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| Cave ne cadas | |
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Aetius d'Ivrey
Ancien
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| Sujet: Cave ne cadas Sam 5 Jan 2013 - 16:20 | |
| Barkios de printemps, deuxième jour de la quatrième ennéade, en l'an six du onzième Cycle. Cantharel, la capitale des plaines d’Atral. Aetius n’avait guère visité cette cité sinon pour quelques tournois dans sa jeunesse. Il fallait bien dire qu’elle était loin des vallées du Médian et ses innombrables guerres privées ; elle avait toujours semblé plus paisible à l’Ivrey. Une ville de braves gens, une brave ville, se disait-il sans vraiment la connaître. Il l’avait peu arpenté, mais il était sûr qu’entre son entrée de chevalier errant différait grandement de son entrée de régent. L'accueil était, cette fois-ci, plus… ostentatoire. A l’unique muraille de la cité était accrochée les bannières de la marquise de Sainte-Berthilde, et, quand on fut arrivé aux portes, une longue route serpentait parmi la foule qui criait son nom.
La situation était fort triste pour Aetius. Il avait, ces derniers jours, enfermé beaucoup d’hommes qu’il estimait. D’abord son frère, qui avait pactisé avec la Rochepont pour assurer sa chute, et le goupil d’Arétan lui-même, contre qui il avait dû combattre au nom de la Paix du roi. Il s’était interrogé sur ses actions. Assurant son rôle de régent depuis seulement quelques ennéades, et après un contexte fort délicat qu’il fallut aplanir avec rapidité, il se sentait encore mal à l’aise, comme propulsé sur une fonction trop grande pour lui. Fils bâtard d’un de ces barons qui avaient tout fait pour enrayer les projets du roi, il était aussi de sang royal, par sa mère. Lui qui avait rêvé la mort du roi Trystan l’Aveugle tant de nuits agitées où, dans ses cauchemars, le visage de son père, les yeux crevés et la tête désolidarisée de son corps, criait vengeance pour la mort ignominieuse qu’il avait souffert. Le voilà maintenant presque-roi, maître et garde des titres de l’enfant roi, Eliam. Il avait lutté contre le pouvoir royal des années, et à présent, il se devait de protéger et d’étendre ce même pouvoir.
Il avait certes ressassé ces pensées tout au long de la guerre, mais lorsqu’il fut aux portes de Cantharel, toutes ces sinistres réflexions disparurent, dissoutes par les vivats du peuple. Les milliers de cris qui s’élevaient dans la ville en l’honneur de celui qui avait arrêté le méchant comte d’Arétria martelait son remords et son ressentiment, l’envahissant comme un vin pur. Les vapeurs de l’ivresse le subjuguaient, collaient sur son visage un sourire timide, mécanique. Il apportait la victoire, et en même temps, il avait l’impression troublante de ramener la joie à la ville. Le voilà soûl, altéré par les ovations, première manifestation du pouvoir. Autour de lui, sa cohorte de soldats, de sires et de valets levait bien haut la bannière du régent, la griffe ailée et les fleurs de lys royales ; sur sa tête brillait une couronne ouverte d’argent, symbole de son rang de prince du sang, et rehaussée de lys blancs. Le bain de foule continua tout au long du trajet jusqu’au palais de la marquise, mais quand ils furent à sa fin, Aetius dégrisa quand un homme le héla. « Aetius, Sire Aetius ! Qu’as-tu fait d’Anseric le cruel ? Est-il mort ? Montre-nous sa charogne, montre-nous son cadavre ! » Et d’autres de le suivre et de répéter « Doux prince, donne-nous le comte ! » Cette foule était aussi ivre que lui, mais elle avait grand soif de sang. Elle voulait, faute de mieux, frapper l’homme à terre, le punir comme s’il eut été un vulgaire voleur. C’est renfrogné que le régent dépassa les portes du château. |
| | | Arsinoé d'Olyssea
Ancien
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| Sujet: Re: Cave ne cadas Dim 6 Jan 2013 - 18:23 | |
| Deux mornes journées s'étaient écoulées depuis que l'ost Olyssean avait été brisé sous les murailles de Cantharel lorsqu'on apprit la venue prochaine du régent-sénéchal du royaume. La chose n'était somme toute guère surprenante , chacun savait que les hommes du roy avaient investi le châteaux d'Hautségur sur les flancs des Monts Corbeaux, mais servit néanmoins de rude choc pour les diverses notables de la cité chargés d’accueillir cette masse d'homme. La ville n'avait pas été aussi peuplée ou affamée du temps, qui semblait bien lointain, du siège du couple félon ; les paysans aux yeux hagards qui autrefois l'approvisionnaient en vivres se massant aujourd'hui dans ses ruelles et temples. Les responsables qui seulement la veille gisaient encore en grand nombre de l'autre coté de murs avaient par l’effort des prêtres de Tyra presque tous reçu les sacrements et été ensevelis sommairement...Le clergé de Tyra qu'elle semblait par la même occasion s’être mise à dos en refusant l'accès des dépouilles aux terres consacrées des hameaux qu'ils avaient passé à la torche.
L'intendant et sa horde de domestique eurent aussi fort à faire pour préparer l'antique forteresse qui accueillerait bientôt près d'une cinquantaine de seigneurs grands et petits. Le grand hall ou se tiendrait la réception ainsi que ses nombreuses bannières et tapisseries avaient été dépoussiéré, et il semblait plus lumineux qu'à l'accoutumé. Elle avait toujours jugé la pièce rectangulaire démesurément vaste, peut être pour le bénéfice des nouveaux sujets païens du premier marquis conjecturait-elle, mais la présence des seigneurs nordiques et de leurs suites le justifiait aujourd'hui amplement. Sa place de marquise était en bout de salle, légèrement surélevée par rapport au reste de l'assemblée. Sa sombre robe en velours émeraude et taffetas dorés s'accordait avec son blason personnel en arrière plan et dévoilé pour l'occasion : l'union en partition des armoiries de ses deux familles. Les places d'honneurs les plus proches du trône étaient réservées à ses alliés les sire d'Odelian et d'Etherna, tout en laissant vide la place si récemment occupée par sa cousine désormais volatilisée. L'Olyssea n'en était pas pour autant dénué de représentants, l'héritier captif du seigneur d'Erdheim ayant à l'aube fait part de sa volonté de renouveler son serment au roy.
Les bruits de la kermesse populaire qui coïncidait avec la venue de l'Ivrey parvenaient désormais à leurs oreilles, ne couvrant que partiellement le bourdonnement sourd des murmures de la congrégation. Puis, on entendit la herse de la bastide se lever et les vivats des chevaliers attroupés dans la basse cours. Finalement vint le tour de la porte de chêne donnant sur le hall, qui s'ouvrit lentement et silencieusement, laissant d'abord entrer un Hérault qui déclama en grande pompe l'identité et les titres de l'intéressé, immédiatement suivit d'icelui. L'homme le plus puissant du royaume était encore jeune, ses yeux bleus clairs dévisageant l'assemblée alors qu'il s’enfonçait dans la salle entouré de ses quelques fidèles. Son apparence n'était certes pas des plus soignée, mais il en émanait une impression de vitalité certaine. S'étant levée dès son entrée, la marquise salua le comte d'une révérence, puis proclama d'une voix forte et claire.
« Au nom de mes féaux et de tout les gens de l'Atral qui par vos vaillant efforts retrouvent désormais la paix du roy, j'offre l'hospitalité de Cantharel à vous et vos hommes, ainsi que notre reconnaissance éternelle, qui s'exprimera plus pleinement au cours des jours à venir ».
