Sanglante Mascarade | Dante

Et alors qu’elle se redresse de toute sa superbe et lui retourne la question, Dante se détend. Non, elle n’a pas plus idée que lui de ce qui s’est passé et de ce qu’il va advenir. Elle se penche vers l’assassin qui se redresse anticipant le contact. Son plastron absorbe le petit choc de son cuir épais tandis que prunelles d’azur, d'émeraude et d’ambre se rencontrent de nouveau et s’entremêlent. Ce regard avide fait remonter un autre frisson le long de sa colonne vertébrale. Plus appuyé, plus chaud.

Par réflexe, une main de fer s’abat sur le fin poignet. Le retenant sans ménagement mais sans brutalité. L’homm La regarde de pleine face, sans agressivité.grimacant, Dante amène les doigts sur sa joue sur sa peau nue. ellelui fait mal et il apprécie le contact.

Tu le sais pas plus que moi, avoue....Lui non plus sait pas... Tu me fais mal et nous aimons. Je suis né pour tuer.... je peux te dire par contre que vous devez trouver votre équilibre. Elles sont trop gourmandes, ça vous rend vulnérable. Tu dois apprendre à leur dire non, pour que vous puissiez travailler ensemble. Elles ne te domine pas, ni toi... Nous avons passé par là nous deux. Si vous voulez vivre longtemps faut que vous vous écoutiez plus... .

Avec répugnance, avec impériosité, Dante la tire de nouveau vers lui. Agrippe de nouveau les cheveux de Cecilie. Il sait que ses propos sont décousus, limites incohérents.

Qu’est-ce qu’elles leur ont fait putain? Ses yeux s’assombrissent de doute.

Vous bouffez trop... Faut faire attention aux moutons, ils mordent.

D’un léger mouvement inconscient du menton, l’assasin réclame une nouvelle torture, une nouvelle caresse.

L'homme saisit son poignet. Pour la première fois, elle s'oppose a lui sur le plan physique, tentant de retirer la main qu'il garde sans plus de mal qu'il gardait son menton. Elle le défie  d'un regard glacial, méprisant, comme si la détente dont il faisait preuve était une insulte en elle-même. Ses pupilles s'étrécissent. Le bleu soutenu de ses yeux ne laissent que deux minuscule pointe noire se darder sur eux.

En tentant de s'acharner pendant qu'il remonte la main, elle se tort légèrement le poignet et s'immobilise, le toisant d'une façon aussi régalienne que si elle avait portée une robe de soie et une couronne. La paume de l'homme ne bouge pas, imperturbable. Elle sert les dents... Mais c'est lui qui grimace. Le muscle de sa joue se tend au contact du revers satiné qu'il pique de sa barbe de trois jours. De la douleur ?

Et puis peu importe.

Mais elle ne pouvait pas bouger et son oreille était irrémédiablement attiré par les réponses frustrantes qu'il lui offrait. Ils ne savaient pas. Ils avaient agis sur une intuition ? Sous l'effet de ce qu'ils portaient en eux à ce moment sans en avoir conscience ? Il était né pour tuer. La belle affaire. Pas elle. Elle, elle l'avait choisi. C'est bon. Elle en avait sa dose ! Elle posait des questions. Elle voulait en savoir plus et il ne lui jetait que des miettes comme on essaie d’appâter un oiseau. Il fallait qu'elle parte. Qu'elle récupère ses affaires, qu'elle quitte la ville et qu'elle aille aussi loin que ses jambes pourraient la porter. Et lui, il disait toutes ces choses qui la décevait tellement... Comme les autres. Poser des règles, des contraintes. Savoir se contrôler. Encore. A un ou à deux ça ne changeait rien, il n'était pas différents de tous ceux qui s'imposaient de soit disant règles de conduite. Tue un peu mais pas trop.

- Conneries. " gronda-t-elle sans bouger, son accent étrange revenant à la charge dans son dédain. " C'est eux ou moi, et ce sera toujours moi, peu importe le nombre de mouton à égorger. "

L'homme se saisit d'elle, la tire à nouveau. Son dos plie vers l'avant. Leur grande main se referme sur sa courte crinière noire. Elle frémit, saisit son poignet par réflexe, mais ne tente pas de l'éloigner. Il la maintient près de son visage. Près de la main qu'il garde contre sa joue. Il ne dévoile pas sa jugulaire, comme la veille, il la tient seulement. Il la guette. Et ses yeux se posent des questions. Ces yeux fascinants. Ces yeux qui savent ce qu'elle est et qui sont passé par des étapes similaires.

- Vous bouffez trop... Faut faire attention aux moutons, ils mordent.

Une vérité de plus qu'il assène et qu'elle ne veut pas entendre. Celle là, elle veut la refuser carrément. Elle prend ce qu'elle veut ! ... Sauf si cela menace sa vie... qu'il ait encore raison la nargue. Ils se tendent vers elle. Un léger mouvement du menton les rapproche encore.

