[Fernel] Chaque jour nous rapproche de notre mariage | Anaëlle & Efren

Début 9ème ennéade
Printemps, Barkios 18:XI

Les douces lèvres d'Efren descendent lentement sur le corps encore brûlant d'Anaëlle. Même si la fièvre est passée, chacun de ses gestes débordent toujours de l'amour qu'ils viennent de partager. Sur son chemin, il embrasse la peau de sa fiancée, non plus avec désir mais avec tendresse. Il baise son cou, le haut de son buste, passe entre ses seins pour atteindre son ventre... Et y pose sa tête dans un soupir de bien-être, enfin apaisé. Depuis leurs premiers ébats, ils ont bien évolué tous les deux. L'intimité leur donne bien moins de rougeurs. Ils se connaissent de mieux en mieux, savent ce qui plaît à l'autre et mettent tout en oeuvre pour se satisfaire mutuellement. Tout est si naturel entre eux désormais... Un peu plus chaque jour.

Dans les bras d'Anaëlle, le jeune homme oublie les évènements des derniers jours. Malgré le départ précipité de son père, il trouve une consolation dans le fait d'avoir au moins pu lui annoncer ses fiançailles et que sa compagne ait pu véritablement intégrer sa famille avant même qu'ils n'aient pu prononcer leurs vœux. Il attend désormais des nouvelles pour savoir où et quand ils pourront célébrer la noce sous le regard d'Aaron.

Immobile, Efren remue légèrement pour enlacer la jeune femme comme il le peut puis pousse un gémissement bienheureux. Il est encore tôt et le château est paisible. Ils ont un jour de liberté pour passer un peu de temps ensemble. Le soleil matinal baigne la pièce dans une lumière des plus agréable, même pour lui.

-Je t'aime, Yelena. Dit-il une fois de plus alors que la passion lui a fait prononcer ces mots plus d'une fois au cours de la dernière heure. Mais il ne s'en lasse pas... car c'est ce qu'il ressent chaque fois qu'il pense à elle.

Appuyés sur ses coudes, il retient son poids pour ne pas risquer d'écraser sa compagne. Il a les yeux fermés et profite de cet instant si paisible où il se sent serein et complet. Aujourd'hui, il a deux secrets de moins pour elle. Elle sait que son père est mage et que c'est dans cet univers-là qu'il a grandi. Elle sait aussi que ces "amis" auxquels il a quelques fois fait référence sont en réalité un réseau d'entraide pour les gens comme Aaron dans lequel ce dernier tient une place importante. Ils ont été interrompus avant qu'il ait pu lui dire la suite et, ce jour-là, il n'en a plus eu le cœur. Il lui reste une dernière information à lui transmettre pour être totalement honnête avec elle et c'est aussi celle pour laquelle il craint le plus sa réaction étant donné comment s'est déroulé le début de leur relation.
Efren relève la tête et observe Anaëlle depuis ce point de vue privilégié et dans cette situation où les frontières entre eux n'existent plus. Un air heureux et aimant orne son visage.

-Est-ce que tu as des envies particulières pour notre mariage ?

Le fait que le date reste incertaine ne les empêchait pas de commencer à en parler et de l'organiser un minimum. Ne serait-ce que partager leurs désirs était un bon début à ses yeux et le rendait bien plus concret, ce qui apporte au fils de la lune un peu de consolation.

-Un lieu peut-être ? Une idée de tenue ?

Il se penche et dépose de nouveaux baisers sur le ventre de sa fiancée.

-Je te verrais bien avec des fleurs blanches dans les cheveux. Dit-il avant de continuer ses douces attentions.

Cela lui faisait du bien... D'entendre son véritable prénom. Surtout dans la bouche d'Anaëlle. Tout en continuant d'embrasser son ventre, il l'écoute raconter cette petite anecdote avec cette jeune fille à Thaar. Il repense aux Soieries et c'est vrai que c'est assez typique des expansions de richesses que l'on peut observer là-bas. Cette enfant devait effectivement être très riche. Peut-être même la fille d'un Prince Marchand. La remarque sur le fait que la tenue ne devait pas être pratique le fait rire.
Finalement, il remonte et vient s'allonger aux côtés de sa fiancée. Elle parle à présent de ses ambitions bien plus réalistes pendant qu'elle grave des dessins imaginaires sur sa peau. Ses yeux ne quitte pas son visage qu'il détaille avec amour tandis qu'il caresse son flanc du bout de ses doigts. Le fait qu'elle parle de son père comme du "leur" lui étire un sourire. Aaron n'avait pas pu avoir de second enfant après sa naissance, sa mère n'était plus retombée enceinte jusqu'à son décès, quatre ans plus tard. Pourquoi ? C'est un mystère mais qui n'a plus de raisons d'être résolu aujourd'hui. Il est un peu triste de l'entendre parler de sa tenue et du lien qu'elle fait avec la première femme importante de sa vie qui ne sera pas là pour la conseiller. Il lui dirait bien de demander à Louise mais... Si elle jouait ce rôle, alors son père ne pourrait pas être là... Et en même temps, c'est quelqu'un d'important pour la jeune femme... Pour l'instant, il ne sait pas comment gérer la situation.

