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 La fierté d'un homme [Solo]

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Tibéria de Soltariel
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MessageSujet: La fierté d'un homme [Solo]   La fierté d'un homme [Solo] I_icon_minitimeMar 16 Juil 2019 - 2:52



4ème ennéade de Karfias, l'an 17

Hernando se réveilla au chant du coq. Il ouvrit les yeux pour trouver la chambre plongée dans la pénombre. Il s’étira avec précaution même s’il savait que le sommeil de la femme endormi à ses côtés était imperturbable. Tibéria ne sera pas debout avant quelques heures encore. Il avait donc tout le loisir de vaquer à ses occupations. En se levant, il jeta un regard vers la masse qui occupait le côté droit du lit. Attirée par la chaleur, Tibéria roula sur elle-même pour se vautrer à sa place avec le même soupir de contentement des gens heureux. Il sourit; elle faisait toujours ça. Hernando traversa la chambre en trois enjambées et tira sur le rideau qui couvrait la fenêtre. Dehors, la nature s’éveillait à peine. Des lambeaux de brume s’attardaient ici et là en laissant derrière de la rosée sur les feuillages. Il entendait les oiseaux chanter dans les arbres qui bordaient la maison. Après des années passées dans l’agitation quasi perpétuelle de Soltariel, il appréciait la quiétude des lieux.

Chaque matin débutait par la même routine. D’abord, il se frottait énergiquement le visage avec de l’eau et du savon puis taillait sa barbe. Hernando ne se rasait jamais complètement, mais il s’assurait de toujours garder le contrôle sur sa pilosité faciale. Ensuite, il s’habillait en enfilant tunique, pantalon et botte. Selon les saisons, il pouvait enlever ou ajouter des couches de vêtements. Tibéria n’était pas la seule à être incommodée par les températures plus froides de la capitale, mais contrairement à la jeune femme, il n’en faisait pas une scène à chaque fois. Il est vrai que la pauvre tendait à être malade dès que les températures chutaient ce qui inquiétait toujours un peu Hernando et Tibéria étant Tibéria, il lui pardonnait. L’ancien garde partageait sa vie avec elle depuis quelques années déjà. Au départ, rien ne les destinait à être ensemble. Tibéria venait de l’une des familles les plus riches de Soltariel alors qu’il n’était qu’un soldat qui ne pouvait compter que sur ses aptitudes pour réussir. Par chance, son talent lui permit de se démarquer et d’obtenir une position enviable au sein du palais au même moment où Tibéria devint duchesse. Au départ, elle l’agaçait tellement. Telle une enfant gâtée, elle se laissait emporter trop souvent par ses émotions. Elle ne manquait pas de bonne volonté, mais la malchance ne la lâchait pas et les malheurs s’enchainèrent pour elle. Après deux mariages catastrophiques, Tibéria se retrouva acculée au pied du mur et perdit tout, mais là où plusieurs se seraient terrés dans la honte, elle s’était relevée. La détermination et l’humilité de cette femme face aux épreuves qu’elle a subies ne pouvaient que susciter l’admiration. Depuis, elle travaillait d’arrache-pied pour restaurer son nom et offrir à ses enfants un avenir digne du sang qui coulait dans leurs veines et elle était en train de réussir. Après tout ce temps passé à ses côtés, Tibéria avait rendu sa vie plus riche à bien des égards, mais le plus beau présent dormait dans la chambre d’à côté.

