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 Le temps retrouvé

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Ameanor Sindënellë
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Ameanor Sindënellë


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MessageSujet: Le temps retrouvé   Le temps retrouvé I_icon_minitimeSam 18 Fév 2023 - 17:54



4ième ennéade de barkios, 20:XI
Entre l'académie d’Alëandir et Alëandir


L’après-midi était bien entamée, et le soleil déclinait dans les jardins de l’académie d’Alëandir. Ameanor avait quitté Anardîl, la thaumaturge qui l’avait tant aidé jusque-là à retrouver la trace de sa fille, pour se rendre dans les jardins où il attendait que Filecthel le rejoigne. Une nouvelle fois, le temps semblait s’être modifié, s’être décompressé afin que chaque seconde paraisse une éternité. Ainsi, le mage se retrouvait seul avec lui-même, à contempler les arbres en fleur se balançant lentement sous la légère brise de fin d’après-midi. Entre le vert des feuilles, le rose et le blanc des fleurs donnaient l’impression que ce balancement était un lent balai d’une myriade de danseurs infatigables. Les rayons du soleil filtrant à travers cette verdure vivace commençaient à tourner à l’orangé, et de ténues énergies magiques apparaissaient comme de faibles rayons traversant une pièce poussiéreuse, tantôt d’un rouge violacé, tantôt d’un bleu aux nuances de vert. Ces rayons venaient alors s’étaler au sol, telle une brume sur l’herbe grasse piquetée de fleures or, argent ou blanches. Tout semblait vouloir placer l’espace où Ameanor attendait hors du temps, comme une antichambre entre deux réalités, comme si, enfin, l’elfe avait mis un pied dans la fenêtre lumineuse d’espoir sans pour autant quitter entièrement la noirceur qui l’avait entouré dans ces deux dernières décennies.

Il fallait avouer que le temps qui approchait, aussi lentement qu’il le paraissait, provoquait un mélange particulier de ressentiment chez l’astronome. Dans son cœur, se mélangeaient excitation et appréhension, l’excitation de retrouver l’une des personnes qui lui était des plus chers, et la peur de voir sa réaction après l’abandon que sa période de térèbre avait engendré. Ameanor restait alors droit, les bras derrière son dos, à observer les arbres qui continuaient leur danse, insensibles aux états d’âme des vivants. Le bruit feutré du vent dans les feuilles lui servait de refuge temporaire, calmement ses angoisses, mais ce doux son portait en lui un temps révolu, appelant la mélancolie pour ce qui fut perdu. Combien de soirées avait donc passé l’elfe à observer les étoiles dans la nature, alors que Míririen, à côté de lui, dessinait un arbre bruissant au vent ? Combien de fois avait-il monté les escaliers derrière le Coromitinwë, sa demeure construite sur une colline aux abords de Quatrième-Saison, accompagné de Filecthel, pour rejoindre son observatoire où seul le bruit des arbres sous le vent se faisait entendre ? Pourtant, la nostalgie n’était pas la seule chose portée par ce son. En cet instant, en cet endroit, il devenait porteur d’espoir. L’espoir que le temps perdu soit, enfin, retrouvé.

Enfin, des bruits de pas se firent entendre, rappelant Ameanor à la réalité qu’il devrait affronter. Après une éternité - ou était-ce une poignée de seconde ? - une jeune elfe entra dans le jardin onirique. C’était la fille que le mage avait attendu depuis si longtemps, si déférente de ses souvenirs, mais pourtant exactement comme elle y était inscrite. C’était bien Filecthel qui se trouvait face à lui, il n’y avait aucun doute, mais elle avait tant changé, tant grandie depuis ces vingt dernières années ! La petite fille qu’Ameanor avait connue entrait déjà dans l’adolescence, un peu en avance sur son âge, comme sa mère avant elle. L’enfant qui, autrefois, ne dépassait pas le bas de son poitrail lui arrivait désormais aux épaules. Son corps, autrefois sec et droit, avait commencé à prendre quelques rondeurs féminines, bien que restant svelte tel que le voulait la jeunesse de sa race. Pourtant, sur le visage qui avait pris une forme plus triangulaire qu’auparavant, les même yeux ambre et turquoise de l’enfant rêveuse des temps perdus plongeaient dans ceux d’Ameanor. Sous ce regard, le même léger et doux sourire que dans les instants oubliés illuminait ce visage familier. Les longs cheveux d’argent de la jeune elfe, arborant une tresse à l’image de ceux de son père, n’avaient pas non plus changé.