Elle se tut alors, regagnant sa place sans détacher son regard du régent. À vrai dire, ces quelques platitudes ne correspondaient aucunement aux interrogations qui la hantaient, et que certains eurent moins de scrupules à exprimer.
« Le comte félon vous a t-il accompagné messire? » interrogea à sa manière bourrue le seigneur de Kelbourg, lorsque vint son tour de se présenter devant le prince.
La procession continua ainsi plus longtemps qu'elle ne l'avait espéré, la poussant finalement à se retirer dans le donjon alors même que Martin d'Adhémar, à peine remit de sa blessure, s’avançait à son tour. Ne négligeant toutefois pas d'inviter Aetius d'Ivrey à la rejoindre lorsqu'il le pourrait et avant le festin qui se préparait dans les cuisines.
Dernière édition par Arsinoé d'Olyssea le Sam 29 Juin 2013 - 9:11, édité 2 fois |
| | | Aetius d'Ivrey
Ancien
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| Sujet: Re: Cave ne cadas Mar 8 Jan 2013 - 11:46 | |
| La porte s’ouvrit lentement sur la longue salle aulique tandis qu’il entendait la voix du héraut psalmodier ses titres et honneurs. D’un pas décidé et sûr de lui, le régent en armure entra. Le menton bien haut, un regard suffisant jeté à l’assemblée réunie, il avait fier allure, l’arrogant chevalier. Sa démarche, lente, régulière et lourde, grinçait métalliquement. L’armure de plates qu’il portait sous son surcot noir fleurdelysé d’argent avait dû être mal articulée, car dans le silence, elle crissait presque plus fort que les hautes bottes de cavalier de messire l’Ivrey.
A mesure qu’il avançait, le prince du sang examinait la marquise. Elle avait des airs de grande perche du haut de son estrade, droite comme un i. Elle avait décidé d’adopter des vêtements d’une grande richesse pour accueillir Aetius, et deux choses choquaient ce dernier. D’abord, Arsinoé avait fait le choix de ne pas porter le deuil de sa cousine, disparue deux jours plus tôt dans le feu de la bataille. Message politique ou simple espoir bienveillant à l’égard de la louve d’Olysséa ? Ensuite, la marquise semblait décider à porter fièrement les couleurs olysséennes, et ses armoiries berthiloises semblaient avoir été écartelées avec le loup de sable de la baronnie du Ner. Si peu de temps après la défaite de la baronne de ce même fief, charger ses armes avec le loup noir laissait peu de doutes sur les intentions d’Arsinoé d’Olysséa au sujet de son fief natal. Enfin, le fait que, comme lui avec la bannière royale, elle s’était arrogé la bannière baronniale satisfit le prince, qui crut voir en son hôtesse un peu de son excès et de sa fougue.
Aetius, bien sûr, ne s’arrêta pas à un examen purement politique de la dame. A la recherche d’une femme depuis son divorce, il avait presque automatiquement évalué la physiologie de Sa Grâce. Son corps semblait avoir bien tenu face aux assauts du temps, encore souple et jeune ; son ventre devait être encore fertile – il ne se faisait pas de souci pour cela, car, comme les autres, il avait appris pour le bâtard d’outre-mer qu’elle avait rapatrié lors de son retour au sein du royaume. Malgré sa mise, son visage dégageait cependant quelque chose de triste. Son visage, ovale et pâle, avait-il toujours cet air mélancolique ou bien était-ce la perte d’une parente qui la rembrunissait ainsi ? Bah ! C’est toujours mieux que la pâlotte de Langehack !, pensa-t-il une fois au pied de l’estrade.
Les salutations s’enchaînèrent. La marquise prit la parole et leur souhaita la bienvenue. Aetius fit une légère courbette, dégrafa d’une main négligente sa cape d’apparat qu’il tendit à un valet de sa suite et dit : « Nous vous remercions pour votre hospitalité, qu’elle plaise aux dieux ! Sachez que je partage votre peine et votre perte. J’avais un peu connu votre cousine la dame d’Olysséa et la tenais en haute estime. »
Ceci dit, la foule se mut et se décomposa. Commencèrent un enchaînement de rencontres avec la cour de Cantharel. L’un d’entre eux, le sire de Kelbourg, s’appesantit un peu plus lourdement que le reste de l’assemblée, et demanda des nouvelles du comte d’Arétria et de son sort. Aetius, à ces paroles, en rit comme si c’était une plaisanterie, et Kelbourg n’insista pas plus. * Confortablement installé dans une cathèdre rembourrée, Aetius avait retiré la couronne d’argent qui lui ceignait la tête. Une longue pipe à la main, il attendait qu’un domestique l’allume pour s’adonner à un tabagisme relaxant. On l’avait invité à rejoindre la marquise pour une discussion plus privée. Aussi n’était-il venu qu’avec une poignée de servants, et attendait, détendu, d’entendre la raison de cet entretien. |
| | | Arsinoé d'Olyssea
Ancien
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| Sujet: Re: Cave ne cadas Mar 8 Jan 2013 - 18:05 | |
| Accompagnée seulement d'une dame de compagnie et deux jeunes nobliaux, Arsinoé descendait posément les marches d'un étroit escalier en colimaçon qui donnait sur l'aile ouest de la bâtisse. Surgissant dans un couloir qu'elle n'avait que rarement arpenté, elle n'hésita qu'un instant avant de remarquer la présence à sa droite d'hommes portant la livrée du roy. Ils veillaient devant une porte qu'elle s'empressa de faire ouvrir, la marquise et la damoiselle s'engouffrant alors dans la pièce enfumée ou attendait l'Ivrey. Celle-ci ne semblait guère remplir de fonction particulière, ne disposant que d'une table exiguë ou trônait une cruche de vin rouge et entourée de quelques chaises assorties de coussins.
« Monseigneur. » Adressa t-elle délicatement à l'intention du prince avant d'à son tour prendre place. Le voyant cloîtré dans sa lourde cuirasse, Arsinoé ne pouvait imaginer comment l'homme supportait la chaleur estivale qui la harcelait. Dissimulant avec peine l'irritation provoquée par les volutes de fumée, elle prit finalement la parole lorsque une longue seconde se fut écoulée.
« Votre tourment à l'égard du sort de ma bien aimée parente vous fait honneur, si bien que je n'avais osé vous contredire devant la noblesse de l'Atral. Comprenez, les déprédations de la troupe olysseane lui sont encore largement imputées, injustement à mon sens, et il serait bien cruel de raviver cette peur...Bien qu'un souci de vérité m'y contraindra sous peu. En effet, j'ai bon espoir que Néera ait préservé la douce enfant ; mes hommes ne trouvèrent aucune trace d'elle sur les lieux de l'affrontement, mais recueillirent plutôt des témoignages affirmant que plusieurs figures montées auraient pris la fuite pour l'est tôt dans la bataille. Ma cousine a regagné l'Olyssea, j'en ai l'intime conviction. »
Tout en parlant, la marquise dévisageait d'un œil curieux son interlocuteur. Son visage portait encore les séquelles de sa campagne, mais nullement plus que sa chevelure étrangement dégarnie. Ses yeux pales et vifs laissaient entrevoir des lueurs lourdes de sens qui échappaient encore à sa compréhension. Marquant une courte pause, elle afficha une moue de contrariété à l'idée de ses futurs propos. Des propos qui seraient bientôt confirmés par les quelques cavaliers qu'elle avait, discrètement, envoyé de l'autre coté des Monts Corbeaux.