Il tait cette pensée pour le moment.

-Tu auras ton père pour te dire qu'il est fier. Parce qu'il a vu à quel point tu as été courageuse depuis toujours et comment tu as été capable de rebâtir ta vie ces derniers mois, à partir de rien. Je sais que tu vas dire qu'on t'y à aider, avec ce travail de camériste ou nos attentions, mais il ne tenait qu'à toi que ça marche. Il se rapproche un peu. Et tu ne peux pas savoir à quel point je suis heureux que tu l'aies fait.

Il l'embrasse avec amour durant quelques secondes. Son cœur se serre avec plaisir lorsqu'il l'entend l'appeler "mon amour". Elle aussi s'est mise à lui donner des petits noms et il adore ça... Il relève la tête, faisant mine de réfléchir à sa question.

-Hm... Je trouve que le blanc et le rouge sont des couleurs qui me vont très bien ! Plaisante-t-il, faisant le parallèle entre les couleurs du marié et son albinisme. Puis il reprend un peu de sérieux. On pourrait faire ça en pleine nature... Ou dans un Temple mais en y mettant des fleurs. Celles de ton choix. On pourrait aussi trouver quelque chose à s'échanger pendant la cérémonie, pour symboliser notre union. Il frôle du doigt le collier qu'Anaëlle ne quitte plus depuis leurs fiançailles. Mes parents se sont échangés des bagues. Etant donné qu'il manipule le métal, cela lui correspondait bien. On pourrait trouver quelque chose à nous.

Il n'a rien à proposer pour le moment, il ne fait que lancer l'idée afin qu'ils y réfléchissent ensemble. Entre lui qui est inventeur et elle qui est artiste, ils ont de la chance d'avoir la liberté de faire ce qu'ils veulent pour leur mariage. Les plus privilégiés de cette société ne peuvent pas en dire autant...

-Si nous étions nobles, la cérémonie serait déjà toute réfléchie, elle est entièrement codifiée pour eux. Il marque une pause... car il n'évoque pas ce sujet sans raison. Ce qui... aurait pu... être notre mariage.

Il cherche le regard d'Anaëlle et pince ses lèvres. Oui, il vient d'avouer avoir un lien avec la noblesse... Après plusieurs jours de silence, il décide de lui confier son dernier secret. Celui pour lequel il redoute un tout petit peu la réaction de la jeune femme.

Efren se redresse à son tour. Sa main vient se poser avec douceur sur la joue d'Anaëlle tandis que son regard assuré et calme plonge dans le sien. Il faut qu'il la détrompe avant qu'elle ne se fasse des idées. Il a du sang bleu, c'est vrai mais...

-Je ne suis pas noble. Commence-t-il.

Il lui a toujours affirmé qu'il n'est personne et c'est vrai. Cependant, elle a besoin de plus d'informations pour comprendre sa situation et, surtout, celle de son père et il n'hésitera pas à les lui donner. Cependant, il est triste de devoir gâcher un aussi beau moment et une conversation aussi plaisante avec cette déclaration...

-Un garçon appelé Calel Losir l'était. Elle fera sûrement le parallèle avec le vrai prénom d'Aaron toute seule... Aussi choisit-il de continuer. Son père l'a déclaré mort quand il avait douze ans. Pour tout le monde, il n'existe plus depuis une trentaine d'années et son nom a été rayé.

Il caresse la joue d'Anaëlle, espérant qu'elle entende ce qu'il est en train de dire. Officiellement, son père est décédé et lui-même n'est pas censé exister. Il n'apparaît sur aucun registre ni aucun arbre généalogique. Personne ne sait que le premier héritier des Losir est vivant et a eu un enfant. Et il vaut mieux d'ailleurs que personne ne le sache...

