Expédition Punitive [pv Nym]

Sujet: Expédition Punitive [pv Nym] Dim 11 Oct 2009 - 23:02

Urlz Meisxeon jeta un rapide coup d’œil par la fenêtre.

Depuis quelques jours, il avait perdu sa sérénité légendaire. Il ne se sentait plus nulle part en sécurité.

Deux ans qu’il avait déserté les rangs de la Dothka. Deux années pendant lesquelles il avait remercié Tesso de lui avoir donné la force de rompre son serment pour prendre un nouveau départ. Il avait laissé derrière lui près de trois siècles de service actif pour devenir brigand et tueur à gages. Il avait trouvé refuge dans les profondeurs de La Dross où il avait établi son quartier général. Un port d’attache où il revenait après l’exécution méthodique de chacun de ses contrats. Un commerce juteux qui lui avait permis d’amasser un inestimable magot, et de se bâtir une réputation hors paire, sous une autre identité. Les Six bandes du repaire de La Dross connaissaient en effet Urlz Meisxeon sous le nom de Jov Rank...

Pendant deux années, il n’avait jamais été inquiété par ses anciens employeurs qui le croyaient mort. Pourquoi aurait-il été inquiété d’ailleurs ? Difficile de compter ceux qui n’étaient jamais revenus de mission. Nul n’avait le pouvoir de lever le secret qui pesait sur les agissements de la Dothka, sinon le Karliik Glenn en personne. Et les raisons de crever sur le terrain foisonnaient. Parfois, les soldats de la Dothka mouraient des mains mêmes de ceux qu’on leur avait désignés comme victimes. Certains tombaient dans un ravin, ou faisaient des mauvaises rencontres. Les Barras ne perdaient jamais de temps lorsque l’un des leurs manquait à l’appel.

Mais Vrinn Nym n’était pas un Barra comme les autres.

Quand Meisxeon n’avait plus donné signe de vie, Nym avait cherché à comprendre. Il avait envoyé ses chiens courant chercher des réponses. Mais jusque là, nul ne semblait avoir réussi à percer le mystère de la disparition du « Elghinyrr ».

« Elghinyrr » ! « Le Mort » dans la Belle Langue, celle que Meisxeon s’interdisait de parler depuis qu’il avait laissé derrière lui ses possessions du Puy d’Elda… Elghinyrr ! Un surnom donné à Urlz Meisxeon par ses compagnons d’armes, à cause de la singularité de sa carnation et de son regard. Peu de Sombres pouvaient s’enorgueillir d’arborer une peau d’un gris si pâle, presque blafard, marbrée par la toile d’araignée bleutée de veines noueuses. Et dans son visage émacié, presque maladif, deux yeux rose pâle, laiteux et inexpressifs, deux yeux morts, médusaient ses interlocuteurs et terrifiaient ses proies. Dans la lumière, il ressemblait au cadavre d’un Drow qui aurait passé trop de temps coincé sous une pierre au fond d’une rivière.

Mais voilà, si Elghinyrr avait eu l’intelligence extrême de ne jamais commettre le moindre faux depuis son changement de cap, privant Nym de toute chance de remonter sa piste, il reprochait à Jov Rank d’avoir peut-être commis une mortelle imprudence.

Deux lunes auparavant, Jov avait rencontré « Aux Sensations Nouvelles », un certain Tcheich qui prétendait travailler pour le compte d’un Dignitaire d’Eryndolen. Tcheich avait produit à Meisxeon tous les sauf-conduits, lettres de missions, cautions qu’il était possible pour attester de ses liens avec les Elfes. Rien qui n’aurait pu passer pour autre chose que des originaux. Tcheich était mandaté pour recueillir auprès des exilés Drows toute l’information possible sur L’Ost Noir. L’Homme étalait une connaissance intime de l’Armée du Karliik Glenn, - et de la Dothka plus particulièrement -, qui avait subjugué Jov Rank. Une fois n’était pas coutume, et Jov, convaincu par le faisceaux des preuves avancées par son interlocuteur, avait baissé la garde. Poussant l'avantage, Tcheich n’y avait pas été par quatre chemins : l'Homme lui avait demandé tout de go de joindre Urlz Meisxeon, un ancien de la Dothka qui avait pris la poudre d’escampette. Tcheich souhaitait que Jov demande à Meisxeon de vendre lui les noms des officiers et sous-officiers de la Dothka dont il se souvenait encore. Tcheich prétendait que les Elfes avaient réussi le tour de force d’infiltrer l’Armée Drow, et qu’ils avaient tout pouvoir d’éliminer soigneusement tous ceux que Meisxeon coucherait sur sa liste. Le prix du service avait de quoi laisser rêveur : Tcheich avait parlé d’un quintal d’or en barre. Et Jov, pris de fièvre, avait commis l’erreur de promettre de contacter Meisxeon.

C’est le soir en s’endormant, que Rank, rêvant à sa bonne fortune, avait senti son cœur se serrer en se rendant compte qu’en acceptant le contrat, il avait sous-entendu que Elghinyrr était bien vivant et qu’il avait, lui, le pouvoir de nouer le contact…

Meisxeon avait recherché Tcheich dans toutes les auberges et tavernes de La Dross. Seulement, Tcheich s’était volatilisé. Et Elghinyrr avait flairé le piège. Trop tard…

Elghinyrr faisait les cent pas, et la lumière éclatante, captée par les miroirs miraculeux conçus jadis par les Nains, projetait sur les murs de sa chambre sa longue silhouette. Six pieds et six pouces, trop mince pour un Sombre, le déserteur avait belle allure dans sa cuirasse de peau qui le carapaçonnait des pieds à la tête. Nerveux, il laissait sa longue main lisser sa chevelure noire qui coulait jusque sur ses épaules. Meisxeon aimait à faire planer un parfum de mystère sur ses origines, et il avait choisi de teindre ses cheveux…

Elghinyrr attendait le retour de ses deux acolytes, Brammli Lorbrem le Nain, - chauve et la moitié du visage recouverte d’une plaque d’airain -, et la magnifique Ophan Leänn, une Elfe originaire d’Actellys, reconnaissable entre toutes à la longue natte bleue qui battait la somptueuse cambrure de ses reins. En songeant à Leänn, Meisxeon se pourléchait les babines. Il gardait précieusement à la mémoire la douceur incomparable de formes à peine ébauchées qu’on lui avait offert de guerre lasse un soir de spleen…

Bram courait les galeries de La Dross depuis trois jours et deux nuits pour trouver trace de Tcheich. Quant à Opha, louant un bon cheval, elle avait décidé de galoper en direction du nord-est. Si Tcheich travaillait effectivement pour les Elfes, peut-être se dirigeait-il en ce moment même vers Eryndolen. Ophan Leänn jouissait du meilleur réseau de contacts d’Aduram jusqu’en Anaeh : si Tcheich avait pris les routes, elle saurait instantanément ; s’il avait coupé à travers la grande forêt, ses amis coureurs de bois et chasseurs de tout poil, la renseignerait.

Elghinyrr, qui attendait leur retour à l’un et à l’autre, se morfondait...

Lorsque Urlz Meisxeon aperçut l’Elfe et le Nain dans la ruelle, son cœur s’arrêta de battre. Instinctivement, Ophan Leänn leva les yeux en direction de la fenêtre d’où Elghinyrr les observait, elle et son très inattendu compagnon Nain. Aucun tireur embusqué n’avait jamais échappé au sixième sens de Leänn, et ses prémonitions avaient sauvé la vie des trois larrons plus d’une fois au cours de l’année qu’il venait de passer ensemble. Leänn perçut sur le masque mortuaire de Meisxeon une insoutenable impatience. Alors, avant de le rejoindre pour lui faire un rapport détaillé, elle hocha la tête et Elghinyrr comprit qu’aucun des deux n’avait retrouvé la trace de Tcheich.

Frustré, Urlz Meisxeon frappa du plat de la main contre le mur, serrant les dents.

Maintenant il en avait la certitude.

Vrinn Nym l’avait retrouvé.

Sujet: Re: Expédition Punitive [pv Nym] Jeu 15 Oct 2009 - 19:01

Deux ans déjà... Deux ans depuis la disparition d'Elghinyrr. Il n'était pas le seul et bien d'autres cas étaient à résoudre. Le Barra de la Dothka ne croyait pas en la mort de celui qui se faisait surnommé plus communément La Mort. La dernière fois qu'il quitta le Puy d'Elda, c'était pour se rendre en Eteniril afin d'y effectuer un repérage. Une mission risquée mais toute bête pour un Sargtlin de la Dothka. Pourtant, un Drow de plus ou un Drow de moins...? Quelle différence face au surnombre de ce peuple où chacun peut aisément être remplacé ? Néanmoins, comme dit précédemment, Nym Vrinn n'était pas un Barra comme les autres. Si Urlz Meisxeon était encore bel et bien vivant, il était évident qu'il se serait éloigné des Terres Stériles. L'asile auprès des Humains, des Nains ou des Elfes ? C'était des théories à supprimer pour celui qui avait servi avec efficacité les rangs de la Dothka. La Mort personnifiée s'était incarnée en son âme et Meisxeon n'était pas connu pour être doux et compréhensif. Il ne restait plus qu'à fouiller les Territoires Neutres et la Forêt d'Aduram semblait être un bon compromis. La Dross était méconnue pour accueillir des bandits et ses lois étaient bien difficiles à vivre. S'il y avait une chance que le Drow soit encore en vie, c'était là-bas. Nym Vrinn voulait le retrouver pour deux raisons : S'assurer qu'il ne représentait aucun danger pour la Dothka et le peuple Drow et aussi comprendre en quoi est-ce qu'il avait faillit. Pourquoi est-ce que Urlz Meisxeon avait-il déserté ? Il ressentait au fond de lui le besoin de savoir pourquoi et refusait d'admettre qu'il pouvait en être la cause. Sa Dothka devait être parfaite et disciplinée. Chacun devait lui être fidèle, c'était là la volonté de ce Barra.

C'est ainsi qu'avec la Sargtlin la plus fidèle de ses rangs, le Barra de la Dothka entrepris de monter un vil stratagème afin de définir si son ancien homme était encore vivant ou non. Cerise sur le gâteau, le plan avait fonctionné et Jov Rank avait mordu à l'hameçon. Tcheich ou plutôt Tebriwyn, mercenaire à ses heures perdues de La Dross avait accepté un contrat alléchant. Contre une belle somme d'argent, le soit disant informateur d'Eryndolen avait accepté de dénicher une âme capable dans La Dross de réagir à l'évocation de l'Armée des Drows, du Karliik Glenn, de la Dothka et de... Urlz Meisxeon. Dans un bosquet peu fréquenté de la Forêt d'Aduram, le Barra de la Dothka et Tebriwyn se retrouvaient une fois par soir tout les trois jours afin d'échanger des informations. Trouver l'objet de sa quête n'était pas chose facile et il était même possible que Urlz Meisxeon soit réellement mort... Vyl Thanat'Khor, Sargtlin énoncée précédemment et Nym Vrinn campaient provisoirement à quelques kilomètres de La Dross et les journées commençaient à être longues et se ressemblaient toutes. Il était son maître d'arme et elle était son élève. Le Drow et la Drow s'entraînaient de temps en temps afin de passer le temps mais ne se parlaient au fond que très peu. Deviendrait-il sa carte la plus fidèle ou bien une lame sinueuse et tranchante qui se déposerait tôt ou tard contre sa gorge ? Il était temps de commencer à méditer cela et de peut-être faire évoluer certaines choses. Mais cela, c'est encore une autre histoire.

Ce soir-là, c'était à nouveau le temps de la rencontre habituelle entre Nym et Tebriwyn. Adossé à un arbre, le Barra de la Dothka attendait patiemment. Vyl n'était pas là et jamais Tebriwyn ne l'avait rencontrée. Du moins, c'est ce que n'importe quel spectateur aurait pu conclure. En réalité, elle était bien-là, à une vingtaine de mètres plus loin, perchée sur la branche d'un arbre en hauteur. Elle surveillait d'un œil d'aigle l'échange et il semblait qu'une teinte d'amusement se répandait dans son regard. Jouant le rôle de Tcheich, ce dernier prit la parole.

Bonsoir, Belgarion...

Dit-il, tout en fixant Nym, l'air hésitant. Évidemment, le manipulé ne connaissait absolument rien de son manipulateur et c'était sous un faux nom que le Barra de la Dothka agissait. Tebriwyn ne soupçonnait même pas l'appartenance de Belgarion à la Dothka et pensait en réalité qu'il était un mercenaire tout comme lui. Il lui avait expliqué être chargé de mettre un terme à la vie de Urlz Meisxeon et que son employeur lui avait interdit de s'approcher de La Dross. Secret professionnel, Tebriwyn avait accepté à tord le marché.

Urlz Meisxeon est vivant. Quelqu'un m'a affirmé avoir le pouvoir de le retrouver... Comme tu le pensais, prétendre récolter des informations de la... Doth...ka...? Oui, de la Dothka... Sur le Karliik Glenn et son armée a rendu une âme intéressée. L'individu qui m'a donné ces informations est un Drow du nom de Jov Rank...

Son discours s'arrêta sur cette dernière révélation. Le Barra de la Dothka essuyait une trace de sang sur sa joue droite tandis que son regard froid et argenté se dirigeait en direction de sa subordonnée. Ils disposaient des informations nécessaires et n'avait plus eu aucune raison pour se retenir d'exalter son racisme et son dégout d'avoir négocier avec un Elfe Sylvain. Ainsi, c'est une flèche admirablement décochée par la plantureuse Vyl Thanat'Khor qui vint s'encastrer dans son crâne, envoyant ainsi l'âme de la victime dans un autre monde. Sans plus tarder, elle quitta son perchoir et rejoint Nym sans laisser paraître le moindre sentiment. Cette mission était importante pour elle. Nym l'avait choisie afin d'examiner les capacités actuelles de Vyl et ses progressions sur le terrain. Il ne s'agirait pas d'une simulation et le jeu en valait la chandelle.

Notre mission commence, Vyl. J'espère que tu ne m'en veux pas d'avoir privilégié La Dross comme terrain d'opération. Là-bas, tu ne pourras pas compter sur tes talents de tireuses à l'arc mais seulement sur un poignard et quelques poisons dissimulés. Nous allons encore nous renseigner un peu sur Jov Rank. Qui sait ce qu'il a devenu le temps de devenir en deux ans ? Est-il un subordonné ou bien un maître mercenaire ? Nous ne le savons pas et nous ne pouvons pas nous y prendre de face. De plus... Il sait que Nym Vrinn marche en ce moment-même vers La Dross et s'il est suffisamment influent, cela pourrait devenir très délicat. Es-tu prête à rejoindre une auberge de La Dross et à nous renseigner ? Es-tu prête à risquer ta vie pour la Dothka et ton peuple, Vyl Thanat'Khor ? Si tu l'es, je te ferais grâce de quelques secrets à mon sujet et je t'expliquerais enfin pourquoi tu as toute l'attention du Barra de la Dothka depuis toutes ces années... Le temps des révélations approche, Vyl.

Ses paroles étaient accompagnés par une petite mélodie jouée par sa lyre comme à son habitude. Cela rendait la Forêt d'Aduram encore plus belle et le silence nocturne qui s'était installé précédemment ne faisait désormais plus qu'un avec la douce et belle mélodie du Barra de la Dothka.

Sujet: Re: Expédition Punitive [pv Nym] Mar 20 Oct 2009 - 12:12

Uriz m’a comblée de bien des manières en ce monde. D’abord, en m’offrant mon premier arc : comment ne pas deviner la main d’un Dieu magnanime derrière la découverte d’une arme elfique dans le cul de basse fosse de la poubelle du monde ? En me plaçant ensuite sur la route de mon créateur, Il Oxzren, le Drow qui me façonna de ses mains, pétrissant mon corps et mon âme comme de la glaise. Et enfin, en me donnant à mon Maître en toutes choses, Vrinn Nym, le plus charismatique et le plus puissant des trois Barras de la Révérée Dothka. En près de cent ans, j’ai parcouru bien des lieues sur les sentiers de la guerre et de la gloire, et je n’ai pas encore versé le sang d’assez d’ennemis pour écrire en lettres écarlates toutes les passions que j’ai vécues, toutes les épreuves que j’ai surmontées, et tous les combats que j’ai menés. Mais il n’en reste pas moins que, dans le malstrom de ces précieux souvenirs que j’aime à caresser dans mes instants de solitude, il en est un qui a pour moi plus de valeur que tous les autres réunis. C’est celui de ma première mission avec Nym dans La Dross.

