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| [Cambriolage sur la Rue Morgue] [ Nessa ] | |
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La Ronce de Diantra
Humain
Nombre de messages : 132 Âge : 42 Date d'inscription : 22/02/2008
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| Sujet: [Cambriolage sur la Rue Morgue] [ Nessa ] Ven 24 Avr 2009 - 11:29 | |
| [ Suite du sujet : [Manoir de la Maison Usher] - Concerto des Filantes ] L'on disait de nombreuses choses sur la Ronce de Diantra, certaines simples et d'autres proprement extravagantes. Etrangement, mais celà n'était il pas tout simplement l'essence du merveilleux, les secondes étaient souvent plus proches de la réalité que les premières. De multiples témoignages accordaient à la Ronce de Diantra une allure changeante. La Milice de Diantra l'aurait désigné comme étant Monsieur de Vorkosigan, homme aimable à l'humeur régulière, serviable au possible. La pègre, elle, en avait des souvenirs plus disparates. Certes, l'escogriffe répondant au nom de Miles de Vorkosigan était l'identité la plus probable de la Ronce. Mais au regard de nombreux témoignages échangés sous le manteau, la Ronce était déjà apparue sous les traits d'une jeune femme blonde, lors de l'affaire du Mas Carpone, sous les traits d'un enfant pas encore pubère lors de l'affaire des "Blancs Manteaux" ou encore d'un sordide nain encanaillé à l'occasion de l'éclaircissement de "L'étrange cas des disparus du Carosse Hurleur".Au premier jugé, la rumeur avait attribué les faits de la Ronce à un Changelin, mais celà n'expliquait pas les cas d'ubiquité de ce curieux personnage. Par la suite, l'on avait parlé d'un illusionniste, émis une théorie sur un curieux pouvoir de passe-muraille ou encore, d'un être éthéré. Parfois, les plus imaginatifs l'avait rêvé en personnage à mi-chemin entre l'ensemble de ces extrêmes. A tel point que nombre de criminels repoussaient leurs projets lorsqu'une vieille mule se tenait proscrite dans un coin de la scène, par prudence.La vérité, vous l'aurez bien compris, était bien plus simple. Monsieur de Vorkosigan, lorsque le besoin s'en faisait sentir, se payait des doublures. La jeune femme blonde n'était autre qu'une actrice pour laquelle Monsieur de Vorkosigan avait rédigé un rôle de composition. Le fait qu'elle répète son texte en place publique avait été suffisant pour générer une telle méprise. Lors de l'affaire des Manteaux Blancs, ce n'est autre que Moucheron - apprenti bon à rien de la Ronce - qui, échappé de l'autorité parentale, s'était cru capable de résoudre seul l'affaire. Enfin, pour la curieuse histoire du Carosse Hurleur, Monsieur de Vorkosigan n'avait fait que proposer un parfum au Miel à un nain en mal d'aventures amoureuses, lequel en allant visiter une Maison de Plaisir, s'était trouvé emporté par les kidnappeurs oeuvrant sur ce Carosse. La Ronce, armé par les bons soins d'un ami horticulteur, avait réussi à suivre - à grand mal, reconnaissons le - la trace d'abeilles au travers de la ville pour arriver à trouver le repaire de ces brigands.Rien qui ne puisse donc s'expliquer de manière rationnelle.Le pas léger, armé à sa gauche de son sabre et à sa droite d'un Moucheron, la Ronce de Diantra remontait une ruelle jusqu'à la Tour des Passe-Passe, laquelle faisait angle avec la Rue Morgue. La Ronce ralentit le pas et passa la tête dans la rue avec prudence, juste le temps de jeter un oeil. Moucheron agit de même, à sa hauteur." Ils ne sont pas encore arrivé, bien bien bien... " commenta la Ronce.Moucheron frappa de son poing droit dans la paume de sa main gauche." Alors, c'est ici que nous mettrons un terme à cette embrouille " répondit Moucheron en sortant un stylet de sa manche.La Ronce se redressa de toute sa taille et observa l'arme d'un oeil appréciateur. " Voyons voir ça " dit il en tendant la main. Son apprenti la lui remit en affichant sa fierté lorsque la Ronce commenta l'équilibre et le tranchant de l'arme." Elle doit parfaitement couper et se lancer " précia la Ronce en prenant la lame par sa pointe." Pour sur ! " réagit Moucheron. Il ne s'offusqua que lors la pointe de la lame, projettée