- Je m'en fout. " jette-t-elle dans un murmure parfaitement articulé. Il est si près que le souffle de la jeune femme balai sa peau, mais ce sont leurs yeux qui se mêlent toujours. Si elle ne peut pas reculer, lui non plus. Sa main libre quitte le bracelet de force derrière sa tête. En un éclair, elle vient attraper le menton de l'homme dans un étau très semblable à celui dans lequel ils prennent son menton à elle pour l'obliger à les regarder... La force et la taille des mains en moins. Il semble si rude que cela doit sûrement ressembler plus à une caresse qu'à une bravade pour lui.

Conneries. C'est eux ou moi, et ce sera toujours moi, peu importe le nombre de mouton à égorger.

Serais ce de la tristesse qui passe dans le regard de Dante? Un autre fugace éclat, rapidement noyé dans l'inhumanité de son regard. Tandis qu'il maintient sa position, voulant s'en aller, voulant s'approcher…  Son air hautaine ne le perturbe pas. Ce corp frêle non plus. Cest deux lac de glaces entourant le gouffre de son âme l'aspirent.

En lui même, l'assassin bataille pour fermer la porte que, de son regard, l'Enchanteresse s'acharne à vouloir défoncer. L'immobilité de leur deux personnes ne laissent pas deviner le combat de volonté qui a cour en ce moment. 

Je m'en fout

L'Enchanteresse, fierté et Avidité, belle et superbe dans sa colère, qui n'a pas encore compris du haut de sa frêle stature les règles qui régissent les prédateurs. Elle veut tout, sans se préoccuper de ceux qui lui tomberont sur la tronche… Une leçon qu'il a appris jeune, lors du voile, avec Vorn…  Les drows ont fait de lui ce qu'il est. Une Bête Fauve… Par eux s'est il soumit à Zhak'Bar, Grâce à eux, il révère et vénère Kiel même si il sait que son royaume lui sera refusé. Il pourrait lui montrer, comme El lui a montré, même s'il était terrifié par la Bête. Mais les Lamentations ne lui font pas peur... Il aime souffrir et il va finir par crever de toute façon. Pourquoi s'en faire?

Les autres, mages ou non, n'ont sur lui que le pouvoir qu'il leur donne… A savoir aucun. 
Elles…  Elle... Essaye de prendre un pouvoir sur lui qui n'est pas sien...
Non...
...

Un grondement sourd de bête sauvage traverse la grande bouche. Une autre avancée de quelques millimètres... L'haleine de l'homme caresse la joue de la femme... Il sent la cannelle étrangement. Cécilie lui lâche le poignet et agrippe son menton à son tour. Il sent et ressent chaque poil de sa barbe entrer en contact avec ces petits doigts. Il veut qu'elle s'en aille, il ne veut pas qu'elle approche. La sensation confuse que si elle gagne cette manche, ca sera dramatique... 

Dramatique ou grandiose. 

Du bout du nez, il effleure le nez délicat de la demoiselle, ne lui lâchant pas les yeux, la retenant pour ne pas qu'elle avance, s'avançant pour ne pas qu'elle recule. Elle le retient pour ne pas qu'il avance, l'empêche de reculer. La dédoublée n'a aucune idée de comment elle lui fait mal. 

Une pointe d'avidité infime traverse les prunelles étranges.

~ Musique ~

Il gronde soudain. Un grognement sourd. Bestial. Elle se raidit instantanément, laissant ses griffes se planter profondément dans la magie qui l'entoure. Alors qu'il s'approche et s'arrêter presque instantanément, l'encre surgit des profondeurs. Ses marques reparaissent. Langage oublié et schémas mystiques ne bougent pas, ne glissent pas, ils s'accrochent à son derme, prouvant malgré elle qu'elle est prête à se défendre. Mais l'immobilité de l'homme force la sienne. Elle ne le lâche pas. Pas tant qu'il ne l'aura pas lâchée. N'est-ce que ça ? Un miroir bravache de ce corps a la force bien supérieure à la sienne ?

Elle ne l'a pas quitté des yeux, mais n'arrive que partiellement à comprendre ce qu'elle y voit. Et ça la frustre un peu plus. Elle veut tout. Tout de suite. Sans apprendre. Sans tempérer. Tout et plus encore. Alors que lui ne demande rien. Ne répond pas. Ne sait pas. Ses prunelles ne brûlent pas de cette soif insondable. Alors pourquoi ce qu'il dit semble avoir autant de sens ?

