[ Terminé] Une matinée tranquille à l'écurie (Libre)

Les écuries royales du château de Diantra étaient sans aucun doute les plus belles et les mieux entretenues de tout Miradelphia. Aucune saleté ne tachait les allées, les enclos des chevaux était entretenues à la perfection et une légère odeur de foin fraîchement remplacé emplissait l'air tel l'humet d'une tarte aux pommes emmené au loin par le vent. Le silence du petit matin fut brisé par le grincement de la porte de l'écurie qu'un homme de grande taille venait de pousser. Entre deux baillements, Conrad de Payn entra dans le bâtiment, une pipe dégageant une agréable odeur de tabac brûlé. Fermant la porte aussi vite qu'il l'avait ouverte, il se dirigea vers une magnifique jument à la robe noir. Conrad n'était pas le genre d'homme à sourire très souvent, mais lorsqu'il était avec son cette créature, il se le permettait.

- Bon matin, Neya, commença-t-il d'un ton bienveillant, j'espère que ta nuit n'a pas été tout aussi tourmenté que la mienne...

Le général en chef des armées de Diantra lui conta son rêve d'une voix douce et apaisante, se questionnant lui aussi sur la signification de celui-ci.
Lorsqu'il eut fini sa litanie, ses pensées prirent la direction de son horaire de la journée. Avant toute chose, il devait faire afficher des avis de recrutement militaire car, malgré sa taille déjà respectable, l'armée manquait de soldat à son goût et, avant de songer à la conscription, il voulait laisser une chance au peuple de s'engager. Aussi, pour le déjeuner (et non le petit déjeuner), il avait planifié de rencontrer la princesse Elywënne sur l'événement dont il avait entendu parler sur sa conduite dans une taverne avec un elfe. Tout en caressant Neya, il se demandait quels mots il allait bien pouvoir utiliser pour lui expliquer à quel point sa conduite était téméraire. Après tout, il n'avait pas envie d'embêter le roi avec cela, et si il parvenait à lui faire entendre raison, il en serait bien satisfait.
Conrad ne semblait pas le remarquer, mais quelqu'un semblait l'observer avec curiosité, à l'embouchure de la pièce...

Lorsque Valkayre sortit de l'ombre, Conrad ne lui adressa pas même l'ombre d'un regard, semblant s'intéresser davantage à Neya qu'à cet homme qui, pourtant, l'avait espionné durant quelques instant. Certes, un tel comportement pourrait paraître sorti tout droit de l'arrogance, mais, n'étant pas un homme de ce genre, le maître d'arme pensait tout simplement qu'il ne méritait pas son attention, vu le fait qu'il avait voulu se faire discret.

- Vous avez enfin décidé de sortir de votre cachette? articula lentement Conrad à l'adresse de Valkayre. Il était temps, car encore quelques minutes et j'appelais la garde.

Sa voix était grave et forte, et son ton sévère. Ce n'était pas le genre de Conrad d'être sympathique avec les inconnus. Lorsque la question de Valkayre fut posé, Conrad ne put s'empêcher de se demander pourquoi on demandait à le voir si tôt. Habituellement, il n'y avait pas beaucoup de monde de réveiller à cette heure, et les rencontres se faisait beaucoup plus tard. Le général se tourna alors pour la première fois vers le jeune homme devant lui, le regard toujours implaçable. La remarque de Valkayre l'amusa beaucoup. Comment pouvait-il s'imaginer que Conrad allait gentiment lui dire qu'il était le maître d'arme alors que cet homme l'espionnait juste avant?

- Le maître d'arme de Sa Majesté est présentement occupé et ne peut être dérangé, répondit Conrad du même ton. Mais je peux lui transférer un message de votre part, si c'est ce que vous voulez.

L'expression de sévérité de Conrad ne flanchit pas lorsque Valkayre lui apprit son métier. Oui, car s'il voulait vraiment se faire passer pour un simple messager, son rôle s'était envolé au moment ou Conrad l'avait surpris à l'espionner. Il le cherchait... pourquoi? Le général voulait en savoir plus. De plus que Valkayre prétendait que son ancien maître était un des amis de Conrad...

- Un assassin cherche à le contacter, commença-t-il lentement. C'est assez inusité comme raison, mais peu probable. Vous devriez savoir que le général a beaucoup d'ennemi dans ce monde, et qu'ils envoient parfois des meurtriers à sa poursuite. Pourquoi alors croire que l'un d'entre eux ne veut que s'entretenir avec lui? Votre histoire ne tient pas debout, et tant que je n'en saurai pas davantage, je refuserai de lui transmettre votre message.

Cette fois-ci, Conrad en était sûr, le jeune assassin devant lui lui avait dit la vérité. Il n'en laissa cependant rien paraître, son visage demeurant impassible et dur comme le marbre. À l'extérieur des écuries, on pouvait entendre des gens du château converser et marcher. Il était temps pour lui de rentrer pour le petit déjeuner avec le roi, et il ne voulait pas faire attendre ce dernier. Sa pipe s'était éteinte depuis déjà un moment et il entreprit de la vider de son contenu maintenant calciné.

- Votre message a été transmis avec soin, annonça Conrad d'un ton neutre. Retrouvez-moi à la caserne des soldats après le déjeuner, nous reparlerons de tout cela dans un endroit plus approprié. Maintenant, je vous conseille de sortir sans être vu, les palefreniers ne vont pas tarder à arriver.

Sur ce, Conrad termina de nettoyer sa pipe et tourna les talons vers la sortie des écuries de son pas assuré. Ce jeune homme serait sans aucun doute un cas intéressant...