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 En quête d'un été estréventin | Cassiopée

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Gaël de Laval
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MessageSujet: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeDim 1 Déc 2019 - 12:09

_ Foutreciel, ces dragons sont vraiment une plaie !
_ Et qu’a prévu l’amiral ?
_ Eh bien, il souhaite attendre. La couronne se veut patiente et précautionneuse. On peut les comprendre, même si Nelen a des richesses, sa perte ne coulera pas le Royaume en une ennéade.


Voilà plusieurs jours que tu es rentré de Diantra et depuis tu n'as cessé de penser à ce qu'une entrée à la cour aurait pour effets sur ton quotidien et sur celui de Missède tout entier. Mais l'opportunité de remplacer ces attardés de Nordiens était trop belle. Alors si les affaires missédoises doivent être délaissées, autant les solidifier avant son départ.

_ Nous ne coulerons pas non plus, c’est inutile de s’en inquiéter outre mesure.
_ Certes, l’apocalypse est encore loin mais il n’empêche que c’est une épine qui perturbe le commerce et tout ce qui perturbe mon commerce, me perturbe.
_ Si la couronne est si lente à réagir, pourquoi ne pas directement voir avec les Princes marchands d’Estrévent ?
_ Que veux-tu dire ?
_ Cela fait plus de cinq ans que tu as envoyé des marchands à Ys pour tenter d’en faire une tête de pont commerciale. Pourquoi ne pas directement voir avec la classe dirigeante pour tenter d’assouplir ces routes commerciales si menacées ?
_ Et que puis-je faire ?
_ Ce n’est pas moi la férue de la voile ici ! Je te rappelle que mon domaine, c’est la religion !
_ Et le gigot en sauce…
_ MAIS ! Je ne te permets pas !


Tu lui fais un clin d’œil provocateur qui fonctionne parfaitement. Linaëlle se saisit d’un innocent oreiller, qu’elle ne tarda pas à envoyer avec une force digne des légendaires géants du Nord. Sous le feu nourrit de ta belle, tu ne peux que subir et recevoir de plein fouet le projectile. Suite à la collision, tu te mets à rire tout en te servant de l’arme comme bouclier face à un éventuel assaut. Par tous les dieux, celui-ci n’aura pas lieu.  

_ Toujours est-il que si tu pouvais négocier des partenariats et obtenir des accords favorables, je suis certaine que cette épine deviendrait une petite écharde.


Elle disait vrai. Et cela donnait à réfléchir. Maintenant que le marquisat à une nouvelle et unique tête, c’est la suprématie navale de Chiard qui est menacée. Il est plus que nécessaire de faire de la baronnie le cœur commercial de Langehack. Missède récoltant les bénéfices de la Route d’Or et Chiard attirant les flux maritimes.
Encore une fois, ton épouse avait su te conseiller avec brio. C’est sur cette base que vous vous rejoignirent sous les couvertures afin de conclure cette conversation d’une façon plus légère.

Le lendemain tu te levas tôt, la lumière de l’astre venait poindre à l’horizon et d’ores et déjà, si l’on tend l’oreille, on pouvait entendre les boulangers sortir leurs premières fournées, prêts à recevoir le flux de clients venus chercher leur croissant. Linaëlle dormait toujours, son visage délié par le sommeil était recouvert par des mèches de cheveux noirs. Tu enfiles quelques tissus et te diriges vers une table en bois sur laquelle était disposé une corbeille de fruit contenant les derniers cadeaux de la belle saison. Tu en dégustes un tout en regardant par la fenêtre, faisant courir ton regard de toit en toit et d’arbre en arbre.

Après une quinzaine de minute, ce fût au tour de Linaëlle de sortir de son sommeil. Quelques grognements mal lunés suffirent à faire naître un sourire sur ton visage. Elle se réveillait lentement et péniblement sous ton regard amusé. Finalement la religieuse se redressa, assise, pour se frotter les yeux encore agressés par la lumière.

_ Gaël ?

Tu ne dis rien, te contentant de te lever afin de la rejoindre et de lui déposer un baiser sur le sommet de sa tête. Instinctivement, elle ne bougea plus, se laissant faire. Après quoi elle leva le menton, réclamant un nouveau baiser, ce qu’elle obtient. Sur les lèvres cette fois.

_ Qu’as-tu prévu aujourd’hui ?
_ Je pars pour Ys. Une ennéade au maximum. Tu as raison, j’ai à faire.
_ Et tu comptais partir sans moi ?
_ Eh bien… je… Je ne pensais pas qu’une prêtresse pouvait quitter son poste à sa guise.
_ Elle ne le peut aucunement. En revanche la Dame du Rivage doit conseil à son époux n’est-ce pas ? Elle ne te laissa aucunement le temps de répondre et poursuivit. Bien. Donc dans ce cas nous partons en début d’après-midi, direction Chiard. Ne tarde pas trop.


C’est sur ces belles paroles que la jeune femme quitta la chaleur des draps pour se diriger vers la salle d’eau, attrapant un fruit sur la route. La décision étant prise sans aucune préparation, tu te mis en quête de trouver Edgard pour assurer la régence jusqu’à ton retour. Et sans aucune surprise, c’est dans sa chambre, nu comme un vers et en charmante compagnie que tu le trouvas. Ton compagnon eu la même réaction que Linaëlle et t’agressa avec un autre oreiller tout aussi innocent, avant même que tu ne puisses dire le moindre mot. Après avoir renvoyé le projectile à son expéditeur, tu lui fais part de ton voyage express sans tenir compte de la femme à moitié assoupie à ses côtés. Edgard devra prévenir Clarence de Beaurivages de ce voyage et assurer ensemble une courte régence.
Le reste de la matinée fut rythmée par les préparatifs jusqu’à ce qu’à quatorze heures, un petit convoi quitte Missède pour atteindre Chiard avant la nuit. Le départ des deux navires devant te conduire à Ys est prévu aux aurores et le voyage s’annonce long à cause des détours envisagés.

Après maintes journées de jeux de dés et une dernière rythmée par le mal de mer de Linaëlle, vous arrivez enfin à destination. Le grand port de la cité marchande vous ouvre ses bras et à peine avez-vous le temps de poser le pied à terre que tu te diriges vers l’étal d’un marchand rivegeois présent depuis le premier jour. Tu traverses les rues bondées en compagnie de deux gardes tandis que le reste de la troupe resta avec Linaëlle à proximité du navire. Une fois l’étal trouvé, le marchand te propose le gîte pour la nuit et t’invite à entrer. Là, vous échangez pendant près d’une demi-heure sur la classe dirigeante que tu souhaitais si ardemment rencontrer. L’homme parla de représentants dirigeants la politique de la cité-Etat. Mais surtout il aborda le nom d’une femme qui t’étais jusqu’alors inconnu. Et en effet, il ne t’est jamais venu d’influencer la politique Ysoise par le passé. Pour le moment du moins. Jusqu’à présent ton seul objectif était d’envoyer et de préserver des marchands dans cette ville pour attirer des flux jusqu’à Chiard. Cela fonctionnait correctement sans pour autant que l’or estréventin abonde dans ta seigneurie. Mais le contact était bien là, alors autant creuser dans cette direction.

_ Comment puis-je trouver cette Dame ?
_ Prenez votre mal en patience, je me chargerai de tout…


Et en effet durant les deux jours qui suivirent, le marchand péninsulaire remua ciel et terre pour faire parvenir un message à la maitresse des lieux comme quoi le régent de Missède était de passage à Ys pour faire affaire… Mais tu n’avais aucune idée de la tournure que prenait ce remue-ménage provoqué par ton homme. Pendant ces quarante huit heures, Linaëlle et toi profitez des alentours de la cité, fuyant par la même occasion l’automne péninsulaire.


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Cassiopée Meldyrin
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeLun 2 Déc 2019 - 1:19


Première ennéade de Barkios 17/XI, quelques jours après la visite à Isgard.

« Le régent de Missède ?

- Oui, le régent de Missède.

- Le régent de Missède !

- Oui, c’est bien ce que je dis : le régent de Missède.

- Je vois … le fameux régent de Missède …

- Vous savez Cassiopée, ce n’est pas en répétant ce que je dis avec différentes intonations que cela ajoutera un effet dramaturgique.

- Je le sais bien, mais cela me plait particulièrement de vous voir lever les yeux au ciel d’un air exaspéré … comme maintenant en fait. »


La Valériane soupira et leva les yeux au ciel. La directrice de la Compagnie Olyane rit de bon cœur afin de dédramatiser la situation. Effectivement, la présence du régent de Missède ne lui avait été annoncée que depuis peu, mais elle n’avait pas encore pris de décision à son sujet. Et visiblement, l’homme ne semblait pas pressé vu qu’il logeait dans le petit quartier où s’étaient installés les Péninsulaires d’Ys. Il se baladait avec ce qui semblait être sa compagne, prenant la température de la cité et rencontrant sa diaspora.

Cassiopée avait beau prendre le sujet à la légère en la présence de La Valériane, elle n’était pas aveugle et savait qu’à un moment ou à un autre, elle allait devoir faire bon accueil à ce seigneur. Mais à vrai dire, elle était en train de mener d’importantes recherches pour le devenir d’Ys et l’interruption causée par ce seigneur péninsulaire chamboulait quelque peu son emploi du temps. Il prendrait son mal en patience comme tout le monde.

Cassiopée referma l’enveloppe qu’elle préparait et apposa son cachet. Cette missive partirait pour une personne qui avait attiré son attention. Elle avait besoin d’une chasseuse de trésors … et de préférence quelqu’un qui n’était pas d’Ys. Lajoie avait exactement le genre de personne qu’il fallait sous la main, mais une missive officielle de la Protectrice d’Ys faciliterait les choses.

« C’est encore Ys-la-Vieille qui vous préoccupe non ?

- Bien entendu. Nous avons besoin de trouver une solution pour cette affaire. Ce vide juridique est insupportable et je crois avoir trouvé quelque chose qui légitimerait nos revendications.

- Vous connaissez ma position vis-à-vis de cela : nous avons besoin de récupérer tout l’espace disponible et de sécuriser notre position. Tout ce qui œuvre dans ce sens a mon assentiment.

- Et bien vous allez être agréablement surprise si jamais cette piste s’avère fructueuse.

- Je n’aime pas les …

- Les surprises … oui je sais. Je me souviens encore de ce qui s’est passé lors de notre dernière soirée chez l’Armateur. Mon épaule me fait encore un mal de chien. »


La Valériane sourit. Il était vrai que les soirées chez l’Armateur se finissaient toujours … de manière exotique. La faute à son alcool de prune des Miles-Caves. Personne n’en connaissait le secret de fabrication, mais par les dieux, quelle puissance !

Cassiopée se leva de sa chaise et se dirigea vers la fenêtre de son bureau. Elle attrapa son foulard bleu qui pendait négligemment sur la poignée de la fenêtre et l’attacha au col de sa tunique blanche. Elle portait une jupe longue aux tons bleu sombre qui lui tombait sur les genoux, recouvrant ses bas noirs. Serrée à la taille par des boutons dorés, la jupe était très confortable et ne la gênait pas pour ses activités, elle qui avait plutôt l’habitude de porter des braies sombres. En tant que Protectrice d’Ys, elle se devait d’être présentable et bien apprêtée, mais n’ayant jamais apprécié le faste et le luxe de la haute société vaanie, elle préférait les vêtements simples mais élégants : quelque chose de soigné et non pas clinquant.


« Missède disions-nous. Les membres du Conseil d’Ys n’ont visiblement pas encore jugé bon de le rencontrer. Je parie que le régent a eu vent de notre petite escapade à Isgaard et qu’il souhaite lui-aussi négocier quelque contrat avec notre belle cité. »

La Valériane opina du chef.

« Sans aucun doute : mais si je puis me permettre, il n’est pas nécessaire de lui rappeler, si d’aventure l’information lui serait parvenue.

- Cela va sans dire …

- Mais cela va mieux en le disant. »


Cassiopée fit une grimace évocatrice à sa responsable des risques. Cette dernière était une Péninsulaire pure souche. Elle les connaissait mieux que personne au sein de la Compagnie Olyane. Mieux valait se fier à son jugement pour tout ce qui concernait les affaires avec la noblesse humaine. Elle lui fit une révérence appuyée en soulevant légèrement sa jupe alors qu’elle pliait le genoux et lui sortit d’un ton taquin :

« De quoi ai-je l’air ?

- D’une vraie princesse de la Péninsule ! Mais votre révérence est 5 centimètres trop basse, si l’on s’en tient aux standards sybrondiliens sur l’étiquette. Vous ne tromperez personne.


- Oh ! Douce Néera ! Me voila donc démasquée, moi l’odieuse demi-drow ! Quelle disgrâce ! Quelle infâmie ! Quelle traitrise ! Ah, je meurs, je suis morte, je suis enterrée ! Aaaaah … »

La demoiselle d’Ys prit de grands airs et s’effondra dans les bras de sa maître-espionne en rigolant. Elle se remit vite de ses émotions et attrapa sa sacoche d’alchimiste, qui ne la quittait jamais.

« Bien il est temps d’aller à la rencontre de ce régent de Missède. »



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LA ROBE DE CASSIOPEE:

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En quête d'un été estréventin | Cassiopée Ys_amb12


Trouver le fameux Gaël de Laval n’était pas bien compliqué. Les Péninsulaires d’Ys s’étaient regroupés dans un petit quartier entre le port et la ville où ils avaient importé leur architecture. Dans le tissu hétéroclite de la cité portuaire, le quartier péninsulaire était une étrangeté, même pour les Vaanis habitués à croiser diverses cultures. Le quartier était tout de pierre et de toits de tuiles : des maisons mitoyennes basses et des rues pavées tirées au cordeau. Un vrai petit bijou de savoir-faire et d’architecture, qui avait été commandité il y a de cela quelques décennies, du temps où Ys jouissait de ses contacts avec la Péninsule.

Cassiopée avait connu l’architecte … qui à l’époque n’était plus tout jeune. Il lui avait conté les merveilles de la Péninsule, ses toits pentus, ses cathédrales, l’air marin et iodé qui venait s’échouer sur les murs de pierres blanches de Pharembourg, … Tout ce qui l’avait inspiré pour la réalisation de quelques pièces des plus emblématiques de ce quartier dont principalement, l’allée des Milles Couleurs.

L’allée des milles couleurs était une petite rue discrète connue par les locaux. Si l’essentiel du commerce se trouvait à l’Agora, de petites rues commerçantes subsistaient dans les angles morts de l’ancien régime gouvernant Ys. Les Milles Couleurs, de l’aveux de l’architecte, auraient du être en pierres blanches, pour rappeler l’architecture sybrondilienne. Malheureusement, importer de la pierre blanche s’étant révélé impossible pour l’époque, la pierre couleur d’or extraite à Ys fut utilisée. Il en résultait, avec l’accumulation des étals de fruits et de légumes en tous genres qu’il s’agissait de la rue commerçante la plus petite, certes, mais aussi la plus colorée d’Ys, débouchant au fond, sur une petite chapelle dédiée à la Damedieu, accueillant une petite communauté de prêtres péninsulaires.

Le couple logeait dans l’échoppe de maître Phinéas Desmoulins, un épicier péninsulaire spécialisé dans la mise en bocaux de produits péninsulaires prisés en Ithri’Vaan : miel, poivrons, viandes, … Maître Desmoulins était connu dans les Milles Couleurs et le quartier péninsulaire pour être un excellent épicier et un membre actif de la communauté. Il occupait un siège au Conseil des Citoyens depuis peu, mais était resté jusqu’à présent très discret sur son engagement, la tenue de l’épicerie lui prenant malheureusement tout son temps. C’était lui qui avait fait parvenir l’information aux oreilles de La Valériane.

Cassiopée Meldyrin, Protectrice d’Ys et Directrice de la Compagnie Olyane apparut donc dans les Milles Couleurs par un bel après-midi et se dirigea vers l’échoppe de maître Desmoulins. Deux gardes jouaient aux cartes devant l’entrée et quelques badauds trainaient pour acheter quelques bocaux. Visiblement, les habitants du quartier étaient en train de prier la Damedieu au temple, de l’autre côté de la ville. Fort bien ! Cassiopée n’aimait pas spécialement les attroupements.

Le duo s’approcha des gardes assis devant la devanture du magasin de bocaux et s’annonça … En espérant que le couple soit présent.


