Ombre en Alonna

Une nuit estivale mais bien sombre. Celle qui annonce des choses funestes, sanglantes, irrémédiables. Celle qui s'offrait à un groupement d'individus non identifiés qui s'avançaient dans la nuit, de manière presque solennelle. Quel bon vent amenait tout ce troupeau de bandits, renégats, mercenaires et autres voyous de bas étage à s'avancer ainsi vers une mission à haut risque (ce qu'ils ignoraient pour le moment), guidés par une silhouette qui avait tout l'air d'appartenir à une femme ?

Il n'en savait rien, à vrai dire il n'en avait pas grand chose à faire. Le fait était là : il s'était fait engagé. Le calcul était rapide: engagement, mission, réussite, argent. Et bien qu'il connaissait un tas de drows présents ici, des anciens partenaires, amis, voir ennemis parfois, il ne se faisait pas d'illusion: tout ce qui les intéressait était l'argent, tout comme lui. Et la récompense promettait d'être assez juteuse vu que Liliana, celle qui les avait engagé, venait de leur révéler que leur objectif serait d'attaquer une délégation elfique de l'Anaëh en pèlerinage vers la capitale humaine, Diantra.

Bien qu'il comprenait qu'Iymril et d'autres drows soient réticents, Naïm lui était excité comme d'habitude, à l'idée de faire couler le sang de ces bâtards de sylvains. Quelques mois déjà depuis sa dernière mission, le mercenaire en avait presque contracté des fourmis dans la main droite, celle qui tenait à l'instant même son cimeterre, dessinant des motifs sur le sol autour du campement pour passer le temps. Temps qui s’avérait long pour le drow à la lame facile avec tout ce bla-bla protocolaire. Mais il s'avait que plus ça parlait, mieux ça se passait par la suite. Laisser parler les femmes pour que les hommes puissent agir sereinement.

-"Qu'allons-nous faire de cet équipement elfe ? Quelle quantité dois-je créer ?" demanda l'armurière longue en taille

« Voila, on en vient au fait. » murmura t-il à Iymril aux cotés duquel il s'était placé, les yeux rivés sur Liliana.

Une fois obtenue ses réponses, l'attention de l'armurière concernant le plan fut légèrement atténuée, une part de son esprit travaillant déjà à l'élaboration des armes et à l'utilisation de ses resources, temps, espace et matière. Néanmoins elle retint l'essentiel du discours de l'espionne, approuvant intérieurement la finesse et la perversité de la machination. Une fois le calme revenu, l'armurière se mit à l'oeuvre. Vidant son esprit, elle sortit d'une de ses bourses une petite pierre gravée du symbole des Kel'Razia qu'elle posa au sol près du feu de camp. Elle prononça ensuite les mots qui guiderait sa magie et matérialiserait son enclume de pierre :

-"TORBOR"

On put sentir une légère pulsation dans l'air, un petit frissonement dans le sol, et le roc apparut, semblant littéralement jaillir de terre. Les Drows proches reculèrent instinctivement en voyant la magie puis se détendirent en constatant qu'elle ne semblait pas néfaste pour eux. L'armurière monta sur ce pied d'estal de fortune et, surplombat désormais le groupe de plusieurs pieds, déclara d'une voix forte:

-"Je vais avoir besoin d'aide dans mon travail. Premièrement il va me falloir du bois pour alimenter ce feu. Ensuite, j'aurais besoin de métal. Du fer principalement, il m'en faudra plusieurs kilos, mais également de l'argent, plus sa qualité sera élevée, mieux cela vaudra. Cela fait déjà deux groupes à constituer, mais pour ceux qui manqueraient encore d'activité dans ce campement, venez me voir, j'ai de quoi vous occuper."

Arkezia redescendit avec un petit sourire aux lèvres en voyant les mouvements se faire dans le campement. L'armurière se tourna alors vers Liliana qui allait certainement diriger la création des expéditions. Arkezia l'avait peut-être un peu prise de court.

-"Le fer peut-être trouvé n'importe où, armes, épées, haches, outils de la ferme, il suffira, je pense, de fouiller les villages voisins. L'argent par contre sera une autre pair de manche, c'est un métal noble, il faudra sans doute prendre plus de rique, mais il m'est cependant nécessaire pour les finitions des armes. Que la lame d'Uriz soit avec toi ma soeur."

La forgeronne rassembla les deux épées qu'elle transportait toujours avec elle, en cas de vente spontanée, près des flammes. Usant une deuxième fois sa magie, elle plongea sa main gantée au coeur du brasier rougeoyant et y dessina la rune de sa famille encore une fois. Les flammes furent pris d'un violent sursaut avant de revenir à leur état normal. Cependant la chaleur autour de ce feu de camp gagna rapidement en intensité. Lorsqu'elle fut à la bonne température, l'armurière saisit une première épée et en déposa la lame au coeur de la fournaise. En quelques minutes elle fut suffisamment ramollie pour qu'Arkezia la ressorte et la pose sur son enclume. Elle détacha le marteau de sa ceinture, et entreprit de redonner à l'objet une forme plus...elfique. Bientôt le battement rythmé du marteau sur l'enclume retentit, un rythme que les mercenaires allaient devoir s'habituer à entendre pour les 48h à venir.

