Mon Feu. Ma Loi.

Survivre, une respiration à la fois… Le feu détruit, le feu purifie… Les prunelles lavandes du guerrier ne se baissent pas… tout au plus cligne t'il des yeux de façon fort rapprochée pour essayer de s'éclaircir la vision. Son visage est marqué de milles phlyctène, gracieuseté de Shyn'Tae inc.

Ses oreilles par contre, sont fixées sur le Père… Combien de temps se passe t'il avant le verdict? Une seconde ou dix? Chaque instant est un combat pour rester debout. Chaque instant est un feu intérieur. Puis, la mélodie diminue… Pour être remplacé par un bruit de chute au sol. Etrangement, Yelàhitr ne se sent pas victorieux du tout. Ils se sont entretués, certes. Le combat fut grandiose, certe… Mais comme sa mère l'a toujours dit: La seule raison pourquoi leur peuple ne conquiert pas le monde, c'est qu'ils sont trop occupés à se taper dessus et à se trahir les uns les autres. Ce qui est un inutile gaspillage de potentiel…

Il soupirerait si ses poumons n'étaient pas en feu… Une quinte de toux le prend, brisant cet instant solennel… Le messager tousse et tousse… Des mains le prennent alors, des paroles d'encouragement fusent.

Tiens bon, on va te remettre sur pied en un rien de temps
Tu as été remarqué par le Père des Batailles en personne!!! Réjouis toi!!!

S'affaissant dans les bras des guérisseurs, le messager se demande si être remarqué par Uriz ou Krish elle-même est une si bonne chose… Etre discret et pas trop ambitieux lui a permis d'avoir une belle et longue vie qu'il aimerait bien poursuivre encore.

De plus, Il, elle a déjà sa petite nièce dans sa poigne…

S'il savait qu'elle a son père aussi, le blessé serait encore bien plus circonspect. Qu'en ont ils à foutre d'avoir autant de X'Ianxin dans leur entourage proche? Le coeur de Yelàhitr se serre… Il ne sait pas trop quoi penser et ca le désarçonne complètement. Avec son esprit pragmatique par contre, le mâle se rappelle à l'ordre tandis qu'il se fait emmener vers la tente d'infirmerie.

D'abord respirer… Ensuite il avisera.

Un contact. Une présence. Un mouvement devant ses yeux.

Elle cille plusieurs fois avant de parvenir à accrocher du regard le visage de l'Architecte. Sans réfléchir, elle jette les bras autour de son cou pour se serrer contre lui.

Terrifiée... Elle est terrifiée. Incapable de penser à autre chose que ce qui vient de se passer, elle se cramponne à Myr'Hennis. La douleur qui émane de tout son corps devrait la faire hurler, mais elle n'arrive pas à percer la gangue d'horreur dans laquelle l'eldéenne vient d'être plongée. Elle ne lâche rien. Elle ne renonce pas et ne se brise pas. Elle sait qu'elle doit reprendre le contrôle. Elle le doit... Mais elle a déjà du mal à ne pas fondre en larme.

Ce n'était pas la première fois qu'il intervenait. Ce n'était même pas la première fois qu'il utilisait ses pouvoirs pour arriver à ses fins à travers elle. Mais c'était la première fois qu'il le faisait de façon aussi violente. La première fois qu'il faisait en sorte qu'elle ait conscience de tout. Qu'elle ressente tout. Qu'elle y assiste, impuissante, cloîtrée dans ce corps qui n'était plus le sien. Il avait tout pouvoir sur elle... Tout pouvoir... Et il est toujours là.


Arrêtant de claquer des doigts au premier signe de vie Myr'Hennis attrapa son aimée dans ses bras pour l'aider à se blottir contre lui.

La fierté se mêle à la peur et à la honte. L'angoisse à une excitation fanatique. Le contact de Myr'Hennis encre l'eldéenne dans la réalité. Dans le présent. Sa respiration reprend peu à peu un rythme viable.

Il l'embrassa alors sur le front dans une tentative, certes risible mais bon il faisait ce qu'il pouvait, de la calmer, de lui signaler que c'était fini et que désormais elle était libre. Enfin elle ne l'était pas vraiment évidemment mais ça n'était pas spécialement le truc à préciser maintenant. Ce soir il passait bien plus longtemps à genoux qu'il n'en avait l'habitue et son dos commençait à sérieusement le faire souffrir mais il tenta de l'ignorer ou du moins de faire abstraction tant que possible de cette douleur lancinante qui se rappelait sans cesse à lui. Si j'ai pas droit à un massage après ça... l'architecte passa une main sous les genoux de Krish pour la soulever et aller sur le lit où il s'adossa à la tête de lit, son aimée allongée contre lui, il passait doucement une main dans ses cheveux.

