|
| Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] | |
| | Auteur | Message |
---|
Cassiopée Meldyrin Sang-mêlé
Nombre de messages : 230 Âge : 33 Date d'inscription : 27/10/2019
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 150 ans Taille : 1m70 Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] Ven 10 Jan 2020 - 22:17 | |
|
__________________________
Quatrième ennéade de Bàrkios 17/XI
Palais d’Ys, amphithéâtre des Treize
__________________________
La séance des Treize se terminait. Cette institution composée des représentants des différentes guildes d’Ys et de son territoire se réunissait une fois toutes les saisons pour discuter des affaires importantes concernant le développement de la cité portuaire.
Les séances avaient lieu dans l’ancien palais d’Ys, dans l’un des anciens amphithéâtres où se tenaient autrefois de splendides représentations. Mais les temps avaient changé, les propriétaires aussi, et les nouveaux occupants du palais étaient désormais des gens avant tout portés sur le développement économiques et législatif d’un territoire florissant. Les esthètes avaient toute leur place dans cette cité, mais les affaires commerciales passaient avant tout.
Les Treize dominaient la politique d’Ys. Accueillant les représentants des diverses corporations établies dans la cité, cette institution était chargée de dresser les perspectives de développement de la cité, de rendre compte de leurs activités respectives et de recaler, si besoin était, leurs prévisions concernant les années à venir. Elle était donc une instance cruciale de la cité portuaire, garante de son bien être économique, mais aussi politique.
Sous les Treize se trouvait la Chambre des Citoyens. Constituée des représentants des citoyens d’Ys, cette Chambre formait l’institution chargée de la législation au sein de la cité. Votant les lois et traitant des affaires courantes, elle constituait une instance indispensable dans la vie quotidienne d’Ys. On y recevait souvent des notables d’autres contrées et d’autres cités estreventines pour s’instruire de leurs expériences et l’on y prenait les décisions cruciales concernant aussi bien le financement des nouveaux projets que des réglementations sur la construction de nouveaux bâtiments.
Les deux institutions étaient accompagnées en permanence par les agents du pouvoir judiciaire de la cité, sous l’œil vigilant des prévôts. Cette petite cohorte silencieuse de magistrats et de greffiers était chargée de consigner avec exactitude tout ce qu’il se disait lors des séances plénières. C’était un travail de titan mais il était plus que nécessaire pour garder une trace de la petite république naissante. A ce pouvoir judiciaire s’adossait le Code Yssois, un ensemble de lois calquées sur le modèle de Thaar.
Dans ce système, la place de la Protectrice d’Ys était avant tout celle d’une médiatrice, devant trancher les débats entre les deux Chambres et représenter la cité auprès des puissances extérieures. Elu par les Treize, le rôle de Protecteur était de tout faire pour préserver le fonctionnement d’Ys et assurer sa stabilité au milieu de la tempête qu’était l’Ithri’Vaan. Le Protecteur était en quelque sorte le garant des institutions.
Cette petite oligarchie était loin d’être parfaite, mais son fonctionnement depuis une décennie ne cessait de se peaufiner. Il était étonnant de voir comment des gens à qui on ne demandait jamais rien pouvaient se prendre au jeu de gouverner collégialement une cité.
Aujourd’hui, les Treize se réunissaient pour discuter non seulement des affaires courantes, mais aussi discuter autour des récents évènements qui agitaient l’Ithri’Vaan. La Protectrice, par le biais de ses actions, avait réussi à mettre en route le commerce avec Odélian et Missède. C’était une avancée non négligeable dans le développement de la prospérité d’Ys : cela allait permettre de concevoir une nouvelle flotte de navires et surtout de bénéficier d’un accès à l’acier péninsulaire, sans avoir à passer par la Corporation d’Argent. A côté, ils avaient reçu pour information que la Protectrice avait pris contact avec Esion pour établir une ligne commerciale. Si rien n’avait été formalisé pour l’instant, cela augurait d’excellentes choses pour la cité.
Autre bonne nouvelle, les fouilles menées dans Ys-la-Vieille avaient permis d’exhumer sous le temple de l’Unique de précieuses reliques. Elles avaient été placées à l’étude au palais et constituaient des biens inestimables pour la cité, qui n’en ressortirait que plus grandie. Des contacts avaient été pris avec les lettrés des plus grandes cités libres pour permettre la traduction et l’identification des objets retrouvés.
Il subsistait cependant des points d’inquiétudes. L’instabilité de l’Ithri’Vaan était palpable ces derniers temps. Qu’il s’agisse de Sol’Dorn, ou encore la prise de Hanning, la cité portuaire avait de quoi être inquiète. Non seulement les Princes-Marchands de la Principauté de Thaar étaient en roue libre, mais en plus, la proximité de la Corporation d’Argent avec les Ost Eldéens rompait totalement l’équilibre de la région, permettant aux armées de l’Elda de massacrer les cités qui s’opposaient à sa domination. Face à cette situation, la complicité et la passivité des membres du Conseil de Thaar menaçait entièrement la paix de l’Ithri’Vaan et les accords de protection devenaient sur le coup, caduques.
N'étant pas rattachée à la Principauté de Thaar mais devant en théorie bénéficier de sa protection, comment Ys pouvait-elle accorder sa confiance à des gens qui laissaient la contrée sombrer dans l’anarchie ?
Ys n'était pas restée sans rien faire. Refuser l’invitation de Krish Al’Serat était un signe fort du point de vue diplomatique, mais les Yssois avaient appris à ne pas mettre tous leurs œufs dans le même panier. Des diplomates avaient été envoyés vers la Côte Brûlée et le Bassin du Nahl pour discuter avec les Princes Marchands locaux. Il fallait d’urgence rassembler toutes les cités encore indépendantes sous un même pacte de protection pour stopper le bellicisme drow et la bassesse des Princes Marchands. En parallèle, des dispositions avaient été prises pour calmer le jeu avec Ashaï. Il fallait absolument que cette dernière ne bascule pas dans la Principauté de Thaar et qu’elle rejoigne la confédération qu’Ys était en train de former. C’était le seul moyen de se prémunir du chaos qui menaçait l’Ithri’Vaan.
En parallèle, les tentatives d’Ys pour accéder au Conseil de Thaar avaient été mises en suspens. Ys avait beau être une petite cité sous protection de Thaar, elle avait sa fierté. Toutefois … il fallait se montrer finaud si l’on voulait faire naviguer sa barque correctement au travers de la tempête. Ys ne pouvait se montrer résolument hostile aux actions des Princes-Marchands : le commerce devait continuer et plus encore, il fallait absolument que la cité récupère ses droits sur Ys-la-Vieille.
L’ordre du jour comportait justement un invité de taille, qui allait pouvoir aiguiller les décisions des chefs de guildes. La Protectrice d’Ys avait invité pour l’occasion l’instigateur de la prise de Hanning, Ascanio Vossula, Prince Marchand d’Eofel et de Feldorn et membre du Conseil de Thaar. Celui-ci avait répondu à la demande de la Protectrice d’Ys de venir expliquer ses récentes actions et les non-décisions du Conseil de Thaar de ces derniers mois.
Dans l’amphithéâtre, l’agitation régnait. Les affaires courantes avaient été expédiées et les Treize attendaient avec impatience l’arrivée du Prince Marchand. Cassiopée Meldyrin était présente, comme le voulait l’usage, sur les gradins de l’amphithéâtre avec les représentants.
Cassiopée portait pour l’occasion les vêtements qu’elle mettait habituellement à la Compagnie Olyane. Etant issue d’une famille modeste, elle n’avait jamais eu de véritable appétit pour les parures dorées et les tissus brodés et emperlés de la haute oligarchie vaanie. Elle préférait les mises simples, plus adaptées à son travail et à son tempérament. Elle portait aujourd’hui une robe longue en tissu gris serrée par un justaucorps noir. Ses cheveux étaient comme à leur habitude, lâchés dans une cascade blanc neige. Vêtue ainsi, elle ne jurait pas au milieu des Treize, qui étaient eux-aussi des hommes et des femmes de métier, peu habitués au décorum des Princes Marchands. A Ys, on savait rester simple dans les effets de représentation.