Dernière édition par Cassiopée Meldyrin le Mer 1 Jan 2020 - 15:59, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeLun 2 Déc 2019 - 7:49

Maître Desmoulins fut le premier à vous inviter ton épouse et toi. L’homme d’un âge respectable était connu pour l’amour de son travail et sa joie de vivre sans bornes. Il fut l’un des premiers à partir avec tes financements et depuis, le Missédois d’origine mervaloise a su étendre son commerce et a réussi le pari risqué d’ouvrir une seconde échoppe à l’autre bout d’Ys. En ce sens, il s’est un peu senti obligé de t’inviter à loger chez lui alors que l’auberge n’était pas bien loin. Et puis en ce sens, il peut se vanter auprès de ses clients de loger ET nourrir un seigneur péninsulaire, preuve que ses produits sont d’un goût exquis. Aujourd’hui Phinéas ramena une bonne nouvelle, son message a été transmis et ce n’est qu’une question de temps pour que Cassiopée ne réponde d’une quelconque façon et forcément, il fut la victime de tes questionnements vis-à-vis de la responsable de la cité

_ Bien mon cher ami. Que dois-je savoir de cette Cassiopée Medyrin ? N’omettez rien !
_ Pour commencer messire, je pense faire l’unanimité en mettant en avant la sympathie de cette dame ! Elle a bon fond croyez-moi. De plus, elle n’est pas une Princesse Marchande comme les autres. Elle aime profondément sa ville. A votre image, elle a lancé de nombreux travaux et rénové en profondeur l’organisation d’Ys.
_ Une idéaliste alors ?
_ Oui et non. Elle rêve de voir Ys prospère et a une éthique qui nous dépasse mais elle sait être pragmatique dans ses choix.
_ Je vois… Pensez-vous qu’elle sera renversée par un coup d’Etat ?
_ Je vous demande pardon ?
_ Non pas que je le souhaite, ne m’accordez pas des intentions qui ne sont point les miennes. Mais admettez que l’Estrévent n’est pas le plus calme des pays…
_ Ah ça... à qui le dîtes vous… Parfois je regrette le calme et la stabilité de Missède vous savez… Mais pour répondre à votre question, je ne le pense pas. En public, beaucoup la soutiennent il est vrai mais même en privé ses actes font consensus.
_ Parfait, elle est donc faite pour durer !
_ Connaissez-vous son marché ?
_ Evidemment. Elle fait du cabotage. Exactement ce que nous faisons. Et c’est bien pour cela que je suis ici.
_ Maniez vos mots avec précaution messire. Je sais de source sûre qu’elle s’intéresse à la Péninsule mais je ne sais en revanche si elle a déjà mis les voiles vers notre Royaume.
_ Ainsi donc me voilà en concurrence ?
_ Chiard concurrence tous les ports Péninsulaires mon Seigneur. C’est vous-même qui nous l’aviez dit le jour de notre départ.
_ Alors quelle stratégie adopter une fois devant elle ?
_ Restez naturel et si vous arrivez à lui soutirer un sourire non calculé… N’hésitez point à vous laisser séduire par le jeu.
_ C’est à moi de vous demander pardon en cet instant.
_ Vous comprendrez le moment venu. Maintenant si vous voulez bien m’excuser… J’ai à faire.


L’homme se lève et s’incline avant de tourner les talons et de s’approcher de la porte donnant sur la rue. Mais au dernier moment, il s’arrête et se retourne avec un grand sourire.

_ Au fait messire de Laval ! Ce n’est pas une sang mêlée comme les autres… Bonne journée !

Et il s’en va, te laissant seul avec les quelques gardes présents. Les mots étaient restés suspendus dans l’air, tu n’avais eu le temps de répondre et après ce départ soudain, tu ne le pouvais plus. Sans autre information, tu dois bien te résoudre à attendre de la voir en chair et en os pour en juger. Négocier avec un Prince Marchand n’est jamais une partie de plaisir. Ce ne sera que la deuxième fois. Et déjà la première fut harassante avec la marchande d’esclave. Mais il fallait rouvrir ces routes commerciales. Véritablement. Tu soupires et te lèves à ton tour. En ce début d’après-midi, l’astre lumineux apportait une chaleur bienvenue aux habitants de la cité. Tu te sentais bien ici. Tu t’es toujours bien sentit en Estrévent… jusqu’à un certain point. Car le mal du pays ne tarde jamais à te guetter et finalement on n’est bien qu’en étant de retour chez soi.

Linaëlle est sortit à l’aube pour visiter la ville et déjeuner avec un souffleur de verre. Accompagnée de la majorité de la garde, il ne restait que deux hommes à l’entrée pour assurer ta protection. Et après tout, que pouvait-il t’arriver ici ? Tu n’as jamais été l’ennemi de cette ville bien au contraire ! Mais en même temps, le retour de politesse n’est pas certain. Plus les minutes passent, plus l’appréhension te gagne et tu te décides à sortir sur le balcon pour prendre l’air et profiter du calme du moment. Respirant à plein poumons, tu laisses ton regard courir sur les toits à perte de vue qui donnent finalement sur l’étendue azur. Tu fermes les yeux quelques secondes et entrouvre la bouche pour humer et gouter l’air chargé de ces parfums d’Orient des épices se mêlant aux fleurs en couronnes, suspendues aux fenêtres.

C’est la faim qui t’encourage à quitter ton état de contemplation pour te saisir d’un fruit traînant dans un panier traînant lui-même sur une table. Mais alors que tu t’étais mis en tête de le dévorer en l’espace de quelques minutes, tes pas t’amenèrent à passer à côté d’une toile destinée à être peinte. Le blanc immaculé venait de s’agripper à ta vue périphérique et tu ne peux t’empêcher de considérer l’objet. Et alors que le fruit était progressivement entraîné vers tes lèvres, il fut stoppé in extremis par une idée. Tes yeux firent quelques allers et retours entre le pauvre fruit et la toile jusqu’à ce que finalement l’envie se saisisse de ton âme. Tu retournas dans la pièce dans laquelle se trouvait le panier afin de l’emmener avec toi et de le disposer face à la toile, légèrement surélevé. Puis te saisissant d’un pinceau, d’une palette et d’un verre d’eau, tu te lances.

Après de longues minutes, qui pouvaient bien faire une heure, la porte s’ouvrit et un garde pénétra dans la demeure, immédiatement arrêté par ta main tendue quelques mètres plus loin qui vient tenter de sauver ta concentration. L’homme se figea. Il ne dit rien, toi non plus. Tu ne le regardais même pas, trop concentré à ne pas dépasser lors du remplissage d’une feuille. L’homme se racla la gorge mais il en fallait plus pour te faire bouger. Finalement, la porte resta grande ouverte, laissant aux invitées tout le loisir de la franchir. Légèrement penché en avant, la palette dans une main et le pinceau dans l’autre, tu fis de ton mieux pour maîtriser chaque poil et chaque coup de poignet. La toile n’était pas terminée, elle était loin de l’être mais le panier de fruit était reconnaissable. Ce n’était d’aucune façon -de près ou de loin- digne d’une peinture de maître mais tu n’es pas pour autant un débutant et cela se sent. Le tracé et le jeu des couches est somme toute bien réussi. Seules les couleurs et la précision des détails restent à améliorer.

Le fait est que tu n’as toujours pas tourné la tête.


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Cassiopée Meldyrin
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeLun 2 Déc 2019 - 21:35


Le garde qui les accompagnait se râcla la gorge. Visiblement, les Péninsulaires avaient du mal avec les annonces. Ce garde devait être cassé, il fallait songer à le remplacer. Le pauvre garçon ne devait pas avoir plus d’un quart de siècle et flottait dans son armure de cuir clouté. Il semblait bien embêté, ne sachant pas s’il devait pousser plus loin son annonce ou obéir à son maître. Quel protocole suivre ? Visiblement, il en était fort contrarié et ne savait plus sur quel pied danser.

Cassiopée posa sa main sur son bras avant qu’il ne fasse une crise de panique et ne se mette à convulser sur place. Elle posa son doigt sur ses lèvres et lui fit signe de se retirer discrètement, ce qu’il fit sans demander son reste. Profitant du fait que le fameux régent de Missède soit occupé à travailler sur ce qu’il semblait être une peinture – dont la qualité était compliquée à évaluer au vu de la distance qui les séparait – Cassiopée fit quelques pas au milieu de la pièce. Elle profita du fait que l’homme était de dos pour tenter quelques discrètes révérences. Elle sentit La Valériane se masser le front d’un air exaspéré à peine eut-elle tenté la première révérence. La Protectrice d’Ys se retourna et lui fit une grimace amusée. Après tout, il n’y avait pas de mal à s’amuser un peu !

Le fameux régent était visiblement trop occupé pour daigner leur accorder la moindre attention. Ladite attention étant focalisée sur la représentation d’une corbeille de fruits : des dattes, des mangues, quelques poires, des bananes … que des fruits que l’on trouvait aisément à Ys. Profitant de ce moment de flottement, la jeune femme s’approcha des étagères d’une bibliothèque assez fournie et parcourut du doigt les titres des ouvrages.

Histoire de la Couronne … La Geste des Barons Félons … Le Nord Sauvage … La Péninsule du Xe Cycle : édition augmentée … L’impossible Sybrondil … Ces ouvrages écrits en Péninsulaire ne lui disaient rien. Il s’agissait d’ouvrages difficiles à trouver dans les contrées vaanies. Curieuse, elle s’empressa de prendre l’Histoire de la Couronne par Mestre Roderick et s’assit sur l’un des canapés du salon pour patienter jusqu’à ce que l’homme ai fini sa toile. L’art était quelque chose à respecter. Il était inconvenant de distraire un homme pendant qu’il jouit d’un moment d’inspiration.

La Valériane s’assit sur un fauteuil, de l’autre côté du salon et sortit de son sac des documents qu’elle devait vérifier avant d’envoyer à Quiryah. Même durant ces instants, le travail ne s’arrêtait jamais et bien vite, Cassiopée l’entendit griffonner au crayon de bois sur le papier.

Cassiopée se plongea dans la lecture :
__________________________


« En la 997e année du Xe Cycle, la Péninsule a un nouveau roi. Trystan, qui vient de succéder à son demi-frère Ultian, va connaître un début de règne difficile. Trysan est un bâtard, reconnu et légitimé tardivement par son prédécesseur. Sa montée sur le trône fait grincer quelques dents dans le Royaume. Comme la bâtardise ne suffisait pas, le nouveau roi a aussi la particularité d’être aveugle … »

__________________________

La directrice de la Compagnie Olyane émergea de sa lecture quelques minutes plus tard, plus instruite qu’avant, mais tellement moins que demain. Le peintre en herbe mettait la touche finale. Il était temps s’introduire dans son espace privé. Cassiopée se leva et rangea avec précaution le livre dans sa vitrine. Alors qu’elle s’approchait du balcon sur lequel peignait ledit Gaël de Laval, ce dernier se retourna. Il arborait l’air satisfait du peintre ayant réussi à saisir ce qu’il avait vu dans la relation entre la lumière, la corbeille de fruits et le parapet de pierre jaune.

Ce n’était pas un homme déplaisant. Il ne devait être dans la vingtaine. Etrangement, elle s’attendait à quelqu’un de plus vieux. Sa rencontre avec Gaubert de Prademont l’avait laissé dans l’esprit l’image de seigneurs péninsulaires d’âges mûrs et à l’air dur et austère, cachant leur personnalité expansive et brute de décoffrage derrière une image de majesté inatteignable respectant scrupuleusement l’étiquette. A contrario, Gaël de Laval était, aux yeux de Cassiopée … un enfant à peine adulte. Il ne fallait cependant pas donner trop de crédit à cette impression : il avait beau avoir l’air à peine d’être entré dans l’âge adulte, il n’en restait pas moins un seigneur péninsulaire. A ce titre, il méritait tout le respect dû à son rang et la Protectrice d’Ys pouvait imaginer qu’un homme si jeune capable de se maintenir au pouvoir était tout sauf un fat et un sot. La première impression était généralement la bonne et ce garçon renvoyait une bonne image de lui-même, quand bien même aucun mot n’ait été échangé.

Cassiopée sourit et fit sa plus belle révérence…2 centimètres trop bas. Il restait encore de la place pour de l’amélioration.


« Monseigneur de Missède je présume. Enchantée ! Je suis Cassiopée Meldyrin, Protectrice d’Ys et directrice de la Compagnie Olyane. Il parait que vous cherchez à me rencontrer, aussi ai-je pris la peine de venir en personne. Que nous vaut l’honneur de votre présence dans notre belle cité ? Je vous l’avoue, je suis curieuse. »
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Gaël de Laval
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeMer 4 Déc 2019 - 16:52

Que faire ? Comment agir ? Que, quoi, ou comment ? Le pauvre garde était perdu. D’un côté se trouvait tout simplement la patronne de ces lieux et de l’autre se trouvait tout aussi simplement son patron à proprement parler. L’anévrisme était sur le point de sauter quand Cassiopée vînt à sa rescousse et l’autorisa à quitter la pièce. Le garçon ne demanda pas son reste et sorti à toute vitesse. Persuadé qu’il s’agissait d’un simple émissaire. Tu ne daignes pas faire attention, ni même considérer les deux femmes qui viennent de poser le pied dans te demeure pour l’ennéade. Pinçant tes lèvres et fronçant tes sourcils, tu cherches à trouver la bonne couleur pour la mangue. Un orange verdâtre aux teneurs exotiques et épicées. Hélas tu n’y parviens en aucune façon. Le vert orangé ne bougera plus et le fruit aux teintes impressionnistes provoque en toi une déception invisible. Qu’importe. Il te reste encore des décennies pour parfaire cet art. Tu délaisses le pinceau et la palette pour jouer du crayon. Le papier bruisse tandis que la mine vient courir pour rectifier une forme. Une fois cela fait, tu déposes précautionneusement le crayon à papier pour reprendre ton idyllique histoire avec les poils d’hermine. Il ne manquait plus qu’une touche, quelques contours et une signature et l’œuvre sera fin prête.

Ce ne fût point long. Quelques minutes et quelques grossiers traits plus tard, ta toile semble achevée. Le premier plan est volontairement laissé vague et sans grande précision. Tu trouves cela intéressant mais ne comptes pas retenter l’expérience. C’est avec une mine réjouie que tu te retournes en direction de tes invitées.

_ Qu’en pensez-vous ?

La question n’était pas totalement rhétorique et n’occupa l’espace que quelques secondes. Une justification se préparait. Mais tu ne la laisses pas sortir, préférant revenir sur ta pensée. Après tout, il ne faut jamais justifier ses actes, c’est inutile et il faut savoir ressentir de la fierté pour chaque chose accomplie.

_ A mon sens, cela manque de précision. Mais après tout, j’ai toute la vie pour retoucher ces manquements et courir vers l’idéal de perfection.

Une perfection inatteignable certes mais qui vous change un homme ! Vouloir être le meilleur, c’est tendre vers le meilleur, et donc, la perfection. Et en soi, n’est-ce pas déjà une forme de perfection ? Rhétorique et philosophie mises à part, revenons à des choses plus terre à terre. La femme aux cheveux forts clairs en vient à se présenter et… zut. Ce n’était ni une cliente, ni une émissaire de la Princesse Marchande. A vrai dire, c’était tout bonnement la Princesse Marchande. Et ça… c’est franchement réaliste sympathique.

_ Monseigneur de Missède je présume. Enchantée ! Je suis Cassiopée Meldyrin, Protectrice d’Ys et directrice de la Compagnie Olyane. Il parait que vous cherchez à me rencontrer, aussi ai-je pris la peine de venir en personne. Que nous vaut l’honneur de votre présence dans notre belle cité ? Je vous l’avoue, je suis curieuse.


Mazette. Une princesse qui se déplace. Une princesse qui utilise ses gambettes. PIRE -ou mieux en fonction des penchants de chacun- une princesse qui vient sans escorte. Mais surtout ! Une princesse qui passe les portes. Mais ne tirons pas de conclusions hâtives ! Peut être qu’elle ne passe pas toutes les portes. Ou qu’aujourd’hui c’était au tour de ses chevilles de gonfler… Restons fidèle à l’Etiquette.

_ Vous présumez bien Votre Altesse ! Tout l’honneur et l’enchantement sont pour moi. Et je tiens à souligner et mettre en évidence ma surprise et ma profonde joie de vous voir ici, devant moi loin d’une horde de mignons ou de géants carapacés de la tête au pied.