« Elle n'est pas seule; outre Luskendale, tous les grands seigneurs du Ner parvinrent à s'échapper. Là voilà donc à nouveau entourée de ceux qui l'ont par deux fois poussé, ou forcé, à se parjurer. Ils n'hésiteront pas à encore risquer sa vie et celles de ses enfants pour leurs fins méprisables. Je confesse m’être été résignée à cette triste issue avant que nous parvienne votre heureuse missive, mais la chute du comte nous offre une opportunité qui ce doit d'être saisie. Après bien entendu que nous eûmes jugé des crimes de ce dernier, au nom de l'Atral et du roy. » |
| | | Aetius d'Ivrey
Ancien
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| Sujet: Re: Cave ne cadas Mer 9 Jan 2013 - 16:33 | |
| Tirant négligemment sur sa pipe, il observait, pendant la tirade de la marquise, la pièce exiguë. A peine un boudoir, pensa-t-il avant de recracher une bouffée de fumée bleuâtre. Il eut un mouvement de moquerie lorsque celle-ci lui parla du ressentiment de la piétaille pour les prédations olysséennes. A quoi s’attendait-il, ce bête peuple ? On ne faisait pas d’omelette sans casser des œufs. Il se concentra cependant lorsqu’elle lui apprit que la Louve serait intacte et bien vivante, amassant une nouvelle armée pour prendre sa revanche avec une poignée de seigneurs jusqu’au-boutistes. A l’étonnement succéda le scepticisme. Jamais Clélia ne tenterait pareille folie sans avoir de nouvelles de son mari. Et pourtant, elle avait fait montre d’une imprévisibilité dérangeante lors de cette querelle, elle ou un des capitaines qui l’accompagnaient… Et la marquise de continuer : les sires du Ner, de nouveau réunis, tous ? A nouveau, le régent eut une moue moqueuse. Il avait pu voir de ses yeux les grands vassaux des Rochepont, et il doutait que ceux-ci se lancent à nouveau dans une aventure qui pourrait bien leur coûter tout ce qu’ils avaient, biens comme vie. Et puis tout ceci était lointain, alors que les vivats venaient de Cantharel même. C’était donc une belle journée, placée sous le signe de l’optimisme.
La fin de son discours laissait poindre les intentions qu’Aetius avait cru déceler dans ce blason tout à fait nouveau qu’arborait la marquise : la bannière de Cantharel écartelée avec celle d’Olysséa. Cela aurait pu être une simple réminiscence des origines olysséennes d’Arsinoé, bien qu’on n’ajoutât pas, au sortir d’une guerre contre Olysséa, les armes des ennemis qui étaient accusés de ravages sans arrière-pensée politique. La conclusion qu’elle prononça sortit cependant le Bâtard d’Ancenis de ses pensées. Nous ? Qui était ce nous qui allait juger le Goupil comte ? Ses yeux se plissèrent et fixèrent un instant les iris châtaigne de son hôtesse. Il n’allait pas laisser un ancien compagnon d’armes, un homme qu’il avait connu comme courtois et de bonne nature, être jeté à la ville furieuse et vengeresse.
D’une main, il balaya ses pensées et ce que venait de dire la marquise, une moue amusée coincée sur son visage rongée par une barbe de quelques jours. Crachant une dernière halenée opaque, il répliqua d’une voix mi bienveillante mi condescendante. « Il y a des choses plus importantes à faire avant de savoir ce qui se trame de l’autre côté des Monts-Corbeaux. Le Goupil est tombé, et il est temps pour vos vassaux de venir vous rendre l’hommage qu’ils vous doivent tous. » Posant sa pipe sur la table, il jeta un regard aux domestiques. « Sortez. » Son écuyer se dirigea vers la porte, et les autres lui emboîtèrent le pas. Quand ils furent seuls, Aetius se releva et commença à marcher en rond, tournant autour d’Arsinoé.
« La noblesse du Berthilois a pris de vilaines habitudes, ces dernières années. J’ai même appris qu’un de vos vassaux avait fait la sourde oreille à votre semonce… Nous ne pouvons pas restés inactifs ici-même et partir guerroyer dans le Ner alors que le marquisat n’a pas été redressé. Une cérémonie publique règlera une bonne fois pour toutes les velléités qu’ont certains de vos hommes à votre égard… Et si les jours sont fastes, ce sera une excellente occasion de nous marier. » |
| | | Arsinoé d'Olyssea
Ancien
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| Sujet: Re: Cave ne cadas Jeu 10 Jan 2013 - 14:50 | |
| Le prince ne fit pas l'effort de dissimuler ce qu'il pensait des inquiétudes et suggestions de la marquise, chose qui l'irrita suffisamment pour qu'elle soutienne sans peine son regard courroucé. Était-ce l'idée que le comte soit châtié pour ses crimes qui l'affligeait, ou seulement qu'autrui participe à ce jugement ? Elle détourna finalement son regard voilé du sien, de sombres pensées ayant déjà remplacé l'optimisme prudent du début de journée ; aurait-elle troqué un despote pour un autre en acceptant la venue tardive de cet homme empli de l'arrogance du sang royal ? La certitude qu'elle n'avait guère eu de choix n'améliora en rien son humeur.
C'est tendue, mais présentant une façade encore avenante qu'Arsinoé fit face à l'Ivrey, qui après avoir fait vider la salle l'arpentait tout en déclarant ses intentions pour le fief qu'il avait secouru. La mention de son cousin Godfroy de Saint Aimé, qu'elle aurait il est vrai été tentée de qualifier de traître, dessina un étrange sourire sur ses lèvres, aussitôt effacé par la prochaine et dernière phrase du régent. On ne peut plus consciente de la présence derrière elle, la dame se leva à son tour et enjamba les quelques mètres la séparant de l'unique ouverture que présentait la roche de la pièce. Rien de plus qu'une vieille meurtrière, mais la vue qu'elle offrait sur le temple et sa coupole semblait retenir toute l'attention de la marquise. Elle aurait pu faire remarquer au prince la douce hypocrisie de vouloir punir Godfroy tout en préservant et dissimulant son ami infiniment plus coupable, ou encore lui rappeler que ses propres droits dépassaient les simples frontières du Berthildois. Avait-elle toujours été si fière ? Elle ne le pensait pas. Ses actions avaient longtemps été gouvernées par la nécessité, et même son retour à Cantharel n'avait été que la fin d'une longue fuite. Désormais libérée de cette angoisse, elle n'en demeurait pas moins profondément insatisfaite et les dires du prince n'étaient qu'huile sur le feu. Ce fut seulement en se posant la question de ce qu'était au juste l'objet de ses désirs qu'elle parvint à reprendre ses esprits et d'entreprendre de répondre.
« de Saint-Aimé nous rejoindra sous peu, il a déjà fait parvenir dires de sa félicité à notre victoire ainsi que de son intention de me rendre hommage le plus tôt possible. Si tel est votre plaisir, nous le recevrons ensemble comme il se doit ; tout comme chacun des sires de l'Atral qui seront récompensés à la juste valeur de leurs actions en ce mois de Barkios. Et, une fois que j'aurai entendu mes bon conseillers et me serai recueillie dans la demeure de notre Mère, nous pourrons préparer l'annonce de nos épousailles. L'union d'un prince du sang et d'une marquise confirmée dans tous ses titres et privilèges.»
