De sang, de métal et d'éther [PV Lòmion]

Kÿrianos de la première ennéade de Verimios
19e année du XIe Cycle

Ta main glisse dans ton dos, et tu bout du doigt tu retraces les contours des renflements d’or qui s’y trouvent. Avec le temps, ce qui n’était qu’une écaille avait fini par devenir un tapis entier, ayant épousé la forme du dessin commémoratif apposé par les habitants de l’Île du Sanctuaire.

L’Or t’observe.

Et tu ne sais pas à quel point tu dois t’en réjouir… ou t’en inquiéter. Tu le sens, la poigne de la créature sur toi se resserre, son influence sur ton corps, ton Souffle, et ta relation avec l’éther s’accroît… ou alors est-ce toi qui lui accorde cette place ? Est-ce lui qui te manipule, de quelque manière que ce soit, ou est-ce au contraire toi qui ploie face à lui ? Et si tu ploies face à lui, ploies-tu face à son influence, ou face à ses simples mots ?
La nécessité de la guerre, des combats, tu la vois toujours. La paix que tu désires, tu n’as pas abandonné l’idée de te battre pour l’obtenir, seulement aujourd’hui plus que jamais elle te paraît une réalité tangible. Autrefois cet équilibre, tu ne faisais qu’y aspirer, convaincu que si vous pouviez vous en approcher et bec et ongles le défendre, il ne serait jamais véritablement atteint. Aujourd’hui cependant, tu étais capable d’imaginer un monde qui connaisse la Paix, et il y avait finalement dans cet espoir plus de force que tu ne l’imaginais.

L’Or t’observe.

Mais comment ? Faute d’espace mental, tu ne t’étais pas réellement posé la question jusqu’à aujourd’hui. Tes responsabilités quotidiennes en tant qu’Aran, vos mouvements en Annon, l’imminence d’une potentielle réunion avec les dirigeants des contrées de l’Ouest et surtout, ta famille avaient trop occupé tes pensées pour que la créature écailleuse ne s’en accapare une part. Ta tranquillité nouvelle cependant – d’autant plus en ces temps d’effervescence – avait attiré l’attention, et celle de Kaëlistravaë la première. Plusieurs fois la nature de l’expérience que tu avais vécu sur l’Île était revenu sur le tapis, et plusieurs fois la question de la nature de ton lien avec l’Or s’était posée. Jamais cependant ces questions ne s’étaient-elles assez longuement posées pour que tu ne cherches à obtenir une réponse. Jusqu’à aujourd’hui.

Pour ce que tu en savais, ces derniers mois n’avaient pas été particulièrement cléments envers l’Assaila. Tes échanges avec les élèves et professeurs de l’Académie t’avaient peint l’image d’un elfe devenu taciturne, moins avenant qu’à son habitude, moins patient et plus agressif dans sa manière de s’attaquer aux problèmes. Lòmion passait par une période difficile, mais s’il était une chose qui ne semblait pas avoir faibli, c’était bien son entrain lorsqu’il s’agissait de faire avancer La Connaissance. De manière « agressive » ou pas.
Peut-être alors le mystère que tu lui présenterais suffirait à le dérider pour quelques temps.

Tu toques donc à la porte du Doyen, attendant la réponse à cette dernière question avant de lui poser la prochaine.

Le temps passe, et aucune réponse ne se fait entendre. Tes sourcils se froncent, et l'espace d'un instant, tu t'inquiètes de l'état du Doyen. On te l'avait dit s'être fait taciturne, mais en était-il vraiment arrivé au point d'ignorer quiconque frapperait à sa porte ? Quelques instants durant, tu te poses la question de s'il valait mieux l'arracher à sa solitude ou la respecter. Quelques instants ensuite, tu commences à te demander s'il ne lui était pas arrivé malheur, s'il n'en arrivait pas au point où l'anxiété commençait à avoir raison de lui. Heureusement tu n'eus pas le temps de le penser bien longtemps que l'un des Clercs t'interpelait.