Elle veut la vie sauve. Elle veut l'accès à la Grand Bibliothèque promis par la drow. Elle veut apprendre à se servir de ce pouvoir encore nouveau qui pulse sous sa peau. Elle veut contrôler les Lamentations et être conseillée par elles. Elle veut n'obéir qu'à ses propres envies, agir selon ses seuls choix. Elle veut qu'il ait tort... et hait le fait qu'il ait raison. Elle veut savoir ce qu'il sait. Elle veut comprendre ce qu'il a compris. Elle veut assouvir chaque pan de sa curiosité. Ces questions qui la hantent toujours. Quand êtes-vous devenu un ? Depuis combien de temps parvenez-vous à coopérer ? Est-ce par magie ? Quel pouvoir en tirez-vous ? Comment survis-tu ? Quel prix as-tu payé ? Quel est celui qui m'attend ? Comment en sais-tu autant sur moi ? Pourquoi... ?

Elle veut forcer des explications là où elle n'en trouve pas.

Elle n'a pas fait tout ce chemin, tous ces choix et tous ces sacrifices pour courber l'échine. Elle s'est faite seule. Elle a regarder ce que Tyra cachait derrière son Voile. Elle a regarder la Mort en face. Elle a survécu à la plus grande mascarade de cette existence. La blessure du Karkal pulse toujours étrangement en travers de son dos. Elle la sent encore. Aussi vive que les plaies qu'ils ont ouvertes cette nuit. Des blessure dont elle ne lui a pas tenu rigueur une seconde... Pourquoi ?!

Elle refuse cet ascendant qu'il prend comme si de rien était.

Les crocs des Lamentations s'étirent en ces longue mâchoire invisibles et difformes en dessous des centaines d'yeux de toutes tailles qui scrutent la scène. Grimpant sur les murs. Suivant le plafond. Ombre silencieuse. Elle entend le battement régulier, le tambour de guerre. La bave de l'aberration suinte le long de cette imperceptible gueule béante positionné autour de lui... d'eux. Elle n'attend qu'une chose, avide de se refermer sur l'homme...

Leurs nez s'effleurent. Leur souffle la brûle. Un frisson remonte le long de son dos, le long de cette plaie qui suit sa colonne vertébrale, suffisamment fort pour secouer son épaule et faire trembler la main serrée sur son menton. Ils sont si proches que ses pupilles fragiles peine à accommoder. Les traits de l'homme deviennent flous. Elle s'en moque. Elle a son regard. Chaque strie, chaque dessin de ses iris. L'une d'un marron sombre, l'autre d'un vert clair et vif. Elles remplissent son champ de vision.

Elle sent douloureusement sa poigne sur les marques de son poignet. Ces dernières reconnaissaient quelque chose de familier, de puissant... et de dangereux.

Le tuer. Partir. Faire une croix sur le reste.

Une étincelle s'allume dans les pupilles noires. Quelque chose qu'elle connait bien, cette fois. Qu'elle identifie... Qu'elle n'y a encore jamais vu. Ni lorsqu'il l'a dominée. Ni lorsqu'il l'a blessée. Ni lorsqu'il l'a laissée faire. Ni lorsqu'il l'a tenue. Une hésitation fugace passe dans les lacs bleutés, craquelant la glace. Il est capable de tout... Il ne craint pas la douleur. Elle, si... Et l'hésitation s'efface, rejeté par l'orgueil, l'avidité, la colère, la curiosité bafouée. Tirant sur les cheveux qu'il serre dans sa paume en un léger sursaut, elle gagne un millimètre. Leurs mentons se touchent. Leurs lèvres basse se frôlent.

Elle ne perd pas son regard. Elle frisonne une fois de plus, inspirant le souffle chargé de cannelle que la large bouche vient de cracher. Il maintient plus fermement le statut quo. Elle sent l'air vibrer dans sa gorge avant même que les mots ne soient articulés. Avant qu'il n'agressent ses tympans en y laissant tomber un poids que sa raison ne parvient pas a estimer.

- Si Nous prenons tout, il ne restera rien. "

Nous... La façon qu'il a de le prononcer est différente. Plus accentuée. Il lui est venu aux lèvres avec moins de naturel que lorsqu'il s'associait à la Bête. La façon qu'il a de fouiller dans ses yeux. Cet éclat qui ne les ont pas quittés... Les mots se fraient un chemin en elle, grattant, grouillant, rampant sous sa peau. Elle ne les comprend pas. Elle ne comprend pas le sens. Sa conscience aurait beau retourner cette phrase des milliers de fois qu'elle n'aurait toujours aucune certitude. Elle ne la comprendrait pas plus...

Pourtant la réponse lui vient naturellement, s'échappant se ses lèvres avant qu'elle n'y pense. Elle parle d'une voix clair. Des mots évidents.

- Pourquoi laisser quoi que ce soit ? Nous n'avons que cette vie. "

Est ce que Krish Al'Serat, est ce que le Feu d'Uriz a prévu ce qui allait se passer? Probablement que non, parce que sinon elle tremblerait. Il faut croire que même les dieux n'ont pas le don de prescience.

L'analogie la plus proche est une porte fermant l'esprit de Dante. Une porte qui a été ouverte par des yeux bleus, glacés. Une porte au milieu d'un champ nu, ou il n'y a rien. Il y a l'Enchanteresse d'un côté qui pousse. Dante de l'autre côté qui tient bon, ne voulant pas céder. Une personne qui entre c'est une faiblesse… Il s'est débrouillé seul tout ce temps.