Tout commença d’une si banale manière que rien ne présageait ce qui m’attendait sous la frondaison de la Forêt d’Aduram. Le Barra m’avait réclamée, et séance tenante, armées de pied en cap, je m’étais mise à sa disposition.

Depuis quelques lunes déjà, Vrinn Nym m’avait manifestée quelque intérêt, et j’avoue sans ambages que cette attention qu’il me portait me gonflait d’orgueil. D’autant que l’officier semblait se contenter de regarder le soldat plutôt que la femelle : au cours des entraînements que le Barra me prodiguait en personne, jamais il ne s’était permis le moindre geste déplacé, ni la moindre allusion. De nombreuses Drows m’enviaient cette proximité. Il faut dire que Nym, avec ses yeux et sa chevelure coulés dans l’argent le plus pur et sa silhouette longiligne, faisait chavirer bien des cœurs. D’autant que tous louaient, au même titre que ses qualités de guerrier exemplaire, ses talents immenses de musicien : le Barra jouissait de la réputation de changer le monde en caressant sa lyre.

Le Barra m’attendait, et à peine me présentais-je devant ses yeux qu’il m’entraînait à sa suite sans mot dire. Tout juste daigna-t-il me confier qu’il avait reçu un message de l’un de ses contacts, et que nous devions rejoindre le quidam sur les lieux mêmes où il menait depuis de longues semaines ses investigations. Le voyage fut long et le Barra m’imposa une cadence folle. Nous courions du crépuscule aux premières lueurs de l’aube, et lorsque nous faisions halte, il commandait des tours de garde. Je ne fus pas longue à comprendre que Nym ne dormait que très peu, certains jours pas du tout, et qu’il m’accoutumait aux interminables veilles que nécessitent les missions en solitaire. Comment espérer s’assoupir lorsque l’on opère en terrain hostile et que l’on ne peut compter que sur sa seule vigilance pour se maintenir en vie ? L’épreuve fut rude, mais je la surmontais, consciente que le manque de repos m’affaiblissait nerveusement, et que j’aurais rapidement à surveiller mon humeur autant que mes réflexes…

A destination, il me fit établir notre campement près d’une source qui cascadait entre les pierres pendant qu’il partait en reconnaissance. Je choisissais un arbre aux branches solides et noueuses dont la cime se mêlait à celle de ses congénères dans un bouquet grandiose qui explosait jusqu’au ciel, et montait me mettre en position. Les instructions avaient été claires. Un Elfe viendrait à la rencontre du Barra. Si Nym hochait la tête en signe s’approbation, je devais supprimer l’Elfe. Rien de plus simple. J’encordai mon arc, sélectionnant une flèche armée d’une pointe tranchante comme un rasoir.

L’Elfe sembla émerger du néant. Manifestement, pour lui aussi la furtivité était devenu un art. Mon Barra ne s’en offusqua pas. Il salua d’un léger signe de la tête. Elégant en toute chose, Vrinn Nym ne manifestait pas facilement de chaleur dans les rapports sociaux. J’entendis quelques bribes de la conversation, mais n’y prêtait guère attention. Devoir principal d’un guerrier de la Dothka : savoir faire la part des choses entre les informations nécessaires à la réalisation de sa mission et les autres. Ce jour là, ma mission consistait à éliminer l’Elfe dans deux cas : sur ordre, ou dans l’hypothèse où il viendrait à mettre en péril les jours de mon supérieur.

Un nom pourtant flotta jusqu’à mes oreilles. Urlz Meisxeon. Je connaissais l’histoire. Ou plutôt celle qui circulait au Puy. Un excellent serviteur de la Dothka disparu en mission. La rumeur laissait entendre que Meisxeon n’était pas mort, comme on l’avait pensé d’abord. Pour ses compagnons d’armes, Meisxeon aurait été capable de revenir du royaume des morts pour achever une mission. On le disait déserteur. Traître. D’autres préféraient croire en sa disparition définitive plutôt que d’entacher leur souvenir. Je compris alors que nous avions fait tout ce chemin pour retrouver le légendaire Elghinyrr. J’en frémissais de plaisir et d’excitation…

Loin devant, la discussion venait de toucher à sa fin. L’Elfe n’avait fait montre d’aucun signe d’agressivité. Je trouvais même qu’il avait, par son attitude, sa gestuelle, et la douceur de ses paroles, fait montre du plus grand respect pour Nym. Pourtant, le Barra qui avait passé ses pouces dans sa ceinture, certainement pour assurer l’autre de ses intentions pacifiques, déplia lentement l’un de ses doigts. Le signal. J’encochai la flèche, bandai mon arc et retenait mon souffle. Je projetais ma volonté vers l’Elfe tranquille. Vrinn Nym me masquait une partie de sa haute silhouette mais le front luisait dans le soleil. Je sentais la corde tendue presser mes lèvres. Et je tirai. Le fer frappa dans la fosse nasale, perforant le cerveau de l’Elfe dans une gerbe de sang et de cartilages brisés. Les sinus sont si fragiles. Ils explosent comme du verre…

Je descendis de mon perchoir et allai rejoindre mon Barra.

Impossible pour moi de manifester la moindre marque de satisfaction pour ce tir parfait. Vrinn Nym n’appréciait pas ceux qui se vautraient sans pudeur dans l’infatuation. C’est donc avec un visage absolument impassible que je l’abordai. Pendant qu’il me parlait, je récupérais ma flèche. La découpe du fer trahissait par trop l’art des forgerons du Puy pour laisser un tel indice en terre humaine. Le crâne de l’Elfe avait éclaté comme un fruit trop mûr et je ne rencontrai pas la moindre difficulté.

« (…) Es-tu prête à rejoindre une auberge de La Dross et à nous renseigner ? Es-tu prête à risquer ta vie pour la Dothka et ton peuple, Vyl Thanat'Khor ? Si tu l'es, je te ferais grâce de quelques secrets à mon sujet et je t'expliquerais enfin pourquoi tu as toute l'attention du Barra de la Dothka depuis toutes ces années... Le temps des révélations approche, Vyl. »

Je plongeai mon regard dans l’argent des yeux du Barra.

« Tu sais bien, Barra, que ma vie appartient à la Dothka. Fais en ce qui te plaira, Barra. Je suis à tes ordres… »

Comment pouvait-il en être autrement ? Je n’étais rien sans l’Ost Noir. C’est l’Armée Drow qui m’avait donnée une identité et offert la reconnaissance d’une Nation toute entière. Si je n’avais pas la Dothka, j’aurais été grossir les rangs des inutiles et des lâches…

J’inclinai la tête en signe de soumission à l’autorité. Un signe bref, sans ostentation. Un signe de respect qui ne me plaçait pas pour autant en état d’infériorité par rapport à mon Maître. Juste pour lui faire comprendre que j’attendais son bon vouloir…

Sujet: Re: Expédition Punitive [pv Nym] Mar 20 Oct 2009 - 19:35

Le Barra de la Dothka était comblé par l'attitude de son élève. Il n'avait aucun doute à son sujet, elle ne pouvait être hypocrite et cacher des ambitions pouvant nuire à la Dothka ou à lui-même. Sauf si elle était aussi manipulatrice et cruelle qu'elle était habille au tir à l'arc. Après tout, c'est lui qui avait redonné une existence à Vyl Thanat'Khor. Une véritable raison de vivre, même. Lorsqu'elle s'était présentée aux portes de la Dothka, elle ne possédait pas tout les critères requis pour prétendre rejoindre la section la plus crainte de l'Armée du Puy d'Elda et son Barra aurait très bien pu l'ignorer et la renvoyer d'où elle venait comme une chienne. Néanmoins, il fit le choix de la prendre sous son aile et d'en faire une véritable élève. Aujourd'hui, il était satisfait d'avoir à ses côtés une telle personne. Vyl Thanat'Khor, une Drow dévouée à la réussite de l'Ost Noir et plus particulièrement de la Dothka. Elle détestait par dessus tout la défaite, tout comme son Barra. Tout devait être parfait et tout pouvait toujours être un peu plus parfait.

Soit, mettons nous en route.

Prononcé sur le ton d'un véritable d'ordre de maître à son élève, de chef de groupe à son sbire, le mâle et la femelle se mirent en marche vers le Puy d'Elda au pas de course. Le chemin était encore long et c'était une fois de plus l'occasion pour le Barra entêté et endurcit de tester l'endurance de son unité. Énormément de choses se bousculaient dans la tête du Barra de la Dothka et comme à son habitude, il n'en ressortait qu'un regard froid et impassible. Nym Vrinn était tel une statue de marbre en mouvement suivit de très près par une flèche à la pointe noircit par ses origines et son avenir sanglant. Le moment était-il venu ? Une fois arrivés à La Dross, ce serait une véritable course contre la montre. Le défi serait très corsé puisque la Dothka ne disposerait que d'un matériel très peu développé... Un poignard chacun et quelques poisons ? Vyl était une habituée de l'arc et des flèches et les cimeterres de Nym faisaient un ravage sur ceux qui avaient le malheur d'être sa cible. Il leur fallait encore obtenir la localisation de la planque de Jov Rank et d'espérer le prendre par surprise. Malheureusement, et par son instinct, il pouvait sentir l'arrivée de son fléau. La Dothka n'aurait aucune pitié et la réponse de Tebriwyn avait soulagé son Barra. Il n'avait commis aucune faute et c'était le choix personnel de Urlz Mesxeon. L'audacieux avait fait l'erreur d'accepter de coopérer avec un inconnu pour lui donner des informations sur la Dothka et le Puy d'Elda. C'était là un acte impardonnable et Elghinyrr représentait désormais clairement une menace.

Je vais te dire la vérité à mon sujet, Vyl. Mon prénom n'est pas Nym et mon nom encore moins Vrinn.

Et alors ? Elle aurait pu simplement penser qu'il s'agissait d'une couverture aux yeux du monde entier et même du Puy d'Elda. Si Nym Vrinn avait une réputation, c'était d'être discret. Alors pourquoi pas s'inventer un faux nom ? Mais comme le savent déjà certains lecteurs, le pseudonyme de Nym Vrinn cache une toute autre histoire.

Usstan tlun Lyme Illistyn.
Je suis Lyme Illistyn.

Avoua-t-il dans la langue natale. Soudain, la course s'arrêta pour se transformer en une petite marche funèbre qui elle même s'estompa pour créer un semblant de vide. Vyl et Nym s'étaient arrêtés au pied d'un arbre et venait donc d'avouer la première vérité à son sujet. Lyme Illistyn... Toute l'histoire de celui qui appris à jouer de la lyre. Sa seule envie était désormais de jouer un petit air afin de détendre l'atmosphère et d'imposer encore une fois son talent dans le domaine musical.

Je suis le fils d'une ancienne Haute Prêtresse de Teiweon Danath'Korr, Felyndiira. Mon beau père appartenait à la Dothka et en était un Veldruk lorsque je suis né. Je ne connais pas mon véritable père et j'aspire peu à peu à le retrouver... Mon beau père du nom de Ryltar, fou de jalousie et de rage me déshérita et fit de moi un esclave pendant quelques semaines. Mère m'a sauvé et j'ai grandis dans le Temple de Teiweon Danath'Korr jusqu'à ma majorité, moment de sa mort... Malgré tout, elle aima Ryltar toute sa vie. C'est d'ailleurs là-bas que j'ai appris à utiliser cet instrument...

Pourquoi en dire autant ? Qu'elle en était l'utilité ? Le Barra de la Dothka voyait beaucoup de chose en son élève et elle était peut-être celle qu'il allait choisir pour... quelque chose. Ainsi, celle qui évolua aux côtés du mensonge qu'est Nym Vrinn devait tout savoir de la personnalité de Lyme Illistyn avant qu'il ne lui présente ce qu'il attendait d'elle en ce jour.

Après la mort de Mère, je me suis éxilé du Puy d'Elda et j'ai passé plus d'un siècle dans les Marais de Faélia où j'ai appris à devenir fort et endurant par mes propres moyens. Je suis revenu avec l'envie de vengeance et il se trouvait qu'entre temps, Ryltar était devenu Barra de la Dothka. Ainsi, je me suis glissé dans ses rangs sous le pseudonyme de Nym Vrinn et j'ai grimpé les échelons jusqu'à pouvoir l'atteindre et le tuer, ce que je fis. Vengeance accomplie, que me restait-il à faire ? J'aurais pu repartir et vivre une vie libertine mais le sang de Mère coule dans mes veines et je l'insulterais en m'éloignant de son Temple. C'est le sang du peuple Drow qui coule dans nos veines, autant qu'à toi que à moi...

Avec le temps, j'ai pris plaisir à manipuler le pouvoir. Diriger la Dothka est quelque chose de jouissif et gratifiant. Je ne veux plus jamais retomber en bas de l'échelle et je veux être en position d'éliminer quiconque s'opposera à moi. Tu me diras probablement que c'est utopique et je te l'accorde entièrement. Ma dernière évolution est l'intégration de l'État Major... Devenir un Obok Senger garantirait mon avenir et le restant de mes jours.

Lyme se montrait comme quelqu'un de très audacieux et de téméraire. Lorsqu'il avait une idée en tête, il se dévouait corps et âme pour tenter de la réaliser et cet esprit lui réussissait dans la plupart des cas. Au fond, Nym Vrinn et Lyme Illistyn n'étaient pas vraiment des êtres différents. Néanmoins, c'était dans un monde encore plus cruel et sans pitié que celui de la Dothka que Lyme désirait s'enfoncer et s'il était reconnu pour être impassible et glacial, il n'avait rien d'un tyran. Les bases mises en place, la course du couple nocturne repris. La Dross était encore à de nombreuses enjambées et il ne fallait pas tarder... Qui sait si Urlz Mesxeon ne projetait pas de disparaître...?

Seul, je ne suis pas grand chose par rapport au Puy d'Elda. Un Homme seul ne peut réaliser l'impossible. Un Homme accompagné quant à lui augmente les probabilités de parvenir à réaliser ses rêves...

J'ai besoin de toi, Vyl Thanat'Khor. J'ai besoin de quelqu'un et je suis persuadé que tu es cette personne. Tu es vraiment mauvaise et bien plus impartiale que moi, par exemple. J'ai besoin d'un réel second qui saura écouter mes ordres sans ouvrir les yeux tout en étant prêt à la fois à me gifler en cas de folie. L'ascension d'un être se construit minutieusement et un réel soutient est généralement nécessaire. Si tu peux concevoir cette éventualité et accepter le fait de suivre mes pas vers le sommet du Puy d'Elda, alors cette mission sera une réussite. Ma seconde, tu auras toi aussi de nombreux privilèges que tu pourras utiliser quand tu voudras. Le pouvoir est dans notre nature, soit en consciente... Il n'y a que les forts qui survivent dans notre bas monde.

Devenons fort et montons vers le sommet, veux-tu ?

Tout cela pour une maigre et petite question ? Lyme avait jugé cela nécessaire et il laissait désormais tout le loisir à Vyl d'y réfléchir. L'heure était venu de voir si ces deux âmes étaient capables de se lier pour un même but et de tester jusqu'à quel point l'unité était fidèle à son capitaine.

Au loin, l'entrée de La Dross se dessinait dans le paysage comme l'énonciation d'un nouvel avenir...

Sujet: Re: Expédition Punitive [pv Nym] Mer 21 Oct 2009 - 18:46

Très vite, nous repartîmes, laissant le cadavre de l’Elfe là où il était tombé. La Forêt d’Aduram grouillait d’assassins et de voleurs en maraude : qui se soucierait d’une carcasse de plus ?

Je suivais Nym qui fendait l’air aussi prestement que l’une de mes flèches. Il ne faisait aucun doute pour moi qu’il éprouvait mon endurance. A en croire les rumeurs, le Barra jouissait d’une résistance hors du commun, et pouvait sans peine courir à pleine vitesse des heures durant. Je me savais forte et rapide, mais je ne commis pas l’erreur de le provoquer en allongeant ma foulée. Au contraire, je demeurais légèrement en retrait, me contentant de suivre la cadence qu’il m’imposait. Ma vie martiale d’avant la Dothka m’avait rodée aux courses sans fin des raids en territoire ennemi et j’avais depuis bien longtemps déjà repoussé mes limites.

