Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla

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Jeanne de Sephren
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MessageSujet: Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla   Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla I_icon_minitimeSam 13 Aoû 2011 - 19:49

Pendant que ses caméristes la paraient des plus chatoyants atours – On ne lui donnait que rarement son mot à dire sur la vêture dont elle se retrouvait attifer et seuls les Cinq savent à quel point les femmes de chambre aimaient à jouer à la poupée avec leur petite duchesse, bref- pendant qu’on l’habillait, Jeanne avait tout le loisir de se remémorer les précédentes cérémonies d’hommage : Jusqu’à là, elle avait eu le droit aux mains tremblantes et le baiser très humide du Vieux de Brevise, l’étreinte un peu brutale de Tall, l’embrassade gênée et presque avide de Lancrais – dont la femme n’avait pas partagé la couche depuis des mois disait-on – et le très cérémoniel d’Amderran. Si Missède et Merval – respectivement trop occupé à préparer des tartes et un mariage ou à des actes de sorcellerie –n’avaient pas jugé bon de suivre une cérémonie avec tout le faste requis par la tradition et préféré envoyer une missive longue de dix pieds chacun, le comte de Scylla aurait le droit, lui, à tout le tintouin dans ces moindres et plus ridicules recoins. Ne sachant pas à quoi s’attendre avec l’hurluberlu d’Ivrey, craignant qu’il ne désire montrer son ardeur à la servir en la prenant sur son trône – idée saugrenue savamment implantée par l'exquise Nilda et ses ragots d’antichambre – Jeanne était pour le moins nerveuse et s’évanouit à deux reprises à cause d’un corset qu’on s’échinait à refermer très fortement pour faire paraître sa taille encore plus menue et par conséquent désirable.

Après plusieurs heures, une ou deux aiguilles plantées dans ses délicates chevilles pour reprendre un ourlet en y ajoutant un liseret d’or, la torture s’achevait enfin. De sable et d’or de pied en cap -ayant réussi par on ne sait quel miracle à éviter la dominante inverse – Jeanne, livide, fut livrée à la dernière vindicte d’une maquilleuse qui lui trouvait fort mauvaise mine. Sous l’assaut d’une poudre pour rosir ses joues, la duchesse manqua de s’étouffer et après avoir flanqué une série de coup de pied aux fesses de l’indolente, jura que la prochaine camériste qui tenterait de la toucher se verrait chaleureusement offrir une discussion avec Chanvre. Là-dessus, ne doutant pas le moins du monde que les menaces seraient mises à exécution, la horde de harpies fuit pour faire place au Chambellan Vallès et au Vicomte de Tall. Rapidement excédée par le rabâchage sur les points-clé de la cérémonie – elle n’y avait après tout présidé avec succès que quatre fois – elle ordonna que les attributs de son pouvoir, couronne et lourd manteau doré en tête, viennent étreindre son auguste tête et ses fragiles épaules.

Affublée de la sorte et avec un certain prestige, la démarche altière, elle gagna la salle du trône. Naturellement, elle dut se fendre du plus long trajet jusqu’à son trône d’une lenteur cérémoniale qu’elle aurait volontiers qualifié ce jour-là de vomitive. Arrivée à destination, elle se retourna vers sa cour qui se redressait après s’être dûment fendu des révérences d’usage au passage de la Rosière. Sur les douze coups de midi, l’on annonça alors l’arrivée du Comte d’Ivrey sans omettre le moindre de ses titres.

