui avait d’emblée retenu son attention demeurait l’enjeu théologique de ce trouble. La menace des Lyrions et des Rivois ne cessait de peser sur son propre clergé et rien que la pensé d’une issue qui serait favorable à ces deux là le rendait malade. Et avec Léandre à la tête d’Erac, même si il se prétendait de confession pentienne, il demeurait Lyrion… Alors le Langecin pouvait bien déblatérer sur la nécessité de sang neuf pour mener le culte, cela ne lui parlait pas du tout.  

Il fallait être clair, ils n’en feraient qu’à leur tête de toute façon. Le Primat d'Oesgard tenterait de maintenir son autonomie nouvellement acquise et de composer avec ceux qui se déchiraient encore ce lopin de terre quasi-stérile. Soltariel tenterait encore de se faire valoir face au culte de Tyra, sur fond d’intrigues stupides comme seuls les soltari en ont le secret. Et le Nord comme le Médian, lui-même compris, mènerait leur petit bonhomme de chemin comme ils l’avaient toujours fait.

Il était loin le temps de sa prêtrise simple dans les faubourgs de Diantra ravagé par la peste. Il se souvenait encore de son arrivé dans la capitale. Il était un jeune novice à l’époque, venu d’un monastère perdu à Lockrive où la foi s’inculquait aussi bien à coup de sermons qu’avec de simples coups. Il faisait partie de ces pléthores de jeunes novices envoyé vers la cité de Diantra pour prodiguer les derniers sacrements aux pestiférés.

Son ordination expéditive à Notre-Dame de Deina pour faire face aux ravages de la maladie parmi le clergé resterait à jamais dans sa mémoire. Des novices alignés d’un bout à l’autre de la cathédrale, le Haut-Prêtre sur une tribune face à eux, et une vingtaine de prêtres administrant les onguents. Une simplification des rites que seule la nécessité avait rendue possible. Et voilà qu’il avait été expédié Prêtre et par la même envoyé vers ce qu’on pouvait appeler alors la mort. D’autant qu’il l’avait attrapé, cette malédiction. Pourtant, il avait survécu et il était même revenu au pays.

Présentement, il aurait bien affronté à nouveau les gémissements, les bubons et l’odeur âcre de l’encens à outrance plutôt que d’écouter pour la troisième fois un même argument paraphrasé. Il en regrettait presque le Haut-Prêtre décédé à qui ils devaient aujourd’hui choisir un héritier. Enfin, presque, si il n’avait pas été du complot qui visait à l’empoisonner lors de la cérémonie du Don bassement qualifiée de «fête de la vie» par le commun mais qui ne reprenait pas assez la grandeur de ce qui y était commémoré.

Il revint tout de même au présent comme le Grand Prêtre de Serramire, qui présidait à la séance du haut de son grand âge, demandait si les différents partis étaient prêts à modifier leurs intentions de vote ou s’ils devraient à nouveau se quitter sans une majorité pour la pause dinatoire de la moitié du jour. Il signifia donc d’un hochement de la tête que non, il ne reconnaîtrait ni l’archidiacre, ni le Grand Prêtre de Langehack et encore moins cette pseudo-sainte d’Alonna. Non, il restait sur sa position, il fallait que le prochain Haut-Prêtre vienne Chrystabel. C’était ce que certains d’entre eux avait convenu pour remettre la noblesse sous le giron de la piété, assurer la fin des magouilles méridionales et surtout fortifier leur position dans le Culte.

Lorsqu’ils se retirèrent vers la salle à manger, où fort heureusement le vœu de silence était d’application, il se rendit compte à quel point il en était des vermisseaux parmi ses confrères. De ceux-là qui font la grimace parce que le plat est trop sobre à leur convenance, ou de ceux-ci qui enfourne goulument le porc salé, les pommes de terre, les bettes et la soupe imbibée de bouillon mais seulement après s’être resservi deux fois au moins. Lui mangeait ce qui était déposé sur la tranche de pain de seigle épaisse, ni plus ni moins. Ce n’était pas en faisant des frasques sur la nourriture qu’on pouvait lutter contre les païens.