-Edmond Losir sert les Stern, en Arétria, une région où les bûchers se montent vite et où la tolérance n'existe pas... Il a annoncé lui-même que son fils était mort, tout en sachant pertinemment que c'était faux. La seule faute que mon père ait commise pour mériter ce sort, c'est de défendre les mages qui lui ont sauvé la vie et qu'Edmond s'apprêtait à faire tuer. Je ne veux pas de lien avec cet homme-là.

Efren tait une autre horreur que son grand-père serait capable de commettre s'il connaissait son existence. Il pourrait avoir droit à la corde rien que pour avoir été en contact avec un mage. Il pourrait subir la torture pour lui faire dire où il est. Et ce serait pire encore si Edmond voyait ses yeux et le prenait pour un drow... Mais il préfère qu'Anaëlle se concentre sur l'intégration de toutes ces informations. Maintenant, elle connaît la vérité. Elle sait d'où vient leur père, pourquoi il n'a intégré la cabale qu'à douze ans et qu'est-ce qui l'y a conduit. Quant à lui...

Il prend le visage de sa fiancée en coupe dans ses mains, lui caressant les joues des pouces.

-Je suis né dans un petit village d'Olyssea. Je suis le fils de Calel et Eloïse Mehntior, un forgeron et une lavandière. Je ne suis personne. D'accord ?

C'est tout ce qu'il souhaite la voir retenir. A ses yeux, son grand-père est un monstre et il ne veut certainement pas de sa noblesse, pas même pour tout l'or du monde. Et il prie silencieusement pour que la femme de sa vie l'entende elle aussi et le perçoive de la même manière qu'il se perçoit, lui. En attendant, il ne cache pas qu'il est un peu inquiet de savoir comment elle prend la chose...

Efren serre Anaëlle dans ses bras avec une force certaine mais mesurée. Il cherche à l'envelopper totalement alors qu'il se sent soulagé et plus amoureux que jamais. Il redoutait tellement la conclusion de cette conversation...

-Mon amour... J'avais si peur que tu te focalises sur ma parenté et que tu considères que je t'ai menti en te disant que je n'étais pas plus important que toi. J'espérais tant que tu comprennes mon point de vue...

Et c'est chose faite. Elle l'a compris et, mieux encore, elle y adhère. Elle non plus ne veut pas avoir de lien avec cette famille qui a rejeté l'un de ses enfants alors qu'il s'est contenté d'être juste envers ceux à qui il devait la vie. On peut honnir quelqu'un mais il fallait savoir reconnaître sa valeur lorsqu'il nous la témoignait. Si les mages sont craints en Péninsule et tout particulièrement dans le Nord, le fait qu'ils aient sauvé Calel, le fils héritier des Losir, aurait dû leur permettre d'obtenir le droit de... simplement s'en aller.
Lorsqu'il se sent un peu plus apaisé, Efren desserre son étreinte et vient retrouver le regard de sa fiancée. Il caresse sa joue à son tour. L'expression de ses sentiments déborde dans ses yeux et ce geste pourtant si simple.

-Maintenant, tu sais tout. Si tu as des questions, pour savoir comment ça s'est passé ou sur n'importe quoi d'autre, j'y répondrais. Et je t'apprendrais à reconnaître les membres de l'Etoile du Nord pour que tu saches toujours où trouver de l'aide.

S'ils sont discrets, ils sont aussi partout. Ils ne sont pas tous mages. Comme Efren, certains sont juste des proches, voire des sympathisants à l'esprit plus ouvert que les autres. Mais tous sont des gens de confiance. Ils forment une famille très vaste. Si vaste qu'ils ne peuvent tous se connaître. Mais si le jeune homme sait les repérer, son père, lui, sait comment ils sont organisés. Il est donc une cible de choix pour atteindre le cœur du réseau. Quelque soit ses talents, se tenir loin de son fils est la meilleure façon pour lui de le protéger.
Efren sourit en repensant à une chose que la jeune fille a dite.

-Madame Mehntior... Prononce-t-il à mi-voix, comme pour intégrer l'idée.

Qu'elle adopte ce nom suppose nécessairement qu'ils soient partis d'ici. Les fernelois ne comprendraient pas qu'ils portent ce nom et cela attirerait trop l'attention sur eux. Ils ne pouvaient pas non plus se présenter devant la DameDieu pour s'unir en tant que Kohle et se présenter comme Mehntior par la suite... Autant faire les choses bien d'entrée de jeu.

-Anaëlle... ou Yelena Mehntior ?