Une petite tape sur l'épaule attire son attention. C'est La Bête qui vient lui rendre visite. Et, de tout ses crocs, il sourit. La Destruction appelle à la Destruction, le Sang appelle le Sang, Les Ténèbres de Cecilie appellent les siennes… Dans son chaos structuré, tout se délite… Il n'y a plus de certitudes.

Laisse la entrer. Ye trop tard de toute façon… Ta peur de souffrir minus?

Les prunelles marrons de la psychée de Dante se tournent vers le vert de la Bête.

Non, tu le sais…

La gueule de La Bête, version déformée de son hôte, s'élargit sur des crocs gigantesques.

T'a peur de crever?

Les prunelles marrons pâlissent sensiblement sous l'insulte. La Raison de Dante se raidit.

Non, tu le sais…

Si tu t'inquiète pour ma gueule, ca va. je les aimes bien… Ecoute sa réponse…

Un écho ébranle la porte inutile que l'assassin tient. 

Pourquoi laisser quoi que ce soit ? Nous n'avons que cette vie.

D'excitation, Dante frémit... Ce frémissement se transmet dans le monde physique, sous la main de l'Enchanteresse. La grande bouche se tord, esquisse un sourire de plus en plus large. L'avidité dans les yeux de l'assassin s'affirme et s'impose.  Dans sa tête, son dieu lui donne une autre tape sur l'épaule.

Allez, part à l'Attaque… Je sais que t'en meurs d'envie mec… Des comme ça, on en trouve qu'une fois et pas dans chaque vie…  Pour le reste on verra plus tard. T'a ma bénédiction, détruisez ce putain de monde si vous en êtes capable ou crevez en essayant... 

*************************

Pourquoi laisser quoi que ce soit ? Nous n'avons que cette vie.

Un sourire s'épanouit sur le visage de l'assassin. La lueur avide s'affermit dans les prunelles dichotomiques. Elle a tellement fière allure, sa Ténébreuse, avec ces encres… mais ce sont ces yeux… ces deux lacs de glaces avides… 

Il ne résiste plus, Avec un grondement sonore, sans délicatesse, les lèvres de l'homme finissent de franchir la distance. Un frisson le traverse de part en part, douleur et plaisir, tandis qu'il s'offre d,un simple baiser, prenant ce qui lui est dû sans fard et sans remord. Embrasser Dante est comme embrasser une dague ensanglantée… La grande main de l'homme lâche le fin poignet pour l'enlacer, pour la serrer tout contre lui. 

Il veut qu'elle rentre en lui, il veut qu'elle les fasse souffrir… Dante sait qu'elle n'a pas de réserve pour encaisser, mais i ne sait pas se réguler ce coup là. Il la tient comme si, par osmose, elle pouvait entrer en lui, comme s'il pouvait entrer en elle… Les yeux se ferment à demi sous cette insupportable douleur du toucher de la belle. Il la sent au travers de tout son linge.

La grande main lâche les cheveux de Cécilie, parcoure sans rudesse mais sans délicatesse la fine peau, le plus près qu'il est capable d'une caresse. Il n'ose pas la relâcher maintenant que la porte de son âme est ouverte, il passe le seuil et part à l'attaque de l'âme de la belle avec seulement ce qu'il est comme arme. Il fracasse les yeux bleus, passe derrière pour laisser sa Marque en elle… Comme il vient de la laisser entrer en lui, par la grande porte en plus. Il ne sait pas ce qu'il en est de la Maitresse des Lamentations, mais Dante a planté ses "crocs" dans cet esprit et ne compte pas le lâcher.  

Avec un grondement sonore, sauvage de frustration et de désir, qui traverse la première fois la gorge de l'assassin depuis Couteau, son aimée, l'assassin se redresse avec Cécilie pour qu'elle puisse ne pas se faire mal, avant de l'écraser dans le lit qui craque de protestation. 

Les lèvres de l'homme ne quittent pas celles de la femme, la meurtrissant tout en la cajolant à la fois, comme si il avait peur que le souffle de Cecilie ne soit pas pour lui. Il la tient comme si il craignait qu'elle avait peur qu'elle ne change d'idée et qu'elle ne s'envole loin de lui. 

Même les plus grands enfoirés de la planète peuvent trouver l'âme sœur.

Il frémit sous sa main.

Son frisson se propage au bras qui le tient.

Elle ne sait pas s'il a comprit, lui, mais ça lui est égal. D'un grondement il s'empare de sa bouche. Son souffle sentait la cannelle, mais sa langue garde le goût de son dernier repas. Cuivré. Salé. Métallique. Âcre. Elle n'en a jamais connu de pareil. Le goût de son propre sang.