Bien vite, l’un des serviteurs s’approcha du représentant de la guilde des tisserands, situé le plus bas dans les gradins. L’invité venait d’arriver. Il lui fit rapidement signe de ne pas le faire attendre plus longtemps. La scène était pour lui … et pour lui seul.
Le maître-tisserand se leva. En tant qu’orateur de la séance, il se devait d’annoncer l’objet de l’invitation à toute l’assemblée et d’accueillir l’invité. « Mesdames, messieurs. Chers membres des Treize. Nous recevons aujourd’hui messire Ascanio Vossula, Prince Marchand d’Eofel et de Feldorn, membre du Conseil de Thaar et Empereur de la Soie. L’objet de la séance sera de recueillir son appréciation de la situation actuelle de l’Ithri’Vaan afin que les représentants de la Chambre puissent déterminer la meilleure marche à suivre pour la prospérité d’Ys. Messire Vossula, bienvenu devant les Treize. C’est à vous. »
Le maître-tisserand reprit place au milieu de l’assemblée. Cette dernière silencieuse, attendit, l’oreille attentive.
- LES VETEMENTS DE CASSIOPEE:
Dernière édition par Cassiopée Meldyrin le Sam 4 Avr 2020 - 12:21, édité 3 fois |
| | | Ascanio Vossula
Ancien
Nombre de messages : 377 Âge : 34 Date d'inscription : 06/04/2014
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 44 ans Taille : Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] Dim 12 Jan 2020 - 3:23 | |
|
La démarche altière, le sourire étiré jusqu'aux oreilles, Ascanio Vossula pénétra dans l'amphithéâtre avec un grand enthousiasme. Revêtu d'une tunique canari éclatante et d'un grand chapeau à plumes multicolores, il semblait briller de mille feux devant l'assemblée austère, comme un joyau étincelant au milieu d'un tableau en noir et blanc. Un silence de mort avait accueilli son arrivée, mais le Prince Marchand ne semblait même pas l'avoir remarqué ; à voir l'entrain qui était le sien, c'eut été la même chose si les membres de l'assemblée s'étaient levés pour l'ovationner.
« Nobles représentants de la Chambre des Guildes, c'est un plaisir et un privilège que d'être admis aujourd'hui en votre compagnie », claironna le Prince d'un ton mielleux tandis que son regard défilait tout le long de l'amphithéâtre. « Je remercie la Protectrice d'Ys pour son aimable invitation, qui tombe à point nommé. Il y a fort longtemps que je n'avais pas mis les pieds à Ys ; trop longtemps en vérité, et quand c'est trop long... c'est trop long ! »
Gros silence.
« Je suis venu ce jour, en ma qualité de Prince Marchand et de membre du Conseil de Thaar, afin d'exprimer au peuple yssois notre attachement à la longue tradition d'amitié et de respect que se vouent nos cités. Un ami m'a dit un jour que Thaar et Ys étaient comme des jarretières posées sur les deux jambes du fleuve, de part et d'autre du delta, au nord et au sud ; l'on ne saurait caresser l'une des cuisses et négliger l'autre, sous peine de passer pour un goujat.
Or, mes amis, entendez ceci ! Les Thaaris ne sont point des goujats. Aujourd'hui comme hier, Ys bénéficie de la protection du Conseil ; elle continuera d'en bénéficier aussi longtemps que perdurera l'amitié entre nos peuples. Chacun dans cette noble assemblée est suffisamment informé, suffisamment instruit, pour savoir que le Conseil a toujours respecté le statut reconnu à la cité d'Ys il y a huit ans. Cette collaboration, que dis-je, cette amitié a favorisé l'essor de votre cité ; mais je ne vous ferais pas injure et laisserai bien volontiers aux Yssois ce qui leur appartient : ce succès est le fruit de votre travail. Et je m'en réjouis.
Je m'en réjouis, toutefois... ! Le Conseil de Thaar n'est pas insensible aux craintes légitimes que connaissent occasionnellement nos clients et protégés ; et la rumeur de certaines inquiétudes m'est parvenue. Il est vrai que la région connaît ces dernières années des temps de changement. Si la chose est indéniable, permettez-moi de tempérer ce constat : vous êtes tous au fait de l'Histoire récente, et la vérité est que cela fait vingt ans que l'Ithri'Vaan subit une mutation perpétuelle. Des fortunes se font et se défont, des principautés se créent et se disloquent ; vingt années de tempête, au bout desquelles Thaar ressort sans égratignure, et plus florissante que jamais. Les Thaaris sont ainsi, mes amis ; nous nous sommes toujours adaptés au monde, non pour y survivre, mais bien pour vivre à notre guise. Ne craignez pas, mes amis, les oiseaux de mauvais augure, alors que l'avenir s'annonce si radieux.
S'il était besoin d'offrir aux Yssois un gage de bonne foi, je m'apprête à vous en donner un ; ma présence ici n'est pas anodine, et il se trouve que c'est à dessein que j'ai accepté l'invitation de votre Protectrice. Moi, Ascanio Vossula, je suis venu vous demander humblement le droit de devenir citoyen d'Ys. »
|
| | | Cassiopée Meldyrin Sang-mêlé
Nombre de messages : 230 Âge : 33 Date d'inscription : 27/10/2019
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 150 ans Taille : 1m70 Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] Dim 12 Jan 2020 - 13:32 | |
|
Les regards s’échangèrent, interloqués. C’était donc ça le Prince Marchand d’Eofel et Feldorn ? De près, il était beaucoup moins impressionnant que l’image qu’ils s’en faisaient. A vrai dire … il n’était qu’un homme. Un homme fort en gueule, mais étrangement bien sot.
Les Treize échangèrent à bas mots, puis ce fut le représentant de la guilde des juristes qui prit la parole.
« Messire Vossula. Devenir citoyen d’Ys est un honneur qui se mérite à la sueur de son front. Nous comprenons votre souhait de faire bonne mesure auprès de cette institution, mais nous ne pouvons vous accorder ce souhait. »
Quelques membres des Treize se mirent à rire, d’autres gardèrent un silence de marbre. Cassiopée resta impassible. Il valait mieux croire en la bonne foi d’Ascanio Vossula et en son ignorance qu’à de la simple provocation.
Le maître-tisserand reprit la parole à la suite de son confrère :
« Je pense que messire Vossula s’essayait à la plaisanterie cher confrère …
- Certes, mais cela ne nous rassure pas pour autant. L’heure n’est pas à l’humour mais aux discussions sérieuses. Vous dites que le Conseil de Thaar protège les cités de l’Ithri’Vaan, mais qu’en est-il de Sol’Dorn ? Comment pouvons-nous accorder du crédit à un Conseil dont la principale représentante - future reine des Eldéens – a laissé ses semblables massacrer jusqu’aux derniers les humains de Sol’Dorn ? Nous voulons bien croire en votre bonne foi messire Vossula, mais que vaut votre influence face à la maîtresse de la Corporation d’Argent si d’aventure, le visage de notre cité ne plait plus à son roi ? Les cités d'Eofel et de Feldorn accepteront-elles de plier le genoux face au feu d'Uriz si Krish Al'Serat vous l'ordonne ?»
Le représentant de la guilde des juristes avait raison d’exprimer ces craintes. Ys, malgré son attitude fière et indépendante, ne saurait résister à un ou plusieurs ost eldéens. Personne dans l’Ithri’Vaan n’en avait la possibilité. Cela signifiait que si l'envie leur en prenait, les Eldéens étaient capables de rediriger Thaar contre l'ensemble des cités libres et de reformer l'empire drow dans la région. La perspective d'une nouvelle ère sous l'influence eldéenne ne faisait plaisir à personne, même pas aux doebens.