Père et fille restèrent figés, se toisant dans un espace qui n’était plus affecté par le temps. Le cœur de l’un comme de l’autre semblait s’être arrêté, et même les arbres ne semblaient plus provoquer le moindre bruit. Enfin, Ameanor s’était élancé à travers la fenêtre d’espoir lumineuse, et plongeait dans un inconnu semé de ténèbres partagées par des rayons de lumière.

- Père… Dit alors Filecthel, d’un ton sec et distant.

Elle affichait une certaine contenance, mais son regard, dans lequel des larmes montaient, ne trompait pas : derrière les ressentiments qu’elle essayait d’exprimer, se trouvait une envie partagée par son géniteur. Alors, Ameanor se précipita vers sa fille, et la serra contre lui, plaçant sa main droite dans ses cheveux tout en lui embrassant le haut du crâne. Ne pouvant plus se contenir, la jeune elfe éclata en sanglots.

- Papa… Pourquoi ? Dit-elle entre deux pleurs. Ses mains étaient serrées et placées contre la poitrine de son père, qui l’enserrait. Elle frappait de son poing droit contre le thorax d’Ameanor sans grande conviction. Pourquoi tu n’étais pas là ? Pourquoi m’as-tu laissée ?
- Je suis là, maintenant, répondit calmement Ameanor tout caressant les cheveux de sa fille. Rien de ce qu’il pourrait dire ne saurait justifier ses errements dans la douleur, et il le savait parfaitement. Les ténèbres n’appartenaient qu’à lui, mais elles s’étaient déversées sur son entourage, affectant leur cœur comme le sien qu’elles avaient, pendant si longtemps, broyé. Je suis revenu, Filecthel, et je ne partirais plus.
- Papa… Répondit simplement la jeune elfe en pleurant de plus belle et en serrant son visage contre le torse de son père.

Ses larmes mouillaient la chemise du mage qui continuait de serrer son enfant contre lui. La peine, la peur et la profonde mélancolie qui l’avaient habité tandis qu’il traversait le fleuve de ses tourments laissaient désormais place à l’envie simple de protéger sa progéniture, de soutenir cet être en détresse. La luciole brillerait toujours dans le noir, mais plus jamais elle ne serait seule.

- Tu m’as tellement manqué… Termina Filecthel, des larmes coulant encore de ses yeux.
- Tout va bien, mon petit colibri. Tout va bien, je suis là. Je suis revenu, grâce à toi. Et je ne te quitterais plus maintenant, je t’en fais le serment.

Pendant plusieurs minutes, père et fille restèrent ainsi. De nouveau, le bruissement des feuilles sous la légère brise de fin d’après-midi se faisait entendre, seulement entrecoupée de quelques sanglots. Sous les arbres, les rayons du soleil avaient prix une teinte franchement orangée tandis que le soir approchait. Les énergies magiques s’étaient retrouvées comme écrasées au sol, densifiant la brume poussiéreuse qu’elles y formaient en prenant une teinte de violet sombre. Mais, de cette brume, de nombreuses petites boules de lumière émeraude s’élevaient, virevoltant autour des deux elfes. Ni l’un, ni l’autre ne prenait conscience du temps qui s’écoulait. C’était là la simple expression de l’amour familial, entre un père brisé et sa fille meurtrie. Une chose si commune, si simple… Mais d’une telle puissance que le temps même pliait ses règles devant elle, laissant s’exprimer le Souffle de deux êtres qui ne cherchaient que lumière et chaleur.

Finalement, Filecthel s’écarta un peu en relevant la tête. Ses yeux rouges, et bouffis par les larmes, exprimaient désormais la peur. Elle les essuya en reniflant, avant de reprendre, la voix tremblante.

- Papa, maman ne voulait pas que je te contacte. Elle disait que tu viendrais de toi-même, que tu t’en sortirais… Mais… Mais ça ne va pas. Maman… Elle va mal. Je… Je crois qu’elle se laisse mourir.