En cet instant précis, la vie était d’une simplicité incroyable. Parfois cela avait du bon et c’est sans conteste Linaëlle qui en aurait été ravie. Mais la pauvre bougresse n’était point là pour le moment. Il ne serait point étonnant d’apprendre que ton épouse a lentement dérivé d’un déjeuner vers le temple dès lors que l’heure de la prière approcha. Mais qu’importe, elle aura d’autres occasions de rencontrer cette charmante sang-mêlée. D’ailleurs parlons-en. Une sang-mêlée sombre. Ou bien dit-on une sombre sang-mêlée ? Qu’importe, ne nous mélangeons pas les poils d’hermine. C’est pour le moins peu commun. Autant les demi-elfes dits de lumière sont légions… enfin, pour ce que ça vaut, autant leurs cousins sont bien plus rares. Tu le crois, c’est une expérience intéressante. Et puis l’alliance de ses yeux gris et de la teinte de la crinière pourraient très certainement faire chavirer le plus ardu des cœurs.

_ Je me nomme Gaël de Laval, seigneur du Rivage et régent de Missède. Tout d’abord permettez que je vous présente mes excuses, j’étais persuadé que vous étiez une émissaire… envoyée par vous-même tout compte fait, venue me quérir pour m’inviter à un obscur sommet dans un palais rutilant de soie, d’or et d’argent, entouré d’une foule de courtisans. Du moins, c’est ce qu’il s’était passé la seule et dernière fois que j’étais venu en Estrévent, rencontrer une Princesse Marchande.

Quel mauvais souvenir. En y repensant, tu pouvais comprendre la vision des Nordiens vis-à-vis des Estréventins en côtoyant des personnalités aussi fantasques que celle de Maralina l’esclavagiste. Une femme de caractère, c’était le moins que l’on puisse dire… Mais aux ambitions dangereuses. Il y a tout de même beaucoup d’ambitions dangereuses dans ce monde, mine de rien. Mais revenons à nos moutons ! Tu offres un sourire à ton invitée de marque avant de poursuivre.

_ Pour être tout à fait honnête avec vous -et je tends à souvent l’être- aucune raison autre que la beauté et le dynamisme de cette ville ne m’anime… Rectification, « ne m’animait » jusqu’à aujourd’hui serait plus juste. Voyez-vous, je pense que si je n’étais ni seigneur, ni même noble, c’est ici que je vivrais. Cette ville a un charme qui n’appartient qu’à elle.

Ciel ! Tu es là pour l’or, l’argent, les épices, les parts de marché, bref du bon gros blé ; quelle est donc cette excuse aux odeurs nauséabondes qui se dégage de tes lèvres ? Et pourtant même si cette entrée en la matière aurait fait douter n’importe quel négociant un minimum expérimenté, la véracité de tes propos était difficile à remettre en cause… Tout simplement parce qu’ils étaient pensés et assumés ! D’ailleurs la légèreté de cette phrase la fit sonner plus vraie que nature. Allais-tu en rester là ? Sauter le pas ? Ou peut-être bluffer ? Que nenni, maître Desmoulins t’as promis du jeu, tu l’attends !

_ Avant de tout vous révéler et de me retrouver à nu, peut être puis-je vous offrir à vous et à votre amie un quelconque rafraîchissement ?

Avant même qu’elle ne réponde, tu approches la main de ta bouche pour lui murmurer la phrase suivante avant de réaliser une légère grimace.

_ Pour être honnête je ne suis pas certain de retrouver le citron pressé, j’espère que vous avez du temps devant vous …


Dernière édition par Gaël de Laval le Mar 14 Jan 2020 - 17:50, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeMer 4 Déc 2019 - 23:02


Ce Gaël de Laval était vraiment très différent de son homologue le comte d’Odélian. Si les deux hommes avaient le même rang, on ne pouvait trouver plus opposés. Si ce dernier était un homme cru et dur, le seigneur du Rivage était son exact contraire : tout de douceur et de velours. Il n’en restait pas moins qu’ils étaient tous les deux comtes et qu’à ce titre, ils étaient aussi ambitieux l’un que l’autre. Ce n’était pas un secret : les Péninsulaires cherchaient à profiter de la reprise du commerce pour tirer leur épingle du jeu. Des rencontres comme le comte d’Odélian ou le seigneur de Missède allaient se multiplier dans les énéades à venir … avec son lot de personnages plus bigarrés les uns que les autres.

Elle lui rendit sa politesse :

«Les meutes de suppliants me fatiguent et j’ai mieux à faire de mon existence que d’accorder de mon temps à des flagorneurs qui n’aident en rien à améliorer la prospérité de cette cité. Quant aux gardes du corps … étrangement, la simple présence de La Valériane me suffit. »

La Valériane ne détourna pas les yeux de ses papiers et continua à travailler quelques instants avant de lever le nez et d’esquisser un léger sourire. Avec elle à ses côtés, Cassiopée se sentait plus en sécurité qu’avec une cohorte entière d’hommes d’armes. Elle l’avait déjà vue à l’œuvre … c’était à la fois magnifique et terrifiant. Il y avait Lajoie aussi … mais elle préférait la présence féminine et discrète de la Péninsulaire à la présence glaciale et à la morgue de Lajoie.

Gaël de Laval donc, seigneur de Rivage et régent de Missède. Cela sonnait bien aux oreilles de la Protectrice d’Ys. Cela avait cette consonnance exotique typique des Péninsulaires. Leurs titres ou les noms de leurs places-fortes étaient toujours des noms liés à l’eau, aux fleurs ou à un élément du paysage. C’était … pittoresque ! Marquis de Montfleuri, Comte des Vivesaigues, Baron de Joyeux-le-Lac, Bourgmestre du Valmoissons… tous ces titres avaient une sonorité que la jeune femme savait apprécier. Existaient-ils d’ailleurs ?

A l’écoute de ses excuses pour l’avoir confondue avec une manante, Cassiopée se mit à rire. Ce n’était pas la première fois. Ce n’était certainement pas la dernière. La directrice de la Compagnie Olyane n’avait pas la posture et la présence des autres Princes Marchands de l’Ithri’Vaan. Elle était issue d’une famille modeste de Thaar et n’avait jamais été attirée par le décorum et les protocoles infinis qui mettaient à distance les Princes Marchands du reste de la population. Ce qu’elle perdait en majesté, elle le compensait en proximité avec les hommes libres. C’était une posture comme une autre, mais qui, pour un seigneur péninsulaire habitué aux protocoles vaanis, pouvait être déstabilisant. Elle ajouta :

« Chaque Prince Marchand a son décorum. Laquelle de mes consœurs avez-vous rencontré ? Personnellement, les cérémonies et les intermédiaires m’ont toujours ennuyé. Je préfère aller directement à l’essentiel, quitte à faire quelques entorses au protocole. A moins que vous ne préfériez passer par des voies officielles et attendre quelques mois pour avoir l’occasion de rencontrer un véritable émissaire ! Nous avons d’excellents émissaires dont le plus grand des talents est de vous faire patienter jusqu’à ce que vous leur vendiez pères et mères pour ne serait-ce qu’accélérer les choses. »

Elle tentait de détendre l’atmosphère. Cassiopée n’était pas d’humeur à être protocolaire, probablement parce que le fameux seigneur de Missède la mettait à l’aise. Il tenta un vain compliment sur sa cité, arguant du fait qu’il y vivrait s’il n’était point relié par sa naissance à sa terre et à ses responsabilités. Ha ! Flatteries ! Bien tenté, mais on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre. Néanmoins, la Protectrice d’Ys ne pouvait lui en tenir rigueur : les flatteries et les compliments faisaient parties des petites règles de mise en scène de la vie quotidienne. Il y avait des codes à respecter entre gens respectables sous peine de voir se craqueler les masques que les différents protagonistes endossent.

Se voir proposer des rafraichissements était la moindre des choses qu’un hôte pouvait faire en si bonne compagnie. Cassiopée accepta de bonne grâce.

«Prenez votre temps, mais profitez-en pour nous exposer les raisons de votre présence. Je suppose que vous n’êtes pas ici pour admirer les vieilles pierres et me servir de sommelier et j’avoue que vous avez éveillé ma curiosité.»

Elle s’assit sur le canapé dans lequel elle avait lu tantôt et lissa machinalement les pans de sa tunique avant de prendre machinalement l’une de ses mèches argentées entre ses doigts. Quelque chose la tracassait. Etrangement, le régent de Missède n’avait pas été effrayé par le fait qu’elle soit une sang-mêlé de Sombres.

Si en Ithri’Vaan la chose était courante, elle avait eu une mauvaise expérience de l’hospitalité péninsulaire envers ceux de sa condition. Cela la travaillait quelque peu … que cet homme qu’elle venait à peine de rencontrer ne fasse aucune remarque ou n’ai aucun mouvement de recul.

L’apprenti peintre – sa toile était fort bien exécutée au demeurant – passa derrière elle, cherchant visiblement des agrumes pour compléter ceux de la corbeille de fruit afin de concevoir quelque breuvage dont il avait le secret. Lorsqu’il revint s’asseoir en face d’elle, les bras chargés d’un plateau, elle ne put s’empêcher de lui poser la question d’un ton grave, qui contrastait avec sa bonhomie naturelle :

« Comment se fait-il que ma vue ne vous effraye pas, messire de Missède ? »
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeVen 6 Déc 2019 - 20:38

_ Chaque Prince Marchand a son décorum. Laquelle de mes consœurs avez-vous rencontré ? Personnellement, les cérémonies et les intermédiaires m’ont toujours ennuyé. Je préfère aller directement à l’essentiel, quitte à faire quelques entorses au protocole. A moins que vous ne préfériez passer par des voies officielles et attendre quelques mois pour avoir l’occasion de rencontrer un véritable émissaire ! Nous avons d’excellents émissaires dont le plus grand des talents est de vous faire patienter jusqu’à ce que vous leur vendiez pères et mères pour ne serait-ce qu’accélérer les choses.

Fallait-il l’évoquer ? Evoquer cette rencontre avec Maralina et cet accord fort peu lucratif tout compte fait qui n’a été utile que dans un seul domaine : mettre le pied sur la côte estréventine et plus précisément dans la cité d’Ys. Une aide financière et logistique qui a permit à nombre de marchands missédois de poser leurs bagages dans cette belle ville et de monter des affaires plus ou moins florissantes. Certes il y eût des faillites, comme partout. Mais également de grandes réussites à l’image de ce Desmoulins. Tu pris la décision d’évoquer sans t’attarder en précisions.

_ J’ai connu Maralina… Ivro… Ivra… Mince… Vous savez, une marchande d’esclave. Triste métier que voilà… Mais à l’époque il ne s’agissait que de maisons de passes et sans mentir, je regrette cette rencontre aujourd’hui. Passons si vous le voulez bien.

Vite, fuyons le passé et concentrons-nous sur le présent ! Aujourd’hui seul Ys compte ! Ys… et ces alentours. La Princesse daigne accepter un verre et ni une, ni deux, te voilà lancé à la recherche d’ingrédients afin de concocter quelque chose de vitaminé, de sucré mais surtout de délicieux. Ouvrant tous les placards les uns après les autres, tu en retires tous les fruits qui ont le malheur de tomber sous ta main. Une pile s’amoncela peu à peu sur un comptoir et quand tu fermas le dernier placard, tu te mis à la recherche d’un couteau tout en répondant à ton invitée.

_ Si vous êtes devant moi aujourd’hui, c’est bien la preuve que les relations que nos deux terres entretenaient avant l’arrivée de ces lézards ailés ne vous laisse indifférente. Pendant les six dernières années je n’ai eu de cesse d’œuvrer à la stabilité et à la richesse intérieure de Missède et du marquisat de Langehack que dirigeait mon épouse. Mais il y a peu, un nouveau marquis a été élu par la noblesse langecine, libérant Linaëlle de ses obligations, qui entre nous, la rendait malheureuse. Depuis cette libération, je peux me consacrer pleinement au fief que je régente et à ma seigneurie. Il est donc grand temps de renouer les liens avec l’Estrévent.

Tout en effectuant ta tirade, tes mains habiles mais encore peu expérimentées au maniement d’objets culinaires contendants et encore moins aux fruits que l’on trouve dans cette région, s’étaient battues pour confectionner trois jus différents, composés chacun de trois fruits différents. La recette venait d’un natif qui faisait la jonction entre Ys et Chiard tous les deux mois pour vendre ses produits. Le fin gourmet était reconnu pour son savoir culinaire que certains disaient illimité. Cependant cette concoction t’a coûté une entaille dans la main lors de la découpe des produits. Tu reviens avec un plateau sur lequel reposaient trois verres comportant trois breuvages aux couleurs différentes. Ta main était entourée d’une serviette qui commençait à se décorer de rouge. Tu offris le premier verre à la Valériane en lui souhaitant le meilleur puis ton attention se reporta sur Cassiopée.

_ Comment se fait-il que ma vue ne vous effraye pas, messire de Missède ?


La question était inattendue et pour cause, tu l’avais fui dès lors que tes yeux se posèrent sur la Princesse Ysoise. Il est connu de tous que les engeances du démon que sont les Drows, sont haïs en Péninsule… à raison. La guerre contre le Puy n’a jamais cessé et de nombreux hommes ont perdu la vie face au péril Noirelfe. Pourtant tu te tenais là, devant elle, si peu désemparé. Question inattendue certes mais pas illégitime. La réponse n’était pas évidente à donner, tes mots se tournent et se retournent dans ton esprit avant que finalement, ton argumentaire fasse sens. Tu venais de t’asseoir quand elle posa la question et tu ne cachas point ta réflexion.

_ Le devrais-je ? Le temps semble suspendu durant quelques secondes volontairement accordées. Est-ce normal à vos yeux de craindre une personne qui ne vous a rien fait ?

Là encore la question avait pour but de faire réfléchir ton invitée. Calmement, lentement, tu lui sers un jus composé de plusieurs agrumes, au goût légèrement alcoolisé. Après quoi, tu te lèves afin de lui tendre la tasse, accompagné d’un sourire rassurant. De ceux que l’on offre à un enfant qui vient se confier à vous ou lors de la guérison d’un chagrin d’amour. Néanmoins, tu as conscience que la demi-drow… Disons plutôt, la demi-humaine, attendais une réponse. Une vraie réponse.

_ La vraie raison est toute bête ma Dame. Les exactions commises par le peuple Sombre remontent à trop loin. Je n’ai même pas vingt cinq ans et j’ai grandi dans une région paisible. Le peuple du Puy est un mythe que je n’ai jamais eu la « chance » de rencontrer. Pourquoi craindrai-je quelque chose que je ne connais pas ? Et puis quand bien même ce que l’on disait à leur sujet était vrai, je ne vois pas pourquoi ce serait à moi de craindre pour ma vie.


Après tout pourquoi est-ce que l'humain devrait-il toujours se sentir inférieur ? Faible ? Pathétique ? Après tout nous apprenons plus vite, nous sommes plus nombreux et plus créatifs et inventifs. Nous sommes l'espèce intelligente la plus adaptable ! Pourquoi devrions nous être craintifs ?  De plus il est toujours plus terrifiant de voir un Drow qu'une semi-humaine à la teinte grisâtre. En somme, la vue de Cassiopée n'était en rien une douleur quelconque ou une source d'appréhension, bien au contraire. Elle revêt une forme de noblesse et de hauteur. Une femme inatteignable qui pourtant n'hésite point à se fendre d'un rire cristallin et réconfortant. Définitivement, cette femme ne te laissas point indifférent.

_ Et puis Maître Desmoulins m’avait prévenu que vous n’étiez pas une sang mêlée comme les autres, sans entrer dans les détails. Disons que je fus moyennement surpris. De plus, si je puis me permettre tant que Linaëlle ne peut me sermonner… Tout votre être, de l’expression de votre visage à votre regard en passant par vos sourires effacent de loin mes à priori sur votre héritage. N’en ayez point honte Votre Altesse. C’est un atout pourvu que vous sachiez le maîtriser.
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeSam 7 Déc 2019 - 21:27


Maralina Irohivrah, Princesse Marchande du Conseil de Thaar et accessoirement responsable de la cité d’Uldal’Rhiz. Cette femme était d’une cinquantaine d’années sa cadette et malgré les relations commerciales existant entre les deux cités olyanes, Cassiopée détestait ce qui avait fait la renommée de Maralina : la traite des esclaves.

