Charité bien ordonnée....

« En général, on donne plus facilement l'aumône à un misérable
qu'un salaire honorable aux travailleurs. »
Lajos Kassàk

Ydril, Gigantesque cité de demi lune qui s'offrait à l'océan comme la mythique cité du Grand ancien. Le temps était gris au-dessus du comté et l'air marin emplis d'embrun annoncé une pluie proche, il faisait même assez lourd, prélude à un orage bien senti.
L'ambiance de la cité au petit matin était plutôt calme, l'agitation se faisait à peine ressentir et déjà les marchands ambulants s'agitait dans les rues pour vendre leurs créations, pain, breloques, farine et autres nourritures.

Mais notre scène ne se passe pas ici dans ces rues pavés qui bientôt verrais l'agitation frétillante de la vie, mais un peu plus loin, non loin du temple de Tyra, déesse de la mort, gardienne du repos éternelle.
Intéressons nous plus spécifiquement à ce crève misère, ce tire la faim qui était adossé contre un des murs de ce bâtiment aussi impressionnant par le mysticisme qu'il émanait que par son architecture.
Affamé par deux jours sans que sa bouche n'ait qu'effleuré un morceau de pain ramassé par terre, maigre comme un clou, le visage creux plein de crasses, on devinait dans ses yeux tristes qu'il n'avait pas connu dans sa vie les draps de soies.
Engoncé dans des guenilles couvertes de boue, émanant d'une odeur typiques de ceux qui vivent dans la rue, on ne pouvait nié que le mendiant offrait un spectacle triste, symbole d'un peuple délaissé et ravagé par les guerres et autres catastrophe divine.

Tenant à côté de lui un baluchon tenant d'encombrante affaire, souvenir ou plus exactement vestige d'une vie passé non pas à chercher l'aumône devant ce temple mais à le servir dans le sang et le fer.

Autre temps, autres mœurs.

Les cheveux encombrant à moitié son visage, Ulysse les repousses d'un geste lent, gardant sa main droite tendu comme une statu, il répète encore et toujours la même chanson à chaque passant, hochant la tête devant eux :

-Bonjours! Une petite pièce pour les pauvres s'il vous plait...

Déjà une goutte s'éclate sur la main calleuse de Mordfroid, la pluie va tomber, ça fera une douche d'occasion...

Trystan, on disait souvent du mal du dernier "vrai roi", mais finalement, son règne, si on retire la fin de ce dernier, était plutôt un règne prospère, mais comme toujours, on oubliait le temps des rires pour se concentrer au temps des pleurs, et tous se rappelé parmi la populace de ce roi plus intéressé par l'amour de sa femme que par l'horreur des souffrances de son peuple, hurlant à la famine et à la maladie quand les campagnes étaient ravagé par les épées et le sang.

La guerre, avait il réellement connu la guerre? Ulysse était un paladin, pas n'importe lequel, celui de Tyra, oui, il s'était battu, il avait fendu le vent de son épée plus d'une fois pour la faire s'écraser sur un crâne d'un revenant, mort vivant, lyche et autre hérétiques qui osait troubler le repos éternels des âmes et empêcher leur grand voyage.

Mais hormis cela, l'ordre refusait la lutte, la mort était une chose naturelle dans l'ordre des choses, les guerres devaient se faire, et ils n'avaient pas à intervenir.
C'était cela qui avait dévasté finalement petit à petit notre mendiant, voir la mort et ne rien y faire si ce n'est être un spectateur passif et attentif de l'horreur.

Maintenant dans la rue, il voyait encore plus de misère, de mort, de souffrance, mais il était également acteur, il pouvait se lever et agir, il avait repris le sens de sa vie parmi le malheur de la pauvreté, mais revenons à la scène, quand la pièce d'or tomba non loin de notre infortuné, il se jeta dessus comme la gangrène sur une blessure infecté et la fit disparaitre dans ses haillons.

Avec cette pièce il avait de quoi se nourrir pendant un mois, mais la nature généreuse de notre ancien dévôt de Tyra faisait qu'il la partagerait et une semaine durant il aurait du moins de quoi se nourrir.
Bénissant d'un "Puisse les Dieux vous bénir Monseigneur" son bienfaiteur, il commença à ranger ses affaires. Il avait gagner sa journée, son ventre criait famine, et déjà la pluie commençait à tomber en gouttes éparse, certes rien de gênant pour un homme de la rue, mais le temps annonçait bien pire, et suivant le vieil adage "mieux vaut prédire que guérir" , Ulysse commença à lever le camp.