S’il avait dû faire la fine bouche au monastère, l’affaire aurait été vite réglée. La communauté de Lockrive n’était pas connue pour sa tendresse. Et puis, de toute façon, un fidèle n’avait pas vraiment de choix. C’était le monastère ou ce n’était rien. Le reste n’était que rites impies ou prières corrompues. Sa jeunesse en tant que dévoué à la Dame-Dieu n’avait pas été de tout repos et l’animosité des Rivois y était pour autant que la rudesse des moines. Par chance, au retour de Diantra, c’était à Erac même que l’attendait la suite de sa vie de dévotion envers Néera.

Là bas, il avait été apaisé de ne plus devoir cacher sa foi en sortant au dehors. Il n’avait plus à se cacher et, de plus, le fait d’avoir survécu à la peste lui avait offert un statut de miraculé qui servait très bien ses ambitions. Erac méritait des prêtres forts pour une foi forte. Une foi qui pouvait ramener les brebis égarées à l’alpage sacré ou en tout cas qui pouvait les abattre si elles s’entêtaient à se perdre sans cesse. Et il n’était pas le seul à penser ainsi au vu du nombre de ses partisans.

On ne pouvait pas à proprement parler d’ambition personnelle. Il n’était pas vraiment de nature égoïste ou orgueilleuse, cela allait selon lui à l’encontre du dogme. Cela ne manquait d’ailleurs pas de marquer sa vision du jeu de la noblesse d’une certaine circonspection. Mais par piété, il savait qu’il fallait qu’un homme fort se hisse dans les hautes sphères, quelqu’un qui aie la poigne pour défendre le culte et rappeler à tous que la foi ne se marchande pas. Qu’importaient les cathédrales et les temples que les Nobles offraient au Culte si c’était pour se vautré dans la décadence.

Une petite sonnette les rappela à la mission qui était la leur aujourd’hui. Elire un Haut-Prêtre… Quelle mascarade. Serramire mettrait un véto pour Odélian et Alonna parce que son Grand Prêtre prenait trop à cœur les guerres de territoire. Soltariel et les autres au Sud s’était acoquinés avec l’archidiacre et ses pratiques détestables et ne voudraient en aucun cas le voir écarter. Lui refusait de voir une pseudo-sainte montée si haut sans même se donner la peine de passer par le noviciat. Langehack ne jurait que par lui-même mais surtout contre Chrystabel, ce qui ne lui attirait pas sa sympathie, et Oesgard soutenait l’Alonienne parce que la superstition semblait être tenace même chez les hommes de lettre. Heureusement, l’arrogant Primepreste d’Ancenis était de son avis, sans quoi c’était le dernier clou dans le cercueil de sa tempérance.

Une situation assez inextricable, en somme. Il était d’autant plus insupportable de constater ce cas de figure ici, que cela confirmait une ignominie: le culte était aussi divisé que le pouvoir temporel. Et c’était une réalité inacceptable pour tout bon croyant. Sa patience avait des limites et il se demandait si elles ne seraient pas bientôt à bout. Il se retrouvait face à ce pour quoi il avait été heureux que son père, vassal de Lockrive, ait voulu qu’il entre dans les ordres, et ainsi échappé à cette détestable politique temporel. L’absence de consensus. Jusque là, il avait toujours pu souder les intervenants autour d’une foi commune ou de la volonté d’œuvrer dans l’intérêt du royaume, ou au moins du duché. Mais ces gens là étaient au-delà d’arguments si simples qui permettaient de revenir sur sa position pour faire des concessions.