Ses muscles son raides. Sans plus de douceur que d'hésitation, les bras de ce prédateur se referment soudain sur sa peau nue. La douleur explose dans son dos, à moitié à cause de la pression qu'il exerce sur ses cotes, à moitié par le coup qui impacte la longue plaie. Son gémissement est étouffé par les lèvres oppressante de l'homme. Sa propre lèvre éclatée rend le contact plus précis. Plus douloureux. Une larme réflexe lui vient à l’œil. Elle le prend à bras le corps. Le serre comme il la serre. Comme elle le serrait dans cette salle immonde. L'un de ses bras cherche un moyen de passer sous sa chemise pour attraper son dos à pleines main. Retrouver le contact de ces cicatrices contre elle. Elle rencontre une tresse de cheveux plus longs que les siens. La forme de son visage dégagé, de ses tempes rasées est bien plus sauvage que celles qui peuplent ses lambeaux de souvenirs. L'Enchanteresse et ses Lamentations se tendent toutes entières, vers lui. Vers ces yeux qui veulent la transpercer de part en part. Qu'elle réclame sans savoir pourquoi. Elle s'en fout de ce pourquoi là.

Elle a la sensation de s'y engouffrer soudain, malgré son expression crispée. Ou est-ce l'inverse ? Lui qui s'engouffre en elle ? Ses pupilles se dilatent. Une vibration unique. La magie se referme sur lui. Le fouille. Et même sans le moindre ressenti des arcanes, il peut sentir sa main immatérielle nimbée des crocs et des mires des Lamentations; car elle s'approche de la partie la plus intime de son être. Derrière ses perceptions, sa mémoire, son esprit. Cette âme palpitante qu'il avait confié à la Bête. Elle ne touche pas. Juste... Juste écouter. Juste sentir ce rythme sauvage et guerrier  au plus profond d'elle au lieu de l'entendre à l'extérieur. Juste quelques instants. Le tenir au creux de sa main comme il la tenait au creux des siennes. Avide de poser sa marque pour qu'il ne s'éloigne plus. Qu'il n'ose pas dérober le plus petit morceau de lui. Sa grande main frotte sa peau, la découvre d'une pesamment. Même si elle le voulait, elle ne pourrait lutter contre le bras qui la serre. Elle veut tout. Elle le veut, lui.

Il se redresse, décoinçant la fragile jambe droite de la belle. La précision professionnelle de ses gestes. Le poids de son contact. Tout ça n'a rien à voir avec un manque de considération ou un empressement égoïste. Elle ne l'a même pas envisagé. Ils sont deux et un, chacun de son côté. Il sont deux et un, ensemble. Les noms n'ont pas grande importance. Elle ne le connait pas. Elle le reconnait. Et toujours ce tambour de guerre qui l'ampli.

Une nouvelle pointe de douleur. Dans son dos. Dans sa cuisse. Dans la poitrine qu'il écrase. Elle l'accueille avec le reste, crispant son visage, tendant sa gorge. Ils basculent sur le matelas dans un même grondement sauvage. Frustration et Désir. Douleur et Besoin. Sa jambe droite reste inerte sur les coussins. La gauche se pose contre la hanche maigre de son traqueur pour l'accueillir plus près. Toujours plus près. L'onguent à l'odeur de lavande tâche les vêtements de l'assassin en divers endroits.

La chute est rude, mais presque calculée pour ne pas dépasser ses limites. Sa concentration en fluctue pourtant. Les Lamentations s'approchent de l'origine du son de tambour, bouches grandes ouvertes. Alors elle recule. Douloureusement. A regret. Mais elle se retire. Si elle perdait le contrôle, elle sait trop bien ce qui se passerait. Elle la vu tellement souvent ces derniers temps. Un spectacle si réjouissant. Si alléchant. Mais pas ici. Pas maintenant. Pas lui. Alors elle gronde, comme si elle arrachait quelque chose de profondément enfoncé dans son flanc. Elle gronde de frustration et d'envie. Elle lâche prise sur la magie redevenue inoffensive. Dépourvues de volonté à suivre, dépourvues de point de mire, Elles s'enfouissent à nouveau en elle. Elle se sent creuse. Elle le sert plus fort d'un bras, l'autre tirant sur sa chemise de plus en plus impérieuse alors que le vêtement résiste, coincé entre eux.

Pas de devoir. Pas de limite. Juste eux.

Il est déçu. Il ne comprend pas. Elle ne sait quoi dire pour lui expliquer à présent. Elle le serre plus fort. Il se redresse. Il lui échappe. Ses bracelets de force sautent. Malgré sa jambe droite, elle s’assoit maladroitement, observant le plastron pour tenter d'en trouver les lacets et les courroies. Elle n'a jamais fait ça... Et a son grand regret aujourd'hui, elle ne s'y révèle pas particulièrement douée. Elle fronce les sourcils, mais rien à faire. Après de longs instants, les yeux qui la guettaient semblent comprendre qu'elle ne fait pas exprès de faire durer les choses. Il la repousse à nouveau Elle gronde, revêche. Butée contre l'obstacle, elle refuse de s'avouer vaincue, mais il la rabroue une seconde fois, aussi autoritaire qu'elle... Et elle n'insiste pas. Plus tard lui va parfaitement.