d'un mouvement badin, s'enfonça de plusieurs centimètres dans le bois d'une poutre, placée à trois bons mètres du sol." Effectivement, elle coupe et se lance fort bien " badina la Ronce, pendant que Moucheron fulminait à ses pieds." J'exige que ... " puisa l'enfant dans ses ultimes réserves de patience.La Ronce de Diantra dégraffa son fourreau de sa taille et se hissa sur un tonnelet afin d'aller installer son arme en haut de la poutre, à l'abri des oeillades indiscrètes. Un tête-en-l'air aurait pu la remarquer, mais la plupart des gens marchaient usuellement en regardant leurs pieds." Un jour, il vous faudra bien répondre à cette question ! " poursuivit Moucheron. " Qui est ? " demanda-t-il en déplaçant le tonnelet. " Savez vous oui, ou non, vous servir de cette arme ? "La Ronce réfléchit un instant." Ce n'est pas mon style, voilà tout. " répondit il." Votre ... " " Puisque je t'ai privé de ton arme, je me prive de la mienne, ce n'est que justice... Maintenant... Dépêches toi, la leçon continue... Mais à l'intérieur de la propriété de la Maison Lectus " dit il en jetant un oeil dans la Rue Morgue, vide de toute présence. Il réunit ses mains et fit la courte échelle à Moucheron pour que ce dernier se hisse sur le mur d'enceinte. Il prit ensuite appel sur une aspérité qu'il était venu reconnaitre quelques jours plus tôt et après un rapide examen des alentours, pénétra dans les jardins de la Maison Lectus... ses jardins... ses fontaines... et ses richesses. |
| | | Nessa Calianthe
En attente de validation.. Nombre de messages : 19 Âge : 124 Date d'inscription : 29/02/2008 Personnage:.: MANUSCRIT :.: Âge : Taille : Niveau Magique : Non-Initié | Sujet: Re: [Cambriolage sur la Rue Morgue] [ Nessa ] Ven 1 Mai 2009 - 22:02 | |
| La Dame Calianthe se faufilait à la suite des deux compères, leur laissant bien deux voire trois longueurs d'avance. Il ne s'agissait pas qu'elle se fasse repérer par un gamin à peine pubère répondant au doux sobriquet de Moucheron, ni par cet homme qu'elle aurait juré bienséant quelques minutes plus tôt. D'ailleurs, être découverte était une option inenvisageable pour elle : elle en était encore à se demander pourquoi elle avait foncé tête baissée dans ce guêpier, et pourquoi donc elle s'enfonçait encore plus loin dans les ennuis. Après tout, elle ne connaissait que peu ce Monsieur de Vorkosigan, il aurait pu tout aussi bien se jouer d'elle et accomplir quelques méfaits ailleurs. Auquel cas, sa peau ne vaudrait pas bien cher s'il l'a trouvait sur son chemin.
Elle avançait, à pas feutrés, tandis que les deux hommes - du moins l'homme et l'enfant - continuaient leur route vers leurs sombres desseins. La Danseuse imaginait tour à tour moult aventures dont la Ronce et son compagnon de fortune étaient voleurs, bandits, mécréants, scélérats, malandrins, aigrefins. Assaisonnés d'histoires aigre-douces, elle improvisait des scénarii aussi fins qu'improbables.
Ainsi, ils s'en allaient enlever la fille bien aimée d'un Haut Dignitaire de Diantra, profitant du bal, et de l'heure tardive où laquelle une jeune fille de bonne famille est forcément au chaud dans son lit. Ou encore, ils partaient s'acoquiner avec une bande de renégats, fomentant quelques complots à l'encontre du Roi. Dans une autre version, toute aussi tordue mais bien moins plaisante, Monsieur de Vorkosigan et Grenouille étaient en fait à l'origine des vols de corsets, bustier et autres sous-vêtements féminins. A son arrivée dans la ville, on l'avait en effet prévenue qu'un singulier satyre sévissait en ce moment dans la capitale et ravissait aux jeunes femmes leur lingerie ; personne n'avait encore pu l'attraper. Se pouvait-il que ce soit justement la Ronce, accompagné d'un abominable gamin en avance sur ses fantasmes ?
Dans tous les cas, si Nessa en sortait vivante, elle filerait droit avertir les autorités, moyennant quelques espèces sonnantes et trébuchantes. Il fallait bien vivre. Et lorsqu'une fête serait donnée en son honneur... Elle en profiterait pour donner une représentation, et ainsi se faire mieux connaître de l'aristocratie diantresque. Elle était gagnante, sur tous les tableaux.