Profitant de la longue diatribe, Jeanne camouflait derrière son plus ravissant sourire tout le ressentiment né la veille à l’égard de son vassal et regrettait amèrement que la Gifle - une obscure pratique des temps jadis qui consistait à baffer un vassal pour qu’il tende l’autre joue en guise de soumission (et non pas la baffe "dernière que tu ne rends pas" lors d'un adoubement)– lui soit interdite tant elle aurait goûté au plaisir de libérer un peu de sa hargne sur le visage de l’objet de ses tourments depuis le banquet.
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MessageSujet: Re: Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla   Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla I_icon_minitimeDim 21 Aoû 2011 - 0:31

Les préparatifs, côté comtal, étaient nettement plus simples. A l’aube, lorsqu’Aetius se réveilla, tancé par une violente gueule de bois, ses hommes, qui conversaient au dessus de son lit sans autre forme de procès, tournèrent leur attention vers leur suzerain. En trois mouvements, il fut debout, maintenu fermement par Prestespée et La Jaille, tandis qu’on commençait à saucissonner ses braies à grand renfort de ficelles d’or. La conversation ne cessait pas pour autant, et l’on dissertait sur cette servante qu’on avait saisi sans ménagement un peu plus tôt dans la nuitée, du vin affreux que l’on fit servir avec les lamproies, ou encore de cet homme qui avait mal regardé Prestespée lors des ortolans frits. Bref on ergotait, on badinait, on tranche-montagnait autour du comte, qui tentait tant bien que mal de se remettre les bouts de souvenirs à l’endroit, pâle comme un linge, les yeux enfoncés au plus profond de sa tête.

« Par les dieux ! Du vin ou je vomis sur ta tête et mon plastron ! » rugit-il à un écuyer qui le revêtait de la demi-armure qu’on avait amené pour l’occasion. La conversation s’enraya un instant, le silence se posa sur les épaules frêles du petit page, qui frissonna et alla chercher une aiguière dont Aetius se saisit sans ambages. La discussion reprit son train et on fut bientôt paré. Le comte, suivi de sa joyeuse troupe, s’en allait donc rencontrer son destin et ce comme les grands héros des épopées : la mine à peine dégrisée et le gras de la bombance de la veille encore dans la gorge.

On ouvrit les portes, on fit du bruit et de la musique, et cela était très beau. Et à mesure que le comte s’approchait de sa soi-disant suzeraine, cette petite bâtarde sortie d’on ne sait quelle bourgade anonyme du Langecin par le filou de Tall, il se raidissait un peu plus. Et beaucoup, dans l’assistance, virent là un peu de majesté qui se dégageait de cette démarche contenue et lente, celle de l’homme qui dégrisait encore un peu.
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MessageSujet: Re: Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla   Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla I_icon_minitimeDim 21 Aoû 2011 - 3:22

Malgré l’éclairage flatteur des vitraux de la salle du trône, Jeanne ne pouvait s’empêcher de lui trouver le teint pâle et l’œil rougi. Le pauvre petit manquait de sommeil assurément et payait le lourd tribut de ses incartades nocturnes. Sous la demi-armure, le mélange des mâles effluves et la transpiration âcre de l’ivrogne concoctaient assurément le plus charmant des parfums. Elle remerciait intérieurement le prêtre de Néera et ses encens de lui épargner l’incommodité supplémentaire.

Ah, évidemment qu’il avait fière allure, son vassal. La démarche raide et lente, il se dressait bien droit, sans doute concentré pour ne pas marcher de travers. Le bellâtre, aussi débauché que sa cour, s’attirait de facto les faveurs des dames à la cuisse légère. D’ailleurs, la De Lancrais minaudait derrière son éventail, étalant sans ambages à sa voisine la prétention d’en faire son repas du soir. Un peu plus loin, Fernando Del Vorma – pédéraste notoire – encensait les fesses de l’Ivrey par quelque discours panégyrique chuchoté à son acolyte libertin. Fort heureusement, l’agréable musique camouflait judicieusement le babille habituel d’une cour.

Lorsque l’Ivrey gravit les cinq marches le séparant du trône ducal, Jeanne lui souriait comme si rien, la veille, ne s’était tramé. La cérémonie en elle-même ne devrait durer qu’un peu plus de vingt minutes. Comme de bien entendu, ils passeraient, ensuite, quelques instants ensemble dans le cabinet de travail de Jeanne, avant de retourner à table, pour la suite pantagruélique du festin de la veille. Malgré tout, la perspective d’en finir rapidement avec le coq scylléen – il avait, aux yeux de la pucelle, plus du coq que de l’aigle – réjouissait la duchesse au plus haut point. Aussi après avoir incliné la tête à la révérence du comte, elle prononça d’une voix haute la formule consacrée :

- Devant Néera, Mère de tous les Hommes, et cette assemblée, voulez-vous, Aetius d’Ivrey, devenir mon Homme et servir la couronne ducale sans réserve ?