- Si tu cherches heru Lòmion ça ne sert à rien d'attendre ici. Dernièrement on ne le croise plus beaucoup hors du Relicarium.  

- Merci. tu hoches la tête J'y vais.

Le Relicarium. L'étude de la Mare avait coûté cher... et plus que tous l'Assaila en payait le prix fort. Finalement, il était bien probable que détourner son attention de l'objectif que Lòmion s'était fixée était une mauvaise idée. Tu es bien placé pour le savoir. Parfois, il fallait arriver au bout des choses pour guérir, quitte à lamentablement échouer. Et tant que l'on n'était pas arrivé au bout des choses, alors tout le reste n'était qu'au mieux futile distraction et au pire attaque envers votre précieux temps. Tu saurais ce qu'il en est en temps et en heure.

La trame était agitée. Agitée au point de rendre floue ta seconde vue. Lorsqu'ils disaient que le Doyen avait adopté une approche plus agressive, ils ne plaisantaient pas... Ce fut donc sans surprise que tu trouvas, à ton arrivée dans le Relicarium, un mysticiste plongé dans d'intenses rituels. Le genre de rituels que tu préférais ne pas interrompre.

La tenue du jour:

La sèche intervention de l’Archimage t’arracha un léger sursaut. Tu ne comptais déjà pas plus t’approcher, alors à défaut de t’arrêter dans ta procession, elle pressa un peu plus d’inquiétude sur ton front. Tu interrompais quelque chose d’important, et quoi que cela ne te pousse pas à essayer de te faire petit – tu aurais de toute façon bien du mal – tu t’en trouvais profondément gêné. Certes, tu avais été curieux de ce que faisait le Doyen. Certes, tu étais d’une certaine manière venu dans l’idée de lui changer les idées. Cependant, loin de toi la volonté de l’arracher à quelque chose qu’il n’aurait autrement pas voulu arrêter.

- Assaila. tu lui rends la révérence Je suis désolé, je ne pensais pas vous interrompre. tu offres un regard contrit aux collègues du mysticiste, leur étendant tes regrets Je peux revenir lorsque vous aurez plus de temps.

Tu marques un début de pas en arrière, mais le regard du Doyen te retient. Un sourire te rassure un brin quant à son état et quelque mots terminent de te convaincre de rester.

- Nous reprendrons dans quelques heures. Les recherches sont épuisantes et nous avons besoin de repos. un concerto de soupirs et de roulement d’yeux appuie la déclaration Ta venue a-t-elle un lien avec l’artefact que tu portes, Artiön ?

L’un de tes sourcils se soulève, et par réflexe tu tires ton sceptre de son fourreau. Par réflexe, tu fais faire quelques tours au focaliseur avant d’en pose le pied contre le sol. Ce n’est au final qu’après avoir posé l’œil quelques secondes sur ton propre sceptre que tu t’étais rappelé de ce qui y était accroché.

- Et bien… ta main libre se pose contre l’arrière de ton crâne alors qu’un sourire gêné se dessine sur ton visage ...en partie. tu te retournes, donnant ton dos au mysticiste sans complètement briser le contact visuel Disons qu’en réalité, j’étais un peu plus préoccupé par cette partie-là…

Fort de quelques inutiles fioritures de plus, la tête de ton bâton s’accroche au dos de ton vêtement pour libérer jusqu’à tes trapèzes. Comme pour mieux se faire remarquer, les écailles d’or y dessinant le crâne de dragon se laissent un instant envahir par l’éther, faisant pulser le visage reptilien d’une vague de lumière, au même instant jumelée sur l’écaille accrochée à ton sceptre.