Ainsi donc leur mystérieuse mission reposait en grande partie sur les épaules de cette imposante armurière au regard de braise. Si la majorité des hommes présents avaient vécu assez longtemps et tranché assez de tête pour ne pas avoir peur de quelque magie faisant sortir la roche de la terre, la femme avait de quoi intimider les soldats plus jeunes et plus inexperimentés, son port fier et autoritaire n'en démentait pas. Si les deux femmes, par une sorte d'étrange alchimie semblaient s'être compris en quelques paroles, les sourcils de Naïm semblaient se lever de plus en plus haut à mesure que les missives et les ordres étaient donnés... Où tout cela les mènerait-ils donc ? Il espérait que Liliana n'allait pas les jeter dans l'antre du diable, il ne connaissait pas suffisamment les terres d'Alonna pour être totalement serein.

Le puissant mâle au regard rougeoyant et à la longue chevelure claire chercha des yeux ses deux camarades mercenaires avec qui il avait fait la route, Yaril et Sendar. Si ces deux là avaient du mal à réprouver leur envie d'affrontement et de meurtre telles deux bêtes assoiffées de sang, Naïm lui savait faire la part des choses et se servait d'avantage de son cerveau. Ainsi il n'avait pas eu trop de mal à les convaincre de rester à ses côtés, pour son confort personnel avant tout (être entouré de deux armoires à glace n'était pas un luxe en dehors des territoires drows), en échange d'une garantie de survie plus élevée. Car un cerveau, c'était bien utile aussi.

-"Je vais avoir besoin d'aide dans mon travail. Premièrement il va me falloir du bois pour alimenter ce feu. Ensuite, j'aurais besoin de métal. Du fer principalement, il m'en faudra plusieurs kilos, mais également de l'argent, plus sa qualité sera élevée, mieux cela vaudra. Cela fait déjà deux groupes à constituer, mais pour ceux qui manqueraient encore d'activité dans ce campement, venez me voir, j'ai de quoi vous occuper."

Naïm se tourna vers la vingtaine de drows qui l'entouraient, et il en désigna dix par défaut. En deux temps trois mouvements notre mercenaire prit en main les opérations qui visaient à apporter le plus de matériel possible et de le mettre à la disposition de la forgeronne, tout en restant d'une discrétion absolue. Ce dans quoi il excellait, après tout. Mais le but était aussi d'accomplir les tâches en tout sécurité. Se tournant vers les sombres désignés, il les sépara en deux groupes, les pointant tour à tour avec son cimeterre.

« Vous cinq, vous irez chercher du bois, rapidement, et en faisant le moins de bruit possible. Par petits a coups, ou en ramassant ce qui traîne. Ne vous éloignez pas à plus de vingt mètres, il y a de quoi faire dans les environs. »

Les cinq concernés s'éloignèrent dans l'ombre des arbres avoisinants, Puis, se tournant vers l'autre moitié :

« Les cinq autres, vous resterez avec la Kel'Razia et lui obéirez. Veillez à ce qu'elle ne manque de rien et que la forge soit toujours alimentée. »

Enfin, il se retourna vers les trois colosses à sa droite

« Yaril, Sendar, et toi, vous monterez la garde autour du campement. Si vous voyez quelqu'un ou quelque chose de louche, abattez-le. »

Acquiesçant les ordres d'un geste courtois, ils commencèrent à faire leur ronde, tandis que Naïm s'assura avec minutie que chacun vaque à son devoir, les yeux balayant sa partie du campement. Ses doigts glissaient sur le cimeterre acéré qu'il tenait en bout de bras. Dans le battement du marteau de la forgeronne qui s'installa, il chercha des yeux Liliana, se dirigea vers elle et s'inclina brièvement.

« Madame, j'ai sollicité une dizaine d'hommes pour faire tourner la forge et ramener le bois, le reste vous appartient. Je veux bien aller fouiller les villages voisins en compagnie d'un autre groupe, si vous le souhaitez. »

Le monde de l'armurière s'était réduit à son travail et son environnement proche. Elle n'avait plus le temps de faire attention au reste du campement aux discussions ou autres "divertissements". Son travail l'appelait. Sous les coups réguliers de son marteau, la lame se mua, ses excroissances pointues furent ravalées, le tranchant se redressa un peu, les gravures furent comblées, la forme fut épurée. Arkezia ne voyait plsu le temps passé. Elle ne se rendit pas tout de suite compte que certains des Drows avaient été envoyées à elle et attendaient ses ordres. Chaque coup de marteau avait un but précis, elle devait être le plus efficace possible, elle n'avait que peu de temps et pourtant la manufacture elfe était particulièrement précise, c'était un véritable défi pour la grande Sombre. Elle ne s'aperçut de leur présence que lorsqu'elle releva la lame devant ses yeux pour évaluer l'avancement de son travail.
Elle haussa un sourcil en dévisageant de ses yeux gris les nouveaux venus. C'étaient des hommes habitués aux combats, ils étaient forts et lui serait très utiles.

-"Que trois d'entre-vous creusent le sol à cet endroit précis" commença-t-elle en pointant du doigt une croix qu'elle avait tracé au sol, "Je veux un trou de deux pieds de profondeur, deux de large et quatre de long, vous y allumerez le feu et serez chargé de son entretien, les flammes doivent avoir une couleur variant entre le orange et le jaune, pas de rouge. Les deux autres, allez me chercher un tonneau, ou un quelconque récipient me permettant de tremper intégralement une arme de cette taille," poursuivit la drow en brandissant la lame encore chauffée à blanc, "remplissez-le d'eau et mettez-le ici. Vous y ajouterez ensuite la terre de l'excavation et la mélangerez à l'eau. Attention je veux que l'ensemble reste liquide. Allez !"

