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 Café croissants

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Aymeric de Brochant
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MessageSujet: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeJeu 20 Avr 2017 - 21:09

1er jour de la 1ère énéade de Verimios, 9ème année du 11ème cycle.

« Cette grognasse m'a gâché ma soirée ; je vais lui pourrir son matin », s'était exclamé le marquis au réveil, tandis que la ville demeurait encore nimbée dans l'obscurité vespérale. C'est qu'Aymeric était d'une rigueur toute monacale - et par là même un calvaire pour les domestiques. S'il épargnait usuellement ses facéties matinales aux invités, il était cette fois-ci bien décidé à prendre revanche sur la sa vassale, la baronne d'Alonna.

Car cette dernière, avec cette propension coutumière qu'elle avait de mettre son grain de sel là où elle n'y était invitée, n'avait manqué l'occasion de se faire remarquer, la nuit dernière, quand elle avait asséné un camouflet verbal à son suzerain, publiquement. Pensez vous ? Le marquis voisin, venu du berthildois, avait acquiescé doctement à la diatribe de son commensal ; à cela, la baronne avait jugé bon d'apostropher l'hôte, pour lui voler son moment. "À défaut, je lui volerais ses heures de sommeil", conclut-il intérieurement, tandis qu'il envoyait une enseigne réveiller la dame, avant même que les mâtine n'aient été sonnées.

Pénétrant dans le petit salon où il recevrai l'importune, Aymeric ordonna également qu'on y dispose du manger pour la première collation du jour. Congédiant le Père Bréguet plus tôt que de rigueur, il expédia ses bondieuseries prestement, avant de s'attaquer aux victuailles d'un coup de fourchette nerveux, attendant son invitée.

Emporté, le marquis vida son verre prestement, se resservant avant même que Jaljen, son factotum, n'eut le temps d'intervenir. S'essuyant la bouche à même la manche de ce dernier, Aymeric chassa le valet aussitôt, tandis qu'à la porte principale, on annonçait la baronne Alanya. Alors, faisant signe d'un claquement de doigt à son fidèle pour qu'il ouvre le vantail au moment de sortir, Aymeric, opérant une singulièrement métamorphose, se rasseyant pesamment sur sa cathèdre, à mesure qu'il entrait dans son personnage.

C'est une figure emprunte à moitié de bonhommie, et à moitié de béatitude endormie qui accueillit ainsi la baronne, lui demandant d'un ton affable : « Vous désiriez me voir, douce amie ? »

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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeVen 21 Avr 2017 - 17:17


« Peste soit-il ! ».

Un chapelet de jurons s'échappa sans grâce de la bouche de la baronne qui s'était prestement levée. La pauvresse envoyée n'était pas non plus en reste : la nuit avait été fort courte et bien trop mouvementée pour qu'on la réveille de si bonne heure. Malgré les excuses balbutiées avec gêne par la camérière, la Broissieux la fusillait toujours de son regard noir. S'il était une chose qu'elle ne supportait guère s'était qu'on la réveille. Pour des raisons politiques qui plus est.

« Alors, ne reste point plantée là et aide moi à me préparer ! ».

La phrase avait été prononcée sans gentillesse et avec la même rudesse que son saut du lit. Avec un peu d'inquiétude, la chambrière s'avança sans moufeter et commença son œuvre. Ainsi donc le Corbac avait décidé de lui faire payer son intervention lors de son moment de gloire. Soit, il en serait ainsi. Aymeric était adulé pour ses performances militaires mais il n'en restait moins qu'un gamin colérique et revanchard à ses yeux. C'est d'ailleurs ce seul fait qu'il l'empêchait de briller à ses yeux : non pas dirigé par de profondes réflexions, il avait cette fâcheuse tendance à se préoccuper bien plus de ses jouets – convoités, prêtés ou perdus – dictant ainsi un enjeu facilement compréhensible. Comme un enfant vexé, il avait voulu reprendre Alonna et Oësgard et n'en a démordu que lorsque son but fût atteint. Alanya pensait réellement que cette sacro-sainte guerre au Médian n'était qu'un prétexte plus que discutable pour une toute nouvelle ambition, une nouvelle babiole dans sa liste qui ne semblait s'arrêter.
Sa toilette ne fût présentable qu'une bonne heure plus tard et après une bataille ardue contre sa masse capillaire qui n'était point décidé à obéir de si tôt. Elle n'avait pas le teint frais et elle n'était clairement pas de bonne humeur. La petite marche à travers le palais ducale n'avait pas eu raison de son acrimonie si bien que lorsque le Brochant pris la parole, elle ne put s'empêcher un petit rictus dédaigneux parfaitement accordé à ses mirettes accusatrices.

« Je le désirais votre Excellence, mais non pas durant mon sommeil ». Elle prit place face à lui, jetant un regard dans le coin de la pièce. Jaljen se tenait droit et muet, comme à son habitude avant de prendre congé sous le signe de son suzerain. La baronne ne l'aimait guère ; il avait cette chose dérangeante de tout observer – tout le temps -, sous les ordres d'Aymeric. Sa fidélité était d'ailleurs aussi louable qu'inquiétante. Peut-être qu'après tout il n'y avait pas que cela entre les deux hommes. Cela ne l'aurait guère étonnée que le marquis s'adonne à quelques déviantes pratiques, au vu de l'intérêt pour sa propre femme. « Est-ce que votre valet n'est point d'assez bonne compagnie pour que vous veniez me quérir au milieu de mes rêves ? ». La question avait été posée avec innocence mais quiconque la connaissait assez aurait pu voir la raillerie derrière son sourire.
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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeDim 21 Mai 2017 - 14:25

À en juger par l'acrimonie de la baronne, Aymeric sut qu'il avait fait mouche. Ce n'était pas sans raison que le marquis avait convoqué sa vassale à une heure pareille ; pour celle qui longtemps s'était imaginée pouvoir rester hors de l'emprise de son suzerain, c'était un rappel d'assujettissement. Peu importe qu'Alanya s'en offusque : elle n'en était pas moins venue.