Après avoir doucement refermé derrière lui, Hernando alla ouvrir la porte de l’autre chambre. Sofia dormait dans le lit du fond à l’image de sa mère, mais sur la seconde couche, un garçon attendait patiemment assis. « Ne fais pas de bruit. » Chuchota son père qui alla ouvrir l’un des rideaux pour laisser entrer un peu plus de lumière. Hernando avait fait le deuil de la paternité des années plus tôt jusqu’à ce que Tibéria décide qu’elle voulait un autre enfant. Il aurait pu lui faire la liste de toutes les raisons qui faisaient que c’était une très mauvaise idée, mais ça n’aurait rien donné. Elle avait failli mourir lors de son premier accouchement, il ne tenait pas à revivre ce cauchemar. Il voyait encore parfois dans son sommeil la silhouette immobile de la jeune femme étendue dans son lit, le teint affreusement pâle à la frontière de la mort, mais Tibéria était confiante. Elle voulait cet enfant, elle voulait une famille avec lui. À bien des égards, cette grossesse fut très différente de la première. Tibéria s’accorda le droit d’en profiter et Hernando l’accompagna du mieux qu’il put, s’émerveillant de voir ce ventre grossir en sachant qu’il y renfermait son enfant. Il souhaita un garçon, évidemment, et son vœu fut réalisé. Un soir, Tibéria donna naissance à un tout petit garçon bien vigoureux qui hurla au monde entier son indignation d’avoir été arraché à son cocon. À l’instant qu’il tint l’enfant dans ses bras, l’univers d’Hernando bascula. Voilà son fils, la chair de sa chair, Guillaume. Honnêtement, il regrettait le nom « diantrais » donné à l’enfant. Il aurait préféré Guillermo ou Esteban comme son père, un nom bien suderon, mais Tibéria lui fit remarquer qu’il ne vivra probablement jamais à Soltariel et qu’il valait mieux pour lui avoir un prénom plus commun même s’il portait le nom de Bertoloti. Ça ne l’empêchait pas de l’appeler Guillermo en privé en se disant que son fils choisira de lui-même lorsqu’il sera un homme. Il comprenait les raisons de Tibéria, mais il n’allait pas laisser son fils avoir honte de ses racines.

Hernando fouilla dans les vêtements de son fils pour trouver de quoi l’habiller. Tibéria adorait habiller ses enfants. Pour ça, ils ne manquaient pas de tenus, surtout Sofia dont la garde-robe était aussi impressionnante que ridicule. Sa mère ne fréquentait peut-être plus les grands cercles de la noblesse, elle avait quand même conservé certaines de ses habitudes. Il n’y avait rien de particulièrement luxueux, il y en avait juste beaucoup. Enfin, il y avait bien quelques morceaux qui sortaient du lot et rappelaient le sang noble qui coulait dans les veines de sa progéniture. Guillaume n’était pas encore lavé après sa naissance, que Tibéria avait déjà des plans pour lui. Elle voulait faire de lui un chevalier, rien de moins. Ça n’allait pas se faire en claquant des doigts et rien ne garantissait la réussite, mais Tibéria allait certainement essayer. Pour ça, on pouvait lui faire confiance. Ça signifiait aussi que vers l’âge de 6 ou 7 ans, son fils serait éventuellement envoyé chez un seigneur qui deviendra son parrain. Hernando rêvait de lui enseigner tout ce qu’il savait. Il était un homme d’armes et avait encore son épée prête à servir. On avait dit qu’il était l’un des meilleurs de Soltariel et il souhaitait passer ce savoir comme son père avait fait avec lui pour l’art de fumer la viande. Ne sachant pas s’il aurait l’occasion de le faire, il fit le choix de passer le plus de temps possible avec lui. C’est pourquoi à tous les matins après s’être réveillé, il allait dans la chambre de son fils pour l’habiller. « Lève les bras. » Il lui passait sa petite tunique. « Hum, dans l’autre sens ça va aller mieux. » Puis son pantalon et ses chausses. « Pipi! »  Oui, il fallait qu’il soit entièrement habillé avant de mentionner son envie pressante à son père…

L’incident évité, le duo père et fils descendait prendre leur petit déjeuner. En bas, ils furent accueillis par la servante de la maison dont le travail consistait à entretenir les lieux et, surtout, à nourrir ses habitants. « Bon matin monsieur Hernando. Ah, monsieur Guillaume, toujours aussi adorable! » Elle lui ébouriffa gentiment la tête, le faisant glousser de rire. Son fils avait ce pouvoir d’attraction particulier chez toutes les femmes. Aucune ne pouvait résister à l’envie de lui ébouriffer les cheveux. Il faut dire qu’il avait de jolies boucles sur la tête héritée de sa mère. Sofia avait les mêmes. Hernando en était convaincu, ce trait allait survivre aux générations. En plus de sa bouille ronde et ses grands yeux — les siens —, il était effectivement adorable. La fierté d’un père! « Vous arrivez juste à temps. Le repas est prêt. » Elle posa devant eux un bol de porridge ainsi que du pain frais, une motte de beurre et de la confiture. Hernando couvrit une tranche de confiture et la donna à son fils. En bon père attentif, il vérifia que le porridge ne soit pas trop chaud et laissa le gamin manger. Tandis qu’il avalait son propre repas, il dressa mentalement la liste de toutes les choses à faire aujourd’hui. Il avait déjà fait l’exercice juste avant de se coucher, mais il devait se rafraîchir la mémoire. « C’est bon? » Ça devait l’être, Guillaume avait les joues couvertes de confiture. « Hum. » Il essaya de le nettoyer avec son pouce, sans succès. Heureusement, la servante arriva à sa rescousse avec un linge humide. « À cet âge, ils en mettent partout! »