La plupart des membres des Treize étaient conscients que l'amitié avec Thaar et plus généralement les cités estreventines était un avantage non négligeable pour leurs prospérités réciproques et étaient prêts à donner du crédit à une amitié renforcée avec Thaar dont tout le monde sortirait grandi. Néanmoins, le conflit d'intérêt qui naissait au sein même du Conseil de Thaar était plus qu'inquiétant. Il signifiait, par le prisme du couronnement de Krish Al'Serat, qu'il n'y aurait plus aucune barrière s'opposant au contrôle des Eldéens sur les cités libres. Sol'Dorn était une première étape. Thaar, Ys, Eofel, Feldorn et les autres suivraient bientôt.
Dernière édition par Cassiopée Meldyrin le Sam 4 Avr 2020 - 12:22, édité 1 fois |
| | | Ascanio Vossula
Ancien
Nombre de messages : 377 Âge : 34 Date d'inscription : 06/04/2014
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 44 ans Taille : Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] Jeu 16 Jan 2020 - 0:33 | |
|
Le Prince accueillit la rebuffade avec une moue désabusée. Il avait voulu tendre les bras aux citoyens d'Ys, et ne récoltait en retour que sarcasmes et rires aigrelets. Du temps de Kahina, ces rustres possédaient encore quelque sens des convenances, regretta-t-il. Qu'importe. Oui, qu'importe, car au vrai, la citoyenneté yssoise, Ascanio s'en moquait comme d'une guigne ; ce n'était guère plus qu'une des nombreuses lubies qui lui prenaient sans cesse, le poussant à courir derrière des honneurs et des titres creux. Un peu comme lorsqu'il avait harcelé toute une année les membres de la Confrérie des Plaisirs de Thaar pour intégrer leur institution, avant de découvrir, bien plus tard, que cette guilde n'était qu'une fable inventée pour le faire tourner en bourrique et se gausser de lui. Plutôt que de s'en apitoyer, Ascanio s'était lui-même promu au grade de Doyen Honoraire ; il était le seul membre, qui aurait pu l'en empêcher ?
Une nouvelle fois, le regard du Prince parcourait la Chambre. Ils sont si laids, jugeait Ascanio en accentuant son sourire pour réprimer une grimace. Il cherchait, parmi ce troupeau de branquignoles, quelqu'un qui semblât suffisamment vif pour comprendre ce qu'il y avait à comprendre. Ils étaient rares, malheureusement. Ce ne sont déjà pas des flèches au Conseil, alors dans ce taudis...
« Je crains, bons sires, que cette auguste assemblée ne se méprenne. La protection de Thaar se mérite, et Thaar ne l'accorde qu'à ceux qui en veulent ; la cité de Sol'Dorn n'a jamais fait partie de la Confédération, pas plus qu'elle n'en fut cliente. Les menées du Puy dans des contrées étrangères ne sont pas notre affaire, pas plus que l'on ne saurait nous reprocher les remous de la politique péninsulaire. Oh, bien sûr, en tant qu'homme, le sort de tous ces malheureux me peine - il n'en avait en vérité rien à foutre - mais qu'y puis-je ? Le Conseil n'est pas comptable des dettes de sang d'un peuple qui n'a jamais sollicité son aide. Krish Al'Serat n'a pas violé nos statuts ; pour le reste, ses actions l'ont engagée seule. Et il se trouve, estimés membres de la Chambre, que la cité d'Ys jouit d'un statut que Sol'Dorn n'avait pas, et cela démontre que vos dirigeants furent raisonnables. Pour le reste, messires, Krish Al'Serat n'a rien à m'ordonner, toute reine d'Elda qu'elle prétendrait être ; elle n'est qu'un membre du Conseil parmi les autres, et si elle a pu soumettre le Puy, le Conseil demeure le Conseil, et Thaar ne reconnaît d'autre autorité que la sienne propre. »
Sa tirade achevée, Ascanio fit un pas en avant, et ajouta d'un ton théâtral :
« Il me peine, messieurs les représentants, d'essuyer de tels reproches quand je viens à vous avec mon cœur, clamer mon amour pour votre cité et pour ses gens. Toutefois, toutefois ! Je comprends les craintes exprimées, et croyez bien que si ma visite pouvait les apaiser, je repartirais la conscience satisfaite et le cœur léger. »
|
| | | Cassiopée Meldyrin Sang-mêlé
Nombre de messages : 230 Âge : 33 Date d'inscription : 27/10/2019
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 150 ans Taille : 1m70 Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] Jeu 16 Jan 2020 - 12:01 | |
|
Nouveaux bruissements et chuchotements entre les membres des Treize. Du point de vue du droit, Ascanio avait mille fois raison. Cela, le Conseil des Guildes ne pouvait le nier : c’est impeccable du point de vue légal. En revanche … sur le plan stratégique, c’était totalement naïf.
Le représentant de la guilde des cartographes se leva et prit la parole :
« Le souci, messire Vossula, c’est que les drows ne vont pas s’arrêter à Sol’Dorn. Les osts eldéens se tiennent en permanence prêts à guerroyer et il est fort probable que la prise de Sol’Dorn, si elle n’a pas suscité de réactions du Conseil de Thaar, fasse des cités estreventines des proies faciles pour le Puy. Je veux bien croire en votre bonne foi, messire Vossula, mais croyez-vous véritablement que les mercenaires que nos cités respectives emploient soient de taille à affronter ne serait-ce qu’un ost ? Les drows vont d’abord s’en prendre à l’entièreté des Seigneuries Morcelées, prendront la plaine de Valmar et si par quelques merveilleux hasards ils ne se décident pas à puiser de nouvelles forces en assujettissant les cités du sud, ils iront établir une tête de pont à Hanning pour ravitailler leurs troupes avant d’attaquer Naelis, Eofel et Feldorn. »
Deux scénarios aussi plausibles l’un que l’autre se dessinait pour les prochaines années. Le premier était le plus favorable aux cités estreventines à court terme. Les drows consolidaient leurs positions à Sol’Dorn puis iraient porter leur feu vengeur à Naelis en passant par Hanning, évitant au passage l’essentiel des cités libres. Les cités au sud de Thaar seraient sauves et les drows iraient batailler au nord pour prendre le contrôle du royaume de Naelis et massacrer quelques Péninsulaires. Ils profiteraient alors du fait que la majorité du Conseil de Thaar leur soit favorable et que les autres cités soient trop faibles pour contester leur autorité pour créer une sorte de pseudo Etat-client, qui n’aurait que sa fierté à revendre. La paix serait préservée pour les cités libres tandis que les cités du nord brûleraient.
L’autre scénario était en revanche plus sombre. A supposer que les drows soient plus stratèges, ils tenteraient de récupérer le contrôle sur les territoires qu’ils avaient conquis des siècles plus tôt. Très simplement, il suffisait d’attaquer en premier les cités de la Côte Brûlée depuis Esion, puis d’utiliser Sol’Dorn pour prendre Hanning, Eofel et Feldorn, puis de coincer les Principautés entre deux feux. Thaar serait la dernière à tomber, mais comme le Conseil était composé en majorité de personnes acquises à la cause eldéenne, la cité tomberait rapidement. Les drows prendraient ensuite les rennes de ces cités, établissant des dirigeants fantoches et maintenant Krish Al’Serat et ses affidés pour montrer qu’au final « rien n’aurait changé ». Toute opposition serait noyée dans le sang, les drows reprendraient le contrôle de l’Ithri’Vaan et pourraient largement consolider leurs positions avant de déferler sur la Péninsule. Il s’agissait du scénario le plus payant à long terme … et les drows avaient l’éternité devant eux.