« Tout va bien se passer... » susurrait-il d'une voix qui se voulait bien plus assuré qu'il ne l'était réellement. Il n'avait jamais essayé de rassurer quelqu'un et encore moins Krish et qu'elle en ait besoin l'inquiétait plus que ce qu'il pensait. Il répétait donc doucement cette phrase pour accompagner sa main qui passait délicatement dans sa crinière, l'enlaçant de son autre bras il referma ses jambes autour d'elle pour tenter de lui donner l'impression d'être à l'abris. Ça ne changerait rien au fait que celui à qui elle tentait d'échapper se trouvait en elle mais Myr'Hennis espérait que ça l'aiderait à se calmer.

Et cela avait tout l'air de fonctionner puisqu'une fois les premier instants passés, elle se détendit peu à peu. Toujours blottie contre lui et refusant de bouger, les tremblements et la raideur avaient diminués. Les mots simples - et ô combien mensongers - qu'il répétait flottaient au-dessus de la tête de l'eldéenne avec calme. S'en était presque surréaliste. Une petite voix se demandait comme il pouvait être si calme, mais tout le reste de la conscience de l'eldéenne était bien trop reconnaissante de pouvoir s'appuyer sur lui en cet instant précis pour poser la question.

Petit à petit, elle relâcha l'étreinte compulsive dans laquelle elle avait enfermé son compagnon, mais ne s'écarta pas de lui. Et il resta ainsi, sans bouger, le temps nécessaire. Il n'était pas question de la brusquer, elle parlerait bien quand elle en aurait envie, même si c'était le lendemain. Il continua son manège en arrêtant de susurrer la même phrase encore et encore, cette fois ça ne servait plus à rien et puis il n'était pas certain de pouvoir continuer à garder cette assurance dans sa voix encore bien longtemps alors c'était mieux d'arrêter maintenant.

Il fallut encore un bon moment avant qu'elle parvienne à reprendre suffisamment le dessus pour commencer à bouger. Pour se redresser, elle voulu s'appuyer sur ses bras, mais poussa un grondement de douleur en commençant à y transférer son poids. Elle retomba à demi une première fois, puis s'y reprit en serrant les dents, tirant sur son dos pour s'asseoir plus ou moins droite.

- Myr'Hennis... Je... " sa voix rocailleuse n'arriva pas au bout de la phrase. " Tu aurais de l'eau ? " Elle voulut porter une main à son visage mais un nouveau grognement de douleur l'en dissuada. Il baissa la tête en l’entendant et sa main arrêta son geste.

« J’ai même mieux… » répondit-il en bougeant le plus doucement possible pour se dégager de leur étreinte afin d’aller chercher son remède miracle. " Non... S'il te plait... " souffla-t-elle en s'asseyant comme elle pouvait sur le bord du lit pour le suivre des yeux, incapable de goûter la plaisanterie.  La bouteille de Sseren l’attendait sur la table et il fit mine de la prendre, un sourire taquin aux lèvres avant que sa main ne continue son chemin jusqu’à une coupe vide qu’il remplit d’une eau qui avait eu tout le temps de refroidir grâce à la brise nocturne.

De retour à côté du lit il s’inclina, serrant les dents à cause de son dos. Elle suivit son geste, une vague surprise dans le regard tant il était inhabituel de le voir aller jusqu'au bout de son geste, mais de toute façon ce soir il n’était plus vraiment à ça près. « Lil niar de ilta val zhah kr'athin. » Ce n’était peut-être pas le moment de plaisanter mais il espérait qu’en lui rappelant un quotidien plus heureux ça aiderait sa compagne, il aurait préféré ramener du Zat'kyr, ç’aurait peut-être aidé la langue de Krish  à se délier, c’est dans le vin se cache la vérité comme disaient les nisétiens, mais elle lui avait demandé de l’eau alors il s’était exécuté.

Un éclat de rire douloureux accompagna les mains tremblantes de fatigue qui attrapèrent la coupe. " Merci... " articula-t-elle à peine avant de la descendre à grandes lampées. A croire qu'elle se serait jeté sur la carafe si elle avait réussit à marcher jusque là. En attendant, c'était au fond de son verre vide qu'elle plongeait.

