Le soleil d'été chauffait la pierre blanche d'Alëandir au point d'en rendre les pavés brûlants. Ce jour là, les habitants profitaient des derniers rayons du soleil pour se promener ou travailler dehors dans le peu de fraicheur que leur offraient ces derniers jours. Les places des fontaines étaient particulièrement prises d'assaut et de larges tâches humides apparaissaient sur le sol et les margelles, crée par la fouge des enfants se chamaillant ou la joie des adultes de pouvoir profiter d'un peu d'eau pour se rafraichir.
Pourtant, malgré la chaleur et le soleil qui tombait dru à cause de l'absence de canopée, une silhouette n'avait presque pas bougée de l'après-midi. Assise sur le bord d'une fontaine du quartier du même nom, elle regardait passer les gens. Ils étaient pressés, lents, souriaient, parlaient, râlaient. Certains étaient expressifs, d'autres d'une rare neutralité. Les enfants criaient de plaisir en s'éclaboussant, atteignant quelque fois l'observatrice et s'excusant aussitôt. Elle les calmait d'un sourire, ne leur en tenant jamais rigueur.
Ceux qui l'auraient reconnus étaient peu par ici. Ils avaient leurs propres affaires et la foule rendait son anonymat à toute personne désireuse de se faire oubliée. Le pantalon de cuir et la tunique verte à col haut et manche courte qu'elle portait ne la différenciait pas vraiment et la tresse de cheveux roux piqués d'une mèche blanche n'attiraient pas plus l'attention.
Elle n'avait pas voulu s'habiller en bleu. Elle n'aurait pas supporter le regard des passants sur elle. Là, avec un calepin et un fusain dans les mains, elle était invisible. Les traits qu'elle esquissait étaient très approximatifs et elle n'avait pas réussit à finaliser un seul dessin depuis le matin, mais elle faisait parti du décor.
En réalité, cela faisait des heures qu'elle aurait du se diriger vers l'esplanade des Cinq. Elle n'était pas loin pourtant. Quelques minutes et elle pouvait y être. Mais le rendez-vous qu'elle y avait ne lui disait rien. Aussi lui avait-il fallut toute l'après-midi pour rassembler son courage, fermer son carnet, le glisser dans son aumônière et quitter les lieux.
Lorsqu'elle arriva devant le Haut-temple de Kÿria, elle s'efforça de ne pas laisser amertume la submerger. Elle aurait voulu pouvoir accuser l'homme qu'elle venait voir, mais cela aurait été injuste en plus d'être inutile. De toute façon, personne n'y pouvait plus rien.
La nef était presque vide à cette heure et elle ne savait pas si elle trouverait quelqu'un pour lui indiquer ou se trouvait celui qu'elle était venu voir. Dans un cas comme dans l'autre, elle tenterait, même si elle devait aller jusqu'à frapper à la porte de la chambre qu'il occupait, quelque part dans ce vaste bâtiment.
- Bonsoir... Je ne te dérange pas ? " le salua-t-elle, la mine profondément fatiguée.
Haldren
Ancien
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Dim 20 Mai 2018 - 17:09
Au temple de Kÿria, les jours s'écoulaient dans une morne attente tandis qu'Hecil espérait recevoir des nouvelles en provenance d'Abyssea. L'hybride sortait peu et passait de longues heures enfermé dans sa chambre, installé à une petite table près de la fenêtre. Ignorant quand le corbeau d'Ombre reviendrait, il se sentait obligé de ne pas s'éloigner de crainte que la créature ne sache pas comment réagir en cas d'absence de son invocateur. Probablement resterait-il tout simplement à attendre, mais Hecil craignait l'hypothèse où le corbeau s'en repartirait à sa recherche en leur faisant perdre des heures voire des jours le temps qu'ils arrivent enfin à se croiser.
S'étant lui-même condamné à l'inaction, l'archimage avait entrepris de rédiger l'histoire des événements de ces derniers mois, tant que les souvenirs demeuraient encore frais et vivaces dans sa mémoire. Rencontrer non pas une mais deux divinités à quelques jours d'intervalles constituait un privilège rare méritant amplement de se voire narrer sur les feuilles de vélin qui s'entassaient sur son bureau. Hecil tentait de se souvenir de chaque détail, de chaque sensation, de chaque bruit ou odeur avant de les retranscrire dans ses mots. Ainsi réapparurent le regard flamboyant et maléfique du Père, la chaleur maternelle de la Mère, la douce Symphonie sous les frondaisons de l'Annon, et tant d'autres moments qui avaient bouleversé à tout jamais la vie de l'ancien Triumvir eldéen.
Le soleil achevait sa descente quotidienne vers l'horizon lorsque Halyalindë le rejoignit.
Bonsoir Halya. Entre, je t'en prie.
Reposant le papier qu'il était en train de relire, Hecil débarrassa l'une des chaises du fatras qui s'y entassait afin que l'elfe puisse s'y asseoir. Bien que n'étant là que depuis quelques ennéades seulement, l'archimage avait réussi à placer la marque de sa profession sur la petite pièce : à savoir un capharnaüm où lui seul réussissait à s'y retrouver (cette affirmation n'a jamais été confirmée par un expert indépendant - NDLR). L'incapacité à ranger correctement leurs affaires se trouvait généralement expliquée par les mages comme la résultante de l'utilisation d'un référentiel spatio-temporel spécifique à leurs activités et donc inaccessibles au commun des mortels... mais beaucoup de gens soupçonnait que les mages étaient en réalité juste de gros branquignols infichus de s'organiser correctement.
Quelles nouvelles de ton père ?
A voir la tête de l'elfe, elle avait dû assez peut dormir depuis leur dernière rencontre. Rien d'étonnant, car l'attente du retour d'Abyssea constituait pour elle une épreuve bien plus intime et de ce fait bien plus terrible à endurer. Une épreuve qui l'obligeait à demander de l'aide à celui qu'elle considérait comme son pire ennemi et dont elle espérait désormais voir venir le salut.
J'ai essayé de revoir l'Aigle, mais son capitaine m'a assez vertement refusé l'entrée. Elle est toujours en vie toutefois je n'en sais pas plus.