Son imagination fertile faillit la faire repérer lorsque Monsieur de Vorkosigan et Moucheron stoppèrent à un angle de rue. Elle s'arrêta un brin trop tard, prenant conscience qu'une filature à moitié endormie équivalait à un suicide. Remettant ces idées en place, la Dame s'éclipsa à temps derrière un étal vide. Par chance, les deux humains n'avaient pas encore regardé en arrière et ne l'avaient donc pas aperçue.
C'est d'assez près, donc, qu'elle pu voir la Ronce de Diantra lancer une sorte de couteau et mettre l'arme hors de portée de l'enfant, qui fulminait à ses côtés. Décidément, ces deux-là n'avaient rien de pervers ou de gredins ; elle fronça les sourcils et s'apprêta à rebrousser chemin, jugeant ses propres fantasmes complètement délirants. La nuit porte conseil, et un sommeil réparateur aura tôt fait de laver ses soupçons.
Alors qu'elle se décidait à partir lorsqu'elle le pourrait, Miles de Vorkosigan déposa sa propre épée en haut de la poutre poignardée par le couteau, cachée, puis il disparut en compagnie de son acolyte dans le jardin d'une propriété jouxtant le théâtre des évènements.
La tentation était omniprésente. Passé quelques instants, étant sûre qu'ils ne reviendraient pas immédiatement, Nessa se releva de sa cachette et se plaça sous la poutre, un air curieux affiché sur son visage. Elle porta un doigt sur ses lèvres, réfléchit quelques instants puis se saisit du tonnelet qui avait permis à la Ronce de placer là son épée. Elle se hissa dessus avec grâce et elle tendit les bras vers le fourreau. La Dame était plus petite que le Sieur, aussi se grandit-elle le plus possible, sur la pointe des pieds, pour toucher la garde de l'épée.
"Viens là ma mignonne !" grogna une voix bien imbibée derrière elle.
A force de concentration, elle n'avait pas entendu les pas irréguliers se rapprocher d'elle. Des mains grossières se saisirent de sa taille, et, par les forces d'équilibre bien connues, le tonnelet se renversa.
Privée d'appuis, les pieds de la Dame se retrouvèrent irrémédiablement attirés vers le sol, tout comme le reste de son être. Et malgré la finesse de sa taille, la demoiselle ne valait pas moins qu'un poids mort.
Poids mort qui, malencontreusement, heurta de plein fouet le ventre du bougre insensible. L'estomac du gaillard, qui était à son contraire bien réceptif, ordonna à son patron qu'il était temps de se soulager des quelques litres de bibines avalées plus tôt dans la soirée.
Renversant sans ménagement la Danseuse sur la caillasse, il se pencha en avant et commença à se soulager les entrailles.
Pendant ce temps, le Fourreau, qui n'était pas en reste, avait été déséquilibré par les efforts de Nessa pour l'attraper, et tanguait dangereusement au-dessus du vide.
Du vide ? Non ! Pensez-vous : lorsqu'il chuta, la garde de l'épée entra en un contact fort peu aimable avec la tête du quidam. Lequel ne se releva pas.
"Ouille" lâcha Nessa, en conclusion fort peu élégante de cette série d'événements étranges.
Elle se redressa, se massa les reins en grimaçant, s'assura que le type saoul n'était pas mort - pour sûr, il ronflait - et attrapa le fourreau prodige.
Le bruit de la chute avait pu alerter les personnes alentour, aussi décida-t-elle de ne pas s'attarder plus que nécessaire. Elle détacha avec précipitation une fleur de ses cheveux, la lassa choir au pied de la poutre, côté abrité ; seul quelqu'un venant de ce côté pour venir y chercher quelque chose pourrait trouver la pièce de tissu.
Puis elle se sauva le plus vite possible, ne se souciant plus ni d'être aperçue ni de faire du bruit ; elle courrait à perdre haleine, en direction de sa Demeure.
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| | | La Ronce de Diantra
Humain
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| Sujet: Re: [Cambriolage sur la Rue Morgue] [ Nessa ] Jeu 14 Mai 2009 - 9:18 | |
| Le diabolique, que dis-je, l'infâme Moucheron - ou Grenouille, nommez le comme vous le souhaitez - émergea le premier de la Maison Lectus. L'enfant, presqu'adolescent, se dégagea des jardins par le portail de fer forgé, sans se soucier nullement d'être vu. A sa suite, les mains dans les poches, venait Monsieur de Vorkosigan, l'air tout aussi désinvolte que son apprenti.
