Tant qu'on aura de l'amour (Miriel-Grayle)

Elle en avait presque perdue la notion du temps, ignorant combien de jour elle s’était absentée après leur dispute? S’en voulait-elle réellement? Peut-être un peu. Mais elle était trop fière pour se l’avouer. Après tout, ce n’était pas elle qui avait ramené une inconnue dans leur chez soi pour dormir avec. Ruminant sa jalousie et sa tristesse, les pieds de la mercenaire avançait d’un pas presque machinale dans ce qui aurait dû être sa demeure. Inconsciente du trajet qu’elle prenait, comme si son cœur passait outre son esprit. Peut-être était-il temps qu’ils se parlent et qu’ils repartent à zéro? Partir de si loin et traverser autant d’épreuve pour en finir la, travailler si fort, espérer autant pour tout jeter aux ordures étaient tout simplement illogique.  Puis, soudainement, une voix qu’elle connaissait que trop bien vint la sortir de ses pensées;


« Si tu m'arrête un instant, pour me parler de ta vie... »


L’hybride s’arrêta un moment, observant de loin la petite maison qui se dressait à l’horizon. Ses prunelles grisailles détaillèrent la bâtisse avant de se relever sure son amant qui se trouvait sur le toit. Il était là, grattant doucement les cordes de sa guitare, l’air malheureux. Et ce fut à ce moment-là qu’elle s’en voulu. Elle l’avait laisser tomber, qu’elle le veuille ou non. Mais en même temps, Miriel n’avait pas réellement créé ce feu, que dis-je! Cette tempête d’émotion ce soir-là. L’hybride se mordilla la lèvre inférieure, sans lâcher son regard de Grayle. Indécise, alors qu’un débat sans précédent se déroulait dans sa tête. Puis elle soupira avant de baisser le regard, pensive, alors que les paroles de la chanson de son amant la berçaient. Le sang sur mes mains l’effrayait. Peut-être était réellement le temps de se réveiller et d’aimer le monde qui était à sa portée? Après tout, rien de réellement mal lui était arrivé depuis un moment… et elle avait Grayle maintenant. C’était le moment de commencer une nouvelle vie. Miriel soupira, peut-être qu’elle avait été trop loin… Peut-être qu’il ne pourrait pas revenir, mais elle se devait au moins d’essayer.
Ses prunelles grisâtre se relevèrent, et elle fit quelques pas vers leurs maison. Son amoureux semblait bien trop occupé par sa chanson qu’il ne sembla même pas se rendre compte de la figure encapuchonné qui se trouvait devant lui. Soudainement, une voix se fit entendre;


«Grayle…»


Miriel baissa doucement le capuchon qui recouvrait ses longs cheveux blancs, et observa silencieusement son amoureux pendant quelques secondes;


«Je suis revenue…»

Miriel tentait tant bien d’arrêter le tremblement de ses mains. La nervosité semblait s’emparer d’elle. Cet horrible sentiment qui faisait office de tempête dans les paysages les plus parfaits.  Et même si Grayle souriait, l’hybride avait toujours autant de mal à le contrôler. Il ne semblait pas s’en faire, allant même jusqu’à l’inviter à ses côtés en tapotant le siège à ses côtés. Silencieux, l’hybride l’observa en silence, un air malheureux au visage avant d’acquiescer à sa demande. Habile, elle grimpa sur le toit en quelques secondes avant de s’arrêter net devant Grayle. Elle le regarda pendant quelques secondes, silencieuse, avant de finalement céder et s’assoir à ses côtés.


