Collation nocturne [PV]

Ainsi c’était donc ça, Ysari ! Dire qu’on lui en avait vanté les beautés, il se souvenait de sa cousine en pamoison devant ses plages et ses pins ! Balivernes ! Rien ne valait la beauté d’Odélian. Oh, certes, le temps y était plus clément, et l’odeur qui vagabondait dans l’air était teinté de rose et non de purins de cheval et de sueur de travailleurs, mais quel morne pays. Où étaient les champs de blés qui blondissent la terre à perte de vue ? Où était le bruit des cloches qui pendent au cou des vaches odéliannes, rentrant à l’étable pour la traite ? Où était la vaste plaine d’Atral et sa terre fertile ? Où était le plat pays … qui était le sien … Après cette référence aussi inattendue qu’inapproprié, observons notre Grassouillissime Grandeur, la veille du bal de sa cousine. Elanore avait visiblement apprécié la compagnie de son ingénue de baronne d’Ysari, sa naïve cousine Lucrèce. Quoiqu’elle avait parlé de lui en termes élogieux, d’après les bruits de couloir … Enfin, d’après les laquais qui écoutent aux portes pour deux pièces de cuivres la journée. Une aubaine ! Bref … La route fut longue, très longue, et l’arrivée du couple d’Odélian,en fin d’après-midi, les vit s’installer dans leurs appartements. La fin de la journée, puis le soir passa. Une fringale nocturne empêcha le Gras de rejoindre la couche immédiatement, et d’un pas décidé, il avait investi le fief des maîtres queux ysarois.

Quatre tranches de lards, un demi-poulet et une grappe de raisin plus tard, sans parler de ces délicieux petits gâteaux au miel, au nom si cocasse … Lougoume, ou quelque chose du genre, un vrai ravissement pour les papilles … Le Gras retournait à ses appartements, une miche de pain et un pot de miel sous le bras gauche et un chandelier ouvragé dans la main droite. L’orfèvre avait fait du bon travail d’ailleurs, bien que l’œuvre semblait frêle, travail de suderon, nota-t-il. Il avançait le long d’un couloir, notant le mauvais goût des tapisseries qui oranient ce dernier, et alors qu’il tournait à un coin, s’engageant vers les chambres des invités, son pied heurta quelque chose. Il eu un petit sursaut, surpris, puis avança le chandelier vers l’objet qui avait osé interrompre la glorieuse course de Sa Grassoullerie. Tiens donc ! Une chaussure fine relié de cuir souple, un léger liseré doré courant autour de la pointe pour dessiner une fleur délicate. Le Gras posa le chandelier un instant sur le sol et se saisit de l’objet. D’un geste habile, il fit passer la miche de pain sous son bras droit et reprit le chandelier. Il reprit sa marche en avant, tentant de trouver à qui un attribut aussi couteux pouvait appartenir. A coup sûr, ce n’était pas un propriété de suderon ! Il se permit un petit gloussement lorsqu’un mouvement attira son attention sur la droite. Il inspecta les ténèbres, fronçant les sourcils pour lutter contre l’obscurité. Sa voix grave retentit.

Qui va là ?

Son couteau pourrait bien servir à autre chose qu’étaler du miel ce soir …

Flute de flute de flute ! Il fallait qu'elle tombe sur le Gras en personne ! Alors là, c'était ce que l'on nommait communément un manque de chance phénoménal. Ou alors elle était maudite sur 36 générations. Bon, ayons l'air...mijaurée et futile.

-Par les Cinq ! Sire d'Odélian vous êtes mon sauveur !

Fit Astéride d'une voix douce et parfaitement teintée de soulagement. Finalement l'éducation de Melisandre n'aura pas été vaine, la jeune soeur du roi jouait parfaitement la comédie. Elle sautilla sur un pied en direction de la faible lumière diffusée par un candélabre que tenait le Comte. Vêtue d'une chemise de nhuit finement ouvragée et d'un peignoir de velours emeraude, Astéride apparu dans le halo de la lumière née des bougies. Dire que son expédition pour trouver un verre d'eau finissait ainsi...Elle était arrivé la veille escortée de son fils et de son futur époux, aussi enthousiaste qu'une coupable au bord de l'échaffaud et voir qu'en prime, il lui faudrait converser (ou pas ) avec le très nouveau mari d'Elaonore. Astéride n'aimait pas le Gras, c'était ainsi et étant donné son caractère, inverser la tendance était presque peine perdue.