Il la couve maintenant d'un regard doux, ses doigts caressant son visage et son cou avec tendresse. Il se demande si elle s'est décidé à ce sujet. En privé, il l'appelle toujours par son prénom estrevin mais rien ne la force à vouloir l'adopter dans la vie de tous les jours. Lui-même va devoir faire un choix à un moment donné... Reprendre le prénom d'Ilan serait-il une bonne idée s'il doit de nouveau l'associer à son premier nom de famille ? Cela lui fait penser qu'il ne lui a pas expliqué les circonstances de son changement de patronyme... Mais il pourra le faire lorsqu'ils parleront de son prénom à lui. Il peut tout lui dire désormais.

-L'Etoile du Nord, c'est le nom du réseau dont mon père fait partie.

Il lui en a parlé mais il comprend qu'elle n'ait pas tout retenu. Elle a eu beaucoup d'informations à retenir ce soir-là. Et encore, il n'avait même pas pu parler des Losir... La gardant contre lui, il l'attire pour revenir s'allonger dans leur lit. Ils sont toujours nus mais cela ne semble pas les gêner. Ils ont dépassé ce stade. Il étire un sourire en apprenant qu'il pourra bientôt l'appeler Yelena en permanence. Yelena Mehntior... Elle a son futur nom. Il doit encore finir de décider du sien mais c'est un petit pas vers leur mariage qu'ils viennent de franchir. C'est bien qu'ils puissent prendre le temps de se décider finalement.

Anaëlle commence à lui parler de l'atmosphère au château et de Louise. Son air devient alors un peu plus sombre alors qu'il plonge dans ses pensées, non sans maintenir le contact avec sa fiancée, regardant leurs doigts jouer ensemble. Même dans les méandres de ses réflexions, elle est toujours là, il l'aime et la cajole. Jamais il ne pourrait l'ignorer ou chercher à s'en éloigner par mauvaise humeur. Son lien avec elle est trop fusionnel pour ça.
Efren comprend l'inquiétude de sa fiancée et lui ressent la même chose pour son père, déjà loin. Louise a perdu le contrôle, Aaron ne lui a pas dit comment mais elle a été terrifiée d'apprendre qu'il est un mage. Et la magie, c'est le centre de toute sa vie. Ce n'est pas seulement les Arts qu'elle a rejeté, c'est lui tout entier. C'est lui qui la terrifie. Il n'ose pas imaginer ce qu'il ressentirait si Anaëlle avait réagi de cette façon avec lui... Mais il est à peu près sûr qu'Aaron ne montre sa peine à personne. Il a une place importante au sein de l'Etoile du Nord et ils sont nombreux à compter sur lui. Louise est dans une situation similaire...

-Elle est la Dame de Fernel. Malgré le fait qu'elle soit une femme, on lui a laissé ses terres parce qu'elle s'est montrée tout à fait capable de les gérer elle-même. Elle n'a pas le droit de se montrer faible en publique ou elle risquerait de les perdre. Mais ça ne veut pas dire qu'elle n'a pas le cœur brisé... Et le seul moment où elle peut s'épancher, c'est quand il n'y a plus personne pour la voir.

Aux yeux du jeune homme, elle n'est pas folle. Elle essaie simplement d'assumer son rôle tout en encaissant comme elle le peut le choc d'avoir appris que l'homme qu'elle aimait est... un monstre, c'est probablement ce qu'elle doit penser. Est-ce que cela aurait changé quelque chose qu'elle l'apprenne plus tôt ? Il n'en sait rien du tout... Il ne sait pas d'où lui vient cette peur de la magie mais ils sont dans le Nord. Elle l'a peut-être depuis toujours...

-Je pense que s'il avait su ce que cela donnerait, Papa ne serait pas revenu. Il l'aurait laissée faire le deuil de leur relation et passer à autre chose, il n'aurait pas voulu réveiller la douleur que son départ a provoqué. Il doit regretter tout en sachant qu'il ne pouvait pas deviner... Lui-même ne doit pas être au mieux en ce moment. Et, comme elle, il ne peut pas le montrer.

Efren soupire et vient enlacer Anaëlle pour la serrer tendrement dans ses bras. Il voudrait être auprès de son père, comme il l'a été lorsqu'il a perdu son épouse. Il n'avait que quatre ans mais il a été sa raison de vivre et de s'en sortir à l'époque. Aujourd'hui, il pourrait essayer de le soutenir du mieux qu'il pouvait... Mais il a accepté le fait que leurs routes doivent se séparer. Lui doit vivre sa vie avec sa fiancée et réaliser les projets qu'ils ont tous les deux. Aaron, lui, ne délaissera jamais l'Etoile du Nord, même si cette vie est très risquée.