Le repas terminé, il était l’heure de la tournée du matin. Tous les jours, il s’assurait que rien n’était arrivé durant la nuit, passant les dépendances une à une en commençant par l’entrepôt où Tibéria conservait son cidre, puis le séchoir et enfin les porcs et les poulets. Il ouvrit la trappe pour laisser sortir ses derniers avant d’aller chercher un sceau de grain pour les nourrir. « Tu veux m’aider? » Il posa le sceau au sol. Guillaume y plongea la main et jeta quelques grains au sol. Il répéta l’exercice quelques fois jusqu’à ce qu’il soit encerclé par une douzaine de poulets affamés. Il battit en retraite derrière les jambes de son père qui acheva la tâche pour lui. Cela fait, il alla s’occuper des porcs en jetant les restants de la veille dans leur enclos qu’il devait d’ailleurs solidifier. Les bêtes se frottaient contre les poteaux pour se gratter les affaiblissant sous leur poids. Plusieurs se moqueraient de lui de le voir ainsi s’occuper de cochons après avoir été le chef de la garde ducale de Soltariel, mais il avait choisi cette vie et elle lui convenait parfaitement. Il faisait le meilleur jambon vieilli de la région et ces silhouettes dodues qui dévoraient frénétiquement leur repas du matin seront bientôt suspendues en quartier dans le séchoir. Tibéria lui avait dit la veille qu’elle comptait s’absenter bientôt. Ça tombait bien, car les bêtes étaient prêtes pour l’abatage et comme la jeune femme ne supportait pas les cris des animaux qu’on égorge, il profitait de ses voyages pour le faire. Il y avait certains aspects de la vie campagnarde auxquels Tibéria ne pourra jamais totalement s’habituer. Tous deux faisaient encore une grande partie du travail de leurs mains, mais plus le temps passait, plus leurs revenues grandissaient. Éventuellement, Hernando espérait pouvoir engager un homme à temps plein pour l’assister. Il avait bien quelqu’un qui venait l’aider à l’occasion lorsqu’il en avait vraiment besoin, mais Tibéria tenait à avoir un revenu stable un peu plus important avant d’engager plus de personnel. « Vient Guillermo, nous avons du travail à faire. »

Environ une heure plus tard, Hernando achevait de solidifier la clôture des porcs sous la supervision de son fils lorsqu’une silhouette passablement échevelée s’approcha d’eux en trainant des pieds. Il essuya la sueur qui perlait sur son front du revers de la main. « Tu es drôlement matinal. » Tibéria grimaça. Elle était clairement à moitié éveillée. Jamais il n’avait vu dans sa vie quelqu’un ayant autant de mal à se lever le matin. En même temps, elle vivait beaucoup la nuit, alors était-ce si surprenant. « J’ai des choses à faire aujourd’hui, notamment à l’auberge. Cassio et moi devons revoir les dépenses de l’auberge du mois dernier. Au fait, je viens de croiser Murtagh, il te cherchait, mais je lui ai dit que je te passerai le message. Apparemment, un renard s’en est pris à ses poules cette nuit et qu’il doit encore traîner dans les parages. Il te dit de faire attention. Quelque chose est arrivé? » Le regard d’Hernando s’assombrit. Tibéria connaissait ce regard. Oh oui, elle l'avait vu plusieurs fois, celui d'un homme prêt à défendre sa terre coûte que coûte. « Non. » Il marmonna ensuite ce que Tibéria devinait être une suite d’injures. Deux mois plus tôt, une hermine était venue leur rendre une petite visite. Une adorable créature à la férocité surprenante avait tué tous les poulets, laissant derrière elle un carnage de sang et de plumes. Murtagh, leur voisin, avait alors expliqué que les hermines ne mangent pas la viande, mais égorgeaient plutôt leur proie pour lécher le sang. « Tu as besoin de ton épée? » Demanda Tibéria avec un large sourire. « Ah ah, très drôle. » Sans rien dire de plus, il s’éloigna à grandes enjambées en direction du poulailler. « Suis-moi, mon chéri. Allons voir comment ton père va se débrouiller pour défendre son bout de terre. À ton avis, qui va gager, papa ou le renard? » Tibéria prit la main du petit garçon qui répondit d’une voix pleine d’enthousiasme. « Papa! »
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MessageSujet: Re: La fierté d'un homme [Solo]   La fierté d'un homme [Solo] I_icon_minitimeDim 18 Aoû 2019 - 20:28