Il n’y avait pas plus opposé que Maralina et Cassiopée. Si la première venait d’une riche famille connue pour son contrôle sur les esclaves, l’autre était née dans un quartier populaire de Thaar, dans une famille de prêteurs-sur-gages. Si la première était une semi-elfe, portée aux nues par son noble héritage, la seconde était une sang-clair parmi les Doebens. Si la première avait fait de l’exploitation de la misère humaine son propre fond de commerce, l’autre cherchait à faire prospérer sa cité et ses gens.

Les deux femmes n’étaient jamais entrées en confrontation directe. Elles avaient chacune mieux à faire de leur existence. Tout au plus se contentaient-elles des formalités d’usages par missives interposées. Dès lors qu’il s’agissait de commerce – sauf celui des esclaves – Cassiopée savait mettre ses sentiments de côté et rester pragmatique.

Ainsi donc, le seigneur de Missède avait déjà rencontré sa « consoeur ». Il ne semblait pas en garder un excellent souvenir. Etonnant … Elle se décida à ne pas le questionner plus avant sur cette rencontre. Elle n’avait aucune intrigue en cours contre Maralina et ne souhaitait pas que la conversation qui avait si bien commencé ne tourne autour d’elle.

Gaël de Laval n’était pas avare de paroles. Les formalités d’usage imposaient que les compliments et les gages de bonne volonté fusent durant les premières minutes de l’échange. Il fut question des relations entre Ys et la Péninsule avant l’ère des dragons. Il n’avait pas tort. Toutes les cités estreventines avaient largement perdu une part non négligable de leur commerce extérieur depuis la chute de Nelen et la rupture des routes commerciales. Tout restait à réinventer et le territoire de chasse des dragons étant une donnée incertaine jusqu’alors, il était difficile de trouver une route à la fois sûre et rapide vers la Péninsule. L’essentiel des ports commerçant avec l’Ithri’Vaan se trouvaient alors dans le sud de la Péninsule, notamment en Scylla. Dans la mesure où les ports du Nord et du Médian n’étaient pas si développés, il n’y avait aucun intérêt à développer les routes commerciales au-delà de Naélis.

La situation avait cependant changé avec l’apparition des dragons et les ports du Nord tels qu’Isgard par exemple, devenaient des plateformes commerciales pleines de potentiels pour peu que des armateurs et des transporteurs eussent assez de courage pour faire le trajet. Ys étant un ancien domaine péninsulaire appartenant aux Clary, la cité avait durant des décennies eu des liens forts avec les duchés du sud de la Péninsule. Il était grand temps de développer ces relations plus au nord.

Il marquait donc un point lorsqu’il évoquait l’enjeu d’un partenariat. Elle conserva néanmoins le silence, préférant ne pas répéter à voix haute ce que tous deux avaient bel et bien compris. Et sa réponse quant à son héritage drow ne fit que lui confirmer ce qu’elle pensait de lui. C’était le partenaire commercial idéal en plus d’être un homme respectable. Elle sourit aux réponses du seigneur péninsulaire concernant son héritage drow. Non seulement, l’homme était doté d’un bel esprit, mais en plus il savait s’y prendre en matière de compliments. Décidément, cette journée s’annonçait plus qu’agréable.

Elle porta à ses lèvres le fameux jus de fruits. C’était doux …

Mais trêve de plaisanteries, il était temps de passer au cœur du sujet. Elle but la moitié du jus et le reposa sur la table, remarquant au passage qu’il s’était coupé. Maladroit ? Il n’avait peut être pas l’habitude de cuisiner pour les autres …


« Bien … maintenant que nous avons fait plus ample connaissance et si nous attaquions le vif du sujet ? Que voulez-vous me proposer exactement et dans quelle mesure puis-je vous satisfaire ?»
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeDim 8 Déc 2019 - 11:51

_ Bien … maintenant que nous avons fait plus ample connaissance et si nous attaquions le vif du sujet ? Que voulez-vous me proposer exactement et dans quelle mesure puis-je vous satisfaire ?

Tu lui offres un sourire avant de te saisir de ton verre. Durant quelques secondes, tu le goûtes, dégustant chaque gorgée comme si c’était la dernière. Un moyen comme un autre de mettre les idées en ordre pour se lancer dans le coeur du sujet : la négociation. Tu sais où aller et par quel moyen y aller. Encore fallait-il que la Princesse marchande soit patiente et qu’aucune objection ne vienne troubler ton raisonnement. Tu reposes ton verre et tu t’avances sur ta chaise pour plonger ton regard bleuté dans le sien.

_ Il n’y a pas si longtemps, un baron missédois a flairé l’opportunité que représentait un port dans le Nord de la Péninsule. Profitant d’un delta, il créa un petit port qui devait être le fer de lance de notre commerce avec les marquisats du nord et Naelis. Ce port se nomme Isgaard. Hélas à l’issue de la dernière guerre, ce port nous a été enlevé.

Tout en débitant, tes mains se mouvaient. Elle racontaient une histoire, tout ton être était dans le moment présent, chaque mot fût pesé, réfléchit et prononcé de telle sorte qu’il soit décisif. Chaque intonation était réfléchie et ton regard ne faiblissait pas. Cette entrevue était cruciale pour relancer l’économie missédoise et tu ne comptais pas la rater. D’un accord pouvait naître une véritable amitié entre les deux fiefs mais surtout, entre les deux protagonistes du moment. Et c’est bien ça qui est prioritaire à tes yeux, une amitié durable donnant lieu à des échanges réfléchis.

_ Je ne suis pas stupide, c’est le seul port viable entre Naelis et Chiard. Il bénéficie de l’incursion des dragons. Mais vous non plus n’êtes pas stupide. Un port aménagé depuis moins de deux décennies n’est pas encore fiable. Il a du potentiel certes, mais il reste uniquement un lieu de mouillage en eau profonde pour vos navires. Leurs marchands, malgré la meilleure volonté du monde, sont pauvres et leur flotte commerciale reste… en deçà de ce qui est attendu.


A un moment il fallait être réaliste, un port ne se construit pas en une journée. Il a fallu un siècle à Beaurivages pour concurrencer Chiard et des investissements encore jamais vus. A cette époque, sans port viable, c’était la seigneurie qui était menacée. Il a fallu investir la moindre piécette dans la moindre infrastructure pour attirer les marchands étrangers. Alors ce n’est pas un petit port mal géré qui allait couler des routes commerciales générant des sommes folles. Et puis après tout Missède est sur la route d’Or, une voie commerciale générant bien plus que tous les fiefs nordiens réunis.

_ Une âme avisée aurait tout intérêt à investir dans ce port. Mais c’est là que cela bloque. Connaissez-vous les Nordiens Votre Altesse ? Ces Wandrais tout juste civilisés qui vivent dans des huttes en terre séchée n’ont aucune notion de ce qu’est le commerce, vous investissez chez eux en espérant des retours et quand ils n’ont plus besoin de votre argent, ils se saisissent de vos biens sur leurs terres et vont voir votre concurrent.

Ah, ces satanés Nordiens. Avec leur accent rocque, aussi incompréhensible qu’un Nain. Les relations commerciales, l’argent, les intérêts, les investissements, tout ça c’est trop compliqué pour ces attardés. Tout ce qu’ils voient c’est comment s’accaparer les biens d’autrui. Voyez plutôt, Missède investit et travaille à créer un port, ET BIM, ils le volent. Le Nordien ne créer pas de richesse, il taxe celle des autres.

_ Comme vous pouvez l’imaginer, nous n’aimons pas vraiment nos lointains voisins du nord et de vous à moi, je préfère acheter mon grain en Estrévent plutôt que par chez eux. Les alentours de l'Olya sont fertile m'a t-on dit...

Ton argent est bien mieux dans les poches d’estréventins pacifistes plutôt qu’échangé contre des armes. Ces barbares bellicistes seraient bien capables de déclarer une guerre pour financer leur propre décadence. Il était facile de comprendre par tes mots et la lueur dans tes yeux que la simple existence de ce beau monde à la frontière wandraise n’était pas la meilleure chose qui te soit arrivée.

_ Suis-je présentement en train de discréditer mes concurrents pour m’attirer vos bonnes grâces ? Je ne vous ferais point outrage de le nier et je vous laisse seule juge de mes paroles. Si je suis ici c’est parce que je me suis battu depuis six ans pour que les relations commerciales entre Ys et ma seigneurie soient profitables. J’ai investi par chez vous en envoyant des marchands afin qu’ils s’implantent et qu’ils vendent nos produits… Et qu’ils nous vendent les vôtres. Au jour d’aujourd’hui même si nous n’avons pas un accord profitable et rédigé, nos marchands continuent leurs échanges bien que ceux-ci soient moins rentables et plus difficiles.


A l’époque, tu exigeais les « clés d’Ys », ces clés qui se résumaient à avoir accès au nœud de flux de la ville marchande. C’était chose faite. Jusqu’à l’arrivée des dragons, Ys et Thaar étaient les premiers clients et fournisseurs de Missède et tu comptes bien ne pas les perdre. Tu prends de nouveau le temps de déguster le verre de jus avant de revenir à ton interlocutrice.

_ Maître Desmoulins m’a parlé de votre compagnie. Il semblerait que nos flottes vendent plus ou moins le même service même si la part de la vôtre est plus importante. Du cabotage. Seul un ignare cracherait sur cette tactique. Ne dit-on pas que l’homme riche n’est pas celui qui creuse à la recherche d’or mais celui qui vend la pioche ?

Tu attendais une réaction de la part de la sang-clair, un sourire aux lèvres. Tu t’étais lancé dans le cabotage alors que Linaëlle était encore à la tête de Langehack, une stratégie afin d’imposer tes marchands dans des ports dans lesquels il n’y a rien à acheter ni à vendre… Pour le moment il n’y avait aucun monopole, simplement des services vendus dans les ports soltarri et langecins. L’objectif était bel et bien d’investir massivement les ports suderons avant de s’attaquer aux ports nordiens bien moins âpres à conquérir.

_ J’aimerai vous proposer un accord qui je l’espère, conduira à d’autres. Vous cabotez et je cabote. Alors cabotons ensemble en bonne intelligence. Il y a trop de ports pour que l’un de nous parvienne un jour à établir un inflexible monopole, pourquoi ne pas travailler de concert ? Missède se chargeant de caboter dans les ports péninsulaires et Ys dans les ports estréventins. Chiard et Ys seraient alors les deux seuls ports à bénéficier des marchandises des deux bords. Nous vous apportons les marchandises péninsulaires à vendre en Ithri'vaan, vous nous apportez les marchandises estréventines à vendre en Péninsule et l’un comme l’autre, nous écoulons nos produits. Les marchands n’auront plus qu’à négocier les pourcentages et commissions de chacun en fonction d’un plafond à fixer.

L’idée était simple. Au lieu de s’attaquer à un marché incroyablement grand, autant le diviser en deux et cibler une partie tout en bénéficiant d’une commission sur l’autre. Un bon moyen d’établir des monopoles, port par port et de ne pas distiller sa flotte. Chacun peut alors confier à l’autre la vente de ses produits contre une commission. Avoir des retours sans effort sur le marché péninsulaire tout en investissant toute la marine en Estrévent et vice versa.


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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeLun 9 Déc 2019 - 0:32


Les seigneurs péninsulaires étaient encore pires que les Princes-Marchands d’Ithri’Vaan quand il s’agissait de luttes de pouvoir. Leurs querelles incessantes nuisaient considérablement au commerce et apprendre qu’Isgaard, avec qui elle commerçait, était autrefois une possession missédoise était … intéressant. Voir le Missédois cracher sur les Nordiens après avoir été si agréable il y a quelques minutes était déplaisant. Si Cassiopée n’avait pas eu un bon accueil de la part de Gaubert d’Odélian, il n’en restait pas moins qu’il était un partenaire commercial sérieux et les convenances voulaient que l’on ne poignarde pas un allié dans le dos. Il en allait de sa réputation.

Elle le laissa déblatérer sans laisser paraître son agacement. S’il avait besoin de se découvrir et de vider son sac, tant pis pour lui. Chaque information révélée était un outil de plus pour la Princesse Marchande, qui n’hésiterait pas à les retourner contre son interlocuteur dans l’optique d’une négociation.

En plus, l’homme ne se cachait pas de cracher sur ses voisins pour plaider sa cause. Il en semblait fier en plus. Devait-on attribuer ce comportement à sa jeunesse ou était-il trop imprudent ? Cassiopée ne put que hausser un sourcil. C’était étonnant de le voir ainsi paraître aussi présomptueux alors qu’il avait été des plus agréables jusqu’à présent.

Ceci dit, malgré sa faiblesse rhétorique manifeste en cet instant, ce qu’il proposait n’était pas dénué d’intérêt pour la directrice de la Compagnie Olyane. Restait simplement à savoir jusqu’où elle pouvait faire pencher la balance en sa faveur. Si elle avait accordé au seigneur d’Odélian de ne pas s’attaquer au marché de Seram, qui n’avait finalement que peu d’intérêt au regard de sa situation géographique, elle convoitait toujours sa part du butin à Sharas et l’opportunité de pouvoir ouvrir une ligne commerciale à Chiard lui permettrait d’avoir la mainmise sur un triangle de ports commerciaux qui serait d’une grande aide à l’avenir.
 

« Celui qui vend la pioche ne la vendra qu’une fois. En revanche, si vous investissez aussi bien dans la confection de pioches que dans les opérations de minage, vous êtes gagnants sur tous les tableaux … »

La réponse de Cassiopée était claire, mais peu enjouée. Ce genre d’expressions qui semblaient pleines de bon sens ne l’étaient en vérité absolument pas. Elle joignit les mains et prit la parole.

« Je comprends parfaitement l’intérêt d’officialiser un tel accord, d’autant qu’il a déjà cours. Les marchands péninsulaires de Missède ont toujours été les bienvenus à Ys et continueront à l’être. Cependant, il m’apparait nécessaire d’approfondir cet échange de bons procédés en rajoutant de nouvelles données dans la balance… »

Cassiopée continua à boire son jus puis reprit :

« Si nous voulons continuer à commercer en bonne intelligence, nous allons avoir besoin d’ouvrir nos bureaux à Chiard et d’y installer nos entrepôts. Nous aurons aussi besoin d’une zone de mouillage particulière pour nos navires ainsi que l’assurance que cette zone nous soit dédiée. Nous allons aussi envoyer des gens de notre guilde d’armateurs pour y bâtir des navires dans votre port. Nous sommes preneurs du bois et du fer que vous pourrez nous fournir à bon prix pour ces projets. »

Ça c’était pour la Compagnie Olyane. Cassiopée avait besoin de sécuriser dans chaque port de la Péninsule une zone de fret, mais aussi une zone pour créer des navires avec du bois local. Ys disposait certes de bois, mais il était plus stratégique de recourir au bois des autres, d’autant que les Péninsulaires le coupait plus rapidement et le vendaient à un meilleur prix qu’en Ithri’Vaan. Quant au fer … elle en avait besoin. Le monopole des métaux était détenu par la Corporation d’Argent et la Princesse Marchande la dirigeant pouvait, selon son bon vouloir, couper l’approvisionnement.

« Quant aux relations diplomatiques entre nos deux cités, je puis vous assurer qu’elles resteront au beau fixe tant que le commerce sera fructueux entre nous deux. De plus, si nous coopérons tous deux dans la modernisation de nos ports respectifs, la prospérité de nos deux cités sera assurée et nos deux populations n’auront plus aucun mal à échanger. Cela supposera l’envoi régulier de délégations afin que nos deux peuples puissent apprendre l’un de l’autre, peut être par l’établissement d’une université … Je soumettrai l’idée aux deux Conseils. »

Il y avait un intérêt tout particulier à faire que ce partenariat commercial ne soit pas qu’un simple échange de matériaux et de produits. Ys était une cité cosmopolite qui avait bénéficié aussi bien de ses racines nisétiennes que de son rapprochement avec la culture estreventine que de son passé en tant que possession péninsulaire. Si la cité n’était pas aussi grande que Thaar, elle était au moins tout aussi multiculturelle et il existait un attrait des Yssiens pour la culture péninsulaire, d’autant que la majeure partie de la population vénérait le culte pentien.