Les intéressés se mirent en mouvement et Arkezia reprit son travail. Lorsqu'elle releva une seconde fois la tête de son oeuvre, les noirelfes finissaient de mélanger la terre à l'eau et un feu imposant crépitait dans le petit four. C'était parfait. L'armurière redistribua quelques ordres d'installation puis attribua les rôles, le souffleur, celui chargé du bois, un autre des métaux qu'il devrait purifier d'éléments autres que la lame. et les deux derniers devant créer des tiges pour flèches et des lanières de cuir pour les poignées. Elle souleva ensuite l'arme désormais quasiment finie et avec une légère appréhension, la trempa dans l'eau boueuse. Le sifflement habituel fut fortement atténué ce qui étonna la forgeronne, lorsqu'elle retira la lame, elle était déjà partiellement polie et affichait une teinte très proches des armes elfes apportées par Liliana. Une technique des plus intéressantes. Et le travail reprit. Arkezia grava sur la lame quelques symboles similaires et façonna la garde. Il ne manquait plus que les finitions d'argent sur le plat et tout serait en ordre, ils s'agissait en fait de remplir les gravures avec le précieux minerai.
La Kel'Razia déposa l'arme près de la roche et saisit sa jumelle encore de facture Sombre et recommença son manège. Les plans des équipements Elfes étaient glissés dans une encoche de la pierre qu'elle avait fait et elle les consultait de moins en moins régulièrement.
A l'heure du repas elle connaissait la technique et les dessins par coeur et avait adopté son rythme. 6 sabres étaient disposés à droite de l'enclume de la Drow mais elle savait que dans les heures qui suivrait son rythme de production allait augmenter, c'était le temps qu'elle se fasse la main.
C'est à la fin du repas que revinrent les expéditions pour le métal. Pour l'instant la Drow avait dû faire avec le rabiot inutile qui se trouvait dans le campement, vieille dagues, ustensiles de cuisine... Elle fut heureuse de voir qu'elle ne manquerait pas de matière

-"Joli travail" gratifia-t-elle les groupes., "J'ai déjà conçu 6 armes", Enchaîna-t-elle à l'adresse de Liliana et en désignant du regard deux dagues, trois épées longues aux formes élégantes et un cimeterre à la courbure gracieuse, "Je pense en avoir à peu près le double d'ici le repas du soir. Je ferai ensuite les flèches, cela sera plus rapide. Cependant j'ai toujours besoin de l'argent pour achever le tout. Si je veux pouvoir donner une arme à suffisamment d'entre nous d'ici demain soir, il faudra qu'il me soit ammené avant demain midi. Si tout se passe bien, demain soir je pourrais donner à chacun une épée elfique et nous aurons entre 50 et 100 flèches sylvestre prètes à l'emploi."

La grande Drow termina sa ration au goût sans importance se leva et détendit les muscles de ses bras avant d'enfiler à nouveau ses gants de métal. Elle avait commencé à suer et ses vêtements de cuir brut lui collaient à la peau en une sensation qu'elle avait appris à apprécier. Balayant le détachement du regard, elle remarqua que la plupart de ses camarades posaient sur elle des yeux plein de respect voir même d'admiration ou d'envie. Elle savait que cela n'était pas dû à sa beauté, ou a ses formes, mais à son talent et son endurance. Cela lui réchauffa le coeur et galvanisa son moral et ce n'est qu'avec plus d'ardeur qu'elle se remit à la tâche.
Coup après coup, trempe après trempe, lame après lame, la routine s'installa, et Arkezia put de nouveau prendre conscience de son environnement. Elle remarqua qu'un Drow en particulier s'était élevé en dirigeant provisoire de la petite troupe fixe au camp et qu'il menait ses congénaires d'une main de maître. Un mâle à la chevelure d'ivoire qu'Arkezia se jura d'entretenir une fois son travail achevé. Même dans le Doeb on sait qu'il est important d'être proches des gens influents.
Après la finition d'une autre arme, les métalliques iris de l'armurière croisèrent le regard rubis du chef improvisé. Elle entendit qu'on l'appelait et capta le nom de "Naïm". Un sourire de gratitude étira les lèvres de la Kel Razia puis elle se pencha et se reconcentra sur son ouvrage.

A peine notre mercenaire avait-il distribué les rôles au sein du camp que leur leader s'approcha de lui, visiblement reconnaissante quant à son travail d'organisation.

« Tu es Naïm, c'est bien cela ? »

« Affirmatif, madame, le seul et l'unique. » répondit le mâle d'un ton ironique.

« Tu sembles avoir un certain talent pour commander les hommes. Cela pourrait te mener loin si tu t'en sers correctement...
Nous n'allons pas nous approcher des villages. Ce serait prendre trop de risques: il ne faut surtout pas que les humains s’aperçoivent de notre présence. Pour ce qui est des matières premières, Yazdrin et moi allons nous charger de les ramener. Ne t'inquiète pas pour cela.
En attendant, j'aimerais que tu restes ici pour superviser l'organisation du camp et l'approvisionnement de la forge. Il me faut quelqu'un sur qui je puisse compter pour faire tourner le tout pendant mon absence, et tu m'as l'air parfaitement capable de remplir ce rôle. »

« Vous pouvez compter sur moi. » se contenta t-il de lui répondre avec courtoisie, reprenant un air plus sérieux que jamais.