« Je suis heureux de voir que tu vas bien. »


Elle lui fit un sourire timide, avant de regarder ses pieds, incapable de supporter son regard cendré. « Et moi donc. » Elle resta silencieuse un moment, avant d’ouvrir finalement la bouche; murmurant doucement; « Grayle, je… » Mais avant même qu’elle ne finisse sa phrase, Grayle enchaîna;


« Je te dois des explications, et des excuses »


Miriel releva doucement la tête, l’air surprise, regardant son amant, pendant que ce dernier continua;


« Cette jeune femme, Ciri, était une ancienne esclave des drows, comme nous. Elle cherchait un toit, et j'ai décidé de l'héberger. Je ne voulais pas la faire dormir par terre, elle a passé sa vie par terre ! Alors, je lui ai laissé le lit. Et j'ai dormi sur le sol. Miriel. Je t'aime. Je suis sérieux. Il n'y a aucune autre femme que toi qui m'intéresses. Pas un seul instant je n'ai éprouvé de désir pour elle. Mais, je sais que je n'ai pas été correct envers toi. J'ai d'abord pensé à son confort à elle, et ma... fierté, si je puis dire, d'hôte, avant de penser à comment tu aurais réagi en voyant une autre personne sous notre toit. Et, pour ça, je m'excuse. Vraiment. Et je te promets que ça ne recommencera plus. »


Ce qu’elle était idiote! Miriel se releva d’un bond, faisant quelques pas pour briser la proximité entre les deux êtres. Maintenant dos a lui, elle leva les yeux aux ciels, tentant tant bien que mal de retenir ses larmes avant de fermer les yeux en tentant de contrôler sa respiration. Encore une fois, elle avait laissé ses émotions prendre le dessus. Depuis qu’elle avait quitté le Puy, il semblait que cela devenait de plus en plus commun, et extrêmement dangereux. N’avaient qu’à compter les innombrables vies qui s’étaient éteintes après avoir pris une décision aucunement logique.


«La prochaine fois qu'une femme dort chez nous, ce sera avec toi.»


Elle savait qu’il tentait tant bien que mal de calmer l’hybride. Il la connaissait trop bien. Miriel se retourna avant d’observer silencieusement l’humain. Elle avait l’impression que ses aventures au Puy avaient tourné son esprit sens dessus dessous. À un tel point qu’elle ne savait même pas faire la différence entre la haine et la gentillesse. Grayle ne pouvait la sauver, ne pouvait sauver son âme.  Elle avait si peur de se retourner contre lui une nouvelle fois, et le perdre à tout jamais. Et à quoi cela servait-il de réussir si personne n’avait besoin de vous? Elle se savait maudite. Le mauvais sort semblait s’acharner sur elle et très souvent, c’était elle-même qui l’attirait par ses actions insensées. Soupirant, en regardant le sol, tentant inconsciemment de retenir ses larmes, elle prit finalement la parole;


«Non.» répondit-elle tout simplement avant de remonter ses prunelles cendrées dans les siennes. «C’est moi qui devrais te demander pardon. » Elle se mordilla la lèvre doucement, se demandant comment continuer ses excuses; «J’ai été stupide et inconsidérée. Je ne t’ai pas fait confiance, et j’ai cru à des ragots qui n’auraient jamais dû nous séparer. » Elle s’avança d’un pas avant d’attraper la main de Grayle, la portant doucement à ses lèvres avant de relever son regard dans le sien. «M’aimes-tu réellement? Et surtout, peux-tu pardonner mes actions? Et ce, même si je suis damnée?» Elle espérait sincèrement qu’il passer outre, qu’ils puissent avancer, elle était prête à s’ouvrir à lui. À faire les efforts nécessaires pour réparer ses torts. Ne restait qu’à se faire pardonner …

Miriel sentit les doigts de son bien-aimé se refermer sur son visage.


«Te pardonner ? Je t'ai déjà pardonné il y a des jours. Pour qui me prends-tu ?»


Il n’y avait rien à répondre, il avait toujours été ainsi. Si innocent, comme si la vie au Puy n’avait eu aucun effet sur ce dernier. À croire que ses années de captivité avaient été beaucoup plus faciles que les siennes… Néanmoins sa réponse la rassura. Elle savait qu’elle était en tort. Elle savait qu’elle n’aurait jamais dû s’emporter ainsi, et peut-être qu’un jour, et l’hybride pourrait s’excuser aussi à la rouquine, quoiqu’elle n’en ait pas vraiment envie…


«Tu n'as rien de damné Miriel. J'ai fait une erreur, tu en as fait une autre. C'est la vie. C'est le commun de tous les couples. Tu sais quoi ? Des disputes comme ça, on en aura d'autres. Ce n'est ni la première ni la dernière fois que tu seras triste et énervée contre moi, et que tu douteras. C'est normal. Ça arrive à tous les couples. Et aussi exceptionnelle sois-tu... on y coupera pas. Et ça ne m'empêchera pas de t'aimer.»


