[Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ]
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Lœthwil
Ancien
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Sujet: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Dim 25 Mar 2018 - 15:10
Calimehtarus de la Première ennéade de Verimios Dixième année du Onzième Cycle Nord-Est de la frontière Ardamir–Annon Aube
L’empressement marquait les visages. L’anxiété gagnait les cœurs. Le poids d’une guerre séculaire semblait soudainement s’abattre sur des épaules qui ne s’y attendaient pas. Ils ont la dent dure, les traumatismes du passé proche. Il est plus virulent que l’on ne veut bien le croire, le souvenir du sang des frères, de la disparition des pères et du chagrin des mères. Mais il était bien trop tard maintenant pour faire marche arrière. Yutar était à portée de main, alors il vous fallait finalement prendre le premier et dernier véritable risque de cette croisade et la saisir. La Grande Chasse avait trouvé conclusion favorable. Les Sombres y ayant trouvé la mort ne se comptaient peut-être pas en plusieurs centaines, mais vous, vous n’auriez à composer qu’avec des blessés. Et surtout, avec ces quelques têtes, c’était un réseau entier d’informations qui était tombé. Et vous auriez peu de temps pour agir avant que l’absence de nouvelles n’alerte vos adversaires, et qu’il ne soit déployé à nouveau, ou que pire, dans leur profond déshonneur, les Drows ne prennent leur revanche sur la Sylve innocente.
- À partir de maintenant nous évoluons réellement en terrain dangereux. Tu entames, faisant face aux trois-cent Souffles t’accompagnant dans les derniers instants de ta croisade Cette fois, nous nous lançons dans la bataille sans l’avantage du nombre, et une fois Yutar proche nous perdrons aussi celui du terrain.
- Tari n’a pris aucun de nous pour l’instant, mais nul doute qu’à Yutar, cela changera. Ringeth prévient, le ton sombre Là-bas, en l’honneur d’Hiril Lôthren, des sacrifices seront faits, mais que l’on s’en réjouisse, car chaque guerrier perdant la vie pour l’Anaëh, c’est un millier de ses enfants préservés du danger.
- Les Sombres ont profité de l’Annon pour nous épier bien assez longtemps ! Rhewil enchaîne, aussi explosive que toujours Plusieurs fois ils ont tenté de nous envahir, quand l’invasion a échoué ils ont tenté de nous empoisonner, et après que l’on ait vaincu leurs poisons, par le feu ils ont creusé de profondes cicatrices dans l’Œuvre ! Il est temps qu’on leur retire définitivement le pieds qu’ils ont dans notre foyer !
- Et nous avons le pouvoir de le leur retirer. Amdir conclut, dans le plus profond des calme La forteresse de Yutar est bâtie sur une pierre du même nom, un minéral que beaucoup d’entre vous connaissent certainement comme réagissant de manière très virulente à la magie. La survie de Yutar tient aux limitations que s’imposent ses mages.
- Au Calimehtarus de la prochaine ennéade, sous les yeux de leur perversion de Dieu guerrier, leurs murs s'écrouleront. tu places la main sur ton coeur Chasseurs tu reprends soyez notre arc. Nous, mages, nous serons vos flèches.
En ce jour, aucune clameur, aucun cri de guerre ne monta, car l’heure n’était plus aux encouragements. L’heure était à l’action. Vous aviez une ennéade.
Les guerriers iraient chercher Yutar par le Nord, feraient front prévisible. Toi et tes mages la cueilleriez par le Sud.
Mouvementé premier mois qu'aura connu le petit être qui t'accompagne avec plus de fierté que de raison. Les bases de la magie d'Ilweran se seront ancrées dans une pratique irraisonnablement intense.
Krish Al'Serat
Ancien
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Dim 25 Mar 2018 - 21:58
Un tonnerre de rire s'éleva dans la cour principale. Puis ce fut de nouveau le tour des quolibets, des insultes et des encouragement. Le coup accidentel d'un supporter trop impliqué déclencha une bagarre dans les gradins de bois. En quelques secondes l'échauffourée avait dégénérée en un second foyer de duel, engendrant à son tour, paris insultes et encouragements. Deux hommes musculeux en toge noire ceinturée de blanc et portant la frontale de Meingal montèrent jusqu'aux perturbateurs. Plusieurs se stoppèrent et s'inclinèrent. Trois ne voulaient visiblement pas s'arrêter en si bon chemin et descendirent à la suite des prêtres pour rejoindre la fosse et attendre leur tour. La poussière étaient soulevées par les mouvements des combattants en une fumée tournoyante. Elle collait à leur peau couverte de sueur et tâchait leurs cheveux défaits.
Ils devaient bien être deux ou trois-cent à hurler, frapper et rire. Les gemmes passaient de main en main tout comme les paniers de viande séchée. Des hurlements aux Dieux plus que des prières fendaient parfois la masse grouillante. Les dernières chasses avait été plus que fructueuse avec le retour de la chaleur et après l'hiver difficile qui leur avait couté plus d'un camarade, les officiers préféraient laisser tout ce beau monde se remplumer avec autre chose que le poisson d'Uraal qu'ils avaient bectés pendant deux mois. Cela faisait donc près d'un mois que les rations avaient été augmentées et que la cour de parade, transformée en arène sous l’œil attentif des adeptes de Meingal, accueillait chaque jour son lot de courageux, d'envieux, et de duels hiérarchiques.
Le sang des eldéen était chaud et les officiers leur laissaient beaucoup de liberté hors de leur temps de service. Par contre, qu'un soldat se présente saoule à son quart, ne prenne pas soin de son équipement ou se comporte d'une façon déshonorante était puni de façon toute eldéenne par leurs supérieur ou par les deux prêtres de Kiel qui étaient restés après Eraison. Si on ne pouvait se permettre de perdre des hommes pour des problèmes d'intendance, l'art d'infliger la douleur sans causer de dégâts irrémédiables était bien connu des Eldéens. L'un dans l'autre, la place et la latitude qu'avaient donné aux gardiens du fort de départ de la majeure partie des forces armées rendait l'endroit tout à fait confortable. L'aile sud, désertée par les troupes du IIIe Ost, avait même été annexés par les enfants d'Isten et de Natha, renforcés par des confrères et consœurs arrivés d'Ithri'Vaan à la fin de l'hiver.
Soudain, la foule des spectateurs vociféra en coeur une prière à Uriz et à Meingal. Le combat venait de trouver son vainqueur. Le perdant, sonné et le nez en sang, était trainé jusqu'à l'infirmerie. Au-dessus de tout cela, à la fenêtre du bureau du Maître des lieux, une femme au long cou suivait de son œil perçant l'agitation coutumière, une moue de mépris sur les lèvres. Sa têtes, gris sombre sous de courts cheveux blancs et bouclés, rappelait vaguement celle d'un vautour malgré sa jeunesse. Elle en avait en tout cas le regard méchant.
- Et ça se dit une armée... " cracha-t-elle en laissant retomber le pan de toile qui permettait à la pièce de garder une fraicheur et une pénombre agréable. - Ne soyez pas obtuse, Ker'tyza." sourit Telzik, honorable Obok Senger du Ier Ost depuis le triste décès de tout autre postulant à ce titre l'année passée. " Cela fait deux ans qu'ils n'ont pas eut le droit à des combats décents, il faut bien qu'il se fassent la main autrement. Elda leur manque et les échos des instabilité n'arrange pas leur moral. "
Penché au-dessus de la carte tactique sur laquelle était posée de bien trop nombreux pions de pierre colorées, il semblait réfléchir intensément en tournant et retournant une figurine blanche dans le battoir qui lui servait de main. Il releva finalement la tête vers la femme haute et rachitique en robe bleue.
- Et puis c'est un jour de fête. La Valdruk Satyl a annoncé sa grossesse ce matin. Cela nous fait donc quatre futures mères ce printemps sans compter les filles de Natha et les enfants de l'année passée. Si on ne reçoit pas bientôt la relève, il faudra monter une école. " Ker'Tyza pinça les lèvres si fort qu'elles disparurent. Un petit plaisir pour l'officier. Ce qu'il pouvait détester cette sale bique... " Mais pour en revenir à nos affaire. Les survivants ont-ils repris connaissance ? - Oui. Sinon je ne serais pas monté vous voir. - Évidement." convint l'homme avec une patience que seul le statut ecclésiastique de son hôte l'obligeait à avoir. " Et alors ? Qu'on t'ils dit ? " - Ils n'avaient pas compris ce qui était arrivé. D'après eux, c'était comme lors de la Retraite, les arbres ont attaqués leur patrouille. "
Telzik lacha un rire mauvais.
- Des mensonges de lâche pour justifier leur faiblesse. - Peut-être, mais je vous ai dit que leurs blessures ne correspondaient pas aux armes des elfes que nous avons affronté jusqu'ici...
Il y eut un regard noir pour toute réponse. Le vautour ne cilla pas.
- Cette putain de forêt n'est pas plus intelligente ou magique qu'un troupeau de cochon. Ce mysticisme ne sert qu'à nous tenir à distance. Nous trouverons les coupables de ces attaques éclairs et nous reverrons leurs tête de leur côté de la ligne de front. - Bien, Senger Telzik. Je vous avertirai s'il y a du nouveau. "
D'un geste ample, la prêtresse salua et quitta la pièce dans un vol de voiles bleu-nuit. Un instant plus tard, elle était de retour à l'infirmerie, l'oeil encore plus froid que d'ordinaire. Ce fichu militaire ne comprenait rien aux guerres et aux enjeux mystiques qui s'établissaient autour de cette forêt ! Elle le laisserait mettre en place ses patrouilles supplémentaires. Qu'il s'amuse en attendant que les expériences des prêtres touche à leur terme. Ils trouveraient un moyen de protéger leurs guerriers contre la colère de cette forêt ou ils la bruleraient mètre par mètre et obligeraient les elfes à s'approcher d'eux.
Æ'ranûron Eruithel
Elfe
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Lun 26 Mar 2018 - 22:06
Calme, quiétude, pérennité. Voilà ce dont j'avais besoin, et c'est ainsi que loin de la foule grouillante des Noss rassemblée je me le procurai. Que Tinuviel emporte les discours galvanisant empreint d'une pointe d'inquiétude face au sort que nombre trouveront peu clément aux abords du fort. Je n' avais nullement besoin de ces paroles, ma détermination à aller jusqu'au bout de cette entreprise était intacte. Les derniers jours passés en compagnie d'Estiam, à éliminer les uns après les autres n'importe quel sombre qui avait le malheur de croiser notre chemin, me laissaient confiant pour la suite des événements. Même si je n'embrassais pas les idéaux pour lesquelles le chef de guerre auto-proclamé menait cette guerre purificatrice, le résultat escompté me satisfaisait. J'aurais vite fait de tirer ma révérence une fois la région débarrassée des Drows, allant vaquer à mes occupations propres, m'employant enfin à mes devoirs vis-à-vis de l'Andraàn'ad. Vide d'une occupation hostile, il me serait possible de parcourir ces terres sereinement et de retourner aux différents temples du clan dispersés dans cette région:vérifier qu'aucun noir elfe s'y est réfugié, faire un état des lieux suite au Voile, redécouvrir les secrets gravés dans la roche des grottes et cavernes composant chacun des sanctuaires. Tout un programme... Mais d'abord Yutar... et supporter silencieusement les éclats héroïques nourris par une béate croyance religieuse qui animait les cœurs des guerriers rassemblés, de ceux près à sacrifier leur vie pour protéger l'Anaëh.
Le soupir que je poussais fut accompagné d'une longue fumée. Portant ma pipe à ma bouche, je tirai de nouveau dessus, tandis que mes yeux se posaient sur deux Noss passant à proximité. Ils avaient l'air particulièrement jeunes. Peut être entamaient-ils à peine leur deuxième siècle. Sous peu il serait confrontés à une bataille effroyable.
Je me demandais à quel point ils étaient conscients de cela, ou la foi dans la libération de cette partie de l'Anaëh les aveuglait-elle ? Peut être était-il préférable d'occuper son esprit d'illusions plutôt que de se confronter à la réalité des choses. Mes frères et sœurs de sang semblaient doués pour cela, ils s'entraînaient mutuellement dans ce cercle vicieux. Une des raison pour laquelle je préférais m'isoler, et contempler.