-Figurez vous que mon chausson trouva fort amusant de se sauver a travers les couloirs, m'obligeant a une recherche dans l'opacité de la nuit. Quel espiègle petit chausson n'est ce pas ?

Astéride s'écorchait la bouche a chaque mot, mais c'était necessaire. Autant paraître cruche et sans interet aux yeux de Gaucelm. Cela la libérait d'une possible approche en vue des bonnes graces de son frère. Il était étonnant que personne n'ai encore comprit qu'Astéride n'avait PAS l'oreille du roi et, chose plus étrange aux yeux de certains, qu'elle se moquait comme d'une guigne de la politique ou d'un quelconque jeu d'influence.

-Oserais je vous demander...

ajouta-t-elle un sourire timide aux lèvres tout en tendant son pieds nu devant le Gras , fier de son butin de la nuit. Alors oui, là, elle abusait, mais se serait hilarant de raconter a Ciaran qu'elle avait eu le Comte d'Odélian a ses pieds...Ahum...

-Je sais qu'une telle demande est cavalière mais mon âme romantique aspire a la féerie. La lune, la douce lueur d'une chandelle, un gentilhomme...Tout les ingrédients sont réunis n'est ce pas ?

Continua-t-elle mutine. En cet instant, elle avait tout d'une cruche idiote et ecervelée et c'était exactement ce qu'elle voulait.

Armé de son pot de miel, d'un chandelier, d'une miche de pain et d'un chausson, le Gras aurait eu fier allure si quelque spadassin avait surgi, mais c'est une voix féminine qui se fit entendre, alors que la silhouette se rapprochait de lui.

Par les Cinq ! Sire d'Odélian vous êtes mon sauveur !

La gourgandine d'Erac, mince!

Dame Astéride, en quoi puis-je vous aider?

La voix était des plus courtoises, dissimulant l'agacement de Sa Grasseté au contact de la soeur du Roi. Elle n'avait que prouvé son écervèlement au fil de leurs rencontres fugaces mais son visage paraissait soucieux, cette fois.

Figurez vous que mon chausson trouva fort amusant de se sauver a travers les couloirs, m'obligeant a une recherche dans l'opacité de la nuit. Quel espiègle petit chausson n'est ce pas ?

Et voilà, qu'est-ce que je disais? Un chausson, elle s'inquiète pour un chausson ... Cela dit, le trait d'esprit fit gloussoter Gaucelm, qui ne put s'empêcher de répondre avec une parfaite bonhommie.

Les chaussons sont très mal élevés de nos jours.

Il eut un nouveau petit gloussement, en baissant les yeux sur le peignoir ravissant de la soeur du Roy. Diantre, elle était bien faite tout de même! Fulbert semblait déteindre sur un Gras qui avait à présent gouter au plaisir de la chair. Comme on dit communément, il bloqua ... Une seconde de blanc, ses yeux inspecta la qualité du peignoir ou de ce qu'il y avait en-dessous peut-être, puis il poursuivit.

Il me semble que j'ai capturé le fuyard, Ma Dame! Il tentait de me barrer la route alors que je retournais à ma chambre.

Il sourit en levant le chausson, sans vrai triomphalisme, mais avec une certaine dérision assumée. Elle sourit timidement.

Oserais je vous demander...

Elle tendit son pied nu vers Gaucelm. Non mais là ribaude! Un pied nu!! Elle enchaîna, ingénue.

Je sais qu'une telle demande est cavalière mais mon âme romantique aspire a la féerie. La lune, la douce lueur d'une chandelle, un gentilhomme...Tout les ingrédients sont réunis n'est ce pas ?