- Je ne sais pas si tu as eu l’occasion d’entendre parler de ce qui m’est arrivé pendant mon voyage sur l’Île du Sanctuaire. tu as rendu la chose publique à ton retour d’Annon, alors tu aurais préféré que oui, cela t’aurait évité d’avoir à raconter cette histoire une fois de plus, mais au vu du récent isolement du Doyen, les chances étaient grandes que tu aies à recommencer Mais pour faire simple, tout ça a commencé après ma rencontre avec l’un des Dragons d’Or. tu te retournes, pour à nouveau faire face à ton interlocuteur Je sais que vous avez récemment eu l’occasion d’étudier la nature du lien entre dragon et dragonnier, alors je me disais que mon cas pourrait vous intéresser.

Parce qu’il était différent surtout. Tu ne ressentais pas de connexion avec l’Or, toi. Ou du moins s’il y en avait une, tu n’en étais pas conscient. Tu te sentais observé cependant. Mais ça… ça tu l’attribuais plus à des paroles qui te poussaient à te surveiller toi-même, et à l’occasion à réfléchir autrement, que tu ne l’attribuais à un véritable regard d’une Créature de légende sur toi.

Étais-ce là plus une réussite qu’un échec ou alors le contraire ? À quoi bon se poser la question ? Le Doyen semblait aussi fasciné que tu l’imaginais par ta situation, et pour le coup, te semblait dans ses réactions totalement égal à lui-même. Loin du personnage tirant vers le taciturne que décrivaient les rumeurs. Lui donner l’occasion de s’écarter un peu de ses sujets d’inquiétudes habituels aura donc été une bonne initiative de ta part… à moins qu’à cause de toi il ne se trouve d’autres raisons de s’inquiéter.

- J’aurais effectivement dû y réfléchir un peu, tu baisses la tête et poses le dos de ta main libre contre ta hanche mais de mon côté, ça va bien faire une décennie que Cìryon en a veiné mon focaliseur, alors je dois avouer que maintenant j’y suis plutôt habitué.

Une décennie à peine. Cela n’était pas grand-chose toutes proportions gardées, mais en une décennie constamment au contact d’un objet faisait finalement presque partie intégrante de ton corps… de ton corps arcanique en tout cas ; les habitudes se faisaient vite. Et il le fallait. Après tout, autrement, c’était ça ou se retrouver séparé de la trame. Ce qui aurait pu arriver en réalité, et tu n’y avais jamais ni pensé ni réfléchi. Certainement parce que Cìryon en t’offrant ce sceptre n’y avait pas non plus pensé une seule seconde. Il voulait t’aider et te faire plaisir. Tu avais accepté son aide avec plaisir. Et tout le reste de ta réhabituation avait été conditionnée par cela. Là était le plus grand pouvoir de l’Esprit.

- Sinon, oui, c’est avec plaisir que j’offre mon corps à la science. tu ris doucement Du moins à condition de ne pas finir sur une table de dissection. tu lèves les yeux une seconde Et si j’ai le temps surtout. tu soupires S’occuper à la fois d’une famille, d’un royaume et de soi-même est plus chronophage que ça n’en a l’air.

Ton regard cherche un instant ton dos et ton front se plisse. Le lien qui unissait Dragon et Dragonnier… peut-être faudrait-il que tu t’y intéresses d’un peu plus près. Car quelque chose en tout cas te liait avec l’Or, et en savoir plus sur ces créatures en règle général pourrait t’aider à mieux le comprendre.

- Au moins pour l’instant je suis rassuré de ne pas avoir une créature étrangère dans le crâne.

- Par quoi commencer…

Ton regard fuit vers le lointain à la recherche d’une réponse, tandis que tes souvenirs livrent rude bataille pour décider d’où devait se placer le point de départ de ton récit. Tu l’avais fait plusieurs fois pourtant, ce récit. Au point d’en être presque fatigué. Tu l’avais fait officiellement, aussi, face à tout ton peuple. Mais ce que l’on dit à tous n’est pas ce que l’on dit à ceux qui nous sont proches. Sans leur mentir, il est des choses que tu n’as pas dévoilé, car il est des choses qui ne concernent pas les tiens. Des questions qui n’appartiennent qu’à toi, et des sentiments que tu ne dois qu’à ta famille. Restait maintenant à savoir : souhaitais-tu inclure le Doyen au sein de ce petit cercle de privilégiés ?