Sans attendre, elle tendit les mains vers lui, paume vers le ciel, afin de recueillir les siennes lors du premier serment. Un brin fébrile, les doigts fins et graciles de la demoiselle tremblaient très légèrement. Seuls les Cinq savaient quel tour le prince du sang turbulent pouvait encore inventé.
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MessageSujet: Re: Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla   Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla I_icon_minitimeMer 24 Aoû 2011 - 0:00

Remonter les degrés ducaux sous le regard silencieux et jugeur de la foule de la veille crispait Aetius. Cette situation, inconfortable s’il en est, faisait dégriser un comte qui n’avait plus rien de l’amoureux transi, du Dom Juan rompu aux minauderies féminines. Il s’agissait d’un seigneur féodal ombrageux, dont l’honneur, taché, l’orgueil, gâté, lui criaient de tirer vengeance, en cet instant et en ce lieu, du petit tour de force que lui avait joué la demoiselle lors du festin où, éperdu de désespoir, il avait flatté avec passion la duchesse. Les mots de ses comparses lui revenaient à l’esprit, les conseils d’Hubert, ce bon et prudent Hubert, refluaient. Il faut la marier, et je serai l’homme le plus riche de la Péninsule, se disait-il, le visage toujours fermé, mort, uniquement animé par sa paire d’yeux où brûlait une lueur glaciale. Ce chaos de conseils, de bons mots et de légèretés fit finalement place aux moqueries de Grelot, son nain. « Ne l’épouse pas, elle a les yeux trop gris, ils te rendront malheureux ! Yeux d’argent, homme vieillissant. »

Aetius, qui était un petit chevalier avant d’être un prince féodal, n’était pas insensible à ces proverbes simplistes mais, par là même, puissants. Il oublia cependant toutes ces circonvolutions lorsqu’il lui fit face. La duchesse de Langehack. Petite enfant pâlotte et faiblarde. Il retint une moue de haine et de défi, fit une révérence un peu trop roide puis, tout en se redressant, plaça ses mains au devant d’elle. Toujours debout, il la dominait de sa taille, de son armure. C’était le guerrier qui toisait la princesse. Le silence s'abattit sur l'assemblée, qui ne comprenait pas, ou accusait encore le coup, mais enfin, d'une voix tonnante, Aetius prononça avec lenteur la formule consacrée : « Oui, je le promets. »
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MessageSujet: Re: Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla   Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla I_icon_minitimeMer 24 Aoû 2011 - 15:20

Complètement crispée, tendue à l’extrême, Jeanne se saisit des mains du comte, à la limite de ce qu’elle pouvait tolérer… Non, plus sincèrement, il dépassait sérieusement les bornes de ce qu’elle acceptait. Les doigts du comte étaient serrés avec toute la virulence dont elle était capable. S’il s’amusait à lui faire du mal dès cet instant, après son serment, ne serait-ce que serrer un peu trop vigoureusement ses mains, il récolterait beaucoup d’ennuis. N’avait-il pas juré de servir la couronne ducale à l’instant et devant témoin ?

Une clameur monta dans l’assemblée. Tous murmuraient à leurs voisins, certains s’indignant, d’autres riant d’avance sous cape. Le regard luisant de colère contenue rivé à celui du comte irrévérencieux, elle proclama à haute voix, ponctuée d’un brin d’ironie.

- Voilà qui est digne d’un prince du sang. J’ai plaisir à constater que vous savez tenir votre rang lorsqu’il le faut.