De temps à autre, je jetai un regard sur mon Barra. Ma loyauté et mon respect à son égard m’avaient immunisé contre l’attrait de sa silhouette et de sa fine musculature. Plus que toute autre chose, j’aspirai à discerner ce que Vrinn Nym dissimulait derrière son visage de marbre. La froideur de son regard comme l’impassibilité absolue de ses traits ne trahissaient jamais la moindre émotion, même la plus infime. Nym ne me paraissait jamais plus insaisissable que lorsqu’il disparaissait derrière ce masque. Quel bel instrument de pouvoir que cette distance établie avec toute chose ! En imposant ce silence de glace, le Barra pliait l’univers à sa volonté. J’avais l’impression d’être moins qu’une ombre à ses yeux. Tout au plus, une arme fraîchement forgée dont il userait peut-être, n’hésitant pas un instant à la briser si la poursuite de son singulier destin l’exigeait. Alors, je me réfugiais moi aussi en moi-même, concentrée sur la régularité de ma foulée, les yeux fouillant la futaie et les taillis, les sens en alerte. Nous n’avions pas le droit à l’erreur et quiconque nous surprendrait si loin de notre territoire irait chercher du secours pour nous donner la chasse. Et, rêvant d’entrer pour la première fois dans les entrailles de pierre de La Dross, je priais que rien ni personne ne ruine mon projet…

« Je vais te dire la vérité à mon sujet, Vyl. Mon prénom n’est pas Nym et mon nom encore moins Vrinn. »

Dans le silence, la révélation tomba comme un caillou dans une mare. Mon esprit en veille s’alluma, frémissant d’une curiosité insatiable. Je cherchai à accrocher le regard de mon Barra dans le mien. Mais il avait les yeux dans le vague. Comme s’il n’avait prononcé ces mots que pour lui-même. Il ralentit le pas jusqu’à marcher sereinement.

« Usstan tlun Lyme Illistyn. »

Mon Maître venait de saisir sa lyre et en caressait les cordes, faisant sourdre de l’instrument une mélodie légère. Combien de femelles avaient succombé à la sensuelle sophistication de sa musique ? Certains sont sensibles aux Arts au point d’en oublier la noirceur de leur réalité. Ce don ne m’avait pas été donné. Les notes ne décrivaient aucune harmonie et glissaient sur moi comme l’eau sur le cristal. Instinctivement, je portais la main au bois de mon arc, m’assurant de sa réconfortante présence. Moi qui apprenais sans relâche depuis des lunes les secrets de la furtivité, je m’étonnais que nous allions au pas au son d’une farandole. Et je guettais sans relâche derrière les arbres les ombres de l’ennemi attiré par la musique.

Ainsi il m’était donnée le privilège de rencontrer moi aussi Nym le Fantasque, le guerrier troubadour qui arbitrait entre la vie et la mort en jouant de la lyre ! Je goûtais au privilège qui m'était offert, incrédule et mal à l'aise.

Stupeur ! Le Barra remit sa vie entre mes mains. Il partagea avec moi ses intimes mystères. Son père qu’il ne connaissait pas. Son beau-père abusif et jaloux. Sa mère, Felyndiira. Son enfance dans l’enceinte sacrée de Teiweon Danath’Korr. Son enfance dans les Marais de Faélia. L’assassinat de Ryltar…

J’avais, sur l’oreiller, accouché les secrets de nombreux mâles alanguis après les désordres de la jouissance. Et reçu les confidences de beaucoup de femelles en mal d’amitié véritable, et prêtes pour la conquérir à bien des sacrifices. Jusqu’à présent, pourtant, il avait toujours fallu que l’intimité s’installe pour que les confessions fleurissent. Je ne compris pas tout de suite les motivations de Nym à me livrer de telles informations. Me mettait-il à l’épreuve ? Lançait-il habilement des leurres pour étudier mes réactions et tester à plus long terme les limites de la confiance qu’il choisirait de m’accorder ? Avais-je à faire à un fou qui vidait son sac juste avant d’attenter à mes jours : nous étions seuls et j’étais sûre qu’il me terrasserait sans peine si la tentation l’en saisissait ? Ou était-ce là les prémices d’un jeu de séduction, le Drow se rendant vulnérable pour toucher mon cœur et posséder mon corps ?

Plus que le chant de la lyre, l’aveu d’une fausse identité et d’un meurtre faisait tressaillir mon âme. Je crus même durant quelques secondes que Nym recherchait ma confiance pour mieux m’approcher et découvrir à son tour ce que recélait mon histoire. J’avais occis un Veldruk, mon amant et mon maître. Et la crainte d’être mise à jour me glaça l’échine. Au fond de mon être, la panique s’épanouit comme une fleur mauvaise et je baissais les yeux pour voiler les portes de mon âme défaite. Et si mon Barra avait découvert mon crime et qu’il avait décidé de m’offrir une mission sans retour ? Savait-il pour ma mère ?

J’avançais, hypnotisée par le son de la voix de Nym et assommée par ma peur…

« J’ai besoin de toi, Vyl Thanat’Khor. »

Ainsi c’est cela que le Barra de la Dothka m’offrait sans partage : lier mon destin au sien pour partir à la conquête de la Gloire ! Je repris instantanément le contrôle de moi-même et envisageai Vrinn Nym sous un autre jour. Comme beaucoup, j’avais cru lire en lui le souverain mépris des contingences de ce monde. Je l’avais imaginé rêveur et éthéré. Je le découvrais ambitieux. Et soudain, il me paraissait plus proche de moi. Comme le fruit mûr qui resplendit au bout des doigts du cueilleur.

Je m’amusais même intérieurement de l’image qu’il me renvoyait de moi-même. « Mauvaise » et « impartiale »… D’autres que moi ce seraient offusqués qu’on leur accole de tels adjectifs. Mais je me reconnaissais bien dans ce sombre portrait. Et j’en comprenais le sens au-delà des espérances du Barra. Le destin avait mis sur la route de Lyme Illistyn son double maléfique. Notre complémentarité s’imposait comme une évidence. Il tuait de près, et moi j’étais plus à l’aise à distance. Il jouait de la musique et composait alors que je n’entendais rien aux arts. Là où sa pensée s’élevait dans les cimes, la mienne s’ancrait dans la glèbe des tristes réalités. Son regard d’argent glaçait les cœurs quand mes yeux de sang brûlaient les âmes. Mais lui comme moi n’aspirions qu’à une chose : nous élever. Devenir plus que nous étions. Et lui avait déjà parcouru vers les sommets un chemin non négligeable alors que j’attaquais seulement mon ascension…

« Devenons fort et montons vers le sommet, veux-tu ? »

Et mon Barra se tut, sûr et certain d’avoir dit ce qu’il fallait. M’imposant à nouveau le silence. Se repliant en lui-même. Comme s’il m’incitait à réfléchir. Comme si une réponse trop prompte ne pouvait le contenter. Décidément, Nym appréciait les autres à l’aulne de sa propre personnalité. Pour lui, une décision, comme une lame, devait être forgée en passant aux feux successifs de la réflexion la plus intime. Je respectais son mutisme.

Lorsque La Dross jaillit à l’horizon, je me tournai vers lui.

« Il en sera fait selon ta volonté, Barra. Je serai digne de ta confiance… »

Et sans l’attendre cette fois, je me remettais en route.

Sujet: Re: Expédition Punitive [pv Nym] Ven 23 Oct 2009 - 18:00

L'union du calme de l'eau plate et du brasier ardent se mettait en place. La réaction de Vyl Thanat'Khor était vraiment très satisfaisante. Lyme venait à peine de se dévoiler qu'elle accepta de croire en ses paroles. Fusion improbable pourtant si réelle, les deux âmes marchaient désormais au même rythme d'un même et unique regard. Un regard révélateur d'un avenir glorieux et sanglant. A partir de cet instant, le mur était brisé. La relation maître-élève / élève-maître n'avait plus lieu d'exister. Cela faisait maintenant sept années que les deux Drows se connaissaient. Jamais Lyme ne s'était montré charmeur ni indulgent envers Vyl et n'avait fait que de la traiter comme un soldat à sa solde. Était-elle déjà prédestinée à devenir sa confidente depuis le jour où Lyme accepta sa requête ? Ne maniant que l'arc et la flèche, elle ne répondait pas aux critères d'entrées de la Dothka et ce qui fut probablement étonnant à l'époque, c'est que le Barra de la Dothka en personne accepta de la prendre sous son aile et d'en faire son élève. Dès leur première rencontre, Lyme avait déjà compris qu'elle était son complément et qu'elle était probablement la perle qu'il recherchait depuis bien des lunes. Mais... Qu'avait sous entendu le moment d'affolement dans son regard ? Dire qu'elle pensa un quelconque instant que Lyme l'avait isolée pour mettre fin à ses jours pour avoir découvert ses secrets... Il n'en était rien de tout cela. Il ne l'interrogerait pas sur cet égarement tout simplement parce que cela ne représentait rien de pertinent à ses yeux. Chacun ses secrets, non ? Contrairement à bien d'autres femelles qui s'étaient abandonnées à Lyme juste à cause de ses talents musicaux, Vyl demeurait impartiale et surtout elle-même. Elle était capable de garder en tête que Lyme pouvait demeurer pour elle un simple inconnu et c'était une variable très importante dans la nouvelle relation proposée.

Au loin, la montagne La Dross se dressait donc devant eux. C'était un bien modeste tas de roches d'une centaine de mètres de hauteur. Que trouveraient-ils à l'intérieur ? Ni Lyme, ni Vyl ne s'y étaient aventurés par le passé. Cette ville née dans d'anciennes mines naines était un joyeux technologique. On racontait que lors de l'extinction des nains qui occupaient le secteur, un groupe de bandit s'y serait installé et aurait bâtit une ville dans la roche en seulement quelques années. Ce qui était encore plus incroyable, c'était qu'un code de l'honneur existait dans cette ville. Toute altercation était réprimandée et sévèrement punie. Les étrangers devaient déposer leurs armes au premier poste de garde... Urlz Mesxeon avait bien choisit son nouvel habitat. Il était sans nul doute qu'une certaine camaraderie régnait dans La Dross... Tout semblait avoir été créé pour rendre quasi inefficace la Dothka. Était-ce pour cela que le Barra de la Dothka s'était déplacé en personne avec son unité la plus fidèle et la plus dévouée à la tâche ? L'objectif n'était pas de se faire remarquer et qui sait comment Urlz Mesxeon avait préparé sa défense... Après tout, il savait. Il savait que la Dothka avançait vers lui et qu'elle avait démontré qu'il était encore en vie, résidant dans La Dross. Malgré cette performance, la Dothka avait perdu l'attaque surprise et cela corsait encore un peu le défi.

Les représentants de la Dothka s'arrêtèrent non loin de l'antre de La Dross et Lyme vérifia d'un regard attentif et méfiant que personne ne les espionnaient. Dans la cîme des arbres, quelques yeux rouges semblaient bouger... Pourtant, Lyme prit la parole et son regard se fit très insistant, comme s'il lui annonçait que tout était normal.

Nous allons assassiner un traitre à la Dothka, Urlz Mesxeon, dît Elghinyrr. Celui-ci a disparu il y a deux ans dans une mission de repérage en Terres Elfiques. Après quelques temps de recherches, j'ai pu définir qu'il était encore vivant, résidant de La Dross... A l'origine, je voulais savoir si j'avais faillis dans mon devoir de Barra de la Dothka en provoquant la fugue de l'un de mes hommes mais...

Je lui ai tendu un piège dans lequel il est tombé. Un piège qui m'a permis de déduire qu'il était prêt à parler au sujet de la Dothka, du Karliik Glenn et de toutes ses connaissances du Puy d'Elda contre quelques piècettes... Il représente une gêne pour le Puy d'Elda et notre ascension commune.

La base même de la mission venait d'être posée. Assassiner Urlz Mesxeon dît l'Elghinyrr. Le Barra de la Dothka saisit de sa poche un petit bout de papier qu'il tendit à sa Sargtlin. Dessus y figurait l'adresse d'une bâtisse de La Dross.

J'ai placé autour de la montagne plusieurs assassins de la Dothka, comme les cinq au dessus de notre tête. Si nous provoquons la fuite d'Urlz Mesxeon lors de notre opération, nous l'attraperons à la sortie. Maintenant, je vais t'expliquer comment nous allons pallier à notre problème d'armement. Tu vas te défaire de ton arc et de ton carquois afin de les déposer au sol. Tu vas seulement converser ce que tu peux cacher sous tes vêtements et je vais en faire de même. Sur le morceau de papier figure une adresse à laquelle tu devras me rejoindre après avoir obtenu l'adresse d'un certain Jov Rank. Pendant que je règlais mes affaires avec Tebriwyn, l'Elfe Sylvain de tout à l'heure... L'un de mes hommes s'est infiltré dans La Dross et a obtenu une résidence sous un faux nom... Ainsi, ce même Sargtlin reconnu comme résident de La Dross apportera notre équipement au point de rendez-vous. Nous ignorons jusqu'à quel point Jov Rank est protégé et nous ne serons que deux...

Lyme avait déployé des Sargtlins qui avaient connu au moins de visage Urlz Mesxeon. Avec ingéniosité, le Barra de la Dothka avait pallier à certains soucis qui auraient du salement entraver leur parcours. Pour laver un affront à la Dothka, il était prêt à tout.

Si tu n'as aucune question ni de recommandation... Tu vas entrer la première. Je m'infiltrerais dans La Dross une heure après toi et tu me feras ton rapport dès que tu auras ce que je t'ai demandé. Et...

L'espace d'un instant, son regard se fit un peu plus doux. Un murmure s'échappa de ses lèvres et s'infiltra dans les oreilles pointues de Vyl.

Usstan nau'shind dos ulu hojh xor ulu rathrea. Usstan zexen'uma phor dosst quortek, Vyl.
Je t'interdis d'échouer ou de regarder en arrière. Je veille sur ton âme, Vyl.

Il semblait que le briefing soit terminé. Si Vyl n'avait rien d'autre à apporter au discours, l'Expédition Punitive pourrait enfin commencer. Plus jamais l'honneur de la Dothka ne serait menacé. Il le jurait sur son âme et sur sa fierté.

Sujet: Re: Expédition Punitive [pv Nym] Sam 24 Oct 2009 - 12:35

PNJ : ELGHINYRR

- J’ai acheté les sentinelles, et payé la moitié des catins de la ville, Jov ! Il n’est pas un Sombre qui entrera dans La Dross sans que l’information me soit transmise par l’un de mes espions dans la demie heure ! Les talents de tes anciens amis sont certes inestimables, Jov, mais par pitié, n’essaie pas de me fais pas croire qu’ils peuvent se rendre invisible !

Ophan Leänn, assise sur la table, le menton nonchalamment posé sur son genou serré contre sa poitrine, tentait de raisonner le Drow qui tournait en rond comme loup en cage. Depuis la confirmation de la disparition totale de Tcheich, Elghinyrr ne pensait plus qu’à plier bagages et quitter la ville.

- Tu es en sécurité dans le ventre de la montagne, Rank ! Renchérit Brammli Lorbrem qui se curait les dents avec son couteau de chasse. Le Nain venait d’engloutir quelques cailles aux raisons, copieusement arrosées de la piquette locale et ne rêvait plus que d’une bonne sieste. La nervosité du Drow l’interloquait. En une année de collaboration, il n’avait jamais vu le chef de la bande dans un tel état.

- Comment veux-tu que ces fils de chienne se fraient un chemin dans une ville où tout le monde surveille tout le monde ! Laisse Beauté soudoyer la garde et entretenir la petite vertu des filles de joie. Si nous avons vent de l’arrivée d’un Drow dans ce bled, nous nous occuperons de sa viande à notre manière.

Pour qu’il n’y ait aucune ambiguïté sur le sens de ses dernières paroles, Brammli avait fait virevolter sa lame entre ses doigts, exécutant quelques savantes jongleries avant de retourner aux soins de sa dentition.

- Vous êtes deux imbéciles ! Tonna Elghinyrr. Vous ne savez pas à qui vous avez à faire ! Ne sous estimez pas l’ennemi ! La Dothka est un serpent froid et silencieux… Efficace… Je ne connais pas d’endroit qui rebute ses assassins ! Au contraire ! Plus le défi est imposant, plus la Dothka se surpasse ! Le trou à rats de La Dross risque de devenir mon tombeau ! Notre tombeau ! Je suis sûr que ce Tcheich comptait parmi leurs contacts ! Et si l’Elfe a su berner son monde, il en sera de même pour tous leurs autres tueurs. Ils sont capables de payer la moitié de la ville pour me faire la peau !