Mais il fut soudainement interrompu par le grand seigneur qui avait récompensé son abnégation :

« Dis moi, l'homme, quelle était ton état, avant de devenir mendiant ? »

Ulysse le regarda, lui engoncé dans ses habit bien fait, son ton de noble, son air supérieur, son visage bien fait, propre sur lui, escorté par des professeurs qui devaient voir là une sorte d'expérience si le jouvenceau était capable de bien maitrisé l'art de la parole.
Dire qu'il aurait put être à sa place si les cinq n'avait pas donné cette place ingrate dans la famille.

« Étais-tu homme de guerre ? Ce harnois que je vois dans tes affaires coûte cher. C'est l'habit des chevaliers ! Or ça, si tu l'a rober, je t'en préviens : je n'aime guère les brigands et je leur délivre la corde, plutôt que les écus. »

Ulysse resta un instant sans voix, dévisageant le comte de son regard d'acier délavé avant de parcourir l'assistance qui regardait la scène avec un air de spectateur attendait un drame.
Commençant à se relever, la voix forte et claire de Mordfroid se fit entendre :

-Monseigneur, dans un premier temps je vous prie de bien accepter mes remerciement pour votre don.

Ulysse se redressa alors, malgré les fripes, le visage creusé, l'air fatigué, il émanait de lui même une prestance, une attitude de noblesse qui justifiait parfaitement ce titre non usurpé de "Prince en Guenille" :

-Mais vous avez un œil aiguisé Monseigneur...

L'ancien paladin sorti de son barda son épée, elle tranchait avec l'ensemble, lui crasseux, elle entretenu comme si elle était encore neuve, rappelant un peu ces parents qui se sacrifiait corps et âme pour leur enfant, l'enfant présent ayant la froideur de l'acier trempé. Un oeil averti aurait facilement reconnu la frappe de Tyra sur son fourreau et sur cette garde ouvragée :

-Je n'ai servi nul Prince, nul Seigneur, nul bannière Monseigneur, mais j'ai en effet combattu et payer le prix du sang. Si Monseigneur veut regarder la lame...

Poli était le terme exacte pour désigner les mots d'Ulysse qui tendait la poignée de sa lame vers Alastein, mais il lui devait bien cela compte tenu de cette pièce d'or confortablement installée dans sa poche...

Sujet: Re: Charité bien ordonnée.... Lun 1 Sep 2014 - 11:51

Il a fier allure, oui, cette pensée traversa l'esprit d'Ulysse aussi sûr qu'une flèche elfique traverse une gorge.
Le peu de lumière semblait faire briller la lame comme une flamme qui illumine d'étrange ténèbres, il y avait presque quelques choses de divin à la scène et nul doute qu'un peintre aurait trouvé là une source d'inspiration. D'ailleurs, pour tout dire, la scène semblait avoir été écrite, un mendiant donnant une épée sans crasse à un noble, cela avait tout d'un roman ou le jeune homme s'en allait ensuite à la quête de la gloire et de son destin.

Mais la réalité était autrement et le jeunes nobles passaient leur vie dans des châteaux, entourés de garde et de gens de bonne naissances et non pas sur les routes à pourfendre dragons et brigands.
C'était ainsi.

Passant sa main sale dans ses cheveux qui l'étaient tout autant, les yeux délavés restèrent un instant sur le comte d'Ydril. Les deux regards se croisèrent comme deux hommes qui se jugent, cherchant l'un dans l'autre des réponses et des questions. Lentement mais sûrement, la mâchoires d'Ulysse bougea pour commencer à prononcer des mots pleins de sens :

-Je confesse Monseigneur que je n'ai aucune idée d'où cette lame a été forgé, tout comme je confesse n'être plus très certains de comment m'en servir. Mais assurément vous avez déjà dût en voir de semblable.

L'ancien paladin marqua une pause, sa langue passa sur ses lèvres sèches, il se gratta un peu le dessus du sourcil droit, l'air quelque peu hésitant puis repris finalement :

-Ceux qui furent mes frères portèrent cette lame, et c'est probablement dans cette maison que vous les avez vu.

D'un geste ample, il désigna les lieux, oui, le temple. Les armes des paladins de Tyra était une chose importante car elle était l'instrument de la mort, et la mort, c'était leur travail. En quelques sortes.
Laissant un instant l'éternité flottée, le pauvre être tendis sa main pour reprendre son bien, attendant de recevoir sa propriété si précieuse. Nul doute d'après son regard qu'il déchiquetterait la gorge de son adversaire pour récupérer cette épée si précieuse pour lui.

» Administration bien ordonnée commence par soi-même
» [Papincourt] La charité, mon bon seigneur | Dante

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