Des nouvelles d'au delà de la mer [Renaud][Terminé]

Elenwënas, VIIIe ennéades du mois de Favrius, An XI, Cycle XI
Erac

«Vous croyez que le duc va nous accueillir ainsi? » demanda l’humain bedonnant à son camarade. « Je doute que ce dernier prenne cette annonce comme une bonne nouvelle. » Continua-t-il en maugréant.  Le rouquin quant à lui, ne dit rien, il se tenait bien droit sur la selle de son destrier en évitant regardant droit devant lui. Ayant fière allure, et ce, même avec la fatigue qui l’accablait. Cela faisait déjà  six ennéades que ce dernier était sur les routes. Son voyage en péninsule semblait s’étirait et disons que Tristan avait bien hâte de retourner à Thaar pour prendre quelques jours de repos. Après un long voyage jusqu’à Sainte-Berthilde, ce dernier s’était rendue jusqu’à Beaurivages, là où son frère Devan l’attendait en compagnie du curieux personnage qui l’accompagnait. La brève rencontre entre les deux frères avait été haute en couleur. Tristan se rappelait encore de la réaction qu’il avait eue alors que son frère lui avait donné la missive de la princesse. Après y avoir pris conscience il avait brulé la lettre et s’était assuré que personnes d’autre ne plus jamais mettre la main sur la missive haute en couleur princesse d’Uldal’Rhiz. Il s’était tout de suite mis en route avec les miliciens et le docteur de la princesse marchande en direction d’Erac. Il y avait une nouvelle négociation qui se préparait, et cette dernière allait être encore plus difficile que la dernière.


Le bedonnant médecin lâcha un bruyant soupir alors que le petit groupe de Thaaris faisait son entrée dans la ville. « Nous arrivons bientôt messire, le fait que vous soyez impatient et que vous ne cessiez de soupirer ne raccourcira pas notre voyage. » Le médecin lança un regard mauvais au rouquin. Quelle Audace que ce dernier avait! Il avait beau être le capitaine de la milice de la princesse, cela ne lui donnait pas tous les droits! Avant même que le bedonnant ne puisse ouvrir sa bouche, ce dernier fut interrompu par un des miliciens qui lui jeta un regard mauvais. Décidément, c’est tout le groupe qu’il ennuyait, pas seulement le jeune capitaine. Le médecin se renfrogna et le groupe put finalement continuer son chemin en silence. Le trajet prit de nombreuses minutes avant qu’ils n’arrivent devant la demeure du Duc d’Érac. Mais ils virent finalement le château à l’allure martiale se dresser devant eux. « Nous y sommes presque », murmura Tristan. Le bedonnant docteur quant à lui ne put s’empêcher de soupirer bruyamment en essayant de penser au bonus que ce voyage allait lui rapporter. Ils arrivèrent finalement aux portes du château et se firent rapidement arrêter par un garde. « Mon nom est Tristan Lasparma, Capitaine de la milice d’Uldal’Rhiz. J’ai un message pour Son Altesse, Renaud D’Erac de la part de Maralina Irohivrah, Princesse Marchande d'Uldal'Rhiz. »  Ne restait qu’à savoir si ce dernier accepterait de les recevoir…

Tristan Lesparma:

Cela faisait maintenant deux ennéades que Renaud s'était marié à Neyrelles. Tout le monde était reparti, et le calme était revenu, sauf que maintenant, il n'était plus seul, et obligé de donner quelques intentions à sa nouvelle compagne. Aucun amour entre les deux, du moins pas du côté de Renaud, mais ce n'était pas une raison pour la laisser dans un coin. Bien que débordé, encore plus maintenant qu'il avait retrouvé sa suzeraineté sur Hautval et Ancenis, il s'attelait à dégager du temps afin d'apprendre à la connaître. Il se demandait s'il pourrait en faire une alliée politique, une conseillère acquise à sa cause, ou si elle était une espionne sans vergogne au service de son frère. Il se devait donc de la tester, et au bout de quelques conversations, il en était toujours au même point, à savoir qu'elle était une énigme. Il n'arrivait donc pas à lui faire confiance. Tantôt, elle était froide et distance, tantôt...Espiègle, narquoise avec des traits d'humours intéressants. Elle ne semblait pas vouloir rester dans un coin à faire des tricots avec ses dames de compagnie, mais elle prenait toujours position pour Aymeric quand on arrivait à parler de Serramire et/ou, de la Régence.