Contempler le souffle de la forêt, fébrile Contempler le temps s'écouler, doucement Contempler un horizon s'approchant, prometteur
Lœthwil
Ancien
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Lun 26 Mar 2018 - 23:55
Trois-cent s’étaient mis en marche vers le Nord de la forteresse. Des chasseurs d’élite, pour beaucoup vétérans de guerres qu’elles fussent intestines ou livrée contre l’extérieur. Ils seraient votre visage devant l’ennemi, les premières cibles à abattre. Tu n’aimais pas ne pas pouvoir marcher avec ceux-là, te voulant leur protecteur plutôt que leur protégé, mais il le fallait. Restait à compter sur leur habileté.
Cinq t’accompagneraient de l’autre côté de la tenaille, et à vous six certainement seriez-vous plus destructeurs que l’entièreté du reste des Souffles ralliés. Ellyrion ; Eraïson ; la pierre de Yutar… les pions s’étaient parfaitement placés pour que puisse avoir lieu ce rituel. Tes dissensions avec l’approche de l’Académie, tes voyages en solitaire à travers Miradelphia : la férocité de l’Anaëh, l’influence de la pensée mortelle, celle des dangereuses sciences Eldéennes, les sirènes de l’Aduram… ton esprit lui-même semblait avoir été modelé de manière à être prêt à recourir à de tels extrêmes.
Hen Kÿria beriammen – Que Kÿria nous protège
À l’approche de l’échéance, tel était devenu ton mantra, et à ce mantra allait tes convictions. Les Voix ne vous auraient pas accompagné jusqu’ici pour que La Mère vous abandonne. Vous agissiez guidés par la Très Sage, et La Dame Sauvage serait à vos côtés. Et si c’était folie que d’y croire, tu y avais sombré assez profond pour emporter nombre de tes frères avec toi.
Un millier avait éclaté, s’était dispersé à travers l’Annon, car si la Chasse est terminée pour vous, elle ne le sera pas pour eux tant que la forteresse ne sera pas tombée. Quand les échappés du carnage à venir fuiront les pierres noyées sous le sang, partout où guettent encore les frères, les flèches continueront de pleuvoir. Certainement il en est qui gagneront l’Elda, mais qu’ils soient peu nombreux à ramener les contes de leur défaite, car ceux-ci auront pour mission de s’inscrire parmi les plus terrifiantes de leurs légendes.
- Huit-cent serait prendre trop de risques, mais je suis certaine d’atteindre ma cible à sept-cent cinquante.
- Tu en es sûre Vessëlin ? Quitte à entrer leurs lignes de vue, on peut se permettre de s’approcher encore un peu.
- Le plus de marge sera le mieux. Fais-moi confiance. Je n’ai jamais failli notre clan, je ne te lâcherai pas maintenant. Et puis… le regard de la chasseresse se tourne vers une étrange elfe entre deux âges j’ai trouvé la parfaite personne pour m’aider.
Tu souris. La maîtresse des chasses de la Lin’Serindë était réputée capable d’abattre trois proies d’une flèche. Il était temps pour elle d’exploser son record.
Littéralement.
Tanäel
Elfe
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Mar 27 Mar 2018 - 21:47
Le clair des jours succédait au sombre des nuits. Leurs foulées martelaient la terre et leurs inquiétudes flottaient dans l’air. Le silence était leur meilleur compagnon, toujours sur leurs talons, dissipant les ondes de paroles qui menaçaient parfois d’émerger. Le silence les accompagnait, les poursuivait, les camouflait. Des étrangers qui se rassemblaient, qui veillaient les uns sur les autres, qui partageaient la même nourriture et qui dormaient sous les mêmes étoiles, mais toujours aussi éloignés, de part et d’autre d’un fossé qui, semblait-il, ne pourrait jamais être franchi.
Mais elle n’était pas seule.
Elle n’était jamais seule. Que recherchent-ils?
Elle ne savait pas. Elle ne demandait pas. Mais ils se rapprochaient, la source se faisait plus puissante, plus définie, les vents bouillonnaient d’effervescences, ils se rapprochaient, elle le sentait, elle le savait. Leurs désirs et leurs craintes n’avaient pas d’importance. Le masque de leur apparence pouvait se fissurer, se morceler, disparaître; tout cela n’avait pas d’importance. Son désir d’exister était la seule chose qui pouvait guider ses pas; elle ne suivait pas les empreintes laissées par les autres, elle ne suivait pas leurs traces éphémères.
Pourquoi?
Elle était l’architecte de son univers, la muse de sa propre création. Les portes apparaissaient à ceux qui les cherchaient. Il suffisait d’y poser un regard plus perçant.
Ta place n’est pas parmi eux.
Rien ne la retenait, rien ne l’attachait. Les barreaux s’étaient rompus depuis longtemps, leur acier illusoire avait fondu, il ne restait plus que ses pieds pour la porter et ses yeux pour l’orienter. Plus de voile, le filtre s’était craquelé, la brume s’était dissipée.
L'existence qu'ils avaient partagée – durant ces derniers instants et les prochains – n’était que le fleurissement d’une époque passagère, dénuée de ficelles, qui finirait inévitablement par faner. Elle le savait. Ils le savaient.
Le cycle se renouvelait, le cycle continuait.
Le vagabond ne cherchait pas son chemin, il n’avait pas de destination, il ne recherchait rien de précis; il contemplait toujours, ses sens aux aguets, errant d’une constellation à la prochaine, glissant sur la surface des circonstances qui se perpétuaient autour de lui. Une présence qui n’adhérait pas, qui flottait continuellement, trop volatile pour se gluer contre la terre.
En jouant avec les inconnues, on risquait de se brûler, mais la douleur ne m’effraie pas.
Elle continua à marcher, à suivre ces étrangers qu’elle apprenait à connaître dans leur silence. Ils parlaient parfois de cette chasse, cette fameuse chasse, cette chasse qui pressait, cette chasse qui les préoccupait, cette chasse qui les définissait. Mais une fois la flamme éteinte, le combustible épuisé, que reste-t-il vraiment, si ce n’est les cendres froides des anciennes rêveries?
Puis ils arrivèrent.
La clairière était pleine. Des dizaines et des dizaines de frère et de sœurs, d’anciens rivaux et de nouveaux amis, de visages mystérieux et familiers, rassemblés dans un même endroit, autour d’un même discours, épaules contre épaules, l’esprit à l’affût et le souffle nerveux. Un spectacle qui blêmissait la nature en projetant son ombre monolithique. Plusieurs consciences fusionnées en une seule. Une foule aux mêmes aspirations. Un troupeau.
Ce n’était pas sa place.
N'était-ce pas ce que tu voulais?
Elle pouvait partir. Vessëlin? Ioriston? Des visages fermés, tantôt méfiants, tantôt inquisiteurs. Des visages qu’elle ne connaissait pas, qu’elle ne connaîtrait sans doute jamais. Des idéaux, des passions, des conceptions qu’elle ne comprenait pas. Des manies indéchiffrables, des silences qui disaient beaucoup mais qu’elle n’entendait pas. Des inconnus. Rien ne la reliait à eux.
Et pourtant.
Pouvait-elle vraiment partir? Se laissait-elle bercer par les mensonges de son esprit?
Ils disaient avoir besoin d’elle.
Pouvait-elle vraiment partir? Était-elle leur prisonnière? Tu n’es pas si différente. Faible et malléable. Insignifiante. Tes illusions épousent seulement des formes complexifiées, tout aussi invisibles pour toi.
Pouvait-elle vraiment partir?
Dernière édition par Tanäel le Mer 28 Mar 2018 - 19:46, édité 1 fois
Lœthwil
Ancien
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Mer 28 Mar 2018 - 15:10
Ta main se pose sur l’épaule de Vessëlin, signe de ton absolue confiance en elle pour la suite avant que tu ne t’écartes en direction d’autres Souffles. Et une fois ton regard arraché à celui de la maîtresse des chasses, ton sourire s’étiole et tes sourcils se froncent. L’archère est présente. L’hydromancienne est présente. La géomancienne est présente. Le pyromancien n’est pas bien loin. Le façonneur est là. Mais ce n’est vers aucun d’entre eux que les pupilles de la Lin’Serindë se sont tournés lorsqu’elle mentionnait l’aide providentielle. Au lieu de cela elle semblait s’être attardée sur une elfe dont les traits t’étaient complètement inconnus. Une étrangère. Une solitaire. Perdue. Perdue au sein d’une armée improvisée au sein de laquelle chacun savait quel combat il menait et pourquoi. À son regard tu comprenais qu’elle avait simplement suivi, sans plus de réflexion, qu’elle s’était laissé guider par quelqu’un, ou par quelque chose, dans des choses qui ne la concernaient que de loin. Elle n’était pas à sa place, mais elle voulait y être, ou alors elle se pensait devoir y être. Elle n’était pas à l’aise, et elle ne s’en cachait pas.
La Sylve autour de vous conte les bribes de son histoire ayant pu traverser l’Anaëh jusqu’ici. Les arbres chantent une tragédie à mi-voix, un désespoir de trouver, une férocité à chercher, un immense succès dans le plus grand des échecs. La Sylve autour d’elle fait conte de sa candeur, conte de son éduquée ignorance, du labyrinthe de sa pensée. De comme elle y est profondément perdue.
Ta paume se pose sur son bras, la sortant de ce monde de réflexions, et le petit reptile sur ton épaule tend une griffe vers elle, attiré par les anomalies semblant la suivre. Tu essaies de toucher le Souffle, il essaie de toucher la trame. Que l’Inconstante vous soutienne, que Kÿria accorde à celle-qui-guérit de vous offrir sa bénédiction. Que l’espace d’un instant la pensée confuse se démêle, ne serait-ce que pour répondre à une question.
- Qui es-tu ?
La question n'est pas de savoir si tu le peux, mais bel et bien si tu le veux.
Tanäel
Elfe
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Mer 28 Mar 2018 - 21:14
Elle suivait Vessëlin, elle suivait cette femme qu’elle ne connaissait pas. Était-elle sa prisonnière? Son animal de compagnie?
Pourquoi suis-tu cette femme? Elle n’est rien. Tu n’appartiens qu’à toi-même. À Kyrïa.
Qu’est-ce qui tenait de sa volonté? Qu’est-ce qui tenait de ses désirs enfouis, dont elle ignorait même l’existence? Avait-elle seulement le choix?
Parmi tous ces gens, parmi ce troupeau fiévreux, affamé du même désir, ne risquait-elle pas de se perdre?
Un grand homme la dévisageait. Il était grand, beaucoup trop grand; une bête enfoncée dans le corps d’un Anëdhel, la peau de cuir et d’écorce, le tronc large et couvert de déchirures, des jambes nouées qui semblaient puiser leurs racines dans la terre; peu vêtu, un simple pagne pour s’abriter des regards et une cape pour réchauffer ses épaules; ses cheveux d’or grisaillé plaqué contre le rebord de son crâne, flottant au-dessus du vide, l’autre côté dépouillé. Sur son épaule, une créature tout aussi étrange, mais dans la contradiction : une petite créature d’écailles, beaucoup trop petites, frêle, fragile, mais aux pupilles tout aussi perçantes; ce que son corps n’imposait pas, c’était sa conscience qui le projetait : une fortitude dégagée sous des apparences trompeuses. Deux contraires, pourtant réunis en cet instant, en cet endroit, deux forces dissonantes qui parvenaient pourtant à se concilier.
L’Homme-Bête s’approcha. Elle recula instinctivement. Il posa ses griffes sur son bras, imité par son antithèse appuyée sur épaule, plongeant leurs prunelles brûlantes dans les siennes.
« Qui es-tu? »
Elle était Tanäel.
Qui es-tu?
Qui était Tanäel? Un nom, un mot, un son. Rien de plus. Pouvait-elle résumer l’éternité en un seul mot?
Qui suis-je?