Cette dernière affirmation ressemblait presque à une interrogation, alors que les yeux de la marquise scrutaient celui qui se voulait son époux. |
| | | Aetius d'Ivrey
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| Sujet: Re: Cave ne cadas Lun 14 Jan 2013 - 13:22 | |
| Tournée vers la vue qu’offrait la maigre fente qui traversait la pierre du mur, elle lui gâchait un peu son effet. Il aurait voulu, un peu, lire la surprise sur ses traits. Au lieu de cela, et avec une lenteur calculée, la voilà dos à lui, cachant son visage et les expressions qu’il recouvrait. Ce genre de manières dénotait quelque chose de l’intrigante qui se cachait sous les parures de la marquise, son comportement était trop pensé, ses réactions trop dissimulées. L’Ivrey se rappela alors du séjour de la marquise en Estrévent, et se demanda si en fuyant un sud il n’était pas tombé dans la gueule d’un autre. Balayant son racisme d’un geste de la main, quoiqu’un peu déçu du calme de sa fiancée. Elle finit cependant par se retourner en prononçant son acceptation et plongea son regard dans le sien.
Semblant peu sûre, il la pensa tracassée, écrasée par cette succession d’événements qui scandaient son retour dans le royaume. Pauvre petite femme, se dit-il intérieurement, avant de s’approcher d’elle. Et quand il fut en face d’elle, quand sa main vint flatter la chevelure d’Arsinoé, il dit alors :
« Je ne suis pas un mauvais homme, croyez-m’en ma mie. Quoiqu’en disent les racontars, je serai bon avec vous, et vous me trouverez aimable, quand le temps viendra. Vos titres, vos terres, vos ennemis et vos causes sont miens à présent. Je serai le protecteur infaillible de ces choses, et de vous-mêmes, ma Dame. »
Et ceci dit, il s’empara de sa main et, courbant un peu le cou, vint baiser sa paume avec lenteur. Les yeux fermés, il faisait sentir et son nez et ses lèvres à l’intérieur de cette main capturée par le bras puissant de l’Ivrey, manipulant avec une infinie prudence la captive, avant de relever la tête et la fixer. Il prit congé d’elle en lui promettant d’être au festin du soir même.
Dernière édition par Aetius d'Ivrey le Mar 22 Jan 2013 - 20:54, édité 1 fois |
| | | Arsinoé d'Olyssea
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| Sujet: Re: Cave ne cadas Jeu 17 Jan 2013 - 18:15 | |
| Le touché de l'Ivrey ne la laissa pas de marbre ; il aura été si facile de s'abandonner à cet étrange fourmillement, de fermer les yeux et se blottir contre la main protectrice qui l'espace dans instant devint celle d'Hélias. Toutefois, elle ne lui offrit finalement qu'un sourire pudique tout en se surprenant à imaginer ces doigts puissants broyant la gorge du roy aveugle comme le voulait la rumeur. Il était manifestement sensible à la retenue dont elle faisait preuve, entreprenant alors de la rassurer par des paroles à la fois vides de sens et attendrissantes, tout comme le fut son délicat baise main. Ne voulant paraître insensible à ses charmes, Arsinoé s’efforça alors de glisser quelques mots avant que le prince ne prenne congé d'elle. « Le voile qui a si longtemps couvert le Berthildois et mon cœur se lève aujourd'hui. Nous nous retrouverons sous peu, et il me tarde d'annoncer au monde cette heureuse nouvelle ; d’apprendre à Adrien, qui vous sera comme un fils, qu'il n'y a guère plus cause de craindre l'avenir. » Attendant que les pas de la suite princière ne résonnent au loin, elle se fit servir une coupe du vin désormais tiède qu'elle entreprit de siroter, perdue dans ses songes, avant de quitter la pièce à son tour. *******
La salle d'apparats s'était vue sensiblement transformée pour l'occasion. Une vingtaine de plateaux à tréteaux étaient disposées sur le sol recouvert de fleurs et autres herbes odorantes. D’innombrables torches et bougies s’alliaient à la lueur du soleil mourant pour baigner l'espace d'une lueur orangée. Le dais était occupé par une unique grande table réservée à la plus haute noblesse : ses chaises rembourrées, salières ornées et coupes d'argent se démarquant des tranchoirs bancs et gobelets destinés aux notables et bannerets en contrebas. Ces privilégiés n'occupaient qu'un coté de la table, leur permettant de voir, et d’être vus par, le reste de l'assemblée qui ne semblait comporter qu'une poignée de femmes. À vrai dire, si l'occasion et son titre ne l'y contraignait pas, elle même aurait volontier dînée dans ses appartements comme nombre de ses consœurs si cela signifiait être épargnée des hurlements des chiens et cris des ivrognes, pour ne revenir qu'une fois les hôtes repus et les musiciens remplacés par des bardes, bouffons et autres divertissements. Accouplée avec le prince Aetius à la place d'honneur, elle pouvait aisément converser avec Jérome de Clairssac à sa droite, et plus difficilement avec Martin d'Adhémar à la droite d'icelui ou encore Grégoire Berdevin de l'autre coté de l'Ivrey. Elle avait jugé son appétit conséquent lorsque le premier met fut présenté, une soupe crémeuse aux champignons et escargots beurrés, mais dut rapidement se rendre à l'évidence qu'elle ne pourrait faire honneur à chacune des créations des cuisines. Sa mine désabusée n’empêcha pas des seigneurs courtois, ou simplement en quête de faveurs, de lui faire parvenir les plus belles pièces qu'Aetius se devait alors de préparer. Finalement, lorsque un domestique présenta une tranche de mouton mijotée au lait d'amande de la part du jeune Tiburce d'Erdheim, Arsinoé craqua et rejeta l'offrande d'un geste de la main ; l'on pouvait bien se permettre d'offenser un homme dont on avait déjà pardonné la traîtrise. C'est alors que son intendant pénétra dans la salle par quelque issue dérobée pour lui faire parvenir une nouvelle de poids : le seigneur de la Toranne se tenait en ce moment même dans la cours de la bastide, demandant permission de se joindre aux festivités. Elle acquiesça après un instant d'hésitation, déclarant qu'une place soit aménagée en face d'elle. La venue de Godfroy, si elle ne fut annoncée par aucun héraut ou bannière, ne manqua pas d’être remarquée lorsqu'il se retrouva debout et dos à deux centaines de convives. Plus amusé qu'autre chose par la situation, le seigneur eu la bonne grâce de paraître quelque peu gêné lorsque son regard croisa pour la première fois celui de sa cousine. Il ne devait plus être loin de sa quatrième décennie en ce monde, mais conservait les traits fins et riants qu'elle avait longtemps connu et qui encore lui inspiraient confiance. S'inclinant devant sa marquise puis son régent, il entreprit gracieusement de se présenter une fois que la quinte de toux du grand prêtre de Néera quelque part à sa gauche ai prit fin. « Votre Altesse, votre excellence, messires, je n'avais escompté être reçu en de si brefs délais, et encore moins de rejoindre votre tablée auréolée de la gloire d'une victoire que je ne peux prétendre partager mais seulement admirer. Mais je ne souhaite aucunement jeter un voile sur cette joyeuse nuitée, et mes explications devront donc attendre le lendemain si vous n'y voyez d’inconvénients ma Dame. » Elle n'y voyait en effet pas d’inconvénients, et de Saint Aimé prit place alors que le festin reprenait son cours, étant visiblement décontenancé par la présence du régent et le regard de haine que lui portait Frédéric de Kelbourg. Il recentra finalement son attention sur Arsinoé, lui faisant savoir que son jeune fils Lancelin l'avait accompagné, désireux de servir comme page dans l'entourage de sa grande cousine. « J'en serai ravie, Adrien a besoin de compagnons de son âge et les rejetons de mes bon chevaliers ne sauront éternellement convenir. Mais mon cousin, si ma mémoire ne me fait pas défaut le jeune Lancelin a une sœur aînée, je me rappelle même des circonstances de sa naissance à la cour de feu notre oncle. Pourquoi ne pas aussi me confier la petite Aélais ? Comme chacune de mes dames d'honneurs, je me porterai garante de son éducation et si les dieux sont bon lui dénicherai un parti digne de son rang. »Godfroy de Saint Aimé sourit et hocha la tête avant de drainer sa coupe, mais l'on ne pouvait manquer de remarquer qu'il se concentra dorénavant presque exclusivement sur le faisant devant lui. |