- Quand je suis parti pour l’Île du Sanctuaire, j’étais en rémission. ton regard retrouve celui du mysticiste, tandis que vous errez à travers les jardins Autant physique que mentale. Après les événements de ces dernières années, j’avais vraiment besoin de repos, alors je suis parti là-bas me recueillir quelques temps. tu souris à l’idée du temps passés avec les habitants de l’Île Et je dois dire que rien que ça m’a fait beaucoup de bien. L’endroit est incroyablement paisible, et les habitants sont très accueillants. ton sourire se transforme en une moue pensive Et c’est peut-être que je trouvais le séjour trop tranquille, mais après quelques ennéades là-bas, et à force d’en entendre parler à demi-mot, et de les voir survoler le village, je n’ai pas résisté à l’idée d’essayer d’observer les dragons près de leur Nid, alors avec mon ami Cìryon qui m’accompagnait pendant le séjour, on est parti à leur recherche.

La « curiosité elfique » disaient-ils. Tu te souviens encore avoir été profondément surpris de constater le peu d’intérêt accordé par les habitants du Sanctuaire aux Créatures de légende vivant juste à côté d’eux. Ou du moins, pas tant leur peu d’intérêt – car ils accueillaient les moindres nouvelles informations avec beaucoup d’excitation – mais leur nonchalence.

- Finalement, ce sont les dragons qui nous ont trouvés les premiers. tu te souviens du cri, ayant résonné longtemps avant que vous ne posiez les yeux sur la Créature Et leur premier réflexe a été d’essayer de nous dissuader de plus approcher… ce qui n’a évidemment pas fonctionné. tu lèves les yeux au ciel, à la fois consterné par ta propre attitude et confiant dans l’idée que si tout était à refaire, tu agirais exactement de la même manière Pas avec moi du moins, parce que Cìryon a été un peu plus craintif et à partir de là a décidé de rester en retrait. Et finalement, de mal en peine j’ai fini par apercevoir ce qu’on cherchait.

Le souvenir des émotions qui t’ont traversé à ce moment-là est encore vif. La crainte, la colère, la fascination, la jalousie, l’émoi, le bonheur, tout était encore si près, si récent. Y repenser suffisait à refaire bouillir ces sentiments contradictoires en ton tripes au point de te pousser proche de l’ulcère. Et pourtant tu étais toujours souriant, presque impassible, contant cette histoire comme si de rien n’était. Tu avais fait ton deuil de l’harmonie que tu avais un temps espéré pour ton Souffle, voilà tout. Maintenant que tu avais embrassé ce chaos, il ne te dérangeait plus. S’autoriser à ressentir était profondément libérateur.

- Si les anciens traités que l’on a conservé sont exacts, le Malthen’delth qui nous a accueilli devait être un jeune dräke... tu fronces les sourcils en essayant de te remémorer ce que tu avais pu lire sur les dragons ...mais quoi qu’il en soit, pour en revenir à l’histoire, après avoir vu qu’on l’avait aperçu, il nous a ouvertement demandé de partir. Du moins, il nous a fait comprendre qu’il voulait que l’on parte… Enfin… je ne saurais pas comment l’expliquer. Ce n’est pas comme s’il avait « parlé », il nous l’a juste fait comprendre. Sur le moment c’était tout aussi évident que s’il l’avait clairement prononcé. La chose avait quelque chose de réminiscent des Chants, sauf que contrairement aux Chants, le message était incroyablement clair.