Instantanément, les ténèbres revinrent s’écraser sur les épaules du mage. Jamais elles ne l’avaient véritablement quitté, le pouvait-elle seulement ? Elles attendaient leur heure, patiemment, pour envelopper son Souffle et se resserrer contre lui pour l’étouffer lentement. En un instant, revinrent mille souvenirs abandonnés aux profondeurs de la solitude. Tant de temps simples et heureux, partagés avec Míririen. Tant de temps doux et paisibles, protégés de sa présence réconfortante. Ce temps perdu ne devait pas définitivement disparaître, il ne le pouvait pas. Comment même imaginer une vie sans lui ? Mais, de la noirceur, une petite voix perça, rappelant Ameanor à la lumière.

- J’ai peur, papa.
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MessageSujet: Re: Le temps retrouvé   Le temps retrouvé I_icon_minitimeMer 22 Fév 2023 - 22:48


Pour la première fois depuis vingt ans, Ameanor marchait au côté de sa fille, comme dans l’ancien temps, alors qu’il l’accompagnait depuis Quatrième-Saison jusqu’à son ancienne demeure étoilée. Pourtant, cette marche rapide n’avait rien des plaisants moments passés sous le ciel nocturne. Et la joie de retrouver un être cher, un Souffle que l’on aime du plus profond de son être, s’était teinté de la sourde angoisse d’une nouvelle perte. Mais cette perte ne serait pas supportable, pas envisageable. Aussi, le père suivait sa fille, à travers les chemins de l’académie et les rues bigarrées de la grande cité d’Alëandir, rempli de monde dans ce début de soirée. Ce n’était plus l’heure du doute, ni de la contemplation lointaine de la vie qui s’écoulait si paisiblement dans les rues bordées de végétation. Les deux elfes poursuivirent ainsi leur chemin, sans prêter plus attention aux fleurs sur le bord de la route, ni aux sculptures finement ciselées, bardées d’arabesques végétaux qui les entouraient. Bientôt, ils quittèrent les grandes artères bondées de monde pour rejoindre des rues sinueuses, s’enroulant entre des jardins colorés et des habitats élancés. Alors, tandis que le rouge-orangé du soleil disparaissant à l’horizon se faisait plus faible, enfin les deux êtres arrivèrent à leur destination.

Filecthel arrêta son père devant un petit chemin pavé, bordé de fleurs et d’arbres verdoyants. Ici, un buisson de roses bleu était entouré de jonquilles au jaune flamboyant, là un grand saule aux larges branches tombant sur des fleurs sauvages entourées d’orties, et, au plus proche des murs blancs d’une petite maison, de petites fleur d’or et d’argent. Des fleurs que connaissait si bien Ameanor, lui qui les avait tant de fois contemplées dans une autre vie, lui qui avait passé tant de temps accroupi parmi elles, regardant pousser l’arbre de son désespoir dans son antique demeure. Des plantes qui semblaient d’un autre âge, mais que Míririen n’avait pu s’empêcher d’emmener avec elle dans sa quête de vie. À la fois doux rappelle d’un passé de félicité, et amer symbole d’une chute terrifiante. Le jardin qui se dessinait ainsi était un savant mélange de couleurs, d’ordre et d’entropie naturelle, offrant un spectacle de finesse et de détail propre à embarquer tout amoureux de l’art à travers un monde de rêve, tant par sa vue que par les odeurs qui s’en dégageaient. Pourtant, quelque chose clochait, comme un trait de noir dans une fresque aux couleurs éclatantes. Certaines fleurs penchaient vers le sol, quelques branches étaient sans feuilles, et, à y regarder de plus près, les couleurs du jardin semblaient quelque peu ternies. Une chape d’ombre s’était comme abattue sur cette terre de poésie, sapant la vigueur végétale pour ne laisser çà et là des tâches sombre de plantes fanées.

Bien triste spectacle que ce simple jardon de fleurs et d’arbres ! Témoignage d’une lutte acharnée pour s’accrocher à la vie, et terrain lentement perdu dans les tourments du mal. Le temps faisait son office ici, brisant lentement les espoirs d’un lendemain meilleur pour n’y laisser que l’ombre d’une vie passée. Une scène à fendre le cœur du mage elfique, qui connaissait plus que tout autre l’amour pour les couleurs et leur agencement que portait l’élue de son cœur. Cette simple image suffisait à illustrer les propos de cette jeune fille, c’était un appel à l’aide silencieux d’un être qui se perdait lentement. Ameanor lança alors un regard d’autant plus inquiet à son enfant, qui était quelque peu essoufflée.