| | | Cléophas d'Angleroy
Ancien
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| Sujet: Re: Cave ne cadas Dim 20 Jan 2013 - 15:47 | |
| Cantharel, nous voilà ! Sous le manteau de la nuit, loin des hautes murailles de Cantharel, loin des collines désertes qui s’étendaient sous ses murs, loin des bosquets gris, loin du monde en somme, la fière troupette du Baron Cléophas cheminait. Leurs montures étaient devenues plus grosses, leurs joues étaient devenues plus gonflées et leurs manteaux pourpres s’étaient couverts de poussière. Il faut dire qu’ils avaient longuement attendu dans le pays d’Erac, en faisant le tour, d’auberge en hostellerie. Lorsque s’acheva le siège et lorsqu’ils furent laissés sur le coté de la colonne arétane, ils hésitèrent, ils tergiversèrent. Là où les gardes, les scribes et les aides souhaitaient rentrer en Merval et sentir l’embrun de l’Olienne, Cléophas voulait attendre. Attendre toujours. Quelque part, il sentait, au plus profond de son âme étrange, que rien n’était fini. Le départ de l’Anseric ne signait que le début d’une autre lutte, plus longue et sanglante, pensait-il et il ne voulait se résoudre à quitter l’Eraçon et le Nord du Royaume alors que tout allait bientôt s’y jouer. Il ne s’entoura plus que de ses plus fidèles et envoya les autres au travers du pays de roche, afin qu’ils apprennent ce qu’il s’y passait et qu’ils reviennent la bouche pleine de nouvelles. De cette façon, il apprit les sièges, les escarmouches et les autres petites batailles qui ravageaient la lande ; de la bouche de soldats ivres, de marchands itinérants, de hérauts égarés ou de messagers trop bavards. Cléophas prenait garde de changer toujours d’auberge, afin de lutter contre l’ennui surtout ; mais vint un jour où il décida d’arreter les pérégrinations et il s’établit à Harren, dans une hostellerie aux hauts pignons et aux colombages colorés au nom racoleur et prometteur de bonne pitance : le Ragondin Joufflu. Lors, le Baron nomade trouva bon de se choisir un lit à plumes et une chambre à fenêtres. Pour attendre. Attendre toujours. Cantharel, nous voilà ! Une chandelle s’éteignait encore, sous les poutres noircies de la chambre baronniale. L’odeur de suif y régnait, malgré les fenetres qui étaient toutes ouvertes lorsque venait le matin. Le tenancier n’avait pas tout de suite compris qui était son client. Il n’avait jamais vu ni griffon, ni laurier, ni blason autre que celui du Roy. C’était un homme simple au visage qui portait les marques de sa bêtise. Ses petits yeux, son nez trop aquilin, son front large et brillant et les restes d’une barbe que l’on pouvait imaginer jadis soyeuse ; tout faisait qu’on ne savait s’il fallait rire ou pleurer devant lui. Malgré tout, et comme les hommes de sa condition, il était d’une gentillesse extreme ; ainsi ne dit-il rien lorsque le Baron demanda des bougies au lieu de chandelles, des encens, des tentures rouges et d’autres accessoires encore pour se livrer aux rituels mervalois. L’un de ces rituels était particulièrement important : la correspondance. Le Baron passa des journées entières reclus dans ses quartiers à griffonner quelques lettres sur du parchemin. S’il n’aimait écrire des lettres, il s’y appliquait ; et le peu de mots qu’il écrivait sur chacune d’elles étaient choisis. Les pays du Soleil reçurent leur part de peaux et de nouvelles. Sept mots écrivit-il à chaque fois et il scella de sa cire purpurine. Mais les quelques lieux au Nord de Diantra qui avaient connu le Baron ne furent pas en reste ; et c’est de la sorte qu’il annonça son retour en pays Berthildois à la marquise. Sa plume gratta le poil, la cire les brula et il envoya un de ses hommes reprendre le chemin de Cantharel. Cantharel, nous voilà ! Le jour était à peine levé que le Baron décida de rejoindre la salle commune. Le tavernier ne dormait étrangement pas, ou alors dormait-il debout. Les simples d’esprit n’avaient pas les memes habitudes que les autres, disait-on dans les hospices suderons. Le premier repas du jour fut frugal, fait de quelques tranches de pain brun, de myrtilles confites et d’hydromel. Le voyage serait plutot long, et la route menant à Cantharel passait au travers de bois sombres et peu fréquentés sinon par quelques bandits de petites voies. Les auberges à cet endroit étaient rares et les quelques qui tenaient encore étaient si vétustes que l’on se demandait si de la vie y restait encore. Ils ne feraient pas de halte, autrement en certaines clairières. Comme au premier jour en Erac, toute la troupe s’affairait au dehors et se couvrait de ses habits de voyage ; leurs pelisses de cuir et leurs heaumes légers. Cléophas, lui, était perdu dans les vapeurs sucrées de son calice. Il regardait la liqueur se rider et onduler et briller à la lueur d’un Soleil qui se levait au loin. Le sol était encore froid et les arbres gris d’un fin brouillard. Le voyage ne serait pas agréable…mais après tout, Erac n’allait pas perdre son caractère en si peu de temps. La petite corne retentit et un homme vint prévenir Cléophas que la troupe était prête à partir. Au simple d’esprit il laissa une bourse de pièces d’argent qu’il avait dans ses malles. Sa monture était préparée, il la monta. La route se déroulait devant eux comme un long ruban ocre sur un brocart verdâtre. Il lui semblait, à Cléophas, qu’il pouvait déjà apercevoir au loin les tours berthildoises et le colombier qu’il avait investi. Cantharel. Nous voilà ! Elles étaient là. Presque intactes. Presque fumantes. Presque luisantes. Les hautes murailles de Cantharel. Lorsqu’ils arrivèrent non loin des grandes plaines qui s’étendent devant la ville, ils firent halte et des malles ils sortirent leurs tenues d’apparat. Leurs heaumes altiers, leurs plumes noires et vermeilles, leurs plaques luisantes et gravées. Le Baron attacha une pomme d’ambre autour de son cou, sous les couches de tissu dans lesquelles il était enroulé. Le calme s’était emparé de ce lieu qu’il avait vu couvert de piques et de tentes et de trébuchets en tous genres. Tout l’apparat de Merval était là, quoique un peu terni. Pour autant, ils ne manquaient pas de dignité, celles des hommes que l’on croit morts et qui reviennent des brumes de l’oubli. Les fantômes rouges, sur leurs montures avançaient lentement, dans la plaine et se dirigeaient vers les portes. La colonne suivait le Gryffon qui se balançait fièrement dans la brise et les olifants blancs sonnèrent trois fois. Il