C'était fini... Cette fois. Il avait voulu qu'elle se sente désemparée. Il l'avait jeté à terre, mais ce n'était qu'un avertissement. Il n'avait touché à personne d'important. Il avait rectifié une erreur. Elle ne refuserait plus de duel. Elle se dévouerait à la chute de Sol'Dorn et elle le ferait bien, qu'importe le temps que ça prendrait. Ils auraient une base stable pour lancer batailles et guerres sur l'ensemble du continent. Peu importe l'ennemi du moment qu'il soit fort. Peu importe l'affront pourvu qu'il soit puni. C'était bien fini. Elle était elle... à nouveau. Elle sera le poing et tourna la tête vers son compagnon. " ça va, toi ? "

« Ça va toujours lorsque tu es avec moi. » Répondit-il en attrapant la coupe vide d’entre les doigts de sa compagne pour aller la remplir à nouveau, prenant soin de fermer le poing pour ne pas révéler sa paume brûlée. Il irait voir un prêtre le lendemain, pour le moment il y avait plus important.  « Et toi? »
- ça va... » Elle répondait sans conviction, un vague sourire désabusé venant éclairé son visage en entendant la nonchalance avec laquelle il se permettait d'être... normal. Elle redressa la tête à défaut de réussir à redresser le dos sans qu'une nouvelle lame de douleur ne la fasse grogner. « Nan, ça va pas... » Elle saisit de nouveau la coupe et la porta à ses lèvres avec moins d'avidité cependant, et parvint enfin à réellement soutenir le regard de Myr'Hennis en se forçant à sourire, jusqu'à ce que ses yeux soient attirés par les traces que son propre contact avait laissées sur la peau cendrée de l'Architecte. Libérant l'une de ses mains, ses doigts rougis vinrent effleurer la marque de sang. Elle ne savait pas si elle devait le remercier, s'exalter ou s'excuser.Il ferma le poing qu’elle avait ouvert, il espérait que les prêtres réussiraient à lui rendre une certaine sensibilité, il n’en avait pas vraiment besoin pour son métier ou pratiquer son art mais perdre le toucher sur une main n’était pas vraiment quelque chose dont il avait envie. Il n’avait pas non plus envie que sa blessure s’infecte maintenant qu’il y pensait, il irait voir les prêtres de Kiran une fois que sa compagne serait endormie. Il remonta sur le lit pour s’allonger, attirant Krish contre lui, l’enlaçant. Elle se laissa faire. En même temps, elle commençait à avoir le tournis, ce qui était assez inconfortable. Se blotissant contre son épaule malgré la douleur de plus en plus lanscinante de ses nombreuses blessures, elle garda son visage souillé, orienté vers celui de son compagnon.

« Tu veux en parler ? »

Myr’Hennis était curieux de savoir ce qu’il s’était passé mais vu l’état dans lequel ça la mettait il ne voulait pas la pousser à en discuter si elle n’en avait pas envie, dans le pire des cas il apprendrait le fin mot de l’histoire plus tard même s’il avait une vague idée de ce qui avait bien pu arriver ce soir. Cependant il se doutait qu’Uriz n’avait pas, bien malheureusement d’ailleurs, purgé les repentis et avec ce que le dieu lui avait ordonné il ne fallait pas non plus être très malin pour réussir à faire le lien entre ceux qui doutaient que Krish était bel et bien l’avatar du Père et le Père en question décidant que si celle qui le représentait ne voulait pas se battre il n’avait qu’à le faire lui-même. Cependant ça ne devait pas être la mort de quelques rebelles qui la mettait dans cet état ou alors l’architecte l’avait surestimé.

« Tu sais, quand tu parles comme ça, tu me donnes l'impression que tout est parfaitement normal... Comment tu fais pour le prendre avec un tel calme ? » Son timbre et ses accents avaient pleinement repris vie, seulement empreint d'une certaine fatigue.
Myr’Hennis gloussa en entendant la question, un gloussement qui se transforma en un rire nerveux qu’il ne put retenir et avec sa main brûlée qu’il avait refermée en un poing il vint sécher les larmes qui commençaient à poindre.

« Je ne m’attendais pas à ce que tu veuilles parler de ça... j’ai pas vraiment le choix, si? Je ne sais pas ce que je ferais si je n’essayais pas de garder mon calme, je préfère ne pas l’envisager parce que, sincèrement, ça m’effraie ; rien de cette soirée ne peut être considéré comme normal et c’est mieux ainsi. »

Il se racla la gorge pour éviter de dire quelque chose qu’il risquait de regretter, surtout avec un dieu qui écoutait sûrement. A ce moment-là l’architecte devait se battre pour garder le contrôle de lui-même et maintenant qu’elle avait appuyé sur cette façade qu’il tentait de maintenir tant bien que mal il tenta de résister à l’envie impérieuse de céder. Il mettrait de l’ordre dans son esprit plus tard, lorsque tout serait plus calme, lorsqu’il serait moins fatigué, lorsque Krish dormirait ; il avait du temps devant lui, du temps qu’il pouvait mettre à profit pour aménager les niveaux inférieurs de son palais mental qui en avaient cruellement besoin, il pouvait bien aller y passer un moment, depuis le temps qu’il n’y avait pas mis les pieds.