6ème ennéade de Karfias, l'an 17

En poussant la porte de la maison, Hernando trouva Tibéria installée à la table devant un morceau de parchemin. La plume coincée entre ses doigts était en suspens et l’air soucieux sur son visage ne voulait dire qu’une chose : elle tentait d’écrire à ses sœurs. La correspondance entre les filles était toujours sporadique quoiqu’un peu plus régulière depuis quelque temps. Antonia avait repris contact la première. À l’instar de son ainée, elle avait eu besoin de temps pour reprendre pied et vivait maintenant à Thaar en compagnie de Paula, la plus jeune des trois. Antonia étonna tout le monde en décidant de participer aux activités de leur tante. Sachant que cette vieille sorcière tenait un réseau d’espions et de bordels, l’image cadrait difficilement avec le tempérament doux et discret d’Antonia. Soit les circonstances l’avaient changée, soit elle était décidément plus dégourdie qu’elle le laissait croire. Cinq ans plus tard, elle tirait les ficelles avec la même dextérité que leur tante et avait une compréhension de la nature humaine d’une justesse terrifiante. Elle était venue leur rendre visite l’an passé. Hernando s’attendait à voir une jeune femme totalement différente, mais non, c’était bien la petite Antonia de ses souvenirs avec le même sourire charmant et la voix douce. Encore aujourd’hui, il avait encore du mal à l’imaginer se promener de bordel en bordel, contrôlant les dessous de la vie nocturne en Ithri’Vann. L’image ne collait tout simplement pas à la jeune femme de ses souvenirs. Malheureusement, si les choses se passaient assez bien entre Tibéria et Antonia, on ne pouvait pas en dire autant avec Paula. La cadette dont le caractère explosif était notoirement reconnu en voulait encore énormément à Tibéria qu’elle tenait responsable de tous les problèmes du monde. Du coup, elle refusait de lui parler. Au lieu de tenter d’améliorer son sort comme ses sœurs réussissaient à le faire avec un certain brio, elle entretenait plutôt sa rancune sans rien faire de plus. Certes la chute de Tibéria avait grandement affecté ses chances de mener la vie de noble oisive qu’elle souhaitait avoir, mais au bout d’un moment nous sommes quand même responsables de notre propre vie. Cinq ans après les événements, Paula avait probablement eu des opportunités qui se sont présentées à elle pour améliorer son sort, mais elle n’avait rien fait. Hernando n’avait que très peu de sympathie pour la jeune femme.

« Alors, on complote pour renverser le pouvoir à Soltariel, c’est ça? »

Tibéria leva les yeux de sa correspondance, le visage impassible. Visiblement, elle ne trouvait rien d’amusant à la blague qu’il venait de faire.

« J’écris à Antonia. J’ai reçu une lettre de sa part ce matin. »

D’un geste de la main elle désigna un autre morceau de parchemin. Hernando referma la porte et vint s’asseoir à la table avec elle.

« Tu peux lire. Tu verras qu’elle n’y parle d’aucun complot. »

Hernando s’apprêtait à lire lorsqu’il remarqua pour la première fois la tranquillité des lieux.

« Où sont les enfants? »

« Avec Cassio. Ils vont dormir dans la maison de ville cette nuit. »

Voilà pourquoi la maison était aussi silencieuse. Avec deux enfants, il y avait toujours du bruit. Là, tout ce qu’il entendait c’était le craquement du feu dans la cheminée. Il prit la lettre et la survola rapidement. En effet, aucun complot à l’horizon, mais il y avait autre chose.

« Elle t’invite à Thaar… Tu veux y aller? »


Tibéria prit la lettre des mains d’Hernando.

« J’aimerais bien, mais il y a un gros problème... »

« Les bateaux... »

« Je déteste les bateaux... Le simple fait de les regarder à quai me donne la nausée. C’est désespérant. »

« Je n’ai jamais vu quelqu’un avec un mal de mer aussi intense, mais je pensais que ça s’améliorait après quelques jours, non? »

« Oui, mais c’est quand même quelques jours à vomir l’intégralité de mon estomac. Tu sais quand tu vomis, mais que tu n’as plus rien dans le ventre et que ton corps ne fait que se contracter douloureusement… »


Il n’y avait rien d’amusant, mais Hernando ne pouvait s’empêcher de sourire. Les lèvres de Tibéria se recourbèrent dans une moue forcée avant qu’elle ne vienne spontanément appuyer la tête contre son bras. Il eut envie de lui dire de ne pas faire ça, qu’il sentait la sueur et probablement le cochon, mais ça ne semblait pas la déranger.