Hecil ignorait comment Halya avait bien pu réussir à obtenir l'échantillon de sang, cependant il soupçonnait fortement qu'elle avait du révéler au moins en partie au capitaine des Aigles la nature de ceux à qui elle allait demander leur aide. Si tel était le cas, rien d'étonnant à voir l'elfe se méfier et ne pas laisser un ami des chaotiques s'approcher de la malade. Le changement de dogme imposé par Haldren au culte enfoui dans la cité des marais ne datait que de quelques mois seulement et ne pourrait pas facilement effacer la réputation bâtie par les siècles d'avanies de leurs prédécesseurs.
Tandis que l'hybride et l'elfe discutaient encore, un petit point apparut dans le ciel loin à l'Est, à peine visible dans l'obscurité qui s'étendait sur Miradelphia.
Halyalindë
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Dim 20 Mai 2018 - 21:03
Halya s'assit sans discuter. Elle n'en avait pas particulièrement envie, mais elle était trop épuisée pour perdre son temps en de veines remontrances. Ces dernières ennéades, elle avaient plusieurs fois fait aller-retour entre Ardamir et Alëandir en un temps record. Elle dormait peut, chevauchait ou marchait sans arrêt et elle avait réussit à inquiéter tous les proches qu'elle avait encore.
- Le capitaine des Aigles n'est pas au courant de notre recherche. Je suis passer... par quelqu'un d'autre. " indiqua-t-elle en étendant comme elle pouvait les jambes sans heurter une pile de papier. Alors il n'avait véritablement eu aucune nouvelle d'Abyssea... Elle n'aurait su dire si l'idée de ne pas simplement avoir raté une missive la soulageait ou l'agaçait encore plus. " Les Noss ont nettement ralentis la maladie mais les fonctionnement même d'un mal de mortel leur est étranger. Il faudra encore du temps pour trouver un remède mais nos meilleurs soigneurs sont sur le coup. Ils sont conscient qu'il y a encore une vie en jeu. Aucune avancée de ton côté, je suppose ? "
Laissant son regard vagabonder sur la pièce, Halya fronça légèrement les sourcils. Le chaos y était encore pire que dans le bureau de son père... Elle détourna la tête vers la fenêtre. Elle aurait bien bu quelque chose, mais il n'y avait sûrement rien à porté de main que ce drow n'ait pas touché... De toute façon au point ou elle en était, ce genre de pensé était totalement inutiles. Elle cherchait comment tourner la seconde raison de sa venue, histoire de ne pas être là pour rien. Elle était à peine arrivée qu'elle avait envie de repartir.
Un point qu'elle avait tout d'abord prit pour une mouche particulièrement fixe attirait peu à peu son attention. Elle plissa les yeux malgré la maigre concentration qu'elle tenait encore à accorder à la surveillance du drow en sa présence.
- J'aimerai que nous parlions de tes liens avec Abyssea. Comment en es-tu arriver à travailler avec eux ? J'aimerai comp..."
Mais la tâche grandissait toujours et eau fur et à mesure qu'elle la suivait des yeux, elle prenait la forme...
Halya se leva, les deux mains appuyées sur la table.
- Un Corbeau ! "
Haldren
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Lun 21 Mai 2018 - 7:14
Halyalindë posa "la" question qui gênait Hecil : la nature exacte de ses liens avec le culte du Chaos. Depuis l'instant où l'hybride lui avait avoué sa capacité à obtenir de l'aide au sein de la cité des marais, il se trouvait obligé de trouver une explication convaincante pour réussir à étouffer les soupçons de l'elfe qui devait considérer les chaotiques comme de dangereux psychopathes aussi redoutables que les plus féroces adeptes d'Uriz ou de Kiel. Fort heureusement, Hecil avait eu le temps d'y réfléchir afin d'apporter une réponse crédible.
Lorsque j'étais encore Triumvir de l'Elda, un violent schisme s'est produit à Abyssea au sein du culte du Chaos entre progressistes et traditionnalistes. J'ai soutenu le parti des progressistes et cela fut l'une des raisons de leur succès. Pour cette raison, les nouveaux hiérarques du culte se considèrent depuis comme mes débiteurs.
Pas tout à fait un mensonge...
Pas tout à fait la vérité...
Hecil ne voulait pas mentir ouvertement à Halyalindë, au risque sinon de voir toute sa crédibilité s'effondrer. Cela lui imposait de parler vrai, tout en s'autorisant parfois quelques menues omissions qui masqueraient les morceaux les plus compromettants de l'histoire. Si l'elfe menait son enquête sur le récit de l'hybride, elle apprendrait que le schisme avait été réel à Abyssea suite à la disparition de l'Oracle et de la Voix. Elle apprendrait également que le dogme du culte venait en effet d'évoluer en profondeur, rejetant ses aspects archaïques et adoptant une position plus ouverte. Elle apprendrait enfin que le Triumvir Haldren Baenfere avait toujours porté un intérêt prononcé à ce qu'il se passait du côté des marais de Faelia.
Une construction en apparence cohérente qui ne masquait qu'une seule chose : le rôle exact d'Haldren au sein du culte du Chaos... pas seulement soutien des progressistes durant le schisme mais incarnation du Chaos lui-même. Toutefois seuls les hiérarques du culte connaissant l'identité "publique" de leur Dieu, Halyalindë serait bien en peine de découvrir ce petit secret.
Il fut interrompu dans ses explications par le cri d'Halya.
Un corbeau !
Se relevant d'un bond, Hecil fit face à la fenêtre et vit en effet le grand volatile s'approcher à tire-d'aile. Dans un croassement rauque, le corbeau se posa sur le rebord et commença méticuleusement à se nettoyer les plumes. Toutefois, ce n'était pas tant le corbeau lui-même qui attirait les regards de l'hybride et de l'elfe, mais la bourse de cuir attachée à l'une de ses pattes. Précautionneusement, Hecil la détacha et la posa sur sa table pour l'ouvrir, révélant une flasque contenant un liquide verdâtre et un parchemin écrit en langue elfique, précaution prise par Hecil dans ses instructions pour le cas où le paquet aurait été réceptionné par un autre que lui à Alëandir.
