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 De velours et de soie [Benjamin]

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Daneva
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MessageSujet: De velours et de soie [Benjamin]   De velours et de soie [Benjamin] I_icon_minitimeLun 2 Aoû 2010 - 4:44

La route avait été longue jusqu'à Diantra, et la fatigue pesait sur les épaules de Daneva. Il avait fallu galoper sans relâche afin de distancer des poursuivants invisibles, le jeune elfe au creux des bras. Enfin, lorsque Diantra avait imposé sa silhouette à l'horizon, la cavalière avait stoppé son étalon épuisé par la course haletante et avait regardé par dessus son épaule. Personne ne semblait les suivre, et pourtant de sombres ombres menaçantes hantaient les pensées de la jeune femme. Elle se savait la proie de prédateurs redoutables, sur ses traces depuis le coeur de la forêt où ils l'avaient débusquée alors qu'elle s'y pensait à l'abri. C'était Lucas, son fils, qui était en réalité convoité par cette mystérieuse organisation. Daneva serra les dents en repensant à la raison pour laquelle on souhaitait le lui enlever : encore une grossière erreur de sa part...

Lucas était resté en Anaeh pour y être soigné, puis formé à la magie par les meilleurs magiciens du peuple des forêts. Daneva s'était résignée à l'y abandonner pour attirer ses poursuivants le plus loin possible et mettre un terme à cette menace sans le mettre en danger. C'est pourquoi les sabots de son cheval l'avaient menée aujourd'hui jusqu'à la capitale. L'elfe qui l'accompagnait, agé seulement d'une centaine d'années, avait accepté de se faire passer pour Lucas le temps du voyage afin de tromper les malfaiteurs, qui croyaient ainsi poursuivre la mère et le fils.

Le jeune elfe s'appelait Eyne. Une lourde capuche sur la tête afin de dissimuler ses fins cheveux blonds, il leva les yeux vers le soleil. Ce dernier se couchait lentement sur Diantra, l'embaumant d'une chaude lumière dorée, les hautes tours du château se découpant sur le ciel rougeoyant. Daneva apprécia le silence de son compagnon qui, elle le savait, était saisi par la beauté du paysage.


- Bienvenue à Diantra...

Cette phrase s'adressait autant à l'elfe qu'à elle-même. Cela faisait plus d'un an qu'elle n'avait pas mis les pieds à Diantra. La dernière fois, elle y avait provoqué un tel capharnaüm qu'elle avait pensé ne plus jamais devoir y retourner. Les événements lui prouvaient aujourd'hui encore le contraire.

Lorsqu'ils entrèrent dans la ville, la nuit était complètement tombée. La garde avait été relevée et les nouveaux arrivés dardaient leurs pointes protectrices vers le ciel noir en surveillant les allées et venues. Daneva serra les dents en passant entre les mailles du filet, mais personne ne les héla. Le trafic était intense, même à cette heure de la soirée, et de nouveaux portraits avaient remplacé le sien sur les mur. Daneva de Nelen n'était plus. Elle fit cette constatation en se découvrant avec surprise un petit goût amer au fond de la gorge, mais fut tout de même soulagée : on ne lui courrai plus après et elle pourrait mener son enquête tranquillement.

Elle mena Iio le long des ruelles encombrées des bas quartiers. Tout cela lui était vaguement familier... L'heure était au repas et à l'intimité familiale. On avait pas encore fermé les volets aux fenêtres, et la douce lueur des bougies se déversait dans la rue. L'étalon devait slalomer entre de petits groupes de personnes, travailleurs rentrant chez eux après une journée de labeur. Daneva et son compagnon de voyage mirent bientôt pied à terre pour abandonner leur monture dans une écurie bon marché. La jeune femme obtint qu'on s'occupât de lui pendant quelques jour en échange du maigre pécule qui lui restait de ses échanges avec les elfes. Il lui faudrait trouver le moyen de subvenir à ses besoins rapidement, mais elle ne se faisait pas trop de soucis pour ça. Son oeil accrocha avec malice la bourse rebondie d'un passant. Il serait sans doute plaisant de retrouver ses anciennes habitudes, bien qu'elle fut consciente qu'il ne s'agisse pas d'une solution durable.