« Voilà une affaire rondement menée » précisa la Ronce de Diantra en refermant le portail derrière d'un bon coup de talon. Grenouille, déjà au milieu de la rue, ne put s'empêcher d'apporter son grain de poivre en précision de cette assertion.
« Effectivement, pourtant il reste comment dire, quelques nota bene, post scriptum et autres menus détails perfectibles... » entama-t-il.
« ... voilà un discours fleuri qui masque bien des puanteurs.. Je vous en prie Maître Nouille, dites moi ce qui était perfectible dans cette scène ? » pérora la Ronce d'un air enchanté.
« Le Majordome vous a cassé la gueule » annonça Grenouille d'un ton neutre.
« Peuh ! » rétorqua la Ronce, en sortant sa main gauche de sa poche pour masser son menton endolori. Il passa sa langue sur ses lèvres pour gouter un peu du sang qui coulait encore et leva son index à l'image d'un instituteur s'apprêtant à donner la solution d'un épineux problème.
« C'était foutrement nécessaire ! Pour mettre le vieux en confiance... Il ne m'a pas défiguré au moins ? » questionna-t-il en présentant son profil.
« Pas plus que Mère nature ne l'a... Tiens... une surprise... » cracha Moucheron en contemplant un homme ivre installé contre le mur de la ruelle d'où il y a peu les deux compères complotaient en préparation de leur effraction.
« ... Au jugé... une centaine de kilos de surprise » jugea la Ronce, en posant sa botte droite sur son épaule. Il se hissa ensuite en prenant leur invité comme marche-pied en direction de la poutre qui lui servait depuis peu de râtelier.
A la force des bras, la Ronce hissa son visage au dessus de la poutre, afin de récupérer l'arme dont il tirait son surnom. S'arrachant à la gravité terrestre la Ronce prit quelques centimetres. Il cligna des yeux quelques instants, hésita encore une paire de secondes et de stupéfaction, lacha prise. Il retomba en arrière, fesses premières au sol.
« ... Mon... arme... envolée... volée ! » caqueta-t-il en tremblant légèrement de colère, de surprise et d'autres sentiments trop complexes pour être décrit.
« ... Pour ce qu'elle vous sert de toute manière ! » ajouta-t-il en ramassant la fleur laissée au sol à proximité du point de chute de la Ronce.
Moucheron ramassa une fleur et l'examina sous toute ses coutures. La Ronce se redressa, examina la fleur en toute hate, l'homme assoupi puis Moucheron.
« ... Gardez votre calme » conseilla Moucheron.
Monsieur de Vorkosigan lui offrit un sourire aimable et appaisé, avant de se jeter avec l'avidité d'un mort de faim croisant un plateau de desserts sur l'homme assoupi, le soulevant du sol et le secouant comme un prunier, lui arrachant parfois quelques gloussements contentés.
« ... Mignonne » gloussa-t-il.
« ... Je crois que notre affaire est claire et limpide. » annonça Moucheron.
« ... il se fout de ma poire » compléta la Ronce en le secouant de plus belle.
« ... C'est votre danseuse qui a fait le coup... Mais comme elle l'a signé... Elle ne devrait pas poser trop de problèmes à vous rendre votre bien » précisa Moucheron d'une voix lasse.
La Ronce rendit sa liberté au bon Monsieur en le laissant s'effondrer au sol, en un bruit gras.
« ... En route. » ordonna la Ronce de Diantra, en rebroussant chemin d'un pas décidé. |
| | | Nessa Calianthe
En attente de validation.. Nombre de messages : 19 Âge : 124 Date d'inscription : 29/02/2008 Personnage:.: MANUSCRIT :.: Âge : Taille : Niveau Magique : Non-Initié | Sujet: Re: [Cambriolage sur la Rue Morgue] [ Nessa ] Ven 29 Mai 2009 - 18:34 | |
| La Demoiselle courrait comme si quelques démons sanguinaires s'étaient lancés à ses trousses. Elle filait à toute allure, le vent giflant ses joues fraîches, portant à son teint la couleur que seul un pinceau de maître peut sublimer ; ça et là, des fleurs de tissus se répandaient sur sa route, traçant une sente odorante de cerisiers en fleurs. Elle regretterait sûrement d'avoir égaré quelques-uns de ses précieux atours, mais elle aurait toute la nuit et le lendemain pour soupirer à leur perte. Et tous les autres jours à venir pour penser à ce qu'elle venait d'accomplir.