« Il serait peu sage de sous-estimer les Sombres, maître Vossula … Ils n’ont pas oublié qu’ils étaient autrefois les maîtres de ces terres et feront tout pour les récupérer d’une manière ou d’une autre. Mais si nous vous avons convoqué, ce n’est pas pour vous réprimander comme un enfant … »
- Mais pour vous proposer notre aide. »
La Protectrice d’Ys venait de se lever. Le petit jeu avait assez duré. Il n’était pas nécessaire de le cuisiner outre mesure …
« Messire Vossula, j’ai le regret de vous annoncer que vous êtes, selon toute vraisemblance, le prochain sur la liste des Eldéens. »
La sang-clair laissa flotter ses paroles quelques instants avant de reprendre :
« Votre récente prise de Hanning n’est pas passée inaperçue. C’était un coup de maître, ce qui vous place désormais comme étant le Prince Marchand avec le territoire le plus étendu de toutes les Principautés, avec à votre actif trois cités dont le territoire dépasse celui de Thaar. Trois cités, qui se trouvent malheureusement sur le chemin des osts pour Naelis …
Krish Al’Serat sera bientôt la reine du Puy. Maralina Irohivrah sera la première à bénéficier du commerce des esclaves que la guerre générera. Quant à Salfaryl le Sombre ou Milynéa Lythandra, s’ils opposent la moindre résistance, ils seront égorgés par la Doth’Ka. Geresh, même si elle n’est pas au Conseil, ne vous sera d’aucun secours. Son patriarche est soit mort, soit trop vieux pour faire quoi que ce soit … Ne parlons même pas des autres cités.
Au final … il ne reste que vous. Vous, qui bénéficiez de trois cités et êtes le seul dans ce Conseil à avoir récemment pris les armes pour les cités estreventines. Vous êtes par conséquent une menace potentielle pour les Sombres : le seul sur qui ils n’ont pas encore de prise. Et malheureusement, vous êtes sur leur chemin. En l’état actuel des forces en Ithri’Vaan, vous serez incapable, même avec l’appui de trois cités, de vous opposer à une motion du Conseil ou à une attaque des Eldéens. Vous êtes vulnérable et vous représentez une menace pour les intérêts de vos pairs et de leurs alliés. Et vous savez pertinemment qu’une alliance ou un accès militaire avec les Eldéens aurait des retombées catastrophiques pour votre commerce avec Naelis et les cités péninsulaires. On ne marchande pas avec des cités carbonisées. »
Elle laissa au Prince – Marchand le temps de digérer ses paroles.
« Ys a trop vu de massacres. Nous ne souhaitons pas la guerre, mais nous n’aspirons pas à une paix factice sous des menaces constantes. Il est possible de bâtir une paix durable avec les Sombres, mais pour cela, nous devons nous trouver sur un pied d’égalité avec eux et nous assurer qu’ils ne puissent dévorer l’Ithri’Vaan. Vous êtes le Prince-Marchand le plus vulnérable et en même temps le plus puissant de la région … C’est pourquoi nous vous proposons notre aide. Faisons-en sorte que les Principautés ne puissent tomber à nouveau sous le joug des Eldéens et parvenons à créer une paix durable entre les peuples. »
Cassiopée sourit. Bien loin de demander de l’aide à Ascanio Vossula, c’était elle qui lui proposait la sienne. C’était un coup à tenter : essayer de faire comprendre au Prince Marchand qu’il était isolé et que la menace qu’il constituait désormais pour les puissances de la région risquait de lui retomber sur la figure s’il ne trouvait pas des alliés sûrs. Restait à savoir si le Prince Marchand aurait assez de jugeotte pour ne pas la repousser. Elle avait parié sur son intelligence et son ambition, deux facettes qui ne laissaient personne insensible en Ithri’Vaan. Et Vossula était un Vaani des plus liés à sa terre.
Ys avait tout à gagner d’un partenariat étroit avec Ascanio Vossula. Avec sa diplomatie et l’appui de la Compagnie Olyane, la cité portuaire avait bon espoir de parvenir d’ici quelques ennéades à rassembler sous un pacte d’assistance mutuel les cités de la Côte Brûlée, ce qui la placerait en tête des cités septentrionales. Une alliance avec le plus vaste territoire estreventin au nord de Thaar pèserait dans la balance si d’aventure, Thaar ne jouait plus le jeu de la paix et se mettait à vendre ses alliés au plus offrant. Il fallait d’urgence rééquilibrer les forces dans la Principauté avant que les Sombres ne réalisent que les cités libres étaient des proies faciles. Mais pour ça, Cassiopée avait besoin d’Ascanio. Restait à savoir sous quelles conditions …
Dernière édition par Cassiopée Meldyrin le Sam 4 Avr 2020 - 12:23, édité 1 fois |
| | | Ascanio Vossula
Ancien
Nombre de messages : 377 Âge : 34 Date d'inscription : 06/04/2014
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 44 ans Taille : Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] Dim 19 Jan 2020 - 14:45 | |
|
Fait rare, Ascanio avait observé un silence religieux pendant l'intervention du représentant de la guilde des cartographes, suivie de celle de la Protectrice. Sensible à la flatterie, il apprécia le fait d'être dépeint comme l'homme le plus puissant de Thaar - le topo sur ses faiblesses trouva moins d'écho dans son esprit. Qu'importe que la flatterie fut un mensonge éhonté ; ces petites phrases caressaient agréablement son orgueil. Bien sûr, il aurait pu démentir certains propos, comme ce raccourci dangereux qui le présentait comme le nouveau maître d'Hanning - mais cela sonnait si bien !
« J'admire cette auguste assemblée pour le don qu'elle a de prédire l'avenir. C'est une force que je n'ai pas, et qui m'aurait évité bien des déconvenues. Toutefois, un avenir qui ne serait fait que de certitudes me rendrait l'existence assez morose. Voyez-vous, par une belle matinée de printemps, je me suis éveillé dans mon lit, les draps défaits, les cheveux ebourrifés, en compagnie de deux sublimes créatures. L'une était une Zurthane à la peau d'ébène, l'autre une elfe farouche à la crinière blonde. Je contemplais avec satisfaction ces beautés endormies, caressant leurs croupes dénudées en tentant de me remémorer mes exploits de la veille, et j'ignorais encore, en cet instant de félicité, que l'une de ces garces m'avait refilé son herpès. Si j'avais pu prédire l'avenir, je n'aurais pas couché avec ces deux femelles ; mais j'aurais manqué une nuit torride et enflammée. La vie est ainsi, Madame la Protectrice ; à trop prévoir les choses, on se prive de belles opportunités. » Il sourit, pas gêné le moins du monde d'évoquer devant une assemblée d'inconnus les détails de sa vie sexuelle. Dans l'esprit du Prince, cette anecdote était une suite logique à ce qu'il cherchait à demontrer ; mais il était probable que les Yssois se soient perdus en tentant de démêler l'intérêt de son coq à l'âne. « Quoiqu'il en soit, je vous dirai ceci : ne préjugez pas trop des faiblesses de Thaar ; le Conseil reste aujourd'hui le mieux à même d'assurer cette stabilité que vous appelez de vos vœux. »
Si excentrique qu'il fut, Ascanio n'en perdait pas le nord - et tant pis pour ceux, nombreux, qui se plaisaient à le dépeindre comme un crétin congénital. Il mesurait le sérieux de l'instant, tout comme il voyait clair dans les intentions des Yssois. La défiance de ces derniers à l'égard du Conseil de Thaar n'était guère plus qu'un prétexte ; en se positionnant à la tête d'une alliance de cités "lucides", Ys cherchait à saper l'influence de Thaar à son profit ; elle voulait mener le jeu en Ithri'Vaan. Et ils veulent faire de moi leur complice, ou leur idiot utile.