Le message rédigé en style pour le moins synthétique indiquait à Hecil qu'il venait probablement directement de l'herboriste en chef du Chaos, un vieillard acariâtre et libidineux, mais doté d'une connaissance sans pareille des herbes du marais.
Un grand sourire éclata sur le visage de l'hybride.
Ils ont réussi ! Par Kÿria, ils ont réussi !
Halyalindë
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Lun 21 Mai 2018 - 10:40
Sans un mot et sans même vérifier si elle était suivit ou non, Halya s'empara de la flasque et quitta la pièce à grands pas. Elle ne savait pas pourquoi le parchemin d'instruction était écrit en elfique mais elle n'allait pas s'arrêter pour le demander. En quelques minutes, elle avait intercepté un prêtre pour lui dire de prévenir la Haut-Prêtresse qu'elle était de retour avec un remède potentiel sans donner d'autres indications. Il ne fallut pas beaucoup plus longtemps pour arriver à la chambre gardée.
Deux Aigles à la mine morose en gardaient l'entrée. L'état de la malade avait du affecté tout le corps qui était encore en pleine reconstruction après les nombreuses pertes de ces dernières années. Halya ne connaissait d'ailleurs qu'un des deux combattants présent et encore elle n'était jamais parti en mission avec celui dont le visage résonnait dans sa mémoire. Évidemment, elle fut donc froidement intercepter.
- J'apporte un nouveau remède à tester. - Nous n'avons pas été prévenus. - Je reviens tout juste d'Ardamir ou était le second cas pour l'apporter. Je n'ai pas eu le temps de prévenir les Auxiliaires ou les Aigles. Laissez-moi passer, vous savez qu'il n'y a pas de temps à perdre en paperasse. - Le lieutenant à ordonner que seuls... - Laissez-moi passer, Bons Dieux ! Je ne suis peut-être plus Aigle mais je connais les risques. Gardez moi sous gardes après si vous voulez mais laissez moi essayer de sauver cette femme!
L'agacement et le manque de sommeil lui retiraient le peu de patience qu'elle aurait pu avoir dans ce genre de cas... Ce qui ne pesait déjà pas bien lourd. Les deux gardes se regardèrent. Le plus âgé acquiesça et laissa passer les visiteurs escortés par son confrère après avoir vérifiés qu'ils étaient désarmés. Halya les remercia du bout des lèvres et ajouta à l'intention de celui qui restait à la porte :
- Si vous pouvez prévenir le lieutenant Ren. - Oh, il le sera, n'en doutez pas.
A l'intérieur avait été maintenue une certaine pénombre. Deux soigneurs s'affairaient et un sac de couchage sur un discret matelas prouvait qu'au moins l'un d'eux avait l'habitude de dormir dans la chambre pour pouvoir intervenir au plus vite en cas de soucis. L'un portait la robe sacrée des prêtres de Kÿria, l'autre seulement la ceinture des mages Auxiliaires de l'armée. Deux mages guérisseurs à n'en pas douter. Ils n'avaient pas dépêché n'importe qui.
Prenant à peine le temps d'expliquer et laissant le bagout aux mages entre eux, elle s'approcha de la couche. Si elle en croyait ce qu'elle avait déjà vu, elle n'en avait plus pour longtemps. La toile de sang noir remontait déjà sur une bonne partie de son visage et ses doigts étaient teintés sur presque toute leur longueur. Il fallait faire vite. Au point ou ils en étaient, les soigneurs furent plus facile à convaincre que les Aigles. De toute façon, s'ils ne faisaient rien ils risquaient de voir mourir la patiente d'un moment à l'autre alors tester un remède venu d'une cité sœur ne pouvait aggraver les choses.
Sur les instructions de la rouquine et pestant contre la posologie vague qui lui avait été transmise, ils laissèrent tomber quatre gouttes du liquide repoussant dans une entaille effectuée le long d'une veine corrompue. Il n'y avait plus qu'à attendre...
Haldren
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Lun 21 Mai 2018 - 11:36
[HRP : la création d'un remède par les herboristes d'Abyssea a été jouée sur 1d20 avec un succès à 10 ou moins (résultat : 10). La survie de l'Aigle durant cette période a été jouée sur un jet à 6 ou moins (résultat : 1)]
Hecil suivit docilement Halyalindë, ou pour être plus précis il lui courut après tant l'elfe marchait vite jusqu'à la chambre de l'Aigle malade. Lorsqu'il la rejoignit, elle était en pleine engueulade avec les gardes en faction pour obtenir un accès, ce qu'elle réussit à faire à force de persuasion. Hecil se glissa discrètement dans la chambre lui aussi tout en esquissant un petit sourire contraint aux gardes comme pour s'excuser du comportement cavalier de la diplomate.
N'ayant rien de spécial à faire, l'hybride se mit dans un coin et attendit, vaguement conscient que de toute façon Halyalindë se fichait totalement de savoir s'il avait suivi ou pas, toute concentrée qu'elle était sur le test du remède. Une incision fut pratiquée sur le bras de l'Aigle et quelques gouttes d'antidote versée à même la veine devenue noirâtre. N'ayant aucune idée de ce qui allait se passer ensuite, les quatre observateurs attendirent avec une patience plus ou moins maîtrisée.
Halyalindë était sans doute des quatre celle qui subissait le plus de pression, et on la sentait pareille à une bouilloire prête à exploser. Hecil se demanda non sans curiosité comment elle allait réagir si le remède ne fonctionnait pas... sombrerait-elle dans un abattement dépressif ? Allait-elle sauter à la gorge de l'hybride en braillant des injures ? Avec quelqu'un d'aussi peu stable dans sa tête qu'Halyalindë et à qui manquait la rigueur morale des magiciens, impossible de prédire.
Bref, j'ai bien mouliné pour ne rien dire, hein ? Laissons donc la parole aux protagonistes.
Regardez, s'écria soudain l'un des soigneurs.
Au niveau de l'incision, la couleur noirâtre commençait à diminuer, comme de la peinture se dissolvant peu à peu dans l'eau.