Il était tout même heureux, non pas en raison de son mariage, mais bien de ses victoires politiques. Depuis son arrivée, il était allé de victoire en victoire. Le retour auprès du Roy avait été salvateur pour Erac, et il récupérait toute la gloire de ce choix avisé. Des renseignements qu'il avait demandé sur le ressentie eraçon (car il prenait soin de jauger la joie ou le mécontentement de ses gens, nobles ou paysans), il ressortait que même ses détracteurs n'osaient pas dire du mal de lui publiquement, conscient de sa cote de popularité, et de son aura du moment. Il faudrait attendre que cette ferveur à l'encontre du Duc diminue, le temps faisant son office.

Renaud écrivait une lettre à Bathilde, prenant soin d'écrire régulièrement afin de tisser des liens amicaux avec les futures baronnes. Un jeune page vint alors frapper à la porte, avisant le Duc que des émissaires d'Uldal'Rhiz s'était présenté à l'entrée du Château, et qu'il demandait à le voir pour lui transmettre un message. Renaud demanda à ce qu'ils soient bien reçus, nourris et logés si besoin, et qu'il les recevrait plus tard.

Le temps du leur paraître long, vu la quantité de choses que le Seigneur des lieux devait faire. Ce ne fut que le soir, après le repas, qu'on vint les chercher pour leur annoncer que le Duc pouvait les recevoir. c'est dans le même bureau qui avait servit à la rencontre avec leur Maîtresse, que Renaud les accueillit. Ce dernier se demandait bien de quoi ils pouvaient bien vouloir s'entretenir avec lui. Peut-être amenaient ils le premier versement convenu ?

"Soyez les bienvenues à Erac, messieurs, j'espère que vous n'avez manqué de rien, et que mes serviteurs ont bien fait leur office. Que me vaut votre présence, je vous écoute."

Renaud ne pouvait que se remémorer le moment plus qu'agréable qu'il avait passé ici même avec Maralina.

Il faisait déjà nuit lorsque les messagers furent finalement convoqués dans le bureau de du Duc d’erac.  Tristan, accompagné du médecin bourru de la princesse entrèrent finalement dans le bureau de Duc d’Erac. Les deux Thaaris s’inclinèrent bien bas devant le duc et relevèrent la tête rapidement après qu’ils aient été accueillis par le duc. «Je vous remercie pour vos bons soins et votre accueil Votre Altesse. Moi et mes hommes n’auraient pas plus demandé mieux. Si vous le permettez, Votre Altesse, laissez-moi me présenter, mon nom est Tristan Lesparma. Je suis le capitaine de la milice de Son Altesse Maralina Irohivrah.» Tristan savait pertinemment comment aborder la douloureuse négociation dont il s’apprêtait à faire face. Maralina l’avait bien entrainé, et ce n’était pas pour rien qu’il était rapidement devenu le négociateur attitré de la princesse Marchande. Des années de pratiques et de loyauté avaient été nécessaires pour acquérir l’étroite relation qui s’était forgée entre les deux Thaaris. Tristan était loyal à la Princesse Marchande et rien ne pourrait l’acheter. Mais la bataille qui était devant lui était loin d’être gagnée. Surtout que le Duc avait une réputation d’opportuniste, cette discussion allait vérifier s’il savait reconnaître les bonnes. «Vous recevrez bientôt le premier versement de la princesse. Aussitôt  le monopole des bordels sera bientôt sous le contrôle de notre Princesse et les rapports d’informations seront bientôt entre vos mains. » Il fallait ouvrir avec un doigté particulier, lui faire voir à quel point la relation entre les deux amants était bénéfique pour Erac et Velteroc. «Avec votre mariage avec Neyrelle de Brochant, vous deviendrez bientôt un des hommes les plus influents de la péninsule Votre Altesse et avec l’appui de Thaar et d’Uldal’Rhiz derrière vous, cela ne fera que renforcir votre position.» Bon il avait un peu exagéré la chose, Thaar n’en n’avait que cure des activités politiques de la péninsule. Tant que ces derniers continuaient de marchander avec la principauté…


