An 18 du Cycle XI, Bàrkios, Elenwënas de la neuvième ennéade
Oesgard-la-CitadelleLe ciel est nuageux, mais aucune goutte ne tombe. Les vents d'hivers s'en sont allés depuis plus d'un mois, laissant place aux chants des oiseaux. Ces maudits oiseaux serviteurs d'Arcam ! Allez donc voler ailleurs que devant ma fenêtre !
De fureur je me lève de ma chaise, ouvre brusquement le volet de la fenêtre à moitié fermée et lance le premier objet à portée de ma main sur l'arbre aux pleurs oranges planté juste en dessous. Le porte-manteau en bois de noyer termine sa chute dans les branchages, emportant avec lui une foulard d'or et de carmin ainsi qu'une cape aux armoiries d'Oësgard, tous deux désormais pris dans les feuillages de l'arbre en fleurs.
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Valet ! Hurle-je d'un ton sec, à l'adresse d'une paersonne hors de la salle.
La porte du bureau s'ouvre et en jeune homme en franchis le seuil, ne s'avançant que d'un pas.
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Oui, Vôtre Honneur ?-
Allez donc récupérer ma cape. Qu'on la lave et m'en apporte une autre. Lui ordonne-je, sans même porter un regard sur l'intéressé.
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Votre cape, Vôtre Honneur ? S'étonne-t-il.
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Ma cape ! Dans le jardin ! Pressez !-
Oui, Vôtre Honneur. Tout de suite, Vôtre Honneur.Il n'est pas très dégourdi, ce nouveau valet, mais je l'aime bien. Il sait préparer mes habits et nettoyer mon armure de manière impeccable, un tel talent est rare.
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Et ramenez mois mon fibule.Une tel oeuvre, ciselée des mains d'un artisan extraordinaire, une pièce unique digne d'un orfèvre, tout de même. Il y a intérêt à ce qu'il soit propre et en bon état.
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Ce sera fait, Vôtre Honneur.La porte se referme derrière mon valet, et me revoilà seul dans le bureau. Les oiseaux chantent, toujours, mais plus loin. Et c'est tant mieux.
Soufflant mon exaspéraration, je reprend place dans le siège confortable derrière l'épais secrétaire en bois, et reprends en mains la missive que j'ai déjà trop lue. Qui donc est cette Louise de Fernel ? Quand l'ai-je rencontré ? Je n'en ai point le moindre souvenir. Pourtant ce nom m'est vaguement familier. Père Othrall a dit que Fernel serait une seigneurie de Serramire. Etait-ce en ce temps ? J'ai eu beau tenter de me le remémorer, et pourtant... Si ! Quelque chose me revient ! Fernel, n'était ce pas le nom de ce vieux Châtelain ? Nous l'avions croisé une fois ou deux, à la Cour du Corbeau... Ce vieux piaf, qu'il soit damné par le jugement de Tyra ! Oarg... Je m'égare. Le vieux Châtelain aux pains sucrés... N'avait-il point parlé d'une fille, une fois ? Je n'écoutais pas vraiment ses palabres, à dire vrai. C'est tout ce dont je me souviens, alors peu m'importe si c'est elle ou une autre.
Mais qu'est-ce donc que cette missive ? Par Othar, une Drow ! Une Drow, en terres Nordienne. Quelle exécrable plaisanterie, si c'en est une. Le petit corbeau essayerait-il de se jouer de moi, en ayant recours à l'une de ses soupirants ? Oarg, il n'oserait tout de même pas... Si, il oserait. Un oeuf de corbeau ne donne pas un meriale. Pour autant, si l'information est vraie, cela reste préoccupant. Oarg ! Oh, et puis que le Brochant aille à Arcam ! Je ne puis décemment point ignorer une telle chose !
An 18 du Cycle XI, Verimios, Kyrianos de la première ennéade
Serramire, Seigneurie de FernelLa matinée arrive à son terme, la course du Soleil s'apprête bientôt à passer de l'ascention au déclin. La température est agréable, sous les frondaisons de la forêt menant à Fernel. Au-dessus, de timides nuages protègent les animaux des rayons printaniers. Sur le chemin encadré par les arbres, deux cavalier approchent lentement du château. Inutile de se presser, lorsque le voyage a été plus agréable qu'espéré. L'un des cavalier est un homme au port digne et aux habits riches, quoi que dotés de l'austérité des couleurs oësgardiennes. L'autre est un homme d'aspect plus médiocre, sans pour autant atteindre le miséreux, loin s'en faut. Si le premier monte fièrement un cheval de bonne racée, le second a pour monture ce de celles qu'un noble refuserait, un canasson qui malgré ses muscles solides n'a pas une posture assez harmonieuse. Arnaché à la celle de ce cheval, deux grandes cages sont couvertes chacune d'un drap confectionné spécialement à cet effet. Se présentant devant les portes du castel, le plus digne des deux cavalier présente aux gardes les armoiries d'Oësgard présentes sur son écusson tout en prenant solennellement la parole.
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Le bonjour, gardes ! Nous sommes des émissaires, envoyés par Oësgard. Nous avons un message à transmettre à Dame Louise de Fernel. Pourriez-vous transmettre à icelle l'information de notre présence, je vous prie ?Dépassant de peu le mètre quatre-vingt et avec une carrure de guerrier, l'homme possède malgré tout un visage avenant. D'une quarantaine d'années tout au plus, il le regard de ceux qui on vu tant de choses, qui ne se laissent pas tromper aisément. De lui se dégage une aura à la fois dure et douce, que l'on ne saurait expliquer au premier abord. Avec politesse et fermeté, il attendra de rencontrer la dénommée Louise de Fernel en personne, d'être assuré de son identité, après quoi seulement il lui transmettra en main propre la missive gardée en sa possession, cachetée du sceau du Baron d'Oësgard.
Elenwenas, neuvième ennéade, Bàrkios de l'an 18, Cycle Onze
De Son Honneur Geoffroy d'Oësgard,
Baron d'Oësgard et Seigneur d'Amblère
A Dame Louise de Fernel
Noble Dame,
Oësgard vous est gré de la considération dont vous faite part en nous informant de la présence présumée de noirelfes sur le territoire nordien. Soyez assurée qu'Oësgard a, et aura toujours, comme objectif primordiale la protection de nos frontières.
Toutefois, les faits mentionnés dans votre missive nous étant adressée demeurent préoccupants. La menace Noirelfique n'est point à prendre à la légère, à fortiori s'il est fait mention d'une "Légion Sainte".
Aux fins de porter au clair cette affaire, nous avons mandaté un émissaire pour qu'il se rende en votre fief dans les délais les plus bref. Sire Erwyn de Fenroër, détenteur de cette présente missive, est notre prévôt envoyé. Ce dernier a autorité d'Oësgard sous les regards de la Damedieu et de l'Aveugle pour attester la gravité de la situation. Nous vous demandons de mettre à sa disposition les témoins afin qu'il puisse les interroger : l'esclave, le ferronnier, les autres que vous n'auriez point mentionné.
Comptant sur votre collaboration,
Que le Guerrier nous Protège,
Son Honneur Geoffroy d'Oësgard,
Baron d'Oësgard et Seigneur d'Amblère.