Ainsi, lorsque la baronne formula ses piques à l'endroit du marquis, ce dernier s'en délecta. « Vous ne devriez pas persiffler, chère amie, cela ne sied guère à une dame de votre rang, lui répondit-il d'un ton affable, qui plus est, cela pouvait séduire un serpent comme feu Duncan, mais quant à moi, je trouve cela vulgaire. »

Faisant signe à la baronne de prendre place, Aymeric s'engonça un peu plus dans son fauteuil. Dévisageant son invitée, il ne put s'empêcher de songer au gâchis qu'était cette femme. Belle, elle se fardait pourtant comme une putain soltariie ; jeune, la dame n'en avait pas moins écopé déjà de deux veuvages, et portait au front cette aplomb qu'ont les dames ayant survécu à leur époux. « Il me peine grandement d'avoir écourté votre nuit, madame, sachez cependant que vous êtes plus rayonnante que jamaismentit il, un sourire aux lèvres. Maintenant, dites moi la raison pour laquelle vous désiriez une audience. »

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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeLun 22 Mai 2017 - 17:41


Le Corbeau était un homme dont elle n’arrivait pas à définir son sentiment à son égard. Ils avaient tous deux une forme d’inimitié consensuelle qui convenait aussi bien à l’un qu’à l’autre. Toutefois, au-delà de ce perpétuel désintérêt, elle éprouvait une forme de respect – si petit soit-il – pour l’accomplissement de sa vie. Il n’était point né pour gouverner, pas plus qu’elle d’ailleurs et il menait chaque jour ses pions avec un brio qu’il lui fallait reconnaître. Et bien malgré elle, la baronne se trouvait dans la partie du bellâtre sans qu’elle puisse moufeter de trop. Bien sûr, il n’était pas sot et plutôt que de la contraindre par la force, il rusait avec la perfidie d’un bon Pentien pour l’amener à agir en son sens. La Sainte Néera en soit témoin, si le Lys n’avait point pris les devants, jamais Alanya n’aurait rejoint le giron du Serramirois. Du moins, pas en ces termes. Elle se retrouvait à présent pieds et poings liés à un homme qu’elle n’aimait guère et dont la politique – si elle rejoignait la sienne sur quelques points – n’était pas à son goût non plus.
Elle haussa un sourcil en croisant les mains sur ses genoux. Ainsi donc commençait leur entrevue, par quelques banalités acides, reflet intemporel de leur relation complexe. « Allons, votre Excellence ! Je n’oserais vous séduire. Nous avons passé ce temps là depuis fort longtemps ». Elle lui accorda un sourire acerbe avant de reprendre sur le même ton détaché. « Tout comme celui des flatteries. Tout gentilhomme que vous êtes – et avec tout mon respect – il n’est guère caché  que nous ne nous entendons que de manière courtoise. Aussi, si vous me le permettez, j’aimerai que nous parlions sans détour, bien que l’heure matinale puisse froisser les esprits plus promptement ».
Elle laissait son regard vagabonder sur son suzerain, étudiant posture et mimique. La conversation qui s’annonçait était sensible, d’autant plus qu’elle finirait certainement de la même manière qu’elle avait commencé. « Si j’ai mandé votre attention mon bon suzerain, c’est en tout état de cause ». Elle lâchait les mots avec prudence et calme. « Vous n’ignorez pas que je me suis rendue dans les contrées suderonnes, d’abord dans le Langecin, puis à la cour du Roy pour enfin passer par Diantra ». Elle se redressa légèrement de son siège, comme si l’aplomb ainsi trouvé pouvait donner plus de poids à la conversation qu’elle entamait. « Vous n’ignorez pas non plus mon avis quant à la nécessité de retrouver une unité dans le Royaume, pour autant je souhaitais vous soumettre mon désappointement quant à votre guerre sainte ».
« Il ne m’est pas difficile d’entendre que vous aspirez à retrouver la dite unité entre les différentes terres, mais vous ne me ferez pas croire ici qu’il ne s’agit pas là d’un sombre prétexte pour vous rapprocher de ce que vous convoitez depuis toujours ». Elle marqua une courte pause, mesurant sa respiration pour ne point paraître trop emportée. « Votre ambition n’est après tout un secret pour personne ici et temps que cela servira la mienne, vous me savez toute dévouée à cette cause ». Les cartes étaient posées mais les questions n’étaient point encore levées. « Cette guerre, entendez le mon bon messire, si elle n’est point dirigé contre le Médian seul causera plus de mal que de bien ». L’espace d’un instant l’image de Niklaus lui apparut et elle eut le cœur serré. Aymeric était bien déterminé à faire tomber des têtes, et nul doute que la sienne tomberait peu après celle de Blanche et Nimmio.

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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeMar 23 Mai 2017 - 12:20

Après d'ultimes atermoiements doux-amers, mus par ce sursaut d'orgueil qui exige le dernier mot, Alanya daigna finalement d'informer son hôte des raisons de leur entrevue. La suite ne manqua pas d'étonner le marquis, qui se vit demander d'épargner les bras de la Ligue, et de n'en trancher que la tête. Aymeric savait sa vassale prompte aux escapades, et n'avait guère été surpris de l'apprendre repartie une fois de plus - quoiqu'irrité, tant il est vrai qu'il lui avait ordonné de veiller à la reconstitution de ses troupes. Cependant, que le goût pour l'exotisme de l'alonnaise se traduise en un plaidoyer pour les traîtres de tout poil déçut grandement le marquis. « Et pourquoi cela ? s'entendit il répondre hautement. En quoi le Royaume ne gagnerait-il pas à être purgé de ses séditieux, autant qu'ils soient ? De grâce, madame, ne me dites pas que vous vous êtes à nouveau amourachée. »

Au delà de la pique adressée à la vassale volage, passée maîtresse dans l'art de ramener un amant de ses voyages, c'était un agacement global qu'adressait le marquis. Il n'était en effet plus grande folie que de gouverner au gré de ses passions ; mais cela, une femelle pouvait-elle le comprendre ? C'est que la dame, du reste, semblait prêter à son suzerain des intentions bien sombres, et le marquis se résolut à la rassurer : « Vous serez déçue, du reste, d'apprendre que mes ambitions ne sont que bien minces. J'ignore quels desseins vous me prêtez, madame, et il me chagrine de vous entendre prononcer de telles paroles, tant il est vrai que de toute ma vie, la grandeur de mes fiefs et le service du Roy ont été mes seules causes. »

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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeMar 23 Mai 2017 - 17:28