Et après tout, s'il acceptait de l'être, cet idiot utile ? Un instant rêveur, il se représenta la déchéance de Thaar, et l'avènement d'un nouveau pouvoir en Ithri'Vaan ; non celui d'Elda, non celui d'Ys, mais bel et bien le sien. Il aimait à croire qu'un jour, l'un de ses descendants, fort des accomplissements de sa famille, restaurerait sous son nom la dignité impériale. Mais peut-être cela se produirait-il de son vivant...
Cela avait peu de chances de se produire, cependant, si Ascanio se proclamait de telles intentions face à un si populeux auditoire, devant des gens qui n'étaient pas les siens, et parmi lesquels se trouvaient vraisemblablement des hommes aux allégeances douteuses. Il était plus que probable qu'à l'issue de la séance, plusieurs missives prendraient le chemin du Puy ou des bureaux de la Corporation d'Argent, afin d'avertir Krish Al'Serat des intentions séditieuses des Yssois. Et probablement de celles du Prince Vossula, si ce dernier s'en faisait le complice. C'est donc d'un ton déterminé qu'il reprit :
« Ma réponse à cette auguste assemblée vous prouvera que nous sommes loin d'être aussi divisés que vous semblez le craindre : je ne tournerai pas le dos à la Confédération de Thaar pour en bâtir une autre. Ce serait une trahison, doublée d'une monumentale erreur ; ce serait rompre l'équilibre des forces sur lequel repose notre puissance. Et pour quel résultat ? De quels puissants atouts disposerait la noble cité d'Ys là où, selon vous, Thaar devrait nécessairement échouer ? Si les braves citoyens d'Ys désirent prendre leurs responsabilités, qu'ils cessent de garder un pied dedans, un pied dehors ; intégrez officiellement la Confédération de Thaar, et nous défendrons nos intérêts tous ensemble, ainsi que nous savons le faire. »
|
| | | Cassiopée Meldyrin Sang-mêlé
Nombre de messages : 230 Âge : 33 Date d'inscription : 27/10/2019
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 150 ans Taille : 1m70 Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] Dim 19 Jan 2020 - 20:56 | |
|
Cassiopée faillit éclater de rire en plein milieu de l’assemblée. Le maître des cartographes se leva :
« Messire Ascanio … votre estimé Conseil et ses représentants nous ont bien signifié par leur silence d'une décennie qu'ils n'entendaient pas nous faire entrer dans la Principauté et ce, même si nous avons mis fin au règne de Kahina d'Ys et libéré le territoire de son emprise. Et maintenant, vous venez nous dire que vous, vous y êtes favorable ? Messire Ascanio, malgré le fait que votre proposition soit plaisante et appréciée par ce conseil, elle arrive néanmoins trop tard. »
Cela faisait bien une décennie qu’Ys avait demandé son rattachement à la Principauté. Mais cette dernière n’en avait rien fait : toutes les missives envoyées étaient restées lettre morte. Au fil du temps, il était apparu qu’Ys avait finalement bien plus à perdre à rejoindre la Principauté sans intégrer le Conseil. Après tout, elle bénéficiait déjà des pactes de non-agression et n’était pas soumise aux monopoles imposés par les Princes Marchands. Il y a dix ans, le rattachement à la Principauté avec l’intégration au Conseil aurait été largement validée par les autorités d’Ys. Aujourd’hui, les choses ne se jouaient plus de la même manière. Le développement de la cité montrait qu’une autre voie était possible hors des pesanteurs des monopoles des Princes Marchands de Thaar, tout en profitant une coopération mutuelle.
Ce fut le maître des juristes qui reprit la parole.
« Nous ne rejoindrons pas la Confédération de Thaar sans conditions. Vous n’avez rien à nous proposer que nous n’ayons déjà messire Ascanio et nous avons trop attendu les réponses du Conseil. Néanmoins, par le pacte de défense mutuel qui nous lie, nous nous trouverons toujours aux côtés du Conseil si l’Ithri’Vaan est attaqué. Ys a toujours honoré ses promesses et continuera de le faire, soyez-en assuré. Nous sommes d’ailleurs très honorés de votre présence : vos pairs ont toujours refusé nos invitations par le passé. Cela, nous ne pouvons vous le retirer. »
Les Treize étaient plutôt conciliants. C’était rare. Ils ne pouvaient pas non plus accabler totalement le Prince Marchand. Il n’était qu’un nouveau venu dans ce jeu … mais il était intéressant de voir qu’il continuait à défendre bec et ongles le Conseil quand bien même il avait une cible dans le dos. Il était venu pour présenter ses respects à la cité côtière et leur dire qu'il partageait le souhait de les voir intégrer la Principauté. Mais il arrivait trop tard ...
Le représentant de la guilde des tisserands frappa dans ses mains pour terminer les discussions qui commençaient à s’enflammer entre les Cinquante.
« Chers amis, nous allons désormais passer au reste de notre ordre du jour. Madame la Protectrice, veuillez accompagner messire Vossula hors de cette assemblée. Nous en savons assez pour pouvoir délibérer. Messire Vossula, merci d’avoir donné de votre précieux temps au Conseil des Guildes d’Ys. En espérant que vous fassiez bon voyage de retour et que vous ne manquerez pas de transmettre les sympathies d’Ys au Conseil de Thaar. »
Quelques sourires furent échangés entre les Treize et les discussions reprirent de plus belle entre les membres de l’assemblée. Normalement, une réunion de ce type aurait duré plus de temps, mais le Prince Marchand arrivait avec quelques années de retard pour leur annoncer son soutien. Si sa position diplomatique et ses manières étaient impeccables et correspondaient bien à ce que l’on attendait d’un Prince Marchand, il était … en retard sur les événements. Et le Conseil des Guildes n’avait pas de temps à perdre avec des gens peu sérieux. Néanmoins, sa venue avait été appréciée.
Le Prince Marchand fut accompagné par les gardes de la république marchande à la sortie de l’assemblée et du palais d’Ys, suivi par la Protectrice. Lorsque les portes du palais se refermèrent derrière eux, laissant les deux Princes Marchands seuls, la jeune femme le dépassa et s’assit sur les marches. Elle sortit des poches de sa jupe un biscuit sec et une petite flasque d’alcool de Baaz’Hima qu’elle débouchonna et tendit à Ascanio.
« Vous ne vous en êtes pas trop mal sorti Ascanio. Heureusement que j’ai discrètement fait annuler la livraison de tomates au palais ce matin. Je voyais déjà la main du maitre brasseur le démanger. Buvez, ça vous fera du bien. Et mangez ça aussi, ça fait passer le tout. »
Elle soupira et posa ses mains sur ses genoux. L’air était doux en cette journée et il n’y avait pas un seul nuage. La journée allait être belle à Ys. Elle finit par se retourner vers lui et le toisa de ses yeux gris clair.
« Ne les excusez pas. Ils sont à cran en ce moment et sont un véritable calvaire à supporter. Mais il faut faire avec le peuple que l’on a et pas avec celui que l’on aimerait avoir. Ils sont cependant sérieux sur le fait de ne plus vouloir intégrer la Principauté, mais vous pouvez leur faire confiance : ils n’ont qu’une parole et même moqueurs, ils ne sont pas plus comploteurs que d'autres et rempliront leurs engagements si jamais la guerre vient. J’ai cependant une question : pensez-vous sincèrement que les Eldéens oublieront leurs vues sur ces terres, maintenant que Krish Al’Serat s’apprête à devenir leur reine ? »
Dernière édition par Cassiopée Meldyrin le Sam 4 Avr 2020 - 12:25, édité 1 fois |
| | | Ascanio Vossula
Ancien
Nombre de messages : 377 Âge : 34 Date d'inscription : 06/04/2014
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 44 ans Taille : Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] Jeu 23 Jan 2020 - 0:49 | |
|
La rebuffade opposée par la Chambre avait surpris Ascanio ; il avait mésestimé la rancune et la fierté des Yssois. Hélas ! La main tendue qu'il leur offrait arrivait bien tard. Mon père aurait dû tendre la sienne en son temps, songeait amèrement Ascanio, mais son père n'avait jamais eu le cran de s'opposer frontalement à la ligne majoritaire du Conseil de Thaar. Tiberio Vossula, pourtant, n'avait jamais compris pourquoi ses confrères avaient refusé qu'Ys intègre la Confédération ; il était probable que lesdits confrères l'ignoraient tout autant. Le Conseil de Thaar est comme un seul corps avec plein de têtes, il marche dans tous les sens, avance d'un pas et recule de trois. Un miracle qu'il ait fonctionné jusqu'à maintenant.