Les jolies lèvres ourlées se pincèrent le temps d’un battement de cœur. Puis elle s’avança vers Aetius. Elle posa ses mains graciles sur ses épaules et se redressa légèrement sur la pointe des pieds. Prunelles d’argent contre bleu acier, ils se toisèrent un instant, proche comme des amants, cœur contre cœur, leurs yeux criant pour eux ce qu’ils ne pouvaient se dire : « Je vous déteste ». Finalement, de ses lèvres, elle effleura celles d’Aetius, avant de l’embrasser réellement. Un brin d’étrangeté transpirait de ce baiser symbolique et traditionnel. La petite duchesse rosière se faisait de fait l’égal à un homme fait, dans la force de l’âge, un chevalier, un prince de sang. L’ayant initié, contrairement aux autres où elle avait agi avec plus de timidité, elle démontrait par le même acte qu’elle était capable de prendre les devants, de laisser de coté la vierge effarouchée pour agir uniquement en dirigeante.

Elle recula, mettant fin à l’étreinte. D’un geste autoritaire, elle fit venir les saintes reliques du Langehack. Plus précisément deux. Sous le pouvoir de ses prédécesseurs, depuis l’arrivée au pouvoir des de Langehack, les serments se prêtaient sur le sceptre ducal. Mais, depuis l’investiture de Jeanne, une seconde relique avait regagné ses droits dans le cérémonial : L’épée d’Arren de Sephren, le marquis ayant repoussé l’envahisseur lors des invasions pharétane. Cette splendide lame à une main, très large, restait naturellement gainée dans un fourreau lourdement ouvragé. Au creux des quillons courbes, un rubis était serti. Pour les pratiquants de la magie, elle semblait pulser d’énergie à intervalle régulier. Quant au sceptre, d’une taille respectable – surnommé la Trique d’Augustin de Langehack, premier duc de Langehack –, l’objet avait tout le bon goût d’apparat langecin. D’un signe de la tête poli à Aetius, elle lui enjoignit de prêter son serment.
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MessageSujet: Re: Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla   Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla I_icon_minitimeMar 30 Aoû 2011 - 21:52

L’insolence triomphait. Si le bon Hubert avait été présent, il aurait hésité entre tomber en syncope ou applaudir l’audace politique (involontaire, soyons-en assurés) dont avait fait preuve le jeune comte à peine investi. La duchesse, malgré le silence tapissé de murmures qui s’élevait de la cour, céda et offrit au bestiau l’osculum, ce baiser qui entérinait l’étrange hommage, cette coopération qui se fondait sur les germes d’une rébellion. Le baiser exacerba la rumeur, l’amplifia. Et tandis que la foule s’étonnait de ce comportement hautain de la part du vassal, ce dernier sentait la damoiselle et toute la crispation qu’elle retenait. On imagine sans mal le plaisir qu’il ressentait à ce moment-ci, ce petit chevalier errant fait, par la grâce des dieux, l’une des grandes personnalités du Langecin. Et si on eût pu comparer l’état d’esprit dans lequel se trouvait le contino à cet instant précis avec quelque chose, ç’aurait été à un rire de hyène, du charognard se pourléchant les babines.

Les yeux toujours ouverts, nos deux compères se retirèrent, reprenant leur place après ce baiser d’amitié. D’un geste brusque, la duchesse fit venir les reliques langehackiennes et l’invita à y proférer son serment. D’une voix calme et contrôlée, le comte, faisant fi de cette petite victoire symbolique sur la famille de Langehack, engagea son serment, la main sur les reliques. Le comté de Scylla revenait enfin à la duchesse, et par cette cérémonie, le duché, de nouveau, redevenait plein et entier. On disait alors adieu au régent royal pour faire place au comte de Jeanne. Aetius, en ce jour, devenait l’homme de la duchesse.
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MessageSujet: Re: Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla   Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla I_icon_minitimeLun 26 Sep 2011 - 20:14

Ainsi arrivèrent-ils au moment du serment. Enfin, ils touchaient au but. Soulagée, Jeanne comptait les minutes la séparant de la libération. Mais, après les actes d’insurrection mettant à mal le pouvoir de la jeune pucelle, l’Ivrey faisait preuve à présent d’un étonnant traditionalisme. Presque déçue – après le carnaval de leurs autres échanges, le discours manquait cruellement de verve et d’entrain – elle reçut néanmoins les hommages avec un sourire bienveillant et satisfait.