Elle serra les dents et fit mine de rien. Cet homme l’exécrait au plus haut point et son air suffisant lui donnait la nausée. Pour autant, elle restait sagement engoncée dans le fauteuil, préférant ne point en venir à des paroles qu’elle regretterait sans doute. Aux yeux du Corbac elle ne serait jamais plus qu’une femme, et jamais moins que cela – si tant était qu’il puisse y avoir pire position sociétale. Pour sûr ! Il les aimait muette et serviable chose que, même par la force des choses elle n’était pas. L’avait-elle jamais été ?
« Entichée de qui mon bel ami ? De la veuve Langecine ? Du Mervalois qu’on dit souffreteux ? De Niklaus que vous abhorrait ? ». Elle esquissa un sourire. « Si cela peut apaiser votre cœur, l’amour n’est pas une chose que l’on peut se permettre pour peu que nous ayons des terres ». Et là-dessus, elle n’avait pas tort. Combien avait appris à ne point haïr leurs épouses bien après leur mariage ? Ce n’était qu’une mascarade religieuse qui servait des fins politiques. S’il l’aimait sa Mahaut, grand bien lui fasse !
« La grandeur, messire, ne s’acquiert pas sans ambitions, si petites soient elles. La Sainte Néera en soit témoin, mais vous avez fait de votre patience une arme bien plus redoutable que l’armée que j’ai eu le loisir de contempler dans la soirée ». Elle plissa légèrement les yeux.
« Votre bonhommie est délectable, je vous l’assure mais il n’y a plus que votre femme qui croît encore à votre modestie ». La baronne se pencha légèrement pour s’appuyer contre l’accoudoir. « N’y voyez pas là un reproche votre Excellence, ni même une méprise quant à vos louables intentions : je vous sais tout prêt à servir notre bon Roy si tant est que la lutte soit noble. Mais ne démentez pas qu’en agissant de la sorte ce n’est pas que le Royaume que vous servez ». Sa conversation avait été étrangement douce et si le ton avait été tout autre, cela se serait certainement fini en pugilat mais il n’en était rien ; il était là, le côté d’admiration. Il avait cette aisance que peu cultivait.
« Aussi mon ami, puisque vous souhaitez savoir pourquoi je m’oppose à votre choix ce n’est guère compliqué à entendre je vous l’assure. Diantra a été brûlée. Aujourd’hui ce n’est qu’un champ de ruines abritant quelques traîne-misère et subissant chaque jour un peu plus la violence. Les troupes Langecines s’en sont allées avec le Duc. Il ne reste de l’emprise de la Ligue que des reliquats. Et si vous pouvez les blâmer pour mille et un maux, sachez que le seul à avoir agi alors que même la couronne n’a rien intenté – par choix ou par obligations, cela ne change guère – reste le baron d’Apreplaine. Certes, je ne cautionne pas plus que vous la sédition lâchement menée mais connaissez-vous seulement les raisons du nouveau pouvoir ? Avez-vous seulement pris le temps d’entendre ce que celui que vous considérez aujourd’hui comme un ennemi avait à dire ? »
Elle le regardait avec pitié. Aymeric était bien plus prompt à porter un jugement qu’à faire place à la raison dans ces moments – et elle savait déjà que ses mots étaient vains. Mais, demain, elle pourrait s’en aller le cœur plus léger.
« Oschide est mort. Le Manchot est manipulé par le doux con de la Hautvalloise. Aucun des trois n’a jamais prétendu que profiter de la situation, s’alliant pour imposer un nouvel ordre dans lequel la lignée royale n’avait de sens que celui que la Blanche voulait donner ». Alanya se mordit la lèvre. Blanche. C’était là que résidait tout le nœud du problème. « Mais croyez le cher suzerain, Niklaus n’avait que pour volonté de permettre au départ du Roy, légitime régent des terres royales, que rien ne s’écroule de trop. Les barons et autre nobliaux se mangeaient entre-eux, se disputant les miettes royales comme des chiens. Quand bien même cela vous révulse mon seigneur, il y avait besoin de quelqu’un à la tête de cet agrégat bestial et sans réflexion. Le destin a voulu que ce soit ce baron-ci, embarqué sans à demi-conscient dans la tourmente de gens dont le seul mérite est de vivre encore aujourd’hui ».
Elle laissa flotter le silence un instant. Un bref instant. « Alors coupez donc ! Les pieds, la tête, le tronc ce que bon vous semble mais vous feriez une grave erreur de tous les considérer égaux dans les fautes ».
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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeJeu 25 Mai 2017 - 9:13

*C'est donc d'Altenberg que s'est enamourée la danselette*, pensa le marquis. Ainsi, une fois de plus le ventre de la baronne obscurcissait son jugement ; voila qu'elle se faisait l'avocate du félon par la seule force de l'amour. Et le marquis d'être partagé! Il lui aurait été impossible de blâmer le dévouement d'Alanya, tant il est vrai que l'irraison passionnelle est un apanage femelle. Attaquer l'attachement de la baronne à son traître d'amant, c'était attaquer la féminité tout entière, qui ne s'encombre de considérations morales au moment de s'amouracher. L'ironie, pourtant, était de mise : des partenaires successifs de la dame, la rébellion semblait être le trait commun. Se pouvait-il que l'infidélité fut critère de choix aux yeux de la belle ? Aymeric, pourtant d'habitude peu avare en fiel, se garda bien de le lui faire remarquer, redoutant ses foudres.

Plus un doute n'étreignait le marquis quant à l'amitié que les deux se portaient, tant le plaidoyer d'Alanya suppurait la détresse. La raison n'aurait pu défendre Niklaus, c'était donc le cœur qui s'exprimait! Bien qu'un pareil emportement, femelle dans son caprice, n'eut guère sied à une tête régnante, Aymeric en fut toutefois touché. Ainsi, c'est d'un ton rassurant, quoiqu'hautain, qu'il répondit à son invitée : « La prolifération des bouchers vous a-t-elle fait craindre que je comptasse aux rangs de ceux-ci ? Tranquillisez vous, douce amie : le service du Roy ne requiert la cruauté. Je n'entends me substituer à la justice de sa Majesté, et lui remettrait simplement les félons. Quand à ceux-ci, je les soustrairai à leurs pénates de gré ou de force ; votre bon ami n'aura qu'à se rendre. Êtes vous rassurée ? »

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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeLun 29 Mai 2017 - 16:56

Allons bon ! Elle lui aurait bien fait ravaler son air suffisant à ce déplumé ! Grands Dieux, il l’insupportait toujours un peu plus mais elle se gardait bien de lui montrer. La tournure de la conversation était assez évocatrice de leur inimitié pour ne point en rajouter d’avantage : il la prenait pour une couche-toi-là et elle le voyait comme un enfant fort mal élevé. Pour sûr, les quelques années aux geôles n’avaient pas eu raison de sa frimousse trop satisfaite de tout. Ah, elle en aurait juré tous les Cinq qu’il ne se voyait que le cul le bougre !
Et tant elle fulminait intérieurement, elle tapotait nerveusement le sofa du doigt. C’était là un bien maigre exutoire qui lui permettait néanmoins de garder sa mine ravie. Aurait-elle parlé à un mur qu’elle y aurait trouvé meilleure discussion.
« Non pas mon doux Seigneur ! Je vous sais de ceux qui attendent et j’escompte bien que vous ne dérogiez pas à votre Foi chevaleresque ». Elle se redressa pourtant, plongeant ses yeux dans les mirettes bien trop arrogantes du Marquis. « Toutefois, laissez-moi vous interroger sans détour, comme nous avons l’habitude mon ami. Mon jugement de femme vous déplait-il au point de m’apprécier comme une pauvre putain, préférant celui d’un mâle ? ».
« Voilà, votre Excellence une médisance que j’aimerai levée. Que je sois une femme importe peu ici et je ne saurais me soustraire à un époux s’il advenait que je me remarie un jour – Néera m’entende. Non obstant, ne mérite-je pas la même considération que vos amis de l’Eglise ou Berthildois aujourd’hui ? Je n’ai certes pas battu la prairie à vos côtés à Amblère mais n’étais-je point là pour vous accueillir à votre retour ? »
« Vous êtes bien mieux armé que moi je ne le suis aujourd’hui : vous détenez mon jeune frère, je suis ici seule en votre demeure. Vous avez ma vassalité et autant de respect que je peux vous offrir. Et pourtant, vous persistez à me traiter comme votre camérière. A ceci je rajouterai une chose : mon con ne me sert guère à réfléchir ; êtes-vous rassuré ? ».