Enfin le plastron tombe. Il le jette sans ménagement. Et il se dérobe plus encore. Laissant sa jambe étendue, elle ne peut que se pencher légèrement en avant pour suivre son escapade. Ses yeux le tiennent, lui ordonne de revenir. Seule. Frustrée. Mais droite. Sa courte crinière noir est déjà ébouriffée par le sommeil et les draps. Elle l'observe et n'a pas assez d'yeux pour ça. Elle aimerait projeter à nouveau sa conscience vers la sienne mais le risque est trop grand. Alors elle le regarde, à la fois régalienne et frissonnante. Elle observe sa peau, enfin découverte dans la lumière du jour. L'ampleur de ses cicatrices...

Enfin elle distingue la vrai forme des inégalités. Des creux. Des bosses. Des traits. Des brulures. Sur l'ensemble de son torse, de son ventre et de ses bras. Elle en reste... Fascinée une nouvelle fois. Elle veut les parcourir du bout des doigts et comprendre chacun d'eux. Des dessins ésotériques aux formes complexes... Des dessins qui ne lui sont pas étrangers, mais elle ne les connait pas assez pour les comprendre ni même pour les replacer dans leur contexte. Une tâche d'encre sur son épaule ne semble pas avoir grand chose avoir avec la trame qui recouvre sa musculature dessinée. Ses propres marques. Sa propre survie. Et il se dresse là, dans toute sa magnifique sauvagerie. Aussi nu qu'elle alors que tout contact le fait souffrir. Debout, sa peau détruite hurle un défi à la mort et à la douleur. Elle continue à le dévorer des yeux. Ses jambes sont épargnées. Seule sa cuisse marquée au fer rouge... la gauche. Un puissant dragon s'y dresse, rugissant. En face d'elle, cela forme un miroir à la marque grossière qu'il a gravée sur sa jambe droite.

Elle le veut. Vient rattraper la puissance de son regard aux couleurs chaudes. Elle le veut dans dans cet entier complexe et bestial. Elle le veut à elle et en elle. Elle sert les poings sur la couverture, crevant de ne pas pouvoir sentir son âme résonner au plus près. La petite éternité s'étend. Elle soutient son regard, le creuse, l'appelle silencieusement.

Et enfin, il revient. Il n'attend pas une seconde de plus, saisissant sa jambe, il se glisse en elle, provoquant un frisson tout le long de son corps. De leurs corps. Il vibraient comme une seule corde. Elle s'est tendue un instant pour s’habituer à cette nouvelle chaleur, mais le temps d'adaptation s'avère inutile. Ses yeux bleus ne quittent pas ceux du chasseur. Enfin... Le manque n'est plus.

Le geste de l'homme est à l'aulne de tous les autres. Puissant et appuyé. Méthodique, mais en rien violent. Subjuguée par ce chasseur, elle encre sa main sur sa nuque et l'incite à se poser à demi sur elle. Durant quelques secondes, elle tente une nouvelle incursion près de son âme. Une sorte de caresse avant de les laisser à ces corps qu'ils partageaient. Un souvenir remonte mais ça n'a rien à voir. Ils étaient seuls dans cette pièce. Rien ne l'entravait. Personne d'autre que lui ne la toucherait. Et surtout elle, elle le voulait.

Il la complétait.

Dans son regard, elle voyait passer tant et tant, d'une intensité indicible. Le besoin qu'elle avait de le sentir en elle la rendait plus désireuse encore de ce qui allait suivre et plus attentive à ce qu'elle percevait. Elle ne voulait jamais avoir à quitter ses bras. Jamais. Elle l'accueille au plus profond d'elle, car elle en est libre. Aucun devoir, aucune règle, aucune croyance ne l'y invite. Nul n'aurait pu l'y contraindre. Nul ne l'aurait souhaité peut-être. Depuis la réouverture de la Fausse Porte, elle n'avait que les murmure inaudibles de Lamentations. Avant, elle avait moins encore. Pas de masque et rien pour se mettre entre elle et lui. Elle n'a pas à jouer à la putain ou à la prude. Elle n'a pas à radoucir ce regard orgueilleux dont elle lui offre la moindre parcelle. Elle peut être elle. Elle n'avait jamais été comprise ni accepté d'une façon si entière.

A l'ordre de sa voix grave, elle s'exécute sans rompre leur contact visuel. Son cœur est pendu aux mots et aux mouvements de ses yeux bicolores. Défaire sa tresse, ça elle y arrive sans mal et elle n'a pas besoin de ses yeux. Ses doigts fluides relâchant les mailles de la coiffure après en avoir défait le lien, le libérant sans que son crane n'en souffre. Elle le regarde. Elle le scrute. Sa large bouche. Son nez droit. Ses yeux si particulier dans leur couleur autant que dans ce qu'ils exprimaient. Ses mains s'emparent de son visage qui vient de perdre la dernière marque de civilisation. Il est parfait...