Ce qui était fait était fait ; ressasser un problème n'était pas le résoudre. Ce qui comptait, à présent, est de voir de quelle manière le Prince pourrait exploiter la situation d'Ys à son avantage. Loin des regards et des oreilles de la Chambre, à la faveur d'un tête à tête avec la Protectrice sur les marches du Palais, Ascanio pouvait désormais s'exprimer plus librement qu'il n'aurait pu le faire face à la foule. Et lorsque Cassiopée en revint à évoquer Krish Al'Serat - on en revenait toujours à elle - les lèvres d'Ascanio s'étirèrent en un sourire mauvais.
« Seriez-vous à la place de Krish Al'Serat, renonceriez-vous à faire la guerre à vos amis ? Je crois, Cassiopée, que Krish Al'Serat n'a pas le choix. Les Eldéens ne jurent que par leur sacro-saint Eda Vengeur ; tout l'or de Thaar ne saurait les en détourner - ce serait même le contraire. Je n'ai jamais compris comment Krish s'y est prise pour rallier ces cinglés, mais ils ne l'ont pas choisie par hasard, et elle n'a pas pris le pouvoir au Puy pour y enfiler des perles. » Il considéra un bref instant la flasque d'alcool de Baaz'Hima qu'elle lui proposait, et son esprit divagua. Azhar Tahwi Salougan, le Prince qui a baisé et engrossé Caley, venait de cette ville, le petit salaud. « Vous ne devriez pas boire cette horreur. »
|
| | | Cassiopée Meldyrin Sang-mêlé
Nombre de messages : 230 Âge : 33 Date d'inscription : 27/10/2019
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 150 ans Taille : 1m70 Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] Jeu 23 Jan 2020 - 12:16 | |
|
Cassiopée resta le regard planté dans sur le décor qui s’étendait devant elle.
« Vous avez une drôle de conception de l’amitié, Ascanio, car ne fais pas la guerre à mes amis. Al’Serat avait tout le temps du monde pour convaincre les Eldéens d’une coopération pacifique avec l’Ithri’Vaan. Si cela avait effectivement été son intention, nous pouvons en conclure que Sol’Dorn est le résultat de son cuisant échec. Même si l’on envisageait ne serait-ce qu’un instant que la future reine du Puy soit de bonne foi, ses actions et leurs conséquences montrent le contraire … Et vous avez raison, les Eldéens ne l’ont pas choisi pour enfiler des perles … »
Elle reposa la flasque sur le sol et la reboucha après qu’Ascanio eut rejeté une lampée.
« C’est une horreur effectivement … Mais comme le Prince Marchand de Baaz’Hima a le monopole sur le commerce de l’alcool, il inonde les marchés de sa piquette bonne à chier des ronds de cuir et cela fait des mois que je cherche un moyen de me fournir en meilleur alcool. Je préfère de loin le vin péninsulaire et celui de la Côte Brûlée ... »
Et avec l’arrivée des nouveaux engagements commerciaux avec Missède et Odélian, elle allait pouvoir fêter dignement l’arrivée des fabuleux alcools péninsulaires avec la guilde des armateurs. Leurs soirées étaient les meilleures de la cité. Elles se finissaient souvent dans une barque au milieu de la mer, mais c’était le jeu ! Elle sourit et croqua dans l’un des biscuits qu’elle tenait dans ses mains.
« Vous savez, ma famille vit en Ithri’Vaan depuis plusieurs générations. Les drows de ma famille abandonnèrent les enseignements de leur dieu vengeur et aspirèrent à une vie de paix hors de la fournaise du volcan. Le simple fait que j’existe me tienne à côté de vous aujourd’hui, à parler d’égal à égal, prouve que la paix est possible. Tous les drows ne sont pas voués corps et âmes à leur divinité destructrice. C’est là où je ne peux accorder mon pardon à la nouvelle reine : elle avait la possibilité de ne pas entrer dans un nouveau cycle de violence. Elle pouvait le briser, même temporairement … et elle n’en a rien fait. Et à cause de ça, nous risquons à nouveau une nouvelle Calcination ... et pas seulement Ys. »
La Calcination : l'évènement fondateur de la Nouvelle-Ys ... et le trépas de l'Ancienne. C'était il y a plus de 200 ans, mais les Yssois avaient la mémoire longue. Les immortels qui avaient survécu à cet évènement en étaient encore traumatisés. Cassiopée avait recueilli leurs récits ... tous plus terrifiants les uns que les autres. Il fallait absolument que cette tragédie ne se reproduise. La Nouvelle-Ys avait été fondée à la fois sur un traumatisme et un espoir.
|
| | | Ascanio Vossula
Ancien
Nombre de messages : 377 Âge : 34 Date d'inscription : 06/04/2014
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 44 ans Taille : Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] Dim 26 Jan 2020 - 0:12 | |
|
La Protectrice d'Ys avait sorti les violons. Poignante, elle dépeignait avec émotion un avenir bien inquiétant, tout en chargeant son lot de reproches sur les épaules de Krish Al'Serat. Pour une raison étrange, Cassiopée semblait déçue ; avait-elle vraiment imaginé qu'une reine thaarie au Puy eut pu changer la donne ? La déception semblait sincère. Pour qu'elle se soit accrochée à un tel espoir, Cassiopée devait vraiment nourrir de sérieuses inquiétudes pour le sort de son peuple. On dirait une mère avec ses enfants, pensa Ascanio, qui n'avait pas eu de mère mais avait connu l'amour de nombreuses nourrices. Cette pureté de cœur était frappante chez la Protectrice d'Ys ; le Prince se serait imaginé que, pour atteindre le rang qui était le sien, Cassiopée devait bien être animée d'une once de duplicité. Si tel était le cas, elle la cachait fort bien.
« Je crois, moi, en dépit de tout ce qui se raconte, que Krish est demeurée viscéralement thaarie bien plus qu'eldéenne. Et c'est précisément pourquoi elle est terriblement dangereuse. »
Si le Puy d'Elda passait pour symbole d'un Mal absolu, les Princes Marchands étaient loin d'être des enfants de cœur ; ils tiraient les ficelles d'un régime corrompu, régnant au nom de l'avarice, supprimant leurs rivaux à coups de réglementations arbitraires. Seul un fragile équilibre des forces les empêchait de se jeter les uns contre les autres ; mais que cet équilibre vacille, et ce serait la fin. Une fin dont pourrait se réjouir le Prince, pourvu qu'elle lui profite. Je vendrais mes trois enfants contre une armée comme celle de Krish, pensait volontiers Ascanio, et cela confirmait au moins ce que pouvait penser Cassiopée : l'avenir s'annonçait noir, noir comme le fond du fond d'un drow.