Halyalindë
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Lun 21 Mai 2018 - 12:10
En retrait, le battement de son pied marquant les secondes, la main encore serrée sur la fiole de verre, Halyalindë sursauta en entendant l'exclamation du soigneur. Le sang... s'éclaircissait... Le temps de revenir de sa surprise et elle donnait définitivement l'ampoule d'antidote aux guérisseurs pour qu'ils puissent l'utiliser et l'analyser à loisir.
Se tournant vers l'hybride, elle le remercia d'un signe de tête avant de l'enjoindre à la suivre dehors. Elle le raccompagna jusqu'à la nef du temple avant de tout juste lui lancer :
- Je reviens dans un quart d'heure. Nous avons à parler. "
Aussitôt dit, elle disparut à l'extérieur pour ne réapparaitre qu'une dizaine de minutes plus tard à la porte de l'antre bordélique du drow. Appuyée dans l'encadrement, elle frappa tout de même deux coup au linteau et brandit une grande bouteille de verre remplie d'un liquide blanc légèrement jauni lorsqu'Haldren tourna la tête vers elle.
- Je me suis dit que tu n'avais sûrement jamais eut l'occasion de goûter de la vrai Lëoras. "
Le ton était encourageant mais dépourvu de sympathie ou de sourire. Tout s'était enchainé à une telle vitesse qu'elle avait du mal à savoir exactement ce qu'elle ressentait. Elle était comme éteinte.
Lorsqu'elle approcha pour venir s'asseoir près de la fenêtre, sa seconde main dévoila deux verre en terre cuite qu'elle posa sur la table avec la bouteille. Tout en essayant de faire sauter le bouchon - sans grand résultat à cause des chevauchées ininterrompues qui lui avaient scié les doigts - elle chercha le regard de l'hybride.
- La Haute-Prêtresse m'avait demander de faire un vrai entretien avec toi et un arbitre à propos de tes actions passées. Mais j'ai déjà donné avec les prêtres qui se mêlent de tout. J'avais mes propres questions et besoin de réponses... J'avais même un millier de questions, mais tu en as peut-être toi aussi... " décidément ce bouchon lui résistait sévèrement ! Elle émit un grognement agacé et tira un grand coup sans résultat puis la reposa un moment sur la table pour reprendre ses forces. " Bon. Tu nous a permis de sauver des vies elfes et tu respecte les limitations de la Haute-Prêtresses, ça n'efface pas les horreurs que tu as faites, mais plus le temps passe, plus j'ai du mal à savoir pourquoi tu fais tout ça. Foi ou non. Pourquoi tenter de venir en Anaëh alors que tu avais de grandes chances d'y laisser la vie ? "
Haldren
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Mar 22 Mai 2018 - 9:56
Hecil prit la bouteille afin d'en ôter le bouchon, utilisant sa compétence de niveau maximum en débouchage acquise suite à de longs entraînements aux cuites en compagnie de Dun Eyr (la présence d'un dawi donnant un bonus de +20% à l'entrainement). Ni une ni deux, le liquide à la couleur malaisément définissable commença à couler dans les deux choppes. L'ayant humé pour en saisir toute la fragrance, l'hybride y plongea les lèvres et une petite lueur malicieuse pétilla dans son regard.
Hmm, pas mauvais... je lui trouve un gout de pomme... mais y'a pas que de ça... y'a autre chose... ce serait pas de la betterave ?
Halyalindë en profita alors pour lui expliquer que la Main souhaitait qu'elle ait un entretien impartial avec lui afin de juger ses actions passées. La première question qu'elle lui posa recoupait en partie celles de Loethwil, mais la venue de l'ancien eldéen troublait tellement les elfes qu'il ne fallait pas se montrer surpris qu'ils aient du mal à comprendre ses raisons. Lui-même, à leur place, ne les aurait probablement pas mieux comprises.
Pourquoi venir en Anaëh ? C'est vrai, j'aurais pu aller ailleurs. En Ithri'Vaan par exemple, ou à Meca, loin des dangers que je cours ici. Mais cela ne m'aurait pas permis de savoir qui je suis.
L'hybride reprit une gorgée de liqueur.
Je ne suis plus un drow, Halya, peu m'importe que tu me crois ou non. Mais pour autant suis-je un elfe ? Non... pas encore... peut-être un jour... peut-être jamais ? Pour le savoir, il me fallait affronter le regard des elfes, voir leur réaction face à un ennemi héréditaire demandant la rédemption, essayer de vous comprendre par-delà les caricatures que l'on m'a enseigné.
Un sourire triste apparut sur le visage de l'archimage.
C'est une chose terrible de ne pas avoir de racines, pour un arbre comme pour un Souffle. Mes racines du Puy m'ont été arrachées par la volonté d'Uriz et depuis je me sens... vide. Imagines un instant que tu sois rejetée de l'Anaëh, que tu te sentes intrinsèquement différente de tous les autres elfes, que tu ne supportes plus leurs valeurs ni leurs ambitions. Comment te sentirais-tu ?
Se levant, Hecil marcha jusqu'à la fenêtre et son regard se perdit au loin dans les frondaisons de la forêt.
J'ai moi aussi une question à te poser, Halyalindë. Tu voulais... tu veux peut être encore me tuer. En tant que drow, j'aurais très bien compris pourquoi. Ce qui s'est passé à Eraison aurait justifié aux yeux d'un eldéen de m'abattre à vue, mais ce n'est pas ce qui m'intéresse.
Se retournant, l'hybride fixa du regard l'elfe, cherchant à lire en elle les réponses aux questions qui le hantaient depuis des jours.
Pourquoi veux-tu me tuer ? Par vengeance pour ceux tombés à Eraïson ? Parce que tu penses que tu y trouveras une satisfaction, un baume pour tes blessures ? Pour protéger l'Anaëh ? Ou pour d'autres raisons que je comprends même pas ?