Il avait raison, et l’entendre le dire la rassura. Grayle avait raison, un couple c’était des disputes, des joies, des peines, des folies, des fous rires, des larmes, mais surtout de l’amour. Beaucoup d’amour. Et Miriel se sentait choyé d’avoir rencontré quelqu’un qui pouvait la supporter ainsi. Ses oreilles se rabattirent alors que le visage de son amoureux se rapprocha du sien. Miriel ferma les yeux alors que Grayle combla le vide qui les séparait avant de l’embrasser. Elle lui rendit son affection, allant même jusqu’à poser la main sur son torse, attrapant de ses doigts effilés la tunique de l’humain. Elle se sentait connectée avec ce dernier, comme si un lien indescriptible se créait entre leurs deux âmes. Et quand elle rouvrit les yeux, elle se rendit compte que leurs pulsions les avaient poussés sur le toit. Grayle se sépara doucement de Miriel avant de rajouter;


«J'ai une proposition à te faire Miriel... que dis-tu de partir d'ici ?»


Ses oreilles se redressèrent, alors que son regard cendré se portait sur l’humain. « Partir? » dit-elle l’air inquiet.


« Voyager un peu tous les deux. Thaar a ses avantages, mais... les drows ne sont pas loin. J'ai envie de voir un peu le monde. Et je t'avoue que j'ai un peu le mal du pays. La Péninsule me manque, et j'aimerais qu'on y passe un peu ensemble. J'aimerais te montrer chez moi. Là où je suis né. J'ai assez d'argent en réserve pour qu'on n'ait pas de soucis pour des mois de voyage. Je sais que tu veux continuer le mercenariat... alors tu pourrais trouver des contrats en cours de route. Je n'aurais aucun mal à trouver du travail en chemin, où qu'on aille. Tu as les lames aiguisées et j'ai les bras solides. Et le jour où nous trouverons un bel endroit... je te... je NOUS ferais une maison. Grande, belle et spacieuse. La nôtre. Où tu pourras y retourner... et y rester quand tu veux. Où tu y seras toujours à l'abri. Où nos enfants seront toujours à l'abri...»


Elle frissonna  à ses paroles. Et que demander de plus? La proposition sonnait comme la plus doucereuse des mélodies à ses oreilles. Jamais elle n’aurait pensé que ce rêve lui soit à porter de main. Miriel se retourna, se redressant pour planter son regard cendré dans le sien. « J’aimerais bien.» Murmura-t-elle un sourire aux lèvres. Cette idée l’enchantait au plus haut point et il avait raison. Thaar devenait de plus en plus dangereuse, les drows se rapprochaient, et l’hybride n’avait aucune envie de se retrouver à nouveau sous le joug de ces derniers. Elle sentit son pendentif sur sa peau, et elle fronça doucement des yeux, l’air pensive. En réalité, il y avait une chose qu’elle avait envie de faire avant de fonder une famille.


«Je dois t’avouer que j’ai un dernier voyage à faire avant de pouvoir s’installer.» Elle releva les yeux vers Grayle, avant de sortir le talisman de sous son armure; «Quand j’étais enfant, une esclave naine a pris soin de moi. M’as élevé comme si j’étais la sienne. Son nom était Royna. » C’était bien la première fois qu’elle nommait son nom à Grayle, bien la première qu’elle révélait cette partie de sa vie. «Elle est morte depuis bien longtemps, mais j’aimerais rencontrer sa famille. Je me dis qu’elle est peut-être la mienne pas extension. » Miriel se redressa avant de s’asseoir, elle porta à nouveau son regard sur Grayle avant de rajouter; « M’accompagnerais-tu au Zazagorn?»

« Tu as été élevée par une naine ? Je pense que ça explique ton côté borné ».