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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeLun 29 Mai 2017 - 17:56

Alors qu'il avait pensé calmer le jeu, voila qu'Aymeric vit son invitée prendre la mouche. Si le visage de la dame était avenant, ses mots en faisait craqueler le vernis : le fiel suintait du masque par tous les orifices. Le marquis avait visé juste, et en un seul mot, Alanya venait d'oublier Diantra, la Ligue, le bon Niklaus. Et la dame de jouer les outrées, et de reprocher à son hôte tous les maux du monde : avec l'hystérie coutumière des femelles, elle sauta du coq à l'âne, mêlant la campagne oesgardiennes aux affres de son ventre. C'était sa nature qui s'exprimait ici, et une fois de plus, Aymeric n'eut le cœur à fustiger la faiblesse de son sexe, car lui même aimait la Femme et ses multiples défauts. « Grands dieux, Alanya! Blâmez les Cinq et non moi de vous avoir mis un con entre les jambes, je n'y puis rien! » s'exclama-t-il d'un ton gaillard.

C'était la pitié qui s'exprimait par la bouche ; pouvait il en être autrement ? Car s'il était un mal que la dame semblait pleurer, cela semblait bel et bien de n'être née homme. Qu'à cela ne tienne! Il lui causerait dès lors comme il causait avec ses commensaux, et tant pis si elle s'en trouvait offusquée : « Eh bien! Je vous écoute, madame : faites moi entendre vos idées, et je le jure, dussent-elles êtres juste, je respecterais votre conseil. Oncques mais! Dussent-elles seulement l'être. »

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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeLun 29 Mai 2017 - 18:40

« J’aurai fait un meilleur homme que certains ici-bas ». Elle eut un bref rire sarcastique qui se tut dans le silence de la pièce. Tudieu, il n’était guère plus vaillant qu’un mouflet le Brochant ! Qu’essayait-il de faire, tantôt attisant la flamme tantôt l’étouffant ? Sans se départir de son joli sourire, ses yeux brulaient de dédain. Elle l’exécrait de tout son être et elle n’aurait su dire pourquoi sa compassion la vexait autant. Mais il restait un homme : qu’il soit fier de son vît si cela lui plaisait, son auto satisfaction lui laissait le champ libre pour ce qu’elle avait en tête. Alors elle préféra cent fois serrer les dents et attendre que cela passe que tout gâcher aujourd’hui. Un jour, il le regretterait.
« Vous êtes – et je ne peux vous le retirer – un très bon homme d’arme ». A part quand, trop saoul vous allez vous jeter sous les murs des Puysards perdant presque deux milles hommes, mais ça, elle se garda bien de le dire. « Toutefois, votre amour pour notre Roy vous pousse à bannir toute évocation d’une possible entente avec ceux qui n’ont pas agi dans leur intérêt mais dans celui des populations que la Blanche et son affreux manchot ont laissé pour compte ».
« Voyez ! Si vous vous sentez l’âme d’un bras vengeur pour Celui qui n’a point encore la force de le faire, vous devrez blâmer la Régence et l’ignominie de l’Estréventine. Souhaiteriez-vous être blâmé pour une médisance de votre frère, de votre épouse ou de vos enfants ? Ô certes, vous en porteriez la lourde conséquence – et je ne doute pas que c’est ce que feront les gens coupables d’humanité. Car pour ne point voir le sang couler à nouveau, pour ne point voir tomber la ville Royale encore ils ont accepté une charge qui leur vaudra l’excommunication sinon la mort. Et dans les termes, vous aurez bien fait, car tel était leur fardeau et telle était votre charge ».
Elle chercha des yeux un godet. La conversation lui asséchait la gorge autant qu’elle attisait son dégout envers le Corbac. « Pour autant, n’est-il point possible d’aller trouver une solution en amont d’une guerre avec ces gens-ci ? Ne pourriez-vous expliquer avec clairvoyance la méprise de vos proches ? Le sang coule depuis bien trop de temps et certains que vous accusez de complots ne seront à posteriori croyez-le, que de simples martyrs aux yeux du peuple. Et alors, vous aurez certes amené les dissidents au billot mais la rue se soulèvera contre ce même Roy que nous tentons aujourd’hui d’asseoir plus que légitiment sur son trône ».
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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeLun 29 Mai 2017 - 19:15

La déception assaillit le marquis à mesure que son invitée lui répondait. Il l'avait attendue incisive et percutante : la voila qui lui assaisonnait des poncifs sirupeux et abscons. Finalement, peut-être Aymeric s'était il trompé : il avait pressenti Alanya à nouveau en proie aux feux du désir, mais voila que la belle semblait s'être faite nonne. Pensait-elle peut-être l'attendrir avec ses boniments ? « Je laisse, madame, l'absolution aux prêtres de Nééra ; le service du Roy n'est point affaire de charité, mais de justice. Ne pensez vous pas, du reste, que les traîtres méritent punition ? » s'entendit-il demander.

À l'évidence, il s'était montré trop faible envers cette capricieuse vassale. Lui pardonner sa défection à l'endroit de Serramire avait été l’œuvre de l'urgence plus que d'un réel sens de la justice. Aymeric alors, nécessitait autant d'hommes que possible, et les barons d'Alonna s'étaient alors présentés là, la bouche en cœur. Ce curieux marché avait fait échapper à Alanya la justice à laquelle sa forfaiture l'eut normalement soumise, et la voila qu'il s'imaginait pouvoir étendre son cas singulier à l'entièreté de la Péninsule. « Est-ce seulement cela dont vous désiriez me dire ? » Le Père Bréguet l'eut aussi bien fait - quoiqu'en moins irritant.

