[Quais] Le regard portant sur l’océan infini {PV Triss}

Les pieds se balançant au rythme d’une musique imaginaire, Liam observe du haut de son promontoire la foule qui s’éparpille comme autant de fourmis travailleuses. En effet, juchée sur une caisse de bois, une petite fille calme et attentive guette le moindre de vos mouvements. Une tache jaune soleil qui tranchait avec la masse de marins, de marchands et de badauds venus observer les magnifiques embarcations.

Liam aussi était venue pour voir les bateaux. Ne sachant pas lire leur nom sur la coque (et d’ailleurs, elle s’en fichait), elle décida de les nommer. Elle pointa son petit doigt vers le premier bateau, large et avec un faible tirant d’eau. Réfléchissant un instant, le doigt en l’air, Liam décida de le nommer Gros. Elle pointa un deuxième bateau, un mince voilier. Après réflexion, elle le nomma Grand. Elle décida que Beau serait le nom d’un grands trois-mâts. Et ainsi de suite, pour la multitude de bateaux présents au port.

Toutefois, elle se désintéressa rapidement des navires pour observer les matelots et les marchands qui passait près d’elle. Des gros, des petits, des grands, des pas beaux, il y en avait de toutes les sortes! Pleins de monsieur à l’air occupé ou fatigué, qui ne l’amusaient pas du tout. Certains faisaient même un peu peur, avec de gros tatouages sur les bras et un air de vilain. Mais Liam était courageuse, alors elle restait sagement sur sa caisse à observer…

Oh! Une dame vient d’arriver sur le pont. Elle sert un garçon dans ses bras et il s’en va sur un bateau. Le chanceux! Liam n’a jamais visité un bateau, elle. Elle pense que ça pourrait être amusant. Et en plus, il doit y avoir plein de cachettes, sur un bateau!

Continuant de regarder la foule, Liam remarqua d’autres gens, un monsieur avec de drôles d’oreilles qui était bien habillé, une fille qui vendait des fleurs, un autre monsieur qui avait un bandeau sur un œil. Liam se mit à penser qu’il était peut-être aveugle d’un seul œil… Elle n’avait jamais rencontré une personne aveugle d’UN œil… Qui était donc cet étrange monsieur qui venait d’arriver sur le quai?

Toujours concentrée sur l'homme avec un bandeau sur un oeil, il fallut quelques secondes à Liam pour se rendre compte qu'il s'avançait vers elle. Directement vers elle.

Que faire? Se sauver parce qu'il a l'air louche ou rester pour se faire un nouvel ami?

Pas le temps d'y penser, il était déjà sur elle. Et puis, Liam n'est pas une fillette du genre à prendre la poudre d'escampette devant le premier inconnu, borgne, capuchonné, à l'air bizarre, qui l'aborde! Elle en a vu d'autres (du haut de ses dix ans)!

Aussi resta-t-elle à le dévisager, même une fois qu'il était planté devant elle. Elle le regardait en se demandant qui il était. Il avait l'air mystérieux...

Peut-être était... un prince qui se promène incognito sur le quai pour aller voir sa bien-aimée qu'il ne peut aimer puisqu'elle n'est pas elle-même princesse. Non, l'homme avait l'allure d'un prince, mais très très très incognito... Il n'avait même pas de couronne (Liam aurait vu la déformation du capuchon sur la tête de l'inconnu) et tout le monde sait que les princes ne sortent pas sans leur couronne...

Peut-être était-il un homme venu d'une contrée lointaine et exotique, renié par son pays, il doit se cacher même en terre inconnue pour éviter de se faire attraper. Peut-être avait-il embrasser la princesse de son pays et le roi l'avait châtié?

Après ces brefs réflexions (qui durèrent environ 5 secondes dans l'imagination fertile de Liam), elle en vint à la conclusion que ce ne devait être ni un prince, ni un homme qui venait d'ailleurs, mais qu'il y avait certainement un lien avec une princesse quelconque. Parce que tout le monde sait que, dans toutes les histoires mystérieuses et intéressantes, il y a une princesse.

Perdue comme elle l'était dans ses rhétoriques pour savoir qui était l'homme devant lui, elle sursauta légèrement lorsque celui-ci lui adressa la parole.

- Bonjour jeune fille, comment vas-tu ? Comment t’appelles-tu ?

Après son léger sursautement, Liam rougit de timidité devant toutes ses questions. Elle décida à cet instant même qu'elle allait découvrir qui était cet homme (et la princesse dont il était question aussi).

Bien qu'un dialogue aurait réglé ce problème en moins de deux minutes, Liam, fidèle à ses habitudes, ne répondit pas à l'homme, mais lui adressa un petit sourire, pour accompagner ses joues rosies par la gêne. Elle cessa de balancer ses jambes au-dessus de la caisse et resta toute attentive à son interlocuteur. Elle le devait, si elle voulait percer le mystère! (Une vraie Sherlock, cette enfant!)

C'est ainsi qu'elle resta, muette, souriante, les pomettes roses, légèrement intimidée, face au grand homme devant elle.