«Mais, si je peux me permettre, ce n’est pas pour cela que notre bien-aimée Princesse Marchande nous a envoyé. Nous avions un message beaucoup plus important et surtout beaucoup plus dangereux à vous faire part.» Tristan, le visage de marbre observa sans bouger le Duc pour observer sa réaction. Ce dernier semblait surpris de l’audace du Capitaine, mais bon, il n’avait pas lâché le gros morceau encore. «La Princesse d’Uldal’Rhiz est enceinte, Votre Altesse. » Un court silence s’installa, pendant que Tristan, le visage de marbre continua;  «Et il n’y a aucun doute quant à l’identité du père.» Tristan avança d’un pas avant de continuer sur sa lancée; «Votre premier née est l’héritier d’Uldal’Rhiz Votre Altesse.»  Tristan se tue pendant quelques secondes, laissant ainsi le Duc se remettre de ses émotions. Après tout, ce n’était pas tous les jours qu’on faisait une pareille connerie. Tristan regarda le Duc, ce dernier sembla avoir une multitude d’émotions qui le traversait, mais le Capitaine ignorait sincèrement ce que ce dernier était en train d’élaborer comme plan. Alors il continua, d’un ton doucereux il répliqua; «La Princesse m’a prié de vous dire que c’était une surprise pour elle aussi, et qu’elle ne voulait pas bouleverser votre si récent mariage.» Tristan regarda le sol, silencieux, avant de retourner son regard vers le Duc. Venait le temps de passer aux choses sérieuses; «Mais elle m’a envoyé pour connaître votre point de vue. Voulez-vous reconnaître cet enfant et avoir le pouvoir et l’influence qu’il pourrait vous apporter? Où désirez-vous que ceci reste un secret pour ne pas heurter votre nouvelle épouse?» La décision était sienne, bien entendu, peu importe, la décision que le Duc prendrait aurait des conséquences sur le marché qu’il aurait avec la Princesse Marchande… Verrait-il cet enfant comme une opportunité d’étendre son pouvoir et sa lignée? Après tout son enfant à naître partait déjà sa vie avec des avantages hors du commun. Ou prendrait-il peur de gâcher sa toute nouvelle réconciliation avec le régent? «Bien entendu, cette nouvelle peut-être un choc. C’est pour cela qu’elle m’a mandé d’accompagner un de ces nombreux médecins.» Dit-il en désignant de sa main le grassouillet personnage qu’y l’accompagnait. Ce dernier ne se fit pas prier, et avec toute l’enthousiaste dont il était capable, il prit finalement la parole.


«Votre Altesse.» Dis-le bedonnant en faisant une révérence maladroite. «C’est un honneur de faire votre connaissance! Je n’aurais jamais osé espérer vous rencontrer un jour! Quel honneur! Que dis-je! Presque un miracle de rencontrer votre grandissime personne!» Et il continua de piauler pendant que Tristan soupire bruyamment en faisant non de la tête. Définitivement, le bedonnant personnage ne savait aucunement quand se la fermer. «Mais pardonnez-moi je ne cesse de parler! Cela doit-être la nervosité, j’ai fait la même chose à Sa Majesté la princesse! Quelle femme! Délicieuse, mais au caractère si indépendant. Vous en avez de la chance d’avoir eu une si jolie femme dans vos bras! En plus elle porte votre enfant! Je n’ose imaginer la joie qui enrobe votre cœur! Quelle Chance! Je….»