- Maman ne voulait pas que je t’écrive, dit-elle alors, comme pour se justifier. Elle disait que tu devais suivre ton propre chemin, mais qu’elle savait qu’il finirait par te faire revenir. Mais elle, elle s’en allait… La jeune elfe regarda ses pieds, rougissant un peu. Elle m’a fait jurer de ne pas t’écrire, mais elle n’a jamais dit de ne rien t’envoyer. J’espérais que tu viendrais quand je t’ai envoyé ma vieille broche. Cela fait des mois que maman n’a plus quitté la maison, et je ne suis même pas sûr qu’elle ait quitté sa chambre bien souvent. J’ai… J’ai peur de ce qu’il peut se passer.

- J’aurais tant aimé que les choses soient différentes, répondit doucement Ameanor en perdant son regard dans le vide. Tu as eu raison d’agir ainsi, je ne sais pas si j’aurais la force de m’élancer sans toi, Filecthel. Le mage mit un genou à terre en posant sa main droite sur l’épaule de sa fille avant de reprendre en plongeant ses yeux dans ceux, larmoyant, de l’enfant. Nous resterons ensemble désormais. Et, ensemble, nous avancerons. Il embrassa alors le front de Filecthel, puis, se releva. Ne te sens pas obligée de venir, si c’est trop dur pour toi.

Ainsi, l’astronome suivit le petit chemin pavé vers la porte de bois décoré de l’habitat. Il entra, découvrant un espace qui, en pleine journée, devait être particulièrement lumineux, avec ses grandes fenêtres de verre transparent. L’espace n’était pas très grand, mais amplement suffisant pour une famille de deux ou trois personnes. Seulement, s’il était bien organisé et rangé, il n’en paraissait pas moins vide, absent des décorations qu’aimait apporter Míririen à son espace de vie. Il n’y avait nulle peinture sur les murs, nul croquis affiché ni de fleurs dans des vases cristallins, comme ce qu’il était autrefois, sur la colline des faubourgs de Quatrième-Saison. Cet intérieur était une nouvelle pique, qui ne faisait que compléter le tableau qu’il découvrit lorsqu’il ouvrit tout doucement la porte que Filecthel lui désignait comme étant celle de sa femme.

Cette porte s’ouvrit sur une pièce plongée dans la pénombre, pas tant à cause du soleil s’éclipsant derrière l’horizon que par les rideaux aux trois-quarts fermé, cachant les hautes fenêtres de la pièce. Sur les murs, seuls quelques traits de couleur verte, bleu et rouge se voyaient. La pièce était dénuée de tout meuble, exceptée une petite garde-robe et un lit double, reliquat du temps où le couple se retrouvait chaque nuit pour partager ce temps de paix et de vulnérabilité qu’est le sommeil. Míririen était assise sur ce lit, regardant le mur nu devant elle, tournant le dos à la porte. Ses cheveux, toujours si bien entretenus, étaient en pagaille, et, elle qui aimait tant s’habiller de robes chatoyantes et finement brodées, ne portait rien de plus qu’une chemise de nuit. Comment un tel être, plein de joie et de vie, pouvait se retrouver ainsi, comme vidé de toute existence ? Comment Ameanor, dans son propre malheur, n’avait-il pu comprendre que le roc lumineux qui brillait dans sa lucarne d’espoir s’érodait lentement sous les assauts répétés d’un océan de noirceur pour finir par s’y noyer entièrement ? Le Souffle de son cœur, celui qui avait illuminé tout son être depuis presque sept siècles, s’éteignait dans l’oubli éternel dans lequel le mage s’était laissé engloutir autrefois.

Le cœur serré et le regard empli de tristesse, Ameanor marcha à pas feutrer jusqu’à son épouse, qui ne s’était toujours pas retournée. Filecthel, ne supportant pas la scène, s’était éloignée pour s’asseoir sur une chaise du salon, regardant le sol dans ses angoisses d’enfant. Alors, le mage posa sa main droite sur l’épaule gauche de Míririen et susurra quelques mots, enfouis dans un sombre méandre de tourment depuis bien trop longtemps.

- Si adh an-uir.
- Tu es revenu, dit alors doucement Míririen en posant sa délicate main droite sur celle qui s’était placée sur son épaule. Son visage d’ordinaire jovial ne portait aujourd’hui que peine et tristesse. Son regard d’ambre était resté fixé sur la blanche nudité du mur en face d’elle.
- Mon cœur ne t’a jamais vraiment quitté.
- Je ne sais pas… Répondit-elle, la voix brisée.