Aux reliques succédèrent deux présent et marques de la charge du comte : Premièrement vint un coffret en bois sombre ciselé d’or. Au centre des entrelacs complexes s’envolait l’Aigle Sable. En face du jeune seigneur, la duchesse ouvrit la boîte. En son sein, sur un velours d’azur, reposait une fiole ouvragée remplie du sel scylléen le plus fin.

- Du trésor langecin, je vous confie la gestion des terres scylléennes. Puissiez-vous faire prospérer, en notre nom, le joyau blanc de notre couronne.

S’avançant vers le comte, elle déposa entre ses mains la cassette. De celles du Chambellan, elle cueillit un anneau. Entre ses branches d’or, il retenait captif un saphir. L’orfèvre, selon les directives de la duchesse, avait pris grand soin à garder la chevalière épurée et épaisse de manière à ce qu’elle sied à un homme dans son quotidien. En mirant la pierre de plus près, Aetius pourra constater qu’elle comporte une gravure sur son cœur azuré : l’Aigle, emblème commun entre la lignée de Langehack et Sephren, ainsi que celui choisit par le prince du Sang.

- Par cet anneau, je vous lie à ma couronne. Symbole de la confiance accordée, puissiez-vous le porter fièrement et sans faillir.

Elle glissa alors au doigt de son vassal la bague de sa charge. Après avoir légèrement incliné la tête, elle attira le sieur à ses cotés et, d’une voix plus forte, annonça.

- A la cour et à mon peuple, je présente le Seigneur Aetius d’Ivrey, Prince du Sang et Comte de Scylla devant les Dieux et les Hommes.

Et la cour s’inclina respectueusement. Le coffret fut remis à la suite de l’Ivrey alors que le « couple » de jeunes gens fendit la foule en direction du cabinet de travail de Jeanne afin de discuter de quelques détails.

***

A l’abri des regards et des oreilles curieuses, délestée du manteau ducal, Jeanne invita Aetius à prendre place sur un des sièges. En chien de faïence le temps d’une respiration, la duchesse mira son vassal, hésitante sur le comportement à tenir. Devait-elle s’insurger contre ses manières ? Rester calme et ne prendre son acte comme une broutille insignifiante pour montrer qu’il ne lui faisait pas peur et sa confiance en son pouvoir ? Ni l’un ni l’autre ne lui convenait réellement. Aussitôt les boissons servies par le domestique, elle étala un sourire d’excuse.

- Je vous prie de m’excuser mon omission pour votre affiliation à la couronne. Il m’est néanmoins difficile de m’en rappeler : votre famille me reste inconnue. Peut-être un jour m’expliquerez-vous votre histoire ? Ne nous attardons pas sur ce détail, fort intriguant au demeurant, pour le moment. Vous devez être pressé de rejoindre le banquet en votre honneur. Je désire profiter de cet instant de calme afin que vous m’exposiez vos projets pour vos terres. Qu’en est-il ?
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MessageSujet: Re: Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla   Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla I_icon_minitimeJeu 20 Oct 2011 - 23:50

Risquer sa vie pour ce qui serait considéré par la majorité comme une broutille donnait soif. Aussi Aetius, une fois effondré sur la cathèdre qu’on lui avait désignée, prit son verre et avala goulument le vin qu’on lui proposait. Pas un seul instant il n’avait pensé que le nectar aurait pu être empoisonné. L’aiglette ne représentait aucune menace, voilà ce que pensait Aetius. Plus enivré par le sentiment de toute-puissance actuelle que les vapeurs d’alcool qu’il avait englouti la veille, il ne pouvait que s’aveugler sur l’intelligence politique dont aurait pu faire preuve la nouvelle duchesse. Regardez-la ! Elle lui arrivait au torse et, malgré sa robe, il aurait pu prédire qu’il faisait deux fois sa largeur. Vraiment, elle avait des airs de petite souris. Bien entendu, c’était la jeunesse d’Aetius et le succès de son coup de main qui le rendait aussi orgueilleux. Certes, la prudence ne fut jamais le fort du jeune homme, mais il savait, en temps normal et face à des adversaires plus dignes de combat, faire preuve d’une lucidité moins émoussée.