«SILENCE!» Le grassouillet personnage s’interrompit, mais sembla se renfrogner lorsqu’il remarqua que l’ordre ne venait pas du duc, mais de Tristan,  qui voyait bien au visage du Duc que la nouvelle semblait d’être bien loin de l’enchanté. «J’imagine que vous avez des questions Votre Altesse, nous sommes à votre disposition pour y répondre. Sachez que la Princesse Marchande m’a mandé de prendre une décision avec vous quant à l’avenir de cet enfant.» Tristan n’irait nulle part tant que le Duc ne prendrait pas de décision. La balle était maintenant dans son camp. Allait-il choisir de reconnaître cet enfant? Où voudra-t-il acheter le silence de la Princesse Marchande pour sauver la face et probablement son mariage? Après tout, ce dernier semblait flotter sur une vague de popularité. Quelle tristesse que cela serait si cette cote de popularité tombait drastiquement…

Il écoutait d'une oreille distraite l'émissaire de Maralina, notant tout de même le nom de celui qui parlait. Il prenait plaisir à se rappeler le moment plus qu'intense passé avec la maitresse de celui-ci. Ils n'amenaient pas l'argent, mais la promesse que le premier versement arrivait, ainsi que les informations qu'il avait négocié en échange du monopole sur les bordels eraçons. L'homme parlait, éveillant une curiosité chez le Duc qui se demandait soudain la raison de sa présence ici. Faire un aussi long voyage juste pour lui dire ça n'était pas pertinent, et connaissant un tout petit peu les Princes Marchands, il y avait anguille sous roche. L’appui de Thaar et d’Uldal’Rhiz ? de Thaar surtout ? mais ou voulait il en venir ? ils avaient un accord entre Maralina et lui, pas du tout avec la cité-état, mais de la à parler d'appui, il y avait un monde, le berçait il de mots doux pour l'amadouer ? Renaud ramena donc son regard sur Tristan, lui accordant un intérêt nouveau.

Les mots coulaient, et enfin la vérité semblait se profiler, beaucoup plus important et dangereux ? une boule d'angoisse naquit dans le ventre du Duc, non pas de peur, mais d'appréhension sur ce qui allait lui tomber dessus. Le couperet tomba enfin, Maralina était enceinte, et elle revendiquait la paternité de Renaud sur son enfant à naitre. Un froid mystique vint s'emparer du Seigneur d'Erac quand il entendit la nouvelle. Il écoutait, mais les mots lui semblaient lointains, cela ne pouvait pas plus mal tomber, et pire, à aucun moment, il n'avait songé aux conséquences lorsqu'il avait possédé la belle et fougueuse Princesse-Marchande. Ce moment éphémère, bien que des plus plaisant, venait de le mettre dans une situation effectivement dangereuse, mais pas que pour Maralina. Ce fut la demande de silence de Tristan qui ramena Renaud à l'instant présent, mais ce silence demandé sur un ton péremptoire, dans un lieu ou Renaud était roi, pouvait être mal perçu. Ce même silence demandé continua quand il eut terminé, aucune réponse ne venait du Duc. Il regardait l'émissaire, et seulement lui, ignorant le "médecin", mais aucun mot ne sortait de sa bouche scellée. Puis enfin, au bout d'un moment qui sembla durer une éternité, il parla

"Comment est elle certaine que l'enfant est de moi ?"