Myr’Hennis se mordit l’intérieure de la joue, s’il ne descendait pas c’était pour une raison bien spécifique, il n’avait pas envie de réitéré l’expérience. A la place il serra Krish contre lui. Rien n’était normal et il était loin d’être calme mais vers pouvait-elle se tourner si lui n’arrivait pas à se maîtriser. Ses yeux se posèrent avidement sur la bouteille de Sserren entamée posée sur la table et il se mordit à nouveau l’intérieur de la joue, plus que la douleur c’était le goût du sang se répandant dans sa bouche qui l’aidait à ne pas se lever. Il fallait qu’il fasse quelque chose, il fallait qu’il se concentre alors il embrassa sa compagne sur le front.

« Je t’aime. »

Même maintenant...

Même après le risque qu'elle lui avait fait prendre et les tensions qui semblaient l'agiter. Malgré la détresse étrange qu'elle avait entendu poindre dans ce rire nerveux. Et surtout, malgré la peur qui venait d'avouer, la peur qu'elle l'avait obligé à ressentir à nouveau. Il était capable de prononce ces quelques mots. Elle se serra un peu plus contre lui, passant un bras autour de son torse en déclanchant une nouvelle vague de douleur.

« Merci. » Cette fois, le mental épuisé ne parvenait plus à courcircuité ou à organiser quoi que ce soit. Elle aurait sûrement du demander à voir un soigneur, mais il y avait toujours plus important. « Je suis désolée que tu aies à subir ça. » La main de l'eldéenne se leva vers la joue de son compagnon pour attirer son regard. Son geste était d'une faiblesse affligeante. « J’ai pris connaissances des risques avant de signer. » Répondit-il avec un sourire qui se voulait moqueur mais dans lequel pointait une pointe de tristesse. Ça n'enlevait rien à l'importance de l'excuse qu'elle venait de lui faire. Elle était bien placée pour savoir qu'il y avait un monde entre savoir quelque chose et y être confronté dans la réalité. Et pourtant, il ne reculait pas. Il ne lui demandait rien de plus... Le silence s'étira.

« Tu es ce qui m'est arrivé de mieux dans cette vie. » Pas de 'mais', pas de 'presque', pas de 'sans doute'. Elle s'étira juste pour poser un rapide baiser sur ses lèvres. Ça lui fit chaud au cœur de l’entendre et il se rendit compte que c’était la première fois qu’on lui disait quelque chose comme ça ; ce qui le touchait encore plus c’était que, aussi loin qu’il pouvait s’en souvenir, seuls les je t’aime de Krish sonnaient sincères. Malgré tout ce qu’il lui avait dit à propos du petit manuel qu’ils s’étaient inventés Myr’Hennis n’en savait pas plus qu’elle sur le sujet. Alors il baissa la tête pour la regarder dans les yeux mais sa vision était troublée, une larme tomba sur sa compagne et du revers de la main il la sécha son regard surpris.

« Arrête de lire dans mon esprit. » C'était plus un grondement qu'autre chose, loin pourtant d'être réellement menaçant, il n'en était pas capable même s'il l'avait voulu. Les iris sanglantes aux ridicules reflets d'or l'observaient avec une attention totale sans la moindre marque de jugement. Elles... l'admiraient. « J'essaierai. »

Habituellement elle aurait opté pour un trait d'esprit. Habituellement, elle se serait venté d'avoir plus de mille ans d'expérience pour lire dans les têtes et qu'elle n'allait pas s'arrêter maintenant. Mais son esprit fatigué ne voyait que ces yeux humides penchés sur elle, débordant d'émotions qu'elle n'était pas sûre de réussir à identifier. Elle ne veut plus être cause de la tristesse qu'elle a entendu dans sa voix, mais ce qui lui faisait face maintenant, elle le regrettait et le trouvait beau tout à la fois. Sa main tremblante parvint à repousser une mèche blanche derrière l'oreille de l'Architecte, s'attardant un instant pour caresser sa tempe avant de capituler. Elle se pelotonna alors contre lui, embrassant la peau de Myr'Hennis, la tête contre son torse, un bras l'enlaçant. Ce qui s'était passé n'était rien... pourtant, elle ne voulait plus jamais lui faire revivre une nuit pareille.