Il la regarda s'éloigner, puis tourna les talons pour revenir vers la forge, presque déçu de ne pouvoir aller saccager un village voisin sous prétexte de chercher des ressources. Les opérations continuèrent et s'intensifièrent au fil des heures, ne laissant que peu de répit à la forgeronne et à ses acolytes qui s'affairaient autour d'elle. Naïm pendant des heures durant tourna et retourna son cimeterre dans tous les sens entre ses mains gantées de noir, supervisant d'un regard autoritaire le campement qu'il tenait d'une main de fer, à la demande de Liliana. Il ne se leva de son tronc d'arbre que lorsqu'il ce fut l'heure du repas, et veilla à ce que tous les hommes se partagent les mêmes rations, de façon équitable.

Avalant sa portion rapidement sans vraiment la savourer, il fit plusieurs rondes autour du camp, à l'avant-poste, remplaçant Yaril et Sendar pour qu'ils puissent se reposer et manger à leur tour... Rien à signaler aux alentours, on aurait dit que les dieux laissait le champ libre à la troupe de sombres pour concevoir leur plan machiavélique. Plan qui consistait pour l'instant à aider Arkezia à forger le plus d'armes possibles. Le périmètre sécurisé, il retourna auprès de l'armurière, vérifiant qu'aucun des hommes ne rechignaient à la tâche. Se saisissant d'un des sabres qu'elle venait de fabriquer, il l'observa avec attention, admiratif du travail de la Kel Razia.

« Vous êtes drôlement douée dans votre travail. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, je suis votre homme. Qui ne serait pas ravi d'apporter sa pierre à l'édifice. » lui fit-il avant de tourner les yeux vers l'un de ceux qui alimentaient le feu.

« Allons mon frère, du nerf, la guerre n'attend pas ! » finit-il avant de s'éloigner, non sans avoir jeter un regard intéressé vers Arkezia.

Après le retour de Liliana et du métal Arkezia avait redoublé d'ardeur, s'appliquant toujours autant à la tâche. Avec la nuit tombante, l'activité du campement ralentit. Les Drows partentse coucher les uns après les autres, quelques uns restent au coin du feu à observer la forgeronne ou à discuter. D'un geste, Arkezia renvoie ses "aides", pour qu'ils aillent se reposer également. Il ne lui restait que deux lames à finir, après elle ferait quelques pointes de flèches avec les flammes restantes et elle irait aussi rejoindre le pays des rêves. Aller encore quelques coups et cette lame aurait la forme voulue.
Un coup...l'armurière entendit un bruit sourd au loin
Deux coup, le bruit s'approchait, dans la courbure de la lame, la Drow crut appercevoir le sourire que lui avait adressé Naïm. Etrange, elle ne pensait pas qu'il l'avait autant marqué. Ce doit être la fatigue.
Trois coup ? quatre ? elle ne savait plus bien désormais. Son travail la réabsorba complètement, et l'éreintement jouant, elle devait puiser dans ses capacités de réflexions pour exploiter celles de forge.
Le bruit des chevaux fatigués et renâclant suffit tout de même à la tirer de sa gangue de concentration. La Drow à la peau mi-suie releva les yeux et salua le chef de la seconde expédition. Son oeil expert capta presque instantanément le reflet argenté dans les fontes des chevaux. Un sourire de satisfaction étira les lèvres de la Kel Razia

-"Je vois que vous rammenez de l'argent, je t'en remmercie Yazdrin. Déposez-le ici, ce sera parfait, puis allez vous reposer. Liliana dort déjà, vous êtes revenus bien tard."

Voyant que les hommes étaient trop fatigués pour répondre autre chose que "oui", elle se remit à sa tâche. Les pointes de traits se succèdent sous ses yeux perçants mais dont les cernes sont de plus en plus apparants. Lorsqu'elle sent son bras douloureux à la simple idée de lever une fois de plus le marteau, elle s'arrête. Le calme qui l'envahit soudainement devient presque assourdissant.Après quelques secondes elle s'y habitue et sent ses tympans se délecter de ce silence bien mérité. Regardant autour d'elle, elle réalisa qu'aucun emplacement ne lui avait été dédié pour se reposer ou bien elle n'avait pas prit le temps de demander où elle passerait la nuit. Elle repéra la silhouette du Drow aux longs cheveux pâle avec lequel elle avait échangé quelques mots dans la journée. Sans réfléchir, et sans vraiment savoir pourquoi, l'armurière s'installa auprès de lui puis ferma les yeux et s'endormit instantanément our presque. Elle s'entendit tout de même murmurer à l'adresse du guerrier:

-"J'espère que ça ne te dérange pas que..."

Après une nuit sans rêve, Arkezia se réveilla en sursaut avec la désagréable impression d'avoir trop dormit. Pourtant le camp reprenait tout juste son activité. Elle chassa sa torpeur du mieux qu'elle put et se leva. Naïm n'était plus à côté d'elle....peut-être n'y avait-il jamais été ? Peu importait...
Après avoir prit, ou plutôt engloutit, son repas, l'armurière attrapa du regard ses assistants de la veille et tous se remirent au travail. Ils commencèrent par finir les flèches puis la forgeronne grava chaque arme de symbole particuliers et chaque pointe de flèche fut ornée de traits ondulés.
A l'heure du midi, tout était finit, il ne lui restait qu'à couler l'argent.

Le travail ne fut pas aisé, bien que dans les affaires des groupes se trouvaient un excellent récipient résistant aux hautes chaleurs, l'armurière dut recourir plusieurs fois à la magie pour obtenir la puissance thermique nécessaire à l'accomplissement de sa tâche dans les délais.
Alors que les premiers rayons de soleils déclinaient, la forgeronne se rendit auprès de Liliana, sa dernière création en main.