Lorsque le ciel s’obscurcirait, lorsque les nuages s’épaississaient pour brouiller les lueurs du jour, lorsque les étoiles mourraient le matin pour renaître le soir, sa présence s’opposait aux changements. Elle était cette figure intemporelle qui semblait avoir toujours existé, qui évoluait, qui changeait, qui ne se reconnaissait plus, mais qui était toujours familière. Lorsqu’une cabane s’endommageait, qu’il fallait la réparer avec de nouvelles planches, encore avec de nouvelles planches, encore avec de nouvelles planches; à quel moment la cabane se transformait-elle en quelque chose de nouveau? Son apparence était la même, sa forme était semblable, mais ses matériaux différaient, son essence s’était métamorphosée; rien n’était vraiment pareil, sa constitution divergeait avec celle d’origine, seule la forme restait. Qu’avait été la cabane, alors? Qu’était-elle devenue? Existait-elle encore?
Je ne suis rien.
Elle n’était qu’un esprit coincé dans la même chair, une conscience en claustration dans son propre corps, observatrice impuissante de la réalité qui se réinventait autour d’elle. Elle regarda son bras zébré de cicatrices, sa main blafarde. Était-ce la sienne?
Elle prit une grande inspiration pour chasser le désordre, pour ordonner le vortex qui remuait son esprit, pour soumettre ses pensées, l’espace de quelques instants.
« Nos réflexions se bousculent pour naviguer les méandres de notre conscience. Le pied d’un bord, le pied de l’autre, nous chancelons sans jamais trouver de stabilité. » Son regard se perdit dans l’infinité du firmament et des feux qui immolaient sa surface. « Je suis la fille du crépuscule. Celle qui naquit entre deux mondes. »
Une stature imposante, un corps veiné de tendons et de muscles, rappelant ceux de la bête, une incarnation de Carpacelva; mais aussi un regard nébuleux; des yeux bouillant d’ardeur, mais aussi des yeux mélancoliques, doutant sans douter, convaincus sans vraiment l’être. Un regard qui avait vu beaucoup, mais qui avait peu partagé, qui n’avait pas pu.
Il n’est pas si différent.
« À tâtons dans l’obscurité, à toujours chasser notre ombre, on finit par se perdre. Que cherches-tu vraiment? »
Lœthwil
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Jeu 29 Mar 2018 - 14:55
Une étrange sensation. Un léger malaise. Un tourbillon dont les eaux se croisent de la même manière que ses mots. Elle était plus que perdue l’étrangère, elle était piégée. Piégée dans un vortex dont elle est elle-même à l’origine, son esprit tourmenté par sa propre magie. Pourquoi ? Pourquoi s’être infligé cela ? Tu entends tinter les arcanes, tu entends l’éther se mouvoir, mais incapable de voir avec ses yeux, d’entendre avec ses oreilles, et de ressentir avec sa peau, tu ne peux que spéculer, imaginer… en combien de morceaux son monde a-t-il été brisé, pour qu’elle ait pu ressentir le besoin de le reconstruire ? À quel point se sent-elle seule dans ce monde qui n’appartient qu’à elle ? À quel point la solitude l’a-t-elle rongé ?
Les douleurs de la solitude, tu les connais, et pour cela tu es le seul à blâmer, car c’est toi qui es parti à leur recherche. Jeune être incomplet, à la fois trop choyé et négligé par deux moitiés qui n’arrivaient pas à se saisir l’une de l’autre, tu t’es arraché à elles deux pour t’apprendre. Tu es allé jusqu’à t’arracher aux Voix pour t’apprendre. Loin des frères, loin des Chants, loin de l’Anaëh, par curiosité, tant envers le monde qu’envers toi-même, tu as fait une part importante de ta vie. Tu t’es construit sans fondations, tu as tout accroché à un cœur flottant dans le vide. En cherchant à échapper à la différence, tu as connu la solitude. Tu as connu les pulsions primaires qui grognent en son sein. Tu as connu la rage de découvrir, la rage de savoir, la rage de faire, pour combler la solitude. Tu as connu les inexplicables chagrins, les sombres heures d’abandon, pour expier la solitude. Tu as connu les passions éphémères, l’amour que l’on croit être le vrai, pour fuir la solitude. Tu as embrassé et nourri une folle colère, sans jamais te l’avouer. Tu es devenu une harmonie Dissonante, grâce à la solitude.
La solitude t’a consommé pour mieux te permettre de te reconstruire, et si l’ouvrage n’est pas encore terminé, tu restes sur le chemin de la guérison. Après de longs siècles d’errance, à nourrir l’une et l’autre de tes trop nombreuses passions, à hésiter à t’accrocher à l’un ou à l’autre de tes talents, tu as appris à correctement les sommer. Tu sais qui tu es. Tu sais ton rôle.
Tu es celui qui accepte le changement. Tu es celui qui connaît les peuples étrangers. Tu es celui qui voit les différences entre chaque révolution du cycle de la nature. Tu es un guide vers le lendemain. Vers un lendemain que tu espères plus beau. Mais si tu t’es trouvé, que peux-tu bien chercher alors ?
Comment le lui dire, à elle qui entend de manière si particulière le langage des mots ? Comment le lui montrer, à elle qui s’était emprisonnée loin de celui de la nature ? Le Dragon-Fae ne tient plus, s’élance à travers les airs et s’agite frénétiquement autour de la jeune elfe. Parfois une étincelle, parfois un flocon, parfois un éclat de cristal, il se laisse aller à redessiner un monde, et à redessiner la trame qui fait le monde de pensées de la fille du crépuscule.
Sans rompre le contact physique avec Tanaël, tu diriges ton attention vers les quatre équipiers à portée de vue, et leur signe rapidement de partir à la recherche du cinquième et d’avancer sans toi. Tu avais à faire avant de les rejoindre.
- Regarde, et écoute. Je vais te le montrer.
D’une main dans son dos, tu l’amenais à s’accroupir avec toi, et à écouter. À ressentir. À s’imprégner de ce que tu voulais lui communiquer à travers l’éther. Les doigts de ta main libre s’enfoncent dans le sol, tu prends le pouls de la terre, et lentement, tu soulèves ta paume. Et ci et là, poussent des arbres sans fondations, des troncs sans vie, sans racines, flottant tous à quelques décimètres au-dessus du sol. Ils poussent gemme par gemme, les immenses troncs de gr anite et de glaise. Elles se dévoilent une par une, les feuilles de gemmes verdâtres. Et ta main glisse le long de l’omoplate de ta camarade alors que tu en reprends possession, que dans de lourds mouvements, comme déployant la force de mille elfes, tu ne termines de faire éclore les gemmes colorées qui seraient les fleurs de tes géants. Tes gestes deviennent plus graciles alors, et faisant démonstration de la souplesse qui est tienne, tu souffles l’eau et le feu dans ta création. Des flammes naissent les cerfs de la harde fuyant les neiges du félin qui les poursuit. De flamboyantes lumières à travers leurs ailes de vitraux font des fées de ton univers une véritable merveille. Des filets d’eau ruissellent à travers les branchages comme des serpents, des nuages flottent comme des oiseaux, et ton monde dans un monde semble en rétablir l’harmonie. De la signature de tes sortilèges il se dégage une paix profonde, une mélodie dont les différentes lignes, qu’elles fassent figure de danse mortelle ou de candide gigue à travers la vie se mêlent en un équilibre parfait. Et tout est connecté, tout n’est que cause et effet, tout est nécessaire et rien n’est superflu, et la solitude n’existe pas, car dans le monde que tu recherches, dans l’Œuvre comme l’entend la Déesse Mère, il n’est pas une vie qui n’ait pas sa place.
- Voilà ce pour quoi je me bats. Et le fait même que tu puisses ainsi faire démonstration de cet idéal laissait entrevoir la férocité avec laquelle tu étais capable de lutter C’est ce pourquoi nous nous battons. Mais et toi ? Tu prends sa main, l’aide à se relever, et guide son regard à travers la forêt moitié de gemmes, moitié de véritables branches, baignée par les rayons du soleil levant Es-tu sûre que c’est ton combat ? Ce lui que tu dois livrer aujourd’hui ?
Tanäel
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Ven 30 Mar 2018 - 19:41
La petite créature voletait autour d’elle dans une cadence précise; des battements et des envolées soigneusement choisies, pirouettes et caracoles, pour évoquer des projections qu’elle ne comprenait pas, mais qu’elle pouvait entrevoir; de ces mouvements surgissaient parfois des brides d’images éphémères : ce que la créature d’écailles ne disait pas, elle le métaphorisait par des ondulations de l’espace, des songes invisibles qui disparaissaient aussitôt, mais qui prenaient leur sens lorsque son regard ne s’arrêtait pas sur chaque détail, mais se concentrait plutôt sur son enveloppe : en fixant les premiers arbres, la forêt avait tendance à disparaître derrière leurs ombres. Peut-être qu’il a raison. Peut-être que nous avons tous notre impact sur ce qui nous entoure. Peut-être que tout n’est pas aussi éloigné que nous pouvons le penser, peut-être que sous nos griffes émerge la réalité que nous voulons, que nous souhaitons façonner, et qu’il suffit de tendre le bras.
Peut-être que le sens n’émanait pas de la façade, mais de ce qu’elle cachait, malgré l’impossibilité d’agripper tous ses morceaux.
Peut-être qu’à partir du néant surgissaient les premières pierres, les premiers pas vers un équilibre confortable, artificiel mais souhaitable, puisqu’il empêcherait la chute sempiternelle? Est-ce vraiment ce que tu veux?
L’Homme-Bête, plutôt que de l’abandonner à ce chaos, l’invita à constater l’angle qui lui était propre, qu’il s’était forgé par la matière de ces périples (ses yeux arboraient des cernes dissimulés) : le nid dans lequel il pouvait se reposer.
Ses ongles grattèrent la terre, et de ces écorchures s’exondèrent les premiers tapis de végétations : des tiges d’argile s’élancèrent vers le haut, s’habillèrent de feuilles et de gemmes; des artifices qui pourtant semblaient se concrétiser, qui épousaient la vivacité d’une création naturelle : le spectacle d’une conscience qui pouvait matérialiser sa volonté en sculptant l’éther, en donnant forme à ses pensées; une communication où les paroles se remplaçaient par des images, puisque le sens ne survenait pas des proférations, mais se transmettait plutôt par le ressenti. En cet instant, en ce moment, concentrée sur cette vision, tout semblait si simple, si fluide, si authentique.
Et pourtant.
De cette démonstration se dégageait la sérénité de celui qui avait fini par trouver ce qu’il cherchait; en parcourant les labyrinthes, en voguant dans le tourbillon, en persévérant malgré les continuelles impasses, il était parvenu à graver sa propre signification dans les murs, à laisser des indices pour se retrouver dans le dédale.
Et pourtant.
Comment pouvait-elle continuer à chercher sans même savoir ce qu’elle voulait trouver? Pouvait-elle vraiment matérialiser ce qui, malgré les nombreuses tentatives, ne semblait même pas exister? Mais peut-être qu’il a raison.
Est-ce que le soleil, avant son levé, toujours abrité sous la couverture de l’horizon, s’interrogeait sur la raison de son réveil quotidien? En avait-il besoin? Était-ce nécessaire de toujours tourner en rond, comme le félin qui poursuit sa queue sans jamais l’attraper?
« Je suis dans un chaos perpétuel. Je dois me battre pour chaque bouffée d’air. » Elle haussa les épaules. « Peut-être qu’ici je trouverai un appui pour sortir de l’eau. »
Elle en doutait.
Mais où veux-tu aller, de toute façon?
Spoiler:
On peut poursuivre vers Yutar, pour le moment j'irai avec Vess, mais peut-être pas pour les mêmes raisons que vous :)
Lœthwil
Ancien
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Sam 31 Mar 2018 - 0:02
Ce que tant d’efforts venait de bâtir, il avait suffi d’un geste pour en commander l’évanouissement. La féerie que tu venais d’offrir à l’Annon s’effaçait, laissant place à la forêt maigrelette qu’elle était en réalité. Ta vision serait une étoile parmi tant d’autres dans son ciel, mais ne suffit-il pas d’un luminaire pour dévier la course des papillons ? Tes doigts se saisirent de sa joue, ton pouce la caressa comme l’on caresse celle d’un enfant, et ton autre main vint se saisir de l’épaule opposée.
- Je l’espère.
Pour l’instant il vous faudrait marcher. Mais pas lui. Lui n’était pas encore prêt.