Que répondre à ces mots empreints d’une profonde douleur ? Tous deux avaient raison, à leur manière. Jamais Ameanor n’avait cessé de penser à sa famille, jamais la lueur vacillante de ses espoirs n’avait cessé d’illuminer ces êtres. Mais, pourtant, il n’avait pas eu la force de le suivre, de sortir des sables mouvants de son propre malheur pour leur montrer la puissance de son affection. Le mage baissa la tête, silencieux, et ferma les yeux. Du noir de ses paupières, une scène lui vint alors. Celle d’un autre temps, qui, pourtant, courrait après les temps de malheur. Sa main gauche se porta à son vieil astrolabe, presque par réflexe. Un petit cliquetis accompagna son ouverture tandis que l’elfe éloignait sa main de l’épaule de sa femme. Levant la tête vers le plafond pour y voir apparaître le ciel aux milliers d’étoiles, si réconfortant, il commença à bouger le cadran de son instrument tout en attrapant les astres brillants de blanc, de bleu ou de rouge.

Sur le mur, en face de Míririen, des traits de couleurs se mirent à briller légèrement, comme si on les dessinait encore et encore sur le mur, donnait l’impression de bordure mouvante. Bientôt, le mur entier fut recouvert d’arbres au feuillage vert, et aux contours tremblants. Un chemin d’herbe montait lentement une colline. Les arbres se détachèrent alors du mur, s’enfonçant dans la pièce, tandis que l’image sur le mur gravissait la colline. Sur le plafond, des myriades de petit point lumineux se mirent à briller, beignant la pièce d’un lueur argenté réconfortante. Les arbres continuèrent à défiler, et la colline, à s’étaler, jusqu’à s’arrêter aux racines d’un arbre épais. Lentement, l’image au mur monta l’arbre, découvrant ses larges branches. Deux silhouettes sombres, presque enfantines, apparurent alors, assise sur une branche horizontale. L’une d’elles remuait les jambes d’avant en arrière, et avait la tête posée sur l’épaule de l’autre, qui regardait le ciel. Dans le lointain arrière-plan, un grand lac se dessinait, illuminé par d’immenses rayons argentés apparaissant comme s’ils traversaient la poussière, et étaient entourés de petites boules lumineuses turquoises.

Un léger sourire apparu sur le visage terne de Míririen, alors qu’une larme coulait sur sa joue. Elle posa sa tête sur l’épaule de son bien-aimé, contemplant quelques instants la scène d’une jeunesse partagée, d’un jour où seul l’amour comptait réellement. Douce image d’antan ! Mais devrait-elle être révolue, ou pouvait-elle exister encore, s’incruster dans un présent d’ombres et de ténèbres ?

- Serait-il donc possible que tu me sois entièrement revenu ? Dit alors l’épouse d’une voix faible et lointaine.
- Je ne sais pas… Je sais uniquement que je t’aime de tout mon être, de tout mon Souffle. Répondit Ameanor, en caressant la joue de sa femme. En face, la douce scène s’effaçait lentement, laissant affiché, pour quelques instants encore, les deux silhouettes profitant de leur instant partagé.
- Tout est si difficile…
- C’est vrai. Un bref silence suivi cette réponse tandis que les dernières étoiles cessaient d’illuminer la chambre, alors plongée dans la pénombre.
- Je suis si fatiguée…

Une fatigue qu’Ameanor comprenait, et ressentait aussi au plus profond de lui. Elle n’était pas que physique. Elle s’inscrivait au plus profond de l’être, comme une insidieuse envie d’abandonner l’idée même de continuer dans une vie où douleur et peine essayaient sans cesse de briser les brèves lueurs d’espoir qui traversaient les nuages, et montraient aux lucioles que d’autre attendaient, par-delà les étoiles.

Très doucement, Ameanor accompagna le corps de sa femme sur le lit, l’allongeant sur le matelas et prenant place contre son dos. Míririen colla ses deux mains contre sa poitrine tandis qu’une larme coulait de ses yeux pour mouiller un oreiller. Son époux, collé à son dos, mit ses mains au creux des siennes et colla son nez dans ses cheveux. Alors, les deux elfes fermèrent les yeux et s’endormirent, profitant de la chaleur de l’autre, comme aux temps jadis, sombrant dans un sommeil sans rêves.
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