Une question qui pourrait être insultante, mais qui taraudait Renaud. Après tout, Maralina n'avait guère était farouche, et il était évident qu'elle prenait ce qu'elle voulait. Même s'il avait du batailler pour pouvoir enfin la prendre, et Néera savait qu'il avait apprécié ce moment, il savait que c'était une façade pour le dominer, et non parce qu'elle était chaste. Il ne doutait pas un seul instant que si elle avait des envies, même de sexe, alors elle les comblait, alors pourquoi cet enfant serait de lui ? Bien entendu, même si elle avait couché avec la péninsule entière, si elle avait envoyé ses émissaires dirent à Renaud qu'il était le père, alors elle soutiendrait qu'il n'y avait eu que lui, mais la question était venue tout naturellement.

Ce fut le médecin qui lui certifia, par quelques mots savants, ainsi que des dates, que l'enfant était le sien, que cela coïncidait avec la visite de Maralina à Erac. Fort bien, il ne pouvait de toute façon pas remettre en question sa paternité avant longtemps, et seulement si l'enfant ressemblait à un autre. Une nouvelle question vint alors, car il était évident qu'elle avait quelque chose derrière la tête.

"Elle me demande de reconnaitre l'enfant ? que veut elle d'autre ?"

Il se gardait de répondre d'une façon ou d'une autre, voulant d'abord savoir ce qu'elle tramait.

Peut-être que Tristan avait fait une grosse connerie en mentionnant l’appui de Thaar, mais il avait voulu être certain de l’impact de ces paroles rappellent au Duc à quel point il était dans une situation désastreuse. Ce secret pourrait clairement le détruire, et il devait comprendre qu’il ne jouait plus dans la cour des péninsulaires… Il était maintenant sur un terrain encore plus dangereux, encore plus traître. Les Princes Marchands n’avaient aucun scrupule à élimer et à détruire leurs ennemis. Renaud le savait pertinemment, et il devait comprendre que sa situation était énormément précaire. Tristan porta attention aux paroles du duc, et répéta sa question d’un ton doux; «Comme je vous l’ai dit un peu plus tôt, Votre Altesse. La Princesse d’Uldal’Rhiz m’a envoyé pour connaître votre point de vue. Voulez-vous reconnaître cet enfant et avoir le pouvoir et l’influence qu’il pourrait vous apporter? Où désirez-vous que ceci reste un secret pour ne pas heurter votre nouvelle épouse?»  Un silence vint envahir la pièce, durant lequel le Duc semblait réfléchir. On aurait dit que des milliers de scénarios possibles se jouaient dans sa tête, et finalement il prit sa décision; «Vous ne comprenez pas tous les tenants et les aboutissants. Cela ne peut plus mal tomber. Ce n'est pas uniquement heurter mon épouse, mais surtout perdre mes alliés, et me mettre à dos beaucoup de monde. Je ne peux pas me permettre de reconnaitre cet enfant, quelle que soit son influence, comprenez-vous ?» Tristan hocha la tête avant de sourire intérieurement, le pauvre… si seulement il savait l’arme qu’il venait de donner à la Princesse Marchande. «La Princesse comprend parfaitement la situation, c’est pourquoi elle tenait personnellement à ce que je vous pose cette question. »