Elle n'était pas une voleuse, tout juste un brin curieuse ; mais toujours Prudence s'était rappelée à elle afin de la tenir écartée de tout danger. Et voilà qu'à peine arrivée dans la capitale humaine elle commettait crime et impair. Car ses explications ne resteraient que vagues et sombres, si d'aventure quiconque l'interrogeait sur ses actes : curiosité n'est pas un mobile qu'il est bon de citer pour se justifier.
Mais qu'importe ! Mues par une mécanique antique, les jambes de Nessa se pliaient et de déployaient sans faiblir, tandis que ses bras graciles emportaient l'objet du délire. La Danseuse ne s'arrêta que devant sa demeure, sans un regard un arrière, les pommettes roses. Déverrouillant la porte d'entrée avec hâte, et la refermant à clé avec tout autant de rapidité, elle ne s'autorisa une halte qu'après être montée dans sa chambre, seule.
Le fourreau qu'elle tenait contre son cœur n'avait pas l'air d'une valeur particulière. Sobre, il dénotait du bon goût dont manquaient souvent les nobles et bourgeois gentilhommes qui s'en paraient plus comme d'un bijou que comme d'un étui de protection pour leur arme. Caressant distraitement le cuir, elle n'osa cependant pas en sortir l'épée, jugeant que ce serait aller trop loin dans la violation de l'intimité du propriétaire de la lame. La Dame Calianthe déposa délicatement sur son lit sa prise et s'accorda enfin un répit.
Elle était essoufflée, d'avoir couru si longtemps ; son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine. Éperdue de fatigue, elle aurait bien voulu s'étendre là et dormir, sans penser à rien d'autre qu'au sommeil réparateur ; mais les rêves attendront qu'elle se rafraîchisse, qu'elle se délasse afin de n'avoir ni courbature, ni muscle rigide le lendemain, ce qui serait fatal à une danseuse. Elle renversa un peu d'eau dans la bassine prévue à cet effet sur la commode, et, bien que l'onde ne soit plus fraîche depuis un moment, le simple fait d'y tremper les mains et de s'asperger le visage lui fit beaucoup de bien. Elle repoussa quelques mèches collées à son front, puis dénoua ses cheveux. Elle n'avait plus l'air si apprêtée, si sûre d'elle loin de ses étoffes de couleur qui lui cachaient la moitié du visage ; elle n'était qu'une sang-mêlée fragile, perdue à la fois dans le monde des hommes et dans le monde des elfes. Elle n'avait sa place nulle part, en dehors des spectacles qu'elle créait pour la foule anonyme : elle pouvait alors inventer un monde fort en couleur, en musique, en poésie, où elle était chez elle, plus que quiconque. Mais la réalité était tout autre, et les rêves, souvent, font se languir l'âme d'une façon si cruelle qu'il vaut mieux abandonner tout espoir d'une vie meilleure.
C'est de la même façon que Nessa quittait ses beaux atours, ses bijoux et ses coiffures soignées pour rester seule, comme nue. Ses cheveux sans artifice ni surprise cavalaient le long de ses formes, pour une fois laissés à leur libre cours. Elle quitta son caleçon mais garda sa tunique blanche, assez longue pour tomber jusqu'à mi-cuisse ; sans ceinture pour l'ajuster, elle paraissait bien deux fois trop ample pour elle. Elle fit quelques pas vers la fenêtre et s'accouda à la balustrade ; il faisait encore chaud pour la saison, et les quelques gouttes d'eau qui étaient restées sur son visage et son cou séchèrent sous l'action de la brise nocturne. Ce même vent qu'elle prenait plaisir à ressentir lui soulevait boucles et jouait avec sa tunique, tout comme un amant l'aurait fait avec sa compagne.
Elle soupira et se retourna, devisant son lit. Il était grand temps de se coucher, et elle pouvait affirmer sans mentir qu'elle n'aurait de mal à s'endormir, avec les évènements du soir. Elle jeta un dernier coup d'œil aux étoiles, par la fenêtre restée ouverte, puis s'allongea sur sa couche, sans prendre le soin de se glisser dans les draps ; elle se lova tout contre le fourreau, et sa conscience se perdit, loin, dans un monde où les Danseuses n'ont jamais à se soucier d'autres choses que de danser. |
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