« Mais j’ai envie d’y aller quand même. Je sais pourquoi Antonia me le propose. Elle ne le dit pas dans sa lettre, mais elle veut que je parle à Paula, en tête à tête. »

« La ville ne risque pas d’exploser? »

« Probablement, mais c’est Thaar, donc on s’en moque. »

« En effet, qui s’en soucierait? »

« Personne, c’est le désert là-bas. »


Le couple rit doucement, ni l’un ni l’autre n’étant réellement sérieux.

« Il y a aussi l’automne qui approche et les tempêtes. Si tu pars maintenant, difficile de dire quand tu pourras revenir. Le voyage n’est pas impossible, mais ça risque de secouer. » Ajouta Hernando en venant poser une main sur sa tête pour y caresser ses cheveux. Si Tibéria pouvait ronronner, elle le ferait certainement.

« C’est certain que si je pars, je ne reviens pas avant un mois. C’est affreusement long loin des enfants… et de toi. »

Elle releva la tête pour le regarder, mais elle trouva sur le visage d’Hernando qu’un sourire encourageant.

« Je peux me débrouiller. Il y a Cassio… et la servante. Personne ne va mourir de faim pendant ton absence puisque de toute façon, tu ne fais déjà pas la cuisine. »

Elle grimaça, dévoilant ses dents. Hernando fit la même chose avant de rire à nouveau.

« Et puis, si tu y vas, tu vas pouvoir remettre toutes ces robes que tu gardes cachées dans la maison de ville et que tu ne portes plus parce que, premièrement, il fait trop froid et, deuxièmement, il ne faudrait pas heurter la sensibilité des habitants de Diantra. »

« J’ai surtout cessé de les porter, car ce sont des robes que j’avais lorsque j’étais duchesse. Elles dépassent largement mon rang, mais c’est vrai qu’à Thaar, personne ne va s’en soucier… Tu sais que je peux encore les porter. Elles me vont encore comme un gant. Cinq années et deux enfants plus tard, j’ai toujours ma silhouette de mes 23 ans. » Elle disait cela comme si c’était un exploit.

« Tu es magnifique... » Souffla-t-il d’une voix à peine plus haute qu’un murmure. Ces quelques mots suffirent à la faire sourire. Elle rayonnait.

« L’entraînement à l’épée doit y être pour quelque chose. » Répliqua-t-elle. « Chaque fois, j’ai l’impression de transpirer l’équivalent de mon poids, c’est terrible. Tu es terrible... »

« D’ailleurs, demain à l’aube… tu n’y échapperas pas. Je vais te faire transpirer et tu me balanceras une tonne d’injures à la tête comme tu sais si bien le faire... »

Tibéria délaissa sa chaise et vint s’assoir à califourchon sur les cuisses de Hernando qui passa tout naturellement ses bras autour de ses hanches pour la maintenir en place.

« Dans l’immédiat, j’ai une autre sorte d’exercice en tête... »

___

Plus tard dans la nuit, les deux silhouettes enchevêtrées dans le lit étaient incapables de trouver le sommeil malgré la fatigue qui pesait sur eux. Hernando fixait le plafond alors que Tibéria, qui se servait du torse de l’ancien garde comme d’un oreiller, avait les yeux fermés oscillants à la limite de l’inconscience sans pour autant y parvenir. Pourtant, leurs ébats d’un peu plus tôt auraient dû les plonger dans un doux sommeil, mais Tibéria avait toujours eu des problèmes pour dormir et Hernando avait juste trop de choses qui lui trottaient dans la tête. Après un long moment de silence et sachant très bien que la jeune femme ne dormait pas, il souffla.

« Tibéria, Épouse-moi... »

Il la sentit se tendre. Parfaitement immobile, elle ne réagit pas tout de suite, mais Hernando savait très bien ce qu’elle allait dire, l’ayant entendu à plusieurs reprises ces dernières années.

« Tu sais très bien que c’est impossible, pourquoi persistes-tu à le demander encore et encore? »

« Parce que tu persistes à refuser... »

Tibéria redressa la tête. Il la voyait à peine dans la nuit, mais il devinait sans mal l’expression sur son visage, la tristesse de devoir refuser encore et la peur qui motivait sa décision.