Elle conduisit Eyne jusq'au temple de Tari, où elle le confia à son tour à un prêtre silencieux qui hocha gravement la tête en posant une main sur l'épaule de l'enfant. Ils échangèrent quelques mots à voix basse, ponctués d'autres hochements de tête. Eyne se tourna vers elle, l'air détendu.


- Ici s'achève mon voyage avec vous, dame Hélène. Je vous remercie d'avoir prit soin de moi jusqu'ici.


Daneva inclina la tête. Hélène était son nouveau nom d'emprunt, et elle lui avait demandé de l'appeler ainsi quand ils seraient en ville.


- J'espère que vous trouverez ce que vous cherchez.

Ils se séparèrent sur des adieux amicaux. Daneva lui était reconnaissante de l'avoir accompagnée jusqu'à Diantra, car il s'était exposé au danger qui pesait sur le véritable fils de la jeune femme.

Elle se retrouva seule.

Ses premiers jours à Diantra furent laborieux. Ses recherches de révélèrent infructueuses, et à vrai dire elle ne savait pas vraiment par où commencer. Elle commença par louer une chambre dans une vieille auberge qu'elle avait fréquenté quelques fois du temps où elle habitait la capitale. Elle savait qu'il n'y avait pas mieux que ce genre d'établissement pour glaner des informations. Elle passa de longues heures attablée près du comptoir à surveiller les allées et venues des habitués sans dénicher ne serait-ce que le début d'une piste. Les artisans se plaignaient du froid qui s'attardait et des mauvais apprentis qui sabotaient leur travail, les commerçants renchérissaient sur l'augmentation des taxes royales et les serviteurs sur leur paye qui allait décroissant. Daneva tenta alors de sympathiser avec deux cuisinières, les filles du tenanciers, qui lui apprirent quantité de ragots sur le voisinage sans qu'elle put y déceler la moindre information intéressante.

Elle s'apprêtait à quitter l'auberge pour changer de quartier lorsque la chance lui sourit enfin. Cela faisait une bonne semaine qu'elle logeait au Fleuve Qui Somnole, du nom de l'établissement, et l'avance qu'elle avait payé au tenancier ne suffirait bientôt plus. Il lui fallait se remplir les poches afin de régler le restant de la note et ficher le camp. Prise d'une soudaine crise d'éternuement un soir de faible affluence, elle fut surprise de constater qu'un homme lui tendait un mouchoir. Il la regardait d'un air plus concupiscent que compatissant, cependant elle apprécia le geste à sa juste valeur et inclina gracieusement la tête en acceptant la douce étoffe qui glissa entre ses doigt comme si elle n'avait été qu'un filet d'eau. Elle était ornée en son centre d'un signe en forme de spirale distordue qui se terminait en pointe de flèche. C'était plus une étoffe précieuse, à vrai dire, et seuls les nobles devaient sans doute avoir l'audace de la salir.


- Où avez-vous trouvé ça ?

Ce détail venait de la frapper de plein fouet. Elle l'avait distraitement remarqué sur le lourd col de laine de la femme contre laquelle elle s'était battue en Anaeh, celle qui tentait de lui prendre son fils. L'homme lui apprit qu'il l'avait gagné aux dés contre un habitué d'une taverne d'un autre quartier. Il semblait apprécier l'attention que lui valait soudain le malheureux mouchoir, et ne se fit pas prier pour donner à Daneva tous les renseignements qu'elle demanda. L'homme en question était le fils d'un vieux marchand fortuné de la capitale, établi tout près de la cathédrale. Il se rendait quasiment tous les soirs dans la même auberge afin d'y dilapider l'argent de son père en jeux divers et en bon vin.