Non, en ce moment, le jeune homme subissait ce que l’on pourrait communément appeler le syndrome du plastronneur. Revêtu de ses habits les plus martiaux, les plus virils, Aetius se retrouvait au milieu d’une situation qui lui donnait la pleine place de mâle. Que ce soit au niveau de la cour de Langehack ou du Langecin tout entier, il ne remarquait pas le moindre prétendant. Aucun obstacle ne le bloquait, et il volait de victoires en victoires. Tout à fait à son aise, et tandis que le domestique le resservait –il devait à tout prix se débarrasser de cet arrière-goût de cimetière qui hantait son palais – il commença à expliquer ce qu’il avait déjà accompli. Il parla ainsi de sa rencontre avec le potentat d’Ydril, de son heureuse découvert au large des côtes et même de ce prêtre défroqué qui avait cédé aux sirènes de la sédition mais qu’un sien vassal, fidèle à son nouveau maître, avait rapporté à Pharembourg pour qu’on l’y juge. Le religieux renégat ne vit pas même une fibre de Chanvre car il mourut de honte dans les geôles ou, comme le prétendent les esprits moins terre à terre, il fut rappelé par Néera elle-même pour qu’elle le juge. Le monologue continua ainsi, et le tranche-montagne n’épargnait rien à la petiote. Le tournoi royal, son amitié avec Eskevar, baron de Hautval et prince d’Helderion, les liens de camaraderie qui existaient entre lui et le comte d’Arétria. Il s’épanchait sur tous ces succès, bien qu’aucun ne remontât plus avant la guerre civile, dont il semblait tout taire.

Bien sûr, il n’y avait pas qu’amour de la gloriole dans ce long discours. Il s’agissait aussi de faire venir crisser l’aiguillon de l’accomplissement sur la frêle duchesse, sa soi-disant suzeraine. L’audacieux maroufle, échauffé par ce sentiment que tout lui était dû et par ses propres paroles, n’oubliait pas de jeter des regards scrutateurs sur la fleur, se coulant sur les formes mises en avant par la robe d’apparat qu’elle portait. Ses yeux glissaient effrontément jusqu’au bas de la soie noire, et l’imagination du seigneur semblait défier sa langue de poursuivre sa tirade. Car en effet, le plastronneur, le soudard qui dormait en Aetius, s’était levé et approché de sa suzeraine. Il l’avait saisi d’un bras et sa bouche vorace s’était jeté à son cou navré, faisant tintinnabuler les sobres joyaux qui vêtait la gorge de madame. Voilà que d’une main, il défaisait le complexe chignon et qu’une nuit noire tombait sur eux. La chevelure aile de corbeau cascada dans le bas de son dos, sa taille menue fut attrapé par un bras aventureux qui échoua vite sur le galbe rebondi de ses fesses. Et tandis que sa poitrine se pressait contre le plastron ouvragé du comte, la pauvrette fut de nouveau propulsée. Cette fois-ci, elle se retrouvait contre son bureau qu’Aetius, d’un geste de la main, avait débarrassé du superflu. Et alors qu’elle croyait être au bout de ses peines, elle put sentir sa robe se relever sous les palpations du soudard, qui eut tôt fait de la trousser entière. Bref, on imagine bien ce à quoi rêvassait le seigneur, dont le monologue, de plus en plus décousu, perdit vite de son entrain.
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MessageSujet: Re: Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla   Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla I_icon_minitimeMar 1 Nov 2011 - 17:52