« Il n’y a aucun prêtre de Néera avec toute sa tête qui acceptera de prononcer un mariage pour moi. »

« Je suis certain que non... »

« Et… et qui sait, peut-être que tu perdras la tête comme les deux autres et que tu lèveras une armée pour renverser le royaume. »

« Avec quels hommes? Tu te fais des idées… Arichis et Franco étaient rongés d’ambitions. Je n’aspire à rien de tout cela, juste à mener une vie tranquille et paisible avec toi... »

« N’es-tu pas satisfait maintenant? »

« Oui, mais j’ai envie de le crier au monde entier, de le célébrer devant les dieux. »

Tibéria soupira.

« Arichis et Franco n’étaient pas seulement rongés d’ambitions… Ils étaient aussi talentueux. Arichis a réussi à établir le nom de sa famille et à gravir les échelons d’une manière tout à fait remarquable. Quant à Franco, on ne peut nier le charisme qu’il avait. Il a réussi à soulever les foules et à fonder un mouvement qui a survécu des années à sa mort… Je suis l’élément dans l’équation qui a tout fait rater. Et toi, Hernando… Tu es un meneur d’hommes. Ce n’est pas sans raison que tu es devenu le chef de la garde ducale… Tu es un homme intègre qui ne se laisse pas aisément avoir par les artifices de la cour. Quand tu parles, les gens écoutent… Tu dégages une force tranquille qui attire la confiance. Je crois que tu aurais été un bon seigneur, bien meilleur que certain que j’ai connu dans ma vie. Du coup… j’ai peur que ces qualités se pervertissent d’une façon ou d’une autre... »

« Si j’avais eu à perdre la tête à cause de toi, ça serait fait depuis longtemps... »

Tibéria ne répondit pas. Quelque part, elle savait qu’il avait raison. Pourquoi les choses tourneraient mal maintenant? Pourtant, il y avait cette petite voix dans sa tête qui lui disait de ne pas le faire. Pas parce qu’elle ne l’aimait pas, mais justement parce qu’elle l’aimait trop et qu’elle avait peur d’avoir le cœur brisé. Sans Hernando, elle ne serait pas ici.

« Ça va… Je comprends. » Finis par dire Hernando devant le silence de Tibéria. « Je vais poser la question une prochaine fois… et encore après… et un jour tu finiras bien par céder. »

Elle déposa un baiser sur son torse ce qui laissa un léger goût salé sur ses lèvres.

« Peut-être... »

Pour la première fois depuis le début de leur relation, elle laissait la porte entrouverte à cette éventualité.
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MessageSujet: Re: La fierté d'un homme [Solo]   La fierté d'un homme [Solo] I_icon_minitimeDim 20 Oct 2019 - 1:48


« Je te déteste... » Trois mots dans lesquelles Tibéria s’appliqua à mettre toute la hargne qu’elle pouvait, ponctués par un regard assassin qui aurait fait reculer n’importe qui. Le destinataire de cette remarque incendiaire afficha quant à lui son plus chaleureux sourire, peu impressionné par la démonstration de force de son petit bout de femme. Chaque fois qu’ils s’entraînaient, c’était la même histoire : Tibéria s’énervait et il recevait les coups. En même temps, il n’aurait peut-être pas dû la pousser en bas du lit cette fois. « Ça me fait chaud au cœur, je t’aime aussi! » L’ancienne duchesse plissa les yeux, mais Hernando crut voir l’ombre d’un sourire danser sur ses lèvres. Tibéria dégaina son épée et la fit tourner dans sa main. L’arme légère fut forgée expressément pour elle à la demande d’Hernando. Sur la garde, il avait fait graver les initiales de la jeune femme au centre d’un soleil, emblème de la famille Soltari-Beronti. Elle avait demandé qu’on lui enseigne les rudiments de l’escrime peu après le dénouement du procès. Au départ, ce n’était qu’une façon d’exprimer la colère qu’elle ressentait, mais ce qui devait être qu’une passade devint finalement une habitude. Hernando avait pris en charge sa formation dès son retour de l’Ithri’Vaan. Il avait formé de nombreuses recrues dans sa vie et Tibéria se révéla bien plus douée qu’il ne l’imaginait. Bon, disons qu’elle n’était pas la pire sachant qu’elle n’avait jamais tenu une arme de sa vie et qu’elle pouvait au moins la tenir du bon sens. Il fallait faire les choses correctement et Hernando fut un professeur redoutable. Il s’attira la plupart du temps l’ire de la jeune femme, mais jamais elle n’abandonna les leçons. À un moment où elle ne savait pas ce que les jours lui apporteraient, Hernando lui offrait une structure et surtout quelque chose à faire de ses dix doigts. Tibéria devait s’occuper l’esprit, autant le faire sur quelque chose de constructif.