Hmm ... Vulgaire gouape ... Ou désespérante idiote ... Le Roy avait-il une cadette aussi dévergondée que la sienne? ... Ou alors ... Trop d'impressions différentes la concernant ... Seules les personnes intelligentes peuvent jouer les imbéciles, le contraire est impossible ... Phrase qu'il appliquait avec soin et qu'il avait peut-être trop ignoré lors de leurs rencontres précédentes. Ce conclave en Erac, ou elle avait joué le rôle du pot de fleur avec une facilité déconcertante, le Tournoi, où mis à part un petit coucou et un sourire béat devant son prétendant, elle avait joué les parfaites petites jouvencelles, et là, la gamine avide de contes de fées ... Intéressant. La courtoisie était de mise et Sa Grassouillerie gloussa avant de poser un genou au sol, avec lenteur certes, pour garder l'équilibre et ne pas valser comme un vulgaire culbuto, mais avec une certaine maîtrise tout de même.

Oh! Vous aussi, êtes amatrice de conte de fées? Pourtant je suis sur que votre carosse ne finira pas en potiron.

Il gloussa, amusé, lançant un regard enjoué vers Astéride. Il poursuivit en déposant le chandelier sur le sol, ainsi que le pain et le miel.

J'affectionne celui de cette jeune paysanne, prisonnière d'un monstre qui se révèle être un prince ... Les apparences sont bien souvent trompeuses, n'est-ce pas?

Il sourit malicieusement. Voyons si elle saura comprendre tout le sens de cette phrase. Il prit le pied d'Astéride au creu de sa main large et boudinée, avec une délicatesse qui étonne toujours la première fois, et glissa le chausson au bout du pied de la soeur du Roy.

Délicieux petit moment emplit de fausseté et d'hypocrisie. L'un comme l'autre se donnait en spectacle dans un jeu de rôle qui dissimulait une méfiance et un mépris réciproque. Elle se laissa chausser avec ingénuité, et Gaucelm usait de la délicatesse des princes charmants ... Ricule ...A la référence du Gras, Astéride répondit par une autre.

Oh ? Pourtant la paysanne est si naïve...Ma mère, la douce Melisandre, me comptait souvent celle de cette enfant qui, insouciente, traverse les bois et ne saurait découvrir la bête qui se cache sous les traits aimables d'une grand maman innocente et douce. Je dois l'avouer, cette histoire me faisait autant frissonner de plaisir que de peur.

Melisandre? Melisandre d'Erac? Elle avait plus l'air d'être une marâtre sinistre de conte de fées, plutôt que la sage conteuse. Le Gras sourit avec toute la fausseté qui sied à l'instant. Il rebondit sur les paroles de la gourgandine d'Erac.

Oh oui, sombre histoire. Bien que le sens caché en soit moins innocent. L'ingénue qui folâtre dans les bois et qui voit le loup ... J'ai bien peur qu'en vieillissant, le romantisme de ces histoires s'estompent quelque peu ...

Il plissa légèrement les yeux vers Astéride, guettant la réaction de son interlocutrice. Une ribaude de renom tel qu'elle ne pouvait ignorer le sens vicié qui se cachait derrière les fantaisies des conteurs. Gaucelm gloussa et alors qu'il allait faire une nouvelle référence, elle l'interrompit en posant un regard gourmand vers le pot de miel.

Dites moi, mon bon Sire, partageriez vous votre encas nocturne ?

Sa Grasseté eu un mouvement de recul naturel. Non mais oh! Ca va oui! Si elle voulait du miel elle n'avait qu'à aller en cuisine, comme il l'avait fait. Non mais c'est vrai ... Il devait aller se coucher ... Et puis, si il avait faim pendant la nuit ... Et si ... Et ... Hmm ... Il fallait se résoudre.

Avec joie!

Ainsi donc, elle souhaitait prolonger l'entrevue, avait-elle vu quelque chose d'intrigant chez le comte? Il prit un air enjoué et poupon et dit alors avec un grand sourire en jouant du couteau sur le pain.

Vous êtes donc amatrice de contes de fées ET de miel? Nous avons des goûts en commun visiblement.

Il gloussa avec bonhommie, s'amusant de sa plaisanterie en tendant une tranche à la soeur du Roy. Et bien, pour une première nuit en Ysari, voilà qui était peu commun, un souper dans les couloirs en compagnie de la Dame d'Erac. Cocasse ...