Les yeux du petit reptile se firent gros, décorant son visage d’une expression que des larmes même n’auraient pas su rendre plus tragique. Aujourd’hui était le jour où tu l’arrachais à toi, et pour lui, c’était bien trop tôt. Bien trop tôt était pourtant la raison pour laquelle tu refusais sa compagnie, comme tu aurais refusé celle de Nerdhanel il y a quelques ennéades de cela si ce n’avait tenu qu’à toi. Partager une part de ton être ne suffit pas. Comprendre la douleur ne suffit pas. Ilweran était fragile, physiquement fragile, bien trop pour s’exposer ainsi à un tel théâtre de guerre, trop fragile pour s’approcher, en tant que créature de magie, d’une ressource aussi dangereuse que la pierre de Yutar, il lui fallait trouver refuge. La Mère le guiderait. Son Père le guiderait, son premier Père ; et à défaut de cela, nombreux étaient les Ornedhels pour lesquels la Chasse s’arrêtait aujourd’hui.
Il retrouverait avec l’un d’eux le couvert de la forêt profonde. Grâce à votre lien il saurait toujours où te retrouver.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ De Calimehtarus de la Première ennéade de Verimios à Calimehtarus de la Seconde ennéade de Verimios Dixième année du Onzième Cycle
Tant qu’il existait le moindre couvert buissonnant vous étiez une menace invisible. Tant qu’aube et crépuscule brouillaient vos silhouettes, ceux qui ne vous attendaient pas n’auraient pas le temps de vous voir venir avant que les têtes ne tombent. La Chasse continuait son cours vers le Sud, loin des berges du Grand Lac, et les éclaireurs continuaient de tomber sur votre passage. Votre temps était compté avant que leur absence ne devienne suspecte, bientôt le silence serait plus parlant que les cris d’une armée, et les Sombres partiraient à la recherche de l’agresseur. Vous étiez trop loin de votre terrain de confort pour vous le permettre, trop engagés dans vos plans pour qu’ils ne faillissent maintenant, alors les herbes et les branchages ont continué de bruisser. Une ennéade durant, de plus en plus fort à mesure que vous pressiez le pas, mais jamais assez pour que l’indolent ne devienne alerte, vous avez mis vos pions en place.
Derrière les lignes ennemies, dans l’œil du Cyclone, vous vous prépariez à vous jeter dans le mur de vents.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ Arkuisa de la seconde ennéade de Vermios Dixième année du Onzième Cycle Avant le lever du jour
Quand les premiers rayons de soleil perceraient la barrière céleste, vos frères et vos sœurs s’élanceraient le cœur contre les flèches. Quand les yeux myopes de vos cousins des profondeurs auraient pris acte du peu de distance, la rage bouillerait en eux, et leur désir de sang les prendrait au cœur et au corps. Ils imploreraient leurs Dieux impies, et se prépareraient à verser le Sang. Ils prieraient que le massacre soit suffisant à nourrir la venue d’une nouvelle forêt folle, à l’image de celle qui leur a donné naissance. Ils prieraient que sur la Pierre de Yutar soit bâti un nouvel instrument de torture, que les légendes Sylvaines décriraient pour le restant de l’Eternité comme une seconde Source de profond Mal.
Quand les premiers rayons de soleil perceraient la barrière du jour, ils prieraient leurs Dieux impies de créer un nouvel instrument de leur chute.
Aucune rage ne bout en toi, sinon celle qu’embrase la vertueuse furie qui t’anime. Ce que tu fais, tu le fais pour toi, tu le fais pour eux, tu le fais pour La Mère, tu le fais pour ses enfants. Chacun de ses enfants. Vous rétablirez l’équilibre en vos terres une vie à la fois.
Tes muscles sont tendus à l’extrême, ton esprit perdu quelque part dans des mélodies dont toi seul connaît la nature. Ton focaliseur brille d’une intense lumière, s’illumine d’une intense chaleur, une chaleur figurative qui te brûle l’oreille. Ici les flux sont chaotiques, excités par la pierre de Yutar. À cette distance déjà ils sont dangereux, les sortilèges sont plus potents, mais plus difficilement contrôlables. C’est ce sur quoi vous aviez tablé.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ Un peu plus d’une heure plus tôt
- Ici le tracé doit être plus droit.
- Il y a une légère asymétrie de ce côté.
- Vous êtes sûrs que les gemmes sont toutes les trois parfaitement équivalentes ?
- Autant que le sont les manches de flèches qui les portent, fais-moi confiance.
D’entre tous Vessëlin était celle dont le souffle était le plus court. Elle qui ne connaissait la magie que de loin, elle serait celle à qui tant de pouvoir serait bientôt confié. Voir les sorciers tracer leur sceaux, observer les mages se positionner avec plus d’attention encore que les guérisseurs n’en mettaient à inciser leurs patients, que les chasseurs n’en mettaient à bander leur arc, ou que les artisans n’en mettaient au service de leur art était quelque chose d’aussi impressionnant, d’aussi fascinant qu’effrayant. Les yeux de la chasseresse se tourneraient souvent vers ceux de l’étrangère, cherchant un peu de soutien dans ce regard qui semblait traduire une éternelle incompréhension.
Il n’y avait aucune senteur comme celle-là, fut la première pensée de la chasseresse. Il y avait une teinte du souffre des volcans, un rappel des pierres salines des profondeurs de l’Uraal, une pointe des vapeurs acides des cracheurs des Monts Norn… et le tout se mêlait en une humeur impossiblement lourde. Comment leurs poumons pouvaient-ils ne pas exploser, eux qui se trouvaient si près de cette chose ? Comment pouvaient-ils supporter les fruits de leur propre Art ?
Le poids de leurs magies était plus titanesque encore que tu ne l’aurais imaginé. Ce sont trois vies que tu portes à bout de bras, à la force des épaules et debout sur tes deux jambes. Ce sont des siècles de labeur dans leur expression la plus brute que tu t’appropries, que tu fragmentes, que tu restructures, que tu entremêles et que tu confies à un autre. Des larmes coulent sur le visage d’Amdir, ton corps entier est moite de sueur, mais vous êtes encore loin d’avoir terminé, et vous n’abandonnerez pas avant la fin. La sphère lumineuse, le chaos régnant au-dessus de toi, celui dans lequel venaient se brûler papillons de trois sources élémentaires, c’était là votre œuvre. Un cinquième élément, presque parfait. Une synthèse des dons de trois élémentalistes. Une magie instable que vous conteniez à la force de vos corps et de vos esprits. Un sortilège qu’Amdir avait pour devoir de confiner dans des flèches que Vessëlin tirerait.
Les premiers rayons du soleil percèrent l’horizon.
Un grand bruit retentit.
Le regard de Vessëlin se tourna vers celui de celle qui la rendait plus forte.
Ton œil se porta sur Amdir. Celui d’Amdir sur Ringeth. Celui de Ringeth sur Rhewil. Celui de Rhewil sur Æ'ranûron.
Les gemmes qu’étaient les pointes des flèches brillaient du feu salvateur.
Trois tirs.
Tanäel
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Mer 4 Avr 2018 - 17:37
La forteresse de Yutar s’élevait devant elle, des pierres noires appuyées contre des pierres noires, écrasées contre le flanc d’un monolithe tout aussi sombre. Ce n’était pas la construction artificielle et sinistre qui la dérangeait, mais la chaleur imperceptible qui brûlait dans l’air, qui semblait se dégager de l’hématite fiévreuse; des vapeurs qui se condensaient en gouttes cristallines pour couler et se répandre et se contracter et fulminer; un volcan d’énergie volatile qui semblait lui agripper la nuque avec ferveur, lui ébouillanter la peau, consumer son corps pour traverser la cloison de sa physiologie et s’exhaler sous une nouvelle forme.
Tout semblait plus simple, même ses pensées les plus inaccessibles, même ses désirs les plus obscurs, les plus chimériques : tout ce que son imagination concevait semblait pouvoir se matérialiser; mais aussi tout semblait plus menaçant, plus dangereux : un pas dans la mauvaise direction et elle chuterait de la falaise, elle tomberait au fond du gouffre, engloutie par l’abyme.
Elle frissonnait d’excitation.
Mais je dois faire attention. Les plus grands brasiers projettent les plus grandes flammes.
Son esprit se contenait difficilement, les courants voulaient la happer dans leur tourbillon incandescent, réduire sa conscience en cendre par l’anéantissement des barrières pour noyer sa conscience.
Laisse-toi aller. Pourquoi ta méfiance? C’est ce que tu cherchais, après tout.
Elle prit une grande inspiration, se concentra sur l’oxygène qui s’introduisait dans son corps, qui coulait dans ses veines, qui soulevait sa poitrine pour alimenter ses muscles. Elle ne devait pas y penser, elle devait se concentrer sur autre chose, elle devait faire le vide, ne pas se laisser entraîner; la prudence surtout, toujours.
Les risques étaient trop grands, leurs conséquences seraient désastreuses.
Elle regarda tour à tour ses compagnons. Six individus, six frères et sœurs, six enfants. Dans leurs regards se glaçait la détermination : c’était ainsi, ce ne pouvait être autrement.
Serrant son arc, trois flèches entre les doigts, baignant sous les premières lueurs solaires, Vessëlin l’observait. Elle lui sourit. L’heure était venue, l’attente touchait sa fin, tous ces moments de nervosité et d’appréhension se dissipaient; la chasse se culminait, la chasse s’achevait : son esprit devait souffler le brouillard, examiner les contours dans tous leurs détails, englober d’une seule vision ce qui s’étendait devant son horizon : saisir toutes les nuances qui lui avaient échappé.
Sans comprendre pourquoi, sans cerner la raison exacte, en cet instant, en ce moment, elle se sentait bien. Ce jour tant attendu, ce jour serait déterminant.
Et elle en serait témoin. Au-delà des ruines, sur les pierres et les cendres se construira une nouvelle destinée.
Yutar tomberait. C’était ainsi, ce ne pouvait être autrement.
Dernière édition par Tanäel le Ven 6 Avr 2018 - 15:16, édité 1 fois
Lœthwil
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Mer 4 Avr 2018 - 23:11
Un silence de mort vous engouffra sans prévenir, et seuls le coupaient les grincements des engins de guerre Eldéens, que vous pouviez déjà deviner dirigés vers vos frères d’armes et de sang, à l’opposé de votre position. Détruire ou être détruits. Les paupières de Vessëlin étaient plissées à lui crisper le visage, son regard tranchant au travers de la distance vous séparant des murs de la forteresse à la recherche d’une faiblesse. Une faille quelconque à exploiter, une ouverture vers le ventre de la bête... il était temps que les meurtrières de Yutar fassent honneur à leur nom.
- Hauteur !
Ringeth et Rhewil prirent de l’avance sur votre course, et avec une parfaite synchronisation, l’une et l’autre laissèrent libre cours à l’expression de leur art. Ce fut d’abord l’eau qui propulsa vers le haut une archère bandant déjà son arc, puis ce furent des plateformes rocheuses, arrachées à un sol rendu ductile par la présence du liquide qui vinrent lui offrir leur support. Les sens excités par l’adrénaline, les instincts aiguisés par les remembrances d’une récente illusion, la chasseresse laissa la première flèche fuser.
- Couverture !
Amdir et toi avanciez à votre tour, l’un et l’autre autant guidés par des sens ancrés dans la réalité physique que par le flambeau qu’était la gemme imbibée de magie élémentaire traçant le ciel matinal. Le mysticiste fut le premier à s’arrêter, plongeant son sceptre dans le sol comme le ferait un acupuncteur. Les lignes de forces étaient dès cet instant en ta faveur. Déjà bien échauffé par votre rituel d’entrée en matière, tu ne perdis pas de temps dans une plongée graduelle. Les trois Dryades : la gracile créature de bois pétrifié au crâne couvert de serpents, la sorcière des abysses au corps moitié comme celui de leurs habitants, le féroce être de flammes aux cornes comme celles d’un bélier ; ils prendraient de suite la place qu’habituellement occupent tes fées. Le projectile de bois et de crystal filait à travers les airs, dévorant la distance coudée par coudée à une vitesse vertigineuse, mais lorsqu’il y avait plus de la moitié d’un mille entre l’archère et sa cible, un tel flambeau sur la trame aura tôt fait d’attirer les lanceurs de sorts adverses. Ils avaient quelques secondes pour agir, quelques secondes pour déchaîner les éléments contre la menace, mais ils avaient le désavantage de la pierre de Yutar, dont les couinements trahissaient le moindre de leurs actes et en étouffait la portée.