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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeMar 30 Mai 2017 - 17:25


La baronne eut un rictus amer. L’avait-elle surestimé ? Que la Sainte Néera lui pardonne le sentiment étrange d’admiration qu’elle avait pu éprouver jusqu’alors envers son suzerain. Il se targuait de tant de vertus et de suffisance qu’il en arrivait à dédaigner les avis de ceux qui voyait en sa possible méprise une faute qui les ferait chuter aussi. Alors, l’énervement laissait place à un amusement acerbe sur la situation : ils étaient là, s’entendaient mais ne semblaient s’écouter réellement.
« Allons mon bon ami ! ». Elle l’observait de nouveau, faute d’avoir trouvé de quoi étancher sa soif dans la pièce. « Le seigneur d’Altenberg est quelqu’un que j’estime pour de nombreuses raisons mais je n’irai point mettre la corde autour de mon cou à sa place ». Si elle le pensait, le dire si crument lui pinça le cœur. Niklaus était un véritable confident et sa perte lui couterait mais telle était la vie au Royaume ; un choix – fussent-il bon sur l’heure – pouvait vous pousser subrepticement dans l’antre de Tyra. Elle avait essayé de dissuader son suzerain mais c’était peine perdue. Elle n’était guère apte à intervenir plus avant sans y perdre des plumes ; et le Faucon n’y tenait pas !
« Seulement, la plèbe est une chose dont vous devez vous soucier mon bel ami. Non pas seulement pour ses besoins – donnez-leur la main et ils vous prendront le bras – mais aussi pour son influence. Si vous êtes la main habile faisant trépasser les mécréants vous serez un héros. Mais la gueusaille ne vous pardonnera point, d’avoir porté préjudice à une idole ».
« Et il en sera de même pour ceux que vous représentez. La Couronne ne saurait cependant reprendre sa place sans l’appui – même temporaire – du bon peuple. Alors, lorsque le sang aura maculé votre lame, qui pensez-vous que notre bienveillant Conseil va accuser ? Le Roy ? ». Elle eut un petit rire sarcastique. Ce serait lui que l’on désavouera, et plus vite qu’il ne semblait le croire.
« Enfin ! ». Qu’il y aille, dans le mur ! Elle ne ferait rien de plus pour l’aider si d’aventure il s’y plantait en beauté. Elle clôtura la conversation là-dessus sans pour autant avoir dit son dernier mot. Le sujet de la guerre Sainte étant bouclée, elle escomptait bien profiter de tenir son suzerain dans une entrevue pour aborder quelques autres sujets qui la préoccupaient d’autant plus.
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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeJeu 1 Juin 2017 - 19:52

Le rire d'Alanya eut des échos de détresse. Les recours de la baronne s'épuisaient, à mesure qu'elle plaidait pour l'ineffable Altenberg. Il lui aurait été impossible de défendre la vertu ou l'honneur de celui-ci, un lâche doublé d'un tourne-casaque ; voila que la dame, empressée de porter secours à son amant, invoquait l'amour que le peuple portait supposément à celui-ci. Qu'en savait-elle, du cœur des gueux des domaines royaux ? De mépris, Aymeric nourrit du dégoût. « Eh bien ? Si les Cinq avaient doté le peuple du sens de l'honneur, la chose serait connue. En vérité, si la gueusaille a érigé cet Altenberg, ce traitre au Roy, en idole, elle mérite elle aussi d'être punie, et sa Majesté lui-même ne saurait que se féliciter qu'on châtiât ceux qui soutiennent l'homme qui l'a tant lésé. »

Aymeric, du reste, ne songeais guère à cela : la populace désirait son pain en suffisance, et qu'un homme, par ses forfaiture, attire sur elle les armées de l'étranger, cette populace même aurait tôt fait de vouer celui-ci au gémonies. Ignorant si son invitée avait professé pareille sottise en pleine connaissance de cause, ou par la détresse inspirée à l'idée du sort réservé à son amant, Aymeric, cependant, acheva d'enfoncer le clou. « Ne vous bercez pas d'illusions, madame : c'est la justice qui attend Altenberg, ainsi que les autres traitres au Roy. Vous feriez mieux de vous y préparer, car le printemps venu, j'attendrais de vous et de vos hommes que vous me suiviez jusque Diantra. » À cette seule phrase, un doute s'empara du marquis : était-il bien sage de se reposer sur une dame enamourée de son ennemi ? Aymeric redouta que la loyauté d'Alanya ne s'écarte du droit chemin : car le cœur, lui, est à gauche. Chassant son hésitation, il embraya : « Qu'en est-il, d'ailleurs, de vos ostes ? Voila trois mois que je vous ai ordonné de veiller à leur reconstitution : qu'en est-il ? »

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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeDim 4 Juin 2017 - 15:04

Qu’elle aille à Diantra auprès de lui était une chose à laquelle elle s’était attendue. Aymeric était un homme, et comme tous les hommes il aimait posséder. Si bien que, non content d’avoir l’Alonnan dans son giron, le gourmand garçon souhaitait dès lors pavaner avec son nouveau jouet. Et bien soit. La baronne que l’on disait encline à la tromperie n’en avait guère l’envie ni même les moyens. Toute l’inimitié qu’elle pouvait porter à l’encontre de son suzerain n’enlevait rien à la qualité d’administrateur de celui-ci ; car il était une chose qu’elle devait une fois de plus lui concéder : il était habile, si l’on omettait quelques erreurs de parcours. Alors, loin d’en tirer quelconque satisfaction, elle donnerait son dû au Marquis mais il n’aurait rien de plus.
« A mon grand dam, monseigneur, l’hiver est arrivé bien trop vite. Les camps de réfugiés Oësgardiens ont été évacués vers les villes et villages. La malemort n’a point pénétrée dans nos terres mais nous y veillons encore et la plupart des familles en fuite ne souhaite rentrer dans ces champs de désolation si tôt ». Elle croisa les pieds en se redressant un peu de son assise. « Aussi, vous comprendrez que l’ost n’est point encore une priorité ». Elle lui adressa un sourire poli mais faux, appuyant parfaitement ses dernières paroles.
« Toutefois mon ami, sachez que la plupart des grands vassaux Alonnais ont cessé de s’opposer, aussi je gage que d’ici le retour des beaux jours – puisque c’est là tout ce qui vous tracasse – vous pourrez trouver parmi vos hommes la bannière alonnaise ». Il n’y avait qu’une vague promesse. Si elle avait ordonné les choses à son départ, elle ignorait encore la situation présente sinon les deux plis envoyés par son intendance ; et si elle en croyait ce qui était dit, eh bien ! Au printemps trois cinquième de l’effectif total serait de nouveau capable de partir en campagne. C’était peu mais c’était déjà beaucoup.
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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeMar 6 Juin 2017 - 19:03

« J'eus préféré des résultats, et non des excuses », s'était entendu répondre le marquis sur un ton glacial. La phrase avait été lâchée dans un croassement contrit : l'homme se faisait violence pour garder empire sur lui même. Quand il avait donné ses directives, trois mois plus tôt, Aymeric avait été fort surpris de voir la baronne obtempérer ; force était de constater que si la dame avait hoché la tête benoitement, c'est qu'en n'en avait en réalité rien à foutre. Il n'était guère surprenant qu'elle eut dès lors passé la plupart de son temps en voyage ailleurs, loin de ses fiefs. Alanya de Broissieux poussait l'indigence à son paroxysme, invoquant des excuses éculées pour justifier son dilettantisme.

En vérité, la baronne offrait une piètre image de dirigeant. Celle qui revendiquait tantôt d'être prise au sérieux alignait depuis maintenant près de deux ans une existence jouisseuse passée loin de ses fiefs, qui demeuraient en proie à la gabegie. Elle avait marié des gandins inconsistants ; ses aventures, elles, étaient manifestes. Avec une mère refourguée, malgré son veuvage, au première intriguant venu, et un frère réduit au niveau d'otage, Alanya complétant un vibrant portrait d'une famille misérable, à la tête d'une terre qu'elle ne méritaient pas, mais qu'un dieu mauvais et rieur avait mis entre leur pattes gauches. Arcam, assurément, devait se tordre de rire à cette seule vision.