Halyalindë
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Mer 23 Mai 2018 - 11:51
Un sourire indistinct glissa sur les lèvres de l'elfe. Se sentir intrasequement différente de ses pairs et ne comprendre ni leurs ambitions, ni leurs valeurs... Elle pouvait... Bien trop aisément répondre à la question rétorique de cet homme. Elle avala de longs traits de Lëoras et reposa son verre, suivant des yeux le mage qui se levait pour aller à la fenêtre.
Demie-Noss, elle s'était élevée jusqu'au sommet des Cités, allant même jusqu'à représenter une alternative sérieuse au régent aujourd'hui en place. Elle avait renoncer à cette charge pour que le Conseil puisse choisir en quelques jour son dirigeant et qu'Eraison puisse être reprise. Et finalement, sa vie avait tant changer qu'elle n'aurait put dire ce qu'elle ferait même le lendemain. Pourtant, elle ne pouvait imaginer faire l'objet de l'abandon de l'Anaëh elle-même. Sa ville natale et le Grand Chêne étaient toujours là. Ils seraient là bien après sa mort. Mis à part la présence de Fenris, c'étaient peut-être les seules pensées qui l'aidait à sentir un peu moins le gouffre que les morts et les affrontements successifs avaient ouverts dans sa poitrine. Elle s'esuya discrètement les yeux et fini son verre d'un trait.
La seconde question était à la fois plus facile à évaluer et plus difficile à avouer.
- C'était par peur. " Elle soutint un moment le regard du drow avant de le baisser vers son verre vide en soupirant " Je n'ai pas fait beaucoup de cauchemar après Eraison, parce que la déflagration magique de ton rituel a littéralement arraché mon Souffle de mon corps. A cause de toi et de l'acharnement des miens à me garder en vie malgré tout, je suis devenue une bête sauvage puis une coquille vide. Je ne ressentais plus rien. Plus de sensations, plus de douleur, plus d'émotions. Pas la moindre compassion. " Elle secoua la tête en ravalant un éclat de rire mauvais et se resservit. " Tu dis savoir ce qu'est le vide... Je te garantis que ce n'est pas le cas. "
Elle se redressa sur sa chaise avant de trouver de nouveau la volonté de parler et de regarder le drow sans que sa voix ne tremble.
- J'étais en colère pour les victimes d'Eraison, d'Ellyrion, tous les gens que tu peuple à détruits. Mais te tuer n'aurait ramener personne à la vie. C'était surtout par peur que j'ai essayer de te tuer. Que ta peau soir noire ou blanche, tu es plus dangereux pour Anaëh et pour chacun d'entre nous que la majorité de tes semblables. J'ai peur pour l'Anaëh, j'ai peur pour les miens. Et j'ai peur pour moi... C'est parce que je sais que la peur est mauvaise conseillère que je t'ai ramené ici. Je ne pouvais pas t'exécuter et que je le veuille ou non, je ne peux toujours pas. Ce n'es pas comme ça que nous conserverons l'Harmonie de ce monde. "
Il avait la capacité de faire des dommages irréversibles dans leur société, cela, elle en était convaincue.
- Très honnêtement, je ne sais pas quoi penser. Si tu es sincère, te repousser signerait peut-être l'arrêt de mort de la dernière possibilité de réunion entre nos peuples. Si tu ne l'es pas, c'est Anaëh que nous sommes en train de condamner. Tu dis avoir changé et tes actions semblent le prouver, mais tu peux encore cacher tellement de choses bien plus grâve que tes entrées à Abyssea. Tu souhaite retrouver tes racines mais tes manières et ta façon de pensée n'entraineront-elles pas des changements dans ton entourage ? Combien de temps avant que cela ne se répercute à grande échelle ? Auras-tu le moindre contrôle sur ce que ta présence entrainera ? Tes bonnes actions n'excusent rien, mais c'est un début. Alors Non, je ne peux pas dire que je n'éprouve plus de gêne en te regardant. La peur est toujours là et la rancoeur personnelle que j'ai envers toi restera sans doute longtemps. Ta mort règlerait beaucoup de problème... mais je ne la souhaite pas. " Elle ajouta avec un sourire sarcastique. " Je déteste ça, mais j'ai l'impression de te ressembler plus que je ne le voudrai. A moins que tu ne sois du genre à mener une vie bien rangée et recluse dès que la Haute-Prêtresse t'aura autoriser à vivre parmi nous ? "
Haldren
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Mer 23 Mai 2018 - 12:36
Hecil écouta Halyalindë tout en sirotant son verre. La peur, il comprenait... ce sentiment faisait partie de toutes les sociétés et les drows eux-mêmes réagissaient en fonction d'elle. Les prêtres d'Uriz auraient certes eu bien du mal à se l'avouer, mais leur attitude rigoriste et bornée venait en bonne partie de la peur du changement, d'une crainte de l'inconnu qu'il n'osaient affronter, se réfugiant dans la tranquillité rassurante des diktats divins. Bien évidemment, expliquer à l'elfe que cela lui donnait un point commun avec les drows n'aurait guère été diplomate.
Ne surestimes pas mon importance, en bien comme en mal. Dans mon orgueil j'ai commis cette erreur autrefois de croire que je pouvais changer le monde... je sais désormais que le destin d'un Souffle ne suffira pas à changer celui d'un peuple.
Reposant son verre, Hecil revint s'asseoir face à l'elfe.
Supposons un instant que je sois un menteur, un nouveau Tebryn qui tente de gagner votre confiance avant de vous poignarder dans le dos. Cela me rendrait-il plus dangereux pour autant que je ne l'ai été à Eraïson, lorsque je m'affichais ouvertement votre ennemi ? Et à l'inverse si je suis sincère, mon exemple ne suffira pas pour permettre une réconciliation entre elfes et drows.
Halyalindë ne le jugeant que sur la base des événements d'Eraïson, elle estimait que l'hybride pouvait s'avérer un poison mortel pour les elfes en cas de traîtrise. Hecil ne partageait pas son avis, estimant que même un choc tel que le rituel du Nœud finissait pas se résorber.