Vous au contraire, vous étiez encore libres.
Ta main s’ouvrit pour mieux se refermer, ton élémentaire de feu dévoila ses crocs, et au loin, une flamme mourut dans l’œuf. Ton autre paume s’élargit ensuite, et les mains jointes, dans une prière, la sirène cristallisa un menaçant trait aqueux.
La flèche traversa la meurtrière, la gemme qui faisait sa pointe excitée par la pierre de Yutar.
Le projectile s’écrasa contre les pierres du château. Le cristal vibra. La dalle vibra.
La gemme façonnée éclata en un millier de morceaux.
Un pan entier de la forteresse en fit de même.
- Hauteur !
Rhewil leva une main, envoyant l’archère vers les cieux, tendit l’autre bras, arrachant au parterre un escalier vers sa camarade, à la recherche de toujours un peu plus d’altitude. Vous étiez totalement à découvert maintenant, des cibles de choix pour les archers adverses. Les mages ne se risqueraient pas à nourrir un infortuné contrecoup à la première déflagration.
- Couverture !
Il ne s’agissait plus de protéger la flèche sur son chemin maintenant, mais bel et bien de vous protéger, Vessëlin en particulier, des traits adverses. Votre formation se resserra, votre avancée ralentit grandement, et votre attention à tous, Ringeth et toi en particulier, se porta sur la pluie de dards qui vous menaçait. Vos efforts conjoints à l’hydromancienne et toi vous offrirent la couverture d’un dôme de glace, décoré comme une carapace de tortue, qui cueillit sans grand encombre la salve.
- Ouverture !
Un tour de vos deux poignets et la barrière éclatait, ne laissant derrière elle qu’un nuage de gouttes de pluie, que le second trait enchanté de Vessëlin trancha net. La distance toujours relativement grande laissa à vos adversaires le temps de vous offrir une nouvelle salve de projectiles avant que le tir de la chasseresse ne trouve sa cible. La flèche fut cueillie à quelques mètres au-dessus des murs de la forteresse, y perdit son équilibre, pour tomber trop près de la brèche qu’avait atteinte la première. L’excitation de l’éther ambiant fut cependant largement assez pour que la combinaison instable d’éléments qu’elle renfermait glisse de son état d’équilibre précaire. Une nouvelle détonation emporta de nouvelles pierres, de nouvelles vies, et tira la pierre de Yutar un peu plus près de son seuil de tolérance.
- Couvert…
La poigne de l’archère sur son arme se resserra. Elle retint une larme. Des cris familiers venaient de monter. Vous n’aviez pas été assez rapides. Vous n’aviez pas été assez précis. L’œuvre des trébuchets et des flèches commençait à se faire concluante. Les premiers sacrifices avaient été faits. Plus que vous tous, c’est Æ'ranûron qui semblait en avoir été touché, et sans réellement chercher votre accord il brisa la formation pour prendre la direction du champ de bataille Nord. Tes dents se serrèrent, mais tu n’y fis pas objection. C’est qu’il restait finalement à l’enfant de l’Andràan’ad un peu de compassion pour ses fanatiques de frères et sœurs… ou alors haïssait-il les Drows au point que leur donner la satisfaction de la moindre vie sylvaine abattue l’exaspérait au plus au point.
- Dans le mille !
Les pierres flottantes disparurent, Vessëlin et Rhewil tombèrent de leurs perchoirs. La première dans tes bras, la seconde cueillie par les flots de Ringeth. Vos yeux toujours alertes se fixèrent sur les derniers instants de votre dernier obus. Si votre perception ne vous trompait pas, alors la flèche atteindrait le cœur de la forteresse.
Un silence perçant s’empara à nouveau de l’atmosphère. Une flamme blanche comme le soleil de midi s’étouffa d’elle-même. La magie déferla sur le fort tout entier.
La trame mise à mal se replia sur elle-même en des dizaines de mimiques d’un phénomène qu’elle n’aurait jamais dû avoir à subir. Une explosion en amenait une seconde, une seconde en amenait une troisième, et comme vous l’espériez, votre sortilège perdit tout contrôle, transformant l’intérieur de la forteresse en une vision d’apocalypse qui s’étendrait lentement sur toute la surface de la pierre de Yutar.
Ringeth s’empara du cor à sa hanche et par procédure plus qu’autre chose, sonna la défensive. Le cercle de mort autour de la forteresse se refermerait bientôt. Vous cueilleriez les lâches ayant décidé d’abandonner le navire. Quant à ceux qui survivraient à votre feu d’artifice, ils succomberaient une fois votre pied posé dans les ruines de Yutar.
Formule des jets de flèches:
0 - 33 : tir raté 33 - 66 : réussite non optimale du tir 66 - 99 : réussite optimale du tir
Pour chaque palier de 100 dépassé à l'addition des résultats : montée du niveau d'instabilité Niveau 1 : Nous les japonais, les répliques de séisme, on connaît Niveau 2 : Les pires des incendies finissent éventuellement par s'éteindre Niveau 3 : ...
Résultats des jets de flèches:
Premier tir : 82 Second tir : 55 ( 137 cumulés ) Troisième tir : 83 ( 220 cumulés )
Krish Al'Serat
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Jeu 5 Avr 2018 - 23:09
Dans un rugissement de douleur, une jambe se dégagea des gravas du mur.
Des craquements, des crépitements, des coups secs. Ceux qui ne pouvaient manœuvré sur les murs nord, rassemblés dans la cour intérieur pour pouvoir protéger les enfants, être mobiliser rapidement et se servir de tous les couloirs d'entrée comme de goulot d'étranglement, écoutaient la pierre se fendre autour d'eux, les phalanges crispées sur leurs armes et les muscles tendus, prêt à bondir. Mais le spectacle de cette masse de sang rouge, de peau noire et de reflets métalliques s'extirpant de la pierre à travers le brouillard de poussière captait autant d'attention que son cri avait touché d'oreilles.
Pas un murmure. Pas une parole ne troubla le chaos des combats extérieurs. La silhouette voutée ondoyait en avançant comme une masse informe. La vérité apparue sous la forme du chef de cette forteresse soutenant une frêle femme au long cou qu'il lâcha dès leur premier pas sur la terre battue. Elle roula a terre, recroquevillée autour d'une étrange sphère de verre, toussant et crachotant. A moitié plié en deux, Telzik continua jusqu'à ses soldats. Le visage en sang et le plastron à moitié défoncé, il arracha l'épée des mains du premier guerrier à porter pour couper les courroies de son armures. Une respiration bruyante et salvatrice ponctua le gong de l'armure tombée au sol.
Pourtant, malgré la rage qui couvait dans le regard de cet homme et la tension qui ne cessait de s’intensifier dans les craquements progressif de leur coquille de pierre, peu de visage osaient afficher le moindre signe de peur. La plupart étaient même au comble d'une excitation sauvage qui soulevaient leurs poitrines et faisaient battre leurs cœur à l'unisson de celui de leur Père.
Si le bâtiment était contre eux, Yutar ne tomberait que s'il n'y avait plus une seule Flamme pour y bruler. Ils ne pensaient pas les elfes assez téméraires pour passer à l'attaque. Ils ne l'avaient jamais fait. Mais dans leur tentative désespéré, ils semblaient avoir oublier une chose. Les drows n'avaient pas peur de la mort. Ils avaient peur de la lâcheté.
La perte du fort, si elle avait lieu, serait la faute pleine et entière des officiers. nulle désorganisation n'avait lieu. Nulle panique n'emplissait le cœur du Fort tandis que les craquement menaçaient de détruire jusqu'à la moindre partielle de pierre. Disciplinés, leur soif de combat et leur volonté décuplée par l'approche de Teiweon, les troupes n'attendaient qu'une chose : savoir comment ils pourraient au mieux vendre leur vie.
D'un mouvement vif, Telzik ramassa la face avant de son plastron bosselé et enroula les courroies de cuir au tour de son bras, s'en faisant un large bouclier.
- Envoyez les enfants et leurs gardiens à l'Ouest. Qu'ils passent par le lac et l'avant poste du IIIe dans Faélia."
Quelques regards réprobateurs apparurent mais on s'exécuta en une fraction de seconde. Oui, la logique aurait voulu qu'ils les mettent en première ligne pour faire hésiter l'ennemi, mais ils étaient trop jeune et trop peu nombreux pour être facilement visibles et identifiables. Ils ferraient de bien meilleurs guerriers à Elda. A moins que le but de l'Obok soit totalement différent ? Mais qui pouvaient savoir ? On ne discutait pas les ordres.
Du coin de l'oeil, il vit la femme au long cou se trainer vers la sortie ouest. Peu importait son devenir. Il ne savait même pas pourquoi il avait essayé de la sauver en la voyant se précipité vers son maudit laboratoire lors des premiers déchainements. A la place, un hurlement surpassa tous les craquements et les explosions de murs qui s'effritaient, tremblaient et s'ébrouaient. " Kulggen du Zhak'Bar's chath ! "
L'ordre fut répété à l'infini, passant d'oreilles en gosiers hurlants. Dans la cour intérieur, les soldats courraient en tout sens. Les portes explosèrent littéralement, dégondées de l'intérieur pour vomir, non pas une marrée vociférantes de barbares mais ce qui semblait être une marée ordonnée de machines. Chaque rangée qui émergeait au pas de charge se décalait sans montrer ses flancs. Peu à peu, aidé par les archers et les armes de guerres sur les murs derrière eux et par l'ordre de défense, plusieurs centaines de drows se massèrent en pelotons serrés, regroupés, tassés entre des boucliers épais qui leur permettaient de se protéger les uns les autres. Un millier d'hommes et de femmes répartis en formations d'une cinquantaine de Flammes. Combien encore attendaient dans les murs ?
Un frisson glacé passa dans le dos de ceux qui avaient combattus aux coté des elfes de pierre à Eraison ou lors de la débâcle du Sud, car bien que modifié et hérisser de piques, ces postures prouvaient une chose : les drows observaient leur adversaires. Cette façon de glisser les lances courtes entre les boucliers pour se battre flanc à flanc n'était pas habituelle pour le peuple sombre. Non. C'était là une technique de défense elfique en milieu découvert.
Une technique elfique, magnifié par le génie destructeur des drows.
Au moment ou la première Carapace mouvante se forma, les sombres se mirent à taper du pied en un rythme lent. Ceux qui le pouvaient entrechoquaient armes et boucliers. La première Carapace commençait à dégager une chaleur anormale. Puis, très vite, chacune des formation fut entourée de son propre dôme de feu et de vent. Au milieu de chaque Carapace, les mages de guerre, les prêtres de Meingal et d'Uriz faisaient flamber si fort leur brasier qu'on ne voyait plus à travers les flammes qui se trouvaient à un deux mètres à peine des boucliers des soldats extérieurs. Peu importait puisqu'il finirait en cendre. Les prêtres de Teiweon et de Valas surveillaient la magie adverse, prêts à dévier ce qu'ils ne pourraient pas arrêter ou à mourir en essayant.
Dans les murs de la forteresse, un tiers des effectifs tenaient les murs et protégeaient les mages moins offensifs qui tentaient de stopper la réaction en chaine.
Et quelque part se dressaient les trois mages de Zhak'Bar qui marmonnaient leurs chants de destruction. S'ils devaient relâcher leur fureur, personne n'en réchapperait, alors ils attendaient. Ils attendaient l'ordre et le lieu propice.
L'air, la pierre et la terre vibraient autour du fort.
D'un même pas, la première Carapace commença a avancer plein Nord, droit sur les elfes qui venaient de les défier. Ils étaient venu pour détruire l’œuvre de la Traitresse et s'ils devaient mourir, alors ils en emporteraient un morceau avec eux. Cette fois ce n'étaient pas quelques jets de flamme et quelques torches tenues par des bras terrorisés qui réduiraient en cendre leur ennemi.
Leurs enfants seraient fiers d'être orphelins, car si leurs prêtres atteignaient Ellyrion, Telzik était prêt à jurer qu'on pourrait voir l'explosion depuis Elda. Tout ce qu'ils bruleraient d'ici là serait une offrande pour leur paver le chemin vers le Nahali.
Tanäel
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Ven 6 Avr 2018 - 23:41
La trame vibrait; une corde étirée jusqu’à son étiolement, jusqu’à sa déchirure; plus rien pour empêcher les ficelles de s’emmêler : l’agitation montait, grimpait, touchait son comble. Ses frères et sœurs s’affairaient : de leurs mains naissaient les premières étincelles du déséquilibre, les ondulations qui ébranlait la surface aqueuse des flots imperceptibles : les éclats qui provoquerait l’instabilité de la structure; autant celle étendue devant eux, couchée contre le monolithe, que celle dont la source semblait se puiser à même la pierre sombre, comme si toute cette puissance émanait directement du minéral.
Je ne ressens plus le froid.
Non, il faisait beaucoup trop chaud, le silence pesait tandis que leurs doigts s’exécutaient dans une chorégraphie précise. Mais son rôle n’était pas de les aider. Elle ne serait qu’une observatrice.
Comme tu l’as toujours été.
Elle s’assit contre le tapis verdoyant, les jambes croisées.
Ce n’est pas mon combat.
Vessëlin, du haut de son promontoire, lâcha la corde de son arc : la première flèche jaillit, fendant l’air comme si toute résistance s’était dissipée, son sifflement perçant le silence : plutôt que de ralentir, sa course s’accéléra; un projectile chargé d’une telle force, d’une telle volonté; une écorchure contre l’espace et le temps : sa pointe ne pouvait que pourfendre sa cible.
Un pan de la forteresse explosa.
Les pierres poussées par le souffle de la déflagration fusèrent dans tous les sens, un nuage de poussière se forma. Même à cette distance, le vacarme résonna au-dessus de sa tête, ébranla le sol; la structure du courant s’effrita, les remous se secouèrent en creusant des sillons désordonnés dans l’équilibre précaire, menaçant de pulvériser son armature; les vibrations de la trame se transformaient en convulsions, la balance se rompait, tout risquait de s’écrouler.
Elle sourit.
Tout est si fragile. Si éphémère. Des rangées de pierres implacables réduites en poussière.
La deuxième flèche s’élança à sa suite, tout aussi rapide que la première, tournoyant sur elle-même, transperçant l’espace qui la séparait de sa cible : elle s’écrasa un peu plus loin dans une seconde explosion; une nouvelle partie de la façade se fracassa contre le sol dans une pluie de décombres.
Yutar s’écroulait. C’était inévitable.
La troisième et ultime flèche fusa; un projectile chargé d’une énergie vibrante, volatile, qui semblait embraser l’espace qu’il traversait en même qu’il balafrait l’essence de la trame, déchirant la surface de l’eau; les flots se fissuraient, la pression était trop forte : le choc se produisit en plein cœur de la forteresse; la détonation résonna jusque dans la fibre de Yutar, ébranlant l’entièreté de la construction qui menaçait de se fracturer en éclats pendant que des explosions remuaient son ossature; même le sol vibrait sous leurs pieds tandis que les pierres détonaient en une éruption de gravats.
Elle se leva pour aller rejoindre ses frères et sœurs.
Lœthwil
Ancien
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Sam 7 Avr 2018 - 2:25
Tout feu a besoin d'un combustible. Lorsque le combustible vient à manquer, le feu s'éteint. Lorsque Yutar aurait chu, l'incendie s'éteindrait. Du moins étais-ce que que vous aviez prévu.
- L’anomalie continue de gagner en force.
- Leurs machines sont tombées avec les murs, les mages ont dû prendre le relai.
- Alors c’est qu’ils doivent faire opposition au Nord.
Pestes de Sombres. Ne pouvaient-ils pas tranquillement attendre que la mort vienne les cueillir ? Se sentaient-ils forcés d’ainsi la tirer vers eux ? Tes yeux d’or s’illuminent de la brillance des déflagrations qui s’y reflètent. Les murs de Yutar tremblent sous les chocs répétés des explosions. Les failles crachent des flammes comme il n’en existe pas dans la nature. Petit à petit, la magie part avec le vivant comme l’inerte, et pourtant, vos adversaires ne semblent pas tenter de la contenir, ou alors certains feignent-ils de le faire, tandis que d’autres la nourrissent, voraces des vies de ceux leur faisant face.
Ils n’avaient pas le droit. Non ils n’ont pas le droit. Ils ne peuvent pas se relever après ça. Ils ne peuvent pas se battre dans ces conditions. Ils ne peuvent pas blesser plus de tes frères alors que les choses s’étaient passées comme escompté. Ils n’avaient pas le droit de lutter. Mais si pour l’instant ils le voulaient vraiment… alors tu leur en passerais l’envie. Ta mâchoire tremble, tes paupières frémissent. Tu devrais attendre. La chose la plus intelligente à faire serait de laisser l’anomalie autant que possible de leurs Braises avant de les achever ; mais actuellement tu ne réfléchis plus. Es-tu même capable de penser ? Pas entièrement. Tu es. Simplement. Tu vois. Tu entends. Tu sens. Tu ressens. Les trois élémentaires qui t’accompagnent en sont le témoin visuel, prenant tous les trois position de combat, leur regard vide de vie braqué sur la brèche la plus proche dans les murs de l’avant-poste Eldéen. Tes muscles se serrent. Chacune de leurs fibres se dessine sous ta peau comme si elles cherchaient à s’y soustraire. Les marques infligées par la Folle au tout début de ton périple, elles te brûlent. D’abord se creusant autour de tes mollets, puis remontant lentement jusqu’à ton torse, à ta poitrine, jusqu’à s’emparer de ton bras droit, des sombres lueurs t’imposent une doucereuse douleur. Des flots tumultueux et des crocs acérés. Des nageoires comme des lames et des yeux de carnassier se détachent de tes tatouages. Ton Harmonie est rompue. C’est ici et maintenant que tu sombreras. Car tel est ton rôle.
Tu es une Bête.
Tu t’accroupis un instant, laisse tes doigts frôler le sol, fermes les yeux.
- Varyëmme, I Ëmel. Palpimmë an ohtastë. ( Protège-moi Mère, que je livre ton combat )
Tes orteils s’accrochent au sol, les dernières phalanges de ta main droite les imitent, tes yeux se rouvrent, et fort de tes appuis, dans un grand bond, tu t’élances vers le cœur du champ de bataille. Plus alerte de ton environnement que tu ne l’as jamais été, plus en phase avec la trame que tu ne l’as jamais été, mais tout aussi loin de la liberté. Tu es une arme au Souffle éteint, dirigée par la Colère des combattants, par les suppliques d’une Sylve trop pauvre, et par le Chaos d’une trame s’écrasant sur elle-même.
- Estiam ! Vessëlin hurle sans grand effet Mais qu’est-ce qu’il fait ? Il est fou ?
- Je m’en… Les regards lancés à Ringeth par Rhewil et Amdir en disaient long La petite et toi, rejoignez les groupes Est et tentez de faire votre chemin vers le Nord à partir de là. Ne vous inquiétez pas, on s’occupe de lui.
Les deux élémentalistes et le mysticiste prirent ta suite. La géomancienne remerciant les Dieux que sa patience n’ait pas plus été mise à l’épreuve ; l’hydromancienne faisant honneur à la promesse qu’elle avait fait de te seconder quoi qu’il arrive, et le Shaman face à cette scène fait plus désireux d’entrer dans la légende que de vivre.
Ils ne sont pas tous rassemblés sur la face Nord. Les absents ne sont pas tous occupés à gérer l’apocalypse s’abattant sur la forteresse. Des Drows pour vous faire face, il en reste une poignée tout de même, une poignée que tu écraseras, noiera ou réduira en cendre sur ton chemin sans le moindre remord. Une lame s’est approchée, et avant qu’elle ne puisse t’atteindre, son porteur se sera trouvé consumé par les entrailles de la créature cornue. Des archers bandèrent leur arc, mais à peine auraient-ils espéré décocher leurs flèches que les traits aqueux briseraient leur équilibre et les enverraient faire chute mortelle du haut de leur perchoir. Un nécromant prit le risque de s’attirer les foudres de l’anomalie, et se tenta à relever ses anciens camarades pour un dernier assaut, mais un baiser de la Dryade, et les langues de pierre noire des Dréatites les écraseraient. Non-morts et sorcier ensemble.
Bientôt les murs de la bâtisse se présentent à toi, une aubaine autant qu’un défi. Prendre de l’altitude. Dominer le territoire que tu réclames au nom de la Mère. Tu grimpes. Parfois grenouille, parfois serpent. Parfois sur la plateforme qui t’es offerte, parfois sur celle que la magie te fournis. La magie… comment fais-tu même pour te l’approprier, pour la manier en des conditions pareilles ? Tu ne sais pas. Tu le fais, voilà tout. Tes instincts puisent adroitement dans tes talents pour te permettre d’autant que possible danser autour de l’autodestruction, mais ta danse, si agile soit-elle, nourrit l’apocalypse. Un pyromancien te tient en joue, ses flammes dans les paumes. Tu feules comme un chat enragé. Il sourit, il s’apprête à t’exécuter. De sa flamme naît une déflagration qui le dévore sans la moindre pitié. Tu tombes.
Les yeux fermés, tu te laisses choir, laissant comme un félin sauvage ton oreille chercher le haut et le bas. Plusieurs fois ils échangent leur place, deviennent plutôt la gauche et la droite. Un effondrement de plus, les cris d’une autre poignée de Sombres te distraient une fraction de seconde. Est-ce à cause de la magie instable de ces lieux, ou est-ce à cause de ta folie, que tes élémentaires t’ont abandonné.
Ce n’est aucun des deux, tu en attends simplement plus de toi-même.
La mélodie que joue l’éther est si douce à tes oreilles. Le contact de l’eau contre tes membres est si doux. Les battements du cœur de la Terre Mère sont si tendres. La Magie, enchanteresse au point de s’y perdre…
Tes yeux s’ouvrent les restes d’une armée, avançant vers ceux qui auraient dû déjà tenir la victoire. Tes yeux s’ouvrent sur des Sombres s’apprêtant à mener leur dernier combat, et sur les elfes en posture de recul, prêts à s’en assurer. Tes yeux s’ouvrent et illuminent la cour intérieure d’une forteresse allant vers sa ruine comme deux soleils d’or. Tu domines.
Mouvement. Force. Energie. Ainsi est nourri ton art. Tu es tombé pour ne jamais toucher le sol.
Tu es une Bête. En témoignent les longues griffes terminant les doigts de ta main droite difforme. Tu es une Bête. Et si la moitié gauche de ton torse est encore organique, sa droite, comme tes jambes, sont un cristal de glace pure aux formes vaguement humanoïdes, à l’intérieur duquel dansent des courants de la même nature que ceux de l’anomalie née de votre rituel. Tu es une Bête. Ce sont les huit ailes , forgées de ce même cristal, qui te portent. Tu es une Bête. Ta moitié de crinière est aussi flamboyante que les colères du Soleil.
Autour de toi crépitent les éclairs. Tu n’es plus élémentaliste. Tu es le Chaos Elémentaire.
Ta main griffue se soulève et se referme. D’un éboulis s’arrachent les pierres, pour muter en des écailles du même cristal que celui qui fait plus de la moitié de ton être. La forme serpentine aux gigantesque crocs, une représentation des Wagyl comme il en existe des centaines, vient glisser dans les airs en ta compagnie.
Il est temps de modeler un nouveau monde.
~ ~ ~ ~ Au même instant, dans un recoin de la forteresse ~ ~ ~ ~
- Combien de temps est-ce que tu penses pouvoir tenir sans nous Amdir ?
- Assez longtemps, j’espère.
- Espérons plutôt ne pas avoir à nous soucier d’autre chose !
Dissimulés entre gravas et éboulis, là où les yeux des Sombres se posent assez peu pour qu’il puisse espérer quelques instants de tranquillité, les Gardiens de ta magie veillent. Ton existence déjà compromise ne tient qu’à eux. Les vies de trop nombreux des vôtres pèsent sur leurs épaules. Qui sait ce qu’il pourrait arriver si ton sortilège s’effondrait et que la trame se repliait une fois de plus sur elle-même ? Le futur s’émoierait-il de ce sacrifice, ou alors serait-il aussi peu tenu en estime que celui de l’Aduram ?
~ ~ ~ ~ Au même instant, à l'Est ~ ~ ~ ~
Vessëlin courait à toutes jambes, jetant régulièrement un coup d’œil derrière elle à la recherche de Tanaël. La chasseresse s'efforçait de ne pas trop laisser son regard appesantir sur Yutar et les forces inconnues qui y œuvraient. Son domaine d'expertise à elle était plus physique, plus organique, et ne pas comprendre la tuait. Étaient-ils vraiment sur le chemin de la victoire ? Pour ce qu'elle en savait tout semblait s'être passé comme prévu, presque tout du moins, parce qu'il avait été au départ convenu d'attendre, d'attendre que les Sombres se laissent enterrer par leur orgueil et leur propre forteresse.
Mais maintenant ?
Comment réagiraient les trois cent du Nord quand Ruthwentë se dévoilerait à l'intérieur ? Comment évoluerait l'affrontement quand les guerriers des clans verraient quatre de leurs mages les plus précieux ainsi s'exposer au danger ? Accepteraient-ils toujours la retraite stratégique, accepteraient-ils de les abandonner à la mort, ou plutôt risqueraient-ils leurs vies à l'affrontement ? Qu'arriverait-il non seulement aux quatre mages, mais aussi aux sorciers parmi les trois cent, dans cet environnement apocalyptique ? Amdir avait mentionné l'usage de magie comme renforçant l'anomalie... Yutar était-elle vouée à devenir un second Ellyrion ? Une seconde forteresse gardée par une magie cauchemardesque ?
- J'ai peur Tanaël... des mots aussi simples que lourds de sens pas toi ?
Tanäel
Elfe
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Dim 8 Avr 2018 - 18:15
Des hurlements se joignaient au vacarme des pierres qui détonaient sur la surface de Yutar; une cacophonie qui vibrait dans l’air en même temps que les fils se déliaient : les éclaboussures étaient multiples, beaucoup trop nombreuses, les éléments s’agitaient, la pression était trop forte, le sol tremblait, tout s’écroulait.
Des frères mourraient, des sœurs mourraient.
Ruthwentë avait eu raison, sa promesse s’était réalisée : son paradis cauchemardesque se matérialisait devant leurs yeux, le sang coulait dans sa gorge, coulait pour arroser les flammes qui noircissaient son cœur, jetant une nouvelle ardeur sur le brasier qui dévorait ses entrailles. Mais les flammèches s’agrippaient à tout ce qu’elles rencontraient, les flammèches dévoraient tout ce qu’elles touchaient; l’incendie consumait tout ce que mordaient ses crocs enflammés, rien n’était épargné, tout deviendrait cendres. Celui qui chérit son rêve comme son joyau le plus éclatant risque d’engouffrer avec lui tout ce qu’il peut pour y parvenir, d’assombrir même ses outils les plus brillants.
Et pourtant, elle ne pouvait qu’admirer tant de détermination, la poigne d’un être qui pouvait tirer vers lui le firmament de sa réalité, qui pouvait s’emparer des étoiles les plus éloignées.
Ses pas devinrent des foulées. Vessëlin courait devant elle d’un pied incertain; sa tête se secouait d’un bord et de l’autre, ses yeux marron plissés, éblouis par toute la lumière que dégageait les effusions dévastatrices du cataclysme; les flots se déversaient, se contractaient avec violence; Vessëlin prenait l’apparence d’un enfant égaré dans le silence d’une forêt lugubre, entouré d’un millier d’arbres, beaucoup trop nombreux et beaucoup trop grands, qui l’obscurcissaient de leurs ombres inquiétantes, la plongeant dans les ténèbres de ses questionnements sans réponse.
Regarde-la. Petite. Chétive. Avalée par un chemin qui n’est pas le sien, dont elle ne peut même pas voir la fin : un chemin qu’elle ne peut même pas comprendre.
Vessëlin se tourna vers elle, son visage assombri d’inquiétude.
« J’ai peur Tanäel… pas toi? »
Bien sûr qu’elle avait peur. Quelle journée se levait sans qu’elle ne ressente cette peur continuelle, brûlante, cette terreur devant l’inconnu qui surgirait, qui l’anéantirait; cette peur de voir la structure de sa conscience s’ébranler; cette peur de voir tout s’effondrer; cette peur de tomber sans jamais se relever; mais surtout, cette peur de s’effacer, de s’être trompée, de réaliser que tout ce qui l’entourait n’avait jamais existé.
Elle connaissait la peur, mais sa vie ne se définissait plus seulement par elle; non, plus maintenant, cela aurait accordé trop d’importance à une seule émotion, un seul mot. Après tout, au milieu de tout ce chaos, il était beaucoup trop tard.
« La peur est ce qui nous empêche de basculer. C’est lorsqu'elle disparaît complètement qu’il faudrait avoir le plus peur. »
Elle s’approcha, tendit la main pour caresser sa joue, pour palper la peinture bleue qui couvrait sa peau. Elle plongea son regard dans ses prunelles glacées, ses lèvres si proches qu’elle aurait pratiquement pu l’embrasser.
« À toujours nager à contre-courant, on finit par s’épuiser. »
Elle fit volte-face, considérant une fois de plus les hurlements qui surgissaient de Yutar pendant que les décombres continuaient à s’affaisser, puis offrit sa main.
« Allons rejoindre Ruthwentë. »
Dernière édition par Tanäel le Mer 11 Avr 2018 - 7:28, édité 2 fois
Krish Al'Serat
Ancien
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Mar 10 Avr 2018 - 21:28
Les cris de rage et de douleur s'élevait de l'intérieur de la carcasse de pierre en décomposition. L'artillerie était tombée vers l'intérieur en même temps que les remparts. Une forme serpentine de pierre, de feu ou de glace apparaissait parfois entre les fissure et les éboulis, bref mirage d'une magie destructrice mue par la folie d'un être sombre.
A moins que ce ne soit la colère d'un dieu ?
Talzik ne regardait pas en arrière. Il faisait confiance à ses hommes pour tenir le fort. Que Yutar tienne une minute ou une heure, les craquement de pierre, comme autant de craquement d'os, présageaient de la fin qui allait suivre. Teiweon les accueille dans son étreinte apaisante. Lui, il lui restait une mission à accomplir pour racheter sa faute, lui, l'officier qui avait laissé Yutar tomber sous sa garde. Et cette mission était droit devant lui au travers de cette armée d'esclaves, aiguillonnée par la colère d'un autre Dieu.
Entre les murs moribonds, les choses étaient bien moins grandiloquentes. Les troupes qui ne sont pas encore sorties, tout comme les troupes de garde se focalisent sur la chose qui a percé leurs murs. Un être mi-elfe, mi... autre chose. Certains frissonnent. D'autres crachent. Les premiers à lever le glaive sont balayer. Les suivants sont détruits. Les sombres, malgré leur rapidité d'exécution et leur férocité d'attaque sont coincés par le décors d'apocalypse qui s'effondre autour d'eux.
Les elfes sont des créatures immondes. Bien plus immondes que les drows. Un prêtre de Teiweon qui était resté pour ralentir la progression de la réaction en chaine qui fendait leurs murs récite à toute vitesse des prières à l'intention de leur Dame des Ombres. Cette chose est doté d'un esprit et d'une Flamme. Difformes. Mais bien présent. Les elfes seraient donc tomber sous la coupe de Kerhel jusqu'à oser s'en prendre au Feu d'Uriz lui-même ? Étaient-ils devenus fous à ce point ?
Loin de ses considérations théologiques, les soldats s'étaient rassemblés. De quelques mots en langue sombre, leurs mouvements s'étaient coordonnés. Ils bougeaient par groupe de douze et s'organisaient par vague pour toucher cet avatar des éléments qui déversait sa rage sur leur abri.
Soudain, une femme petite et charpenté surgit d'un couloir et cria à son tour quelques mots. Les soldats semblèrent ne pas en tenir le moindre compte mais parmi les prêtres et les mages, des têtes se tournèrent et les yeux s'embuèrent de concentration. Alors cet avatar n'était pas seul. Ils devaient trouver les sources de la magie qui lui portait secours. Alors que certains des piliers magiques de l'endroit tournaient leur attention vers la détection, le grondement distordu de l'anomalie se fit plus menaçant.
HRP:
Je vous laisse tirer au dé ou choisir si les mages Noss se font repérer. Et je vous laisse tirer au dé ou choisir sur les attaques des soldats contre Estiam ont le moindre impact.
Lœthwil
Ancien
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Mer 11 Avr 2018 - 22:11
Quelques instants d’immobilité, de silencieuse contemplation, d’incrédulité et de questionnements. Qui es-tu ? C’est la première question venue à l’esprit des Sombres. Qu’es-tu ? Ç’aura été la seconde, celle que partageraient avec eux tes propres frères. Que faire ? Ils se le demandent tous, tous sauf toi, car il n’est plus la moindre question ayant place dans ton esprit et il n’est plus le moindre esprit ayant place dans ton corps. Est-ce seulement la bonne chose à faire ? Si seulement tu étais capable de t’observer, de te comprendre, alors certainement en serais-tu convaincu. Si tu avais été mené jusque-là, alors ce ne pouvait être une erreur. Tu pleurerais le sang versé plus tard. Tes entrailles ne se tordraient qu’au jour où les réminiscences surgiraient. Là n’était pas l’instant.
Ce fut la formation Noirelfe la première à réagir, à se mouvoir, à se fêler pour mieux se reconstituer, ou seulement le pensaient-ils. La queue du Serpent s’abattit contre la première vague à avoir pris les armes contre toi, les renversant sans le moindre effort. C’est une véritable vague, d’une eau glaciale à en transpercer la chair, qui aux commandes des ondulations de La Bête, s’abattit sur le second régiment. Tu hurlas, d’une voix paradoxalement incroyablement claire, et les flots se resserrèrent, tournoyèrent sur eux-mêmes, ramassant sur leur passage tous ceux n’ayant pas réussi à s’en écarter à temps. Et l’eau fut faite flammes. Quand le sortilège eut trop gagné en inertie sa signature s’écrasa sur elle-même, avalant ses alentours comme une étoile mourante.
Quelques écailles de ta créature subirent le même sort avant de repousser.
Ta rage nourrit la leur. Tu es une extension vivante de la malédiction tombée sur la forteresse. Tu es le plus grand danger ici présent. Toi. Pas les trois cent. Qu’ils continuent de reculer ceux-là. C’est vers toi que l’armée Sombre se tournerait. Les arcs se bandent dans ta direction, les groupes de soldats tentent de t’encercler. Sans montrer le moindre signe de résignement, tu recules tout de même, tente de conserver ta mainmise sur le champ de bataille.
Un claquement de quatre des six ailes du Roi des Fées. Le Serpent de Cristal ondule l’appel à la pluie. Les gouttelettes s’assemblent en un nuage noir. La foudre s’abat sur l’Elda. Les traits des archers traversent l’orage. Ta droite est touchée.
Ta carapace de cristal se fêle, les battements de tes ailes perdent un instant leur logique. Tu chutes, hurlant à la mort, griffant le vide de ton bras de chair. Le Wagyl abat une nouvelle fois sa queue contre tes assaillants, et plutôt que quelques écailles, c’est plus de la moitié de celles arrivées au contact du sol qui disparaissent dans des déflagrations de magie pure. Désemparé, tu tentes de rendre son enveloppe à une créature qui dans ta folie te semble ton seul compagnon vivant, mais au lieu de cela, c’est ton bras cristallin qui à son tour vole en éclats. Une flèche vient se planter au milieu de ta paume, et quelque part derrière les boucliers adverses, un mage de feu déjà savoure une victoire dont il pourra se vanter durant de longs siècles.
Le mage tomba raide au sol. Une pointe de lance profondément enfouie dans le crâne.
Ainsi la moitié des trois-cent pris la décision de se battre à tes côtés, tandis que l’autre continuerait sa course vers la sécurité de la glaise, loin de la surface de pierre de Yutar surchargée. Grâce à l’attention maintenant divisée de enfants d’Uriz, quelques cibles furent aisément cueillies, seulement à une centaine et demi, même possédant de leur côté celui dont la magie était de la même nature que la malédiction, ils restaient une minorité. Il faudrait s’assurer que les cartes soient bien jouées.