« Je n'entends plus accepter, madame, entreprit de répondre le marquis, que mes terres vassales s'embourbent dans pareille médiocrité. Aussi vous fais-je une offre : mon aide et mon appui. Alonna est la petite sœur de Serramire ; n'y a-t-il plus normal que je vous épaule, ne le pensez vous pas ? »

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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeMer 7 Juin 2017 - 18:07


La pièce se glaça presque aussi tôt. L’air était déjà pesant mais ce fut de trop. Les mots du Corbac semblaient retenus par sa propre gorge à mesure de la conversation. Il n’était plus question de quelques incartades : il était clair que ces deux-là ne se comprendraient jamais et plus encore ; ils ne parviendraient pas à s’entendre si longtemps que l’un n’aurait plié face à l’autre. L’égo d’Aymeric n’était plus à prouver. Sa petite sauterie de la veille en était l’illustration la plus récente. Il aimait à ce qu’on l’adule, il aimait à ce qu’on le regarde et plus encore il aimait à ce que l’on ploie devant lui. Mais la baronne n’en était point capable. Elle avait déjà courbé l’échine en acceptant de retourner dans son giron. Elle avait été presque humiliée lorsque celui-ci avait fait de son propre frère un pantin. Mais elle ne cèderait plus de terrain. Qu’il ne l’aime point, elle n’en avait rien à foutre. Leur vision du monde était à la fois si similaire et pourtant bien différent.
Et elle l’exécrait. Croyait-il qu’elle se tienne loin de chez elle par envie ? Oh certes ! A y voir de l’extérieur, elle n’était guère impliquée dans la vie de sa terre et pourtant. Pourtant il ignorait ce qu’elle avait sacrifié pour celle-ci et ce qu’elle sacrifierait encore pour elle. Qu’il tue son frère ! Qu’il porte atteinte à sa vie ! Qu’il essaye de faire d’elle la salope qu’il pensait qu’elle était. Elle en avait cure. Plus encore, cela la rendait plus entêtée. S’il voulait lui forcer la main, elle réussirait à en trouver avantages.

« Pensez-donc votre Excellence ce qu’il vous plairait de croire. Vous parlez de médiocrité alors même que plutôt que de comprendre que nous n’avons pas eu la chance de Serramire durant les dernières années. Alors allez donc ! Insultez ma terre, mes gens et ma régence tant qu’il vous plaira mais sachez vous rappeler mon bon sire que vous n’y habitez point ». Le visage fermé, son sang bouillait un peu plus à chacun de ses mots. Il lui fallut beaucoup de courage pour ne point imploser.

« Ignorez donc la guerre civile, la campagne d’Oësgardie. Restez donc sur vos volontés de purgation. Ordonnez bien ce que vous voulez mon ami car cela est votre droit et votre devoir mais ne me demandez pas de faire à l’Alonnan ce que vous n’arriveriez pas à faire vous-même ».

La dernière phrase claqua dans la pièce et le silence s’empara quelques secondes des deux interlocuteurs mais avant même qu’il ne répondre, elle l’arrêta. « D’ici au printemps trois cinquième de l’ost sera prêt. Maintenant, êtes-vous seulement prêt à entendre la politique économique et militaire que je souhaite mené ou alors votre seule volonté s’arrête aux chiffres ? Préférez-vous vous entretenir avec moi de l’avenir de votre petite sœur ou bien simplement exiger d’elle son dû ? »
« Je veux depuis le début entretenir avec vous, Messire de Brochant, une toute autre relation que celle-là. Vous n’êtes guère parfait, pas plus que je ne le suis.  ».
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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeDim 11 Juin 2017 - 14:27

La dame de Broissieux était-elle au pinacle de ce que peut produire le sexe faible ? C'est qu'à l'aune de l'hystérie, elle tenait la dragée haute à ses consœurs. Aymeric lui avait tendu à nouveau la main, et la ménesse s'était une fois de plus emportée dans une diatribe outrée, un salmigondis d'offuscation incohérente. Le marquis, face à cela, se trouvait proprement agacé. Il avait espéré pouvoir converser intelligemment avec sa vassale, or, dès qu'il avait le malheur de lui donner tort, et les Cinq savent que ce n'était guère difficile, la dame s'ébaudissait vertement. Et la drôlesse d'invoquer mille chimère à son secours!

Aymeric, cependant, s'était résolu, faute d'arriver à la raisonner, d'entendre Alanya se noyer proprement. La dame semblait croire qu'il y avait entre eux une forme d'égalité ; qu'elle le prouve donc. Jusqu'à présent, c'était de son incurie crasse et naïve, doublée d'un orgueil fort mal placé, qu'avait fait montre la baronne, tout en se figurant que le marquis ne fustigeait cela, mais son con. Alors peste! Qu'elle cause, la femme! Une fois qu'elle aurait débité sa logorrhée, épuisé ses réserves de bêtise, peut-être alors saurait-elle garder son bec clos et recevoir sa leçon. De tout cela, le marquis en doutait grandement ; il était cependant prêt à lui laisser le bénéfice du doute, pour la énième fois. « Là, madame, je vous suis tout ouï, répondit-il, mielleux, mais allons! Dites mois plutôt ce que vous fîtes, après que nous nous quittâmes, l'été dernier. »



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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeDim 11 Juin 2017 - 17:51


Elle sera les dents en affichant un sourire forcé. Bon sang, il avait le don de la mettre hors d’elle. L’égo du Corbac n’avait donc point de limite pour la regarder ainsi, partagé entre l’ennui et la pitié ? Il voulait qu’elle lui raconta sa vie alors même que le bon Marquis n’en avait strictement rien à faire. Il faisait passer le temps, se gaussant certainement au fond de lui que la baronne espère encore tirer quelque chose d’autre que ce dédain entendu. Pour sûr, il devait avoir des qualités, celles-là même qui jamais ne feraient ombrage à la myriade de défauts qui définissaient ses humeurs. Elle résistait à l’envie de simplement lui fausser compagnie, encore un peu.