Il n’était certes pas beaucoup intervenu depuis le début du Concile. Il fallait bien avouer qu’il avait gardé le secret espoir qu’un de ses pairs arrivent à le rallier à une cause plus juste que son choix de dépit. Si il avait été évident qu’il fallait se débarrasser du précédent Haut-Prêtre au plus vite, il n’était pas si clair de savoir vers qui se tourner ensuite. De plus, étant le plus jeune des dignitaires présents, le droit d’ainesse et la subtile connaissance de sa place lui interdisait de faire trop de vague. Aussi, au lieu de taper un bon coup du poing sur la table comme il l’aurait fait un Erac, il se contenta de s’éclaircir légèrement la voix. Un bruit discret mais audible, sans paraître déplacé. Il attendit qu’on lui donne la parole avant que sa voix mesurée et doucereuse ne s'élève, contrairement à ce vieux porc d’Oesgardien qui parlait sans y être invité à grand renfort de postillons.

«Eminences, je pense que nous sommes dans une impasse et je pense également qu’il est fort regrettable que nous en soyons arrivés là. J’avais osé espérer en me rendant ici, il y a de cela déjà une Ennéade, que la raison et notre objectif commun et sacré prendrait le pas sur toute autre considération. Cependant, il m’apparait que nos points de vue ne sont pas si semblables que je ne le pensais. Je vous prie naturellement d’excuser ma naïveté, due sans doute à ma jeunesse.

Mais, si je puis me permettre, nous n’arriverons à rien comme cela. Il n’y aura pas d’unanimité parmi nous pour élire un représentant suprême du Culte. Ou en tout cas, il n’y en aura pas avant longtemps et le temps est une denrée rare qui manque aux enfants de la Dame-Dieu.

Certains d’entre vous voient déjà où je souhaite en venir. La guerre menace en ma province, les païens ne sauraient qu’en profiter. Je vous rappelle que Farren de Lockrive a déclaré le rejet du Culte Pentien. Je pense que vous comprendrez que la mission qui m’appelle là bas est bien plus urgente que celle de mettre à plat tous les différents qui nous occupent. Cela ne veut pas dire que je compte déléguer mon devoir sacré devant cette assemblée.

Il existe cependant une close dans les lois divines inhérentes à notre réunion aujourd’hui et laissées par la Gardienne Deina qui prévoit le cas de figure où la conjoncture serait défavorable à un long conciliabule entre les Grands Prêtres du royaume. Celle-ci autorise ce conseil à reporter d’un an sa décision. La gestion du culte dans le domaine royal revient alors à l’Archidiacre ici présent dans le domaine des affaires courantes comme le définit sa fonction et comme il l’exerce présentement. Les autres dignitaires du Culte ayant droit à administrer leur domaine comme le leur dicte la Dame-Dieu, à la seule condition de ne pas nuire à l’ensemble de Culte.

Cette close a, selon moi, été écrite spécialement pour notre concile. Et il serait mal venu pour nous de ne pas nous en servir alors que l’heure est grave au Nord. J’ai d’ailleurs ouï dire qu’une secte païenne sévissait également du coté d’Alonna. Et surtout, force est de constater que la noblesse s’écarte des préceptes sacrés. Il est de notre devoir de remettre ces choses à leur place. Si nous ne sommes pas capables d’agir de concert dans cette élection, agissons au moins dans un ensemble en tant que Concile. Je vous laisse méditer ma parole.»

Une manière distinguée de poser un ultimatum… Et de proposer à tous ses avares et ses orgueilleux une autonomie jamais acquise. Pour la première fois depuis l’an de grâce 620 du dixième cycle, le pouvoir séculier absolu serait détenu par les Grands Prêtres et non par un seul Haut-Prêtre. Il espérait juste qu’ils n’iraient pas vérifier trop vite la vraie teneur du texte. Ils risquaient vite de déchanter. La motion était irrévocable et ne pouvait être appliquée que deux années successives. Autant dire que sa «solution» ne faisait que postposer un problème qui n’en resterait pas moins vivace.

L’avantage serait que l’archidiacre aurait les mains liées. Plus question de petits arrangements et compromis, en l’absence du Haut-Prêtre, il croulerait sous le labeur et ce serait tout. Sa popularité auprès des Soltar et autres en serait, à n’en pas douter, fortement revue à la baisse. Mais à part ce dernier, les autres interlocuteurs semblaient fort aises de cette nouvelle approche. Aussi fut-il finalement admis, après quelques discussions pour la forme, que l’élection pouvait être reportée à l’année suivante mais que le Concile devrait à nouveau se réunir au mois suivant pour discuter des actes de chacun et admettre une vision commune de l’évolution du culte. Autant dire qu’il s’agirait d’une autre réunion vide faite de belles paroles bien creuses.