Si au début la jeune duchesse s’était montré intéressée et attentive, rapidement le discours fanfaron du comte égara ses pensées sur d’autres chemins. Aussi, l’un parlait sans faire attention à son interlocutrice et l’autre se demandait comment elle pourrait le faire taire efficacement. Tout bouffi d’orgueil, Aetius étalait sans fin ses exploits. Si on retirait la couche de lustre, que restait-il en substance ? Rien ? Non, là, elle devait avouer qu’elle faisait preuve de mauvaise foi. Les Cinq ! Est-ce qu’il ne s’arrêtait jamais de parler ? Durant sa formation de chevalier, personne ne lui avait jamais appris à faire concis et efficace ? En pensée, elle nota qu’elle devrait faire préparer une carafe remplie d’un bon vin assez capiteux pour masquer la saveur de plantes somnifères au cas où ce genre d’exercice devrait se reproduire.

Ecarquillant deux-trois fois les yeux – mais cesserait-il de se vanter un jour ? – elle laissa doucement son esprit vagabonder sur le thème « Prince de Sang agaçant ». Entre sa petite rébellion lors de la cérémonie et ses piques envers elle – à sa propre table ! -, il n’avait pas réussi à s’attirer la sympathie, pourtant facile, de la rosière. Restait les premiers mots échangés. Qu’avait-il dit déjà ? Ah oui ! Il l’avait encensé par quelque discours panégyrique à la mode très langecine finalement. Si elle avait paru froide sur le mot, certains mots « doux » avait titillé sa sensibilité féminine et le comportement très romanesque lui aurait inspiré de doux songes si le reste du capricieux comte ne lui était pas aussi antipathique. Pour passer le temps, elle commença à imaginer un Aetius sans son défaut majeur d’enfant pourri gâté.

La soirée de la veille se serait déroulée fort agréablement. Le vassal bien que pressé de prêter serment aurait obtempéré de bonne grâce à l’ordre de sa duchesse. Il n’aurait pas changé de comportement pour autant, la couvrant d’attentions sucrées et de compliments. Lui et le Comte d’Arétria auraient sans doute conté quelques unes de leurs aventures et combats de chevaliers. Sans doute Jeanne aurait-elle même proposé de profiter du temps doux pour une balade dans les jardins. La discussion aujourd’hui ennuyeuse aurait alors connu un tout autre essor. Ses exploits auraient été accueillis avec ravissement, intérêt. Peut-être même que ses prouesses auraient excusé aux yeux de la souveraine son comportement volage avec les femmes.

Quant à la cérémonie d’hommage aujourd’hui, Jeanne aurait pu profiter pleinement de voir le chevalier s’avancer dans l’allée. Avec fierté, elle aurait pris ses mains lorsqu’il se serait agenouillé devant elle et l’aurait relevé doucement. Puis, lorsque leurs lèvres se seraient effleurés timidement pour le baiser de vassalité, il aurait pris des allures de premier baiser.

Les joues de la duchesse prirent un instant une délicate teinte rosée.

Lorsqu’ils se seraient retrouvés ici, un silence gênant aurait plané un instant. Aetius aurait alors mis genou à terre et constellés sa main pâle de petits baisers un peu trop empressés, lui jurant, une nouvelle fois, sur les Cinq allant bien au-delà d’un serment de vassalité usuel. Un mariage entre jeunes gens bien fait de leur personne aurait peut-être pu alors tracer un vrai chemin dans la caboche de Jeanne. Allié la couronne langecine avec la maison du Prince de sang relevait évidemment d’un lustre certain, une occasion à ne pas négliger. Même maintenant, aussi désagréable et antipathique lui était-il, cela restait une opportunité non-négligeable. Pourtant, un brin fleur bleu, Jeanne rêvait encore secrètement d’un mariage d’amour. Ridicule, n’est-ce pas ?