« La perte de son Honneur du Lys m’a beaucoup affecté ; non pas d’amour perdu, ce n’était point la relation que nous entretenions lui et moi mais, rappelez-vous. A sa mort, je vous avais invité car ce n’est point la goutte qui l’emporta mais un vil crime qu’il ne m’a pas encore été donné de punir. Pour cause ! La guerre a uni mes vassaux les plus fidèles et a éloigné un peu plus de mon contrôle ceux qui s’était opposé à nous durant la guerre civile. J’ai toutefois réussi à apaiser la branche des Chtoll en le mariant à ma mère. D’une chose l’autre, il ne demeura plus que pour seul opposant assez puissant pour que l’on s’en occupe ici : Robert de Lourbier, le père de Constance. La campagne en Oësgard était très certainement pour lui un espoir vif et certain de retrouver son unique enfant, espoir évanoui au terme de la guerre – et même avant mais quel père renoncerait à sa fille ? ». Elle soupira, las de conter une histoire dont il semblait se foutre comme d’une guigne. « A notre retour, la peine de ne point avoir ne serait-ce que trouvé un corps sans vie le conduisit à la folie. Son esprit aveuglé par la douleur il s’est avéré que cette nuit-là, il atteignit au cœur l’Alonnan en tuant le pauvre Duncan. Je n’avais alors pas une chose que je détiens aujourd’hui, car comprenez, malgré tout cela il aurait été mal venu de punir un homme aussi influent alors même que j’avais besoin de son autorité sur les régions frontalières pour tenir les réfugiés et veillez à la sécurité de mes gens. Son épouse n’étant pas capable depuis fort longtemps de s’occuper de son domaine, j’aurais été encombrée d’un souci de plus. Et messire, j’ai bien fait d’attendre aussi longtemps que les choses s’améliorent. J’ai fait mener une enquête à Lesdiguières qui s’est conclu sur ceci : Lourbier est morte calcinée par les Puysards ou de sa propre volonté. Son équipage a retrouvé sa chevalière et me l’a rapporté ». La Broissieux s’accouda, son front se plissant légèrement. « L’espoir de l’opposition est mort avec elle ».
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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeDim 11 Juin 2017 - 19:02

Un rictus fit tressaillir la bouche du marquis, quand son invitée déclara Duncan être "le cœur de l'Alonnan". Si cette prononciation provinciale de la baronnie, à l'instar du patois infâme "Sgardien", lui arrachait usuellement des haut-le-cœur, la bouche du marquis s'était cette fois-ci tordue, amusée. L'ineffable seigneur du Lys avait été un opportuniste de premier ordre, un traître notoire, et un serviteur bien malhabile ; fort heureusement, ce feu follet avait brûlé promptement. En faire le cœur d'Alonna était soit illusoire, et trahissait un attachement envers l'homme que la baronne récusait, soit ironique : faire de cet insignifiant mesquin un héros avait quelque chose de cocasse.

Cependant, Alanya causait de ses mésaventures avec ses vassaux. Visiblement peu incommodée par le sort de sa mère, qu'elle avait in fine revendue pour s'acheter un peu de soutient, et ce malgré son veuvage, comme un vulgaire maquignon refourguerait une carne trop vieille, la baronne aborda l'autre famille de rebelles, nulle autre que celle responsable de l'assassinat de son époux. La même désinvolture triomphait : après avoir bazardé sa génitrice, elle semblait se soucier de la mort de son époux comme de vétilles. Robert de Loubier était il un assassin et un félon patenté ? Allons bon! Alanya ne l'avait fait proprement étêter, comme la justice l'eut commandé. Après tout, il était "influent". La couardise avait suinté tout les pores de la peau de la baronne, à la prononciation de ces mots, aussi vrai que le dégout en avait fait de même chez Aymeric. Là où le marquis eut fait écorcher vif ce traître de vassal, Alanya semblait se féliciter de lui avoir ôté son désir de se rebeller. Mais après tout, venant d'une personne à l'honneur si mince, à quoi pouvait-on s'attendre ? Le fiel marinait dans la bouche d'Aymeric qui regardait sa vassale s'enfoncer progressivement. Alors que celle-ci s'interrompait, il tapa trois fois sur la table, entrainant aussitôt l'irruption de Jaljen, son valet. « Fais donc mander le père Bréguet, veux-tu. Qu'il nous rejoigne céans, et apporte avec lui les vélins concernant les familles d'Alonna, ainsi que le codex du Lys. » Reportant son attention sur la baronne, il l'intima alors par un mouvement de main de continuer son récit, joignant le geste à la parole : « Je vous en prie, madame, parlez moi de vos voyages, maintenant. »

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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeDim 11 Juin 2017 - 19:33

Elle ne lâcha pas Jaljen des yeux. S’il eut été un homme qu’elle aima moins encore qu’Aymeric, c’était bien ce fouille-merde qui lui collait aux basques comme un vilain furoncle. Disgracieux, puant et suintant, il était la fièvre du Marquis. Elle n’aurait su dire avec exactitude à quel point ils furent proches, l’un et l’autre, si bien que la demande pondérée la rendit un peu plus soucieuse. Il n’était pas anodin qu’il convoqua céans l’ecclésiaste qu’il avait habitude d’user pour collecter ses papiers. Elle ne se détendit pas pour autant lorsqu’il quitta la pièce, la demande dans un coin de sa tête. Allons bon ! Qu’avait donc décidé le Corbac de si urgent pour déranger le vieil homme jusqu’ici, rouleaux vierges sous le bras. La baronne décida cependant de ne point faire remarquer au Marquis.

« J’eus préféré avoir davantage à vous raconter. Je me suis rendue jusque dans le Mervallois afin de rencontrer le bon Chancellier Cléophas. J’y allais y rencontrer celui qui menait le pays jusqu’alors, veillant à notre bon Roy en son domaine le temps de revenir à Diantra. Malheureusement le temps ne m’a permis de m’entretenir avec lui, ce dernier bien trop pris par les choses de la Régence. En y allant j’ai moi-même assuré la poursuite de nos échanges tout en offrant le soutien qu’il convient à la Dame Méliane, qui demeure avant tout une amie. Enfin, en remontant je me suis arrêtée quelques jours à Diantra ». Elle fixait de nouveau son suzerain, pesant les mots qu’elle allait employer ici. « J’y ai vu les ravages qu’on causer le feu, la guerre et le déchirement du Royaume. J’y ai aussi assisté à l’annonce de la dissolution de la Ligue par Niklaus auprès de la bourgeoisie et des petits seigneurs des terres royales. J’ai enfin fini ma course ici même ».
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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeLun 12 Juin 2017 - 10:58

Alanya faisait bien piètre trouvère. De trois mois de voyages, passés loin de ses pénates où elle avait laissé vivoter en toute quiétude les assassins de son époux, la baronne ne tirait qu'un maigre récit. La vibrante épopée de la dame se soldat par une fin de non-recevoir à la cour royale, et deux coquets dîners dans les places fortes de la sédition péninsulaire. À n'en pas douter, la dame choisissait ses amis comme elle élisait ses époux : avares en fidélité, si bien que le marquis se résolut dès lors de la faire surveiller étroitement plus encore.

On toqua cependant à la porte : c'était Hyacinthe Bréguet, la chapelain, et archiviste du marquis. Le vieux factotum ne fit pas long feu. Après qu'il eut déposé sur la table les vélins requis, le père Bréguet prit la tangente, laissant tout le loisir à Aymeric pour lire la paperasse. Un silence s'ensuivit, durant lequel le marquis se consacra à l'étude. La petitesse du codex établi de la main de Duncan n'avait d'égal que sa ladrerie. Baron éphémère, les grandes décisions de l'homme s'étaient résumées à annoncer que la fille d'un autre serait son héritier, qu'il veillerait au bien être de quelques clochards fuyant l'oesgardie, et que dorénavant, les duels seraient interdits. Ces trois mesures trahissaient la nature veule et pusillanime de l'homme ; elles n'avaient du manquer de contribuer à son trépas.