Cinq ans plus tard, ses progrès étaient plus qu’admirables. Elle savait se défendre. Certes, contre la force brute, Tibéria serait incapable de dévier le coup, mais elle pouvait l’esquiver sans que ce soit nécessairement un coup de chance. Il ne lui avait pas seulement appris à tenir correctement une épée, mais également à se battre avec intelligence en analysant son environnement ainsi que ses adversaires. Il avait travaillé son endurance ainsi que la force dans ses bras, car autant être honnête, Tibéria n’avait rien de tout ça au départ. Malgré sa taille de guêpe, elle pouvait difficilement monter un escalier de plus de deux étages sans avoir le souffle court. Voilà ce que ça donne lorsqu’on a passé toute sa vie qu’à lever le petit doigt pour avoir tout ce que l’on veut. Elle n’avait jamais travaillé physiquement. Elle n’avait jamais été éreintée comme on peut l’être après une longue journée de travail. Autant dire que les premières séances de course à pied ont été intéressantes. Ce fut peut-être le seul moment où, vraiment, elle passa tout près d’abandonner le projet, il suffit qu’elle commence à sentir les résultats pour que plus rien de l’arrête. Tibéria aimait la sensation de liberté qu’elle avait en courant. Elle était fascinée par sa propre force et son endurance. Elle était étonnée de voir que plus elle en faisait, plus elle poussait ses limites, plus elle était capable d’en faire. Naturellement, elle finit par atteindre sa limite, mais comparé à ses débuts, c’était le jour et la nuit. C’est là qu’elle réalisa à quel point elle était faible et dépendante de son entourage et Tibéria ne voulait plus que ça se reproduise. Aujourd’hui, les entraînements étaient moins pour former que pour conserver les acquis et sur ce point, ils bénéficiaient autant à Tibéria qu’à Hernando.

« On s’arrête un instant? » Tibéria n’attendit pas la réponse d’Hernando pour s’asseoir au sol en plein milieu de la cour. Un peu plus d’une heure venait de passer et elle avait si chaud que sa chemise lui collait à la peau. Le front de l’ancien garde luisait également de sueur, mais contrairement à la jeune femme, il préféra rester debout. « Sur un champ de bataille, un soldat ne peut pas simplement s’asseoir au beau milieu des combats pour reprendre son souffle. »

« Tu vois un champ de bataille toi? Je suis au beau milieu de la cour de ma maison et je m’assoie à terre si je veux. »

Tibéria étira ses jambes et se pencha vers l’avant pour toucher le bout de ses bottes. Elle sentait la tension dans ses mollets et derrière ses genoux. Ça faisait du bien.

« De toute façon, je suis certaine que je m’en sortirais très bien dans les combats. »

« Ah oui? »

« Tout à fait, je cours très vite quand je veux. »

Hernando éclata de rire. Au même moment, deux hommes, épée à la ceinture, remontaient l’allée bordée d’arbres qui menait jusqu’à la cour. Deux visages familiers qui avaient laissé Soltariel pour s’installer ici. Ils avaient été sous les ordres d’Hernando à une autre époque. Aujourd’hui, ils avaient refait leur vie ici comme fermiers et travaillaient pour Tibéria comme escortes armées quand elle devaient récupérer de la marchandise. Ils venaient à chaque ennéade pour s’entraîner avec Hernando. Ils étaient plus que des employés, ils étaient des amis.

« On a manqué quelque chose de drôle? »


« Non, seulement moi qui dit des bêtises. Comment va le bébé? »

« Elle fait ses dents. Elle a passé la nuit à hurler. »

« Oh, pauvre petite. Pour le soulager, tu peux dire à ta femme de prendre un peu d’alcool, d’y tremper un doigt et de lui masser les gencives. Ça soulage la douleur. Elle peut se prendre une gorgée pour elle-même aussi. »

« Et pour le père qui n’a pas dormi? »

« Il s’ouvre une bouteille pour lui. » Répondit Hernando avec le sourire. « Bon, Felipe avec Tibéria. Vous allez vous entraîner à l’attaque au couteau. »

« Je peux être l’agresseur, pour une fois? » Demanda Tibéria qui se relevait enfin.