Il devenait donc possible d’organiser des échanges entre les représentants des deux populations, notamment sur le plan intellectuel et technologique. Mais cela nécessiterait un travail plus approfondi avec les commissions des deux Conseils … Pourquoi ne pas développer l’éducation et la bibliothèque de la cité ? Il y avait un coup à jouer avec le seigneur de Missède qui dépassait de loin les accords commerciaux et qui pouvait s’avérer bénéfique pour tous.

« Je résume donc. Etablissement officiel de la route commerciale entre Ys et Chiard, installation d’une antenne de la Compagnie Olyane dans votre port pour le fret et la construction de navires et développement des relations diplomatiques entre nos deux cités. Cela me semble une proposition honnête. »
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeMer 18 Déc 2019 - 12:58

Il est, dans tout pays, des tensions entre différentes peuplades. Certaines sont riches et enviées, d’autres assument des pratiques différentes de l’ordre établi, d’autres encore, vénèrent des dieux que l’on ne saurait tolérer. Partout sur cette terre, peuples aux croyances diverses s’opposent et s’affrontent, collaborent et prospèrent. De l’opposition découle parfois l’harmonie et de l’harmonie peut découler l’opposition. En ces bonnes terres de Péninsule, les hommes sont unis sous la couronne des Fiiram depuis bien des siècles mais cette unité n’est qu’une façade. Les barons complotant contre les ducs et les seigneurs se mariant entre eux pour évincer un voisin, voilà un beau tableau de la vassalité. Chaque terre et chaque ville est un gage de puissance qui cherche à vivre ou plutôt survivre indépendamment et pourtant, des liens nécessaires doivent être tissés.

Quel beau parleur tu fais, à hurler ainsi ta haine viscérale contre le Nordien. Cet être froid, belliqueux, menaçant. Nul Sudéron ou Médianais n’éprouve plus d’aversion pour ce peuple que toi et pourtant… ne faut-il pas travailler en bonne intelligence pour le bien du Royaume ? Un sentiment éprouvé des suites des récentes guerres, de la victoire qui fût la leur et qui priva Missède de sa paix et de ses terres. Toute stratégie est bonne pour discréditer un adversaire et si un étranger voyait la Péninsule comme un pays, c’est que l’ignorance s’est emparée de lui. Alonna, Odélian ou Saint-Berthilde sont autant de menaces à surveiller.

La Princesse répondit à ta proposition. Elle en demandait beaucoup. Ce n’était pas surprenant, la négociation est souvent ardue, plus encore quand on traverse l’Olienne. Mais certaines de ses exigences peuvent être facilement déroutées quand d’autres sont acceptables et ne nécessiteront aucune attaque.

_ Honnête certes, je le conçois mais néanmoins un peu dure ne trouvez-vous pas ?

Tu lui souris avant de lever les yeux tout en te gratouillant le bout du nez. Tu te mis à réfléchir, ou plutôt à feindre la réflexion car tes pensées sont d’ores et déjà en ordre dans ton esprit. Tu te mis à la lister les éléments à haute voix tout en les comptant sur tes doigts.

_ Premièrement vous souhaitez installer des entrepôts de la compagnie Olyane à Chiard. Ce ne sera pas bien compliqué. Puis, vous désirez une zone de mouillage… permanente si je ne m’abuse ? Hum, soit. Et enfin, vous me demandez la permission de construire des navires avec vos armateurs dans ce port avec nos ressources vendues à un prix intéressant. Est-ce bien cela ?

Cela pouvait faire beaucoup. Même si l’idée ne trouve aucune hostilité en toi, ce sont les détails qui restent durs. Mais c’est aussi là le jeu de la négociation non ? Commencer en demandant beaucoup et descendre peu à peu jusqu’à trouver le juste milieu. Tu ne préfères pas donner ton avis, préférant laisser le doute planer et offrir à Cassiopée un second tir. Le prendre est risqué car cela pourrait passer pour un compromis et une marque de faiblesse dans cette guerre rhétorique. Mais laisser la main à son opposant c’est aussi lui offrir l’opportunité de trancher avec sa propre vision des choses. Le cri du cœur qui dérouta la princesse ysoise pouvait sembler puéril et Néera sait à quel point il l’était. Mais l’objectif est néanmoins atteint. Passons à la partie la plus facile, celle où les deux parties sont d’accords.

_ Je suis favorable à un envoi mensuel d’une délégation composée de marchands, d’universitaires et d’émissaires, de sorte que nos envoyés communs puissent débattre entre eux de façon intelligente, sans dépasser les lignes rouges que nous aurons fixées conjointement. De plus, je soutiens tout autant votre idée de créer tout aussi conjointement une université. Missède possède une bibliothèque renfermant tous les trésors de notre Royaume et les savoirs de nombre d’hommes lettrés. Ensemble et via cette université, nous pourrons étendre le Savoir de chaque côté de l’Olienne et renforcer les liens scientifiques et littéraires de nos contrées.

La partie diplomatique et scientifique étaient de loin favorable aux deux camps sans en léser aucun. Développer les relations diplomatiques ne pouvait qu’être positif. Nombre de déconvenues pourraient ainsi être empêchées et tout conflit entre marchands pourrait directement être résolu à la base sans passer par la noblesse dirigeante. La partie scientifique est tout aussi intéressante. Reliée une université à la bibliothèque permettrait à la fois de l’enrichir mais aussi de distribuer ces savoirs et de former une élite à la fois estréventine et péninsulaire resserrant les liens entre les deux cultures. Malgré ces deux points fort positifs, tu restais perplexe sur la partie commerciale.

Spoiler:


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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeJeu 19 Déc 2019 - 23:16


« L’un et l’autre ne sont pas nécessairement incompatibles, lâcha-t-elle dans un sourire. »

Elle massa sa main droite consciencieusement avant de reprendre d’une voix claire.


« C’est tout à fait cela. Bien sûr, nous sommes conscients du prix du bois et des métaux et comme nous sommes des gens honnêtes, nous les achèterons au prix qui vous semblera raisonnable. Cela va de soi. Construire dans votre port nous permettra surtout d’éviter les surcoûts liés au transport et vous permettra d’utiliser votre propre flotte sur d’autres projets. »

C’était une offre des plus raisonnables. De cette façon, aucune des deux parties ne serait lésée. Le commerce continuerait de plus belle entre les deux contrées et la Compagnie Olyane pourrait facilement diversifier ses chantiers navaux dans d’autres territoires. Cela éviterait de maintenir une flotte au même endroit, à un moment où Cassiopée avait besoin de faire très attention à ne pas trop concentrer ses ressources. Moins on mettait d’œufs dans le même panier, mieux c’était.

Elle n’avait pas l’intention de tordre le bras au Péninsulaire, mais il fallait qu’elle marque le fait qu’elle n’était pas née de la dernière pluie. Elle représentait une cité et ne pouvait se permettre de montrer un côté trop doux dans les négociations. Il y avait des intérêts qui dépassaient sa propre personne et elle se devait de les représenter.

Quant à la proposition plus … culturelle dira-t-on, elle était particulièrement contente de voir que Gaël de Laval était un homme plus enclin à des discussions spirituelles que ne l’était Gaubert d’Odélian. Les deux hommes étaient comme le jour et la nuit … Et même si le partenariat avec Isgaard était des plus juteux, il y avait une très belle opportunité à partager plus qu’un accord commercial avec les Missédois. Elle était ravie de voir que cela ne tombait pas dans l’oreille d’un sourd !


« Cela serait un véritable plaisir que de recevoir des lettrés de la Péninsule chez nous. Nous saurons convenablement les traiter, sur la base d’un projet qu’il nous faudra définir en amont, cela va de soi. Nous mettrons à disposition les ouvrages de nos bibliothèques ainsi que nos amphithéâtres pour vos gens, si toutefois les instances dirigeantes de la ville acceptent de valider ce projet, ce dont je ne doute pas. »

Les discussions avec les instances d’Ys promettaient d’être enrichissantes. Elle n’avait aucun doute sur le fait que les citoyens acceptent un tel projet. Les Vaanis étaient ouvert à la nouveauté et les plus vieux d’entre eux n’avaient pas oublié leurs racines péninsulaires et se montraient généralement friands de ce genre de projets.

La Princesse Marchande se détendit et s’étira en souriant.

« Y-a-t-il autre chose que je puisse faire pour vous messire de Laval ? »

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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeJeu 26 Déc 2019 - 11:01

_ L’un et l’autre ne sont pas nécessairement incompatibles.

Tu souris. Elle semble s’accrocher à sa proposition. Tu n’en attendais pas moins. Il allait falloir avancer ses pions et ses arguments afin de rendre ses exigences plus… faciles à combler. Tu termines ton verre et le repose sur la table. La compagne de Cassiopée n’avait point bougé et la rue commençait à s’animer comme si l’heure de la prière s’était terminée il y a peu. Tu ne dis rien, feignant une fois de plus la réflexion.

_ C’est tout à fait cela. Bien sûr, nous sommes conscients du prix du bois et des métaux et comme nous sommes des gens honnêtes, nous les achèterons au prix qui vous semblera raisonnable. Cela va de soi. Construire dans votre port nous permettra surtout d’éviter les surcoûts liés au transport et vous permettra d’utiliser votre propre flotte sur d’autres projets.
_ Je vous propose une autre option qui, sans vous mentir, serait plus facile à mettre en œuvre de mon côté.


Tu te prépares à te re-lancer dans l’arène. Une inspiration, une main dans les cheveux pour rabattre une mèche et tu t’y mets.

_ J’accepte la construction d’entrepôts sur mes terres, dans le port de Chiard uniquement. Ces entrepôts devront respecter les lois en vigueur afin d’être protégés par celles-ci. C’est une évidence. La zone de mouillage en revanche, posera des problèmes. L’idée même de monopoliser une zone à temps plein entraînera des pertes. Je propose que des heures soient soumises, des heures durant lesquelles vos navires n’auront point à attendre. Chiard reste un des ports les plus imposant du Royaume, même si un de vos navires arrive à l’improviste, il n’aura point à attendre longtemps pour pouvoir s’amarrer. Enfin la construction de navires… C’est ici que cela bloque.

Les entrepôts sont arrangeants. Ce sont des investissements à l’étranger qui, à l’image de n’importe quel entrepôt, sera un nouveau bien fiscalement intéressant aux coûts nuls. La zone de mouillage était de suite bien plus complexe. Même en tant que seigneur souverain de tes terres, tu ne peux imposer toutes tes décisions aussi éclairées soient-elles. Les bourgeois rivegeois verraient d’un très mauvais œil une telle décision et les pertes seraient trop grandes. Mais les deux points ne sont rien par rapport au dernier.

_ Les armateurs verront d’un très mauvais œil la venue de vos hommes, construisant dans leurs ateliers. En revanche nous pouvons produire des navires pour vous et vous les vendre à des prix honnêtes. De plus, si c’est de la matière première qui vous manque pour en construire à Ys, nous pouvons vous en vendre à un prix compétitif si vous acceptez de compter sur nos artisans pour réaliser vos navires.

Seul le marquis de Langehack peut exiger une telle chose et même lui ne l’avait osé. En l’état, il t’était tout simplement impossible d’accepter une telle demande. Envoyer des Estréventins utiliser les outils et les infrastructures rivegeoises ou amenant les leurs… C’est la révolution assurée ! Si ce sont des navires que Cassiopée souhaite, elle pourra en avoir. Mais achevés et confectionnés par les instances compétentes du Rivage. Venir chez les gens, leur voler leur travail n’est pas bon à la longue…

_ Enfin, j’aimerai poser une condition. Avec l’arrivée des dragons, deux guildes ont été créées. Elles assurent un remboursement partiel des éventuelles pertes terrestres et maritimes. Une assurance en quelque sorte. J’aimerai que la Compagnie Olyane travaille avec eux. Cela fera moins de coûts pour vous ainsi qu’une meilleure implantation dans la région et de nouveaux marchés et nouvelles opportunités pour eux. Qu’en pensez-vous ?

La Princesse marchande avait beaucoup d’exigences, trois en fait. Même si celles-ci ne sont en rien exceptionnelles, elles t’offrent néanmoins le droit et l’opportunité de faire de même. Mais au lieu d’aligner une liste de demandes, tu te contentes d’une seule. Si les deux sociétés se développent sous la coupe de la Compagnie Ysoise, leurs recettes devraient bien augmenter et par conséquence, les impôts perçus devraient aller croissants.

_ Cela serait un véritable plaisir que de recevoir des lettrés de la Péninsule chez nous. Nous saurons convenablement les traiter, sur la base d’un projet qu’il nous faudra définir en amont, cela va de soi. Nous mettrons à disposition les ouvrages de nos bibliothèques ainsi que nos amphithéâtres pour vos gens, si toutefois les instances dirigeantes de la ville acceptent de valider ce projet, ce dont je ne doute pas.

Cet accord purement culturel et intellectuel est une aubaine. Un bon moyen d’agrandir la bibliothèque de Missède mais aussi de préserver un climat de paix et de confiance entre les deux territoires. Tu n’as jamais considéré l’Estrévent comme une zone de conquête ou un ennemi, même commercial. Tout au contraire, l’Est à toujours semblé être un pays plein de promesses et d’opportunités, opportunités qu’il fallait oser saisir. Ce jour-ci pouvait bien en être une.

_ Y-a-t-il autre chose que je puisse faire pour vous messire de Laval ?


Tu réfléchis quelques secondes, levant les yeux au ciel. Mais il semblait que tout avait été dit. Tout… Pour le moment ! L’accroche est bonne, tu en es certain. Il ne restait plus qu’à développer une relation de confiance entre les deux êtres infiniment complexes et simple à la fois que vous êtes.

_ Si mes retouches sur notre négociation commerciale vous conviennent, nous pourrions aller danser pour fêter cela ? A moins que vous ayez trop de travail ?

Tu oses le clin d’œil combiné au rictus. Une joyeuse plaisanterie innocente et sans arrières pensées te permettant de quitter -quelques instants- la joute argumentaire de la négociation. Tu lèves ton verre vide, incitant Cassiopée par le geste à reprendre un peu de jus avant de se laisser aller à l’amusement. Un rapprochement avant tout personnel entre les deux dirigeants, loin de ces manœuvres politiques qu’ils doivent pourtant assumer.


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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeVen 27 Déc 2019 - 0:33


La jeune femme resta pensive. Ce n’était pas une mauvaise chose que de faire l’alternance des zones de mouillage. Il n’y avait aucun mal à partager ces zones. De toute façon, cela n’impacterait pas sur son commerce. Il suffirait de s’organiser pour le trafic maritime, mais ça, ce n’était pas de son ressort, mais de celui de ses collègues. Il fallait simplement veiller à ce qu’il n’y ait pas d’embouteillage, ce qui était peu probable.

« Fort bien, cela me semble convenable pour la zone de mouillage. Mon idée n’était pas de parasiter votre commerce, mais de m’assurer qu’il y ait une place disponible pour mes navires. Concernant les entrepôts, il va de soi que nous nous soumettons aux lois péninsulaires et plus spécifiquement aux vôtres. Il en va de notre réputation et de notre éthique concernant la transparence. »

Ce n’était pas une mauvaise affaire. Cela éviterait à Cassiopée d’avoir à renforcer la sécurité autour des entrepôts si ces derniers étaient protégés par le seigneur lui-même. Du moins, ça légitimerait sa présence aux yeux de ses suivants. S’il n’y avait pas de doute sur les intentions du sieur de Laval, il était peu probable que l’intégralité de ses suivants fasse le dos rond quant à cette nouvelle association entre les Estreventins et leur seigneur-lige.

« Concernant les armateurs, je ne vois aucun souci à vous acheter des navires à bon prix, si en contrepartie, le bois que vous produisez nous revient moins cher à l’importation. Cela me semble acceptable comme arrangement. »

Cassiopée savait être arrangeante. De toute façon, cet accord commercial lui était profitable sur de nombreux tableaux, sans être défavorable au comté de Gaël de Laval. L’avantage de la coopération, c’est qu’elle était profitable aux deux parties et la Protectrice d’Ys n’était pas femme à s’offusquer quand il s’agissait de négocier sur ce genre de sujets, pour peu que les deux parties en ressortent contentes.

En revanche … la dernière condition de son interlocuteur la gênait particulièrement.