« Causons un peu, madame, voulez vous. » Aymeric avait lancé cela, calmement, comme une invitation, quand il s'était plus agi d'une déclaration : c'est lui qui s'apprêtait à parler. « Au printemps, cela fera deux ans que vous aurez tenu la baronnie entre vous mains. Cette terre, vous ne la devez ni à votre lignage, ni à vos amitiés dans le pays, mais à l'intervention d'un conquérant étranger. Cependant, après avoir joui de son aide, vous avez tourné le dos à votre bienfaiteur. Tandis que nous menions la guerre en Oesgardie, vous avez gagné le Sud : on vous a vu à Diantra lorsque Nimmio y professait sa félonie, et en Ydril, auprès de celui qui intenterai plus tard à la vie du Roy. Revenue avec un enfant et un nouveau mari dans vos bagages, vous avez rejoint Amblère à temps pour la bataille, et rendu l'hommage dû à Serramire. Puis, quand je vous commandais de veiller auprès de vos terres, vous avez regagné le Sud, fréquentant cette fois-ci les cours du Langecin, et visitant Diantra. » Il s'arrêta un instant, avant de reprendre son énumération. « Velteroc, Anoszia, Altenberg, Lancrais... On peut dire que vous cultivez les accointances respectables. De pareille amitiés ne vous apporteront que l'opprobre, madame, or pendant ce temps passé à s'encanailler avec une bande de félon, vous tolérez sur vos terres l'existence même de l'assassin de votre mari. Mieux encore! Ce gandin de Duncan a donné à votre noblesse toute les raisons de vous en vouloir : leur ôter le droit de rendre justice, et de la réclamer à l'épée, la chose même qui nous différencie de la gueusaille. Vous pensez avoir dompté vos vassaux en vendant votre mère à l'un d'entre eux ? En vérité, vos quelques soutiens vous bercent d'illusions : demain, ce sera un de vos gens qui vous plantera une dague dans le dos. » Il prit une nouvelle pause. « Comprenez moi bien, madame : je désire le bien de vos terres. Les ducs de Serramire, après qu'ils eussent concédé ce fief aux premiers barons, ont toujours veillé auprès d'eux. Cependant, par vos actes, vous vous aliénez plus de monde que la raison et l'honneur ne le permettent, et si demain, l'un de vos vassaux venait chercher ma justice, ou que Sa Majesté le Roy voyait dans vos fréquentations de la lèse-majesté, et exigeai que je vous châtie, il me serait difficile de leur leur refuser, car malgré votre hommage, vous vous défiez de moi, et désobéissez mes commandements. Sachez donc cela : vous pouvez accepter la main que je vous tends, et faire amende honorable de vos manquements, conspuer vos amitiés félonnes, et retrouver le droit chemin à titre de vassale, ou vous obstiner sur votre voie de mauvaiseté. Je prierai les Cinq, dans ce cas, pour que votre sort ne soit trop tragique, cependant, j'en doute fort. »

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MessageSujet: Re: Café croissants   Café croissants I_icon_minitimeLun 12 Juin 2017 - 13:39

Elle le laissa déblatérer en silence. Elle ne bougea point, non pas parce qu’elle accusait le coup mais surtout parce qu’elle attendait patiemment qu’il eut fini son flamboyant discours. A l’instar des suderons, le Corbeau avait l’intime conviction de détenir toutes les vérités. Elle aurait pu se gausser de lui mais après tout, tous les hommes avaient leur faiblesse ; et voilà la sienne. Il n’était pas seulement convaincu que tout cela fût vrai, mais en plus il en jeter son fiel sans raisonnement. A l’instant elle ne se retrouvait point devant un homme fait, mais devant un gamin à qui l’on aurait volé une friandise. Cela l’amusa, pour sûr !, de le voir si plein d’aplomb devant ses chimères ; car tel l’enfant qu’il était, il croyait au monstre de literie et autres bêtes étranges que seuls l’imagination des bambins les rend réels. Le père Bréguet aussi resta muet. A la différence de la baronne, il le fît simplement car c’était là son rôle. Tenu de ne jamais point intervenir, écoutant l’échange pour plus tard servir de Brochant en conseils et ordonnances à l’encontre de sa vassale. Ce n’est que lorsqu’il eut fini qu’elle se redressa de son siège, étirant un sourire affable sur ses lèvres tandis que ses mirettes se fixèrent sur le suzerain, sans défaillir. Il avait de l’aplomb certes, mais elle non plus n’en manquait pas – tout sexe faible qu’elle était.

« Vous êtes bien fort de certitude Messire, et à n’en point douter peu importe ce que l’on a pu se dire auparavant et qu’importe ce qu’on se dira céans ne sera pour vous que du temps perdu. Vous avez un avis fort bien éclairé sur tous mes agissements aussi vous laisserai-je en paix avec ceux-ci. Il est bien clair à présent que vous n’êtes point prêt à entendre autre chose de moi. Alors, pour nous ménager tous deux ainsi que votre archiviste, j’acquiescerai. Je vous sourirai sans crainte, afin de ne point froisser vos beaux idéaux et vous assurerai de ma grande amitié et de mon soutien sans faille ».

Derrière chacun des mots, prononcé sans amertume et sans haine, l’on devinait toute fois qu’elle n’avait pas cédé au caprice du bon marquis. Elle n’allait plus le prendre de front car visiblement, cela ne marchait point. Elle allait saisir sa main tendue pour s’approcher davantage de lui. Peut-être entendrait-il autre chose que le doux écho de sa vanité.

« Je me complais à avoir un ami et un suzerain tel que vous, Messire. Qui donc aurait pu mieux me faire entendre la voix de la raison ? Assurément, vous êtes un véritable modèle pour nous autres. Puisse les Cinq veiller sur vous ». La Broissieux se leva de son siège avec calme. « Maintenant, si vous l’acceptez, j’aimerai prendre congé. Je n’ai point eu le loisir de voir Fulcran encore, il sera ravi d’avoir des nouvelles de notre mère. D’ailleurs, doux Sire soyez rassuré ! Je n’ai point vendu ma pauvre mère au seigneur de Chtoll, c’est elle qui désirait l’épouser. Ah l’amour ! Quelle chance vous avez d’avoir auprès de vous dame Mahaut ». Elle lissa un pli de sa robe en attendant la réponse de son brave suzerain. Il était inutile de parler plus avant : il ne voulait pas écouter plus et elle ne souhaitait pas poursuivre cette mascarade. Dorénavant, elle sourirait en le voyant et baste. Voilà à quoi était cantonné leur relation.
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