- Parfait, Chasseur... Dante. " souffle-t-elle avant de venir l'embraser avec passion. Contre ses lèvres de plus en plus avides, elle murmure encore. " Tu es à moi. " Mais si ses bras s'agitent, son bassin reste d'une immobilité quasi parfaite, le laissant décider.

Détruire… Ne plus rien laisser. Torturer, un goût de sang dans la bouche. Enlever des Vies. Que ca soit des Souffles ou des Flammes, peu importe. Donner la vie, faire des enfants n'est qu'un simulacre, un pansement sur la plaie purulente que sont les êtres pensants, le pansement se souille, pourrit. On le change, on fait d'autre enfants… Mais la plaie nécrosée qu'est la vie contamine le pansement sain. Et ca recommence, encore et encore … Et pourtant..



Au rythme de sa tresse qui se défait, il laisse sa rationalité de côté, la Bête de côté. Ils se fusionnent temporairement dans sa tête, leur but étant le même… Ils sont deux mais ils sont un. La dernière mèche noire, libérée, vient frôler le front de la chasseresse sous lui. Leur méthodes diffèrent, leur appétit aussi, mais elle tend vers le même but que lui. Par son immobilité, attendant son acceptation ou son rejet, l'homme la marque comme son égale. Ils sont deux créatures nées du chaos, de la violence, de la destruction. Il ne sait pas ce qu'elle a vécu, mais il le pressent confusément. Mais il n'est pas trop tard pour retraiter. Reprendre sa vie et ses buts… Elle n'a qu'un mot à dire, la dame de glace, et il respectera le refus.  



Les mains s'emparent de son visage. Sous l'encre, il la voit, Elle… Les odes à Kiel qu'elle a versé au fil de sa vie. A la caresse qu'elle lui octroie dans son âme, il .saute dessus, mord et suit la magie à pleine dents pour ainsi dire, s'inondant, se baignant dans sa psychée à elle… Ce n'est qu'une analogie bien sûr. Mais ca vous donne le ton… Ou peut-être est ce réel? Il ne sait pas et s'en fout royalement… Dans les prunelles inhumaines brûlent une faim dévorante qui brûle ardemment et qui va bien au delà de la simple luxure.  



Dante ne pense plus, il fonctionne à l'instinct, laissant son être, son corp le guider. Plutôt il aspire le souffle chaud de Cecilie, ces lèvres… Elle le heurte, elle lui fait mal. C'est perceptible au mouvements involontaires de l'épiderme, à l'infime crispation de la mâchoire. Toujours immobile, il la laisse l'agresser de ces lèvres tandis qu'en elle, toujours immobile, il se fait plus dur si c'est possible.  De yeux à yeux, leur communion est pas mal plus intime que ces deux corps brûlants sur ce lit miteux.

Parfait, Chasseur... Dante. Tu es à moi.

En réponse, il finit par prendre enfin ce qui lui revient de droit. D'un coup de hanches, puis d'un autre. Voulant se fondre dans les ténèbres de son intimité. Les prunelles deviennent dures et douces à la fois. Le corp de l'homme s'éloigne et se colle, transpercé par les collines de la poitrine sur laquelle il se presse… Agressé par le ventre plat qui se presse contre le sien… Aspiré par le bassin qui se met à onduler sous lui. 

Une main brusque s'abat sur la gorge gracile de son amante. Mais il ne serre pas. Toujours cette étreinte puissante, mesurée, qui peut se relâcher ou devenir meurtrière à tout moment. Pourtant, Cecilie ressent dans le fond d'elle-même qu'il ne lui fera jamais mal volontairement. Il y a toujours un risque, certes. Une Bête Sauvage peut mordre à tout moment.

Il dévoile ses dents blanches en une manifestation de possessive agressivité tandis qu'il continue, profitant de cette sensation indescriptible. Savourant manifestement chaque coup de reins brusques et lents, qui l'emportent toujours un peu plus loin en elle… Vrillé dans ces yeux bleus. 

Elle lui fait tellement mal, lui fait tellement de bien l'Enchanteresse! La plénitude dans la douleur.

 Sois remerciée divine Kiel de m'envoyer ce châtiment, ce tourment! J'en prendrai soin, promis!

Toi… 

Il sourit, douleur, rage, colère, sérénité, calme, apaisement… Tout cela mélangé à la fois. Son coeur va exploser sous toutes ces émotions. Pour survivre, il accélère le rythme, le souffle plus court et plus profond. Ce faisant, il montre les dents tandis que la main quitte la gorge. Se plaçant mieux, il l'entoure, un bras chaque côté de la tête, en un geste protecteur, possessif. 

t'es à moi!