« Je ne peux malheureusement pas agréer à votre dernière condition, du moins, pas selon la manière dont vous l’avez formulé. Il va nous falloir un peu plus de temps et surtout l’assurance que notre coopération est fructueuse avant que je songe à lier mon entreprise avec une guilde dont j’entends parler pour la première fois et dont je ne connais ni le fonctionnement, ni les stratégies. Restons-en à quelque chose de simple : vous assurez vos marchandises, nous assurons les nôtres. »

Elle ne pouvait pas ouvrir ses bras à toutes les offres. Non seulement cette offre venait comme un cheveu sur la soupe, mais en plus, elle constituait un risque pour la Compagnie Olyane, mais aussi pour Gaël de Laval. La demi-drow n’hésiterait pas un seul instant à s’emparer de la fameuse guilde dont parlait le seigneur si d’aventure, cela s’avérait profitable pour elle. Cela pouvait aussi constituer un risque considérable si cette guilde se révélait totalement archaïque. C’était donc un veto de la part de la maître-alchimiste.

La demoiselle lui sourit. Mis à part ce dernier point, elle était prête à conclure l’accord.

« Je serai ravie d’aller danser avec vous, si toutefois le dernier point vous semble acceptable. »

Elle se leva, peut être pour forcer un peu la main au seigneur … et lui faire comprendre que négocier plus avant ne serait pas possible avant que le partenariat ne porte ses premiers fruits. Mis à part ça, elle était effectivement ravie de pouvoir aller danser ...
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeVen 3 Jan 2020 - 13:23

La négociation arrivait à son terme, les derniers détails seront réglés de guildes à guildes. L’objectif premier de ta venue est donc mené à son terme, il est grand temps d’entrer dans la seconde phase : une discussion purement personnelle. L’idée est réjouissante en deux sens. Tout d’abord la femme face à toi semble profondément attachée à cette ville et dégage une certaine bonté qui ne te laisse pas indifférent. Ensuite, de par sa condition, Cassiopée t’intrigue. Les Sombres, on en parle à tout va mais on oublie parfois les sangs mêlés. La bête monstrueuse des livres pour enfants s’efface à la vue de la Princesse Marchande pour ne représenter que douceur et volupté.

_ Concernant les armateurs, je ne vois aucun souci à vous acheter des navires à bon prix, si en contrepartie, le bois que vous produisez nous revient moins cher à l’importation. Cela me semble acceptable comme arrangement.

Voilà un bon moyen de redynamiser et d’agrandir l’arsenal de Chiard. Un des plus gros contrats que les armateurs rivegeois ne signeront pas deux fois… Tu acquiesce et offre un sourire à ton interlocutrice avant de répondre sur un ton tout aussi enjoué.

_ Vos marchands feront connaître ces conditions aux miens afin que nous puissions vous satisfaire au mieux ma Dame.

Tu clignes longuement des yeux, la perspective commerciale semblait enrichissante à tous les étages ! Reste ta proposition, ta petite exigence. Une cerise sur un gâteau déjà bien volumineux. Un bluff diraient certains. Pourquoi pas après tout ? la vie est si courte, autant tenter et succomber au risque !

_ Je serai ravie d’aller danser avec vous, si toutefois le dernier point vous semble acceptable.

Elle se leva. La négociation est terminée. Zut ! Trop gourmand ? Peut-être… Au moins auras-tu essayé. Rien de fâcheux en soi, peut être une légère déception dans tes pupilles. Alors soit, n’allons pas plus loin. Beaucoup a déjà été fait aujourd’hui et tu espères que cette entrevue sera bénéfique pour tous sur le long terme.

_ Très bien, je cède sous vos arguments ! Je suis déjà ravi de la tournure qu’a prit notre échange. Désormais, et si vous me le permettez, j’aimerai apprendre à vous connaître en tant que personne. Laissons politique et économie derrière nous quelques heures et parlons rêves et passions voulez-vous ?

Tu l’imites. Une fois debout, sur tes gambettes, tu regroupes les verres au centre de la table puis tu reportes ton attention sur Cassiopée. Ta main droite vient remettre de l’ordre dans tes cheveux blonds, se jetant à l’assaut d’une innocente mèche pour lui voler sa liberté et la faire rentrer dans le rang.

_ Mais avant cela, allons-nous divertir ! Vous connaissez cette ville comme je connais mon château alors soyez ma guide et par Néera, ne me perdez pas ! Je ne tiens pas à trépasser par manque d’hydratation !

Tu laisses s’envoler un rire léger, de ceux que l’on libère quelques secondes avant de reprendre le contrôle. Tu te diriges vers la porte et l’entrouvre pour laisser passer la maîtresse d’Ys et sa suivante. Une fois ce seuil franchit, te voici abandonné au bon vouloir de l’orientation féminine…


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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeDim 5 Jan 2020 - 20:46


LES PROMENADES SUSPENDUES


         


« Et bien si plus rien ne nous retient ici, suivez-moi. »

Cassiopée fit un rapide signe à La Valériane, qui rangea avec hâte ses affaires tandis que la sang-clair la rejoignait. La Princesse d’Ys murmura quelques mots à son adresse et lui prit discrètement les mains avant qu’elle ne s’excuse auprès de Gaël.

« Messire de Laval, ce fut un plaisir. »

La Valériane s’éclipsa. Elle était toujours avare de mots, mais le pincement de ses doigts sur les siens ne mentait pas. Une simple pression et elle lui confirmait qu’elle pouvait faire confiance au Péninsulaire. Cela suffisait amplement à Cassiopée : le silence de La Valériane valait autant que ses mots.

Une fois Gaël et Cassiopée seuls, cette dernière se retourna vers le Péninsulaire et l’enjoint à le suivre :


« Après vous messire. Je connais un endroit où nous pourrons danser. »


__________________oOo__________________


Les rues d’Ys étaient bien animées en cette journée. C’était une situation ordinaire dans la cité : le contraire eut été étonnant. Il n’y avait que dans le quartier des Péninsulaires que l’activité cessait au moment de la messe. En revanche, du côté des Yssois, la religion était une affaire privée et elle n’empiétait pas sur les affaires. Après tout, le commerce était la force motrice des cités estreventines …

La Protectrice d’Ys avançait d’un pas rapide et enjoué au travers des rues colorées de la cité estreventine. Les étals étaient toujours autant garnis et les commerces prospéraient avec aise, malgré l’éloignement avec l’Agora. C’était une bonne chose. Il ne fallait pas concentrer toute l’activité marchande dans un même endroit.

Cassiopée connaissait l’endroit parfait pour aller danser, mais pour cela, il fallait marcher quelques minutes au travers du dédale de ruelles, grimper quelques escaliers monumentaux, traverser quelques passerelles et passer sous quelques arcades sculptées. A chaque arrêt, parce qu’il fallait bien guider le seigneur de Missède sans le perdre, elle faisait quelques commentaires sur l’histoire de tel ou tel édifice, statue ou placette. C’était fait sans arrière-pensée et avec plaisir. Il ne s’agissait pas de lui en mettre plein les yeux mais Cassiopée était passionnée par sa ville et adorait la voir vivre au quotidien.

Une dernière volée de marches et les deux compagnons arrivèrent là où Cassiopée voulait le mener…
Sur les hauteurs d’Ys se tenaient ce que les locaux nommaient les Promenades Suspendues. Parc urbain verdoyant bâti sur les ruines d’un ancien palais de pierre, les Promenades Suspendues étaient des jardins bien entretenus où les habitants aimaient se perdre les jours de repos. On y trouvait de tout : de petits jardins botaniques, de vieilles fontaines couvertes de verdures, des jardins aromatiques, mais aussi des musiciens et des bals de plein air sous les kiosques.

Les Promenades avaient été créées récemment. Il n’avait fallu que peu de choses : un site abandonné, quelques plantes et une équipe d’excellents jardiniers et paysagistes … et bien sûr un peu d’argent pour rénover le tout. Le palais avait été abandonné depuis longtemps et restait dans un état de ruines. La personne qui le possédait faisait parti des proches de la famille de Kahina d’Ys, mais mourut sans laisser de descendance. S’il était respecté par ses pairs et par les habitants, sa mort permit aux autorités locales d’investir dans la création du parc.

Des oiseaux exotiques piaillaient dans les bosquets et les anciennes arches marquant l’entrée des Promenades invitaient les visiteurs à s’égarer dans le lieu. Ça-et-là, des points de vue avaient été aménagés sur le site, permettant ainsi de voir la mer et l’activité de la ville basse. De loin, bien cachés derrière les chemins sinueux, des musiciens et des artistes de rue s’affairaient. Visiblement, ils préparaient une fête improvisée.

Cassiopée se retourna vers Gaël et pointa la direction d’un belvédère couvert dans lequel se tenait une statue de Sainte Iselda, la patronne des malades et des guérisseurs. Des musiciens armés de clarinettes, de flutes et de violons se tenaient sur les marches et se préparaient à jouer.

« Je pense que nous serons bien là-bas. »

Les deux compagnons s’approchèrent des musiciens. Ces derniers, reconnaissant la Protectrice d’Ys, firent un salut poli, qu’elle leur rendit en souriant. Elle leur tendit une bourse pleine d’écus pour leur peine et leur demanda s’ils pouvaient jouer pour eux quelques minutes. Visiblement, cela suffisait.


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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeMer 8 Jan 2020 - 23:01

Une fois debout, la négociation avait pris fin. Cela n’était -en revanche- point l’occasion de se laisse aller, pis, de s’abandonner à toutes formes de conversations, oubliant Etiquette et rang de chacun et chacune. Une Etiquette certes mais moins stricte, moins codifiée, plus libre, plus souple en deux mots. La Princesse de Papiers fit un signe à sa suivante, échangea quelques mots te laissant en retrait quelques courts instants. De cet échange inaudible naquit une réaction de la part de la Valériane qui vînt te faire ses adieux. Tu inclines la tête et laisse échapper quelques mots courtois avant de la regarder s’éloigner et franchir le seuil de la porte. Après quoi, Cassiopée t’invita à sortir et te guida à travers les rues de la cité portuaire. Les gardes postés à l’entrée ne dirent mot, se contentant de refermer les portes derrière vous.

A l’extérieur, l’astre de lumière emplissait le Ciel. Ses rayons vinrent caresser ta peau de leurs mille éclats. ‘N’oublie pas ton ombrelle’ aurait hurlé un père à sa fille pour que sa peau ne brunisse pas. L’expression te décroche un sourire. Aujourd’hui tu profiteras de cette chaleur bienvenue. A cette période de l’année, le froid descend du Nord de l’autre côté de la mer. Bientôt Missède se couvrira d’un tapis orangé de feuilles mortes et il suffira de cligner des yeux pour voir le manteau blanc succéder à son homologue automnale.

L’Estréventine semblait bien enjouée et courait, sautillait et se frayait un chemin entre les passants tandis que tu tentais maladroitement de la suivre. Il semblerait que tous se soient passé le mot ! Les couleurs emplissaient les ruelles et nombre de fruits et de fleurs enveloppèrent l’atmosphère d’odeurs toutes plus sucrées les unes que les autres. Là, tu entendais de l’Olyan, ici du Sudéron, un peu plus loin c’est un poète médianais et là-bas… serait-ce de l’elfique ?

Mais déjà, te voici perdu ! Au milieu de la foule occupée à négocier le repas du soir, tu te dresses sur la pointe des pieds, lève le bras pour qu’elle te repère et en quelques secondes, la voilà qui revient, te sauves et t’entraines. Au détour d’un escalier, elle s’arrête et raconte l’histoire du lieu, l’âme de l’endroit. Sa voix s’emballe, ses yeux s’illuminent et c’est la passion qui se déverse de ses lèvres. Tu ne la quittes plus des yeux, le rictus allant de pair. Mais déjà, vous devez repartir ! Elle t’encourage, tu escalades quelques marches et te voilà arrivé.

Tes lèvres s’entrouvrent, tes yeux quittent ta compagne du jour pour se poser sur l’édifice. Tu le contemples, l’admire, l’observe. Mais s’arrêter n’est pas une option. Avec un sourire enchanteur, la voilà qui t’accompagne sur la Promenade. Le mariage de la pierre et de la verdure, de l’Homme et de la Nature était fabuleux. Attiré par le spectacle, tu poses la main sur la paroi, ferme les yeux et prend une respiration. En te concentrant un peu, tu pouvais entendre le bruit blanc de l’eau résonner au loin. Une fontaine ?

Encore une fois, il faut poursuivre la route. Moins vite cette fois, tu la suis sans réellement la suivre, marchant les yeux rivés sur chaque détail. C’est elle qui t’arrête et te sors de ta rêverie pour pointer du doigt une statue.

_ Je pense que nous serons bien là-bas.
_ Après ce que vous venez de me montrer, je vous suivrais jusqu’au bout du monde pour retrouver pareil endroit.


Ta mine était pour le moins surprise. Les mots étaient quant à eux balbutiants. Ce lieu est un paradis terrestre. Un vrai. Vous vous approchez de la statue et des musiciens. Un petit pécule et les voici en pleine action, jouant un air envoûtant et heureux. Autour de vous, quelques citoyens intrigués se mettent à danser ou se balancer de gauche à droite en suivant le rythme. Tu ne connaissais point la mélodie. Pourtant elle sonnait affreusement familière. Embarrassé, tu t’approches de l’oreille de la Princesse Marchande.

_ Me feriez-vous l’honneur de me guider Votre Altesse ?

Puis tu tendis ta main droite tout en plaquant la gauche contre ton dos. Tu t’étais penché en avant, de quoi imiter une inclinaison de l’ordre de l’Etiquette. Une fois de plus, ton visage s’illumine et quand elle l’eut prise, te voici imitant ses pas à la perfection. Etait-ce une farce ? Une tactique pour capturer sa fine main ? Toujours est-il que votre duo suivit les notes sans en faire de fausses… Aucune ? Réellement ? Ç’aurait été trop beau ! Pris à défaut sur une tonalité imprévue, les jambes de ta partenaire changent de cap, elles se révoltent, dictent un tempo que tu peines à suivre et alors c’est le mauvais enchaînement ! La position de tes jambes et par défaut de ton corps se troublent. Tes yeux délaissent la sang-mêlée pour se porter sur vos quatre jambes qui ne forment qu’un brouillon sans queue ni tête.

_ Ah !

Lâchas-tu entre deux tentatives de retrouver le rythme. Les musiciens se mettent à sourire. L’un d’eux libère un rire innocent et bientôt tu en viens à le partager et à lever les yeux au ciel dans un râle à la signification profonde.


Dernière édition par Gaël de Laval le Mar 14 Jan 2020 - 17:48, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeSam 11 Jan 2020 - 21:43


« Et bien, vous ne vous défendez pas trop mal messire de Laval … »

Effectivement, ce n’était pas « trop mal » pour une première fois sur ce rythme. Visiblement, le seigneur de Missède connaissait assez bien les règles de l’étiquette pour ne pas avoir l’air trop ridicule une fois confronté à des sonorités et des rythmes qui n’étaient pas ceux de la Péninsule. Cassiopée n’était pas une excellente danseuse, mais elle avait des bases. Des bases très approximatives, mais des bases quand même. Après tout, elle n’était pas née dans une famille très riche. Ses parents étaient d’humbles prêteurs sur gages qui avaient placé leurs enfants auprès de précepteurs et d’amis de la famille pour qu’ils puissent sortir du milieu de leur naissance et s’émanciper de leurs origines modestes.

Dans sa famille, on croyait fermement aux vertus du mérite et du travail. Si vous ne maîtrisiez pas un domaine, il fallait travailler pour devenir compétent : c’était la règle. Mais malgré ses efforts, Cassiopée n’avait jamais véritablement eu de talent particulier pour la danse. Elle avait simplement appris sur le tas, en participant à quelques festivals et célébrations publiques. Il en résultait que la jeune femme était incapable de rivaliser avec quelqu’un qui était formé depuis sa plus tendre enfance à guider une danse, mais en contrepartie, elle était capable de guider ou de suivre. Généralement, dans la danse de salon, il est d’usage que les femmes suivent et les hommes guident. C’était une convention séculaire qu’il était malvenu de transgresser lors des évènements officiels. Mais les Estreventins étaient des gens bien moins à cheval sur ces convenances que leurs cousins péninsulaires. Non pas que les Vaanis n’aient pas parfois des codes de conduite ou des coutumes strictes, mais sur la question de la danse, il était d’usage de faire preuve d’une certaine … souplesse.

La musique continua de plus belle. Cassiopée avait pris la tête du duo. Elle faisait de son mieux pour guider Gaël au travers de la mélodie, sans faire de faux-pas. Cela lui demandait une certaine concentration. Elle ne pouvait pas se permettre de paraître gauche devant un seigneur péninsulaire. Mais visiblement, le seigneur de Laval ne semblait pas mieux loti de son côté.