Le Colibri était sans aucun doute d'un standing bien supérieur à celui du Fleuve qui Somnole. La grande façade de pierre blanche donnait sur une coquette petite place. On y louait une chambre à la nuit ou à la semaine, bien qu'un étage entier ait été acheté par un riche rentier qui l'avait transformé en salle de jeux. La cuisine était raffinée et le service agréable, on était loin de la taverne crasseuse et mal fréquentée dans laquelle Daneva venait de passer une semaine...

C'est seulement en entrant dans le somptueux salon que la jeune femme se rendit compte qu'elle ne pourrait pas y loger, ne serait-ce que pour une nuit. En la voyant entrer, une femme d'âge mûr se hâta vers elle afin de lui signifier que le Colibri ne faisait pas charité aux mendiants de passage et qu'elle ne pourrait y trouver aucun emploi car le personnel était en effet complet. Vexée, Daneva fut forcée de reconnaître que sa tenue était loin de lui donner l'allure d'une jeune duchesse venue parier de l'argent. Elle ressortit donc, morose mais néanmoins décidée à poursuivre sur son idée : elle en saurait plus sur l'ex-propriétaire du mouchoir. La coïncidence était trop grosse, elle était intimement persuadée que l'homme était lié à l'organisation qui en voulait à son fils. C'était du moins la seule piste qu'elle ait trouvé jusqu'alors.

Elle replia donc sa capuche sur sa tête et s'assit dans un recoin sombre d'une ruelle qui faisait l'angle. D'ici, elle pouvait voir les allées et venues des clients du colibri sans se faire remarquer. Elle se doutait que la mendicité fut aussi interdite à cet endroit, mais la nuit qui tombait doucement la rendait de moins en moins visible. Il aurait fallu passer tout près de sa cachette et baisser les yeux en plissant les paupières pour l'apercevoir, car elle se tenait parfaitement immobile.

L'affluence du Colibri était remarquable, surtout en ces temps de guerre. Dès que les premières étoiles se mirent à scintiller au dessus de Diantra, les clients commencèrent à arriver, formant bientôt un petit attroupement devant l'entrée. On s'y saluait poliment et échangeait les derniers ragots du quartier dans une ambiance festive et éméchée. Il ne fallu pas longtemps à Dane pour repérer l'homme qu'elle attendait. Grand, aux boucles d'or et au regard clair, il parlait fort en agitant les mains de façon agaçante. Elle reconnu à son nez une arrête irrégulière, signe qu'il avait été cassé des années auparavant : l'individu correspondait parfaitement à la description que lui en avait faite l'homme du Fleuve qui Somnole.

Finalement, les clients disparurent en s'engouffrant dans l'établissement, duquel se mit à émaner musique et éclats de rire. Daneva patienta en tenant fermement serrés autour d'elle les pans de son manteau. Si d'autres personnes entrèrent dans le Colibri durant les heures qui suivirent, peu en sortirent. Il fallu attendre ce qui lui sembla une éternité avant que le blondinet ne se montre à nouveau. Il avait bu et semblait décidé à quitter la fête, qui pourtant battait son plein. Un de ses amis sortit à son tour et tenta de le retenir en tirant sur sa manche, mais il refusa de retourner s'amuser au Colibri. Avisant ses gestes expressifs, Daneva comprit qu'il avait à faire ailleurs.

Elle se déplia comme une ombre qui s'étire et se faufila à sa suite tandis qu'il s'enfonçait dans l'obscurité des rues de la ville. Pourquoi faire ? Elle savait parfaitement où il habitait. Mais elle avançait plus ou moins à l'aveuglette dans cette enquête, et comptait sur la chance qui l'avait jusque là bien menée... Le problème était qu'elle ne savait absolument pas à qui elle avait affaire. Elle espérait qu'il la mènerait jusqu'au coeur de l'organisation, mais c'était sans doute utopique.