Tristan se retourna vers le médecin et lui demanda de sortir. Étonnamment, ce dernier s’exécuta sans parler. Une fois la porte refermée, Tristan reporta son regard vers le Duc avant de continuer; «Maralina vous promet de tenir le secret, vous comprendrez que c’est un énorme sacrifice qu’elle se prépare à faire pour son héritier. Un enfant qui grandira sans connaître son père…» Il s’arrêta un moment en se mettant à faire quelques pas de long en large de la pièce. Sa maîtresse s’attendait à un résultat, et Tristan tentait de trouver les bons mots. Comment amener le Duc au pied du mur? Quoiqu’il l’était déjà, ce secret pourrait détruire tout ce que le Duc d’Erac avait construit… «Vous comprendrez qu’en temps et  lieu, Son Altesse ne se gênera pas pour vous demander quelconques faveurs?» Renaud semblait pensif. En réalité il repensait à son moment avec Maralina, se maudissant de ce moment intense, même s'il avait apprécié la dominer. Voilà que son orgueil, et sa libido débridée se rappelaient à lui, lui faisant payer gros sa dépravation, et ce, même s'il n'était pas marié à l'époque. Après avoir longuement réfléchi, le Duc répondit finalement;  «Ce n'est pas parce que je ne le reconnais pas officiellement qu'il ne doit pas savoir qui est son père. C'est surtout de discrétion, et de secret dont il est question. » Tristan vit l’hésitation dans le regard de Renaud, comme si ce dernier se demandait si la princesse marchande n’allait pas l’entourlouper dans quelconque manigance. « Je comprends parfaitement, et j'y consens, tout du moins si la faveur n'est pas...disproportionnée, et dans la mesure de mes moyens.» Tristan tentant tant bien que mal de camoufler sa surprise. Avait-il bien entendu? Mieux valait reposer la question pour mettre tout au clair; « Alors vous voulez faire partie de la vie de l’enfant? Au risque d’ébruiter ce secret? »


La réponse ne tarda pas;  «Non, c'est pour cela que je parle de discrétion, et de secret. Il va de soi que tant que l'enfant n'est pas en âge de comprendre ce que cela implique, il ne devra pas le savoir. Ensuite, je n'exclus rien.» En fait Renaud n'avait pas assez de recul pour savoir vraiment ce qu'il désirait, à part qu'il n'avait pas l'intention de perdre ses alliés, et sa crédibilité auprès des autres Suzerains, et de son Roy. Tristan et  Maralina l’avaient définitivement pris au dépourvu. Le messager inclina légèrement la tête avant de continuer;  « Je rapporterais vos demandes à la Princesse. Je peux par contre vous assurer que la faveur ne sera jamais au-delà de vos moyens. Si vous avez un message à faire passer à Son Altesse, il me fera plaisir de lui faire part. Sinon je vous demanderais humblement de me retirer. » Le duc semblait pensif. Que devait-il lui dire? Un seul mot semblait lui venir en tête; «Dites-lui que même si cela reste un secret, je ne suis pas insensible à cela. J'espère que les cinq la garderont sous son aile.» En réalité, Renaud était partagé entre sa descendance, et le pied de nez d'avoir engrossé une Princesse-Marchande, et l'angoisse, se demandant s'il ne serait pas plus satisfait qu'elle perde l'enfant, retirant ce poids de ses épaules. Le messager quant à lui n’était pas aveugle, il voyait bien que le Duc semblait déchiré et il en faisait presque pitié.  Il prit un air sincère avant de lui avouer un de ses sentiments les plus profonds. Un sentiment, qu’il espérait, puisse rassurer l’Eracon. « Je connais très bien, Maralina. Elle a peut-être l’air d’une femme sans cœur. Mais sachez qu’elle ne se donne pas à n’importe qui. Elle prendra bien soin de cet enfant. » Tristan secoua la tête, comme s’il venait de se rendre compte qu’il avait été trop loin et il reprit son sérieux;  « Si vous désirez rencontrer votre descendance, vous serez toujours le bienvenu à Uldal’Rhiz. » Voilà qui surprit Renaud, qui pensait qu'elle n'avait justement pas de coeur, et ne s'accrochait qu'à ce qu'elle désirait. Peut-être aurait-il dû mieux apprendre à la connaitre ? Mais le temps n'y avait pas été propice. S'ils étaient réellement alliés, et pas seulement dans un but lucratif réciproques, sans doute seraient-ils amenés à se revoir. Il serait alors possible de converser de manière plus débridée, sans tout le protocole. Mais cela serait une pensée qui devrait hanter son esprit, car Tristan salua poliment le Duc d’un mouvement de la tête, puis quitta la pièce. Le voyage vers Uldal’Rhiz serait long.