Miriel haussa les épaules avant de rougir alors que Grayle l’embrassait sa joue. « Si l’on veut. Elle était esclave aussi, et elle m’a sauvé la vie. » Sauver la vie… oui définitivement, et plus d’une fois! Non seulement Royna avait-elle pris soin de sa mère jusqu’à sa mort, mais elle avait pris sous son aile le nouveau-né alors que cette dernière aurait probablement été un sacrifice pour Neetha… À moins que cela soit Leetha? Peu importe…  


« Avec plaisir, Miriel. Je ne suis jamais allé en Zagazorn, mais j'ai... failli le faire.»


L’hybride haussa un sourcil en regardant Grayle, intéressé. Elle se dit que si ce dernier voulait lui raconter son histoire elle voudrait bien l’entendre, mais jamais elle n’aurait l’audace de le forcer à révéler son passé.


« Que dis-tu de faire d'une pierre deux coups ? On remonte vers le Nord, on visite un peu la Péninsule, puis ensuite, nous faisons route en Zagazorn. S'ils sont ta famille, alors, ils sont un peu de la mienne... il lui fit un clin d'oeil alors, compte sur moi pour te suivre, peu importe les dangers. »


En réalité elle n’avait aucune idée si cette dernière était encore en vie ou si Royna leur parlait encore. Elle se souvenait seulement des histoires qu’elle lui avait racontées pour l’endormir. La description de Lante, les clans, tout lui avait semblé si surréaliste, si différent de tout ce qu’elle avait connu, et en près d’un siècle, elle n’avait jamais eu l’opportunité de s’y rendre ou de par où commencer ses recherches. Apparemment les nains étaient extrêmement perfectionnistes. Peut-être devrait-elle aller voir les mille caves pour demander conseil à leur cousins pour commencer? Grayle la sortit rapidement de ses réflexions et descendit du toit, Miriel le suivit de son pas félin, avant de s’arrêter a l’extérieur, laissant Grayle entrer dans leur maison. Au bout de quelques minutes, l’humain revint avec une épée dans les mains, la tendant vers elle.


«Je n’aime pas quand tu pars tuer des gens, mais je voulais quelque chose qui te plaise, et qui te serait utile. Je voulais te l’offrir quand tu étais revenue… mais nous n’avions pas vraiment eu le temps d’aborder ce sujet, n’est-ce pas ? Joyeux anniversaire, Miriel. Puisque cette lame, entre tes mains, nous protège tous les deux.»


L’hybride ne put s’empêcher de cacher sa surprise. Elle releva ses yeux cendrés vers Grayle, avant de murmurer;  «Mon anniversaire? » Sa main se glisse doucement sur le pommeau de l’épée, dessinant doucement sur les fines gravures du métal, avant de rapporter sa main sous le fourreau, caressant le cuir. Elle resserra doucement ses doigts sur le fourreau, et fit la même chose sur le pommeau, prenant ainsi l’arme des mains de Grayle. Elle dégaina rapidement l’épée, laissant échapper un son métallique, avant d’observer la lame d’un œil expert. Elle balançant cette dernière sur ses doigts pour regarder son équilibre, avant de replacer ses mains gantées sur le pommeau. Reculant de quelques pas pour s’éloigner de Grayle, elle fit tournoyer l’épée d’une main experte. C’était franchement une arme de très bonne qualité, et qui avait dû coûter les yeux de la tête a Grayle. Elle observa l’arme de nouveau avant de porter son regard vers son amoureux, hésitant entre le remercier et lui dire qu’il n’aurait pas du dépenser autant d’argent sur une arme…  « Merci » chuchota-t-elle avant qu’un sourire vînt illuminer son visage. À croire que c’était une façon pour Grayle de finalement accepter son métier. Elle rangea la lame dans son fourreau avant de sauter dans les bras de ce dernier l’embrassant passionnément pendant de longues secondes. Elle se sentait si bien lorsqu’il était ensemble, et a chaque jour a ses côtés étaient réellement le paradis. Miriel se sépara de ce dernier, plongeant son regard dans le sien avant de poser la fameuse question; « Alors on part quand? »