Et pour répondre à ta question... non, je ne compte pas mener une vie rangée et recluse. Il y a tant d'endroits à voir, tant de découvertes à faire, tant de nouveaux visages à découvrir. Je suis un éternel inassouvi de découvertes, cela était vrai hier au Puy comme cela serait vrai demain en Anaëh si vous m'autorisez à y rester. Tu as raison de dire que je ne pourrai pas maîtriser les conséquences de ma seule présence ou de mon mode de vie.
Malgré ses milles ans bien sonnés, Hecil ne se sentait pas du tout atteint de ce que les elfes nommaient le Mal de l’Éternité, cette langueur pouvant les affecter lorsque les siècles devenaient trop nombreux. Peut-être fallait-il y voir la marque de son héritage drow. Peut-être aussi fallait-il y voir sa soif de découvertes qui alimentait son envie d'avancer.
J'ai toujours pensé que les drows sont incapables de stabiliser le cours de leur histoire et vivent dans un mouvement perpétuel sans trêve ni répit, alors qu'à l'inverse les elfes ont trop tendance à vouloir se maintenir dans un instant figé pour toujours. La réaction de la Haute-Prêtresse refusant de chercher de l'aide au-delà des frontières de l'Anaëh est caractéristique de cette autarcie défensive. T'es tu jamais demandé si le meilleur mode de vie n'est pas l'union du meilleur de ces modèles ? S'il ne faut pas mettre un brin de folie dans la stabilité pour en goûter toute la saveur ?
Halyalindë
Ancien
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Mer 23 Mai 2018 - 13:16
Ce que le drow ne savait pas, et ce qu'elle aurait préféré qu'il ignore pour toujours, c'était qu'il se trouvait à quelques minutes à peine du plus grand point faible d'Anaëh et que si les étrangers ne pouvaient aller et venir comme ils le voulaient au sein de la ville, c'était aussi pour protéger ce secret. Tous les elfes n'étaient pas au courant de l'impact de l'arbre sacré, mais ceux qui l'étaient avaient conscience de la fragilité précaire de l'équilibre qu'ils défendaient tous et de la renaissance de leur Soeur. N'importe quelle autre ville de pierre aurait put être rasée, l'Anaëh s'en serait remise et le Peuple avec elle, mais Alëandir n'était pas que de pierre et d'histoire, tout comme Ardamir n'était pas un simple enchevêtrement d'arbres qui pouvaient mourir et repousser sans peine.
- Il y a quelques mois je t'aurais dit oui. Je l'ai pensé pendant des siècles. "
Tout d'abord envers les Noss, puis même envers les humains. Ils croquaient la vie à pleine dents, profitaient de leur vie éphémère et étaient si extrêmes qu'il leur arrivait d'accomplir des choses plus grande que ce qu'aurait put espérer n'importe quel elfe. Elle avait apprit d'eux. Elle avait comprit et accepter une part de leur capacité d'improvisation et de leur impulsivité.
- Presque tout le monde l'ignore ici, mais j'ai vécu en Itrhi'Vaan quelques temps. J'ai cru que les autres races avaient beaucoup à nous apporté comme nous avions beaucoup à leur offrir, mais tous les évènements qui auraient put prouver que c'était une solution acceptable on au contraire prouvé que les influences extérieures déséquilibraient notre société. La mort du Protecteur Dragan, de la Protectrice Rêverie, de toute une famille royale, l’éviction de Rima, l'inutilité de la défaite drow en Alonna, les bucherons de Péninsule, le vole des armes d'un de nos héros de guerre. Et ce ne sont que les faits à grande échelle. J'ai vu sur quelle misère et sur quelle inconscience ils construisent leur grandeur. Ils ne comprennent pas le monde comme nous avons le temps de le faire. Et convaincre un ou deux étrangers ne sert à rien étant donné leur espérance de vie. Toutes les deux ou trois décennies, les penseurs et gouverneurs changent et refont les même erreurs que leurs prédécesseurs. La pauvreté, la maladie, la perte, le meurtre, ce sont des choses qui nous sont intrinsèquement étrangères.
Que certains d'entre eux veuillent chercher, apprendre et aller à l'extérieur tant mieux. Mais les elfes jouaient déjà les équilibriste pour maintenir leur culture et ne pas se complaire sans les erreurs du passé.
- Cela fait plus de 10ans que nous souffrons à cause de la guerre. Nous avons essuyé la disparition d'une cité entière, une guerre civile. Les Noss viennent de prouver qu'une poignée d'entre eux pouvaient détruire des milliers de vies et nous savons pertinemment que sans la paix et le calme que nous maintenons dans les Cités, des actes de même nature seraient inévitables. Les Cités ont été pensées et créer comme des havres de paix pour se reposer de la dureté du monde. Alors qui a-t-il de mal à vouloir faire durer un instant de bonheur et de paix toute une éternité ? Qu'aurions-nous à gagner à rajouter du chaos au chaos ?
S'ils n'avaient pas autant voulu donner leur chance à des gens de l'extérieur, Eorim ne... Elle s'accorda une grande rasade. Et puis si c'était de la folie qu'il voulait, elle pourrait toujours lui présenter quelques prêtres d'Arcamenel. Il ne serait pas déçu du voyage. Entre eux et les effets mystiques de la Symphonie, il y avait déjà de quoi faire comme folie au sein de leur chère forêt.
Halya failli s'étouffer lorsqu'une violente question lui fracassa le cerveau droit.
- Est-ce que tu peux entendre la Symphonie ?
Haldren
Ancien
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Mer 23 Mai 2018 - 13:59
Parce que le monde bouge autour de vous, Halya. Vous pouvez vivre en autarcie et chercher à faire durer un instant d'éternité, mais avez-vous mesuré l'effet que cela créé pour les autres races ? Au mieux les elfes sont considérés comme des êtres hautains et mystérieux, au pire comme des égoïstes cachant leurs richesses... un cocktail hautement attrayant pour tous les ambitieux qui parcourent Miradelphia.
Se voir de l'autre côté du miroir n'est pas chose aisée, et Hecil craignait que trop peu de dirigeants elfes aient cherché à le faire. Par honnêteté, il fallait reconnaître que les autres peuples ne faisaient pas mieux. Des dawis enfermés dans leurs profondes mines pour en extraire plus de richesses aux péninsulaires trahissant leurs serments aussi vite qu'ils les portaient, tout le continent ressemblait à une bouilloire prête à exploser.