Triss continuait d’observer cette charmante petite enfant, bon sang tu es bien trop jeune pour errer seul dans ce port, il y a bien trop de danger pour une petite fille de ta trempe.
Il plongea son œil dans celui de la jeune enfant, ne rougit pas douce et innocente petite âme, je ne te ferais pas de mal, n’ai pas peur. Bien, tu as une bonne éducation, ne pas parler aux inconnues, en plus d’être une charmante enfant, tu es bien élevés, mais alors qu’est ce que tu fiches ici, tu devrais être avec ton papa et ta maman, pas à traîné dans un lieu remplie de salopards.
Triss s’accroupis, d’une part pour ne pas l’effrayer du haut de son mètre quatre vingt quinze, mais surtout pour pouvoir la regarder droit dans les yeux, ne pas avoir l’air menaçant, voila ce qui comptait pour le moment.


- Oh je vois, tu as perdus ta langue petite puce, ou bien tu ne veux pas me parler.


Inimaginable, le Capitaine Triss Amras, terreur des mers, était à parler le plus simplement du monde à une jeune enfant, tentant de la faire rire par sa voix légèrement modifiée, plus douce qu’à l’habitude. Puis il se penchant vers se visage si pur.


- J’aurais un petit service à te demander, du moins si tu veux bien me parler, et surtout si tu souhaites gagner des sous, pour t’acheter tout ce que tu le souhaites, des bonbons par exemple. Tu aimes les bonbons ?


Il sortit de sa bourse, deux belles pièces d’or, qu’il tendit à la petite enfant, dans la main du Capitaine, se tenait presque 6 mois de salaires pour un pêcheur, voir beaucoup plus. Une véritable richesse.
Puis il pointa du doigt le magasin qui vendait des boussoles et des compas.


- Chère enfant, vois tu ce petit magasin, pourrais tu aller m’acheter quelques objets ?
Tu dois te demander pourquoi je ne peux y aller moi-même, et bien vois tu, le marchand a été très méchant avec moi, il ne veut plus que j’aille le voir, et je suis très triste car j’ai vraiment besoins de ces objets. Mais chut, hein, cela reste un secret entre nous.


Il adressa à l’enfant un léger clin d’œil, emplie de sympathie. Et de sa poche il sortie un parchemin, et … un morceau de chocolat.


- Tiens belle enfant, c’est pour toi. Sur le parchemin est marqué tout ce dont j’ai besoin, tu auras juste à le donner au monsieur. Le chocolat est pour toi, mange le quand tu en auras envie.


Puis il regarde de nouveau l’enfant, qu’elle était mignonne dans sa robe jaune, et son petit chapeau de paille, tout simplement craquant.


- T’as ton dit que tu étais la plus charmante des enfants ?

Le géant s'accroupit face à Liam et continua à lui parler. Liam lui portait attention, mais pour elle, seules certaines choses valaient la peine d'être prise en compte. Elle ne s'intéressa donc pas au fait qu'il pense qu'elle ait perdu sa langue, mais le surnom de "petite puce" fit agrandir son sourire d'enfant.

L'homme continua à lui parler et lui confia une mission. Liam, fidèle à son devoir (envers la princesse de l'histoire, bien sûr), comprit tout de suite qu'elle devait ramener les objets sur la liste au monsieur, pour que celui-ci libère sa princesse. Bien évidemment, l'autre monsieur qui vendait des objets était un méchant et il fallait s'en méfier!

Liam répondit au clin d'oeil du monsieur par un clin d'oeil des deux yeux en même temps (on n'a pas tous les mêmes habiletés!). Leur accord était scellé.

Liam sauta en bas de sa caisse de bois, lissa sa petite robe jaune. Elle s'empara des deux pièces brillantes, du parchemin et du chocolat (qu'elle fourra immédiatement dans sa bouche, laissant un grand cercle brunâtre autour de celle-ci) et, après un dernier mot de l'homme partit avec assurance jusqu'au magasin qu'il lui avait désigner.

Après plusieurs bifurcations entre les jambes des grandes personnes, qui se souciaient très peu d'elle, d'ailleurs, Liam se retrouva face au magasin rempli de matelot et autres. Elle prit une grande respiration et, prenant son courage à deux mains, elle poussa la lourde porte battante de l'échoppe.

À l'intérieur, une marée de jambes, à nouveau. Toutefois, la petitesse de l'enfant lui fut utile plus d'une fois pendant son épopée jusqu'au comptoir, au fond de la boutique. Elle dépassa, évita, bouscula, contourna et le tout sans se faire écraser, ni piétiner, ni même trébucher. Elle arriva enfin au comptoir (qui lui arrivait au front) et elle dû sauter pour attirer l'attention du marchand.

Lorsqu'il la vit enfin, il fut étonné de voir une si petite fille dans son échoppe. Ne s'en préoccupant pas (et se rappellant toujours qu'il s'agissait d'un méchant), elle lui tendit le parchemin. Il s'enquit rapidement de l'état de la bourse de la jeune fille, qui lui montra (sans lui donner) les deux pièces brillantes données par l'homme avec un seul oeil. Elle ne savait pas ce qu'elles valaient, mais au poids qu'elles pesaient, ces pièces pouvaient sûrement acheter la boutique au complet!

Rassuré, mais toujours étonné, le marchand apporta tout ce qu'il y avait sur la liste (du moins Liam l'espérait, puisqu'elle n'avait aucun moyen de savoir, ne sachant pas lire). Elle lui tendit les pièces, prit le paquet que le marchand lui avait préparé et fila rapidement hors de cette échoppe beaucoup trop bondée pour elle.

Elle courait, tenant prudemment contre elle les objets qu'elle venait d'acheter, petite tache jaune ondoyante, avec du chocolat sur le bord de la bouche.