Sur le moment il ne t’était pas passé par l’esprit de réfléchir à la nature de ce contact. Ni au comment ni au pourquoi. Tout paraissait tellement évident, tellement censé. Une Créature de Légende communiquait avec vous d’une manière qui était la sienne, et que vous compreniez sans faire le moindre effort… pourquoi alors remettre quoi que ce soi en question ?

- Encore une fois j’ai refusé d’obtempérer, et à la place j’ai continué d’avancer vers lui. tu soupires Il faut dire que j’étais assez remonté. Je n’aurais jamais pensé le vivre comme ça, mais juste voir un dragon en face était quelque chose d’assez éprouvant, et être chassé par un dragon, comme si pour une raison ou une autre il nous craignait avait quelque chose de profondément rageant, de presque insultant. tu baisses le regard un instant avant d’avouer C’était difficile pour moi – et ça l’est toujours au final – d’accepter que des Créatures aussi puissantes puissent me percevoir moi, un pauvre elfe, comme une menace. Et c’était encore plus difficile à accepter en sachant à quel point leur environnement était paisible, et comment leur puissance n’était pas gaspillée… mais presque. tu roules des yeux de manière préemptive Enfin, là-dessus je vous vois venir Heru Assaìla tu lances avec une pointe de sarcasme amusé mais quoi que vous en disiez, de mon point de vue d’ancien chef de guerre, voir une pareille puissance « dormir » quand n’en posséder qu’une fraction serait assez dissuasif pour éviter beaucoup des conflits qui guettent à la porte de chez vous est une expérience plutôt difficile à vivre. Imaginez vous une seule seconde face à un Caranthir qui n’en aurait rien à faire d’en apprendre sur l’éther et peut-être que vous comprendrez. tu ris doucement Bref, le dräke a vite compris ma frustration – ma souffrance, selon ses mots – et m’a plus ou moins tiré les vers du nez. ton regard se perd à nouveau Et ce-faisant, il m’a donné l’occasion de comprendre la manière dont les siens concevaient La Paix. tu fronces les sourcils Ce qui m’a probablement le plus marqué dans ce qu’il m’a dit, c’est l’idée que chercher la paix pour quelqu’un puisse se traduire par chercher la paix contre un autre. une moue désapprobatrice se dessine sur ton visage Et j’avoue que je n’avais jamais pensé la chose de cette façon. J’en comprends la logique, mais j’avoue avoir du mal à y souscrire. Après tout, en tant que soldat, je n’ai jamais été appelé à défendre la paix aux dépens de qui que ce soit. La guerre a toujours été à mes yeux quelque chose de simplement inévitable, auquel il fallait réussir a survivre. Et au final, on ne m’a jamais présenté l’élimination d’un ennemi comme un triomphe. Les batailles sont inévitables, mais être forcé de batailler m’a toujours été présenté comme une défaite en soi, et la vraie victoire comme d’obtenir que la guerre n’ait plus de raison d’être et cesse. tu lèves les sourcils en repensant à l’attitude du dräke face à ce qui avait été tes propos les plus présomptueux Je pense qu’il a fini par se rendre compte que malgré la peine que j’ai à concevoir un monde où l’on aurait plus à livrer de guerre, nos aspirations n’étaient pas bien différentes. tu ris à nouveau Puis au final j’ai tenté ma chance et j’ai demandé si pour accompagner cette histoire, je pouvais avoir un souvenir pour mes enfants, et c’est là qu’il m’a offert l’écaille. ta main vient se poser sur le haut de ton crâne Et une larme. Une larme qu’il a versé sur le haut de mon crâne et une écaille qu’il m’a offert de sa poitrine « pour participer à l’enseignement des miens ».

Participer à l’enseignement des tiens… tu peines encore à comprendre exactement ce qu’il entendait par là. Tu as ton idée de la chose, mais elle est pour l’heure encore floue. Pour l’instant tout ce que tu as su faire de cette promesse, c’est une nouvelle mission à remplir en tant que l’Aran béni du Malthen’delth. Une responsabilité d’utiliser l’aura que t’as conféré la Créature pour s’assurer que les tiens recherchent bien La Paix et non pas simplement Leur paix.