-"Je viens de finir, Liliana, au total nous disposons donc de quatre dagues, six épées longues et deux cimeterres prêts à l'emploi et identique aux originaux. Sans oublier les 72 pointes de flèches qui sont actuellement en train d'être assemblées sur leurs tiges par les Drows qui m'ont aidé. J'espère cela suffisant."

Faisant reposer la lame sur ses deux mains, la Drow tendit l'arme vers sa consoeur. Une fois saisit elle poursuivit:

-"Si cela vous convient, j'aimerais aller éteindre le feu et me reposer"

Car même si elle ne le montrait pas, Arkezia se trouvais dans un état de fatigue extrêmement avancé. Elle ne s'en rendait pas compte mais elle avait tout juste dormi deux heures, et son rythme de travail forcé avait poussé son corps dans ses derniers retranchements. Lorsqu'elle quitta l'espionne ce fut pour se diriger d'instinct vers le même coin que là où elle avait dormit la veille. Elle fit signe à ses assistants de recouvrir le feu de la forge et se laissa tomber à plat ventre sur une couverture. Tournant la tête de côté, elle aperçut Liliana qui avait prit la parole et Naïm non loin, elle adressa un dernier sourire à celui-ci avant que la fatigue et l'épuisement ne viennent une seconde fois à bout de sa conscience.



HRP : navré du retard, si quelque chose ne va pas dites-le moi, sinon eh bien je crois qu'on va effectivement pouvoir avancer. Considérez qu'Arkezia va passer une TRES longue nuit et qu'elle ne sera pas disponible avant le début de la matinée prochaine.

Arn avait du mal à dormir. Sa vieille blessure de guerre l’élançait de nouveau. Cela arrivait parfois. La vieille Brunda affirmait que c’était un mauvais présage, mais il ne croyait pas à ce genre de sottises.
L’homme d’une cinquantaine d’années, les cheveux grisonnants au niveau des tempes, était un vétéran de l’armée d’Alonna. Il avait défendu sa patrie contre les drows lorsqu’ils avaient tenté d’envahir la péninsule dix ans auparavant, et l’avait payé d’une blessure sévère à la hanche. Aujourd’hui encore celle-ci lui rappelait parfois le tribut prélevé par la guerre.

Réalisant qu’il n’arriverait probablement pas à fermer l’œil avant un bon moment, Arn se dit qu’il pouvait autant en profiter pour aller prendre l’air. Il se leva, s’habilla sommairement et sortit à l’extérieur de la chaumière. L’air était doux. Une légère brise nuptiale passa sur son visage. En cette heure tardive, le village dormait paisiblement.

En passant près de la place centrale, Arn aperçut une forme adossée à la margelle du puits. Le vieux soldat sourit en reconnaissant de loin la silhouette de Jared. Comme souvent, le jeune homme avait dû donner rendez-vous à la fille Lascaux. La moitié du village était au courant des escapades nocturnes de ces deux-là. Malheureusement pour lui, Iris n’était pas toujours présente à l’heure convenue, et on retrouvait de temps en temps le pauvre garçon le lendemain matin, endormi dans un coin du village.

Arn s’approcha de l’autre côté du puits, et s’adressa à la tignasse brune qui dépassait en face.
« Il se fait tard, fils. Tu devrais rentrer chez toi. »
L’intéressé ne réagit pas. Il devait l’avoir entendu s’approcher. Arn reprit sur un ton un peu plus bienveillant :
« Ecoute, je ne pense pas qu’elle viendra encore ce soir. Ce sera pour une autre fois mon garçon. Rentre chez toi à présent. »
Jared ne répondit toujours pas. S’était-il endormi ? Arn fit le tour du puits.
« Fils, est-ce que tu m’entends ? Tu… »
Il s’interrompit en apercevant le visage de Jared, figé dans une expression d’horreur mêlé de surprise. Un sourire sanglant s’étirait en travers de sa gorge.

Arn resta sous le choc de sa macabre découverte pendant quelques instants.
La flèche qui se planta soudain dans son épaule lui fit reprendre ses esprits de manière brutale. Ses vieux réflexes de soldat reprirent le dessus et il se mit à courir. Ignorant la douleur qui irradiait dans son bras et les flèches sifflant autour de lui, Arn se précipita en direction de la petite chapelle de Néera. Le village était attaqué, il fallait qu’il donne l’alarme ! A l’entrée du bâtiment, une cloche suspendue permettait d’annoncer le début des cérémonies religieuses. Arn se dirigea droit dessus, courant de toutes ses forces. Quelques mètres seulement le séparaient encore de l’instrument.
Un choc dans son dos le fit tomber en avant, et il se rattrapa à la première chose qui lui tomba sous la main. Une chaîne. L’instant d’après, le son grave de la cloche retentit dans la nuit.

Arn expira profondément. Il ne sentait plus ses jambes. La flèche avait du toucher sa colonne vertébrale. Avec beaucoup d’efforts, il se retourna pour s’adosser à la porte de la chapelle. Ses yeux fatigués distinguaient à travers un voile flou le village, dont les lumières s’allumaient les unes après les autres alors que les habitants sortaient voir ce qui se passait. Il vit les formes sombres des guerriers sortir de nulle part pour se jeter sur les villageois encore à moitié endormis. Il vit ses compagnons, ses connaissances, ses amis tomber sous les flèches et les coups. Leurs cris et hurlements de panique résonnaient à ses oreilles. Ceux qui tentaient de résister ne tenaient pas bien longtemps et rejoignaient les corps au sol. Peu après, les premières flammes commencèrent à s’élever dans le ciel nocturne tandis que les masures s’embrasaient les unes après les autres.