- Tu délires Jov ! Protesta Ophan Leänn de sa jolie voix flûtée. Tu sais l’attachement que les Chefs de bande te portent ! Tu jouis d’une presque immunité ici ! Prends en compte tous les services que tu as rendu aux bandes, et tout l’argent que tu leur a fait gagner ces dernières années ! Qui serait assez stupide pour tuer la poule aux œufs d’or, ou la laisser se faire égorger par un renard ? Il n’est pas un Frère de La Dross qui ne se rangera pas à la défense de tes intérêts. Si tu veux, je peux aller demander aux Chefs de Bandes de…

- Et par la même occasion, faire reluire un ou deux de ces hiérarques, hein ma belle ! S’esclaffa Brammli.

Il était de notoriété publique que Leänn entretenait avec la moitié des chefs des principales bandes de La Dross des relations plus que courtoises.

L’Elfe bondit comme un chat. Si vite qu’il sembla un instant que son ombre était demeurée assise sur la table alors que sa silhouette fuselée fondait déjà sur le Nain. Après avoir connu des hauts et des bas, leur amitié, lune après lune, s’était renforcée et les deux compères avaient coutume de chahuter comme des enfants chaque fois que l’occasion leur était permise. Malheureusement pour leurs victimes, une même connivence les unissaient dans le crime, et ils n’avaient déjà plus leur semblable pour délier les langues et prendre les vies…

- Serais-tu jaloux, Bram ? Aurais-tu envie de la belle Ophan toi aussi ?

- Par les Dieux, quelle pitié ! Autant me taper une morte ! Tu es maigre ! Efflanquée ! Tu as une peau aussi lisse que celle d’un serpent ! Et tu sens la violette ! J’aurais l’impression de forniquer une momie ou quelque chose dans ce genre, l’odeur de rance en moins !

Lorbrem venait de repousser l’Elfe, non sans avoir un tantinet profiter de la soudaine proximité qu’elle lui avait offerte, laissant tout de même ses mains s’égarer sur les courbes sensuelles de sa complice. Leänn en avait profité pour lui barboter son couteau, et dans un puéril simulacre de combat, elle menaçait de lui tailler le col.

- Suffit ! Je suis fatigué de vos enfantillages !

Joignant le geste à la parole, Elghinyrr venait de pulvériser une chaise aussi facilement que s’il avait brisé un œuf.

- Il ne suffit pas de surveiller les Drows ! Il faut surveiller tout le monde ! Tout le monde, vous m’entendez ! Opha, fais le tour des bandes et promet de l’or à qui me rapporte la tête de tout individu, quelle que soit sa race, qui mentionne le nom de Jov Rank. Même si c’est pour chanter ses louanges ! Et toi, le Nain, cours les tavernes et les bouges. Fais passer le message que des prévôts se sont introduits dans La Dross et chassent le malfrat contre prime ! Allez !

Brammli Lorbrem ne discutait jamais les ordres d’Elghinyrr. Ophan Leänn, fine mouche, avait quant à elle l’habitude de dispenser ses conseils avisés lorsqu’il lui semblait que les mesures prises étaient inappropriées ou inopportunes.

- Te rends-tu compte, Jov, du merdier que tu vas semer en ville ? Si tout le monde soupçonne tout le monde, les règlements de compte vont fleurir comme pâquerettes au printemps ! Et Kathleen va te tomber dessus si elle apprend que tu es à l’origine du bazar ambiant. Elle te fera expulser… Et tu sais bien que c’est dehors que la Dothka te mettra la main des…

- Tais toi, femelle !

Elghinyrr avait attrapé Ophan Leänn à la gorge, l’attirant contre lui. Surprise, l’Elfe n’opposa pas de résistance, plongeant son regard flamboyant dans celui du Drow révulsé par la fureur. Meisxeon avait échappé à son contrôle, et l’envie de meurtre le submergeait au point qu’il en tremblait de tous ses membres. Lorbrem assistait à la scène, médusé, ne sachant plus quel parti prendre.

Alors que le Sombre assurait sa prise sur le cou de cygne de Leänn, il sentit la rigidité de l’acier s’insinuant dans une faille de sa cuirasse. L’Elfe le tenait en respect, prête à lui planter le couteau de chasse du Nain entre les côtes.

Elle souriait. Provocante. Irrésistible…

- Sois courtois avec moi, Jovi ! Ou je me charge moi-même du travail de la Dothka…

Il y avait plus d’amusement et de charme que de réelle menace dans la voix d’Ophan Leänn. Mais, avec elle, il était toujours extrêmement difficile de faire la part des choses.

Elghinyrr relâcha aussitôt sa prise, mais de son bras puissant, il pressa Leänn contre sa poitrine, plaquant ses lèvres contre les siennes. Toute fureur l’avait abandonné l’instant fugace d’un souffle. Et, recouvrant ses esprits, il n’avait rien trouvé de plus intelligent à faire que de t’entamer le long chemin du pardon. Fallait-il qu’Ophan Leänn le respecte pour ne pas l’avoir châtié sur le champ pour son impudence ! Le Drow savait qu’elle avait déjà excusé son geste irraisonné. Il le savait parce qu’il respirait encore. Il le savait parce que l’Elfe n’avait jamais laissé l’un de ses ennemis vivre assez longtemps pour commencer à éprouver de la rancune.

- Je suis désolé, Opha… Je ne suis plus moi-même !

Leänn se blottit tout contre Meisxeon, féline.

- Veux-tu que je reste un moment avec toi, Jov ? Lui susurra-t-elle au creux de l’oreille, séductrice en diable. Si tu as besoin d’oublier un peu…

- Non, Opha… Va s’il te plaît… Je me rachèterai mille fois lorsque toute menace sera écartée, et que je serai fixé sur mon sort… Fais le tour des Bandes. Fais ça pour moi, Opha… Et ne me cherchez pas en rentrant. Je vais changer de place le plus souvent possible pour brouiller les pistes. C’est moi qui vous contacterai…

L’Elfe rendit son baiser au Drow.

Puis elle se dégagea de son étreinte avec une délicatesse infinie, et, tendant son couteau de chasse au Nain, elle accompagna ce dernier vers la sortie.

Avant de refermer la porte, Ophan Leänn accorda un dernier sourire à Elghinyrr.

La belle n’avait jamais vu Jov Rank dans un tel marasme. Si un guerrier de sa trempe tremblait à l’idée de se confronter à la Dothka, alors il y avait vraiment de quoi nourrir une inquiétude sans borne. Pour ne rien laisser paraître des doutes qui l’assaillaient, elle retint le frisson qui lui labourait l’échine et rejoignit Brammli Lorbrem, manifestement encore plus préoccupé qu’elle…

VYL THANAT’KHOR

La haute colline de La Dross culminait à l’horizon.

Depuis plusieurs heures déjà, Vyl Thanat’Khor se sentait épiée par mille yeux dissimulés dans la profondeur de la Forêt d’Aduram. Comme beaucoup de Sombres, la guerrière vouait une aversion atavique pour ces océans verts qui mugissaient sous la caresse des vents. L’antique nature sylve des Drows demeurait encore assez présente en elle pour qu’elle ressente dans toutes les fibres de son être la vie puissante et paisible des arbres plusieurs fois centenaires qui élevaient vers le soleil leurs bras noueux et magistraux. Chaque fois qu’elle cheminait sous les futaies des grands bois, Vyl entrait en résonance avec cette nature impérieuse qui jaillissait de toutes parts et qui l’oppressait. Comment ne pas ressentir l’animosité de tous ces êtres d’écorce et de sève qui penchaient leur cime vers le vagabond, comme pour l’observer ? Elle s’attendait à chaque seconde à voir sourdre des profondeurs de la terre des racines meurtrières qui l’emporteraient dans les entrailles du monde. Les Drows avaient fui la Forêt, et la Forêt maudissait les Drows…

Puis elle avait repéré les premières ombres qui bondissaient dans la ramure des plus hauts feuillus. Si elle avait laissé son arc somnoler, paisible contre son dos, c’est qu’elle avait pu identifier ces curieux promeneurs qui semblaient préférer l’obscurité à la lumière. Des assassins de la Dothka accompagnaient la marche silencieuse du Barra et de son apprentie. La mission devait être d’importance pour que Nym Vrinn se déplace en personne et mobilise autant de sargtlins…

Nym dressa son poing fermé pour ordonner la halte, et les ombres se dissipèrent aussitôt. Décidemment, les hommes de la révérée Dothka entretenaient avec l’invisible les liens d’amour les plus profonds pour se fondre avec ce talent dans le décor.

« Nous allons assassiner un traître à la Dothka, Urlz Meisxeon, dît Elghinyrr… »

Les yeux fixés sur La Dross, Vyl Thanat’Khor n’avait perdu miette des paroles du Barra. Elle commençait vraiment à apprécier cette expédition. Des aveux compromettants d’un officier supérieur de l’Ost Noir, une course en territoire hostile, et maintenant, une chasse à l’homme qui s’annonçait des plus corsées. Du miel pour ses lèvres rouges comme le sang. Et de l’exaltation pour son âme en mal de sensations violentes et pures.

D’Elghinyrr, elle savait la réputation. L’un des fidèles entre les fidèles, le plus discret et le plus virulent d’entre tous. Lorsque Meisxeon n’avait pas rejoint sa base, tous avaient douté de sa disparition. Personne ne peut tuer la Mort, chuchotait-on dans les quartiers de la Dothka. Et tous avaient cru comprendre que Meisxeon s’était vu confié par les Triumvires en personne une mission d’infiltration des plus périlleuses qui le contraindrait à demeurer loin du Puy d’Elda pendant des lustres. Les assassins pensaient revoir un jour Elghinyrr pointer son nez blafard aux portes de la garnison, tout auréolé de gloire, pour recevoir des mains du Karliik Glenn sa charge de Barra. Mais voilà qu’il n’en était rien. Le mythe s’effondrait, emporté par le tourbillon turpide des aspirations les plus basses. Désertion, corruption, trahison… Urlz Meisxeon avait échangé sa place au panthéon des héros contre la tombe froide de la honte et du déshonneur.

Pourtant, Vyl Thanat’Khor n’éprouvait nulle haine pour sa cible. Pire. Elle comprenait Elghinyrr. Les Triumvires étaient des mauvais maîtres qui jetaient à la piétaille les quelques miettes du fastueux festin qui les avait engraissés. Quelques pièces d’une maigre solde pour le sacrifice de sa vie toute entière à la gloire d’une Nation que les hiérarques corrompus jusqu’à l’os menaient tout droit à la défaite. En une vie déjà de raids et de combats, la guerrière n’avait pas encore amassé de quoi s’offrir ses propres appartements. Comme bien d’autres sargtlins, elles vivaient dans les pierres sales des garnisons du Puy, jouissant d’une paillasse médiocre au beau milieu d’un dortoir. Ses possessions tenaient dans un grand coffre de cèdre enchaîné. A peine disposait-elle de l’or nécessaire pour s’acheter un arc si le sien propre venait à être brisé… Meisxeon avait jeté l’éponge, lui. Il avait eu le courage d’abandonner derrière lui les fumerolles des Terres Arides pour affronter son destin de Drow libre de toute entrave. Son seul véritable tort, simplement, était de mettre en péril les secrets de la Dothka, et il le paierait de sa vie. Et puis, - fallait-il rester dupe ? -, en supprimant Elghinyrr, Nym faisait d’une pierre deux coups : il rayait de la surface de la terre un félon, mais il se libérait aussi d’un concurrent sérieux. Si Meisxeon renonçait à divulguer ses informations, et revenait repentant au Puy, qui sait si les Triumvires n’auraient pas reconnu la valeur d’un tel soldat capable d’infiltrer, capitalisant sur son réseau de La Dross pour renforcer l’espionnage et développer les trafics en tout genre…

« (…) Tu vas te défaire de ton arc et de ton carquois afin de les déposer au sol. Tu vas seulement converser ce que tu peux cacher sous tes vêtements (…) »

Vyl avait déjà son idée en tête. Elle se délesta de son arc et de son carquois, puis de sa cape. Des deux coutelas croisés aux creux de ses omoplates. Et à la surprise de Nym, elle n’en resta pas là. Elle délaça ses bracelets et ôta ses cnémides. Puis, méticuleusement, elle fit sauter les sangles de sa cuirasse, laissant sa carapace de cuir et d’acier tomber à ses pieds. Pour mieux se débarrasser ensuite du large ruban de lin qui bandait sa poitrine. Elle se dressait maintenant torse nu dans la lumière, vêtue de ses seules chausses minimalistes et de ses bottes de cuir souple, exhibant sa féminité arrogante et sauvage. Ses tatouages scintillaient sous les dernières lueurs du soleil couchant, presque vivants. Elle ouvrit son sac et en tira une tunique chatoyante taillée dans la soie la plus fine, plus noire que le manteau de la nuit, et éclaboussée ça et là par des orchidées de feu aux chatoiements de miel. Et pendant que Nym terminait d’égrener ses ordres, elle déboucla sa ceinture pour mieux s’en revêtir. Le vêtement, très cintré, soulignait la rondeur de ses seins et dévoilait sa gorge parfaite. Elle passa sa ceinture par-dessus la soie et la serra haut au-dessus de ses hanches pleines, mettant en valeur la finesse de sa taille et magnifiant la sensualité de son buste. Puis elle dénoua sa natte, libérant son opulente chevelure qui cascadait jusqu’au creux de ses reins en lourdes mèches neigeuses. Replongeant dans son sac, elle se para de bracelets d’or et d’argent, et ceignit son front d’une chaîne ornée d’une croix sertie de rubis qui lui faisait au front comme un troisième œil écarlate. La transformation était magistrale. Aussi folle qu’une scintillation, ou quelque tour de passe passe d’un Mage créatif. Comme si Vyl avait mué, se défaisant de sa peau de machine à tuer pour mieux se draper dans celle, subtile et désirable, de quelque danseuse nimbée de sombre exotisme. Elle n’avait gardé, comme arme, que son seul stylet, et cachés dans sa ceinture, ses poudres et onguents maléfiques.

« Si tu n'as aucune question ni de recommandation... Tu vas entrer la première. Je m'infiltrerais dans La Dross une heure après toi et tu me feras ton rapport dès que tu auras ce que je t'ai demandé. Et... Je t'interdis d'échouer ou de regarder en arrière. Je veille sur ton âme, Vyl. »

Vyl posa sur Nym ses yeux de sang qui reflétait l’éclat écarlate des pierres brillant à son front.

« Je suis prête, Barra. J’entrerai dans La Dross et j’en infiltrerai les bouges. Je vais vendre ce que je fais le mieux pour me fondre dans la racaille de cette cité des brigands, et j’aurai l’information que tu cherches avant la prochaine lune. »

Vendre ce qu’elle faisait le mieux… Nym ne connaissait pas encore toute la profondeur du côté obscur de son alliée. Il ne savait pas ses nuits d’orgies dans les maisons des plaisirs du Puy d’Elda. Vyl, elle, savait que la meilleure façon de se noyer dans la masse, était encore de se montrer à la face du monde. Elle proposerait aux taverniers de s’exhiber pour quelques pièces d’or, et pour corser le jeu, de lancer la hache ou le poignard. Nul ne résisterait à ses sulfureux appâts. Et les mâles se bousculeraient pour jouter contre elle pour la promesse de quelques baisers volés.

Prenant son sac à l’épaule, la guerrière grimée en putain se dirigea vers La Dross.

Sujet: Re: Expédition Punitive [pv Nym] Dim 25 Oct 2009 - 0:17

Vraiment... Je n'avais jamais vu Jov ainsi auparavant... Après tout, c'est impossible que ces anciens associés puissent l'assassiner ici. Impossible... Surtout lorsque je serais allée le voir... Eh, Brammli ! Va donc faire le tour des tavernes et des auberges de la ville. Ce sont tes lieux de prédilections, après tout...