Alors qu’il remontait vers ses appartements pour donner ses ordres à sa suite et préparer le départ, il fut pris à parti par le Grand Prêtre Ysarois. Il prit donc le temps de s’arrêter pour converser un moment avec ce religieux qu’il avait si peu le loisir de rencontrer et donc encore moins de vraiment connaître.

«C’était très habile de votre part. Il faut une grande connaissance des écritures pour être tombé sur ce passage précis. Je ne savais point que les prêtres rivois avait un tel accès aux saintes lectures.»

«C’est à Diantra que j’ai été intronisé et non dans la région païenne de Rive. Disons que j’ai eu le temps de me pencher sur certaines archives de Notre-Dame de Deina lors de ma convalescence.»

«Il est vrai, on m’a parlé de cette histoire. Il faut dire qu’il y a déjà quelques rumeur à votre sujet, savez vous…»

«Je dois bien avouer ne pas être fort au fait des rumeurs courant à mon propos. Les bruits de couloir vous comprenez…»

«Oui, oui, je comprends. Mais admettez tout de même, certains vont jusqu’à affirmer que vous faites partie de ces privilégiés à être ce que l’on appelle un homme de foudre. Si c’était vrai, j’en connais certains qui crèveraient d’envie et d’autres qui seraient prêts à vous suivre sans hésitation…»

«On ne m’avait encore jamais parlé de cette rumeur là. Puisse la Dame-Dieu l’entendre et m’en faire grâce dans ce cas. Je ne doute pas qu’un pareil outil me serait bien utile face aux impies de Rive et Lyron. D’ailleurs, si vous voulez bien m’excuser, ma maisonnée et moi-même quittons la capitale dans quelques heures, nous espérons avoir atteint un endroit sain avant les vêpres.»

Et il prit congé sans autre fioriture. Ainsi donc, il y en avait qui murmurait à son sujet. Et ces gens semblaient fort bien informés. Il devrait faire plus attention à ce qui se passait à ses cotés, et surtout, à ceux qui l’observaient d’un peu trop prêt. Certains le suivraient si ils savaient, beaucoup voudraient savoir comment il avait obtenu ce don, et parmi eux, nombreux seraient ceux qui préfèreraient le voir mort ou évincé plutôt que de jouir de ce talent. Le Grand Prêtre s’était bien gardé de préciser à quel parti il appartenait.

Clovis ne croyait pas en l’apprentissage des manifestations divines dont pouvait être capable un prêtre. Pour lui, c’était un don offert par la Dame-Dieu à ses fidèles qui montraient le plus d’assiduité à suivre son enseignement et à observer ses règles. Il avait toujours eu ce pouvoir en lui, un cadeau qui aurait d’ailleurs bien pu lui coûter la vie. En Péninsule, surtout dans les régions les plus profondes, ce genre de manifestations sans cadre religieux se retrouvait bien vite à être appelé «sorcellerie» et s’achevait tout aussi rapidement sur un bûcher. Il allait de soi qu’il ne laissait jamais ce qui apparaissait alors comme une malédiction, un péché mortel, éclater au grand jour. Même si, une fois seul dans sa cellule du monastère, il faisait danser des étincelles du bout des doigts pour se rassurer et se dire que Néera l’accompagnait toujours et veillait sur lui malgré la souffrance.

La peste, elle, avait été une épreuve. Garder secret un tel pouvoir qui demeurait pourtant le seul secours rassurant qu’il lui restait avait tenu du miracle, presque plus que sa guérison. Sous l’action de la fièvre, il se souvenait avoir déjà envoyé un éclair à travers la pièce contre un mur, par un heureux hasard, il n’y avait alors personne à son chevet. Mais l’époque n’était pas à ce genre de phénomène et peu importait que, pour lui, il s’agisse d’un don du ciel. La malédiction de la peste combinée à la foudre l’aurait clairement placé sur la liste des hérétiques au pire, des mages au mieux.