Toujours était-il, que lorsqu’on retirait à Aetius ce défaut plus qu’agaçant, qu’on passait sous silence ses airs de conquérant fanfaron, il restait un chevalier dont pouvait rêver une demoiselle. Avec un peu plus d’indulgence qu’initialement, Jeanne écouta la suite de son discours. Elle remarqua donc bien vite que celui-ci devenait de plus en plus brumeux et emprunté comme si le comte se perdait lui-même dans ses propres pensées. Selon les dires de La Lancrais, il rêvait probablement de lui ravir sa virginité à coup de butoir sur le bureau – à défaut du trône -, cela correspondrait assez à son comportement du jour. Un instant, elle songea à la chose avec effarement. En serait-il vraiment capable ? Non, il n’était tout de même pas aussi stupide. L’instant d’après, elle se demandait si cela ne serait pas une façon plus agréable que de subir les mêmes outrages de la part d’un futur époux qu’elle ne pouvait qu’imaginer horriblement vieux et laid…. Ou alors terriblement plus rustre et gigantesque comme le comte de la Rochepont – même si sur ce point, l’idée n’était de loin pas complètement rebutante -. Après la vision huilée de tétons et de vît dressé – non pas qu’elle puisse se représenter vraiment la chose à défaut d’avoir vu «le loup » - elle pria un instant Néera et Tyra de laver son âme pour cette pensée impure et Arcam de la préserver encore un temps.

Toutefois, à force d’observer les manières des dames de sa cour, Jeanne esquissa alors un geste inattendu. Elle approcha sa main et la déposa délicatement sur la sienne. Presque une caresse, une flatterie étudiée pour elle, elle murmura presque sur le ton de la confidence.

- Vous savez, Comte, je suis ravi de compter un homme tel que vous dans mon entourage. Les vrais hommes, les chevaliers se font de plus en plus rares. La narration de vos exploits me conforte dans l’idée que votre place est auprès de moi. Je sais à présent que Scylla est entre de bonnes mains.

Après un sourire enjôleur, elle retira doucement sa main et reprit sa place avec la rigueur qui la caractérisait. L’idée de la manœuvre était de calmer l’égo meurtri du vassal. La duchesse avait l’impression d’en avoir fait beaucoup trop. Elle était un peu gênée, un peu en colère aussi de devoir se plier à une bassesse très langecine pour se garantir un semblant de loyauté de la part de son vassal. Après tout, IL était le vassal que cela lui plaise ou non. Néanmoins, elle restait aussi stoïque que possible, la mine plus avenante comme si le discours l’avait plus attendrie, touchée que ce qu’il en était réellement.

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Aetius d'Ivrey
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MessageSujet: Re: Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla   Cérémonie d'hommage du Comte de Scylla I_icon_minitimeMer 21 Déc 2011 - 12:52

Trop n’était pas un mot que l’on retrouvait fréquemment dans le vocabulaire de l’Ivrey. Et si la jeune duchesse pensait sa manœuvre flagorneuse excessive, le comte ne sembla pas le remarquer, bien au contraire. Avait-il songé que tout cela n’était que calcul ou bien que la damoiselle, après tout ce qu’il lui avait fait subir, démontrait un peu d’affection pour le gentil chevalier ? Qui l’aurait su ? Pas Aetius en tout cas. Ce dernier, laissant les subtilités dans un coin de sa tête, se laissa faire tout naturellement, contemplant cette main qui se posait sur la sienne, ce sourire gracieux qui venait commenter tous les récits qu’en bon tranche-montagne qu’il était, il avait débité jusqu’à plus soif.

Le plastronneur avait laissé place au galant, car quand la jeune femme lui retira sa main, il la reprit avec brusquerie, et lorsqu’il eut bien saisi et que le calme revint, il se tourna vers la duchesse, les airs d’amoureux transi habillant son visage rongé par la barbe, et dit :

« Ma dame, laissez-moi votre main, que je la baise. »

Et sans attendre aucune autorisation de sa part, il déposa un baiser chaste sur la paume de Jeanne. A son tour il offrit un sourire enjôleur, et conclut ce duel de flagornerie sur un dernier mot :

« Croyez bien, duchesse, que l’homme qui vous pensait la plus belle femme du monde n’est pas mort dans la nuit. »

Et sur ces ultimes sornettes romantiques, il se tut et baisa une dernière fois la paume ducale.
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