L'Elfe Sylvaine et le Nain venaient de quitter le repaire d'Elghinyrr. Vraiment, il ne s'était jamais comporté ainsi. Ophan Leänn et Brammli Lorbrem ignoraient absolument tout de la menace absolue qui pesait au dessus de leur tête. Une véritable épée de damoclès s'apprêtait à arracher leurs âmes juste pour avoir été le complice du traître de la Dothka. Il était connu que Nym Vrinn ne pardonnait pas la trahison. D'un rire grassouillet, le Nain balafré rétorqua.

Hahaha ! Bien sûr que je vais aller m'en descendre plusieurs des bières ! Autant que ma barbe est longue, pardi ! Et comment tu comptes aller annoncer tout ça aux Six Bandes ? Il ne faut pas écouter Rank...

T'occupes ! coupa-t-elle. J'ai déjà mon idée sur la question... J'ai placé une partie des catins de La Dross près de la seule entrée de la ville. Les Drows à la chevelure et aux yeux en argent, c'est pas commun ! Si la milice aperçoit un tel Drow, ils l'arrêteront immédiatement... En supposant que ce soit bien le... Ba...rra... le Barra de la Dothka qui se déplace en personne ! Maintenant, nous devons nous mettre au travail.

Sur ces dernières explications, les deux compères se séparèrent. Ophan Leänn en direction du repaire des Six Bandes et Brammli Lorbrem se paierait ce soir une tournée monumentale digne des plus grands nains de ce nom. La belle était inquiète au plus profond d'elle-même. Elle n'aimait pas réellement Jov Rank dont elle se méfiait comme tout les mâles en réalité. Sa petite personne et sa sécurité passait avant celle des autres mais son association avec le Drow et le Nain lui rapportait un gros lot très conséquent. En deux ans, les noms de Jov Rank, Ophan Leänn et Brammli Lorbrem étaient connus de toute La Dross et ses alentours. Jov ne travaillait que dans l'ombre tel l'efficace assassin de la Dothka qu'il fut autrefois. Ophan apparaissait comme le cerveau et l'informatrice du groupe même si Jov en était en réalité à la tête. Cela arrangeait les intérêts des deux. Quant à Brammli, il incarnait la force brute à l'état pur du trio original que composaient le Drow, l'Elfe Sylvaine et le Nain. Ophan atteignit les locaux de la troisième bande de La Dross une bonne demi heure plus tard. En chemin, elle avait interrogé toutes les catins et les sentinelles déployées qu'elle croisa sur sa route mais rien d'étrange ne fut signaler. Le principal désavantage de cette opération de dépistage était la forte activité dont faisait preuve La Dross que ce soit de jour comme de nuit. Des centaines de personnes entraient et sortaient tout les jours et c'était comme chercher une aiguille dans une botte de foin.

Eh... Saleth... J'ai besoin de te parler...

Saleth était le chef de la troisième bande. Humain, le bonhomme était doté d'une faible pilosité sans pourtant être imberbe qui attirait Ophan. Ophan était Ophan, fidèle à elle-même, libre de s'envoyer en l'air avec qui elle voulait et lorsqu'elle le voulait. Reine des catins de La Dross ? C'était peut-être trop défiguré comme titre. Disons plutôt qu'elle était une charmante manipulatrice très osée.

Oh, Ophan... Qu'est-ce que tu viens faire par ici, chérie ?

Naturellement, Ophan s'enfuit dans les bras de Saleth et se blottit dans son étreinte. La manipulatrice baisa ses lèvres en guise de salutations comme elle avait l'habitude de le faire. Le couple était retiré dans une pièce au fond du repaire et tout ce qui était dit à l'intérieur ne pouvait être entendu que par leurs quatre oreilles. Elle prit un petit air malicieux qui plaisait à celui qu'elle considérait comme son mâle. Parmi tout les chefs des Six Bandes, Saleth était son petit préféré.

J'ai vraiment besoin de ton aide, mon beau garçon... Rank est en danger, c'est une certitude. Mes... informateurs m'ont rapportés que des Drows vont entrer dans La Dross pour lui faire la peau.

Quelle belle manipulatrice, vraiment ! Si Ophan avait prouvé une chose depuis qu'elle rendait service aux Six Bandes, c'était que son réseau d'informations ne s'était jamais trompé ni égaré dans de fausses informations, même un temps soit peu douteuses... Les talents de Jov Rank représentaient une mine d'or pour les affaires de La Dross et Saleth n'avait d'autre choix que de s'intéresser aux paroles de son amante.

C'est... délicat, comme situation. Personne ne menace La Dross, personne. Jov Rank exécute un excellent travail depuis qu'il vit parmi nous et je te manquerais de respect en remettant en cause tes informations... Je vais réunir les milices des Six Bandes et nous allons ouvrir l'œil dans toute La Dross. Que recherchons-nous ?

Nous recherchons un Drow aux cheveux et aux yeux d'argent du nom de Nym Vrinn... Elle l'embrassa un court instant puis reprit. Tu es un amour, Saleth... Un véritable amour... Je ne sais pas ce que je ferais sans toi, vraiment...

Lui avoua-t-elle d'un ton très suave et sensuel. Ophan ressentait en cet instant précis des pulsions très révélatrices. Qu'elle regrettait manquer de temps... L'occasion de copuler avec sa victime était vraiment très belle et le lieu très bien choisit. Malheureusement pour elle, le temps manquait et Saleth devait se dévouer à sa tâche. Dans moins d'une heure, les services de sécurité de La Dross seraient averties du danger. Néanmoins, il était déjà trop tard... Vyl Thanat'Khor et Lyme Illistyn sillonnaient déjà les ruelles les plus sombres de La Dross.

**********

Quelle magnifique scène pour les yeux et pour l'esprit. Vyl Thanat'Khor venait de démontrer à son Barra qu'elle était capable d'avoir le diable au corps comme on le disait si bien et malgré son impartialité habituelle, il ne rata rien du spectacle. Spectacle ? Il n'en était en réalité rien du tout. La Sargtlin s'était seulement adaptée aux contraintes de son Barra. Si Lyme pouvait être l'incarnation du parfait gentleman, Vyl pouvait être à son opposé la pire des traînées. Sa tunique chatoyante lui allait à ravir et Lyme avait saisit toute la portée des intentions de Vyl. Bien qu'il n'était pas partisan de telles pratiques, il était forcé de reconnaître le dévouement à la tâche de sa compagne. Cela en devenait... plaisant. Venait-il de commettre une terrible erreur ? Pour une des premières fois de son existence de Barra, il doutait. Elle serait certes la plus fidèle des alliées qu'il posséderait à l'avenir mais elle pouvait également devenir son fléau... Que l'avenir s'en suive, dit-on... Visage impassible, il l'observa se fondre dans les ombres de l'entrée de la montagne jusqu'à ce qu'elle disparaisse complètement.

Nalfein.

Prononça-t-il à haute voix. En une fraction de secondes, une ombre fila du haut perchoir des unités embusquées afin de faire face au Barra de la Dothka.

Barra...

Nalfein était un élément jeune et talentueux de la Dothka. Son recrutement était très récent et dans les rangs de Lyme Illistyn, la règle voulait que les épreuves d'intégrations se fassent en sa présence, sans exception valable. Certains étaient spécialisés dans l'espionnage, d'autres dans l'assassinat et quelques érudits talentueux dans les deux domaines... Nalfein, lui, était un espion à l'avenir prometteur. Il était en réalité le Drow énoncé tout à l'heure dans le briefing de Lyme pour Vyl. Le Barra de la Dothka n'avait pas perdu de temps et pendant qu'il enquêtait avec Tebrywyn sur Mesxeon, il avait chargé Nalfein d'intégrer en toute légalité la ville de La Dross. Sa mission fut un succès et lui fit remporter ses premiers honneurs. Tandis que Lyme tira ses deux cimeterres ornés de diamants rares, Nalfein déposa sur le sol une caisse en bois.

Très bien... Comme convenu, tu vas te saisir de nos armes et les amener dans la demeure que tu as obtenu récemment. Ensuite, tu reviendras ici et tu attendras patiemment avec les autres mon retour et celui de Vyl.

A vos ordres, Barra !

Exemplaire, peut-être même trop militaire, Nalfein commença sa tâche et saisit non sans fierté les deux cimeterres de son Barra. C'était peut-être la première fois qu'un autre être que Lyme posait ses deux mains sur ces deux armes à la valeur inestimable. Puis, il saisit le carquois et l'arc qu'il attacha dans son dos. Avant de partir, Lyme fit même quelque chose qu'il n'aurait jamais pensé faire. Il remit entre les mains de son espion sa lyre... Toute son enfance venait de lui être confié et il se pourrait bien que les Dieux en personne viendraient à plaindre Nalfein s'il venait à l'égarer... Fin prêt, Nalfein s'enfonça à son tour dans l'antre de La Dross, laissant Lyme à sa solitude. Ce dernier s'agenouilla sur le sol et retira la planche supérieure du coffret. Plusieurs compartiments étaient incrustés à l'intérieur dont un qui attirait particulièrement l'attention. Un liquide noir baignait à l'intérieur, liquide noir qu'il ne tarda pas à renverser délicatement et avec précision sur sa chevelure d'argent. Ainsi, la poussière d'argent devint un beau ténébreux dont la nouvelle chevelure reflétait ce même élément que sont les ténèbres.

Par Teiweon Danath'Korr... Que fais-je ?

Le Barra de la Dothka saisit deux lentilles dans un autre compartiment du coffret en bois. Toujours aussi précisément, il les appliqua sur ses pupilles et le regard d'argent devint à son tour aussi noir que la racine de ses cheveux. Méconnaissable, il se demandait si Vyl le reconnaîtrait dès le premier regard. Bien que sa couleur naturelle lui donnait un certain charme et une très bonne réputation chez les femelles, l'argent dont il avait été doté à la naissance était très rare chez les Drows. Cela, Mesxeon le savait et il fallait ruser, tout simplement. L'heure s'écoula à son rythme et ce fut enfin à son tour d'entrer dans les cavernes de La Dross. Mais quel était cet étrange phénomène ? Plus il s'enfonçait dans la grotte, plus elle était éclairée... Les lampes torches étaient en faible densité et cela ne suffisait pas à expliquer cette luminosité anormale. Il était un maître assassin et espion et n'avait pas les connaissances requises pour comprendre que des petites cheminées avaient été creusées jusqu'au sommet de la montagne dans lesquelles avaient été installées des miroirs polis. Lorsqu'il faisait soleil à l'extérieur, il faisait soleil à l'intérieur. Lyme savourait sa première visite mais il ne fallait pas écarter la raison de sa venue. Si l'on découvrait que le Drow à la chevelure ténébreuse était le Barra de la Dothka au nom de Nym Vrinn, les choses deviendraient bien compliquées... Lyme se présenta au premier escalier bien gardé sous l'identité de Belgarion, pseudonyme qu'il avait utilisé seulement avec Tebrywyn, qui son âme reposait dans les bras de Teiweon Danath'Korr selon les seules croyances de Lyme. Son stratagème fonctionna puisqu'on ne put le comparer au Drow à la chevelure et aux yeux en argent et il passa sans aucune altercation la vigilance accrue des sentinelles.

Il y était enfin, dans la ville de La Dross. La structure ressemblait étrangement aux niveaux inférieurs du Puy d'Elda. Vivre au fond d'un volcan ou au coeur d'une montagne, qu'elle en était la réelle différence ? Pourtant, le lieu était étrangement éclairé et cela le perturbait. Une humaine à la chevelure flamboyante et aux formes alléchantes vint aborder le Drow.

Quel beau mâle que voici... Sais-tu jusqu'à quel point je peux te faire plaisir, mon minet...?

Pendant un instant, le Barra de la Dothka hésita. Demeurer froid et distant ou bien entrer dans la danse ? Non, ce fut un simple sourire qui se grava sur ses lèvres. Comme s'il avait été honoré d'être abordé par la fille de joie. Au plus profond de lui-même, cela l'écœurait et l'idée de pouvoir flirter avec une humaine le dégoutait encore un peu plus. Néanmoins, il n'était ni Lyme Illistyn ou encore moins Nym Vrinn. Il était Belgarion, un tout autre Drow.

Ce serait probablement un honneur de voir jusqu'à quel point tu peux me faire frissonner ma jolie mais j'ai quelques affaires qui m'attendent... Une autre fois, peut-être.

La putain prit une mine déçue et vint baiser la joue droite du Barra de la Dothka qui s'efforça de sourire hypocritement. Il devait rejoindre la bâtisse et vite. Chaque heures, chaque minutes, chaque secondes comptaient. A cette heure-ci, Vyl devait très certainement se donner en spectacle... Écourtant la rencontre importune avec la catin, Lyme atteignit le repaire temporaire quelques minutes plus tard. Immédiatement, il se rendit jusqu'au grenier et posa deux mains un peu frustrées sur sa lyre. Elle se portait bien et Nalfein semblait avoir bien rempli sa dernière tâche. Sa lyre, ses deux cimeterres, le carquois et l'arc de Vyl étaient là. Dans les règles de l'art, la Dothka du Puy d'Elda contournait en toute discrétion et en secret les lois de La Dross.

Il ne restait plus qu'à s'assoir sur le planché, dos contre une poutre en bois du grenier et à songer à tout et n'importe quoi. Qu'allait lui rapporter la Sargtlin ? L'information dirait-elle que Mesxeon s'était déjà échappé et que toutes les recherches devaient reprendre à zéro ? Était-il surprotégé ou pas du tout ? Rions un peu... Était-il possible qu'il se soit suicidé en constant l'arrivée de la Dothka pour prendre son âme de traitre ? Encore mieux ! Et si Vyl ramenait ce soir son cadavre en personne à son Barra adoré ? Que de possibilités... Pourtant, de nature rêveur et libertin, Lyme pensait comprendre le choix de Mesxeon. Vivre comme Sargtlin dans la Dothka au Puy d'Elda n'avait rien de très honorable ni de très luxueux. Ici, il devait probablement gagner beaucoup plus qu'en ayant été sous ses ordres. C'était bien dommage au fond, Mesxeon aurait certainement fait un très bon Veldruk dans un premier temps pour enfin arriver à terme comme Barra de la Dothka au même titre de Lyme. Au fond de lui, Lyme Illistyn enviait Urlz Mesxeon. Il l'enviait d'avoir pu choisir entre la servitude et l'exile. Pour Lyme, cette question ne se posait pas. Son âme était rattachée au Temple de Teiweon Danath'Korr depuis sa naissance et s'il s'était élevé au rang de Barra de la Dothka, ce n'était certainement pas pour tout abandonner maintenant. Songeur et rêveur, il ne restait plus qu'à attendre le retour de la belle Vyl...

Sujet: Re: Expédition Punitive [pv Nym] Lun 26 Oct 2009 - 16:38

Trouver un engagement dans l’une des tavernes de La Dross fut un jeu d’enfant.

Au tenancier borgne qui regimbait pour le principe, Vyl Thanat’Khor fit la démonstration de ses talents d’effeuilleuse. Le bonhomme, pourtant coutumier des exubérances féminines dans une ville qui comptait plus de prostituées patentées que d’aventurières émancipées, sortit de son boudoir, essoufflé et rubicond, comme s’il venait d’échapper à la mort en personne. Mais bien persuadé d’avoir tiré le gros lot…

Et pour cause !

Aucun mâle n’avait jamais su résister à l’exhibition maléfique des tatouages les plus intimes de Vyl Thanat’Khor. Il faut dire que la féminité outrageuse des Drows exerçait sur la plupart des humains un pouvoir presque magnétique. De leur côté, les Elfes pervertis et les Nains renégats goûtaient davantage à la sensualité diabolique des danses lascives dont les femelles sombres usaient pour stupéfier leurs mâles, qu’à la plastique sulfureuse de l’ennemi héréditaire. Vyl, intuitive, exploitait toute la palette des sensations, de la curiosité à la concupiscence. Elle avait de plus l’avantage d’avoir embrasé son corps des couleurs vivaces de la guerre, sa chaleur animale réveillant les créatures mythiques peintes sur sa peau. La guerrière en représentation semblait un tableau vivant qui s’attachait tous les regards. En dansant, elle racontait une histoire, et parlait à l’imagination de ses spectateurs médusés. Elle avait depuis longtemps éprouvé la puissance de ce pouvoir d’attraction, et elle en jouait comme le virtuose de son instrument de prédilection. Elle savait provoquer les hommes, reconnaître les meneurs parmi les buveurs attablés et flatter leur orgueil en faisant mine de leur promettre ce qu’elle n’accordait à personne d’autres. Elle débusquait les timides et les laissés pour compte, les jetant en pleine lumière pour leur donner le premier rôle, mimant l’extase dans leurs bras pour enflammer la salle. Jusqu’aux femmes qu’elles allaient chasser derrière la muraille de leur indifférence, les entraînant derrière elle dans des duels de séduction qui embrasaient l’atmosphère.