En y repensant, ce devait être lors de la Malenuit que la rumeur avait dû prendre naissance. Il avait eu beaucoup moins de scrupule à laisser libre court à cette force lorsque des traîtres avaient jugé son ascension trop destructrice vis-à-vis de leurs propres avantages. Mais la présence du divin avait alors effacé l’incident, le mettant au rang de symbole. Le signe que le prêtre, en plus d’avoir été sauvé de la peste, était également préservé par Néera. Cela ne l’avait cependant pas encouragé à poursuivre dans une voie plus fantasque. Un don des dieux était un cadeau précieux qu’on ne pouvait dilapider.

Il s’était donc astreint à faire son office de prêtre. A accueillir les fidèles sans cesse plus nombreux dans le temple d’Erac et à écouter leurs peurs, leurs maux et leurs prières. Ces sermons avaient calmé des foules et sa parole apaisé bien des tourments. Mais il n’en retirait aucune gloire. Que ce fut lui ou un autre qui s’occupa de la charge d’officiant alors, le résultat aurait été le même. Le dogme leur enseignait à être capables de ce genre d’intervention. Mais c’était peut-être ce qui l’avait amené là où il était malgré toute la modestie dont il pouvait faire preuve, il ne le nierait pas.

Il pénétra dans ses austères appartements et distribua ses ordres d’un ton sec qui ne souffrait aucune réplique. Il lui restait trois heures avant que sa suite ne soit prête au départ. Il s’enferma seul dans sa chambre. Calmement, il défit sa pèlerine, ôta sa soutane et s’approcha de l’autel sur le mur Est de la pièce. Au bout de ses doigts de petites étincelles jaillirent convulsivement lorsqu’il saisit le flagellum et commença sa pénitence. Après la première strophe, il s’administra un premier coup violent dans son dos couturé. Des billes de fer fusa un éclat vibrant comme elles marquaient sa chaire. Une odeur de viande rôtie se répandit dans la pièce à mesure qu’il avançait dans sa requête de pardon pour le complot à l’encontre du précédent Haut-Prêtre. Dans sa bouche, le goût du cuivre se substitua lentement à toute autre saveur. Ce rituel se poursuivrait pendant encore huit Ennéades, peut-être plus si il le jugeait nécessaire.

Alors que le soleil commençait sa descente à l’horizon vers la mer, le Grand Prêtre Eracien se mit en route vers Chrystabel. Ils feraient halte dans un petit hameau entre la cité et la capitale et reprendrait la route après les matines. Avec de la chance, il atteindrait Morène au midi du troisième jour, à partir de là, les choses seraient à la fois plus simple et plus compliquées. Il devrait faire en sorte de ne plus devoir courber l’échine face aux païens de Lyron et de Rive. Il tenterait d’asseoir la toute puissance du Culte dans le Médian comme cela aurait dû être depuis longtemps. Nul ne rirait plus à l’évocation son clergé. Tel était sa volonté, remettre Erac dans la lumière ou mourir en martyr en essayant. Que la Dame-Dieu préserve son entreprise!

HRP

Comment trouves-tu le forum? On a quand même fait du beau boulot...
Comment as-tu connu le forum? Vraiment du bon boulot...
Crédit avatar et signature : Votre texte ici (lien vers l'image d'origine et nom de l'artiste dans la mesure du possible)
Compte autorisé par : Alric

Il reste globalement le mental, mais je pense que le reste est plus ou moins "fini", je ne doute pas qu'il y a un certain risque de devoir modifier un grand nombre de détail mais j'en prends le risque