« Non. Enzo, avec moi et que je ne t’entende pas te plaindre que tu n’as pas dormis. »
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MessageSujet: Re: La fierté d'un homme [Solo]   La fierté d'un homme [Solo] I_icon_minitimeMer 23 Oct 2019 - 1:36

« Maman, je veux venir avec toi! » Du haut de ses cinq ans, Sofia acceptait difficilement les refus, mais malgré son menton relevé et son ton impérieux, sa mère restait inflexible. « Non ma chérie, tu es trop jeune. Tu pourras m’accompagner quand tu seras plus grande. »

« Grande comment? »

« Pas avant tes dix ans. C’est un voyage risqué pour un enfant et même pour moi. Bon, cesse de te lamenter, ce n’est pas approprié pour une jeune fille. »

« Mais maman! »

« Ne me fais pas répéter, Sofia. J’ai besoin que tu agisses comme une grande fille. Je sais que je vais être partie longtemps, mais je promets d’écrire le plus souvent possible. » Tibéria allait être absente pendant tout un mois. Une éternité loin de ses enfants et d’Hernando, mais le trajet serait difficile pour elle; autant se déplacer pour que ça en vaille la peine.

« Cassio dit qu’on peut envoyer un oiseau. Le message sera là avant toi. » Tibéria s’agenouilla devant sa fille. « La première chose que je ferai en arrivant chez tes tantes sera d’y répondre. Allez, viens ici... » Elle serra sa fille dans ses bras. Elle avait le cœur qui menaçait d’éclater. Elle n’avait jamais été aussi longtemps loin de sa famille. « Oh, ma fierté… Mon petit rayon de soleil. Je t’aime tellement… Veille bien sur ton petit frère, ma jolie princesse... »

Hernando passait devant la porte lorsqu’il entendit la voix haut perchée de Sofia et celle plus basse de Tibéria. Il ne comprenait pas très bien ce qu’elles disaient, mais Sofia devait insister une fois de plus pour accompagner sa mère. Elle devait partir demain. Il n’aimait jamais ça lorsqu’elle voyageait, car le plus souvent il ne pouvait pas l’accompagner. Tout pouvait arriver, mais elle revenait toujours. Cette fois-ci toutefois, elle allait plus loin, beaucoup plus loin. Une mer allait les séparer. Il comprenait son désir de revoir ses sœurs, mais ça n’empêchait pas l’inquiétude de lui tenailler les tripes. Il avait pris la peine de glisser dans ses bagages l’épée de Tibéria ainsi qu’une dague. Elle ne voulait pas les apporter, car elle n’avait pas l’intention de les porter, mais elle aura quand même le plaisir de les trouver au travers de ses robes. Incapable de voyager léger, elle avait décidé de tout emporter. Des piles et des piles de vêtements aux couleurs vives qu’elle n’avait pas portés depuis des années. D’abord, Tibéria avait été ravie, puis elle s’était soudainement mise dans la tête que tout cela était passé de mode et qu’on allait rire d’elle. Alors là, ça n’allait plus, mais après avoir enfilé certaines de ces robes et même parader devant lui, Tibéria était revenue à la raison. Hernando aurait aimé être avec elle non seulement pour veiller sur elle, mais pour avoir l’occasion de retrouver la femme dont il était tombé amoureux, celle aussi lumineuse qu’un soleil. Elle avait beaucoup changé depuis toutes ses années et personne ne pouvait vivre ce qu’elle a traversé sans s’en trouver transformé. Oh, ses sentiments n’avaient pas changé, mais Tibéria venait d’un monde très différent et elle allait le retrouver d’une certaine façon. Il aurait voulu voir sa réaction lorsqu’elle jouira de tous ces luxes dont elle se privait aujourd’hui, mais qui avait fait partie de son quotidien pendant longtemps…

Après une dernière nuit passée ensemble, Tibéria partit à l’aube. Les enfants dormaient toujours lorsqu’elle disparut au bout de l’allée. Hernando resta longtemps dans l’ouverture de la porte, pensif. Un mois sans la voir… Un mois où beaucoup de choses pouvaient arriver. En silence, il adressa une prière aux Dieux pour qu’elle ait un bon voyage et pour que le baiser qu’ils venaient d’échanger ne soit pas le dernier.
Fin


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