En trois nuits de représentation, Vyl avait fait des « Gorges chaudes » la taverne où il faisait bon finir la nuit. Son numéro terminé, elle se promenait nonchalamment de table en table, répondant d’un sourire ou d’un bon mot aux clients qui l’apostrophaient. Elle acceptait volontiers les chopes qu’on lui offrait et ne rechignait pas, lorsque quelques bravaches la chahutaient, la serrant d’un peu près, à minauder comme une pucelle échappée d’une moniale. Rien dans son attitude ne devait éveiller le moindre soupçon : aux yeux de tous, la femme légère qui vivait de ses charmes escamotait derrière le voile du mensonge et de l’illusion le Sargtlin de l’Ost Noir. Il lui fallait se faire violence lorsque certains perdaient le contrôle de leurs mains, ou que des paroles un peu vertes dépassaient les limites de ce qu’elle acceptait d’habitude. Elle esquivait d’un déhanché torride, gloussant comme une oie, et parait d’un sourire, là où sa nature profonde l’aurait porté au meurtre le plus sanguinaire. Et elle s’étonnait elle-même de s’en accoutumer.

Elle comprit très vite qu’évoquer le nom de Jov Rank serait un mortel aveu.

Elle se trémoussait sur les genoux d’un reître gigantesque aux mains baladeuses quand un des hommes de main de la Maîtresse de La Dross s’était invité à leur table. Vyl venait d’être invitée par des gaillards de la Marine Marchande qui écoulaient à prix d’or des cargaisons terrifiantes de rhum coupé, puis claquaient la moitié de leurs gains dans les bouges de la ville. Manifestement, le serviteur de la belle Kathleen connaissaient les larrons et profitaient sans vergogne de leurs largesses. Il ne tarda pas à partager avec eux ses préoccupations du moment. Et Vyl ne fut pas surprise d’apprendre que ces dernières avaient maille à partir avec sa mission.

- Nom d’un chien, vous ne pouvez pas imaginer ce que certains sont capables d’inventer pour se faire valoir auprès de la patronne ! Le bougre engloutissait sa sixième chopine d'aloccol fort, et son élocution, comme son haleine, commençait à s'en ressentir. On cherche des prévôts qui se seraient introduits dans nos murs ! Et d’autres cherchent des espions du Puy... Hier, ça a dégénéré. Un type un peu guindé s’est fait ramassé par des Nains qui l’ont battu à mort : il ressemblait à un des hommes du Guet d’Ydril, paraît-il ! En fait, c’était un des clercs de Kathleen, qui gère ses affaires à Diantra… Et c’est comme ça sans arrêt depuis que des fêlés ont fait courir des bruits !

L’ivrogne avait aperçu Vyl qui croisait sur sa poitrine les pans de sa tunique froissée par son vivant fauteuil.

- Toi ! Tu as de la chance de montrer ton cul tous les soirs ici ! Parce que tu étais numéro un sur la liste des suspects ! Mais bon, Kathleen a dit : une putain de plus… Et c’est vrai que t’es gentille, et pas compliquée, à gagner ton pognon en nous régalant de…. Tout ça !

Joignant le geste à la parole, le bavard avait avancé une main vers le buste de la Drow mais le géant, soudain chevaleresque, avait volé au secours de la pudeur de son invitée, et brisé les doigts du rustre. Une bagarre s’en était suivie, réprimée à coups de bâton par le tenancier borgne, plus hirsute que jamais…

Alors, Vyl Thanat’Khor avait-elle redoublé de prudence.

Jusqu’à remettre à plus tard sa visite à Vrinn Nym dans le grenier de son contact. Elle en était persuadée. Nym comprendrait. Il saurait interpréter son absence comme l’aveu d’une enquête bien mal partie. De son côté, certainement, il aurait lui-même apprécié le contexte et mesuré les dangers qu’il y avait à s’exposer trop directement.

C’est le quatrième soir que la guerrière eut une révélation.

Elle venait à peine de finir son numéro, et se rhabillait en hâte. Il ne fallait pas blaser les clients.

Lorsqu’il entra, escorté de ses mercenaires et de quelques filles. Lui : Anastase Vigile, l’un des lieutenants du plus redouté chef de bande de La Dross ! Il tendait ses gants de cuir à son valet, - un adolescent à peine pubère qui lui vouait une adoration mystique -, et jetait un regard condescendant sur les gueux qui cuvaient alentours. Le silence ne tarda pas à s’installer. Un silence empreint de crainte et de respect que brisa le tenancier, bredouillant ses respectueux hommages en se tordant les bras. Vyl fut frappée par la beauté de l’importun : elle n’avait jamais trouvé un humain beau et attrayant avant celui-là. Il faut dire qu’avec ses presque six pieds et six pouces, sa crinière sombre moirée de reflets bleutés, sa peau mate et ses yeux céruléen, le lascar avait belle allure. Sa puissante stature, la finesse de ses attaches, sa naturelle cambrure le rapprochait tant des critères de la beauté tels que vantés au Puy d’Elda qu’Anastase, sans le vouloir, embrasa la convoitise de la guerrière.

- Holà, Manant ! Jeta-t-il du bout de ses lèvres charnues au propriétaire des lieux, comme il aurait lancé des abats à un chien galeux. On m’a dit que tu t’étais payé les services d’une créature de l’enfer qui met, chaque soir séant, le feu aux goussets ! Alors ! Ta meilleure table ! Et montre !

Anastase dégrafa sa cape sans se soucier de l’endroit où elle tomberaitn et son petit serviteur se lança par terre pour que le tissu n’effleure pas le sol. Comme la clientèle, pétrifiée, ne reprenait plus son charivari, le jeune homme, - il n’avait pas plus de vingt cinq printemps -, frappa dans ses mains, goguenard.

- Allez, allez, les gueux ! Réjouissez-vous ! Ne plombez pas l’ambiance ! J’exécute sur l’heure les fâcheux qui s’exténueront à gâcher mon plaisir ! Reprenez là où vous étiez ! Je suis, ce soir, d’humeur à la gaudriole !

Et comme s’il avait été quelque mage épicurien lançant sur la foule un sort irrépressible d’hilarité spontanée, les encouragements d’Anastase Vigile furent saisis au vol et la salle s’embrasa dans un nouveau délire. Déjà, le patron des « Gorges chaudes » tirait pour son Maître son meilleur fauteuil, pendant que la cour du beau ténébreux envahissait la grand’table centrale dressée pour elle par des servantes soudain plus véloces.

Anastase se laissa tomber de tout son poids sur son siège, et s’empressa de salir de ses bottes à boucle le chêne de la tablée.

- Evite de me servir la pisse de ton chien, patron, ou je brûle ton établissement ! Se gaussa-t-il, très vite rejoint par les donzelles aux visages empourprées qui composaient sa suite. Les pauvresses ne rêvaient que de fourrager de leurs doigts aux ongles peints la toison noire qui bouclait sous sa chemise immaculée. Mais l’autre, blasé, les tenait à distance, les réservant à ses compagnons, plus déplaisants les uns que les autres.

Vyl n’attendit pas d’être invitée à se joindre à la joyeuse compagnie pour pointer son nez.

Chaloupant entre les tables, elle s’avança, royale, vêtue de sa seule tunique de satin noir retenue à la taille pas une ceinture. Et lorsque le bel Anastase posa la première fois son regard bleu sur la silhouette de la créature, la guerrière comprit sur le champ qu’elle l’aurait pour elle seule où et quand elle le désirait. Le sémillant Lieutenant aurait trouvé d’habitude les mots qu’il fallait pour saluer l’entrée en scène de la Sombre, mais cette fois, il demeura coi. Lui qui cherchait depuis des lunes une femme à sa mesure pour partager sa couche, venait de croiser le sillage de la baleine blanche, de la perle mythique. Qu’elle fut Drow ne le rebutait pas, au contraire. Ce n’était pas d’amour dont il rêvait, mais de bataille. Et l’envie de dominer une mortelle ennemie exacerbait le désir violent qui venait de s’emparer de tout son être.

Anastase Vigile se leva, et Vyl Thanat’Khor fut sur lui, le feu de son regard faisant bouillir l’eau du regard de l’homme. Le silence entre les deux protagonistes était trop éloquent pour que quiconque s’y trompe. Même le tenancier s’en frotta les mains, lui qui, pourtant, ne se remettait plus de l’irruption chez lui d’un des plus féroces noceurs de La Dross.

- Danseras-tu pour moi ! Souffla Anastase à l'oreille de Vyl Thanat'Khor en lui prenant les deux mains dans les siennes.

- Pour toi, ce sera un honneur, Seigneur ! Mais rien que pour toi…

Anastase Vigile, dans la candeur de son âge et tout pétri de son arrogance, ne s’était jamais frotté à la perversité sans limite des Drows. Il laissa parler son appétit, - qu’il avait insatiable -, et s’enferra dans les rets de la nuisible.

- Où et quand veux-tu ?

- Demain et dans un endroit connu de toi seul ! Je ne gagnerai plus une pièce de cuivre si l’on me sait à un seul homme…

Le fat se fendit d’un sourire carnassier. Il en avait la bave aux lèvres. Et le « demain » qui équivalait presque à une insulte dans son propre système des valeurs se noya dans la promesse torride d’un tête un tête avec la luxure faite femelle.

Il hocha la tête, et souffla dans l’oreille de Vyl le lieu de leurs retrouvailles.

- J’y serai au levé du jour, et nul ne m’y verra entrer. N’insulte pas ma patience, et tu ne seras pas déçue…

Et il retourna à ses traînées, pendant que Vyl prenait congé…

Ce soir là, la guerrière abandonna plus tôt que d’habitude la touffeur alcoolisée des « Gorges Chaudes ». Nul ne lui en tint rigueur. Surtout pas son patron qui voyait du meilleur œil se nouer une relation qui lui vaudrait une clientèle nouvelle, abondante, et cousue d’or.

Au cœur de la nuit, elle se faufila sans être vue jusqu’au grenier de Nalfein pour y retrouver Vrinn Nym.

Lorsqu’il vit arriver son apprentie, le Barra comprit que la guerrière avait de bonnes nouvelles pour lui. A peine était-elle assise en tailleur près de lui, qu’elle lui déballa son affaire.

Vyl Thanat’Khor avait un plan pour débusquer Jov Rank.

- Barra, fais moi confiance. Donne moi encore trois jours. J’ai besoin de ton aide. Il faut que tu fasses courir le bruit qu’Anastase Vigile cherche Jov Rank…

Sujet: Re: Expédition Punitive [pv Nym] Mer 28 Oct 2009 - 15:08

Quatre jours... Qu'est-ce que le temps pouvait passer très lentement lorsque l'on était seul. La seule chose qu'il pouvait faire, c'était d'attendre. Attendre patiemment le retour de sa prodigieuse guerrière. Le Barra de la Dothka ne possédait plus qu'un seul flacon du produit qui faisait ressortir les vaisseaux sanguins de ses yeux afin de masquer l'argent de son regard ténébreux. Ce qui l'avait certainement le plus agacé dans cette période d'attente, c'était le fait de croiser un miroir et de s'apercevoir que sa chevelure était noire. Il espérait reprendre bientôt ses traits naturels et en revenir à ses mèches d'argents. Ce trait, même s'il n'était pas de sa mère, il en était fier. Ainsi, Vyl Thanat'Khor revint aux côtés de Lyme Illistyn en fin de nuit et lui fit son rapport.

Anastase Vigile...?

Ce nom, il l'avait aperçu dans les rapports qu'il avait mandé à Nalfein lors de son intégration dans La Dross. Anastase Vigile était un lieutenant d'un chef des Six Bandes. Une très belle pêche, petite Vyl. Depuis le début, le Barra de la Dothka avait conscience de la difficulté de la tâche qu'il avait assigné à sa protégée. Et... Elle revenait avec du mordant. Elle venait encore de grimper en flèche dans son estime. De plus, elle avait déjà imaginé un plan qui avait séduit son supérieur. Sur papier, tout semblait être parfait. Il ne restait plus qu'à reproduire la pièce en grandeur nature. Comble de la chose, personne ne saurait que la Dothka infiltra La Dross...

Soit. Je vais exécuter la mission que tu me proposes. Bon travail. Je suis vraiment satisfait d'avoir quelqu'un comme toi à mes côtés... Finissons-en, mon alliée.

La confiance du Barra de la Dothka, elle venait de l'obtenir. Vyl Thanat'Khor était un merveilleux élément pour ses rangs et était capable d'incarner une grande alliée. Néanmoins, il ne fallait pas oublier que derrière un masque d'innocences peuvent se cacher les plus perfides et grandioses trahisons. Vyl est un serpent libre, petit Lyme. Sur cette dernière louange, la guerrière acquiesça et quitta son supérieur afin de se remettre à la tâche. Quelques heures plus tard, la lumière fut à nouveau maîtresse dans les rues de La Dross...

L'heure était venue d'utiliser le fond du flacon et à nouveau les yeux d'argents devinrent une marée de sang. Le Barra de la Dothka quitta sa cachette avec seulement les poignards et dagues qu'il cachait en permanence sous ses vêtements qui recouvraient son corps d'athlète. Sa seule tâche était donc de faire passer une rumeur ? Qu'il en soit ainsi. Le Barra de la Dothka avait déjà une petite idée sur sa façon de procéder et il allait faire quelque chose qu'il n'appréciait pas particulièrement : vendre son corps. Ainsi, Lyme Illistyn s'enfonça dans des ruelles plus étroites que les axes principaux et bien moins fréquentables. Il avait l'embarras du choix. Néanmoins, il garderait la fierté d'être un Drow pure et pour cela, ce dernier choisit une Drow bien foutue. Adossée contre le mur d'une vieille bâtisse, poitrine bombée, fesses mises en valeur par le léger voil violacé qui les recouvraient... Elle l'attendait. Ses lèvres pulpeuses lui faisaient signe d'approcher, ce qu'il fit.

Eh, beau mâle... Tu sais que l'on ne passe pas sur mon territoire sans me saluer comme il se doit ?

Le Barra de la Dothka sourit. Il n'était plus Nym Vrinn, il n'était plus Lyme Illistyn. Il était juste quelqu'un qui ne ressemblait pas à ces deux-là. Quelqu'un qui était capable de sourire à l'idée de culbuter une telle créature.

Vendui... Pardonne ce manque de politesse, j'ignorais que j'étais sur le territoire d'une si jolie sombre... Je peux peut-être rattraper cette faute ?

Aux yeux de la putain, il ne manquait pas de classe. C'était comme si cette intervention était innée. Lyme Illistyn était-il réellement froid ? Mystère... A pleine bouche, la catin se jeta sur sa proie et le fit entrer dans son repaire. Tout ce qu'on attendit de l'extérieur, c'était des cris de jouissances à l'intérieur pendant une bonne heure. Déboursé, et c'était le cas de le dire... Le beau ténébreux s'était présenté à la putain. Dur comme fer, elle pensait qu'il était Belgarion, un Mercenaire à la recherche de la richesse et de la gloire. Cerise sur le gâteau, il lui avait conté la mission qu'on lui avait assigné. Elle savait juste qu'un employeur avait chargé Belgarion de traquer Anastase Vigile. Intéressée par le nom énoncé qui ne lui était pas inconnue, la pute lui demanda d'en dire davantage. Alors, il lui avait répondu que Anastase Vigile était à la recherche de Jov Rank, tout simplement...

Dans les heures à venir, il était sans nul doute que les choses dans La Dross seraient sans dessus dessous. On rechercherait Belgarion, le Drow à la chevelure noire et aux yeux rouges alors que l'objet de leur recherche serait déjà redevenu Lyme Illistyn, Drow à la chevelure et aux yeux d'argents. Et... Il aurait déjà quitté La Dross à ce moment-là. Pour le Barra de la Dothka, la suite de sa mission se passerait à l'extérieure. Désormais, le destin et la sécurité de la Dothka reposait entre les doigts habiles et l'esprit manipulateur de Vyl Thanat'Khor.