ne fallut pas longtemps avant qu’un cavalier solitaire vint à leur rencontre, portant sur son tabard les armes de la Marquise et ne sachant qui il avait devant lui. La main sur la garde, il scruta la compagnie jusqu’à ce qu’il vit entre les colosses de fer, le visage amaigri du Baron et ses yeux ardents. Les mots qu’ils s’échangèrent étaient simples. Les portes leurs furent ouvertes et lorsqu’il passa sous l’arche, Cléophas se remémora ces anciens moments entre paix et inquiétude qu’il avait passés ici. La ville semblait avoir vieilli sous la lueur des torches et des lucioles, le colombier était bleu sous la Lune et le château trônait toujours aussi fier au-dessus de la ville. Les quelques badauds qui étaient à prendre le frais à leurs fenêtres ou au pas des tavernes regardaient les spectres pourpres avec des yeux ébahis. Tout sentait le rêve. Sur le trajet, le cavalier apprit à Cléophas qu’un festin était tenu en compagnie de la marquise et des vainqueurs, qui avaient écrasé l’ost arétan comme le pas d’un cheval foule un brin d’herbe. Du château venait une clameur et des fumées odorantes ; les rôts, les aromates, le vin et la sueur. La compagnie démonta silencieusement et, un garde à son coté, le Baron pénétra dans l’enceinte et il fut conduit devant les portes de la grande salle. Avant que les portes ne soient ouvertes, le Baron retint un héraut par le bras et lui dit, la voix claire. « Faites dire à la marquise et à ses hôtes que le Baron de Merval ; que le Nomade ; que le Justiciaire d’Erac ; que le diplomate ; que Cléophas d’Angleroy est à ses portes, comme ses mots l’avaient juré. Dites leur que les gryffons ont du mal à périr. »
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| | | Jérôme de Clairssac
Humain
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| Sujet: Re: Cave ne cadas Lun 21 Jan 2013 - 12:39 | |
| La guerre était terminée, elle avait été au final très courte et c'était une bonne chose mais cela n'avait pas épargné la population pour autant. Bien au contraire, celle-ci avait beaucoup souffert vu les exactions faites par la Baronne d'Olyssea. Le temps était maintenant à la fête, la reconstruction viendrait en son temps mais pour le moment, c'était l'apparat qui convenait et il fallait s'y plier. Tous les protagonistes avaient donc été convié à se joindre à la Marquise et l'arrivée du Régent mettait tout le monde en ébullition, surtout qu'il avait défait le Comte félon (oui c'est ainsi vu qu'il est le perdant) et qu'il l'avait fait prisonnier.
Jérôme s'était donc préparé comme il convenait à son rang, il avait revêtu une tunique noire brodée de fils argentés, son pantalon était de la même couleur ainsi que ses bottes et il portait une rapière d'apparat mais qui pouvait faire son office s'il le fallait. Il s'était coiffé comme il le pouvait mais sa chevelure blonde était toujours aussi compliquée à discipliner. Enfin prêt, il se rendit au lieu ou on l'attendait et il fut annoncé comme il se devait par son titre de Baron d'Etherna. La salle avait été décorée pour l'occasion, les parfums des fleurs disposées sur des tréteaux et les herbes odorantes bataillaient pour prendre le dessus sur les autres. Il fut surpris de constaté qu'il avait une place de choix à la droite de la Marquise, sur la table d'honneur qui était équipées des meilleurs sièges. Grégoire, pour sa part, était de l'autre côté, auprès du Régent.
Le repas commença et pendant que les plats se succédaient, la Marquise et Jérôme parlèrent de banalités comme souvent, puis Jérôme se permit de poser une ou deux questions qui le tracassaient
"Votre excellence, si vous me permettez. Tout le monde a entendu dire que le Régent avait capturé le Comte d'Aretria, avez vous eu confirmation de cela ? et pardonnez mon audace, mais savez vous ce qui lui est réservé ?"
Jérôme avait prit part à une joute organisée sur les terres du Comte et il devait bien avouer que l'homme lui avait fait bonne impression. Il était content en quelque sorte d'avoir pu tenir sa promesse de ne pas lever la main sur lui ou son épouse. Poussant encore dans la conversation il continua sur sa lancée
"Maintenant que le marquisat vous est acquis, puis je savoir ce que vous comptez faire ensuite ? avec la défaite de deux de vos vassaux que sont Aretria et Olyssea, vous allez être fort occupée, comment voyez vous les choses ?"
Il aurait pu continuer lorsqu'il fut interrompu par l'intendant qui dit à la Marquise qu'un de ses vassaux attendait et demandait à participer. Toutes les personnes ayant prit part étant présentes, Jérôme se demanda de qui il pouvait bien s'agir. Godfroy de Saint Aimé, seigneur de la Toranne fut introduit, surement l'un de ceux qui voyant dans quel sens le vent à tourné, se range du bon côté. Jérôme devait s'avouer qu'il détestait ce genre de personnes, opportuniste jusqu'au bout. Il ne put s'empêcher de sourire lorsqu'il remarqua que la Marquise lui joua un tour bien orchestré, elle l'installa face à elle, ce qui était un honneur mais puisqu'il était le seul à avoir le dos tourné à la salle, il était évident qu'il serait remarqué par tous. Il prit la parole et encensa les personnes présentes mais Jérôme ne répondit pas, il ne le salua pas en retour et son sourire s'estompa tandis que son regard dur et froid le jaugeait. Il fallait admettre que l'homme avait de l'arrogance et qu'il savait apparemment y faire mais cela ne prit pas avec le Baron et il n'était apparemment pas le seul à ne pas apprécier la démarche du sieur. La Marquise montra une fois de plus ses qualités de dirigeante en demandant au Seigneur de lui confier ses enfants, le tout dit de façon très courtoise mais tout le monde avait vu derrière le voile et la prise d'otage que cela amenait, obligeant le vassal à se rappeler de ses obligations à l'avenir. |
| | | Grégoire d'Odélian
Humain
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| Sujet: Re: Cave ne cadas Mar 22 Jan 2013 - 19:36 | |
| " Avec une cravache ?
- Oui, on obtient des résultats inattendus. "
Grégoire et le régent étaient en pleine discussion pendant que des serviteurs s’activaient derrière eux à leur servir toujours plus de vins et que les plats défilaient tour à tour. Se laissant à rire un peu trop, le corps de Grégoire lui rappela toutes les ecchymoses qu’il avait subit lors de la dernière bataille et lorsque ce dernier se toucha l’entaille qu’il avait au front, il remercia les cinq de l’avoir protégé. Ainsi lorsqu’un domestique avertit le comte du diner, Grégoire laissa l’armure pour une simple de tenue à l’allure guerrière et arriva à la salle commune pour présenter ses hommages au régent et à la marquise avant de prendre place à leur côté. Cependant le comte semblait s’isoler entre deux bons mots, s’enfermant dans un constat de la situation. Ce soir on fêtait la victoire des forces coalisées, ce soir on fêtait la victoire de dame Arsinoé, nouvelle marquise de Saint-Berthilde. Cela tira un sourire à Grégoire qu’hier encore, son frère venait punir les félons du roi et qu’aujourd’hui lui-même venait mettre quelqu’un sur le marquisat. Odélian faisait et défaisait des régions et peu pouvaient se targuer de faire de même, le bélier était l’un des nobles les plus puissant voire le plus puissant du nord et bien mal les en prendraient, ceux qui le sous-estimeraient.
Jetant un coup d’œil sur les personnes qui l’entourait le noble fut pris d’une légère déception quant à l’issue qu’avait pris ce conflit et sentait une légère jalousie poindre en voyant le beau rôle que s’était réservé son frère Aetius d’Ivrey. Cependant au moins le conflit était fini et la victoire était là ; et cette victoire justement certains semblaient la goûter avec un peu trop de plaisir. Jetant un coup d’œil à la marquise celle-ci n’avait plus rien à voir avec la jeune fille éplorée qui avait tapé à chaque porte du royaume quémandant et pleurnichant pour qu’on lui vienne en aide. Non aujourd’hui celle-ci était fière et droite, surélevée, elle pouvait scruter la salle et poser son regard suffisant sur les châtelains qui étaient aujourd’hui sous coupe. Enfin bientôt cette bourgade ne serait plus l’une de ses préoccupations, remettant ses pensées et autres discours privés à une date ultérieur-surement au lendemain, car il fallait être bien sot pour parler des conséquences de cette guerre devant toutes cette assemblée d’oreilles -Grégoire continua de blablatait avec le régent. Parlant de son futur enfant, il assura à l’Ivrey que ce serait un honneur que son frère devienne le parrain de son fils.
C’est à peu près à ce moment du diner que l’on reçut deux invités pour le moins surprenant. Le premier de cette grande parade fut le cousin de la marquise le bon Godfroy de Saint-aimé. Le comte regarda l’homme de manière indifférente mais ne put s’empêcher d’avoir un peu de pitié pour le pauvre bougre qui était toisé avec hypocrisie par ses pairs à commencer par le sieur Kelbourg qui n’avait pas levé le petit doigt jusqu’à ce que la situation lui soit des plus avantageuses. Le pauvre Godfroy n’avait fait que jouer la partie comme les autres, il avait seulement mis plus de temps que les autres à étaler son jeu. La seconde interruption fut celle du baron de Merval, oui mon sieur. Après s’être fait annoncer le coq débaroula avec sa suite, tous vêtus de leurs beaux ramages. Cependant le coq était en réalité chapon et aux vues du rôle qu’avait eu l’homme-selon ce qui l’avait pu entendre-on pouvait décemment se poser la question sur son interruption en ces lieux. On le pouvait effectivement mais Grégoire n’en avait cure, il regarda le spectacle de ce seigneur pique-assiette sans y prendre part et attendit que le griffon-à moins que ce ne soit le moineau, il ne se rappelait jamais-eut fini ses amabilités pour que le repas puisse enfin reprendre.
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| | | Aetius d'Ivrey
Ancien
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| Sujet: Re: Cave ne cadas Mer 23 Jan 2013 - 17:12 | |
| Le Régent était quant à lui gourmand de banalités. A la tête de la tablée, accompagnant Arsinoé à sa gauche, il semblait être son co-hôte, et cette attention paraissait lui plaire. Il avait troqué l’armure pour une houppelande cousue d’arabesques dorées aux motifs floraux, et sa couronne d’argent avait laissé place, pour des raisons de modestie envers son hôtesse comme par commodité, à une toque rigide de feutre vert attifée d’une longue plume de paon. On était loin, ma foi, des airs militaires de la journée, tant dans les parures que dans le comportement. La tête presque toujours penchée vers son commensal le comte d’Odélian, Scylla babillait avec lui une poignée de courtoisies et d’urbanités. Un large sourire illuminait son faciès un peu pâle, et plus les plats se succédaient, plus l’Ivrey oubliait les conseils de ses amis, qui l’avaient mis en garde sur les poisons, qui sont la coutume dans les soupers politiques d’Estrévent – d’où revenait la marquise. Il buvait donc, et riait fort, et parlait doucement, avec une infinie concentration, avec son ancien beau-frère. Parfois il se tournait vers ses vis-à-vis pour décocher une plaisanterie, levait son calice à l’approche d’un échanson ou pour un toast. Léger, badin, on n’eut trouvé de damoiseau plus affable d’Ydril à Lante ! Parfois aussi, sa voix débordait : « Aux Cinq n’en déplaisent, un fils pour le Berdevin ! », s’était-il écrié avant de glouglouter sa coupe avec force ostentation et de repartir sur quelque anecdote aussi saugrenue que gauloise.
Ces airs joviaux, pourtant, s’effondrèrent quand le baron d’Etherna tenta d’élever un peu la conversation. Ce dernier, tandis que deux écuyers tranchants posaient sur la table un gargantuesque pâté de lamproie, s’enquit du sort qu’on réservait au comte d’Arétria ainsi qu’au reste du Berthildois. Le Régent s’entremit.
« Cà, cà ! fit-il avec un beau sourire qui, pourtant, sourdait quelque chose d’un peu morose, ne gâchons pas cette nuitée avec ces choses, l’heure est aux réjouissances ! »
Et le comte de Scylla de se retourner vers Grégoire pour lui narrer comment il avait tué un de ses homonymes lors d’un duel, un mari jaloux, avant d’ajouter qu’il l’aurait tué trois fois encore en échange d’un moment avec son épouse et ses seins doux comme le miel. Cependant, le destin de la narration voulait plus que de simples badineries, et toute une suite de seigneurs vint se présenter au festin. Ils rappelèrent tous à Aetius la guerre, aussi ce dernier se concentra sur son pâté, qu’il mâchonna pour dissimuler son silence que masquait déjà le brouhaha des deux cents convives. Les festivités suivirent leur cours. Les conversations sortirent le régent des lugubres pensées destinées à ces hommes valeureux qui avaient été vaincus, aux actes et bassesses de cette campagne militaire qui avait opposé les amis et les frères. Souvent, quand il jetait un regard à la marquise, il la pensait triste, et par attendrissement ou par sympathie pour les sombres pensées qu’il la croyait nourrir, sa main venait glisser sur la sienne avant de la serrer. * Lorsqu’il fut bien tard, que l’assemblée devint plus calme à cause des vins et des plats, Aetius demanda finalement le silence. Il se leva, le calice à la main et les yeux se tournèrent vers lui. Le régent laissa passer un ange avant d’inspirer et dire.
« Le Royaume n’en est pas à ses premiers cahots, nul ne le nierait. Ces dernières années plus encore, désastres et guerres se sont abattus sur notre douce Péninsule. On a vu des forces infernales déferler sous nos murs, des hordes d’elfes noirs soutenues par leurs nécromancies impies, on a vu, dans le ciel, le soleil embraser la lune. La mort noire, la Malenuit ont frappé notre terre et nous mirent à l’épreuve comme jamais une génération d’Hommes le fut auparavant – pas même celle de Léandre de Soltariel. Pourtant nous les affrontâmes et fûmes victorieux, malgré tous les obstacles, malgré tous les pièges qui furent mis sous nos pieds. Tous ces maux, nous les surpassâmes avec le mépris que les hommes de valeurs portent au danger et à la mort.
Mais pourquoi, alors, sommes-nous si faibles ? Pourquoi, en devers de notre courage et de notre pugnacité, la Damedieu ne nous offre-t-elle pas les fruits qu’a produit notre vertu ? L’Equilibre devrait revenir, car l’univers est ainsi fait, et il reviendra. Mais il est retardé.
Il est retardé par les divisions de notre race, qui pourtant est appelée à régner, retardé par nos querelles fratricides qui drainent le sang de notre royaume, tandis qu’au loin, tapis dans leurs tanières, nos ennemis rongent leur frein, fourbissant leurs glaives et préparant leur poison, attendant son heure, épiant nos guerres et riant de nos morts. Qu’ils durent rire de nous, ces démons ! quand ils apprirent que les prud’hommes de la Péninsule s’entredéchiraient, ces frères que notre Mère pleure de larmes amères.
Le temps de l’Unité est venu. Cette guerre, bientôt, sera morte et la paix du Roi reviendra dans nos riantes pénates. Vous irez rejoindre vos demeures, vos femmes et vos enfants, et sur le chemin, j’en jure !, on dira à votre passage ‘Cet homme-là a fait son devoir’. » Il tapota alors l’épaule de son voisin de table, le comte d’Odélian, avant de laisser rouler son regard bleu vers le fond de la table. Un silence, assez long pour en devenir gênant, s’imposa, mais l’Ivrey reprit.
« Je suis un homme faible, et trop longtemps je me suis montré indigne de ce que les Cinq divins m’ont offert. Qui le nierait ? Pas moi, non-da ! Mais j’ai accepté les punitions que m’ont envoyé les dieux. J’ai battu ma coulpe, et maintenant je ne vis que pour contenter les volontés de la Providence. Aussi, aujourd’hui est un jour heureux, car, comme le voulait notre Mère, je prends femme pour donner à la race des Hommes des fils à sacrifier pour le bien commun, comme c’est mon devoir. »
Il se tourna alors vers Arsinoé, et, lui prenant une main, lui fit comprendre qu’elle devait être levée, à son niveau, en tant que sa femme.
« Arsinoé, d’Olysséa et de Sainte-Berthilde, la dame que tant d’entre vous ont conseillé contre les ruses des renards et soutenu contre les violences des loups, a accepté de se lier à moi devant les dieux et les Hommes, pour la plus grande gloire du royaume des Hommes. » Alors il leva sa coupe vers le plafond, le menton levé, son regard embrassant ses camarades le temps d’une seconde.
« Glaives et sang pour mille ans de gloire ! »
Et lorsqu’il eut prononcé cette phrase, un homme – un féal que d’aucuns reconnaîtraient pour être le chevalier de La Jaille – se leva à son tour et porta son verre bien haut pour répéter le cri de guerre d’une voix tonitruante : « GLAIVES ET SANG ! » |
| | | Arsinoé d'Olyssea
Ancien
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Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 28 ans Taille : Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Cave ne cadas Dim 27 Jan 2013 - 16:32 | |
| « ...Et le soir venu messire d'Angleroy, tous, aussi bien l'Archonte que le vilain, se rendent dans les diverses amphithéâtres de la cité. Le plus beau et celui que j'ai eu le plaisir de fréquenter occupe une presqu’île à l'extrémité du delta de l'Oliya, le seul de ces édifices que les sombres qui infestent la région n'osent encore souiller de leur présence. Comme en toute chose de l'Orient, la plus exquise beauté y côtoie barbarie infamante, un mélange enivrant dans lequel il est aisé de se laisser sombrer. Mes paroles ne sauraient rendre compte de la grâce des jeunes virtuoses, ou de l'horreur que sont les derniers instants des pauvres âmes envoyées en pâture à des créatures provenant de terres plus lointaines encore. Il vous faudra en témoigner par vous même mon bon ami, lorsque vos pèlerinages vous mèneront de l'autre coté de l'Olie.. » L'Ivrey avait levé sa main, mettant peu à peu fin aux discussions éparses de cette fin de soirée. L'estomac d'Arsinoé se noua avant même qu'il ne prenne la parole; l'homme avait trop bu à n'en point douter. Ses craintes vinrent grandissantes au fil du singulier discours qu'elle écoutait sans réellement comprendre, attendant plutôt une déclaration qui ne se fit pas longtemps attendre. Ne voyait-il donc pas qu'il était trop tôt ? Plus paniquée qu'agacée, la marquise s’efforça de rester impassible alors que le monologue touchait à sa fin, ignorant avec superbe l’expression presque blessée de son oncle. Les acclamations des fidèles du prince ne purent masquer le silence étonné des Berthildois, la poussant à se lever à son tour, joignant sa main à celle d'Aetius tout en levant haut sa coupe étrangement vide. Les quelques mots qu'elle aurait pu ajouter furent perdus dans les vivats des chevaliers de l'Atral, et bientôt la salle toute entière fut debout. Elle savait pourtant qu'elle avait perdu plus d'un fidèle aujourd'hui, et la main chaude de son prince ne lui était qu'un pale réconfort. Orientant son visage vers celui-ci tout en arborant un sourire rendu fébrile par la fatigue, l'alcool et l'inquiétude, elle lui glissa d'un ton badin quelques mots qu'elle oublia aussitôt : « Peut-être vous faudra t-il apprendre la devise de votre nouvelle famille messire, mes aïeux ne furent jamais connus pour leur fougue. » ********
Barkios de printemps, troisième jour de la quatrième ennéade, en l'an six du onzième Cycle
Le soleil était déjà haut lorsque la marquise entrouvrit les yeux, nichée haut dans le donjon de la forteresse. Les festivités s'étaient prolongées tard dans la nuit suite à l'annonce des épousailles, trop longtemps pour les quelques amusements de la nuitée à vrai dire, et elle ne doutait pas que le château tout entier somnolait encore. Se levant enfin, elle se contenta d'un frugal déjeuner en la compagnie de Mélisande de Sillé et d'Adrien, avant de se rendre au temple comme était son habitude. Non pas le Temple de la Martyre qui faisait la gloire de la cité, mais bien l'autel propre à la forteresse. La vieille bâtisse devait être plus vieille encore que les murs qui l'entouraient, plus vieille que le marquisat lui-même. Mais ses avantages principaux résidaient en sa proximité et l'absence des prêtres qui n'auraient autrement pas manqué de l'importuner au sujet de la rumeur qui devait en ce moment même enflammer Cantharel. C'est donc en la seule compagnie d'un vieux chevalier qu'elle ne reconnaissait guère qu'Arsinoé put se recueillir quelques instants, profitant simplement de la présence solennelle de la Damedieu avant d'entamer les véritables travaux de la journée. Elle commença par faire quêter son Sénéchal qu'elle ne pouvait guère se permettre de se mettre à dos. Taciturne et fier, la loyauté qu'il vouait à sa marquise et à son sang ne tarda cependant pas à transparaître, sans qu'elle ne pense l'avoir réellement convaincu du bien-fondé de son entreprise. Elle put ensuite se pencher sur la lecture d'un vélin en provenance du Ner, parvenue au milieu de la matinée par voie des airs : la première missive du bon sire Jean de Brosse, envoyé au lendemain de la Bataille des Plaines (de Cantharel) retrouver la trace de sa cousine volatilisée. Ayant à peine dépassé les collines d'Ack, l'homme rapportait rumeurs de troubles naissant dans la foret de Malwen qui auraient contraint sa troupe à emprunter chemin plus sûr. Plus irritée par la perte de temps occasionnée par le message que par son contenu, Arsinoé jugea alors bon de retarder l'échéance par quelques divertissements. Plus d'une heure fut ainsi mise au profit de diverses jeux de tables en compagnie de Mélisande et Brunehaut, avant que la dame ne prenne enfin son courage à deux mains et fasse inviter les seigneurs victorieux afin de traiter de l'épilogue du bref mais sanglant épisode. La table fut débarrassée de tout sauf une large carte de l'Atral, aux traits quelques peu vieillis et fantaisiste mais au parchemin exquisément enluminé. |
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