Le jeune homme marchait d'un pas certain. Il bifurqua brusquement et entra dans une luxueuse résidence. Elle cru tout d'abord qu'elle s'était fourvoyée sur son lieu d'habitation, mais reconnu bientôt avec surprise le dessin élégant qui ornait le linteau de la grande porte d'entrée. Il s'agissait de la Rose Pourpre, l'une des maisons closes les plus luxueuses de la ville. On n'y vendait pas seulement son corps, mais aussi ses talents, aussi variés soient-ils du moment qu'il pouvaient participer au bien-être des clients. Massages, chant, danse et discussion agréable majoritairement. Contrairement aux bordels des bas quartiers, les femmes y étaient instruites et bien traitées. L'endroit était très bien fréquenté, tellement même que Daneva y avait infiltré l'un de ses espions à l'époque, qui y avait travaillé comme homme de main.

Comme tout à l'heure, elle se posta dans l'ombre pour observer. Le blondinet fut accueilli par un serviteur, mais il l'ignora superbement comme si il connaissait très bien le chemin. Daneva ne s'attarda pas, elle se doutait bien qu'il n'irait pas plus loin cette nuit. En outre, elle avait besoin de réfléchir. Une idée venait de germer dans sa tête, mais elle n'était pas tout à fait sure que ça en soit une bonne...

Lorsqu'elle se coucha, l'aube commençait à poindre à l'horizon, cependant elle ne parvint pas à s'endormir tout de suite. C'était une très mauvaise idée, et pourtant... Elle n'arrivait pas à se la sortir de la tête. Elle décida de se donner quelques jours avant de prendre une décision, pour voir si rien d'autre ne se présentait.

Les jours suivants furent donc consacrés à la filature du blondinet qui, elle l'avait entendu, s'appelait Sire Lordan. Malheureusement elle n'en apprit guère plus... Sa vie semblait se borner à boire, à jouer de l'argent et à fréquenter la Rose Pourpre. Elle commençait à croire que le mouchoir n'avait rien à voir avec l'organisation qu'elle cherchait quand elle eut enfin la confirmation de ce qu'elle soupçonnait. Un soir, Lordan sortit du Colibri en pleine conversation avec un homme immense à la chevelure brune hirsute. Daneva, en l'apercevant, avait du réprimer un cri de surprise : elle l'avait déjà vu, précisément là où Lucas avait été retenu après avoir été enlevé de la ferme Granchot. Il s'était enfuit à la première escarmouche, emportant avec lui tout ce qui aurait pu répondre aux questions de Daneva. Plutôt que de le poursuivre, elle avait préféré retrouver au plus vite son fils.

Ce soir là, au lieu de suivre Lordan, c'est ce grand homme qu'elle talonna dans la nuit. Seulement, après quelques centaines de mètres, il s'évapora. Daneva se retrouva seule face au mur d'un cul de sac, rageant contre elle-même. Il n'y avait désormais plus à hésiter.

Le lendemain elle se rendit à la Rose Pourpre, les dents serrées et le regard fixe. Elle préférait éviter de trop réfléchir à ce qu'elle était en train de faire, au risque de changer d'avis.

De jour, l'endroit était magnifique. On accédait au bâtiment en traversant une cour agréablement fleurie où coulait une fontaine ouvragée. Le léger clapotis de l'eau était apaisant, et l'ombre des petits arbres fruitiers plantés le long de l'allée invitait les passants à s'y prélasser. Malgré toutes les aventures qu'elle avait vécues, Daneva ne pouvait s'empêcher de se sentir impressionnée par l'imposante façade aux reliefs sculptés.

Un serviteur s'approcha d'elle en trottinant. Comme d'autres l'avait fait avant lui, il dévisagea la jeune femme et jugea rapidement de la qualité de ses habits : cela lui suffisait pour juger à qui il avait affaire, c'est à dire assurément pas à une cliente.


- Puis-je faire quelque chose pour vous mademoiselle ?


Daneva hésita quelques instants puis fronça finalement les sourcils, la mine décidée.

- J'aimerais m'entretenir avec votre responsable.

Il plissa le nez imperceptiblement, puis la convia aimablement à le suivre à l'intérieur. Elle pénétra donc dans une antichambre où circulait un air frais et parfumé. On la pria de s'asseoir et d'attendre, ce qu'elle fit en cherchant à réprimer son appréhension.