Ou en est votre alliance avec la Péninsule depuis la mort du roi Trystan ? Pourquoi n'avez-vous jamais su refermer les plaies des guerres naines et établir des relations pérennes avec le trône de Kirgan ? A part Naelis qui a une elfe comme reine, quelle cité d'Ithri'Vaan vous considère comme son allié ? Avez-vous tissé des liens d'amitié avec les magiciens de l'Aurore ? Vous vous retrouvez politiquement aussi isolés que les drows, sauf qu'eux recherchent cet isolement qui justifie leur politique militariste.
Du temps où il participait aux séance de l'Olath Blada, Haldren avait toujours signalé l'intérêt pour l'Elda de concentrer ses attaques sur l'Anaëh en laissant tranquille les autres puissances géopolitiques, assuré qu'aucune ne tenterait d'aider les elfes si le front cédait. Mais déjà Halya amenait un autre sujet sur la table.
La Symphonie ? Je... crois. Mais je n'en suis pas sur.
L'ancien eldéen se gratta la tempe comme pour s'éclaircir les idées.
Peu après ma rencontre avec Kÿria, je me suis mis à faire des rêves durant lesquels je voyais évoluer ensemble un drow et un elfe. Lors d'une de ses transes, l'elfe et le drow dansaient ensemble sous les frondaisons de l'Anaëh au rythme d'une musique si belle qu'elle leur arrachait des larmes. Cette musique chantait les saisons, le cycle de la nature et évoquait une ode au renouveau.
Un sourire attendri apparut sur ses lèvres.
Lorsque je médite près de l'Estel, au moment où je ne sais plus si je suis éveillé ou endormi, il m'arrive de l'entendre à nouveau comme un murmure lointain. Est-ce cela, la Symphonie ?
Halyalindë
Ancien
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Mer 23 Mai 2018 - 14:33
- Et cet isolement justifie notre autarcie. Tu penses que nous n'avons pas réfléchia u problème ? Arrête de nous juger et de croire que tu comprends tout de nous alors que tu viens à peine de poser le pied dans une Cité. " répliqua-t-elle agacée, mettant clairement fin au débat pour passer à la question qui venait de surgir.
Et la réponse la cloua sur place. Elle blêmit.
C'était impossible... alors que si peu de citadins parvenaient à l'entendre... De ce qu'ils savaient, les drows avaient perdu toute sensibilité à l'Oeuvre en regnant Kÿria. Pourquoi l'un d'eux récupèrerait ce don alors que tant priaient la Mère toute leur vie sans auvoir aucune chance de l'obtenir ?!
Mais plus encore, un nom, un seul avait collé une sueur glacée le long de la colonne vertébrale de l'elfe.
- Qui t'as laissé approché de l'Estel... Et qui t'en a parlé ?
Haldren
Ancien
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Mer 23 Mai 2018 - 15:33
Euh... je... ne sais pas. L'Estel est important, c'est comme... un réceptacle... je crois.
Hecil regardait avec surprise Halyalindë qui de son côté le dévisageait avec la même stupeur que s'il avait baissé son pantalon pour faire le foreuse ydrilote avec sa verge. Jusque là, l'hybride ne s'était à aucun moment interrogé sur les raisons le poussant à aller méditer auprès du Grand Arbre, si ce n'est qu'il s'y trouvait bien, en paix avec lui-même. A sa place, d'une certaine façon ? Oui peut-être, même si cette affirmation aurait été trop simplificatrice pour les sentiments mitigés qui le parcouraient souvent.
Désolé, je n'arrive pas à me souvenir qui m'en a parlé la première fois. C'est comme si cette information avait été implantée dans ma mémoire, et puisque personne ne m'empêchait d'y aller... eh bien j'y suis allé.
Fouillant en vain sa mémoire, Hecil se demanda si l'image de l'Estel ne lui venait pas de ses transes, du grand elfe qui l'y guidait alors de lieux en lieux. Ne voyant personne lui interdire l'accès à l'Harmalaica et suivant son instinct, il s'y était rendu par curiosité d'abord, puis parce que l'Estel lui semblait un bon endroit pour méditer au calme, bien préférable en tout cas à la nef du temple où les passages perpétuels empêchaient de se vider l'esprit. Comme souvent depuis son arrivée dans l'Annon, Hecil sentait aux limites de sa perception qu'il effleurait des éléments importants, avant de les perdre comme de la brume s'échappant entre ses doigts.
Pourquoi ? Qu'est-ce que l'Estel a de spécial par rapport aux autres sanctuaires de l'Anaëh ?
Halyalindë
Ancien
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Sam 26 Mai 2018 - 15:02
Non seulement il percevait consciemment une certaine part de la Symphonie, mais il connaissait l'Estel. Il le connaissait instinctivement, le décrivant pour ce qu'il était d'un point de vue symphonique et non comme la plupart des citadins le voyaient. Les prêtres l'auraient décrit comme un présent d'une gardienne ou la preuve que la Mère était toujours à leur côté, mais depuis qu'elle s'était entretenue avec Eninril et que le rite druidique avait été mené à bien, elle ne le percevait plus seulement comme l'origine d'une symphonie très particulière, mais comme l'écrin d'un pouvoir qui la dépassait.
Le fait qu'il connaisse l'arbre était déjà étonnant en soit, mais si elle dévisageait toujours l'hybride avec incrédulité, c'était plus pour ce que cette conséquence sous entendait. Elle aurait sans doute eut moins de problèmes à accepter qu'il se mette effectivement a faire la foreuse ydrilote.
Un éclat rire désabusé lui échappa.
- Mon père est mort et Kÿria te tend les bras... "
Pour une raison inconnue, une voix revenue du fond de sa mémoire lui soufflait les mots d'une prophétie qui ne s'était pourtant jamais réaliser... Impossible. Il n'était chef du tout de rien de toute façon. Elle secoua la tête pour se la sortir de l'esprit.
- L'Estel est un symbole. L'avant dernière avatar de Kÿria nous l'a offert pour qu'on sache qu'Elle était toujours à nos côtés et que le XIe Cycle serait marqué par Sa puissance.
Que du vrai... Pas toute la vérité mais un gros morceau.
- Et cet l'elfe de tes transes... A quoi ressemble-t-il ?
Haldren
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Dim 27 Mai 2018 - 10:15
Il devinait des morceaux, des fragments d'une histoire plus vaste à laquelle il ne participait pas. Halyalindë lui soulevait un coin du voile, comme les catins de Thaar dévoilent le galbe de leurs jambes, mais elle ne remontait pas plus haut et ne lui fournissait qu'une partie des éléments qui lui aurait permis de réellement appréhender des événements qu'il sentait se révéler importants pour un elfe. L'espace d'un instant, Hecil hésita à lui demander en quoi l'Estel prouvait que la déesse les accompagnait. Avaient-ils donc besoin d'un signe pour croire ? La compréhension viendrait peut-être avec le temps.
L'elfe revint alors aux transes dont lui parlait l'hybride, l'interrogeant pour obtenir plus de détails.
A quoi ressemble-t-il ? A un grand elfe aux cheveux ailes de corbeau et aux yeux d'émeraudes. Le drow est plus facile à identifier car c'est... non pardon... c'était moi.
La bouteille de Lëoras attendant patiemment qu'un gourmet y retâte, Hecil se dévoua et remplit de nouveau les deux choppes tout en continuant à parler.
J'ai beaucoup réfléchi à ces transes, aux conclusions que je dois en tirer. Je soupçonne que le drow représente mon passé, ce que j'étais au Puy, alors que l'elfe symbolise ce que je pourrais peut-être devenir un jour. S'agit-il d'une sorte de carte mentale devant me guider dans mes premiers pas ici ? En tout cas, c'est mon impression bien qu'il me soit impossible de le vérifier. Tu me demandais tout à l'heure pourquoi j'étais venu en Anaëh malgré les risques. L'une des raisons était également que l'elfe de ces transes invitait le drow à y aller.
Plus il y pensait, plus l'hybride soupçonnait avoir vu juste. Après le reniement d'Uriz et l'acceptation du Choix offert par Kÿria, il s'était retrouvé déboussolé, sans repères, incapable de décider ce qu'il devait faire. Les transes nocturnes permettaient certes de le rassurer, mais également de lui indiquer une direction, une voie cohérente avec son Choix. Leur disparition depuis sa rencontre avec Loethwil pouvait confirmer cette hypothèses, d'autres ayant alors pris le relais pour l'aider à avancer même lorsqu'il ne s'en rendaient pas compte.
Sais-tu quand les tiens statueront sur mon sort ?
Il n'y avait nulle menace ni sous-entendu dans les paroles de l'ancien eldéen, ou alors il les cachait bien. La question semblait aussi banale que de savoir s'il ferait beau le lendemain.
Halyalindë
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Dim 27 Mai 2018 - 10:33
Coincé entre deux versions de lui même... Tout ce qu'elle apprenait sur cet homme était étrange. L'implication de la Déesse encore plus. Elle ne voulait pas l'entendre mais la foi n'avait pas besoin de preuve pour exister. Et si on ne croyait que lorsque c'était simple cela perdait beaucoup de son sens. Elle n'aimait VRAIMENT pas ça.
Elle n'arrivait pas à se décrisper... Et avala donc de grandes gorgées du verre qu'il venait de remplir à nouveau pour faire bonne mesure avant de répondre à la question tellement anodine qu'il avait fini par posée.
- Non. Je sais seulement que la Haute-Prêtresse a averti le Doyen de l'Académie, le Protecteur d'Eteniril et deux ou trois familles de défunts d'Eraison. Mais je pense que bien peu viendront. Elle n'a donné de détails a personne si ce n'est que ça concerne Eraison. Personne ne veux se souvenir d'Eraison. " ajouta-t-elle avec un rire jaune qui, cette fois, n'était pas destiné à l'hybride mais visiblement à ses propres compatriotes. " Mais si ça te rassure, sache que je vais lui donné mon avis officiel sur tout ça dès que tu m'auras promis de ne plus recontacter les Abysseéns. Leur culte est incontrôlable et nocif, la Haute Prêtresse à raison. Si tu restes parmi nous, tu ne peux pas prendre le risque de contracter des dettes ou de leur transmettre involontairement des informations.
Haldren
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Sujet: Re: L'Aigle et le corbeau | Hald Lun 28 Mai 2018 - 14:07
Hecil comprenait la réticence d'Halyalindë a le laisser libre de ses contacts vis-à-vis d'Abyssea. L'autarcie imposée par la Main et les hautes autorités politiques d'Alëandir ne pouvaient qu’entraîner ce choix, que l'hybride trouvait malgré tout trop radical. Garder un lien avec d'autres groupes pouvait toujours se révéler utile en cas de crise, d'autant plus que d'Abyssea auraient pu venir les nouvelles issues de l'Elda où les chaotiques disposaient de quelques fidèles pouvant recueillir de précieuses informations. Mais il ne lui appartenait pas de prendre cette décision, aussi accepta-t-il le serment demandé.
Tant que je serai parmi vous... si bien entendu vous m'y acceptez... je jure de ne plus avoir de contact avec le culte du Chaos.
Coup de chance, se dit l'ancien eldéen, que j'ai déjà prévenu les hiérarques de mon absence prolongée. Ils ne seront dès lors pas surpris de devoir gérer le culte sans mon aide. L'elfe et l'hybride discutèrent encore quelques minutes de choses et d'autres sans grande importance avant de se séparer, l'essentiel ayant été partagé. Une sorte de gentleman agreement ? Oui, sans doute fallait-il y voir quelque chose comme cela puisque Halylindë n'essayait plus de le tuer en braillant des injures, ce qui contrastait foutrement avec leur histoire à Yutar.
Pendant ce temps, dans les bosquets sous la fenêtre de l'hybride, un corbeau d'Ombres picotait le sol à la recherche de vers tout en se demandant si son invocateur n'avait pas oublié de le renvoyer dans son plan d'existence.