Pourquoi dès que Gaucelm assistait à un évènement, la nuit précédente était toujours cause de réunion improvisée? Pourquoi !? Il se souvenait encore de la tournure qu'avait pris la veille du mariage et les ingrédients semblaient de nouveau réuni. La nuit, une gourgandine, les sous-entendus ... Bref, étrange loi des séries. En parlant de sous entendus, gaucelm évoqua le double sens des contes, et reçu une réponse ingénue, voire même carrément débile.

Oh...Je ne voyais pas les choses ainsi, mais peut être suis je trop ingénue pour ce genre d'idées saugrenues

Dixit la Ribaude Royale, quand même. Si ça, c'est pas du foutage de gueu... Restons calme et courtois, elle continuait son jeu de rôles, Gaulcem continuerait le sien.

Allons Mon Seigneur ! Un jeune marié tel que vous ne peut se sentir vieux et usé !

Gaucelm gloussa avec innocence, rosissant presque. Tu vas voir, vile gouape d'Erac, on va en reparler du mariage et de ton présent magnifique. Puis, vint l'affront, la demande indécente, le partage de sa petite collation improvisé. Il accepta à contre coeur, et fit bonne figure, alors qu'elle le remerciait avec une hypocrisie presque palpable, même si elle n'en laissait rien paraître. Il se paya le luxe de souligner leurs goûts en commun, ce à quoi elle répondit par une nouvelle envolée hypocrite.

Mais mon cher, votre goût est si sur, votre réputation si propre que l'on ne peut que suivre votre exemple.

Il gloussa joyeusement, se dandinant presque de bonheur, flatté ... En apparence. Il avait bien décortiqué les mots qu'elle avait employé, et le réponse la plus évidente aurait du être: "Tu sais ce qu'elle te dit ma réputation, fille de mauvaise vie!". Pourtant, restant mettre de son paraître et de son être, Gaucelm répliqua avec amusement.

Vraiment ?! Ooooh! ... Vous êtes une vile flatteuse, Madame ...

De nouveau, il gloussa puis, il prit l'air le plus enfantin qu'il puisse, celui du gentil petit garçon triste et s'élança dans sa tirade, tout en étalant le miel doré sur les tranches de pain.

Moi qui pensais que vous ne me portiez guère dans votre coeur ... Depuis ce conclave en Erac. Détestable moment à vrai dire ... L'arrogance de Kazil m'a insupporté! Rendez vous compte! Il me fait mandé en Erac, j'accours aussi vite que possible, et voilà qu'il m'ordonne ceci, qu'il me soupçonne de celà, et tout ça parce que Môssieur est le Sénéchal, Môssieur est Duc ... Je me suis vu forcé de lui rabattre son caquet, même si je n'aurais pas dû m'amuser avec la sombre destinée de Dame Ashenie ... Mais j'apprécie le fait que vous n'en ayez point pris rigueur. Pourtant, même moi me suis trouvé détestable ce jour-là.

Hein? Hein? Sacré filou quand même. Comme souvent quand il partait dans ses explications capillotractés, il semblait d'une sincérité confondante. Et puis quelque part, il y avait beaucoup de vrai là-dedans! Il tendit latartine à la gourgandine et mordit à pleine dent dans la sienne, avec la gourmandise d'un enfant qui découvre les joies du goûter. Et là, où on pourrait imaginer un porc se goinfrant et s'en mettant partout, Gaucelm se montra délicat, mais de bon appétit. Il mangeait beaucoup certes, mais pas salement. Il avala sa bouchée et poursuivit sur le même ton, innocent.

De plus, votre absence lors de mon union avec Elanore, m'avait fait croire à une certaine antipathie de votre part.

Il fit un petit sourire, noir de sens, alors qu'il allait porter l'estocade.

Et votre cher enfant, va-t-il mieux?

Le Gras s'amusait bien à tailler un costume sur mesure au dernier des Sephren. Se dissimulant sous les atours d'un innocent, il montrait son mépris à l'égard du Sénéchal du Roi, sans même se soucier du lien de parenté que Astéride partageait avec le duc du Langecin.