Et ce n'était pas d'être refoulée qui l'inquiétait, mais bien le contraire.
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Benjamin Belfaure
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MessageSujet: Re: De velours et de soie [Benjamin]   De velours et de soie [Benjamin] I_icon_minitimeSam 7 Aoû 2010 - 12:56

L'incident entre Sylvain, et les seigneurs de Scylla et de Hautval fut regrettable mais n'eut pas de ressentis sur les affaires de la Rose Pourpre. Les clients réguliers ne s'étaient pas retenu de venir, et la petite altercation alimenta même peut-être la curiosités de quelques bourgres qui décidèrent de franchir pour la première fois la porte de la maison close. Pourtant, depuis ce jour, j'étais préoccupé... La violence de Sylvain allait en augmentant et il se faisait presque despote. De plus, nous avions désormais la preuve qu'il s'interessait véritablement à Inès. Cela avait provoqué quelques disputes entre Pimprenelle et lui, mais rien n'avait abouti. Pendant ce temps, je sentais que Mathieu et Inès complottait. Quelque chose se tramait dans l'arrière-scène et peut-être était-ce cela qui me faisait le plus peur. La disparition d'un voir de deux de ses enfants signerait pour Pimprenelle une lutte à mort contre son frère ainé, et donc le glas de notre alliance si fragile.

J'avais été réveillé par la lumière du jour, ayant oublié la veille de fermer mes volets. Ce fut un mal pour un bien car j'eus le privilège d'admirer un lever de soleil véritablement magnifique. Doucement il était venu éclairer le jardin aux milles nuances - malgré la guerre civile et les ravages qu'elle avait provoqué, nos jardiniers avaient fait des merveilles - puis avait trouver echos sur les murs blancs et finement travaillé de chaque bâtiment. Ce spectacle m'avait coupé le souffle et m'avait inspiré quelques vers supplémentaires que j'avais immortalisé dans mon carnet de poésie.

Mais la réalité m'avait brusquement saisi et rammener sur le droit chemin. Je ne pouvais rester oisif, il me fallait m'occuper des comptes. Pendant plusieurs semaines Pimprenelle et moi avions méticuleusement chercher, trouver et ranger les archives des dernières années. Je mettais un point d'honneur à ce que chaque dépense ou chaque gain soit notifié afin de nous permettre des recherches rapides et que la comptabilité de cette petite entreprise soit entièrement transparente. Mais ce travail nous avait retardé dans les comptes actuelles et il me restait au moins une semaine de comptes à mettre au propre. Un travail laborieux et terriblement ennuyant, même si nécessaire.

Nous avions intégralement refait toute la décoration intérieur des bâtiments, et même à grand cris, je n'avais pu persuader Pimprenelle de me laisser le soin de refaire mon bureau - elle me connaissait depuis suffisamment d'années pour savoir que l'esthétique n'était pas mon plus grand intêret et donc qu'il faudrait plusieurs années pour que je ne daigne seulement m'y interesser. Elle fit sabler les murs de pierre, leur redonnant leur couleur blanche d'autrefois. Le plancher fut vernis et elle insista pour séparer la grande pièce en deux à l'aide de rideaux fins aux reflets pourpres. Ceux qui franchiraient la porte de mon bureau entreraient tout d'abord dans un espace confiné relativement sombre où avaient été installé trois fauteuils aux coussins pourpres. Au milieu tronait une petite table de verre. L'ambiance y était bien plus intime que dans la seconde moitié de la pièce où j'avais insisté pour qu'il n'y ait rien d'autre que mon fauteuil, mon bureau et l'armoire où je gardais les documents importants. Mon bureau était placé perpendiculèrement à la fenêtre pour qu'à toute heure du jour j'ai le maximum de lumière.

Pimprenelle et ses enfants prenaient leur petit déjeuner - tardif, le temps que tout le monde se réveille - sur la petite balustrade juste en dessous et l'écho joyeux des discussions futiles et des rires me parvenait par la fenêtre ouverte. Visiblement, Candice faisait le pitre. Je fus surpris lorsqu'on frappa à la porte. Qui ? Je consultais d'un regard mon emploi du temps... Non, rien pour ce matin. Etrange.