Sujet: Re: Expédition Punitive [pv Nym] Mer 28 Oct 2009 - 19:53

PNJ : ANASTHASE VIGILE

Le bel Anasthase barbotait comme un gandin dans son baquet d’eau parfumée, exhibant avec fierté les griffures qui zébraient ses fesses et son dos. Aux boniches qui venaient lui frotter le dos ou bien verser quelques seaux d’eau tièdes supplémentaires pour réchauffer son bain, il lançait des œillades entendues. Quand Louison La Rousse, retroussant ses manches pour dévoiler ses bras mignons, vint, comme elle en avait l’habitude, plonger ses douces mains sous la mousse, le jeunot couina, comme si son intimité le faisait souffrir mille morts. Et la belle en fut quitte pour prendre ses jambes blanches à son cou de cygne.

- La peste de toutes ces voraces ! Gueula-t-il à tue-tête, éclaboussant tout autour de lui en se calant au fond de son baquet.

Ses reîtres pouffèrent de rire, moins discrètement qu’il n’aurait fallu peut-être. Mais Anasthase Vigile était depuis deux jours d’humeur extrêmement joviale, ce qui conférait à son charme naturel un surcroît de puissance.

- Le Grand Anasthase Vigile partage sa couche avec un chat sauvage ! Il n’a que faire des ribaudes fadasses qu’on lui sert habituellement ! Braillèrent les lascars à qui voulait les entendre, et s’esclaffant de plus belle.

- Il a le fer tellement porté au rouge à force d’aller au feu qu’il a peur qu’à la fin, il ne se casse ! A moins qu’il ne craigne qu’il ne fonde prématurément…

Il fallut quelques très longues minutes pour que la métaphore du fer ne pénètre l’esprit si peu agile du beau Vigile. Alors qu’à l’accoutumée, il aurait botté le cul des impétrants rien que pour montrer qu’il était le maître, et que l’on ne plaisantait pas avec l’autorité, il éclata d’un rire tonitruant, et se mêla au joyeux chahut.

- Il faut bien avouer, entonna-t-il fiérot, qu’Anasthase Vigile a trouvé une forge exceptionnelle, et que ces temps-ci, le fer a été battu chaque fois qu’il a été chaud !

Les rires gras fusèrent de toute part. Seules les servantes restèrent coites, elles que Vigile ne culbutait plus comme il prenait le temps de le faire chaque jour à la toilette.

- Nom de dieu que je suis crevé ! Hurla-t-il, mimant l’épuisement en sombrant dans son bain, et provoquant à nouveau l’hilarité générale.

Et pour cause. Anasthase Vigile, depuis deux jours déjà, rejoignait à l’aube dans une maisonnette connue de lui seul (et de quelques uns de ses gardes du corps les plus proches bien entendu), une maîtresse impétueuse et sauvage, dont il s’évertuait à combler les insatiables exigences. En levant la nouvelle danseuse des « Gorges Chaudes », le fat avait pensé qu’il dominerait le sujet en quelques minutes. Mais dès les préliminaires engagés, Anasthase avait craint de ne pas se montrer à la hauteur. Elva, - c’est à ce joli sobriquet que répondait son amante tatouée -, avait le tempérament d’une tigresse et il ne comptait plus le nombre de fois où tous deux enlacés, ils touchaient le ciel de leurs doigts entremêlés.

Alors qu’à la fin de la journée, Anasthase rampait vers ses quartiers officiels pour faire sa toilette, vidé et hagard, l’œil éteint, la belle fonçait tête baissée en petites foulées jusqu’à son cabaret, et elle dansait toute la nuit. Pour cela, et pour bien d’autres encore que la morale réprouve et ne nous permet pas d’étaler séant, Elva avait gagné la considération totale et le respect de son gaillard de malfrat qui, - il se l’avouait à lui-même -, en pinçait vraiment pour elle.

Ah ! Il aimait le soir, Anasthase Vigile ! Car aux « Gorges Chaudes », le soir, il savourait son triomphe devant une clientèle de plus en plus fournie et de plus en plus riche, en s’exhibant avec sa prise. Au début, la Drow n’avait pas souhaité s’afficher plus que nécessaire. Mais l’attirance qu’elle ressentait pour Vigile avait été la plus forte, et elle réservait ses plus beaux déhanchés, et ses pas de danse les plus lascifs à son amant, aux yeux de tous. Elle acceptait même de ne plus fréquenter que sa seule table, et elle ne manquait jamais de l’embrasser à pleine bouche à la face du monde. Peut-être était-elle amoureuse ? Anasthase songeait à occire le patron des « Gorges Chaudes » et à offrir à la donzelle sombre ce bel établissement où il faisait si bon s’éclater dès la tombée du soir.

Mais alors que Vigile rêvassait dans son eau bientôt froide, un de ses hommes de main pénétra dans la pièce, armé en guerre, le visage rubicond et le verbe haut. Le bougre semblait en colère.

- Seigneur ! Clama-t-il en se découvrant la tête, je suis venu aussi vite que j’ai pu. Diantre ! J’ai été ralenti par une rixe entre des malfrats du nord et une poignée d’hommes de Hautval. Ces abrutis du nord ont étranglé un gars de Hautval en l’accusant d’être un prévôt ! Cette histoire commence à échauffer les sens de tout le monde dans La Dross !

Depuis quelques jours, les rumeurs sur la présence d’assassins et de prévôts dans la ville pourrissaient l’ambiance, et il n’était pas une heure sans que des rixes éclatent ça et là. On ne comptait plus les morts et les blessés, victimes de ces bruits répandus par quelques plaisantins stupides. Jonathan et Kathleen grondaient. Les Bandes attendaient les représailles.

- Mais je ne suis pas là pour ça, Seigneur.

- Accouche, maraud ! Siffla Anasthase contrarié par cet opportun qui piétinait ses songes.

- J’ai ramassé toute à l’heure une ribaude qui prétend avoir couché avec un mercenaire, du nom de Belgarion. Ce lascar, un hybride aux yeux rouges et aux cheveux noirs, a été embauché par Jov Rank pour te faire le cuir, Seigneur. Rank veut te buter, Messire ! Ce fou est après toi.

Anasthase Vigile répondit au trop long discours du gueux par une moue dubitative. Que pouvait lui vouloir Jov Rank ? Mais dans le doute, à La Dross, on ne s’abstenait pas : on agissait. Et Vigile n’en était pas à ses premières menaces.

- Réunis mes gars, crapule ! Et trouve moi ce Belgarion et ce Rank sans tarder ! Ordonna-t-il en lançant son pain de savon à la tête du guerrier.

Et, satisfait de sa prestation, il s’endormit dans son baquet d’eau froide en rêvant aux ondulations reptiliennes du corps de la brûlante Elva et aux promesses de l’aube…

Expédition Punitive [pv Nym] Star3

VYL THANAT’KHOR

Troisième matin dans les bras d’Anasthase Vigile, ou comment joindre l’utile à l’agréable. Car le jeu en valait la chandelle. Jamais Vyl n’aurait songé que le bellâtre avait autant de ressources cachées. L’apollon réussissait là où bien des Drows avaient échoué. Mais s’il avait la force et l’endurance, le pauvre garçon n’avait ni l’imagination ni le vice. En outre, il apprenait bien mal, car si la nature l’avait comblé de ses bienfaits à bien des égards, elle avait bâclé son ouvrage pour ce qui était de l’esprit de cet animal. Un sanglier avait plus de bon sens, et certains chevaux, plus de mémoire que lui. Anasthase Vigile était aussi stupide qu’il était inépuisable. Et sans intelligence, il n’est point de saveur aux plaisirs de la chair.

Troisième et dernier matin dans les bras d’Anasthase Vigile. Vyl Thanat’Khor s’était lassée de son jouet. Elle avait donné suffisamment le change, et toute La Dross savait cette liaison sulfureuse. La guerrière allait jusqu’à mimer l’amour chaque soir après son spectacle. Et les filles lui répétaient à l’envie qu’elle serait bientôt la favorite de cet habile et estimé Lieutenant, qu’il la comblerait de ses bienfaits et l’installerait pour pouvoir se la conserver à lui tout seul. Alors Vyl versait-elle en public des larmes de joie. Et tous s’entichaient de ce couple si bien assorti, symbole d’une ville libre, offerte à toutes les races, où l’hybridation avait force d’exemple.

Mais en ce troisième matin, Vyl avait stoppé leurs effusions bien avant midi. Le bougre n’avait pas protesté, épuisé qu’il était. Oh ! Il avait encore été à la hauteur des espérances de la femelle qui conserverait de cette matinée un souvenir ému encore quelques lunes. Seulement voilà ! Il y avait la mission confiée par Vrinn Nym et l’honneur de la Dothka en jeu. Il fallait bien dérouler ce plan qui lui avait valu les félicitations de son Barra, et le réussir.

Anasthase Vigile dormait sur le ventre, ses cheveux noirs bouclant sur les oreillers de plume. Il dégageait une chaleur animale infernale et Vyl aurait bien profité de la tiédeur moite des draps pour somnoler un peu. La guerrière souleva le drap pour contempler le corps musculeux abandonné contre elle. Elle sourit. Beau spécimen d’humain en vérité.

Lentement, elle rampa jusqu’à Vigile et vint se mettre sur lui, ses formes s’écrasant sur le dos musclé de l’homme. L’autre s’éveilla, gardant les yeux mi clos, un sourire béat se peignant sur ses lèvres.

- Je me disais aussi, ma beauté ! Tu as encore envie de ton bel Anasthase, hein ?

Il fit mine de se retourner, mais la belle entrava son mouvement. Elle était au moins aussi forte que lui, et écartant les jambes, elle le maintenait en son pouvoir. Vigile frémit, excité, pensant à quelques jeux érotiques encore.

- Ohhhh ! Gloussa-t-il, Que me réserves-tu donc, cette fois ?

Il sentait son Elva qui s’accroupissait au-dessus de lui, le chevauchant au niveau de la taille, ses mains plaquées sur ses larges épaules. Et ronronnait, se délectant d’avance de la belle surprise que la femelle allait lui servir. Jusqu’à présent, il n’avait jamais été déçu, bien au contraire.

Vyl se penchait sur lui. Il pouvait sentir ses seins qui se pressaient entre ses omoplates. Rien que l’image dans son esprit le galvanisait. Il percevait le souffle chaud de la fille contre son oreille.

- Cette fois, ce sera beaucoup moins plaisant, mon bel oiseau !

L’autre se tortillait d’impatience.

- Oh ! Tu veux corser mon plaisir par quelques souffrances ! Je n’ai jamais essayé ! Mais avec toi, je suis sûr que ça va être merveilleux ! Va ma douce, Elva, va… Souffla-t-il déjà très échauffé.

- Comme il te plaira mon prince…

Anasthase Vigile poussa un cri tout de suite étouffé par la plume des oreillers. Il ressentait une cuisante douleur au cou, à deux doigts sous son oreille gauche. Il porta sa main vers sa souffrance. Et il trouva son stylet d’acier planté tout droit dans sa viande. Le sang pissait par la plaie ouverte. La nausée qui l’envahissait et la faiblesse qui le terrassait ne le trompaient pas sur son sort. Il se mourait.

Vyl se leva, lentement, comme elle l’eut fait pour quitter le lit dans toutes autres circonstances.

- Pourquoi ? Pour…qu… Supplia Anasthase Vigile.

La Drow se pencha sur lui et lui chuchota à l’oreille.

- C’est Jov Rank qui m’a payée pour te tuer, Anasthase. Jov Rank… Et il m’a payée pour tuer ton maître aussi…

L’homme se débarrassa du stylet planté dans son cou, et se laissa tomber au bas du lit. Il rampait sur ses coudes, de plus en plus faible. Dans ses yeux, on pouvait lire les regrets qui l’assaillaient. Il était venu seul. Il était venu sans escorte. On ne le retrouverait que le lendemain au mieux. Il allait crever tout seul. Il geignait maintenant.

Vyl se pencha sur lui une nouvelle fois.

- Anasthase ? Si tu n’arrêtes pas Jov, il tuera ceux de ton clan. Dénonce Jov Rank, Anasthase ! Dénonce le pendant qu’il est encore temps…

Dans sa voix, il y avait de l’exaltation pure.

Anasthase tendit lentement le bras, et sur le sol, dans son sang, il traça quelques signes, péniblement.

Puis dans un dernier sursaut, il expira.

Expédition Punitive [pv Nym] Star3

PNJ : ELGHINYRR

Cette fois, Urlz Meisxeon faisait ses paquets.

La Dross était à ses trousses.

Kathleen et les Chefs des Six Bandes lui reprochaient le bazar qui régnait en ville depuis quelques jours. Des bagarres s’allumaient dans tous les quartiers. Tout le monde soupçonnait tout le monde. Nains, Elfes, Drows et Hybrides lynchaient un humain par jour, croyant reconnaître dans tel ou tel un prévôt infiltré qui traquaient les malfrats. Plusieurs commanditaires avaient renoncé à livrer leurs cargaisons. Le commerce en souffrait. La Dross se vidait de ses visiteurs les plus timorés. Et Rank portait le chapeau. N’était-ce pas lui après tout qui avait envoyé la belle Ophan Leänn informer les bandes de la menace qui pesait sur la cité des bandits ? Leänn d’ailleurs se désolidarisait de son ancien associé. Elle avait changé ses quartiers. La traîtresse !

Mais ce n’était pas vraiment le pire.

On lui avait collé la mort d’Anasthase Vigile sur le dos.

De cette sordide histoire, Meisxeon connaissait tous les détails. Brammli lui avait tout conté par le menu.

Un soir, Vigile n’était pas venu assister au numéro de sa nouvelle conquête, une danseuse Drow somptueuse qui s’exhibait à prix d’or aux « Gorges Chaudes ». Le Nain avait été constaté par lui-même la qualité du spectacle, et en était revenu ébahi. Il ne tarissait plus de la « charge érotique » de la prestation de la sulfureuse Elva. « Charge érotique » ? Où cet analphabète avait-il été pêché un truc pareil ?

Elva s’était inquiétée. Elle avait même refusé de danser. Elle avait fait un esclandre, prétextant qu’Anasthase l’avait séduite et abandonnée. Interrogée par les hommes du bellâtre, elle avait raconté qu’elle l’avait quitté l’après midi. Comme tous les jours depuis quelques temps, les deux amants se retrouvaient dans une cabane aménagée dans une galerie morte de l’ancienne mine de La Dross. Ils passaient leur journée à faire l’amour. Elle avait quitté Anasthase pour venir rejoindre le bouge. Il allait bien. La journée avait été encore plus torride que les autres. Les reîtres de Vigile témoignaient de l’état du dos de leur imbécile de maître : griffé jusqu’au sang par les ongles de la belle qu’il était ! Une preuve de la passion de leurs étreintes.

Tous s’étaient portés en cortège jusqu’à la baraque. Le Chef de Vigile en tête, consolant la favorite qui les avait tous suivi, pressée de retrouver son amant. On raconte qu’elle avait ramassé un manche de pioche pour lui casser la tête si par malheur, elle le retrouvait au lit avec une rivale.

Et voilà qu’on l’avait retrouvé, le Vigile. Raide. Dans une mare de sang. Les veines du cou proprement sectionnées par un joli coup de surin, porté de main de maître. Il était nu comme un ver. Son assassin l’avait surpris au lit, et l’avait exécuté froidement, sans lui laisser la moindre chance. Mais Anasthase, ce héros, avait eu la présence d’esprit, avant de crever tout à fait, de tracer trois lettres sur le sol. « J ». « O ». « V ». Et là, un de ses hommes s’était rappelé d’un mercenaire, engagé par Jov Rank pour faire la peau d’Anasthase Vigile. Jov Rank le paranoïaque ! Jov Rank le fouteur de mouise qui avait mis sens dessus dessous La Dross toute entière ! Et certains de se rappeler que Rank avait servi dans l’Ost Noir. Qu’il n’y avait qu’un assassin sombre pour tuer un quidam de cette stature sans qu’il ne puisse se défendre !

La Drow, à la vue de son amant mort, s’était effondrée. Elle avait fait une crise de nerf. Emu par sa fidélité, le Chef de Vigile l’avait faite transportée aux « Gorges Chaudes » et on l’avait calmé à grandes rasades de rhum. Pauvre fille ! Elle avait tiré le gros lot, et elle était veuve avant d’avoir pu lui passer la corde autour du cou.

Depuis, Jov était la bête à abattre.