Mon Seigneur...Voyons, vous savez que mon oncle a perdu en très peu de temps ce qui était sa famille. Quel homme dans un tel cas ne perdrait pas un peu de maitrise ? Votre compassion ne peut lui en tenir rigueur. Rendez vous compte, sa belle soeur et son neveu en même temps...Sa douce nièce, son frère...Quel homme ne serait pas souffrance ? Mais je sais que vous lui avez pardonné, vous êtes un homme compréhensif

L'air contrit, à moins que ce soit un air con, dis ... La moue de la soeur du Roy, donc, rappelait les jeunes enfants en lutte entre la révolte intérieure et la semi peur des parents. Elle continuait son jeu, il continuerait le sien, avec la même maîtrise.

Certes, certes ... Je ne lui en tiens pas rigueur. Ma fierté a vivement réagi sur le coup, mais si je pouvais revenir en arrière, je mesurerais mes propos. De mon côté, l'histoire est oubliée depuis longtemps, j'espère que lui aussi, aura su déceler dans mon insolence, une réaction d'orgueil mal placé.

Sortez les violons et les mouchoirs! Le cynisme était bien présent, mais indécelable dans le ton de Sa Grasseté. Il s'inquiéta alors du sort du bâtard de la Gourgandine, levant les sourcils dans une expression des plus innocentes, lui aussi jouer à l'enfant dans un corps d'adulte. Il en devenait presque touchant, si seulement tout cela n'était pas que façade. La réponse fut tout aussi hypocrite sur le fond et sincère en apparence, alors que le Gras engloutissait la fin de sa tartine de miel. Soit dit en passant, le nectar ambré était succulent, laissant un petit coup âpre sur la fin, pas désagréable, qui appelait une nouvelle ration. Tandis qu'Astéride répondait, il se lança dans la coupe de nouvelles tranches.

Oh oui ! Heureusement d'ailleurs et je vous remercie de vous en être inquiété. Vous pardonnerez le coeur d'une mère n'est ce pas ? Abandonner mon enfant malade me brisait l'âme et je n'ai nullement songer l'emmener et ainsi introduire la maladie dans votre maison ! Sire de Melasinir me fut d'un grand secours et il n'a pas tari d'éloge sur la qualité de votre accueil. Le regret de n'avoir pu être présente m'etreint savez vous ? Un mariage est une telle joie. On dit même que le votre fut bénit par Arcamenel en personne ? Vous êtes un homme chanceux ! J'ose espérer que mon présent vous a ravit, c'était le moins que je puisse faire étant donné mon absence.

Pendant ce temps-là, Gaucelm étirait de nouveau le miel sur les tartines, alors que le rouge commençait à lui monter aux joues. Il était bien, finalement ce jeu de rôles était amusant, qui aurait pu penser que passer un moment, avec cette soit disant petite idiote, serait si amusant. Ce miel était délicieux ... Il répondit alors.

Il est vrai que les enfants sont des cadeaux si précieux qu'il est impossible de ne pas les faire passer en priorité. Je n'ai pas encore connu le bonheur d'être père, mais j'espère que bientôt ma mie me comblera de bonheur en m'apprenant une bonne nouvelle.

Il tendit une nouvelle tranche dorée à Astéride, dont le regard laissait supposé, que comme le Gras, elle en reprendrait bien après et il poursuivit, après avoir croqué une petite bouchée de pain mielleux. Il était bien bon ce miel ...

J'ai eu la chance d'accueillir le Gardien d'Arcamenel lors de mes épousailles, en effet. A dire vrai c'est un peu un hasard, il est le compagnon de Dame Katalina Noblegriffon, connaissez vous? L'héritière de Serramire si on se réfère aux textes anciens. Charmante et intelligente Dame que celle-ci, elle m'a fait l'impression d'une Reine ... Bref, elle a répondu favorablement à mon invitation et est venu avec Aerandir Ancalimaë, à notre plus grande joie à Elanore et à moi. Je suis en effet chanceux, et je ne me plains guère de mon sort.