Une larme roula sur la joue du vieil homme alors qu’il observait, impuissant, brûler sous ses yeux tout ce qui lui était cher. Il sentit sa respiration s’alourdir alors que les bruits de la bataille lui parvenaient de plus en plus faiblement. Dans son champ de vision apparut soudain la silhouette élancée d’un guerrier en armure noire. De longs cheveux blancs et une peau d’ébène étaient visibles sous sa capuche.

Arn ne chercha pas à se défendre. Il savait de toute façon qu’il n’en était plus capable. Ses lèvres formulèrent un « Pourquoi ? » silencieux, que l’elfe noir ignora complètement. Sa lame plongea droit dans le cœur de l’homme.
Arn eut quelques soubresauts, puis son corps se relâcha et il rendit l’âme. La dernière chose qu’il vit fut un visage empreint de cruauté et de délectation qui le regardait d’en haut.

La nuit précédant le raid avait été courte, bien trop courte. A peine s'était-il assoupi qu'il avait été appelé pour faire la ronde à son tour, laissant Arkezia, qui l'avait rejoint un peu plus tôt, seule dans son sommeil. A midi le lendemain, l'armurière avait déjà achevé sa mission, prouvant à tous les mâles qui l'entouraient à quel point elle était diablement efficace. Une nouvelle nuit tomba, et Liliana donna enfin l'ordre aux hommes d'accomplir leur première mission, la mise à sac du hameau humain.

Naïm mena la petite troupe à l'entrée de celui-ci, le reste fut un délicieux concerto de cris et un joli tableau de larmes et de sang esquissé par les lames fraîchement forgées. Alors que la sienne transperçait le coeur d'un vieil homme qu'il avait immobilisé au sol, il entendit un des sombres parler avec Liliana. Apparemment, Ny'Hym ne s'en était pas sortis.. Le vrai problème étant qu'un humain avait pu s'enfuir, il allait sans doute chercher de l'aide. Satané Ny'Hym! Trop faible, il allait ruiner leurs plans...

Naïm, après avoir sèchement retirer la lame du corps de l'humain, se dirigea vers Liliana.

« Quels sont les ordres ? »

Après avoir accomplit sa tâche, Naïm, suivit par le reste de la troupe, prit le chemin du camp dans lequel ils étaient basés. Les lueurs à l'horizon annonçaient les prémices d'une nouvelle journée, le capitaine de la marche observa un instant l'Aurore aux doigts de sang qui symbolisait la fin de cette nuit de massacre. Il y avait eu un survivant, Naïm s'était assuré qu'il lui reste un humain pour le servir une fois qu'il serait de retour au camp. Plus tard il le sacrifierait en offrance à Uriz, mais pour le moment il avait besoin d'un serviteur pour les tâches ingrates que la paresse et la fatigue l'empêcherait d'accomplir. Attaché à une corde que Naïm tirait derrière son cheval, le jeune homme baissait la tête, n'osant confronter son regard à celui des sombres, et cachant les larmes qui n'avaient cessé de couler après le massacre de sa famille sous ses yeux.

« Quel est ton nom, humain ? Que dirais-tu de "Rothe" ? Ca veut dire "esclave" dans ma langue. Salue ton nouveau maître. » fit-il en tirant sur la corde pour faire se courber l'homme, au milieu des rires des autres drows.

Il servirait au passage d'exemple à tous ceux qui un jour auraient l'audace de se retourner contre le peuple noirelfique, et qui espéreraient simplement mourir. La mort n'était rien comparé à ce que pouvait subir un homme face à la cruauté d'Uriz. De retour au campement, il veilla à ce que l'humain aille cherche du bois pour préparer un feu, et un repas décent avec les carcasses de quelques bêtes chassées en route. Il demanda aussi à ce qu'on s'occupe des quelques blessés s'il y en avait. Arkezia vint aux nouvelles, le mercenaire descendit de son cheval et fit face à la forgeronne, dont il devinait la surprise de ne voir Liliana revenir avec le reste du groupe.

« Il orn valm udossa gajak. Torval zhah elghinyrr. »
( Elle nous rejoindra plus tard. Torval n'est plus. )

Une autre question avait suivit , Naïm s'approcha d'elle, la saisit et l'embrassa sauvagement pendant plusieurs secondes. Il se retourna et se dirigea vers ses campements non sans avoir ajouter:

« Qu'Isten bénisse tes doigts de déesse. »

La réaction d'Arkezia ne s'était pas faite attendre. Il s'en était douté, son tempérament était aussi brûlant que les lames qu'elle forgeait. Ce n'était pas pour lui déplaire. Il avait tout de même du se contenir pour ne pas répondre à son coup de poing, mais le baiser l'avait pardonné, indéniablement. Les lèvres de la forgeronne laissèrent un agréable goût dans sa bouche, si bien qu'il du se faire violence pour reprendre sa contenance habituelle. Inutile de dire qu'il n'aurait pas laissé la femelle s'en tirer si elle l'avait juste frapper sans explication, question d'honneur et de fierté. Il n'y avait d'ailleurs bien qu'une femme pour le toucher ainsi, par Uriz. Un peu plus loin, le regard de quelques hommes s'était arrêté sur cette scène étrange, quelque peu stupéfait, avant de reprendre leurs activités. Ce n'est que le soir à l'heure du repas, qu'ils reprirent une discussion, plus normale cette fois-ci... D'où venait-il ? Il venait de loin... Et d'une autre époque, définitivement révolue.