- Entrez.

Après avoir refermer le livre des comptes et l'avoir rangé dans le tiroir à double fond de mon bureau, je me levais. Le serviteur se tenait debout, bien droit, et attendait mon attention pour parler.

- Une dame souhaite vous rencontrer Monsieur, dois-je...?

- Merci Victor. Faîtes la entrer je vous prie.

Je fermais la fenêtre pour être plus au calme et m'avancer dans la première partie de la pièce où semblait m'attendre une jeune femme brune. Je cherchais dans ma mémoire mais ne put mettre de nom sur ce visage. Je m'approchais d'elle et m'inclina légèrement en guise de salutation, un baise main aurait été plutôt déplacé. Il était rare que des femmes - autre que les prostituées ou Pimprenelle et ses filles - franchisse la porte de la Rose Pourpre. J'hésitais quant à la conduite à tenir avec elle. Les prostituées qui étaient venu travailler à la Rose Pourpre avaient généralement le couteau sous la gorge. La faim, la grossesse, ou la misère. Quand elles avaient franchi les portes, elles n'avaient pas demander à voir le responsable mais simplement à être engagé. Qui était-elle...? Patience, patience. J'aurai bien vite la réponse.

- Asseyez vous.

Mes quelques mots furent accompagnés d'un simple geste de la main, ce n'était pas un ordre mais une invitation. Qu'elle reste debout si elle le souhaitait. Je pris moi-même place sur l'un des fauteuils. J'étais vétu comme à mon habitude d'un ensemble sombre, simple, et sobre.

- Peut-être ma mémoire me fait-elle défaut, mais je ne crois pas vous avoir déjà rencontrer auparavant. Benjamin Belfaure. Et vous, qui êtes vous ?

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Daneva
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MessageSujet: Re: De velours et de soie [Benjamin]   De velours et de soie [Benjamin] I_icon_minitimeVen 13 Aoû 2010 - 2:17

Le majordome revint bientôt pour l'inviter à entrer dans l'antichambre de ce qui devait être le bureau du gérant de l'établissement. Elle resserra son manteau ourlé contre ses épaules autant pour se réchauffer que pour se rassurer. Ces grandes tentures conféraient à l'ambiance une froideur raffinée. Savoir ce que les jeunes filles faisaient à l'étage mettait Daneva mal à l'aise, l'air qu'elle respirait lui semblait malsain. S'imaginer donnant son corps à un inconnu la fit frissonner des pieds à la tête, et elle faillit faire demi tour. Heureusement, l'image de Lucas s'imposa bien vite à son esprit : elle n'avait pas le droit de renoncer.

Un homme entra enfin. Par ses atours, sobres mais élégants, il ne faisait aucun doute qu'il s'agissait du responsable qu'elle avait demandé. Cela pouvait être Sylvain ou son frère Benjamin, quoiqu'elle penchait pour le second étant donné ce qu'on lui avait rapporté sur la famille Belfaure.

L'accueil qu'il lui réservait était poli, même si elle décelait derrière ses manières affables une certaine appréhension. Il devait sans doute être prit au dépourvu par la soudaineté de sa visite. A elle désormais de dissiper ses soupçons... Après avoir longuement inspiré, elle se résolut à s'asseoir, et choisit pour ceci le fauteuil le plus près de la porte.

Elle avait bien deviné, il s'agissait de Benjamin. Soulagée de ne pas avoir affaire au fougueux Sylvain, elle lissa les plis de sa robe élimée sur ses genoux et leva vers lui un regard décidé dans lequel ne perçait nulle frayeur. Elle était ici parce qu'elle l'avait choisi.


- Je m'appelle Hélène Otrantem. J'ai entendu dire que vous cherchiez une... préceptrice pour vos enfants. Si je viens à vous c'est dans l'espoir de pourvoir à ce poste.

Elle inclina doucement la tête, consciente d'avoir fourni à son interlocuteur des raisons de ne plus se poser d'autres questions à son sujet que celles à propos de sa capacité à s'occuper des enfants de la maison.
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