Il gloussa, alors que ses yeux commençaient à chauffer, en même temps que ses paumettes. Ce miel était ... Il souriait presque bêtement, et en vint à l'évocation de l'horreur qu'elle avait envoyé en guise de cadeau, cette chose immonde et ratatinée. Se sentant toujours plus confiant, il lança.

La statue ... Hmm ... Comment dire? ... Affreuse! Tout simplement ... Je m'étonnerai toujours, d'ailleurs, qu'une femme qui porte des toilettes et des parures de votre qualité, à put penser un seul instant que je n'y verrai pas une insulte ... Certes, on dit que c'est l'intention qui compte, mais là quand même ...

... Eh bah dis donc, voilà la première phrase sincère de cette entrevue improvisée. Sincérité? Baisse de l'inhibition et de la retenue? Ce miel était ... alcoolisé? Quelle diablerie avait encore inventé les ysarois? Cela dit, ce miel était délicieux.

Ne vous inquiétez pas, mon oncle est un homme distingué et au parler franc, mais il n'est pas rancunier. Je suis sure qu'il vous a pardonnez vos écarts. Décidement, vous êtes plein de surprise, mon Seigneur ! Il est rare qu'un homme reconnaisse ses fautes

L'erreur est humaine, la reconnaître est adulte, voilà ce que disait mon défunt père.

Il adressa un sourire complice à Astéride, avant de mordre dans sa tartine dorée. Elle le prenait pour un doux idiot, alors que commencer à se dévoiler son ironie. Le jeu devenait de plus en plus intéressant. Il se confia alors sur son désir d'être père à son tour, ainsi que sur ses charmantes rencontres avec Dame Katalina Noblegriffon. Elle répondit du tac au tac alors que Sa Grasseté s'attelait à achever son encas, avide de se reservir, le gourmand.

Katalina est une femme admirable oui quand a son compagnon, disons qu'il se murmure des choses quelque peu...étrange sur son compte, aussi l'ais je un peu évité je l'avoue. Son esprit des plus retors dit on. Mais j'ai beaucoup de mal a imaginer Katalina amoureuse d'un vil sournois, m'est avis qu'elle ne les supporte pas. Fort heureusement son nom relève un peu la noblesse de Serramire.

Tiens, ils étaient d'accord sur une chose, ou plutôt sur une personne. Enthousiaste, il rétorqua.

Oh il aime à parler en énigme et se pavaner à demi nu. En dehors de ça, il est plutôt un compagnon charmant. Quand à Katalina, je ne comprend pas pourquoi votre frère le Roy, n'a pas redonner sa gloire d'antan au nom des Noblegriffon et fait d'elle la marquise.

La lame de son couteau attaquait de nouveau la miche de pain, alors que ses yeux se troublaient sous l'effet de l'hydromel épais. Il gloussa avant qu'Astéride n'évoque la monstruosité qu'était son présent. Il y répondit avec sincérité et fut saisi par celle qu'employa la soeur du Roy.

Mélisandre a toujours eu des gouts plutôt horrible, cela dit, j'étais très contente de m'en débarrasser. Et on ne pourra pas dire que ce fut un pingre présent !

Ce miel faisait son chemin chez elle aussi ... Il renchérit en s'étonnant de la main tendue vers lui. Elle avait dévoré sa tartine presque plus rapidement que lui. Il s'exclama.

Diantre! Vous êtes une grande gourmande! Je pensais que votre réputation était faussée.

Il partit dans un gloussement alcoolisé, se sentant pousser des ailes pour franchir les barrières de l'inhibition, manquant de basculer en arrière, puis, il poursuivit.

Vous défendez votre oncle, mais accablez votre mère. Pourtant, Mélisandre n'était pas connu pour apprécier les fantaisies ... Peu importe à vrai dire, elle doit être au fond d'un coffre en attendant que je fasse comme vous.

Il gloussa à nouveau, puis tendit une nouvelle tranche d'hydromel onctueux. Ces ysarois avait de ses idées. Il mordit enfin dans la sienne se retournant alors qu'un étrange bruit de ferraille retentissait non loin des escaliers à quelques mètres d'eux.

Quoi?! Qu'est-ce??

Tut tut tut ! Sire Gaucelm ! Je les entends vos sous entendu ! Alors permettez moi tout de même de vous dire que...Non, je ne couche pas avec mon frère, ni avec Aristide d'Afel, ni avec mon palfrenier et encore moins avec mon valet de chambre. Cela dit, je l'avoue, ces tartines sont délicieuses.

Allons, allons, Madame. Vous m'attribuez des pensées qui ne sont pas les miennes. Je parlais de gourmandise culinaire. Oui, très savoureuses en effet.

Il eut un gloussement alcoolisé, qui laissait bien paraître l'hypocrisie de sa remarque. Elle poursuivit sans se démonter, visiblement sous l'effet de ce miel de vérité.

Enfin, c'est pas mieux que d'épouser une enfant a peine femme juste parce que son pôpa possède Etherna et pouvoir clamer haut et fort que l'on est un sauveur et un loyal défenseur de sa majesté. Mais c'était bien joué !

Oh la petite insolente! Bon, certes, elle n'avait pas tord sur le fond, ni sur la forme d'ailleurs, mais exposer ça froidement était déplacé ... Quand même ! Il se permit de rectifier, levant l'index dans un geste professoral.

Ah non ! Vous faites des raccourcis un peu rapide, Astéride. J'ai libéré Etherna et J'Ai fait de Borys de Caerlyn, le baron. Borys est le premier seigneur ethernien à avoir rejoint mes forces contre les rebelles, il est normal que j'ai appuyé sa candidature à ce poste auprès du Roy, votre frère. Quand à Elanore ... Elle est en âge de se marier, je ne vois pas où est le problème.

Il s'appliquait à faire de nouvelles tartines, alors que la discussion dérivait sur Katalina et son aptitude a régné.

Oh oui, Katalina aurait fait une marquise parfaite ! Même ! Elle aurait elevé sa terre au rang de Duché ! Malheureusement...Mon frère ne lui a pas donné cette terre et il devait avoir ses raisons.

Exactement! Une marquise parfaite! Ravi de voir que nous partageons cet avis.

Un bruit métallique vint interrompre la discussion. Enfin, quand je dis un bruit, je pourrais décrire un bordel sans nom, comparable à un concert de percussion sur casserole, mais focalisons nous plutôt sur le casque virevoltant qui heurtait les murs en zigzaguant et en sautillant vers les deux nobles, assis en plein milieu du passage. Après un crash test effectué sur le mur non loin, le casque roula jusqu'à la jambe du Gras, qui observait avec un regard à la fois dubitatif et curieux, un regard de soudard, dirons certains. Astéride éclata de rire, avant de se pencher et de sortir l'immonde bestiole qu'elle portait souvent sur son épaule. Quelle monstruosité visqueuse et froide.

Ouiiii, je me souviens ! Enchanté, Seigneur Dräke ... Voulez-vous vous joindre à nous et partager cette collation?

Il gloussa ... Il était en train de parler à un lézard, non mais quelle déchéance de l'esprit ... Lui, l'orateur, le manipulateur, le rhétoricien accompli, le voilà en train de faire la discussion à un reptile minuscule. Il déposa un petit morceau de pain couvert de miel sur le sol, et tendit ensuite une nouvelle tartine à Astéride.

Voilà pour vous deux

Mais justement, là est la manœuvre parfaite ! Après tout, personne ne peut réellement affirmé qu’une révolte a réellement eut lieux n’est ce pas ? Ce cher Borys ne dirait jamais mot contre vous. Non je l’avoue, vous êtes diablement sournois, mais il faut croire que le royaume a besoin d’homme tel que vous, tant qu’ils restent loyaux a leur souverain bien sur.

Vous avez plus de dix milles odélians qui peuvent témoigner de cette rébellion, et toute une baronnie, qui peut témoigner de la fuite de sa souveraine. Je préfère éviter de parler de l'épisode avec les chevaliers que votre oncle m'avait confié ... Les chevaliers de la Rose Blanche ont pu, eux aussi, se rendre compte de la traitrise de l'époque.

Le ton, bien qu'imprécis à cause de l'alcool qui lui picotait les neurones, n'était pas hésitant, et il connaissait tellement sa leçon, que même en pataugeant dans les vapeurs d'alcool, il parvenait à maintenir le fil des évènements. Il renchérit une fois de plus, sur la sournoiserie.

Sournois, me semble un bien mauvais mot ... Si j'étais l'homme à qui vous prêtez ces machinations, je serai plus brillant que sournois. Comme dit le proverbe, on peut duper milles fois une personne ... Non ... On ne peut pas duper milles personnes une ... Non ... Comment est-ce déjà? ... On ne peut pas ... Peu importe !

Triste constat d'un homme que l'alcool est en train de vaincre et qui perd de sa verve légendaire ... Déchéance classique d'un homme de pouvoir incompris, qui noie son génie dans les plaisirs éphémères de l'ivresse, au bras d'une jeune femme désinhibée qui partage un dernier repas de quiétude dans les couloirs sombres de la péninsule ysaroise ... Ou pas ...

Le lézard fit alors un entrée fracassante, dans tous les sens du terme, et la chose immonde et pustulente qui servait de compagnon à la soeur du Roy fut présenté à Sa Grasseté par une duchesse d'Erac, des plus amusées. Le reptile s'agita frénétiquement dans les airs avant de se jeter avec avidité sur la bouchée de pain mielleuse, même si elle ne valait pas celle d'Astéride qui se jetait sur la sienne, après avoir ôté son peignoir d'un geste gracile et expert. Une maîtrise du déshabillage assez exceptionnelle. L'oeil embrumé du Gras parcourut les courbes qui se dessinait sous le fin vêtement de nuit, et il fallait avouer que ça valait le coup d'oeil. Allons, mon Gras, un peu de tenue, ta femme t'attend dans ta chambre, ne te laisses pas distraire par cette croupe élégamment cambrée, qui laisse présager le fessier rose et galbé et la cuisse ferme ... Par les Cinq ! ... Heureusement qu'elle changea de sujet, et que son attention, faussée par les incessantes coulées d'hydromel, se reporta sur autre chose que le physique de son interlocutrice. Mais elle avait raison, il faisait chaud tout d'un coup.

Dites moi, Gaucelm, vous permettez que je vous appelle Gaucelm n’est ce pas ! Au point où nous en sommes…Enfin bref ! Que pensez vous de ces trois jours de bals ? Pour ma part, j’aurais aimé faire l’impasse, j’ai un mariage a préparé tout de même !

Il sourit, elle avait osé prononcer son nom. La barrière de l'étiquette venait d'être ouverte, et c'était tant mieux, il n'avait pas vraiment envie de passer son temps à donner du "Dame" par-ci et du "Madame" par là, à sa compagne de beuverie.

Eh bien, c'est mon prénom, il fait pour être utiliser

Il gloussa ... Une fois ... Je m'arrête un instant pour que vous visualisiez bien l'image et décortiquiez le son.

...

Il poursuivit.

Oh comme je vous comprends ! Traverser la Péninsule toute entière pour venir m'ennuyer devant des ménestrels au talent plus que limité, j'aurai préféré y échapper. Mais voyez-vous, Elanore s'est prise d'affection pour ma cousine. Et elle aime danser. Et elle s'est tellement enthousiasmé à cette idée, que j'ai consenti à venir. Elle nous a d'ailleurs fait faire des costumes magnifiques pour le bal masqué. Nous allons faire sensation, je vous le garanti ... Mais qu'est-ce que ?

Le lézard observait Sa Grasseté en agitant la queue comme un petit chien, le chargeant et heurtant sa cuisse massive, avant de rebondir vers l'arrière. Gaucelm s'était saisi du couteau, prêt à faire rendre gorge à cet adversaire impudent, qui osait porter atteinte à son intégrité physique. La lutte serait brève, l'exécution rapide et sans douleur, il n'aurait pas le temps de regretter son geste ... Puis, l'idée que cette chose était la propriété d'Astéride lui revint en tête, et il se tourna vers la jeune femme.

Que veux ce machin ? Quel est son nom d'ailleurs ? ... Encore du miel?