" J'étais l'homme de main de Tebryn Rylin'tar, le souverain. Après sa mort, je suis devenu mercenaire... Voilà les grandes lignes. "

Mentionner son passé, ce passé là, éveillait toujours en lui une once d'amertume, de nostalgie, quant à cette époque bénie des dieux où il assassinait dans l'ombre sans se soucier du rang de la cible, et vivant dans un confort royal. Rien à voir avec l'enfer dans lequel il était né. Tebryn lui avait donné sa chance, mais Naïm n'avait jamais eu l'occasion de le remercier comme il l'aurait du. Ce seigneur s'en était allé bien trop vite... S'en était suivit un amas de prétendants pour le trône, des souverains tous aussi ridicules les uns que les autres, se livrant des guerres internes pour obtenir le pouvoir. Toutes ces choses que Naïm avait haït au point de quitter Puy d'Elda pendant des années. Le Tueur de l'Ombre qu'il était n'aurait pu rester là, à contempler un peuple fourbe se déchirant au nom d'une politique chaotique. Des décennies qu'il n'y avait plus eu de leader digne de ce nom. C'était son opinion, elle ne changerait pas, et il n'était pas décidé à en parler, surtout pas ce soir. Il avait d'autres chats à fouetter.

Notamment l'humain qui tenait trop à sa misérable vie pour oser désobéir au drow, bien que son inactivité à cet instant le dirigeait vers la case "exécution sommaire". Naïm balaya les alentours du regard. Quelques biches décortiquées pour le repas du soir, grillant au-dessus de l'immense feu au centre du camp. Les hommes avaient l'air de se régaler. L'esclave avait bien remplit son rôle, il éviterait peut-être de finir sur le bûcher ce soir... A part si ils avaient encore faim de viande bien rouge et saignante... Tournant les yeux vers Arkezia, il lui passa la main autour des épaules, esquissant un sourire aussi blanc que sa chevelure;

" La mission là, je pouvais pas passer à côté... Plus y'a de risque, plus ça paye ! "

Il laissa échapper un rire peu discret et croqua dans un morceau de biche, avant de reprendre,

" Et toi ? C'est quoi ton histoire ? Histoire que je fasse mine de m'y intéresser... " ironisa t-il en s'adossant au tronc d'arbre qui leur servait de banc.

Naïm suivit la jeune sombre des yeux, un sourcil relevé, alors qu’elle lui chipait son morceau de biche. Il n’avait pas manqué de remarquer que la distance entre eux s'était grandement réduite et se demandait à présent quelle serait la prochaine carte qu’elle tirerait de sa manche. Et jusqu'où elle irait si il ne freinait pas son offensive, qui risquait bien de faire craquer le mercenaire. Elle était joueuse. A nouveau, Naïm esquissa un sourire, plus franc et dessiné cette fois. Son regard de braise se posa dans les yeux gris et pénétrants de la forgeronne. Ainsi, c’était une voyageuse, une forgeronne exilée par sa famille pour prouver sa valeur, et que l'itinérance n’avait pas encore réussi à briser. Prendre la route chaque jour n'était pas chose aisée, il en savait quelque chose. Et puis elle le questionna à nouveau. Il n'aimait pas tellement se livrer à ce genre de confidence, mais fit l'effort d'y répondre.

" En dehors des missions, j'aime boire, rire, voir des femmes. Je passe aussi du temps à m’entraîner, aussi bien le corps que l'esprit.
Je pense parfois à l'avenir. A la femme qui accomplira une grande oeuvre en me donnant un héritier... "

Il contempla Arkezia longuement, comme s'il voyait en elle cette possibilité. Il laissa flotter ses paroles un instant, et soutint le regard de son interlocutrice, qui semblait l’étudier autant qu’il le faisait lui-même. Sa main vint lentement effleurer le visage de la drow, parcourant le tatouage sur son front, descendant le long de son nez jusqu'à ses lèvres pour les pincer légèrement. Il se perdit dans ses yeux et son sourire délicieusement sauvage. Une beauté typiquement noirelfique à n'en pas douter. L'attachement spontané de Naïm était totalement imprévu, et prendrait peut-être une autre tournure plus tard. Il fallait simplement qu'il y réfléchisse. Son regard, à cet instant, trahissait son envie de la dévorer, et pas seulement des yeux.

Mais l'heure n'était pas à ce genre d'activité et son esprit revint à la situation présente.

" Enfin bref.. ".

Il finit par cligner des paupières et détourner le regard du visage de la Kel'Razia pour observer les quelques âmes aux alentours, car non, ils n'étaient pas seuls. Beaucoup s'étaient déjà assoupis sur le sol, repus et parés pour un sommeil salvateur. Demain serait une rude journée pour les hommes de la troupe. Marquée sous le signe du sang si Uriz le voulait. Il espérait tout de même que sa proposition implicite n'était pas tombée dans l'oreille d'une sourde. Il ferma les yeux, le visage d'Arkezia blottit contre son torse, et se laissa étreindre par les bras de la nuit.

Le calme relatif du campement fut soudain interrompu par les cris d'une femme. Ils provenaient de l'autre côté du bivouac, où quatre elfes sombres s'amusaient avec le deuxième prisonnier, une jeune humaine d'une vingtaine d'années. La violence de ses hurlements témoignait qu'ils venaient de passer à la partie la plus désagréable de leurs jeux. Le reste de la bande ne s'alarma pas du comportement sauvage de leurs congénères, certains observant même la scène d'un air amusé. Les autres se contentèrent d'ignorer le spectacle, poursuivant leurs occupations comme si de rien n'était.

