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 Il faut ce qu'il faut

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Zaahrian Las'Danir
Sang-mêlé
Zaahrian Las'Danir


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MessageSujet: Il faut ce qu'il faut   Il faut ce qu'il faut I_icon_minitimeSam 14 Jan 2023 - 13:02


Fin de la 2ème enneade de Barkios
An 20 du XIe cycle

Midi venait de passer. Zaahrian se tenait devant un assortiment de dagues disposées avec soin sur une table en bois dans la boutique d’un forgeron. Elles sortaient à peine de l’atelier et le tranchant de leur lame luisait, menaçant. Il aimait l’ambiance des forges, l’odeur du métal chauffé, de la cendre et de la sueur masculine. De son vivant, son père était forgeron bien qu’il soit mort avant d’avoir montré ce qu’il pouvait faire à son fils. Pourtant, l’intérêt de Zaahrian pour le travail du métal remontait à bien avant qu’il n’apprenne ce détail sur la vie d’Halandarin. Était-ce le fruit du hasard ou est-ce que l’attrait pour quelque chose en particulier pouvait être passé par le sang? Il prit une dague au hasard, une vraie beauté avec son motif damassé. Son manche en corne était confortable dans la main et, après une rapide vérification, son équilibre parfait. Zaahrian sourit et s’amusa à faire quelques feintes contre un ennemi imaginaire et à jongler avec la dague sous le regard médusé de l’apprenti du forgeron.

« Elle est parfaite, je vais la prendre. »

L’adolescent, la mâchoire pendante, ne réagit pas.

« Je veux acheter la dague », répéta Zaahrian, non sans une pointe d’impatience dans la voix.

Le gamin revint soudainement à lui. Bien qu’il soit toujours plus conciliant lorsqu’il était question d’enfant, ça sautait aux yeux que celui-là n’était pas le plus vif d’esprit qu’il ait croisé dans sa vie. Il était grand comme si son corps avait poussé trop vite et pas de façon uniforme. Ses bras trop longs pendaient le long de son corps donnant l’impression qu’il ne savait pas quoi faire avec. Avec son front épais, son nez épaté et sa bouche molle, il n’était pas non plus une beauté, mais c’est son regard absent qui renforçait l’impression d’un manque d’intelligence ou, au moins, d’un manque d’intérêt.

« Ah… Heu… Oui, ça va être… »

Il s’interrompit, se grattant distraitement la tête, faisant tomber une pluie de pellicule sur son épaule. Apparemment, il avait oublié le prix. Zaahrian soupira d’impatience, mais s’efforça de garder le sourire. Il n’avait rien mangé depuis des heures et il sentait sa bonne humeur s’effriter sous les effets combinés de son estomac vide et de l’incompétence de ce nouveau venu, car il fréquentait cette forge depuis des années et ne l’avait jamais vu avant.

« Tu ferais mieux d’aller chercher ton maître », lui conseilla Zaahrian au même moment où l’homme en question entrait dans la boutique, le front ruisselant de sueur. Il connaissait bien Rodmar, mais était toujours aussi impressionné chaque fois qu’il le voyait : il était certainement l’homme le plus massif qu’il ait croisé dans sa vie. Rodmar faisait approximativement la même taille que l’assassin, avec une musculature deux fois plus développée et des bras se terminant avec des poings aussi massifs que les marteaux qu’il manipule à longueur de journée. Il ne doutait pas non plus qu’ils devaient être aussi douloureux.

« Un problème? » Sa voix rappelait le tonnerre à l’horizon quand la tempête approche : caverneuse et indéniablement puissante.

« Oh non, simplement que je souhaite acheter cette dague, mais votre apprenti semble avoir perdu sa langue. »

Le forgeron jeta un regard de biais à l’adolescent qui sembla se ratatiner.

« Combien de fois dois-je te le répéter? Bon, je vais m’en occuper. Retourne à l’arrière et demande à Nelli de venir. »

Le gamin s’exécuta sans protester.

« Nelli c’est la plus vieille, non? »

Le visage bourru de Rodmar se fendit d’un énorme sourire qui changea radicalement son expression.

« C’est exact. »

Il avait eu cinq filles et toutes étaient à son image : grandes, musclées et absolument terrifiantes. Zaahrian avait déjà vu Nelli et ses sœurs par le passé. Il aurait alors juré qu’elle avait 16 ou 17 ans alors qu’elle en avait que 12.

Nelli arriva alors que Zaahrian payait la dague. Elle sembla hésiter en le voyant. Il lui sourit et son visage, déjà rougi par la chaleur de la forge, se colora un peu plus. Elle avait encore grandi et bien qu’elle ne soit pas aussi massive que son père, elle était bien loin d’être délicate. Nelli, tout comme le reste de sa famille, lui faisait penser aux guerriers vivant dans le nord de la Péninsule. Il y en avait à Thaar gardés en esclavage et utilisés dans des combats d’arène. Il n’était pas impossible qu’ils en aient un parmi leurs ancêtres proches. Peut-être que Rodmar en était un lui-même.

« Comme toujours, ce fut un plaisir. Merci bien et bonne journée! »

La dague soigneusement enveloppée dans un morceau d’étoffe, Zaahrian quitta la forge, un sourire aux lèvres. Il était impatient de rentrer chez lui et de la donner à Mehram. Il avait plus ou moins pris sa décision dès l’instant où il le vit dans sa réserve de nourriture en train de se gaver de pomme. Cette dague serait le symbole de son intégration à la famille, où il prendrait le nom de Las’Danir. Il allait lui montrer à s’en servir et à en prendre soin. Avec un peu de chance, elle lui serait aussi précieuse à ses yeux que celle que Zaahrian porte toujours à sa ceinture. Naturellement, il se sentait un peu coupable envers les autres esclaves qui ont, depuis Mehram, cherchés eux aussi refuge en sa demeure. Ils étaient maintenant une dizaine à se remettre tout doucement des abus subis durant leur captivité. Il réfléchissait encore à ce qu’il allait faire. Il ne pouvait pas les chasser, ils étaient sans ressources et ne survivront pas dans les rues de Thaar. Zaahrian ne pouvait pas non plus tous les garder. Ça l’agaçait d’admettre cela, mais L’Aile Blanche pourrait les aider, mais son dernier entretien avec leur chef ne s’était pas très bien passé. Peut-être que s’il mettait la main sur Ren… Quelque chose était indéniablement passé entre eux, mais il semblait lui aussi avoir disparu de la carte. Zaahrian n’aura pas d’autres choix que de les traquer, peut-être en débusquer un pour faire sortir Vil de sa cachette. Nul doute qu’il en sera ravi, mais il faut ce qu’il faut!
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