Ton focaliseur est stoppé dans son élan lorsque le Doyen se saisit de l’écaille. Naturellement, votre marche ralentit, et le déroulement du temps est comme entravé par le départ de la conscience du mysticiste à travers les flux. Fidèle à lui-même, Lómion semble déjà s’interroger tant sur la nature de l’objet que sur son impact sur la trame. Tu l’avoueras, ces questionnements te seront passés loin au-dessus de la tête. Plus terre à terre, ce qui t’a intéressé toi, c’était de comprendre l’impact que l’objet semblait avoir directement sur toi. Non pas à travers ses attributs arcaniques, mais de par son essence biologique. Mais sachant ses centres d’intérêts, la question posée par l’Archimage t’apparut comme l’évidence même.

- Ce qui m’est arrivé est malheureusement tout ce que j’ai pu voir de sa magie. tu soupires, désolé Donc pour la part dont j’arrive à peu près à saisir l’essence, je ne pense pas me tromper en la comparant à notre magie de Vie. Mais pour le reste… tes sourcils se plissent et tes lèvres se pincent dans un instant de réflexion ...il m’aurait fallu pouvoir l’observer la pousser plus proche de ses limites pour pouvoir émettre une quelconque forme de jugement. Qui sait, peut-être que ses pouvoirs s’expriment d’une manière similaire à notre magie de Vie en certaines conditions, mais qu’en réalité leurs limites sont totalement différentes.

La manière dont Elenmàr vous avait enseigné la magie, ou du moins, ce que vous aviez pour l’heure compris de ses enseignements avait cela de restrictif que beaucoup des manifestations plus primales, plus sauvages de la magie vous restaient incompréhensibles. Maîtriser ce qui était devenu « votre version » de l’Art était déjà une tâche colossale, alors comprendre la manière dont les créatures de légende interagissaient avec les flux…

- Et honnêtement, même si j’en avais vu plus – à moins que par chance ils n’obéissent aux mêmes règles que nous – je ne pense pas que j’aurais été capable de rendre justice à l’utilisation qu’une Créature de Légende fait de l’éther. Je vous laisse ce travail avec plaisir. tu ris Je me contenterai de lire ce que vous en écrirez ensuite.

- « Aisément ». tu te pares d’une moue douteuse Je ne pense pas que ce soit le mot juste.

Tes sourcils se plissent en repensant aux premières ennéades d’après la « bénédiction ». Car pour une bonne part, tu les auras vécues loin de toute forme de magie. Que ce soit la tienne ou celle du Malthen’delth. Et pourtant… pourtant…

- J’ai récemment passé quelques ennéades en Annon, alors que c’étaient les enfants à Alëandir qui gardaient l’écaille. ton regard fait un instant mine de se pencher sur ton propre dos Ça n’a pas empêché ma… « transformation » pour autant, tes joues se pincent avant que tu ne rajoutes et mes enfants n’ont pas non plus été affectés. Alors peut-être qu’il y aurait moyen pour moi de rompre le lien, mais ce ne serait probablement pas si facile. tu inspires longuement Et aussi présomptueux que ça puisse paraître… je doute que la magie de l’écaille affecte un autre porteur comme elle m’affecte moi. La larme doit y être pour quelque chose j’imagine.

Ton index se porte à tes lèvres, et un instant de réflexion s’impose à toi. Participer à l’enseignement des tiens. Tout en revenait toujours à cela. Et tout pour l’instant laissait à comprendre que la mission était tienne et tienne seule. Le Doyen pouvait t’aider. Son aide serait même précieuse, mais il ne pouvait pas t’apporter toutes les réponses en un jour. Il faudrait lui donner le temps, et te donner le temps.