Quelques minutes plus tard, les cris cessèrent enfin et les elfes noirs abandonnèrent leur jouet brisé et à peine conscient sur le sol de la clairière. Un mercenaire non loin de Naïm glissa un petit commentaire comme quoi ils allaient enfin pouvoir finir de manger en paix. Cependant, loin d'avoir été apaisés par ce défouloir temporaire, les quatre drows semblaient au contraire n'en être que plus excités. L'un d'entre eux, nommé Ulryn, traversa le camp pour venir s'asseoir à côté d'Arkezia.

« Aaaaah... notre grande et belle armurière ! Hummm... et aussi chaude que le foyer de sa forge, ma parole ! »

Le sombre se rapprocha encore un peu. Tout comme ses camarades, il semblait avoir fait bon usage des tonnelets de vin pillés dans les caves de Torval. Son haleine empestée d'alcool en témoignait.

« Toi qui aimes les armes ma mignonne, j'en ai une à te montrer qui dépasse en solidité et en force tout ce que tu as pu voir jusqu'ici... »

Disant cela, il avança sa main en direction de la poitrine de la forgeronne, un sourire lubrique affiché sur le visage.

Plongé dans un profond sommeil, Naïm n'entendit pas les cris de la femme, ou peut-être les entendait-il mais ne s'en souciait pas plus que ça. Une autre esclave humaine avait été faite, ils s'étaient amuser avec elle, fin de l'histoire. En théorie. Malheureusement, ça ne se déroulait pas toujours comme ça chez les Sombres, c'était même très rare. S'arrêter alors qu'ils venaient à peine de commencer à se distraire, la modération n'était pas ce qui les caractérisait le plus. L'appétit venait en mangeant, et en buvant en l’occurrence. Ils avaient pillées les caves de Torval, et si Naïm n'avait bu qu'un litre ou deux, certains de ses congénères étaient dans un état bien plus avancé.

L'un des quatre drows, de retour de la clairière ou ils s'étaient amuser avec la forcenée, se dirigea vers le centre du camp et se posa à côté d'Arkezia, l'esprit visiblement échauffé par l'alcool. Naïm tendit légèrement l'oreille, les yeux toujours clos. La première remarque d'Ulryn passa par une oreille pour en ressortir de l'autre. La forgeronne savait se défendre, et elle allait sans doute le remettre en place dans la seconde. Pourtant quelque chose vint contrarier notre mercenaire aux yeux rougeoyants.

« Toi qui aimes les armes ma mignonne, j'en ai une à te montrer qui dépasse en solidité et en force tout ce que tu as pu voir jusqu'ici... »

Poussant un grognement, Naïm ouvrit les yeux et d'une main attrapa le bras baladeur d'Ulryn, tandis que l'autre main vint agripper le cou du médisant. Les ongles s'enfoncèrent dans la chair, les doigts se resserrèrent petit à petit autour de la gorge à mesure qu'il lui lançait ces mots " Tu... veux... finir... comme elle ? " son regard pointa vers l'autre côté du bivouac, ou l'humaine gisait à terre, encore sous le choc. Ulryn était peut-être puissant, il n'en savait rien, en tout cas le taux d'alcool qu'il avait ingurgité réduisait fortement ses capacités.

L'étreinte douloureuse cessa, Ulryn put à nouveau respirer et Naïm se rassit, dans le calme. Oh, il oubliait. Il se releva aussitôt, et son poing vint heurter la mâchoire du Sombre, l'envoyant au sol sans plus de cérémonie.

" La prochaine fois je te coupe les burnes. Va te laver, tu pues l'alcool. " finit-il avant de reposer sa tête sur le tronc d'arbre, passablement énervé par ce manque de respect. Il était temps que Liliana fasse son retour. Il n'allait pas pouvoir les tenir bien longtemps à ce rythme là, d'autant que les esprits commençaient à s'échauffer. Il n'était pas prêt de dormir...


( sorry Arkez' j'avais envie de répondre! L'inspi peut-être? J'ai retrouvé mon avatar fétiche )

Si Naïm avait cru qu'il allait pouvoir retourner s'assoupir, il dut rapidement déchanter. Avec un grognement, Ulryn se releva, encore surpris du coup qu'il venait de recevoir. Puis, faisant preuve d'une rapidité et d'une force étonnantes, il se précipita sur celui qui venait de l'humilier, l'agrippa, avant de le projeter contre le tas de bois qui servait à alimenter le feu. Les bûches s'éparpillèrent dans tous les sens, et Naïm put sentir la douleur cuisante du bois sec dans son dos. Déjà le drow éméché était de nouveau sur lui, le relevait par le col et l'envoyait à nouveau au sol d'une droite bien sentie. Un peu sonné, l'ancien suivant de Rylin'tar vit son agresseur qui le toisait de haut, le regard plein de haine.

« Tu t'es pris pour qui, espèce de fiente de Morgal !? » l'invectiva-t-il. « Tu as cru que j'allais m'aplatir devant toi simplement parce que la commanditaire t'a désigné comme chef pendant son absence ? »

Un crachat de dégoût accompagna cette déclaration. Ses camarades le rejoignirent et se postèrent derrière lui, l'air menaçant. Certains avaient déjà posé la main sur la garde de leurs armes.

« Ne me touche plus jamais, enfoiré, ou je te jure que c'est moi qui te les coupe... » finit Ulryn, contenant avec peine sa colère.

Le reste du camp observait en silence les évènements. Tous savaient qu'il ne fallait pas plaisanter avec le sombre et ses acolytes, et ils étaient curieux de voir comment l'altercation allait se terminer.