Tu te relèves d’un bond, referme tes ailes sur ton bras droit ensanglanté, souffle une grande lampée d’air vicié, et ainsi renaît ta carapace. Ainsi renaissent les écailles caudales du Grand Poisson. Ainsi tu reprends ton envol. Ta nuque craque, ton bras de cristal se soulève verse le haut comme emportant avec lui une charge monumentale. Le muscle se dessine jusqu’à travers le minéral, et quand finalement ta paume arrive à son point culminant, émerge du sol qui s’effrite la Tortue-Monde, compagne élémentaire du Wagyl.
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Rhewil fait un grand bond, prend appui sur un affleurement pour se projeter pieds en avant contre un sorcier trop curieux. La cheville de l’Ornedhelle cogne la nuque du Sombre avec une inouïe violence, l’envoyant reculer jusqu’à un muret proche… trop proche. Sans la géomancienne, la création de Ruthwentë perd en stabilité, le Wagyl se meurt, et en réponse à ses souffrances, Yutar se recroqueville. Une réplique des détonations conséquences de l’effondrement de l’élémentaire dévorera ensemble muret et prêtre Eldéen.
- Je suis là ! Je suis là !
- Et tu n’es pas seule on dirait.
Il y a les Drows, mais maintenant il y a aussi le soutien des frères. Une bouffée d’air frais dans cette atmosphère de plus en plus toxique. Ils étaient peu. Moins nombreux que ne l’auraient espéré les trois mages, mais ils étaient à leur avantage, en position d’attaque dans cet environnement chaotique. Moins qu’ils ne l’auraient été en forêt, mais certainement plus à l’aise que si tout s’était joué à l’extérieur, dans les plaines. Partir à la recherche des trois piliers, affronter les élémentaires, contenir l’assaut elfe… les Sombres ont l’avantage du nombre, mais lorsque l’environnement lui-même est le plus grand danger, le nombre est autant une faiblesse qu’une force, et plus ils se diviseraient, plus la balance pencherait en faveur du peuple d’Anaëh.
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La peur est ce qui nous empêche de basculer. La peur nous enchaîne à nous-même. Ou alors est-ce simplement à la vie qu’elle nous raccroche ? C’est de la peur que naissent les plus grandes colères. C’est de la peur que naissent les plus grandes folies.
Le triste spectacle qui se dévoilait enfin devant ses yeux, Vessëlin aurait préféré ne jamais avoir à poser le regard dessus. Tant qu’elle était loin d’eux, il n’était pas un instant où elle aurait pu mentionner l’existence des sombres sans au même temps souhaiter leur anéantissement, et pourtant… Quelque chose la gênait. Quelque chose la gênait dans cet affrontement. Pas le risque, non, voilà longtemps qu’elle s’était fait à l’idée de voir s’éteindre des vies, par centaines s’il le fallait. Pas le résultat non plus. Elle était celle qui avait permis la création de ce champ de bataille. C’était les flux déversés par les flèches qu’elle avait tiré qui l’avaient modelé.
C’était le regard vide de l’archimage. L’absence totale d’empathie chez Ruthwentë, quand elle connaissait Estiam pour être trop sentimental.
Avoir la sensation de perdre un frère de cette manière lui était plus douloureux que de faire le deuil d’un mort.
Mais à la guerre, si l’on ne laissait pas muter sa psyché, s’il on ne s’éteignait pas, alors on s’autodétruisait.
C’est de grandes folies que sont nées et les plus profondes plaies, et les plus grandes bénédictions d’Anaëh. Ne restait plus qu’à se battre et espérer que les dés plaident en votre faveur.
La chasseresse banda son arc.
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Lorsque les Wagyl eurent creusé leurs tranchées autour du monde, alors naquit l’Œuvre sous sa forme primale. Telle qu’elle aurait dû être si le Père des Batailles n’y avait livré la guerre. Lorsque sous le pied de la Tortue-Monde, le sol de Yutar trembla, une ferveur inouïe pris à la fois elfes d’Anaëh et Eldéens. Peut-être la métaphore, sans qu’ils ne le réalisent, les avait-elle plus touché que de raison.
Lame à double tranchant, les Drows par excès de zèle continuèrent de diviser leur attention, mais ce-faisant, s’ils devenaient des cibles plus faciles, ils devenaient aussi des armes plus mortelles. Quand chaque Ornedhel était sa propre entité, quand le Chaos total était votre plan de bataille, quand vous saviez comment les autres agissaient sans avoir réellement appris à vous coordonner, se retrouver face à une somme d’individus chacun capable de réagir à sa mesure pouvait se prouver un challenge plus ardu que de perdre un seul corps trop rigide. Il te fallait à tout prix tenir bon, rester la pierre angulaire de ton peuple, continuer de maintenir un terrain à votre avantage. Il te fallait à tout prix les garder loin de tes piliers, enfermés entre toi et ton armée. Il te fallait profiter d’une Yutar en perpétuel changement pour placer ton jeu. Dans un ballet aérien autant conditionné par tes rituels que par les projectiles tant physiques que magiques se jetant dans ta direction, tu t’attelais à permettre à tes deux créatures de redéfinir l’espace. Au rythme du piétinement du chélonien naissaient et disparaissaient des aiguilles rocailleuses, chutaient ou s’envolaient des rochers, tandis que les incessantes boucles du corps serpentiforme guidaient des eaux coléreuses et des nuages d’orage entre les rangs ennemis. Souvent, quelque elfe courageux se servait des courts mouvements de panique générés par tes sortilèges pour s’y glisser, emporter avec lui une, deux, trois vies, et abandonner la sienne par la même occasion. Parfois quelque Drow téméraire en digne fils d’Uriz s’offrait aux tiens, sachant qu’avec lui il emporterait les éléments, nourrirait l’anomalie, et amènerait une poignée de ses ennemis à s’éteindre avec lui.
Plusieurs dizaines des tiens furent emportés par ta magie.
Plusieurs dizaines des tiens le seraient encore.
Un cor retentit. Un son long, comme coupé dans son élan par une brusque perte de souffle. Ringeth ne devait sa vie qu’à l’intervention de Rhewil, ayant érigé un mur de pierre entre elle et le souffle de feu du Maître-Mage Eldéen. Elle soupira bruyamment, tentant de ne pas perdre contenance. Pour chaque effort qu’elle ne faisait pas, c’est sur Amdir qu’un peu plus de poids pesait. Ils ne pouvaient pas se battre dans ces conditions, pas contre des mages décents, et ceux-ci n’étaient pas simplement décents, ils étaient effrayants. Une colonne d’eau jaillit de sous les pieds de la géomancienne, à peine contenue par sa comparse, tandis que le mysticiste cherchait désespérément une échappatoire là où il n’y en avait pas. Amdir paniquait.
Plongé comme tu étais dans une magie portant une part de son empreinte, tu étais le premier à le ressentir, mais qu’y pouvais-tu. L’Automne tombait sur la Tortue-Monde, dont les arbres de granit et de pierre de Yutar perdaient leurs feuilles pétrifiées. Les écailles du Wagyl mourraient une à une, et bientôt tu ne trouverais plus la force de défendre ton propre corps de la pluie d’obus.
Vessëlin te jeta un regard compatissant, et prit la fuite. À sa suite, en réponse au son du cor, les chasseurs entamèrent de se replier.
Un rocher s’écrasa contre ton flanc, te décrochant des cieux. Une lame te cueillit le cœur, alors que genou à terre, tu t’apprêtais à te relever.
Telzik sourit. Tu le lui rendis.
Comme une étoile mourante, tu laissas ton corps entier s’en aller à la magie. Tu laissas l’intégralité de tes chairs se consumer, dans un dernier grand cri. Les entrailles de la Tortue-Monde se réveillèrent. La sève de ses arbres se fit magma brûlant, se déversant dans des feuilles qui plutôt que de tomber s’envolaient en une nuée de petites créatures ailées flamboyantes. Les écailles du Wagyl s’arrachèrent une à une, devinrent les épées et les boucliers d’êtres minuscules.
Tu arrachas la lame Eldéenne de tes entrailles immatérielles, regarda Telzik, l’air de questionner l’intégralité de ses choix de vie, et lorsqu’il comprit, lorsqu’il fut entièrement résigné, tu l’étreignis.
Les éléments se déchaînèrent sur Yutar.
La forteresse n’était plus.
Lœthwil
Ancien
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Sujet: Re: [Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ] Mer 11 Avr 2018 - 22:47
Les muscles comme rongés par l’acide et les os comme réduits à l’état de poudre, perdu entre deux états de conscience, tu tenais dans tes bras les restes du chef de guerre adverse. Un pouls, tu entendais encore un pouls. Il vivait ! Il vivait ! Alors sans que la moindre expression ne traverse ton visage tu le lâchais au sol, le regardais s’écraser comme un vulgaire sac, et à ton tour tu te laissais tomber. Dans la poussière tes doigts cherchaient. Dans les débris tes paumes fouillaient. Une pierre, une pierre… un épieu.
De toute la force qu’il te restait, tu abattis la pointe émoussée de ton arme contre le sternum de ta victime. Toute la force qu’il te restait, tu l’utiliserais à terminer de le mettre à mort. Lentement. Coup par coup. Fibre après fibre. Os après Os. Tu cognais autant que tu grattais. Tu cherchais une ouverture autant que tu forçais une entrée. Etait-il vraiment mort maintenant ? Tu ne le savais pas. Ce n’était pas important. Tout ce qu’il te fallait c’était une preuve. Une preuve devant la déesse. Une preuve de ta victoire.
Tes doigts s’enfouirent sous les chairs, tes bras, dans un effort surhumain écartèrent les côtes brisées. Tu allas chercher le cœur. Tu t’en saisis. Tu le contemplas. D’une main chancelante, tu le levas vers le ciel. D’une voix chancelante, tu hurlas ta victoire.
Mais aucun son ne franchit tes lèvres.
L’odeur du sang t’enivrait. Ainsi la puissance de l’Eldéen t’était livrée. Par son sang tu t’emparerais de son être. Par son sang tu t’emparerais de ses souvenirs. Par son sang tu t’emparerais de sa force. Par son sang tu ferais couler le sang des siens. Dans son sang un jour gésiraient les cadavres de son peuple. Détruire les ennemis de l’Œuvre, et à tout prix. N’est-ce pas là après tout le rôle de L’Hydre ? Tes canines percent le myocardium. Le goût de la chair de tes cousins se répand dans ta gorge… et te dégoûte. La saveur de ton propre sang est déjà bien suffisante. Sans l’énergie de cracher, tu laisses le liquide vital s’écouler de tes babines comme la salive d’un chien malade. Tu lâches ta prise, l’abandonne à pourrir auprès du corps de son maître, et puis tu te traînes, tu te traînes vers là où il n’y a pas d’échappatoire.
Comme un enfant dans le ventre de sa mère, tu te prostres parmi les débris, et avec pour seul réconfort la chaleur de trois corps dans un aussi piteux état que le tien, tu te laisses aller, tu t’abandonnes, et tu écoutes. Tu écoutes l’Annon chanter comme elle ne l’avait plus fait depuis des siècles.
Tes yeux se ferment. Mais ton visage sourit.
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Entouré par les fées de la colonie qu’il avait fait sa gardienne, Ilweran pleurait. Recroquevillé au milieu d’entre elles, il avait peur. Terrifié dans cet endroit aux apparences pourtant idylliques, le reptile se sentait seul, livré à lui-même à un instant charnière de sa vie. Son épiderme s’arrachait par lambeaux entiers, ses ailes ne le portaient plus, et c’est à cet instant que ses forces décidaient de le quitter. Il entrevoyait l’abysse, l’autre côté du Voile. Si jeune, il s’imaginait déjà partir.
Les guérisseuses ailées pourtant ne firent jamais que lui sourire pourtant. On lui offrit de reposer au cœur d’une fleur au parfum de renaissance, lui récitant jusqu’au dernier instant sans mots que demain serait un jour nouveau.
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[Cri des Premiers ralliements | La dernière pierre de Yutar ]