« La domination du Conseil sur les principautés ne repose que sur une règle unique : oppression. Nous ne nous sommes libérés du joug eldéen que pour copier l'essence de leur pouvoir : la menace, la violence. C'est une chose qui devra changer, car Thaar ne résistera aux Eldéens qu'en reniant tout ce qu'elle leur doit. Et je souhaite œuvrer à cela, Cassiopée, mais j'espère de tout cœur en avoir le temps. »
|
| | | Cassiopée Meldyrin Sang-mêlé
Nombre de messages : 230 Âge : 33 Date d'inscription : 27/10/2019
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 150 ans Taille : 1m70 Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] Lun 27 Jan 2020 - 13:28 | |
| « Vous voyez bien que votre modèle de gouvernance arrive à ses limites… »
Elle se rappela ce qu’une haute-prêtresse de Néera lui avait dit il y a quelques années. Elle l’avait posé devant une aporie : « Fallait-il que le suzeain soit bienveillant ou indifférent envers ses sujets ? ». En fait, il s’agissait d’un dilemme sans fin. Un suzerain indifférent au sort de ses sujets les laisse libre de faire ce qu’ils souhaitent, mais leur est inaccessible en cas de besoin. Un suzerain qui veille au bien être de ses sujets prend le risque de s’immiscer dans leur vie, jusqu’à leur dicter la manière dont ils doivent la conduire. Le souci de ce dilemme est qu’il constitue un faux choix dans la mesure où quelle que puisse être votre décision, votre vie est suspendue au bon vouloir du maître.
Cette aporie avait forcé Cassiopée à trouver un moyen de la contourner. Le problème n’était pas de savoir si le suzerain était bon ou indifférent – ou mauvais. Le problème était qu’il y avait un suzerain, une personne pour décider de votre vie ou de votre mort, sans que vous ayez votre mot à dire dessus. La solution était là : pourquoi ne pas « abolir » le suzerain ? La question était de savoir par quoi le remplacer.
Avec les forces vives d’Ys, Cassiopée avait trouvé dans l’établissement d’une oligarchie marchande une ébauche imparfaite mais stimulante de solution à cette aporie du souverain bienveillant. En se dotant d’institutions élues par les citoyens, il devenait possible aux hommes de basses extractions de se gouverner eux-mêmes, comme une société d’hommes libres. La dynamique des pouvoirs entre ces mêmes institutions rendait impossible – ou du moins compliquée - l’apparition un despote, même éclairé.
C’était imparfait, mais c’était déjà plus encourageant pour les années à venir que pour le reste de l’Ithri’Vaan.
« Il est clair que régner en despote, même éclairé, ne vous sera pas d’un grand secours si d’aventure les Eldéens viennent frapper à votre porte. Du coup, que comptez-vous faire ? »
Dernière édition par Cassiopée Meldyrin le Sam 4 Avr 2020 - 12:26, édité 1 fois |
| | | Ascanio Vossula
Ancien
Nombre de messages : 377 Âge : 34 Date d'inscription : 06/04/2014
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 44 ans Taille : Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] Sam 1 Fév 2020 - 23:27 | |
|
Ce qu'il comptait faire ? C'était une grande question. « Dans un premier temps, j'espérais que vous m'inviteriez à dîner », répondit le Prince en badinant, rompant avec le sérieux de son propos. « J'ai certes échappé au lancer de tomates mais, ma foi, j'en aurais bien dégusté une ou deux ; mon ventre n'a pas arrêté de faire grouiiiiiik tout au long de la séance. J'espère que ça ne s'est pas trop entendu. » Il glissa un sourire à la Protectrice d'Ys, bien conscient qu'il n'avait pas répondu à sa question. Il ferma quelques instants les yeux, appréciant la douceur yssoise, avant de grimacer ; il s'était assis sur un caillou qui lui piquait le fondement. Il bougea son séant pour ramasser la pierre, contemplant celle-ci entre ses mains. Si mon magnifique cul était le destin de Thaar, ce caillou, c'est le Conseil, pensa Ascanio qui n'avait pas son pareil pour trouver de judicieuses comparaisons. « J'ai une devinette pour vous, Cassiopée. C'est l'histoire d'une femme jeune et séduisante, dont la fortune n'a d'égale que la beauté, mais malheureusement un peu cruche. Appelons-la Cunégonde, ce sera plus facile pour suivre l'histoire. Ou Odinette, c'est plus joli. Non, mieux ! Thaara. Thaara, c'est bien. » Ses yeux pétillaient de malice alors qu'il se perdait dans les détails. « Elle habite dans une splendide baraque, et des princes et des aventuriers arrivent du monde entier pour lui faire leurs avances. Or, voyez-vous, Thaara est un peu coquine sur les bords ; toute pimpante de juvénilité, elle arrangue le chaland, écarte grand son entrecuisse humide et laisse tout ce beau monde visiter son sein. Hélas ! Tous ses amants ne sont pas bien intentionnés ; ils lui susurrent à l'oreille des mots doux, endorment sa méfiance et la flattent de serments d'amour, alors qu'ils ne cherchent qu'à la déposséder de tout ce qu'elle a. » Il haussa les épaules, alors qu'un élan d'amertume voilait son visage et assombrissait sa voix. « De tous les amants de Thaara, quelques-uns seulement sont sincères dans leurs sentiments et aimeraient la protéger ; mais ils divergent sur la manière de s'y prendre. Le premier pense qu'il suffit de la mettre en garde contre la duplicité des mauvais amants ; le second, quant à lui, prétend que Thaara est trop entêtée pour entendre raison, et qu'il vaudrait mieux trancher la tête de tous les mauvais amants pour la protéger de sa propre naïveté ; le dernier, le plus pessimiste de tous, croit qu'il n'arrivera jamais à protéger Thaara et qu'il vaudrait mieux qu'il noie son chagrin dans les bras d'une autre femme. De ces trois hommes, Cassiopée, qui est le plus sage ? »
|
| | | Cassiopée Meldyrin Sang-mêlé
Nombre de messages : 230 Âge : 33 Date d'inscription : 27/10/2019
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 150 ans Taille : 1m70 Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] Mer 5 Fév 2020 - 23:53 | |
|
« Et bien … si vous êtes capable de supporter une omelette maison et quelques épices, je serai ravie de vous confectionner moi-même à dîner. A moins que votre palais ne soit trop délicat. »
Elle avait joint ses deux mains sur son genoux gauche et se balançait lentement au gré de la légère brise qui glissait sur les colonnes du palais d’Ys. Le Prince-Marchand poussait sa chance un peu loin, mais la Protectrice était décidée à jouer le jeu et à se laisser porter.
En revanche, la devinette du seigneur de Feldorn était … hum … sommaire. Franchement, il y avait du laisser-aller dans les métaphores que savaient employer les Princes-Marchands. La plupart n’étaient certes pas des intellectuels et des poètes, mais quand même … un peu plus d’imagination par Arcamenel !
Elle l’écouta étirer sa devinette en longueur, sans laisser paraître son ennui. Elle était très forte à feindre l’intérêt alors que, avouons-le … ce n’était pas d’un très haut niveau de réflexion. Ascanio ne faisait qu’essayer de maquiller à grands coups de truelle les trois scénarios qu’il imaginait mener pour ses propres plans sur Thaar. Même un sourd aurait compris.
La jeune femme prit le temps de feindre une longue réflexion avant de répondre d’un ton neutre :
« Le plus sage, Ascanio, c’est l’homme qui s’est tenu loin de la couche de Thaara. Car voyez-vous, c’est ainsi que se transmet la vérole. L’homme sage est celui qui, pendant que les idiots tentaient d’obtenir la demoiselle pour mettre la main sur ses biens, se contentait de mener ses affaires. Ainsi, quand les trois hommes s’entretueront pour cette femme vérolée et que cette dernière mourra de son affliction, l’homme sage se tiendra au milieu des sépultures et prendra ce qui lui reviendra de droit. »
Elle se releva. Aucun de ces trois hommes n’était plus sage qu’un autre. Ils avaient commis la même erreur : penser qu’obtenir le cœur d’une femme était obtenir ses biens. Or, Cassiopée était bien assez femme pour savoir que les demoiselles d’Ithri’Vaan étaient bien loin d’être des plantes d’ornement et savaient se montrer retorses et manipulatrices. L’homme sage est celui qui connait ses limites et une des grandes limites que l’on apprenait à ses dépends en Ithri’Vaan, c’était que le cœur d’une femme n’était jamais acquis.