Elle réprima un fou rire. A eux deux, ils faisaient la paire. Une Protectrice d’Ys qui savait à peine guider et un seigneur péninsulaire qui peinait à suivre. Les musiciens devaient se régaler de cette situation cocasse. Elle se demanda si ces derniers l’avaient reconnu. C’était probable, mais généralement, les gens se gardaient bien de lui faire remarquer. Elle apparaissait souvent en public à Ys, mais elle n’avait pas son visage sur toutes les pièces qui circulaient. Elle n’était pas mégalomane à ce point.

Un dernier tour complet sur elle-même et Cassiopée stoppa la valse. La demoiselle lâcha les mains de son partenaire, se recula et fit la révérence de circonstance … encore trop basse … décidément ! Les musiciens reprirent de plus belle : des curieux s’étaient attroupés et avaient profité de l’occasion pour se mettre à danser aux sons des cuivres et des cordes. C’était le bon moment pour s’éclipser avant de ne trop attirer l’attention.

Elle replaça ses cheveux derrière ses oreilles et se retourna vers Gaël après l’avoir amené hors de la foule des badauds, sur l’un des chemins pavés des jardins.


« A noter sur ma liste des tâches que je n’aurai jamais le temps d’accomplir : apprendre à danser. »

La jeune femme tourna à gauche sous l’allée des tonnelles couvertes de vignes aux multiples couleurs. L’air y était plus frais et l’ombre meilleure. Elle reprit la conversation de tantôt :

« Vous parliez de rêves et de passions. Que souhaitiez-vous réellement savoir ? »

Elle ouvrit sa sacoche et en sortit une gourde d’eau, qu’elle tendit au seigneur. Elle n’allait quand même pas le laisser mourir de soif. Cela ferait désordre.
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeMar 14 Jan 2020 - 17:48

Quel émoi ! Cette danse fut à la fois exquise et douloureuse pour ton ego. Dire que fut un temps tu courais les bals et autres représentations en quête de partenaires avant de danser durant des heures. Aujourd’hui te voilà prit à ton propre jeu n’ayant pu suivre une Dame durant l’entièreté de la représentation. Qu’importe, le moment fut amusant. Qu’importe les rires et les éventuels commérages, tu n’es pas en Péninsule, quelle importance ?

L’hôte de ces lieux en avait le fou rire aux lèvres, à deux doigts de succomber à la tentation de railler ta prestation pourtant si bien commencée. Elle met un terme à ce jeu, faisant une révérence presque parfaite. A quoi bon lui faire remarquer. Tu la suis sous les ombres végétales, fuyant l’attroupement.

_ A noter sur ma liste des tâches que je n’aurai jamais le temps d’accomplir : apprendre à danser.

La gente dame tourna à gauche, tu la suis de prêt, n’hésitant pas à jeter un œil sur les vignes et leurs larges feuilles cachant la lumière. De chaleur, l’atmosphère devînt fraîcheur et quand tes yeux reprennent la direction de la sang mêlée, une gourde apparaît devant toi. Tu te saisis de l’objet pour le porter à tes lèvres et t’abreuver. Tu en avais bien besoin !

_ Vous parliez de rêves et de passions. Que souhaitiez-vous réellement savoir ?

Tu tends la gourde à Cassiopée avant d’inspirer profondément une bouffée d’air pur. La question aurait pu te faire sourire mais tu retiens celui-ci, optant pour un hochement d’épaules et la paume des mains ouvertes vers le ciel. La réponse semblait évidente.

_ Eh bien… Vos rêves et vos passions.

Bon, tu le conçois, la réponse n’aidait pas beaucoup, il fallait reprendre et être plus précis. Tu te mets à descendre les marches pour l’inciter à te suivre.

_ Aussi engagée que vous l’êtes auprès de cette ville, je n’ose croire que vous ne faîtes que la diriger. La plupart des Princes Marchands passent plus de temps à faire fleurir leur commerce personnel ou s’adonner à des loisirs plus ou moins excentriques que planifier la création et l’entretien de jardins aussi merveilleux soient-ils.

Malgré l’éloignement, les notes des musiciens parvinrent jusqu’à vos oreilles. Celles-ci paraissaient douces et atténuées et s’accordèrent merveilleusement bien au lieu. Bientôt, vous voici face à la mer au détour d’un olivier. Tu t’avances sur ce qui ressemblait à un balcon pour admirer la mer, infiniment bleue sur laquelle se reflétaient les rayons du Soleil. Il est possible de voir le port et de deviner au loin le rythme effréné des ouvriers déchargeant les cargaisons. A l’entrée de celui-ci, un navire réduisit sa voilure, ne se laissant porter que par les faibles remous. Quittant le spectacle des yeux, tu poursuivis ta pensée.  

_ Seriez-vous une arcaniste affirmée ? Une architecte de grand talent ? Une généreuse guérisseuse peut être ?

Enumération après énumération, tu fis mine de compter sur tes doigts en plissant les yeux sous les assauts de la lumière. Ta phrase se termina sur le cri d’une mouette passant au-dessus de vos têtes.  Celle-ci fit un tour sur le fil de l’horizon pour se rapprocher et finalement se poser sur une tour drapée de verdure de laquelle s’échappèrent des cris plaintifs d’une progéniture affamée.
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeJeu 16 Jan 2020 - 20:32


« Une mage ? Moi ? »

Cassiopée se mit à rire. S’il y avait bien un domaine dans lequel elle se montrait d’une incompétence redoutable, c’était bel et bien la magie. La jeune femme avait pourtant tout tenté pour déceler chez elle la moindre compétence en la matière, mais rien n’y faisait. Elle y était totalement imperméable. Et finalement, c’était peut-être mieux ainsi. Il y avait tant de choses à faire et à apprendre pour ne pas en plus se farcir l’intégralité d’un apprentissage magique chez de vénérables vieux birbes qui tentaient de vous faire sentir « la puissance cachée en vous » ... ou « à l’extérieur de vous » … Elle ne savait plus trop, cela changeait tellement en fonction des mages.

« Non malheureusement, je ne suis pas mage. Je suis totalement incapable de maîtriser la moindre énergie magique par moi-même et mes parents étant issus des couches populaires de la société vaanie, je n’ai jamais eu de précepteur capable de m’apprendre à le faire étant petite. »

La jeune femme referme le contenu de l’outre d’eau et la replaça dans sa sacoche. Elle en ressortit un petit carnet de cuir relié, qu’elle se mit à feuilleter avant de s’arrêter devant quelque inscription tracée à l’encre noire. Elle déclama à voix haute :

« Vous prétendez fabriquer directement l’avenir ; nous fabriquons, nous, l’homme qui fabriquera l’avenir et nous accomplissons ainsi un prodige beaucoup plus grand que le vôtre. Nous ne fabriquons pas un homme tout exprès pour notre cité, nous prenons l’homme tel qu’il se présente, encore imparfaitement dégrossi de ses cavernes primitives, dans sa cruauté, dans sa bonté, dans son égoïsme, dans son altruisme, dans sa pitié des maux qu’il endure et des maux qu’il fait subir lui-même à ses semblables. »

Elle marqua une pause, satisfaite, et rangea le carnet dans sa besace.

« Je pense que vous connaissez ces mots, même s’ils n’ont plus été prononcés par leur auteur depuis un siècle. Georges Mansault de la Clef reste une de mes inspirations politiques et j’essaye de faire en sorte d’appliquer ses principes. Voila comment j’envisage mon action à Ys …

J’ai commencé ma vie en tant que prévôt de Thaar et chemin faisant, je suis devenue alchimiste. J’ai continué à exercer ce métier, même après la création de la Compagnie Olyane. S’il est vrai que je dispose de moins de temps que je le voudrai pour mes expériences, j’essaye de faire en sorte que ce que je produis soit utile à toute la population. »


Elle fit une légère pause et lissa les plis de sa jupe.

« Je ne vous ferai pas visiter mon laboratoire. C’est un bazar innommable et les gens que j’emploie sont en train d’y faire fondre du plomb et du sable pour affiner la production du cristal. C’est malheureusement dangereux et hautement toxique, aussi vous ferai-je la grâce de ne pas risquer l’empoisonnement. »

L’atelier de Cassiopée était effectivement un véritable bazar. Cela faisait des mois que ses hommes l’avaient transformé en fonderie de verre pour tester un procédé d’affinage du verre avec du plomb pour améliorer la clarté du cristal. Il avait fallu tout pousser et malheureusement, rien n’avait été rangé depuis. C’était un véritable capharnaüm et il était urgent qu’elle y remettre de l’ordre, sitôt que ses artisans auraient fini leurs expériences. Il allait falloir faire redéplacer les soufflets et les moules … Il y en avait pour quelques jours à refaire toute la logistique …

« Et vous Gaël ? Je suppose que vous n’êtes pas issu d’une famille de prêteurs sur gages de Thaar. Quels sont vos projets pour l’avenir ? La Péninsule est-elle un endroit qui satisfait vos ambitions ? »

Elle lui sourit.  
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeLun 20 Jan 2020 - 14:27

_ Non malheureusement, je ne suis pas mage. Je suis totalement incapable de maîtriser la moindre énergie magique par moi-même et mes parents étant issus des couches populaires de la société vaanie, je n’ai jamais eu de précepteur capable de m’apprendre à le faire étant petite.
_ En plus de la danse, voici donc un point commun. Notre incapacité à voir, ressentir ou… euh… imaginer ? Leur énergie étrange et… étrange. Ma sœur est très douée dans ce domaine. Mais je vous avoue que ce genre de chose ne m’a jamais… conquis. Je vais peut-être passer pour un chevalier limité à vos yeux mais la joute fut plus facile à appréhender pour être honnête.


Tu ris à ton propos. La magie est à la fois une bénédiction et une malédiction. Mais tu choisis de préserver l’opinion de Missède vis-à-vis de ceux qui la pratique. Acceptez-les et encouragez la pratique magique pour rendre la vie de tous plus simple. C’est ce que les vieux arcanistes répètent sans cesse. Ils n’ont pas tort, autant chercher à la contrôler plutôt que la nier. Tout cela te dépasse, tu préfères laisser la gestion de ces… énergumènes à des gens compétents.
Chose surprenante, la Protectrice se saisit d’un ouvrage, le feuillette puis s’arrête et le lit. Une lecture attentive requiert une écoute attentive. Chaque mot pesait son poids dans ton esprit et quand elle termina son récital, Cassiopée se mit à expliquer sa vision d’Ys. Les phrases en elle-même résonnaient dans ta tête, elles n’étaient pas inconnues, plutôt oubliées.

_ Je ne vous ferai pas visiter mon laboratoire. C’est un bazar innommable et les gens que j’emploie sont en train d’y faire fondre du plomb et du sable pour affiner la production du cristal. C’est malheureusement dangereux et hautement toxique, aussi vous ferai-je la grâce de ne pas risquer l’empoisonnement.
_ Vous savez, les alchimistes n’ont pas une bonne réputation par chez nous. L’empoisonnement est trop commun et ils en sont souvent l’artisan. Mais j’aimerai que nos apothicaires et les vôtres, si tant est que tous vos alchimistes ne soient pas des producteurs de cristaux, travaillent de concert. Il y a quelques années, la maladie toucha nos terres et à la fin de l’épidémie, un ordre de guérisseurs vit le jour. Ils ne sont point nombreux et vivent principalement grâce à l’ordre néérite mais leur cause est noble. Je serais honoré de pouvoir vous présenter son maître et qu’ensemble, nous puissions abaisser la mortalité de nos sujets.



Ce petit ordre hospitalier devait prospérer en parallèle du culte néérite. Ils offrent une solution au manque de médecins en campagne et permet aux apothicaires de se retrouver et de travailler de concert et de partager leurs découvertes. Une pseudo guilde n’obéissant pas au pouvoir temporel mais bien au pouvoir spirituel. Un jour, il faudra converser de cela avec la grande prêtresse… Quand l’organisation sera prête et capable.
Cassiopée se mit ensuite à te questionner, tu te grattes le bout du nez, détaillant son visage avant de lui répondre.

_ Non en effet, il est un mythe criant haut et fort que ma famille descend d’une guérisseuse canonisée pour avoir consacrée sa vie aux Dieux tout en soignant les Hommes, amis comme ennemis lors de la Pentianisation de la Péninsule. De quoi me rappeler l’humilité dont doit faire preuve tout pénitent sous le regard bienveillant de notre Mère.

Il y aurait plus d’une cinquantaine de Saints pentiens, cinquante cinq si ta mémoire ne te fait pas défaut. Certains ont réalisé des exploits militaires de grande envergure contre des païens, d’autres ont guéri des hommes et des femmes sans rien attendre en retour. La bonté ou le succès menèrent ces êtres d’une autre époque dans le droit chemin jusqu’à la sanctification. S’enorgueillir d’un tel passé serait une erreur, il faudrait plutôt s’en montrer digne et rester humble. Ne pas l’oublier pour mieux le respecter.

_ La Péninsule est un pays bien particulier… Parfois je me demande si ce n’est pas le Royaume qui me dicte mes propres ambitions. Roi, duc, marquis ou baron, ils peuvent me prendre tout ce que j’ai en un claquement de doigt. Peut-on être ambitieux dans ces conditions ? Mais si je ne le suis pas assez, ce seront mes vassaux qui me pousseront à l’abdication. Un jeu d’équilibriste constant, dans lequel nous devons rajouter des variables telle que le mariage, le serment de vassalité ainsi que l’honneur.

La politique, l’économie, l’amour et la guerre. La politique guide souvent le mariage qui devrait être l’apotheose de l’amour. En ce sens, cela voudrait-il dire que l’amour n’a plus sa place dans la société féodale dans grands seigneurs ? Tu remercies Néera chaque jour pour t’avoir conduit à réaliser un mariage d’amour. Une chance. C’est certain.
Mais il y a aussi les loisirs. Des loisirs se transformant souvent en compétition de tous les instants dont la réussite ou l’échec vous ouvre ou vous ferme bien des portes. Être noble c’est mener une vie de noble et non pas sa vie de noble. La standardisation est la règle au grand désespoir de nombreux aînés qui espéraient l’avenir de leur cadet.

_ Se marier c’est créer une alliance mais aussi rajouter les ennemis de la belle famille à sa liste. Servir un baron, un comte ou un marquis n’est pas discutable mais que faire quand le baron s’oppose au marquis et le marquis au roi ? Qui suivre ? Enfin quel est le plus important ? L’honneur dynastique ou celui de son épouse ? Tous les nobles du royaume sont reliés par des engagements plus ou moins tacites, éternuez trop fort et vous prenez le risque de déséquilibrer ce rouage complexe.


Voici des questions peu communes en Estrévent mais si importantes de l’autre côté de la mer. Tout est millimétré avec une précision incroyable et chacun protège son pré-carré avec une force impressionnante. Les avantages de chacun sont imaginés de telle sorte qu’un équilibre relatif subsiste mais si un seul de ces avantages venait à faillir, c’est l’ensemble de la société qui en vient à dérailler. Cela entraîne guerres et assassinats, orphelins et… orphelines.

_ Mais malgré tous ses défauts, la féodalité dégage une qualité indiscutable. Le code régissant les rapports ne peut être violé sans une lourde sanction. C’est peut-être le ciment qui la maintient en place.

Un bien maigre ciment si le rang au-dessus n’est pas capable de le faire tenir. Jusqu’ici tu penses t’être bien débrouillé. C’est peut-être un signe que le ciment tient… pour le moment. Tu lèves finalement les paumes vers le ciel, haussant les épaules et fermant les yeux quelques secondes. Relativisons.

_ Pour autant, le grand jeu des pairs du royaume n’est pas pour moi. Je ne suis qu’un simple seigneur régent une baronnie prospère au nom de son neveu et marié à la plus noble femme du langecin. Je pense que cela me rend heureux. Surtout que Linaëlle fait beaucoup pour le bonheur d'autrui. Elle en a manqué durant son enfance, son entrée dans les ordres néérites et son travail quotidien pour guérir et réconforter paysans, nobles et bourgeois est un moyen pour elle de donner au plus grand nombre ce qui lui a été refusé. Mais ce sont aussi des rencontres comme celle d’aujourd’hui qui me rappellent que malgré cette lutte de pouvoir permanente, il est des journées qui rapprochent au lieu d’éloigner.

Au vu de l'heure, ton épouse devrait être rentrée. Depuis votre arrivée, vous avez passé plus de temps ensemble que lors de la dernière ennéade. Une preuve de plus que ce séjour yssois est de bonne augure. Son double rôle est accaparant mais elle ne semble pas s'en plaindre. Peut-être n'a-t-elle tout simplement plus le temps pour cela ? Ou alors elle aime son quotidien aussi sûrement qu'elle te le présente.

_ D’ailleurs je pensais… Pourquoi faire d’Ys cette société ? Menée par des hommes imparfaitement dégrossis ? Laisser autant la parole et le droit de décider aux chambres ? Ne craignez vous pas le manque d’efficacité ? La révolte ou pire : la corruption ? En Péninsule nos familles ont été désignées par les Dieux et le Roi Phiiram pour diriger le peuple. Il est le représentant de Néera en Péninsule et nous sommes les garants de la confiance qu’Elle accorda à nos dynasties. Même si nos prédécesseurs ne furent pas toujours sages et éclairés, jamais la dynastie des de Laval ne fut brisée car notre nom est relié à notre terre depuis le commencement. Il est le gage qu’un de nous régnera toujours sur la seigneurie du Rivage.
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Cassiopée Meldyrin
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeJeu 23 Jan 2020 - 23:35


"L’alchimie est en effet mal vue dans de nombreuses contrées, ça, je ne peux le nier malheureusement. Nos alchimistes travaillent de concert avec les apothicaires et plus généralement avec les artisans. Au lieu de les laisser tenter des expériences plus dangereuses les unes que les autres, nous leur proposons de se mettre au service de la collectivité. Cela n’a pas été facile de les convaincre de se regrouper en une guilde et de les faire adhérer à une charte pour encadrer leur pratique, mais au moins, ils peuvent désormais pratiquer leur art sans risquer d’incendier la moitié du territoire."

Les alchimistes d’Ys étaient en effet regroupés sous l’égide d’une même corporation. Ainsi, ils pouvaient être représentés au Conseil des Guildes, mais aussi se doter de statuts légaux leur permettant d’exercer leur science en toute sécurité. De plus, cela permettait à Ys de bénéficier officiellement d’une corporation capable d’apporter une expertise que les mages ne pouvaient conférer : la science. Les alchimistes étaient des gens rationnels, capable de trouver des solutions inédites à des problèmes que des artisans chevronnés pouvaient mettre en lumière. Cassiopée croyait sincèrement au fait qu’il était possible d’utiliser les connaissances des alchimistes autrement qu’à la confection des poisons.


"Si vous souhaitez que nos alchimistes travaillent avec un ordre néérite, cela sera avec plaisir. Je leur transmettrai le mot le plus vite possible. Si cela nous permet de trouver des remèdes plus efficaces, nos deux cités ainsi que le reste de la Péninsule et de l’Ithri’Vaan ne pourront que mieux s’en porter. Si vous le souhaitez, je ferai aussi parvenir votre proposition à la haute-prêtresse de Néera à Thaar. C’est une guérisseuse de talent et je suis certain que ce type de partenariat pourrait l’enchanter."

C’était tout à fait sincère. Il n’y avait aucune raison pour ne pas accepter la proposition de Gaël de Laval. Après tout, c’était bien pour ce genre de projets que Cassiopée souhaitait un rapprochement avec les Péninsulaires. Les Néerites avaient une solide réputation de guérisseurs dans l’Ithri’Vaan … du moins, autant qu’en Péninsule supposait-elle. Si les alchimistes d’Ys se mettaient à travailler avec eux, nul doute qu’ils parviendraient à des résultats surprenants. Qu’il s’agisse d’un ordre parallèle au culte de Néera n’était pas spécialement un problème.

Le seigneur péninsulaire continua à parler et la Protectrice d’Ys l’écouta attentivement.


"Un tel héritage doit être une plus-value non négligeable quand il faut porter un titre de noblesse je suppose … Quant à votre métaphore de l’équilibriste, je ne peux qu’être d’accord avec vous. Si les jeux d’influence ne sont pas les mêmes en Ithri’Vaan, ils existent bel et bien et on ne saurait s’y soustraire, malheureusement. Je ne suis pas étonnée d’apprendre que la même chose soit à l’œuvre en Péninsule.»

Effectivement … Cassiopée avait exactement les mêmes problèmes avec le reste de l’Ithri’Vaan. Les systèmes politiques n’étaient peut-être pas les mêmes, mais il existait clairement des similitudes. Il fallait se battre pour se maintenir au pouvoir et pour tracer son chemin sans accumuler autour de soi les piles de cadavres. Néanmoins, la dernière tirade de Gaël avait le mérite d’être particulièrement révélatrice de la distance culturelle qui séparait les Péninsulaires des Yssois.

«Pourquoi faire d’Ys une république marchande alors qu’une simple monarchie de droit divin aurait suffi ? La raison est simple et se trouve tout autour de vous. Ces gens, partis de rien, issus des plus basses classes de la société vaanies, parviennent, une fois mis en responsabilités, à dépasser la condition de leur naissance et à accomplir les merveilles qui vous entourent. Ils ont choisi une voie dure, ingrate et pas toujours couronnée de succès, mais ce qu’ils parviennent à accomplir, ils l’accomplissent ensemble et non sous le patronage d’un souverain. Ils se gouvernent eux-mêmes et sont comptables de leurs réussites comme de leurs échecs … et je ne vois pas plus belle manière pour honorer le Choix que nous a donné Néera. Il y a aussi une raison plus pragmatique à cela. L’Ithri’Vaan est une terre dangereuse : le collectif survit là où le solitaire est dévoré. Il faut que ces gens apprennent à se construire en tant qu’individus, mais aussi comme société d’hommes libres. Si jamais je disparais, cette œuvre me survivra car elle ne repose pas sur mes épaules, mais sur l’ensemble de cette population. Si jamais vous mourrez sans héritier, c’est toute votre contrée qui s’effondrera ou ira à votre suzerain … Si je meurs, une nouvelle Protectrice sera élue. Et si jamais Néera me fait cadeau d’un enfant, le système yssois lui évitera d’hériter de ma charge s’il ne la veut pas … ou s’il n’a pas fait ses preuves et gagné la reconnaissance de ses pairs pour être élu. »
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeJeu 30 Jan 2020 - 13:16

_Si vous souhaitez que nos alchimistes travaillent avec un ordre néérite, cela sera avec plaisir. Je leur transmettrai le mot le plus vite possible. Si cela nous permet de trouver des remèdes plus efficaces, nos deux cités ainsi que le reste de la Péninsule et de l’Ithri’Vaan ne pourront que mieux s’en porter. Si vous le souhaitez, je ferai aussi parvenir votre proposition à la haute-prêtresse de Néera à Thaar. C’est une guérisseuse de talent et je suis certain que ce type de partenariat pourrait l’enchanter.

Voici peut-être la plus grande avancée de l’année pour le petit ordre rivegeois. Petit par la taille mais grand par ses valeurs, l’Ordre hospitalier œuvre depuis la grande épidémie à l’éradication de la maladie dans les campagnes désertées par les hommes de sciences. Profondément religieux, ils s’étaient rapprochés du dogme néérite -suivant les pas de Sainte Aliénor, travaillant de concert avec les monastères et abbayes parsemant le pays. Troisièmes fils de nobles comme rejetons de paysans libérés, toutes les conditions sont représentées et la hiérarchie du sang n’a pas sa place au sein de l’organisation.

Il n’y avait dans cette proposition, aucune présomption d’influence. Tu ne cherchais pas à étendre l’ombre menaçante d’une main missédoise sur la société ysoise par le biais d’un saint ordre ayant voué son existence au bien être d’autrui. Au contraire, l’aide d’alchimistes et d’apothicaires réunis en guildes permettrait de créer de nouveaux remèdes et aboutirai à un échange de connaissance qui pourra être conservé et préservé pour les générations futures.

Le long monologue de la Princesse de Papier sur l’organisation politique de la cité fut pour le moins… instructif. La simple idée que la plèbe devait se gouverner elle-même était pour le moins cocasse, mais non dénué d’intérêt. S’il est vrai que des conseils citadins pouvaient être une bonne chose pour que les politiques urbaines soient cohérentes avec la réalité, la domination pure et simple du sous ordre sur les décisions d’un domaine est quant à elle fondamentalement impossible. Tu crois fermement en une gestion efficace et raisonnée désignée par les Dieux. Une « simple monarchie de droit divin » est pourtant la volonté des Dieux ou du moins celle de notre Mère. Sinon comment expliquer l’incroyable longévité des petites dynasties comme la tienne ? Et de la plus illustre, régnant dur Diantra ?

Malgré le doute que tu peux ressentir dans le flot de paroles de ton interlocutrice, il y eut une phrase qui resta dans ton esprit. Le Choix donné par notre Mère serait mieux honoré en Estrévent qu’en Péninsule car les paysans seraient davantage libres de leurs actions. Sur le coup, tu n’as pas d’argument contraire. Tes yeux parcourent les paysages derrière Cassiopée à la recherche d’une réponse à apporter mais aucune ne vînt. Alors, tu abandonnes. Pour le moment.

_ C’est une conception bien étrange de la chose. Ma seigneurie est un bien, comme une femme ou un bœuf. Indissociable de mon nom et de celui de ma famille. Il ne peut être question de vouloir ou non cette charge. Elle est là. Et elle doit être tenue par le premier né. C’est ainsi.

Il est des choses qui ne peuvent être les mêmes partout. Malgré le rapprochement culturel du Sud de la Péninsule et de l’Estrévent, certaines spécificités culturelles restent. C’est aussi cela qui fait le charme de ces rencontres et la complexité de ce monde. Autrement, l’ennui succèderait bien vite à l’extase de la découverte.

_ Vous devez certainement trouver cette dernière tirade un brin obtus alors que l’Estrévent a une réputation de pays arrangeant…

Tu souris maladroitement, passant ta main gauche derrière le crâne, dans tes cheveux. Les heures ont passé depuis cette peinture dans la demeure de Maître Desmoulins. Tu lèves les yeux vers l’astre solaire qui poursuivait son inexorable course vers la mer.

_ Que diriez vous de dîner avec nous ce soir ? Ce sera l’occasion de vous présenter mon épouse. Ce qui me fait penser… Êtes-vous mariée Cassiopée ?

~ ~ ~ + ~ ~ ~

A quelques centaines de mètres de la discussion entre les deux dirigeants, une foule de fidèle s’était rassemblée plus tôt dans le temple dédié à la Mère des Hommes pour se recueillir et prier. Parmi cette foule hétéroclite se trouvait la Dame rivegeoise, épouse du Gerfaut. Sans aucune prétention, elle se confondait parmi les innombrables citoyens, suivi par deux hommes vêtus sous leurs habits d’une côte de maille et disposant d’une épée laissée à l’extérieur du temple. Au milieu des chants et des sermons, Linaëlle se laissa aller, fermant ses yeux et respirant lentement. Ainsi entourée, elle se sentait objectivement bien. La plèbe était finalement moins fourbe que la cour et ici, nul ne viendrait déranger une femme vêtue de la longue robe néérite.

A la fin de la cérémonie, une écrasante majorité quitta le lieu. Il ne restait qu’une dizaine de personnes, religieux compris, qui marchaient paisiblement dans l’édifice, observant gravures et vitraux. Mais au détour d’un tableau représentant l’aumône d’un Prince local, l’ancienne duchesse grimaça et commença à se plaindre de douleurs. Celles-ci arrivèrent sans crier gare et s’intensifiaient seconde après seconde, la forçant à s’asseoir sur un banc en bois, aidée par les deux Péninsulaires.

Son souffle s’est accéléré et le bruit qu’il produit, s’élève dans le temple qui de par son architecture, provoque un écho qui alerta les maîtres des lieux. Quelque chose se passait.
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeVen 7 Fév 2020 - 17:48

« Que vous ayez le droit de propriété sur des biens immobiliers et mobiliers me semble tout à fait normal. Je ne remets pas ça en question. En revanche, c’est le principe de posséder un être vivant qui me parait difficilement justifiable. Les considérerez-vous comme votre possession le jour où l’un d’entre eux voudra quitter le servage ? Nous avons le même problème avec l’esclavage ici, même si mes compatriotes ont une attitude très, trop … complaisante … envers l’esclavage. »

Le problème n’était en effet pas de posséder la terre. En Ithri’Vaan, la possession de terres était une sécurité et chaque Vaani tentait à son niveau de posséder un patrimoine et d’en assurer la pérennité, par la transmission de l’héritage. En tant que Vaanie, Cassiopée acceptait parfaitement cet état de fait : la terre appartient à celui qui s’en occupe et cette possession lui est inaliénable, à moins qu’il ne la vende ou la transmette. En revanche, elle faisait partie des rares membres de son espèce à avoir une vision très négative de l’esclavage. Pour la Princesse Marchande, rien ne pouvait justifier la mise en esclavage d’un individu par un autre. Non pas que les esclaves soient plus maltraités ici qu’au Puy, mais il s’agissait d’une position philosophique et économique à ses yeux. Priver un individu de son Choix était un sacrilège aux yeux de Néera et, même si Cassiopée préférait des arguments rationnels à un simple acte de foi dans les dires de la Damedieu, elle était d’accord sur le principe : l’esclavage était une plaie béante dans la civilisation estreventine.

La Protectrice d’Ys avait passé sa vie à tenter de trouver un moyen de faire comprendre à ses pairs qu’un homme libre est plus productif et responsable qu’un esclave. Les démonstrations économiques ne manquaient pas, mais malgré ses arguments, il existait dans la société estreventine une véritable résistance des habitudes qui l’empêchait de progresser sur la voie de l’abolition. Le problème était le même en Péninsule avec le servage visiblement.

Il n’en restait pas moins que l’esclavage et le servage étaient des systèmes en voie d’être dépassés dans les années à venir … mais ce n’était pas le moment d’en discuter et ce genre de projets pouvait attendre. Si ce n’était pas du temps de Cassiopée, quelqu’un d’autre prendrait cette charge et la mènerait à bien.


« Et bien ma foi, un diner avec vous serait un vrai plaisir. »

C’était tout à fait sincère. Cette journée s’était avérée bien plus intéressante qu’elle n’avait commencé et elle n’était pas prête à lâcher l’affaire. Par contre, la dernière question s’était révélée plus … personnelle. Elle prit le temps de bien réfléchir à sa réponse.

« Je ne suis pas mariée. Je n’ai jamais pris ce temps et comme vous le savez, les sang-clairs vivent plus longtemps que le reste des mortels … On ne peut pas dire que je sois pressée. »
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitimeVen 7 Fév 2020 - 17:49

« Madame. Décrivez-moi vos symptômes … »

La haute-prêtresse avait failli lever les yeux au ciel quand elle entendit les bruits caractéristiques d’un être humain souffrant d’un mal inconnu. A chaque fois qu’elle devait pratiquer une messe dans un temple à l’extérieur de Thaar, la même chose se produisait. A la fin de l’office, une personne au hasard décidait de déclarer ses symptômes au moment où la haute-prêtresse s’apprêtait à partir.

Accompagnée par Tiphaine, Lucrétia n’avait pas songé un seul instant passer plus de quelques jours à Ys. Non pas que la cité fut déplaisante, loin de là, mais ses malades la réclamaient à Thaar et elle ne pouvait pas s’absenter trop longtemps hors de son dispensaire.

La jeune femme qui avait assisté à l’office était entourée d’un petit cortège. A son allure et à ses vêtements, c’était une Péninsulaire de haut rang, sans aucun doute possible. Elle portait une robe bleue, caractéristique des prêtresses de la Damedieu … mais n’avait pas d’insigne permettait de traduire son rang. Décidément, les ennuis arrivaient par cargaisons. Du coup … la question se posait : était-ce une confrère ou une noble ?

Agenouillée devant sa patiente, Lucrétia demanda à Tiphaine de repousser gentiment le cortège avec son bâton de pèlerin pour que la jeune duchesse puisse respirer. Cela avait aussi une autre fonction : si elle avait quelque chose à lui dire, elle pourrait le faire à l’abri des oreilles indiscrètes.

« Madame … il me faut votre prénom et aussi une description de votre mal … »
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MessageSujet: Re: En quête d'un été estréventin | Cassiopée   En quête d'un été estréventin | Cassiopée I_icon_minitime

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