Heureusement, Ophan Leänn ne connaissait pas sa dernière planque. Sentant le vent tourné, elle l’aurait vendu pour rien si son geste l’avait encore rapproché du pouvoir de La Dross. Cette chienne voulait la place de Kathleen et de Jonathan. Et au rythme de ses trahisons, elle arriverait certainement à ses fins.

Elghinyrr avait fait savoir à Brammli Lorbrem qu’il quittait la ville. Le Nain, fidèle et loyal, l’attendrait à une lieue de La Dross, planqué dans la Forêt d’Aduram. Meisxeon avait juré qu’il reviendrait. Il laisserait le temps passé, et ferai toute la lumière sur cette histoire.

Profitant d’une cheminée de ventilation qu’il avait lui-même aménagé pour disparaître sans laisser de trace, Urlz Meisxeon, à la nuit tombante, se fit la malle, emportant avec lui le strict minimum.

Sujet: Re: Expédition Punitive [pv Nym] Jeu 29 Oct 2009 - 9:59

Ainsi, le piège de la Dothka se refermait sur Urlz Mesxeon comme on enfermait un rat dans sa cage. Dans quelques minutes, tout serait terminé. Le plan proposé par Vyl Thanat'Khor fonctionnait comme prévu et sa mission était remplie. La Sargtlin était devenue sans conteste un bijou pour son Barra, sa perle rare. Avec un tel élément à ses côtés, tout semblait devenir plus... facile. Enfin, il ne fallait pas crier sa victoire trop vite. On peut être un Héros un jour et devenir une crapule le lendemain. Urlz Mesxeon n'en est-il pas la preuve absolue ? Faire croire à Anasthase Vigile que Jov Rank voulait sa peau et faire croire à Jov Rank que Anasthase Vigile voulait la sienne... Un merveilleux quiproco, Vyl. Rien de mieux pour agacer les spectateurs et habitants de La Dross d'un tel bordel en leur sein. Désormais, Vigile était décédé et les trois lettres « J » « O » « V » étaient révélatrices pour la cité. Jov Rank devait être retrouvé et puni pour avoir mené La Dross dans un tel bordel. Ainsi, ce dernier prit la poudre d'escampette et La Dross n'entendit plus jamais parler de son mercenaire talentueux devenu traitre aux yeux de la populace... De ce fourbe stratagème, la terrible Dothka dont parlait Jov Rank fut classée au rang de légende urbaine.

En réalité... Rien n'était fini. Tout commençait. La traque d'Urlz Mesxeon commençait. A toute allure, le renégat dévalait les pentes de la montagne de La Dross en direction de la Forêt d'Aduram. Avec tout ces évènements, l'imprudent en avait oublié sa véritable inquiétude, la Dothka. Même s'il en avait eu la réflexion, il était déjà trop tard. Urlz Mesxeon se trouvait sur le terrain de jeu de Nym Vrinn : la chasse en pleine nature. Aussi vite qu'il pouvait, Mesxeon filait en direction de la clairière où l'attendait son fidèle et dévoué compagnon, Brammli Lorbrem. Malheureusement pour lui, le Barra de la Dothka le pistait déjà, dans l'ombre et le silence... C'était bien lui, Lyme Illistyn n'en doutait pas et reconnaissait bel et bien celui qui fut sous ses ordres. Jusqu'où allait Mesxeon ? Lyme devait le savoir et le laisser filer encore un peu. S'il avait des complices, ils y passeraient en même temps que lui, tout simplement. Quelques minutes plus tard, le Nain et le Drow se retrouvèrent dans cette clairière à une lieue de La Dross, leur destination finale.

Ah te voilà mon ami ! J'ai cru qu'on t'avait attrapé avant que tu ne puisses sortir de ta planque ! Tu l'as butée, cette salade ?

Non... Je n'ai pas eu le temps de la chercher. Enfin, ce n'est pas très grave. Nous allons nous refaire ailleurs et quand nous serons assez forts, nous reviendrons et je baiserais Kathleen en personne. Elle me suppliera de l'épargner et m'offrira sa cité, tu verras !

Ha ha ha ! Toujours aussi fougueux toi alors ! J'ai hâte de voir ça, Rank !

...Brammli ! ... s'écria-t-il, les yeux écarquillés et dégainant ses deux épées.

Sur ce simple avertissement, le Nain se jeta sur le côté et manqua de peu de se faire égorger par le poignard qui se planta alors dans le sol.

Hé hé hé... Ma barbe a faillit en prendre un coup cette fois...

Pauvre pauvre Brammli. Avec la Dothka, on ne rêvasse pas. On ne perd pas non plus son temps à faire des remarques inutiles. Toi qui est maître chasseur, tu n'es à leur yeux qu'une proie. Nalfein jaillit de l'ombre d'un arbre et fondit en direction de Brammli avec ses deux lames assassines dégainées et un premier duel s'engagea contre la hache. Mesxeon n'en revenait pas et c'était pourtant la réalité. La Dothka l'avait trouvé. La folie allait s'emparer de lui dans très peu de temps... Il riait. Il regardait autour de lui et riait.

Nym Vrinn ! Je sais que tu es là ! Montres-toi ! Allez ! Je vais te faire la peau !

Aussi tôt appelé, il aurait été peu courtois pour le charmant damoiseau de ne pas se montrer. D'un pas lent et de son regard naturellement impassible, le Barra de la Dothka répondit à l'appel de Mesxeon par sa présence maintenant dévoilée. Il n'avait pas envie de parler. Il voulait seulement en finir. Dégainant ses deux cimeterres, Lyme Illistyn fondit sur Urlz Mesxeon et le second combat s'engagea. Autrefois, ils étaient à égalité constante. Néanmoins, Lyme avait continué de progresser dans un lieu qui ne pardonnait pas, le Puy d'Elda. Quant à Mesxeon, son niveau s'était considérablement appauvrit avec le temps. Elghynirr était mort il y a bien longtemps... Brammli fut défait par Nalfein et Mesxeon fut vaincu par Lyme. Le traitre de la Dothka gisait misérablement aux pieds de Lyme.

Tu verras... Ils te feront la peau... T'es juste bon à les servir... Nym Vrinn ! ... Mais quand tu ne seras plus aussi performant... Ils te remplaceront sans aucun remord ! ... Et je rirais en Enfer !

Oui. Ce jour arrivera probablement et je l'ai accepté. Néanmoins, je vais vivre plus longtemps que l'idiot que tu es. Elghynirr est mort en même temps que ta fuite. Pourtant, il avait un avenir très prometteur.

Sais-tu ce qui aura été ta perte, Mesxeon ? Tu t'es accommodé de la confiance des Humains, des Elfes Sylvains et des Nains.

Ah ! Cette Elfette... Ophan Leänn... Elle est mon dernier complice et elle se cache...

On reconnaissait bien là l'aveu de celui qui n'avait pas supporté d'être abandonné par son ancienne collaboratrice. Par cette déclaration, il était certain que Nym Vrinn y retournerait et vérifiait par lui-même l'état de ce fait.

Tout à fait. Tu as placé ta confiance en des êtres manipulables à souhaits. La Dross est un endroit lamentable. Ceux qui y habitent ont renoncé à leur fierté. Les Elfes Sylvains ont renoncé à leur Sagesse et tentent de se montrer comme des Drows... Les Drows, eux, feraient n'importe quoi pour un peu plus de plaisir charnel... Les Humains sont déjà si bêtes de ne jamais apprendre de leurs défaites à l'origine, alors ceux de La Dross... Et les Nains... Je n'ai rien à en dire.

A partir de tout ces faits, il a été extrêmement facile pour la Dothka de manipuler les autorités de La Dross et de te faire porter les fautes pour te forcer à... sortir. Nous avons gagné haut la main et tu as perdu lamentablement. Tu ne me seras jamais supérieur, faible ordure que tu es...

Enfoiré ! ... Tu veux dire que tu es derrière tout ce bordel ?! ...

Il était futile pour le Barra de la Dothka d'en dire davantage. Il mourrait avec une vérité douloureuse à accepter. Nym Vrinn, celui qu'il avait considéré comme son plus grand rival l'avait trompé et forcé à sortir de sa cachette. C'était à titre d'exemple ce que réservait Lyme Illistyn à tout ceux qui auraient l'audace de considérer qu'ils feraient un meilleur Barra que lui. Impassiblement, le cimeterre droit de Lyme traversa le cœur du manipulé et sa vie prit fin tandis que Vyl Thanat'Khor rejoignait les premières loges. Le Drow rengaina ses deux cimeterres et se tourna vers Nalfein et Vyl.

C'est terminé. Votre mission est un succès. Vous pouvez disposer... Je vous rattraperais sur le chemin du Puy d'Elda sauf si l'un d'entre vous veut m'attendre ici pour converser. En cette heure-ci, je n'en ai pas le temps.

Si Nalfein l'intéressait un peu moins, Lyme lança un regard très insistant à Vyl. Encore une fois, il ne regrettait pas tout ce qu'il avait pu lui dire avant de rentrer dans La Dross. Elle était digne de lui et pour la première fois, il ressentait le besoin de se montrer digne d'elle. Enfin, l'heure n'était plus aux louanges mais aux vérifications... A nouveau, Lyme s'infiltra cette fois-ci bien plus discrètement dans La Dross et partit à la recherche de la dénommée Ophan Leänn. En fin d'après midi, ils étaient face à face, dans la planque d'Ophan.

Tu crois être qui pour entrer comme cela chez moi sans ma permission ?!

Un Drow à la chevelure et aux yeux d'argent... C'était lui, elle le savait mais ne voulait pas encore l'accepter.

Mon nom est Nym Vrinn. Je suis le Barra de la Dothka. Mes... Jov Rank m'a informé de ton existence en tant que complice. Ton compagnon et... le Nain qui l'accompagnait sont morts depuis ce matin.

Attention, Ophan. Ta réaction immédiate déterminera si tu continueras oui ou non de vivre.

Et tu es venu pour me faire taire, alors...?

S'il avait tué Jov Rank, elle était consciente qu'elle ne tiendrait probablement pas face à celui dont elle avait renié l'existence avant cette rencontre.

Avant de venir te voir, j'ai fait quelques recherches à ton sujet. Ton profil m'intéresse. Il paraîtrait que tu te glisses vers le sommet de La Dross et ta condition d'Elfe Sylvaine est tout à fait intéressante. J'ai un marché à te proposer. Enfin, c'est idiot parce que tu n'as d'autre choix que de l'accepter.

Je vais te donner l'emplacement du cadavre de celui qui a causé des tords à La Dross et tu pourras le ramener en héroïne. En échange, tu devras tenir ta langue sur l'existence de la Dothka et je veux que tu mettes à ma disposition ton réseau d'informations qui s'étend jusqu'en Anaëh. En échange de ta vie et de la gloire que tu tireras de la mort de ton précédent associé.

J'accepte.

Un sourire malicieux se dessina sur le visage de la garce. En réalité, sa vie ou sa mort... Elle s'en contrefichait. Mais tirer la gloire du cadavre du traitre de La Dross, c'était une belle occasion pour se rapprocher de la place de Kathleen et devenir la maîtresse de la Dross. Même si cela demandait une coopération avec le Puy d'Elda. Elle s'en fichait, seule sa gloire personnelle comptait. Lyme et Ophan avaient une chose en commun. Ils étaient ambitieux et un pacte de longue date venait de se former.

Soit. L'un de mes hommes du nom de Nalfein te rejoindra bientôt. Il dispose déjà d'un titre de reconnaissance qui fait de lui un habitant de La Dross et il sera tout simplement ton lien entre toi et moi. Sauf cas exceptionnel, c'était notre première et dernière rencontre.

J'attends ton Nalfein avec impatience, Barra...

Sur ces derniers mots, Lyme quitta la couche d'Ophan et la Dross par la même occasion. Il observait les alentours. L'un des deux l'avait-il attendu ? Il ne tarderait pas à le savoir. Sinon, il partirait immédiatement rattraper son retour sur sa Dothka. En tout cas, l'Expédition Punitive était terminée.

Sujet: Re: Expédition Punitive [pv Nym] Sam 31 Oct 2009 - 11:12

PNJ : OPHAN LEÄNN

Le soir même, accompagnée de deux malabars recrutés à la sauvage dans les coupe-gorge de La Dross, Ophan Leänn se rendit à l’endroit indiqué par le Barra de la Dothka. Elle trouva comme prévu les cadavres de Jov Rank et de Brammli Lorbrem. Déjà, les charognards d’Aduram avaient profané les corps, mais les deux anciens associés de l’Elfe se ressemblaient encore.

Leänn se pencha sur la dépouille de Rank. Adossé à un arbre, les bras pendant le long du corps, Elghinyrr dormait du dernier sommeil, paisible. Son assassin lui avait ôté la vie d’un seul coup de lame, droit au cœur. Une exécution des plus propres. Meisxeon cette fois ne reviendrait plus d’au-delà de la Mort. Mais par superstition, l’Elfe commanda qu’on tranche la tête du Drow, et que tête et tronc soient enterrés dans deux fosses différentes. Elghinyrr, de son vivant, exhalait des fragrances mortelles de vieilles malédictions et de pouvoirs surnaturels. Ophan l’avait longtemps pris pour quelque scintillateur dissimulant ses liens intimes avec les forces occultes. Une précaution valait mieux qu’une…

Les deux barbares qui l’accompagnaient s’acquittèrent de la tâche sans rechigner : l’Elfe payait bien. Elle avait commandé qu’on creuse une tombe assez profonde pour inhumer cinq défunts. Dans la terre meuble des sous-bois, la commande fut exécutée sans peine.

Urlz Meisxeon y fut jeté le premier, sans son crâne.

Pour Lorbrem, Ophan Leänn se fendit d’une prière. Sa fin à lui avait été moins facile comme le criait à la face du monde son cadavre mutilé. Le Nain avait vendu cher sa peau, et son adversaire l’avait maintes fois saigné avant de porter le coup de grâce. L’Elfe savait que si Vrinn Nym s’était lui-même chargé de Rank, c’était son homme de main qui avait fait le cuir de Brammli. Peut-être ce Nalfein que le chef de la Dothka lui avait mis dans les pattes. Ophan sourit : elle s’occuperait de ça aussi en temps et heure. Le Nain rejoignit rapidement dans l’humus glacé la dépouille de celui qu’il avait choisi de servir jusqu’à la dernière minute. Loyauté proverbiale, presque caricaturale, des Nains ! Même la pire des vermines des montagnes neigeuses du Grand Nord Ouest conservait en son sein les reliques morales de sa Race. Parce qu’il avait été un frère d’arme fidèle, l’Elfe posa sur chaque paupière du Nain une pièce d’or pour pour payer son passage vers les champs fleuris et radieux de ses chasses éternelles.

- Ma Dame ? Où sont les trois autres, Ma Dame ?

Le plus fort des deux rustres s’impatientait. La nuit tombait maintenant, et il ne faisait pas bon traîner dans la Forêt d’Aduram après le coucher du soleil.

- Les trois autres ? Ah, oui. Je suis désolée…

Le bonhomme n’eut pas le temps de parer la lame qui lui trancha la gorge. A peine perçut-il le tintement de l’épée quittant le fourreau lorsque Leänn dégaina. Il porta les mains à son cou, le regard déjà brouillé par la mort qui le saisissait. Son compère gronda. Ophan Leänn exécuta quelques moulinets rapides avec son arme, et dans la fulgurance d’une seule et unique attaque, frappa son adversaire sous le menton. L’homme s’écroula, foudroyé.

Après avoir soigneusement essuyé sa lame, Leänn s’attela à sa tâche. Elle tira les deux nouveaux cadavres dans la fosse, et ferma la tombe.

L’Elfe n’avait pas suivi les conseils du Barra de la Dothka. Revenir en héroïne avec les cadavres de Lorbrem et de Rank aurait été du plus mauvais effet. La racaille de La Dross oublierait bien vite qu’elle avait abandonné ses associés lorsque le vent avait tourné, d’autant que cette trahison servait les intérêts supérieurs de la ville des brigands. Mais jamais crapule ne pourrait lui pardonner d’avoir exécuté elle-même ses frères d’armes. La Dross avait ses coquetteries et son éthique…

Deux jours plus tar, Ophan Leänn enterra la tête de Jov Rank de l’autre côté du fleuve, en Anaeh. Puis elle s’en retourna vers La Dross. Vers son destin…

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