« Parfois Ascanio, le meilleur moyen de gagner, c’est bel et bien de ne pas jouer. »
|
| | | Ascanio Vossula
Ancien
Nombre de messages : 377 Âge : 34 Date d'inscription : 06/04/2014
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 44 ans Taille : Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] Dim 16 Fév 2020 - 16:29 | |
|
Ascanio accueillit la réponse de Cassiopée avec détachement, comme si sa devinette n'attendait pas de solution particulière. Il sourit, épousseta sa tunique canari qui avait prit la poussière, tout en mûrissant la pensée de la Protectrice d'Ys. Le meilleur moyen de gagner, c'est bel et bien de ne pas jouer. Une règle qu'appliquaient à la lettre les Princes Marchands depuis déjà de nombreuses années ; cela expliquait en partie l'absence de réaction du Conseil aux événements de Sol'Dorn. Attendre que le monde s'écroule pour en ramasser les miettes, traduisit Ascanio en son for intérieur, c'était là ce que préconisait Cassiopée - quand, dans le même temps, la Chambre des Guildes dénonçait cette même attitude.
Ainsi était la sagesse. Mais le monde n'appartient pas aux hommes sages. Sinon, ce ne serait pas autant le bordel, conclut Ascanio, et cette conclusion était fort sage.
« Vous oubliez que ce que veut l'homme sage, c'est Thaara. Lorsqu'il se tiendra au milieu des sépultures, à la recherche de ce qui lui revient de droit, l'objet de ses convoitises ne sera au mieux qu'un cadavre en putréfaction, au pire un tas de cendres. La sagesse doit-elle condamner un homme à baiser une morte ? » Il fit la moue. Il avait fait des trucs bizarres dans son existence, mais ça, pas encore. « Ça me semble peu engageant. » Il ôta son chapeau à plumes et se gratta la tête - ça lui donnait toujours l'air un peu ahuri. « Le monde regorge d'autres femmes, mais on ne désire jamais autant que ce que l'on a perdu. Les hommes éprouvent de semblables sentiments pour leurs cités, Cassiopée ; je me suis laissé dire que la Nouvelle-Ys n'avait pas effacé les cicatrices de l'ancienne. »
|
| | | Cassiopée Meldyrin Sang-mêlé
Nombre de messages : 230 Âge : 33 Date d'inscription : 27/10/2019
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 150 ans Taille : 1m70 Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] Dim 23 Fév 2020 - 20:47 | |
|
Visiblement, le Prince Marchand n’avait pas saisi la subtilité de l’argumentaire savamment filé de la Protectrice. Elle ne s’en formalisa pas et tenta de réarticuler son propos en étant la plus claire possible.
« Comment vous expliquer cela sans circonvolutions ? Disons que si vous voulez les biens de quelqu’un, profitez du fait que cette personne s’épuise avec ses prétendants et se croit au-dessus de la mêlée pour lui dérober petit à petit ses avoirs et ses actifs pendant qu’elle vous ignore. Ici, nous appelons cette technique la Ruée vers l’Elda : faire croire à tout le monde qu’il faut regarder à droite alors que l’important, c’est ce qui arrive sur votre gauche. »
Quant à Ys …
« Il est vrai que la Nouvelle-Ys se languit de l’ancienne… »
Elle montra au loin les ruines de la Calcinée, dévorées par une luxuriante forêt.
« Mais je suis une patience rare pour une sang-clair, maître Vossula et les Yssois ne vivent pas dans le passé. Pendant que vous vous évertuez à filer des métaphores douteuses sur le fait de baiser des mortes, ce qui … avouons-le, est du plus mauvais goût … - mais vos goûts ne regardent que vous - , j’ai passé le plus clair de mon existence à occuper les vides laissés par vos estimés pairs. Ys-la-Vieille est un paravent bien utile que les membres de votre Conseil n’ont de cesse de me jeter à la figure pour m’humilier et me faire comprendre que je ne suis qu’une parvenue dirigeant à bout de bras une cité insignifiante. »
Elle s’étira à nouveau tel un chat.
« Mais comme je vous le disais, c’est une Ruée vers l’Elda. Pendant que vos pairs pensent que la Nouvelle-Ys n’a d’yeux que pour l’Ancienne et ne souhaite qu’obtenir réparation pour les torts du passé, mes hommes et moi avons officiellement ouverts des routes sûres vers la Péninsule, jusqu’à Odélian et Missède. Vos amis du Conseil … prenons-en un au hasard … je ne sais pas moi … le vendeur d’alcool tient. Peut-il en dire autant ? Si j’ai beaucoup de respect pour vous, pour le maître nain et pour la Dame Blanche, qu’ont fait les autres pour la prospérité générale, mis à part se vautrer dans le lit des Eldéens et gaspiller leur fortune ? »
Cassiopée attrapa un nouveau biscuit et en croqua un morceau.
« Observez bien le bilan de vos pairs du Conseil, qui contraste étrangement avec votre propre réussite personnelle. Que s’est-il passé ces dernières années ? Vous avez méprisé Ys au sein de la Principauté, vous n’arrivez pas à dialoguer correctement avec les cités du Bassin du Nahl, le commerce avec Esion ne profite qu’aux Drows, les Zurthans ne sont toujours pas pacifiés. Naélis se méfie de vous, les elfes vous méprisent, les Péninsulaires aussi et les Eldéens vous prennent pour des bouffons en maintenant à la tête de votre Conseil la directrice de la Corporation d’Argent et en assiégeant Sol’Dorn sans que vous ne puissiez rien faire. S'ils attaquent Naélis en passant par la Principauté, ils vous jetteront un paquet d’argent au visage pour faire de vous leur putain et vous verrez ceux que vous pensiez être vos pairs se baisser le cul à l’air pour le ramasser. Et qui s’opposera à cet affront ? Vous sans doute, en comptant la Dame Blanche et le maître des Milles Caves. Et si les Eldéens ont de la suite dans les idées, ils se contenteront de vous déposer et vous perdrez tout. Vous finirez vos jours dans un bordel pour les Oboks Senger et pour ma part, ma tête sera au bout d’une pique. Avouez que ça ne donne pas spécialement envie. »
La perspective ne la réjouissait guère. Elle aimait bien sa tête, surtout quand elle était attachée au reste de son corps. Cependant, il n’était pas nécessaire d’accabler plus le prince de Feldorn. Seul le temps lui dirait comment ce curieux personnage allait évoluer. Cassiopée était patiente. Personne ne s’occupait de ce que faisait Ys. Personne n’en avait jamais rien eu à faire et c’est pourquoi, elle avait toute latitude pour avancer dans ses propres projets.
« Bien … Passons à des choses plus réjouissantes si vous le voulez bien ! Je viens de vous promettre un diner et je compte bien me montrer à la hauteur de ce défi. Et je suis curieuse d’en savoir plus sur comment vous vous êtes débrouillé pour prendre Hanning et en savoir plus sur cette nouvelle soie d'Eofel. »
Elle écarta le bras, l’ouvrant vers la ville en contrebas du palais et fit une légère révérence. Avec un peu de chance, elle aurait de quoi préparer une belle omelette agrémentée de délicieux ingrédients. C’était loin de ce à quoi un Prince Marchand pouvait aspirer, mais la Protectrice était confiante en sa capacité à produire un met de qualité avec peu … Et puis, elle avait dans sa cave un excellent fin péninsulaire et un jambon sec d’Odélian arrivé il y a quelques ennéades qui dégageait un fumet incomparable ! |
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] | |
| |
| | | | Les séances de la Chambre des Guildes [Ascanio] | |
|
Sujets similaires | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |