De retour par dessus les cimes .. [Tebirahc]

Sous les yeux de la Da'ron du Temple, tout Miradelphia s'étendait. Même si la nuit emplissait le ciel il était intéressant de contempler un monde depuis les nuages, c'était là une impression de puissance que tout Drow souhaiterait connaître : avoir le monde à ses pieds et évoluer librement au dessus de ce dernier.
La wyvern évoluait à vitesse constante, fendant la nuit et se dirigeant vers le Puy d'Elda. Devant la Drow, Tebirahc restait silencieux sur sa selle tout en manoeuvrant la bête. Haeldra se demandait comment un aveugle pouvait se déplacer dans une direction aussi précise, être Gardien devait grandement aider pour cela. Installée juste derrière lui, la Drow contemplait le paysage plongé dans les ténèbres de la nuit alors que seul le vent se faisait entendre comme bruit tout autour d'eux, parfois un vrai silence régnait que seuls les battements d'ailes de la wyvern venaient rompre.

La Da'ron et le nouveau Gardien d'Uriz étaient partis seuls depuis la Première Cité. En effet, le dieu Uriz ne s'était pas attardé sur le monde de Miradelphia et il s'en était allé, non sans avoir parlé avec ses visiteurs, Haeldra et Baoht. Le Haut-Prêtre de Valas était mécontent de l'entrevue car il n'avait pas pu avoir les renseignements qu'il désirait, le départ du dieu l'avait laissé dans une humeur passable.
Haeldra était plus attentionnée envers Tebirahc qui était resté inconscient malgré le départ du Dieu, elle ne pouvait pas aller voir son état à cause de l'esprit-gardien mais fut soulagée de voir qu'il avait commencé à remuer.
L'ancien Obok Senger resta un moment en haut du trône surplombant la pièce, semblant réaliser où il se trouvait. Il récupéra ce qui semblait être un marteau ainsi que quatre petites pierres avant de commencer à descendre les marches, la D'aron avait été trop éloignée pour jeter un coup d'oeil plus précis sur ces gemmes mais elle ne s'en soucia aucunement.
Une fois les trois drows, chacun représentant des Prima Sanguis, réunis au pied du trône, une discussion s'était engagée. Tebirahc fut mit au courant de la mission qui avait été assignée à Haeldra ainsi que des événements qui avaient immédiatement suivis la chute du Fort d'Ellyrion. Le moment était venu de le ramener au Puy d'Elda afin de célébrer sa nouvelle condition et accessoirement pour la Da'ron de remplir sa mission.
Le petit groupe avait alors quitté la pièce du trône, que Tebirahc scella avec de la magie et ordonna à un esprit-gardien de la garder continuellement. Personne hormis un nouveau Gardien ne pouvait désormais franchir ces portes sculptées, dernier vestige intact de la Première Cité.
Ceci fait, Haeldra et Tebirahc commencèrent à remonter vers la surface, marchant le long des coursives éventrées et des débris de la cité. Ce ne fut pas le cas de Baoht qui manifesta le souhait de rester au sein de la cité afin d'y faire des recherches personnelles. Le groupe se scinda donc en deux, Baoht allant de son propre chemin. Cela ne dérangeait pas Haeldra, après tout le Haut-Prêtre faisait cavalier seul depuis la Chute d'Ellyrion. Qu'il continue son oeuvre, elle serait la seule à ramener le Gardien auprès des autres Drows, elle ne se souciait pas de l'avenir de Baoht dans ces terres, après tout c'était son problème.

Parvenus à la surface, les deux Drows se retrouvèrent face à une délégation naine arrivée bien trop tard pour rencontrer le Dieu. La situation aurait pu devenir dangereuse car les armes furent tirées, pour les nains voir deux Drows sortir de la Première Cité étant un sacrilège pour eux.
Mais Tebirahc avait désamorcé la situation en se mettant à parler la langue naine. Haeldra ne sut exactement ce qui avait été dit mais après quelques instants les nains baissèrent leurs armes et laissèrent passer le couple qui se retrouva à l'air libre.
Devant la faille, une silhouette familière se tenait, la Da'ron se retrouvant face à Tagnik'zur, la fidèle Wyvern de Tebirahc. La Drow n'aimait guère la Wyvern car elle avait tuée l'une de ses suivantes lors de son arrivée mais passa sur le fait, mourir pour Uriz était un cadeau lui étant fait. Tagnik'zur avait remplit son rôle de gardien, elle n'allait pas lui en tenir compte.
Tebirahc annonça alors que le voyage se ferait par les airs, cela eu le don de surprendre la Drow car elle ne s'était pas imaginée grimper sur le dos de la wyvern, expérimentant ainsi son premier vol au dessus des montagnes.
Quelques instants plus tard, la Wyvern prenait son envol, les deux Drows installés sur son dos, Tebirahc tenant les rênes devant et Haeldra installée derrière lui, se tenant fermement lors du décollage.

Ils avaient volés ainsi toute la nuit avant de descendre dans les contreforts des montagnes, près de la cité de Lante, pour passer la journée sur le sol afin de permettre à la wyvern de se reposer. Cette première expérience de vol avait enchanté la Drow, avoir un moyen de vol était des plus pratiques et voir le monde sous soi était splendide.
Durant la journée de repos, les deux Drows avaient discutés entre eux, parlant de choses diverses comme ce qui attendait Tebirahc au Puy ou ses voyages et projets futurs. Ils avaient aussi parlé d'Oloryle et de choses tenant plus à leur rangs de Prima Sanguis et aux premières expériences du Gardien sur son nouveau statu.

Puis, à la nuit tombante, ils reprirent leur envol pour atteindre la deuxième étape : la forêt d'Aduram. Le vol était particulièrement calme mais un détail venait chagriner le moral de la Drow. En effet, dans les terres naines régnait une chaleur étouffante et celle-ci continuait à se faire doucement sentir après le départ du Dieu. Mais plus les deux Drows allaient vers le sud-est que la température chutait. Dans le ciel, la Da'ron se gelait le corps, la faute à son équipement léger et au fait qu'elle n'était pas vraiment équipée pour faire face au froid du ciel contrairement à Tebirahc qui avait fait modifier son armure en conséquence.
Les heures passées sur la selle étaient comme une torture mais la Da'ron y faisait face tant bien que mal, ayant déjà connus des épisodes froids. Mais cela devint vite insupportable et elle du se rapprocher du dos du cavalier afin de récupérer un peu de chaleur. Elle était embarrassée de devoir se coller ainsi au dos de Tebirahc qui a coup sûr n'allait pas manquer de remarquer le geste de sa cavalière mais elle n'avait guère le choix.
Un simple "désolé" gelé s'échappa de ses lèvres alors qu'elle tentait de se réchauffer un peu.

Depuis la Bataille du Fort Ellyrion, Tebirahc n'avait plus eu le sentiment d'être lui-même avant ces deux derniers jours... Son corps avait servi à son Père, à son Dieu, honneur certes, mais sensation des plus étranges, d'être là et pourtant détaché, en demi-sommeil tandis que le Père installait ce corps sur le trône de pierre qu'il avait occupé des siècles durant, alors qu'il avait débuté son existence sur Miradelphia, avant d'user d'une magie sans commune mesure, dépassant même ce qui pouvait être imaginé. L'esprit et l'attention du Dieu s'était attelé à diverses tâches... Malmenant les nains en leurs cités, en leurs territoires, avec une efficacité et une volonté à faire pâlir même les plus redoutables drows, il n'oubliait pas son Gardien, communiquant avec, l'instruisant de nombreux détails, sur sa fonction, sur ses nouvelles facultés, ses sens et ses pouvoirs, afin qu'au terme de sa venue, il puisse être digne de ce rang, de ce rôle qu'il lui faudrait jouer.
Il apprit des rudiments nains, tant dans le parler que dans l'écrit, suffisamment pour comprendre mais surtout, en tant voulu, transmettre un message au Haut Prêtre nain qui siégeait au Conseil, si d'aventure, il survivait à la catastrophe en cours... En somme, ce ne fut pas un mois en sommeil, il était ailleurs, en un lieu inconnu, mais il ne perdit pas une seconde dans ce laps de temps.

Puis vint le moment de l'éveil, où Mogar l'informa qu'il en avait fini, que les choses s'achevaient là, et le quitta, bien que le lien demeura, il reprit place dans son corps et quelques heures ensuite, retrouva conscience, quoique toujours plongé dans une obscurité toute relative. Il parvenait à percevoir les chaleurs que dégageait les corps, sans pour autant les voir, mais faisait taire ses autres nouveaux sens, pour l'heure, il n'en avait pas le besoin. Il récupéra le marteau, vestige, relique véritable du temps du Dieu Roi Mogar, ainsi que quatre petits rubis disposés sur les bras du trône, où sommeillait les Esprits Gardiens, il en aurait besoin, n'en doutait pas, et ils seraient plus utile auprès de lui qu'ici, au vue de ce qu'il comptait faire.
Une fois descendue des marches, ils lui firent un petit résumé de la situation, il n'avait pas eu vent de ce qui arrivait dans ce monde, là où il était, et il décida qu'en effet, il lui fallait d'abord retourner au Puy d'Elda, il devait rassurer, annoncer, ensuite seulement, il repartirait, car il en était d'autres sur ces terres qui devaient entendre l'annonce.
Dès lors qu'ils eurent quitté la salle du trône, il ordonna à un Esprit Gardien de tuer quiconque pénètrerait les lieux, ensuite seulement ferma t-il les portes, les scellant magiquement de telle façon que seul un Gardien de Mogar puisse l'ouvrir, à l'avenir... Le trône du Dieu Roi ne devait être souillé par une présence indésirable.

Le Haut-Prêtre de Valas Tal'Berith, Baoht Dal'Serakh'Ahn tandis qu'il faisait route vers la surface, décida d'entreprendre l'exploration de la Première Cité. Son entretien avec Mogar n'avait pas offert les fruits voulus et il souhaitait trouver dans ces ruines, un trésor qui saurait compenser l'amertume qu'avait laissé cette discussion sans résultats satisfaisant, et là-dessus, Tebirahc lui souhaita de trouver satisfaction, d'une façon ou d'une autre.
Lorsqu'ils parvinrent à la sortie, Haeldra Valsharesh et lui tombèrent sur une petite troupe naine, dans laquelle se trouvait le Haut Prêtre, finalement venu, avec du retard, et, sans plus de discussion, et malgré les armes au clair, il délivra son message tandis que Tagnik'zur répondait à l'appel lancé... L'heure était au départ, il ne souhaitait pas s'attarder plus longtemps. Il lui suffisait de suivre le lien magique qui rattachait son artefact à celui de sa monture, autant qu'en suivant les sons émis, pour la retrouver, et, à force d'habitude, il n'eut aucun mal à la monter, attachant le harnais spécialement conçu pour ce besoin et tandis le bras pour aider Haeldra à monter. Elle était la première, et sans doute la dernière personne à monter avec lui, pour une unique fois, exceptionnellement, car Tebirahc n'avait nullement le désir de partager sa monture.

Les deux décolèrent, aussi doucement que possible, sachant la drow sans rien que l'attention du sombre gardien pour la maintenir sur la wyvern, et en vie. Il trouva bientôt son rythme, lui, sa wyvern, guidés par un sixième sens imprécis... Il voulait revenir au Puy d'Elda et savait le chemin, c'était tout. De nuit, ils volèrent jusqu'à l'aube, avant de faire une première halte pour la journée, non loin de Lante, ils discutèrent, bien que le Gardien fut bien silencieux. Quoi dire ? Il ne trouvait pour l'heure rien à dire, quant à raconter ce qu'il avait vécu, ce qu' il avait apprit, ce que cela faisait, il n'y trouva aucun intérêt, et pas davantage les mots.
Ils se reposèrent jusqu'au crépuscule et repartir pour une nouvelle nuit de vol... Tebirahc estima à moins de cinq jours un voyage qui prendrait dix fois ce temps pour un marcheur à pied... Là était l'avantage de Tagnik'zur, capable de faire fondre une distance sans mal, avec régularité, sans être gêné par aucun obstacle naturel. Point à se soucier de la meilleure route pour gravir une montagne, à chercher un passage sûr pour un fleuve... Il n'était que le ciel, et seul les tempêtes pouvaient faire reculer le seigneur de guerre lorsqu'il était là-haut.

Les heures passèrent tandis qu'ils survolaient à présent la forêt d'Aduram, bientôt à mi-chemin, Haeldra subissait les effets de cette manière de s'habiller qu'aimait avoir les femelles de la sombre race... Si peu vêtu, dans un ciel froid, et contre le vent tout aussi frais, elle souffrait de ces températures contre lesquels désormais il était doublement protégé... Son armure conçue et rembourrée pour garder la chaleur, complète qui plus est, était une preuve depuis longtemps de l'habitude qu'avait prit Tebirahc d'un tel moyen de locomotion.

L'aube n'était plus si loin, aussi Tebirahc décida t-il qu'il avait fait assez de route pour s'autoriser un arrêt, lorsque sa passagère se permit de se serrer contre lui, tout du moins, contre son armure, soufflant un « désolé » heureusement présent. Il ordonna donc silencieusement à Tagnik'zur de descendre et de se poser en douceur. Au sol, il démonta le premier avant d'aider Haeldra à faire de même, et autorisa la Wyvern à partir à la chasse, il en avait besoin, plus qu'eux deux.
A tâtons, il récupéra du bois, des branches et après les avoir rassemblé en un tas, l'enflamma pour qu'Haeldra puisse s'y réchauffer.

Il détacha les lanières de cuirs au niveau des épaules, ainsi qu'au niveau des côtes pour retirer son plastron qu'il posa, retirant aussi les protections des bras et les gantelets, quoique son avant bras droit demeurait couvert par un gantelet de cuir où était incrusté un diamant. Sous son armure, il ne portait qu'un gilet de cuir et il s'assit là, posant à ses côtés le marteau et le reste de ses affaires.

« Même si ça n'est pas à ta taille, jusqu'à ce qu'on arrive au abord de Yutar, tu porteras cette armure, et ensuite, jusqu'au Puy d'Elda. »

Il chercha à tâtons, dans ses affaires, un petit bocal où se trouvait un onguent, ainsi qu'une bande de tissus et détacha son gantelet, qu'il posa à côté de lui, avant de découvrir, par habitude, son avant bras dévorer en bonne partie par les acides contenus dans la bave de Tagnik'zur... C'était une chose que peu de personne avait vu, miracle des magies de guérisons, la chair était pourtant à vif, et l'on pouvait même, en certains endroits, voir les os. Il ouvrit le bocal, en tira une noisette et l'étala sur son avant bras et sur sa main, avec beaucoup de soin, avant de recouvrir le tout d'un bandage propre, et de remettre son gantelet.

«Nous devrions être revenu au Puy dans un moins de trois jours, je pense... »

Il ne savait pas quoi dire d'autre, sur le moment.

Quelque peu gênée de se montrer aussi vulnérable face aux caprices du froid et devant s'avancer au contact du gardien, qui pouvait parfaitement se méprendre sur ses intentions, la Da'ron tentait de récupérer un peu de chaleur tout en redoutant la réaction de Tebirahc. Mais le Drow sembla comprendre la situation et fit descendre la wyvern pour finalement la poser au sol. L'aube était proche, ce petit incident ne les retarderait pas de trop.
Sitôt au sol, Tebirahc alluma un feu à partir de bois trouvé à proximité, la forêt d'Aduram était proche et il était désormais facile de trouver du combustible pour un feu. Haeldra regretta que Tebirahc eu à user de ses pouvoirs pour elle mais, en tant que moine, elle ne pouvait créer de feu pour se réchauffer contrairement aux autres membres du culte d'Uriz.
La wyvern partie en chasse, Haeldra jeta un rapide coup d'oeil sur les alentours avant de s'approcher du feu pour s'y réchauffer. La douceur des flammes faisait disparaître progressivement le froid qui la lançait et elle se sentit plus rapidement à l'aise. Autant le dire voler au dessus des nuages possédait ses inconvénients, chose manifestement inconnue pour la piétonne assidue qu'elle était.
Assise devant les flammes, la Drow retira doucement son casque qu'elle posa à ses cotés, le froid du métal l'empêchant de recueillir pleinement les ondes de chaleur provenant de l'âtre. A coté d'elle furent disposées ses armes, juste au cas où, la présence de la wyvern et d'un gardien ne rendait aucunement nul un risque d'attaque.

Devant elle Tebirahc entreprit d'ôter son armure qu'il déposa devant elle, lui indiqua qu'elle la porterait désormais, du moins jusqu'au Puy. C'était beaucoup de la part de l'ancien Obok senger mais les circonstances étaient particulières, après tout elle devait être la première étrangère sur le dos de Tagnik'zur.

Je vous en remercie ..

Ironiquement elle pensa à l'image qui s'offrirait aux Drows qui allait voir atterrir la wyvern devant le Puy. Non seulement Haeldra reviendrait sur le dos de la plus dangereuse créature du Puy et en compagnie de son Gardien mais elle porterait également son armure. Bon soyons clair l'armure était trop grande pour elle et elle-même ne saurait imaginer à ce moment ce à quoi elle ressemblerait une fois dedans mais le fait était assez singulier. Par contre elle allait devoir enlever ses propres épaulières si elle espérait faire tenir ce plastron sur son corps, porter deux armures, même de tailles différentes, était tout bonnement impossible.
La Da'ron fouilla un peu ses affaires, sortant une couverture qui n'était pas d'un grand secours dans le ciel. Elle la regarda un moment avant de refouiller un peu plus dans son sac, sortant le restant d'un pain qui subsistait encore, souvenir d'un pillage de paquetage nain après un combat.
Le partageant en deux, elle se leva et s'approcha de Tebirahc pour lui offrir la seconde moitié. Même si Tebirahc possédait ses propres affaires, le mois passé loin de tout et sans contact avait du gravement influer sur ses réserves de nourriture. Pour le moment la Da'ron possédait encore un peu de nourriture, ce qui suffirait à les nourrir un peu pour les trois prochains jours.

En s'approchant, la Drow vit le spectacle du bras du Gardien, rongé jusqu'à l'os par endroit par de l'acide. Haeldra ne connaissait pas encore l'existence de cette blessure même si elle avait combattue aux cotés de Tebirahc durant de nombreuses batailles. L'aspect de la blessure ne l'effraya pas, après tout son passé de combattantes lui avait offert le spectacle des pires horreurs qui pouvaient arriver à quelqu'un, de la maladie aux tripes sanguinolentes étendues sur le sol. Tous deux étaient des soldats et avaient posés les yeux sur ce que l'on pouvait faire de pire à un corps, ils étaient Drows après tout, habitués à la violence.
Haeldra posa doucement le pain dans la main libre de Tebirahc tandis qu'elle se reposait juste à coté, le Senger lui indiquant dans la foulée la durée restante pour leur voyage.

C'est peu mais je m'en voudrais que vous rentriez au Puy l'estomac hurlant.

Installée près du Gardien, la Da'ron entama son propre bout de pain, regardant avec attention les réactions de son compagnon de voyage. Ses yeux se posèrent sur le marteau ancien qui était disposé sur le sol, signe des changements qui avaient marqués le Drow. Elle l'avait toujours connus maniant autre chose que ce genre d'arme, le marteau étant connu pour son manque de délicatesse au combat. Elle aurait plutôt vu l'Obok Senger Alderak manier ce genre d'arme, cela convenait mieux à son image et à sa carrure. Mais elle savait aussi que la cécité de Tebirahc n'allait nullement l'empêcher de manier cette arme très correctement, le souvenir d'Illiv'aere était encore présent dans les esprits de chacun des Drows.
Par contre Tebirahc était devenu bien silencieux depuis le retour, ne parlant uniquement que pour dire les choses essentielles et rien de plus. Autant dire que cela donnait plus l'impression d'une veillée funèbre que d'un voyage.
D'habitude Haeldra gardait le même silence mais accompagner le Gardien d'Uriz en personne, une personne qui se trouvait être un être qu'elle connaissait fort et ce depuis longtemps, la poussait à sortir de ses réserves. Elle n'allait pas ramener un moribond au Puy tout de même ?
Elle se perdit un peu en contemplation du feu, symbole du dieu de la Guerre.

Je ne saurais imaginer les changements que vous subissez en ce moment Gardien. Une nouvelle vie s'offre à vous, une vie directement liée au Dieu de la Guerre. Moi qui vous ait connue Obok senger durant des siècles cela change énormément le regard que je dois porter sur vous. Vous n'appartenez plus exclusivement au monde des Sombres, en cela je le regrette un peu.
En tout cas, je suis désormais votre servante, dévouée fidèle à Uriz. Si vous avez besoin que quelque chose, demandez le moi, je vous l'apporterais, Seigneur Tebirahc.

Les temps changent...Tebirahc y pensait à présent qu'il était libre de le faire, et son nouveau statut ne pouvait concilier le précédent, si il ne doutait pas de garder une place à l'Olath Blada, en qualité de Gardien cette fois, il redoutait le moment où il devrait abandonner son rang d'Obok Senger d'Thalack du Premier Ost. Oh, il était fier de devenir Gardien, honoré, et savait qu'il ne rechignerait jamais à jour son rôle nouvellement acquis en cette terre, mais une partie de ce qui est attachée au nom des Zaurahel serait perdu, au moins durant encore quelques siècles, voir davantage. Les Zaurahel, ils s'étaient succédés avec mérite et dignité, sans préférence, sans faveur que celui de recevoir une instruction de loin supérieure à d'autres, à la tête du Premier Ost depuis sa création, et voici qu'il devrait y renoncer, mais la chose serait fait non par disgrâce et déshonneur, mais parce que les Zaurahel entrerait dans l'histoire d'une nouvelle façon, l'attachement et la loyauté, la foi envers Uriz aura payé, si bien que l'un d'eux se verra recevoir l'honneur suprême de devenir l'Avatar du Dieu de la Guerre.
En pensant à cela, il faisait jouer l'anneau portant le saphir entre ses doigts, les yeux perdus dans le vague, mais cela, on ne peut guère lui en faire le reproche, puisqu'il est aveugle.

Après qu'il eut retiré son plastron pour le prêter à Haeldra, du moins, le temps du voyage, afin qu'elle n'ait pas à souffrir du froid plus que nécessaire durant ces routes inhabituelles pour elle, pour lesquelles elle n'était pas préparé, autant qu'elle le serait en marchant l'hiver dans cette tenue.
Il refit ensuite son bandage, car si Mogar n'était apparemment pas gêner, sa blessure le démangeait et il entreprit ce rythme qu'il pratiquait depuis près ou plus, sa mémoire ne lui offrit pas le loisir d'une parfait précision, deux siècles maintenant.
Dès qu'il eut finit ça, bien qu'ayant entendu les sons que laissaient Haeldra comme indice de ses actes, il sentit qu'on déposait quelques chose dans sa main, et il en apprécia la texture pour en connaître la nature, c'est ainsi qu'il comprit que c'était du pain, et il se laissa prendre à une pensée... Comment Mogar s'était-il occupé de son corps... A priori, il restait bien conservé, ce qui n'était pas pour lui déplaire. Il mangea donc, avant de répondre à la remarque sur l'estomac hurlant.

« J'ordonnerais à Tagnik'zur de ramener quelque chose, si vous êtes capable de le préparer. »

Après tout, pour de la viande, ils avaient à disposition un super-prédateur, donc après qu'il se soit bien nourrit, il lui demanderait de chasser autre chose, pour eux-deux, cela calmerait les inquiétudes d'Haeldra autant que les appétits qu'un quignon de pain ne saurait pleinement satisfaire.
Elle finit par en venir à l'incontournable sujet, mais si il avait préféré l'écarter jusque là, il savait également qu'il ne pourrait pas rester silencieux à ce sujet trop longtemps.

« Vous n'êtes pas ma servante, Haeldra, vous êtes l'une des fidèles d'Uriz... Je n'attends de vous ni la servitude, ni l'obéissance absolue, plus encore sachant que vous êtes aux ordres de la Haute Prêtresse Naerth, et c'est ce que je vous demande de continuer d'honorer pour l'instant, nous verrons à l'avenir. »

Il avait saisi et retenu la nuance qui avait fait défaut à Illiv'aere en son temps... Il ne faisait plus vraiment parti de la hiérarchie des sombres, pas plus que celle du Culte. Il avait une autorité, c'est vrai, mais il ne le dirigerait pas, pas comme devait le faire les Hauts Prêtres, lui était l'instrument, la voix et la main directe du Dieu.

« Et pour tout dire, je n'ai pas encore pleinement conscience des répercussions, et de l'avenir... Mogar a été présent et maître de mon corps très tôt, bien qu'il m'ait beaucoup apprit durant tout ce temps. Je ne suis que vaguement au courant de ce qui s'est passé, ou bien encore de la durée de mon absence. Aussi, s'il vous plait, pour l'heure, comportez-vous comme si j'étais toujours Obok Senger d'Thalack, je ne m'en formaliserais pas pour la durée de notre voyage, ensuite... Nous verrons bien. »

Il ne savait pas encore comment aborder les gens, du moins, la manière dont il devait les traiter... Devait-il se comporter naturellement, ou bien alors prendre ton et comportement bien spécifique ? Lui préfèrerait n'avoir pas à modifier sa manière d'être, après tout, sauf la relative neutralité qu'il devrait prendre, c'est pour lui-même que Mogar l'avait désigné, non pour être un autre.

Les deux drows s'accommodèrent du pain de voyage pour le moment. Le fait qu'ils rentraient en volant faisait qu'ils ne connaitraient pas de famine, juste un repas frugal de temps en temps. Tebirahc semblait être en forme mais Haeldra n'avait pas aperçu de nourriture dans la salle du trône ni même dans la cité, le Drow était pourtant parti depuis plus d'un mois et ayant quitté le champ de bataille à l'improviste et ce sans équipement de voyage. Uriz avait du en prendre soin mais maintenant qu'il était reparti le nouveau Gardien se devait de se restaurer. Mais ils ne mourraient pas de faim, loin de là.
Tebirahc offrit même la possibilité que Tagnik'zur parte à la chasse pour leur ramener quelque gibier. Pourquoi pas ? Haeldra n'était pas vraiment équipée pour faire la cuisine mais elle saurait se débrouiller, ce n'était pas la première fois qu'elle devrait se préparer à manger l'armée Drow ayant parfois connue des difficultés de ravitaillement. Bon la cuisine de camping et la découpe à l'épée ne permettait pas de sustenter un fin gourmet mais le couple saurait s'en contenter.

Tant que Tagnik'zur ne nous ramène pas un troupeau entier de Hanglyosis Laineux comme trophée de chasse je pense pouvoir m'en sortir ..

Après cette courte plaisanterie, la discussion s'engagea sur le nouveau statu de Tebirahc. Il n'était plus l'Obok Senger du premier Ost désormais, une grande page de son histoire s'était tournée où il avait rendu bien des services aux Drows. Autant le dire les soldats seraient déçus de ne plus avoir Tebirahc à leur tête, Haeldra se demanda qui pourrait bien le remplacer mais les officiers de valeur se faisaient rares dans l'armée, surtout que plusieurs Osts étaient sans commandants depuis un certain temps. Certes Ellyrion avait été une belle victoire mais l'armée voyait ses rangs d'officiers de haut rangs peiner à se renouveler, il fallait des siècles d'expérience pour devenir Obok Senger et peu pouvaient endosser cette responsabilité.
Tebirahc resterait néanmoins au conseil de l'Olath Blada mais il serait souvent absent car devenu le Gardien d'un dieu. Pour les Zaurahel c'était à la fois une bénédiction d'avoir un membre nommé Gardien mais aussi une douleur que de devoir rendre un titre qui leur avait donné de la fierté plusieurs siècles durant. C'était un peu comme si la famille des Valsharesh devait rendre le titre de Da'ron de la Garde du Temple, la Drow était à la tête de cet ordre depuis plusieurs siècles également et n'envisageait aucunement de devoir le rendre.

En réponse à ses paroles l'ancien Obok ne souhaitait pas qu'elle devienne sa servante. La situation était un peu complexe qu'une simple question d'obéissance. Oui elle était chargée d'assurer la protection de la Haute-Prêtresse d'Uriz mais elle ne se limitait pas qu'à cela. Les Valshareshs étaient connus dans le Puy pour être l'une des familles les plus pieuses du Puy, entièrement dévouée au Dieu de la Guerre. Haeldra n'était peut être pas sous le commandement direct de Tebirahc mais elle ne pouvait contester un ordre de celui qui était devenu le représentant personnel de son dieu. Elle était tenu par deux engagements, celui de protection envers Alyryne et celui de dévotion envers Uriz. Peut être ces engagements changeront à l'avenir mais la situation était telle qu'elle était aujourd'hui.

Mes obligations envers Dame Alyryne restent en effet, c'est un engagement que j'ai promis de respecter de par ma vie. Néanmoins je ne peux rester sourde à vos paroles car vous êtes le relais sur terre du dieu de la Guerre. Soit .. Nous verrons de quoi l'avenir sera fait mais cela ne doit pas vous empêcher de me demander certaines choses, non pas en tant que Gardien mais en tant que Sombre. Même si nous sommes de deux familles différentes, portant chacune un passé fier glorieux, nous nous connaissons depuis longtemps et ne pouvons refuser de nous entraider de temps en temps.

Tebirahc souhaitait qu'on le voit toujours comme étant encore l'Obok Senger du premier Ost, étant encore mal à l'aise avec son nouveau rang. Tout allait changer, le regard que les Drows allaient lui porter et le regard qu'il devra porter sur les Drows. Sans compter le fait qu'il allait devoir abandonner ses fonctions dans l'armée. De plus il était désormais aveugle, Uriz s'était occupé de lui depuis Ellyrion mais désormais il était livré à lui-même avec le regard plongé dans le vague pour toute la durée de sa fonction de Gardien. Il allait falloir un bon moment d'adaptation pour qu'il retrouve la prestance qu'il possédait et qu'il s'affirme non plus comme Obok Senger mais bien comme Gardien d'Uriz.
Le regard de Haeldra se posa sur la bague au saphir qui reposait sur la main du Sombre, symbole d'une époque maintenant révolue. Brylyan allait être content de récupérer un Gardien mais peut être moins enthousiaste à perdre un Obok Senger, le Karliik Glenn aura du mal à combler un tel vide.

Je comprend votre situation, tout va désormais changer. Je peux encore vous considérer selon votre ancien rang mais une fois au Puy il n'y aura pas d'hésitations ni de recul, vous serez le Gardien du dieu de la Guerre aux yeux de tous.
Néanmoins ..

La Drow se tourna vers Tebirahc, s'approchant de lui pour lui parler plus directement. Le regard vide du Sombre pouvait trahir quelques hésitations reflétant ses paroles mais Haeldra souhaitait ramener un Gardien au Puy et non un Drow encore incertain sur l'avenir.

Ne vous préoccupez pas de l'avenir pour le moment. Devenez celui que vous êtes désormais : le Gardien d'Uriz, Mogar comme les autres races l'appelle. Avant de se projeter vers l'avenir il faut accepter ce que l'on est et se conduire comme tel. Profitez de ce voyage pour comprendre les implications de votre nouveau rang, les nouvelles relations que vous possédez désormais avec le domaine divin, vous qui avez toujours été un soldat.

A genoux devant lui, la Drow tendit le bras et posa doucement son index sur le front du Gardien, parlant d'une voix douce mais ferme. Elle retira ensuite sa main pour reposer l'index cette fois sur le torse du Drow, désignant son coeur.

Vous êtes désormais Gardien dans votre esprit mais pas encore dans votre coeur. Une fois que cette connexion sera faite vous serez pleinement ce que vous devrez être. Vous avez été un formidable Obok Senger d'Thalack, vous pourrez être un formidable Gardien.
C'est pourquoi je vous demande, Tebirahc, de ne pas encore vous soucier de l'avenir, vous pourrez toujours y songer plus tard. Revenez au Puy en tant que Gardien et non avec un statu encore incertain dans votre coeur. Vous avez encore le temps pour vous y préparer et vous n'êtes pas seul dans cette tâche jusqu'à notre arrivée au Puy d'Elda.

Un troupeau entier de hanglyosis... Cette idée le fit sourire, et il essayer de s'imaginer sa wyvern soulever une telle masse, et il ne parvint à aucun résultat, tant la chose était invraisemblable. C'est pourquoi il répondit simplement, le ton amusé.

« Pas de crainte à avoir là-dessus, Tagnik'zur ne peut réussir un tel exploit. »

Un seul de ces bestiaux pesait plus lourd que la wyvern, aussi, autant pour elle aurait-elle pu en chasser un pour le dévorer sur place, mais pour ce qui était de ramener un petit quelque chose aux deux sombres, il fallait viser plus petits, dans des proportions disons... Plus raisonnable.

Une page se tournerait bientôt définitivement, et quand viendra le moment de remettre le saphir au Souverain des Sombres, Brylyan Naerth, c'est une tradition familiale autant qu'une histoire personnelle qui resterait à jamais graver dans les mémoires et l'Histoire du Peuple d'Elda, un parcours qui avait commencé au cours de la Bataille des Cendres, voilà un peu moins de cinq siècles, où il s'était illustré, autant que son frère d'arme Alder'Aak Dolérian et qui s'était achevé à l'aube de ce nouveau cycle avec la destruction du Fort Ellyrion. Une nouvelle histoire débutait, plus prestigieuse encore, et auquel il avait bien l'intention de briller pour que son nom, dans la continuité de ses ancêtres, restent à jamais dans les mémoires, qu'on n'oublie jamais, même dans plusieurs millénaires le Gardien d'Uriz qu'il fut, mais qui sait, ses actes se graveraient également dans l'histoire des autres races, car il était le Gardien de chacune.

Haeldra évoqua ses engagements, envers le Culte, envers Alyryne Naerth, lui assurant ensuite sa disponibilité et son écoute des besoins et des demandes qu'aurait à formuler le Gardien à son intention. Mais cela, il le savait déjà, et il se doutait avoir à l'avenir à demander des services, donner des missions. Toutefois, il ne la voulait pas asservi, servante ou bien tout autre mot pour définir un tel comportement... Il ne serait pas Illiv'aere, il se l'était promit, aussi ne chercherait-il pas à dominer les drows comme ce dernier l'avait fait en intégrant le Triumvirat.

« Je ne doute pas de votre intention d'être à l'écoute de mes paroles, de mes demandes, mais je ne veux pas que vous soyez une servante, car je n'en aurais pas l'utilité, du moins, ça serait gâché vos talents que de vous demander cela... Vous serez une alliée de confiance, et sur laquelle je pourrais compter, cela, je le sais, et ne l'oublierais pas quand la situation l'exigera. »

La confiance était une chose rare, que Tebirahc n'offrait pas si facilement, mais dans le cas présent, la dévotion et la fidélité au Culte d'Uriz, comparable à celui de sa propre lignée, jouait en la faveur d'Haeldra. Le trahir, en ces temps futurs, reviendraient à trahir Uriz lui-même, et cette idée, il le savait, ne viendrait jamais à l'esprit de la guerrière, c'est pourquoi il pouvait avoir confiance...
Elle lui rappela ensuite une évidence... Arrivé au Puy, plus de doute, plus de masque, il serait le Gardien qu'on attend de voir revenir, plus que l'Obok Senger d'Thalack disparu dans d'étranges circonstances, inquiétant ceux dont il a obtenu la loyauté, et ceux qui savent et respectent les mérites et la grandeur de son nom.
Il écouta les mots, s'interrogeant à la valeur qu'il devait leur donner, et décida de leur accorder assez de crédit pour les retenir, mais il s'attarda sur un détail, et prit la parole en conséquence.

« Puisque vous l'évoquez... Gardez pour vous ce nom de Mogar, n'en dites rien à personne tant que je ne vous aurais pas autorisé à autre chose, pas même à la Haute Prêtresse. Au Puy d'Elda, je doute que le Culte d'Uriz ait comprit ce qu'impliquait ce qu'ils ont pu découvrir par ce défi lancé, aussi, ne leur offrez aucun indice tant que je n'aurais pas décidé quoi faire de cette situation. »

Le double jeu d'Uriz était un secret dont la nature n'était détenue que par les Gardiens, mais le Voile et le Défi de Mogar, adressé tant aux peuples lumineux qu'aux sombres mettait à mal le masque derrière lequel il se dissimule... Il devait réfléchir, à moins qu'entre temps, Mogar ne lui offre un ordre clair, à l'avenir de ce secret...
Il sourit à ces dernières paroles, ajoutant après qu'elle eut terminé.

« Vos paroles sont touchantes, mais je vous rassure, ma condition, je la connais et n'en doute nullement... Je sais ce que je suis, ce que je dois être et ce que je veux devenir à l'avenir, mais cela ne suffit pas à effacer les petits détails auxquels vous ne pensez pas, vous, mais qui m'apparaissent à mesure que notre route avance. »

Il marqua un petit temps d'arrêt, une bouchée avalée et il continua.

« Comme Obok Senger d'Thalack, je savais précisément où je me situais, comment je devais traiter les hommes et femmes en fonction de leurs positions et de leurs rangs, mais aujourd'hui, la donne à changer. Illiv'aere avait finalement choisi de prendre position au Puy d'Elda, de prendre la tête d'un des pouvoirs qui régissent notre société, ce que je ne ferais pas... J'évoluerais hors des cercles communs, et c'est une chose dont je dois comprendre toute la portée... Mais ne vous inquiétez pas, je sais ce que je suis, et ne désire pas en changer, loin de moi cette idée. »

Et il doutait qu'Haeldra puisse l'aider à mesurer la portée de la chose... Comment le pourrait-elle, après tout.

« Si vous permettez... »

Et là-dessus, il prit une position propre à la méditation, posture typiquement elfique, l'une des choses que les Zaurahel tenaient à préserver, n'en ignorant pas les bienfaits, et une heure passa sans qu'il ne dit plus rien, ne bougeant pas même, sa respiration ralentie, et quand l'aube pointa son nez, il rouvrit les yeux, bien que cela ne lui servait finalement à rien, tandis que dans l'air se propageait les bruissements d'ailes caractéristiques. Tagnik'zur passa au-dessus d'eux, lâchant non loin d'eux le cadavre d'un chevreuil dont le cou et une bonne partie de la tête portait les traces de morsure autant que d'acide, mais le corps demeurait relativement intact, à part quelques traces de griffes.

La wyvern se posa tout de même assez loin d'eux, s'allongeant et couvrant sa gueule ensanglantée avec la voilure d'une aile, comme les drows, la wyvern n'appréciait guère le jour, abaissant son acuité visuelle au point de la rendre presque aveugle, alors que la nuit en faisant un des prédateurs les plus redoutables du continent.

Tebirahc avait réagit à la plaisanterie, au moins cela avait permis de détendre un peu l'atmosphère qui était assez pesante depuis qu'il gardait continuellement le silence. Le couple de Drows allait voir ce que ramènerait la Wyvern, quelque chose de pas trop gros et pouvant être préparé dans l'instant. Le gibier ne manquait pas dans la région et une seule proie pourrait leur fournir assez de nourriture pour le reste du voyage, sauf si Tebirahc faisait la fine bouche et souhaitait varier les plats auquel cas la créature devra faire plusieurs chasses. Haeldra s'accommodera de ce que rapportera Tagnik'zur, ils avaient un feu et il allait servir, la viande rôtie sera au menu ce soir faute de pouvoir faire mieux avec qu'on possède comme moyen de cuisine.

La discussion s'engagea alors sur les rapports qu'allaient entretenir la Da'ron et le Gardien. Il y avait là deux poids et deux mesures car les deux Drows entretenaient déjà des relations avant l'avènement de Tébirahc comme Gardien.
Ne pas être sa servante même si elle devait dévotion à Uriz .. c'était là une chose difficile mais le Drow ne souhaitait pas l'avoir à son service, la préférant comme une alliée. Haeldra ne savait pas encore comment allait se comporter le culte à l'égard du nouveau Gardien, elle se doutait néanmoins du fait que les prêtres avaient été très enthousiastes après l'avènement. Seulement la politique de Tebirahc allait différer de celle de Illiv'aere, comment les Drows allaient ils accepter ce changement, eux qui étaient déjà très fier d'avoir un second Gardien choisit parmi leur peuple ?
Tout ce dénouement se connaitra une fois arrivés au Puy, ce soir le couple discutait juste des implications et du comportement à apporter face aux nouveaux liens qui les liaient.
Une alliée de confiance ? oui elle pouvait être cela. Désormais il n'était plus question d'une simili-rivalité à cause du sang pur des Prima Sanguis qui coulait en eux, Tebirahc était détaché de la politique et entendait faire comme tel. En tant que servante d'Uriz elle apportera sa contribution à l'effort du Gardien lorsqu'il le demandera.

Fort bien Tebirahc .. Je resterais attentive et répondrais à vos demandes lorsque la situation vous le dictera.

Haeldra se releva alors que la réponse du Gardien à ses paroles se faisait entendre. Ne pas prononcer le nom de Mogar .. la Da'ron avait osée prononcer l'autre nom d'Uriz, chose impensable pour un membre du Culte d'Uriz. Mais la situation exigeait que la discussion ne se limita pas uniquement que sur le point de vue des Drows. Tebirahc allait marquer la différence avec Illiv'aere, ce qui incluait une certaine rupture avec les instances du Puy d'Elda. L'ancien Obok Senger le dit d'ailleurs, il allait oeuvrer en dehors des cercles habituels, ce qui signifiait un contact éventuel, voir certain, avec les autres races, celles avec qui les Sombres étaient en guerre.

Je resterais muette sur le nom de Mogar, soyez sans craintes. Ma mission consiste seulement à vous présenter au Culte d'Uriz et non de rapporter les moindres paroles que nous nous adressons en ce moment-même, cela restera entre vous et moi.

La Drow alla s'asseoir au coté de Tebirahc, là où elle était installée après avoir offert les quignons de pain. De là elle pouvait observer à loisir Tebirahc et ses réactions. Ce dernier était préoccupé par son rôle car il n'allait pas interférer avec les Sombres de manière forte, contrairement au temps où il siégeait à l'Olath Blada en tant que Général d'un Ost.

Je ne saurais vous dire comment les Sombres vont réagir à vos paroles. Ils ont été beaucoup habitués à Illiv'aere, ce temps où deux Gardiens résidaient au Puy a apporté une grande fierté à notre peuple. Ca a été un déchirement lorsque ces deux Gardiens ont disparus, cela a aussi été une joie que de savoir que vous veniez d'être proclamé Gardien à la suite de Illiv'aere. Il en sera peut être certains qui s'attendront à vous voir agir comme votre prédécesseur, chose que vous ne ferez en aucun cas.
Il y aura des attentes déçues mais avec un peu de temps l'acceptation sera acquise, je ne me fais pas de soucis dessus, le culte saura faire accepter cette situation.

Il n'était pas question de parler des autres races, ce sujet était contre-productif pour la Da'ron. En effet, les Drows étaient en guerre contre les autres races et elle dédiait sa vie au dieu de la Guerre. Parler des ennemis avec le même détachement que pouvait avoir Tebirahc n'était pas chose facile pour Haeldra.
La Drow se tue lorsque le Gardien réclama le silence, prenant une pose de méditation. Il était clair que la posture était elfique, chose qui était impossible à faire en tant que Drow, rien que sur le domaine de l'orgueil c'était impensable.
Mais Tebirahc avait toujours eu des relations étranges avec les autres races, Oloryle avait du lui apprendre certains rudiments sur sa race.

Une heure passa sans que le Gardien ne prononça un mot ni ne bougea d'un pouce. Haeldra avait depuis un certain temps quitté sa place à ses cotés, s'occupant d'entretenir le feu ainsi qu'en montant la garde en attendant que son compagnon de voyage ne se décide à émerger de sa méditation.
La garde de Haeldra fut interrompue lorsque Tagnik'zur revint à eux, lâchant au passage le cadavre d'un chevreuil fraichement tué. Cette scène apporta la preuve à la Drow que tebirahc pouvait contrôler sa Wyvern à distance, chose dont elle s'était doutée mais sans pouvoir y apporter de preuve.
La Da'ron se retourna vers Tebirahc qui n'était pas sorti de sa méditation. Devant le message implicite, la Sombre accepta sa tâche et entreprit de préparer quelque chose à partir du gibier tué.
Découper la carcasse à la dague et à l'épée n'allait pas donner de la cuisine fine mais, après quelques temps, la Drow put faire cuire au dessus du feu une cuisse du chevreuil, chose qui pourrait convenir pour un repas pour deux bouches. Le corps du gibier allait leur donner encore quelques repas pour le reste de la journée.
Il ne fallut pas longtemps pour que soit déposé devant Tebirahc une gamelle contenant une portion de viande rôtie, ce qui allait le changer du pain mangé précédemment.

Viendra le moment où Mogar annoncera sa décision à son Gardien... Le secret demeurera t-il ou bien le Dieu sera t-il fidèle envers ses ouailles ? Lourde de conséquence serait la décision, et il faudrait être maître des mots prononcé si l'heure vient à la divine révélation, car de cette découverte ne devait pas naître un sentiment de trahisons, mais déjà, les mots à employer lui apparaissaient, du moins, les arguments qui convaincraient sans doute la sombre race, si d'aventure c'était là la volonté du Père.

« Je vous remercie. »

Furent ses seules paroles à la promesse présentée par la Da'ron, elle ne le trahirait pas, ou bien alors, le paierait chèrement si elle venait à nuire par une langue par une occasion bien trop pendue.
Ils parlèrent de Illiv'aere, et si il était sans doute vrai que l'ancien Gardien, autant que sa famille qui, par malice et sournoiserie, tant le père que le jeune fils, avaient approché de très près le trône, dominant presque comme aujourd'hui les Naerth, son échec comme Voix et Main du Dieu sur cette terre ne souffrait d'aucune contestation, puisque le Dieu lui-même l'avait abandonné, au profit de l'ancien Obok Senger d'Thalack. Suivre ses traces, n'exister que comme Gardien d'Uriz, s'endormant dans le Puy pour ne plus y bouger, était par conséquent une bien mauvaise idée si il voulait durer dans ce rôle.

« J'ai déjà le respect des drows, par mon nom autant que par ma carrière, je ne le perdrais pas à être différent d'Illiv'aere... Il a échoué, tant et si bien qu'Uriz l'a abandonné, déçu que son Gardien soit si peu actif, je ne commettrais nullement la même erreur, comme je ne me limiterais pas. »

L'ambition du drow demeurait importante, mais il s'était volontairement stoppé quand le rang d'Obok Senger fut obtenu, car le trône ne l'intéressait pas... Pourquoi prendre un tel siège, un tel risque alors qu'un autre, un cran plus bas, soutenu par une armée entière, un frère d'arme, offre autant de possibilité, sans les risques encourus à régner... Les guerres des Lignées Prima Sanguis, qui avaient coûté la vie aux Quatre, étaient une leçon suffisante pour savoir que cette place pour l'une d'elle était extrêmement dangereuse.
Mais devenir Gardien offrait des possibilités très différente... Il pourrait prendre le pouvoir, renverser les Naerth sans qu'aucune lignée, aucun drow ne puisse le menacer, l'armée et le culte à sa cause, un pouvoir sans commune mesure à sa disposition, un règne qui pourrait durer des millénaires, mais pourquoi se borner à cela quand le monde s'offre à portée de main ?

Puis il médita, prenant la posture des elfes, se plaisant à cet exercice. A tord, les drows avaient rejeté tant de la culture elfique dont ils sont finalement issue, par souci d'orgueil, qu'ils n'ont pas su faire la part des choses pour s'affirmer comme race à part, développer leur propre culture. Les Zaurahel, l'une des plus anciennes lignées, avaient pris soin de sauvegarder cette chose, la langue et l'écriture, la méditation entre autre chose.
Quand il émergea, c'était en sachant le repas prêt, la viande apportée par Tagnik'zur cuite et prête à être mangée.

« Merci. »

Ils mangèrent alors que le jour se levait sur la forêt qui servirait en partie d'abri à la luminosité gênante pour eux, quoiqu'à présent, lui n'avait plus à s'en soucier... Sa vue ne pourrait être pire qu'actuellement.
Quand ils eurent fini, il s'adressa à nouveau à Haeldra, après être demeuré silencieux tandis qu'il appréciait la viande cuite, bien plus riche et fameuse que le pain à demi rassi qui l'a précédé.

« Vous devriez dormir et vous reposer, nous repartons ce soir, je monterais la garde, faites moi confiance. »

La chose pouvait paraître surprenante, mais Tebirahc semblait convaincant autant que convaincu de sa capacité à faire la chose, à voir si Haeldra se laisserait convaincre qu'un Gardien, même aveugle, puisse être capable de prévenir et détecter un éventuel danger, malgré cela.

Il était vrai que Tebirahc allait différer de ce qu'avait été Illiv'aere et qu'il avait derrière lui une forte réputation. Mais Haeldra s'était plus intéressée à ses paroles aux Drows de haute société plus détachés des affaires de l'armée. Faisant partie d'une des familles des Prima Sanguis dédiées à la religion elle connaissait certains Drows qui pouvaient s'être accommodés des actions du prédécesseur de l'ancien Obok Senger, la sphère religieuse possédait aussi ses adeptes parmi les plus butés, parfois aveugles au plus haut point. Pour les masses populaires il n'y aurait certainement aucune difficulté, le culte était là pour les diriger selon la Voie d'Uriz.
Tebirahc ne se limitera donc en aucun cas, il reviendrait plus à Haeldra de surveiller les mécontentements éventuels au sein du milieu d'influence des grandes familles, chose que ne pourrait pas faire le Sombre s'il continuait à prendre son habitude de partir tout le temps à l'improviste. Intérieurement cela l'intéressait de voir comment les choses allaient tourner, non pas parce qu'elle était une Drow habituée à vouloir biologiquement sortir son épingle du jeu mais plutôt de voir quelqu'un qu'elle connaissait depuis longtemps se débrouiller à une place qu'elle respectait et qui influait sur son existence même. Une invitation à lui montrer ce dont il serait capable.

L'avatar du Dieu de la Guerre ne se limitant plus aux considérations raciales .. le Voile a vraiment apporté son lot de surprises et de changements, pour nous-mêmes que pour les habitants de ce monde. Quel dommage que je ne puisse vous suivre sur ce chemin, mes lames sont trop destinées aux ennemis de notre peuple pour pouvoir me détacher aussi facilement de ce genre de considérations, comme vous le ferez.

Haeldra n'avait pas la même mentalité envers les autres races que Tebirahc qui était plus disposé à adopter certaines pratiques qui pouvaient l'arranger. Elle était une combattante religieuse, dirigeante d'un ordre guerrier et combattant selon la voix d'Uriz. Les autres races étaient pour elle des ennemis et elle en avait versé le sang depuis son incorporation dans le culte du Temple.
Bien qu'elle puisse comprendre Tebirahc il était certaines choses qui resteraient en dehors de ses compétences de tolérance.
La Da'ron y repensa alors qu'elle faisait cuire la viande de chevreuil sur le feu sans changer d'avis sur le sujet, observant par moment Tebirahc qui ne sortait pas de sa méditation.
La cuisson terminée les deux Drows se restaurèrent, le menu changeant radicalement du pain de voyage usé. C'était rustique mais le plaisir de la viande chaude était un luxe que l'on ne rencontrait pas souvent lors d'un voyage improvisé.
L'attention de la Drow se porta sur le ciel qui commençait à s'éclaircir, signe que le Voile était bel et bien et définitivement terminé. Le jour se levait, réchauffant l'air autour d'eux, la lumière était une mauvaise chose pour les Drows qu'ils étaient mais les arbres masquaient efficacement la plupart des rayons du soleil pour que l'ambiance soit supportable.

Ils ne repartiraient qu'une fois la nuit tombée, Tagnik'zur étant trop repérable dans le ciel et ils ne pouvaient voler sans être affectés par la lumière du jour, aussi bien la bête que les passagers.
Haeldra allait se relever lorsque Tebirahc émit le souhait de monter la garde, préférant qu'elle se repose à la place. La demande était inattendue pour la Da'ron qui n'avait pas songé demander cela à un Gardien. Techniquement Tebirahc pouvait se débrouiller en dépit de sa cécité, Illiv'aere combattant dans les batailles étant un bon exemple, mais cette dernière était encore récente, il n'y était peut être encore habitué.
La Sombre ne sut répondre sur le coup mais elle pensa rapidement à un plan qui permettrait de vérifier si le Gardien pouvait remplir cette tâche.

En tant que Da'ron il serait impoli de ma part de vous confier cette tâche .. néanmoins vous semblez être des plus sérieux bien que j'ai du mal à faire confiance à votre cécité.

La Drow se leva, ramassant son épée sur le sol avant de revenir vers Tebirahc, un sourire en coin sur le visage.

Soit .. Pourquoi ne pas mettre vos compétences de garde à l'épreuve ?
Depuis que nous avons quittés la Première Cité je n'ai guère pu faire un semblant de toilette et je suis encore couverte de l'odeur des bêtes que j'ai du tuer pour parvenir jusqu'à vous. Et je m'en voudrais de devoir porter votre plastron dans cet état.
En atterrissant j'ai pu remarquer que nous sommes très proches d'une rivière, je vais donc y aller pour m'y baigner quelques instants.

Si vous parvenez à vous apercevoir du moment de mon retour, que je tacherais de faire discret, alors je vous laisserais monter seul la garde, pleinement confiante.

Amusée par ce petit défi lancé, la Drow laissa Tebirahc près du feu, s'en allant près de la rivière qui n'était située qu'à quelques dizaines de mètres. Il ne semblait pas y avoir d'ennemis dans les environs, la Sombre restant très vigilante sur ce qui était autour d'elle. Parvenue près du cours d'eau, elle ôta son armure afin de la nettoyer consciencieusement, cette dernière étant encore couverte par endroit de sang ou de fluides. Son épée restait toujours à portée de main, juste au cas où. Nous verrons plus tard si Tebirahc saurait détecter l'arrivée d'une Drow dans le plus simple appareil, sans bruits d'armure pour trahir son approche. Peu importe la tenue il était aveugle non ?
Puis, en ayant terminée avec l'entretien de son équipement, la Drow plongea dans la rivière pour prendre un bain bien mérité.

L'Histoire des Sombres, ses véritables origines sont ignorées, oubliées volontairement alors que les lointains ancêtres reniaient tant dans leur exile, et devant cette décision, il est vrai que Mogar s'était vu devoir se parer de quelques atours malicieux, usant de tours et d'autres pour créer ce personnage, cette facette propre au Panthéon des Drows, Uriz Vyn'Het Namaz, le Dieu de la Guerre.
Illiv'aere, en son temps, de son fait, peut-être aussi avec l'accord du Dieu qu'il représentait, s'était contenté de cette sanglante et sombre facette, il était devenu le Gardien d'Uriz, non celui d'un Dieu de la Guerre tel qu'est Mogar. Tebirahc, lui, au vue de la situation, serait le Gardien d'un Dieu qui se révèle, le Gardien d'un Dieu entier, non d'une seule part.
Les temps changeront, car entre Illiv'aere et lui se trouvaient d'immenses fossés, tant dans l'esprit que dans le comportement... Espérer qu'il se rabaisse au niveau de son prédécesseur, c'était folie, tant qu'il s'étonnerait que quelques uns, dans ce qui connaissait l'Obok Senger d'Thalack, ou l'héritier Zaurahel, bien qu'il soit délicat de séparer l'un et l'autre, le nourrisse.

« Avez-vous pensé que la Guerre n'était que l'affaire des drows, Haeldra, pour en être étonnée ? La Guerre est partout, chez les hommes, chez les nains, même chez les elfes, bien que les drows soient la culture qui y donne le plus d'importance... En cela, est-il encore surprenant qu'un Avatar du Dieu de la Guerre existe en toutes terres, non en une seule ? »

Non, ça ne l'était pas... L'inverse l'était, au contraire.

« Quant à vous détacher de ces considérations, se serait offense faite au Père, ne croyez-vous pas ? Vous supposez à tord que nos rôles demeurent proche, mais nous ne contribuerons plus de la même manière à le satisfaire, à participer à son œuvre... Vous devez servir le Culte d'Uriz, notre peuple, votre place, votre devoir n'est nul autre que celui-ci... Il fut le mien autrefois, à présent, je ne sers même pas le Culte, je sers un Dieu qui propage sa voix, son œuvre en tout lieu de cette terre. »

C'était une des premières choses que lui avaient apprise Mogar, dans sa torpeur, tandis qu'il laissait son corps au Dieu, et si il en comprenait le principe, il ne serait jamais foncièrement ouvert aux autres races, jamais totalement amical, mais il n'userait pas de ses pouvoirs que pour favoriser la race sombre. Une tolérance plus élevée, mais son sentiment n'en changerait pas... Ils considèreraient les autres races comme faible, inférieures, être Gardien ne changeait pas l'ensemble du monde, après tout... Mais le Dieu était partout, il devrait l'être aussi.

Quand il lui parla de se reposer, tandis qu'il s'occuperait de monter la garde, elle éprouva et exprima quelques doutes quant à sa capacité à réussir cette tâche, du fait de sa cécité. La chose était logique, légitime, mais il n'aurait aucune peine à lui donner la preuve de tout son talent... Gardien depuis peu, peut-être... Mais durant tout le Voile, une partie de son temps, Mogar s'était prêté à quelques leçons de premier ordre à l'égard de son Gardien...

« Soit... Mais Haeldra, qu'importe la politesse ou le rang, vous devez vous reposer car en vol, dormir n'est pas permis, pas pour vous. »

Et elle ne méditait pas comme lui, pour remplacer et reposer son corps, si elle finissait par souffrir de fatigue, de faiblesse et lâchait prise en vol, les chances de survie seraient moindre... Tagnik'zur pouvait transporter certes, mais attraper, non... Aussi, si elle tombait, elle mourrait.
Et elle partie faire sa toilette... Il en aurait besoin, mais cela pourrait attendre son retour au Puy d'Elda, et pendant qu'elle s'absenta, il attrapa le marteau de guerre qu'il avait récupéré, la bourse de cuir dans laquelle il avait rangé les quatre Esprits Gardiens.

« Ne manque que l'Artefact... »

Il devrait fouiller les appartements de son prédécesseur, il ne se risquerait pas à laisser l'Objet ailleurs qu'en un endroit où il le sera en sécurité, c'était son devoir de le préserver. Ses mains glissèrent sur l'arme, les runes gravées, l'emblème du Dieu Roi Mogar, du temps où il n'était encore que le Dieu du Feu, Divin Créateur des Nains. Cette arme lui avait appartenu, en un temps si reculé qu'aucun récit, autre que mythologique, n'en faisait mention... Une véritable relique, et un des symboles futurs de son rang.

Il attendit, les minutes défilèrent et il s'ouvrit à l'un de ses nouveaux sens, une perception qui lui serait utile au quotidien, pour le combat et la survie d'abord, et pour quand il devra jouer son rôle... Un don proche de la précognition, quoique ne tenant pas compte de l'avenir lui-même... Il pouvait percevoir les intentions qui l'animait, plus précisément, à cet instant, celle qu'elle avait au moment où il sondait... Elle voulait le surprendre, elle ne tarderait pas à être là... Avec ça, il se concentra sur son ouïe accrue, cherchant chaque son de chaque pas qui la rapprocherait de lui.

Quand il l'a perçu et l'entendit, de très nombreux façons, c'est une petite boule de feu qui jaillit et passa à un rien de la drow, pour l'avertir qu'il la savait là, l'avait « vu » venir.

« J'aurais pu vous faire signe de plus loin, mais vous n'auriez pas apprécié... Cela vous suffira pour dormir, ou avez-vous encore besoin de preuve ? »

Sujet: Re: De retour par dessus les cimes .. [Tebirahc] Mer 5 Jan 2011 - 18:13

Le calme régnait dans cette partie de la forêt et les deux drows furent tranquilles pour oeuvrer à leurs besognes. La Da'ron passa un certain temps à entretenir son équipement et faire sa toilette tandis que Tebirahc patientait près du feu de camp en attendant son retour. Ce fut chose faite lorsque la Drow ramassa ses armes et reprit le chemin menant au camp. Elle ne prit pas la peine de se revêtir à nouveau de son armure, préférant être discrète pour s'approcher de Tebirahc et le surprendre. Peu importe qu'elle fut nue à ce moment, son congénère étant aveugle, seule se trouvait dans sa main son épée qu'elle comptait bien poser sur l'épaule du Drow une fois qu'elle l'aurait surpris.
Sur le chemin, elle posa doucement son équipement à une dizaine de mètres avant d'atteindre la zone de repos et reprit sa route allégée de son équipement superflu.
Sabre au clair, elle vit sa cible qui n'avait pas bougée de sa place, il fut facile de trouver une route qui l'emmènerait dans son dos après quelques enjambées furtives.

Seulement, alors qu'elle était parvenue dans le dos de Tebirahc et s'apprêtait à lever son arme une boule de feu jaillit en face d'elle et la frôla de quelques centimètres. Haeldra fut surprise de comprendre que son approche avait été détectée malgré ses efforts pour rester discrète face à un Gardien aveugle.
Elle fut quelque peu déçue de ne pas avoir pu mener à bien sa petite surprise mais il fallait constater que la cécité de Tebirahc ne l'empêchait pas de montait la garde.
Sans dire un mot en réponse aux paroles quelques peu assassines du Drow, la Da'ron baissa son arme et passa à coté de lui pour regagner sa place.

Très bien vous m'avez convaincue .. je vous laisserais monter la garde jusqu'à notre départ.

La première chose que fit Haeldra, un peu frustrée de ne pas avoir réussie son oeuvre, fut d'aller chercher son équipement et de le ramener. Les instants suivant virent la Drow s'habiller sans aucune gêne en plein front d'un Tebirahc aveugle, élément tueur de pudeur par excellence. Elle ne remit pas néanmoins ses épaulières et son plastron vu qu'ils ne feront que la gêner lorsqu'elle devra porter l'armure de Tebirahc.
Il fallait désormais envisager de dormir si elle ne voulait pas chuter durant le prochain vol, cela lui donnerait en plus des forces pour mieux combattre le froid en dépit du plastron conçu pour résister à ce genre de températures.

Si vous avez besoin de moi, n'hésitez pas à me réveiller dans ce cas.

Sitôt dit sitôt fait, la Drow alla s'installer avec une couverture à sa place pour s'y reposer. La journée était encore jeune mais il fallait évacuer la fatigue occasionnée par le voyage aller qui l'avait menée jusqu'au coeur du territoire des nains.

Sujet: Re: De retour par dessus les cimes .. [Tebirahc] Jeu 6 Jan 2011 - 13:24

Le temps défile, les heures d'un jour s'écoulent en attendant qu'arrive le crépuscule et le soir, où, enfin, les sombres pourront reprendre leurs routes vers le Puy d'Elda, sans avoir à souffrir, tant eux que la monture qui les porte, si mal à l'aise, aveugle en journée. Il médita, portant tout de même de l'attention aux alentours, si proche des terres du Royaume de la Péninsule, si proche des Bois Sacrés d'Anaëh, le danger était tout de même présent, quoique rien n'inquiétait vraiment le Gardien, mais tout de même... Ensuite, ils seraient en sécurité, dans les cieux ou bien dans l'influence de Yutar, du Puy, mais en cette journée, ils étaient si proche des ennemis des guerres actuelles...

Le jour s'écoula ainsi, sans qu'il n'ait à réveiller la sombre dormeuse, et pourtant, le soir venu, quand elle se réveilla, une odeur de chair brûlée put parvenir aux narines de la drow, et elle put voir Tagnik'zur s'appuyant sur quelques corps à demi calciné, arrachant des lambeaux de chair à ces petites carcasses... Des humains, sans doute des voyageurs, avaient eu le malheur de passer à proximité du camp improvisé, et menace ou non, Tebirahc avait décidé de faire jouer ses pouvoirs... Ses quelques malheureux n'avaient après tout aucun rôle, dans aucune œuvre, présente ou à venir, pour son Divin Père.

Le soir venu, tandis que le jour s'achevait, ils repartirent, Haeldra portant l'armure rembourrée, conçue spécialement pour le vol, et pour contrecarrer la fraîcheur de l'altitude, et ils se mirent en route, à rythme soutenu, vers leurs prochaines destinations, non loin de Yutar... Pourquoi non loin ? Parce que Tebirahc n'était pas sans ignorer les perturbations magiques de la région, tant désormais à Ellyrion, depuis le Siège, qu'à Yutar... Aussi contourneraient-ils la zone pour se rendre dans les montagnes pour se rendre en un lieu « secret », avant poste situé dans une grotte très difficile d'accès, mise à part à dos de wyvern, créée à l'initiative de Tebirahc et connu que d'hommes fidèles à sa famille et à lui-même, véritable petit entrepôt de matériel et cache pour la wyvern quand le drow devait se rendre dans la région.
Depuis peu, quelques autres aménagements avaient été fait, mais Tebirahc, si il offrit quelques détails sur l'usage de l'endroit, mais interdit strictement de le visiter, elle devrait se contenter de la pièce principale, celle ouverte sur les montagnes, où se repose la wyvern. Il interdit également qu'elle en fasse mention à quiconque, ou tente d'y revenir, sous peine de... Il ne le dit pas, à vrai dire. Il put toutefois récupérer son armure, fournissant à Haeldra une des tenues de rechange qu'il trouva dans ce petit avant-poste.

Et ils repartirent finalement, le soir venu, pour une route à travers les montagnes escarpés d'une chaîne qui les conduisait au Puy d'Elda, nuit de voyage qui s'acheva à la frontière entre montagnes et terres stériles, à une demi-jour, en vol, de la Faille.
Ils montèrent le bivouac, et tandis qu'ils étaient installés autour du feu.

« Nous ne sommes plus qu'à une demi-journée de la Faille et du Puy d'Elda, profitez de votre dernière journée de repos, demain, vous reprendrez pleinement vos fonctions. »

Un si long voyage, d'une extrémité à l'autre, en moins de cinq jours... Nul ne pouvait, à part ceux qui savaient manier les divers méthodes de téléportations, pouvait prétendre à voyager à une telle vitesse, sans peine. Tagnik'zur trouverait plus encore son utilité quand il devrait aller de royaumes en royaumes, car plutôt que de passer des semaines entières sur les routes, il dévorerait les distances en quelques jours à peine... Un Gardien mobile, assurément.

» [Demeure de Tebirahc] Un retour précipité [Tebirahc](fini)
» [Demeure de Tebirahc] Retour au Puy [Tebi]
» [Demeure de Tebirahc] Retour d'une esclave [Tebi]
» Hypérion L'Ombre du dessus
» Au dessus de la fosse, Lante.

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