• Concernant l'équipement, j'ai préféré du noir pour une sobriété inhérente au personnage. La sobriété et la pauvreté pour pouvoir mieux venir au démuni un truc comme ça. Il s'agit bien entendu de vêtements courants et pas d'un habit cérémoniel. Je vais faire la distinction dans ma description. La fente à l'arrière permet de monter à cheval sans se mettre en amazone et donne une plus grande liberté de mouvement, c'est tout. Concernant les saintes écritures, il y en a, ce n'est peut-être jamais précisé dans le BG mais il doit y en avoir à mon sens. Dans la société féodale qui sert de trame de fond à la Péninsule, cela m'étonnerait qu'il n'y ait pas un tas de code et d'écrit concernant Néera ou même les autres dieux. Et Mea Culpa pour Hautval ^^
  
• Physique: les cicatrices sont dues à la pénitence, simplement.
  
• C'est suite à une discussion sur le culte des cinq sur la CB où certains voyait bien que Tyra pouvait avoir un ascendant équivalent dans le sud. J'ai repris l'idée parce qu'introduire une rivalité entre les cultes des différents dieux peut former un terrain de jeu intéressant et propice aux intrigues. Je n'ai pas la volonté de copier le catholicisme moyenâgeux ici, ça me semblait juste assez cohérent dans l'esprit de l'unité qu'on voit en Péninsule.
  
• Je suis toujours ouvert à revoir ma hiérarchisation, même si au final je reprends simplement des Grands Prêtres qui administre les principaux temples et les "paroisses" environnantes, un haut prêtre prétendument au sommet même si son autorité est parfois discutée et le reste ne sont "que" des prêtres et des moines, dont la position est déterminée par l'influence et le truchement plus politique du religieux. Je ne vois pas en quoi je surhiérarchise le clergé. Les différents noms qui apparaissent sont propres aux régions d'où viennent les Grands-Prêtres, rien de plus.
  
• Je qualifie le grand-prêtre d'Archidiacre, c'était une envie personnel. L'idée est avant tout de lui donner un titre particulier puisqu'il administre avec le Haut-Prêtre un des hauts lieux du culte. Mais c'est adaptable et ça répond au point suivant.
  
• Je modifierai l'aspect de Tyra, cependant on peut imaginer dans la rivalité des cultes, un rite pour que Néera se penche pour la vie qu'a mené le mourrant et la bénisse pour qu'il puisse être bien vu par Tyra. Mais ce n'est qu'une suggestion sans plus.
  
• A ma connaissance non plus, mais étant en âme errante, je me suis dit qu'une intrigue autour du poste valait le coup, donc comme on peut le lire plus ou moins clairement dans mon histoire, j'ai décidé de l'assassiner ici C'est bien sûr sujet à validation.
  
• La séance a pour but d'élir un nouveau Haut-prêtre suite au "décès fortuit" du précédent.
  
• Je transpose à une région qui est en constant heurt entre le culte pentien et les cultes Rivois et Lyron. Il s'agit de région fort superstitieuse et le BG de la magie en Péninsule précise bien que les mages sont relativement mal vu surtout dans les régions rurales où il est assez conseillé de taper dans le divin. Mais je peut toujours me tromper ou confondre.
  
• Pour la magie je vais adapter.
  
• Concernant le coté égoïste, je veux bien en soi modifier, mais alors pourquoi ne demande-t-on pas à tout noble de s'adapter également en fonction du Voile? L'impact est autant important à leur niveau qu'au niveau du clergé, je pense, sinon plus puisque le clergé lui, étant renforcé, peut voir une recrudescence de la soif de pouvoir de certains de ses membres. Ma volonté est de créer un culte fort politique, où tout est affaire de rumeur, de tact et de relation. Si cela donne une image fort chrétienne du culte, je m'en excuse mais je m'en défendrai en disant que c'est aussi ce qu'on m'a laissé comme matière globalement. Rien n'empêche de respecter le dogme et d'être égocentrique ou de penser que son idée est meilleure que celle de l'autre. Je veux bien qu'il y a des caractéristiques mais je pense qu'elles ne peuvent pas non plus effacer toute personnalité chez les personnages. Un chevalier peut-être mauvais, pourquoi pas un grand prêtre?