Rugit il avec un coup de rein plus violent que les autres tandis qu'il replonge sur ces lèvres, aspirant le hoquet de la belle. Aspirant son plaisir, sa douleur, sa vie, son souffle… Tout ce qu'elle lui donne, il prend sans délicatesse ni remord. 

Il devient plus brusque, plus bestial… Mais essaye très fort de ne pas lui faire trop mal. Essaye très fort de se dissoudre en elle. Une chaleur se répand dans les reins de l'homme… Annonciatrice de quelque chose de grandiose.

Ce sentiment d'appartenance, d'abandon, de connivence, de désir et de puissance... Sa grande main la saisit à la gorge. Elle frisonne, mais certainement pas de peur. Elle n'est pas en sécurité, pourtant. Mais elle ne demande pas la sécurité, seulement qu'il la serre plus fort. Sa main vient repousser les cheveux sombres qui lui caresse le front pour les plaquer contre la nuque musculeuse. Ils menaçaient d'entraver sa vue. Elle ne veut pas le perdre, ce regard sauvage, bestial, violent... et doux. Son esprit n'arrive pas à l'analyser, mais son esprit a abdiqué. Il n'est plus. Il n'a plus prise. L'inhumaine se cramponne à l'homme, à la fois origine et rempart face au feu qui nait en elle et menace de la ravager.

Elle accompagne des hanches les à coups de son amant, l'engageant à creuser toujours plus loin en elle. La glace craque. Craque encore. L'orgueil n'est plus. Il n'a plus la place d'exister. Ses volontés impérieuses se font plus violentes. L'avidité sauvage est toujours aussi entière, mais se teinte de suppliques. Elle l'engloutit peu à peu. Gémissements et grondements s'échappent de sa gorge sans qu'elle ne se détourne, même un instant. La glace de ses yeux est réduite en un monceau d'éclats. Ses feulements de plaisirs, elle les pousse avec une nouvelle force. Il découvre les dents. Elle en vibre. Elle en tremble jusque au Souffle. Une force déferle dans ses veines, remplace l'avidité. Les derniers interstices de vides. La morsure d'un monstre qui ne la lâchera pas. Elle plante ses ongles dans le dos noueux, crispée sous l'effet de ses coups de boutoir. Possessive. Il sourit. Un sourire extrême, fou, extatique, dangereux. Il accélère. Elle se cambre. Il l'enserre, l'encadre. Il la possèderait si elle n'était pas déjà une part de lui. Sa tête manque de se révulser en arrière, mais elle ne peux pas. Ses pupilles la tiennent comme elle les tient. Son odeur musquée et sanglante l'imprègne. Elle veut y perdre la sienne.

Malgré la rudesse apparente de ses mouvements saccadés, Il s'est placé de façon à épargner sa jambe droite. Il n'en frôle même pas dessins rouges partiellement couverts d'onguent. Le bras qui lui sert d'appui et bloque l'épaule de la belle évite aussi à son dos de frotter douloureusement sur le drap à chaque fois qu'il s'avance en elle. Ses blessures lui font toujours mal, mais ce n'est rien par rapport à ce qu'il pourrait en faire. Attentif. Précis. Il se retient...

- T'es à moi ! " Un rugissement. Une preuve. Oui. Le coup se propage dans tout son être avec l’écho de sa voix grave. Elle se contracte des pieds à la tête, enfoncée dans les prunelles de l'homme. Pousse un hurlement. Un hurlement avalé par la bouche de Dante. Tout. En ce hurlement de plaisir, elle lui offre tout. Sa voix à de quoi mettre le rouge aux joues de la Marquise et donner la chair de poule à toutes les proies qui auraient le malheur de l'entendre. La Bête des Lamentations rugit à travers eux. Eux. Rien qu'eux.

Plus puissants ensemble, plus avides que jamais.

Le monde est déjà leur terrain de chasse. Il ne peut que trembler.

Les cris suivants n'ont rien à envier au premier.

Elle saisit brusquement sa nuque. L'autre main toujours plantée dans son dos. Il devient moins précis. Elle tremble. Un filet de sueur glisse entre ses seins. Son ventre se tord, se tend, se contorsionne. Leur plaisir est indicible au point d'en arriver à la douleur. Ses nerfs saturent. Crient grâce. Brûlante. Glacée. Ils en veulent plus. Possessifs.

" Mords moi. "

Deux glapissement plutôt que de vrai mots soufflent entre les hurlements. Elle ne s'en rend qu'à peine compte. La morsure dans sa psyché doit saigner. Ils se dissolvent l'un en l'autre.

Vivants.

Jusqu'à leur petite mort.

Sous leur rage, leur puissance, leur avidité mutuelles, leur plaisir le lit tremble… Leurs gémissements se répercutent sur les murs, éveillant la Marquise et certaines des filles qui se regroupent dans le corridor, silencieuses, écoutant ce qui transpirent de la chambre qui a toujours été si silencieuse quand Dante y crèche… Mais il n'en a cure. Tout ce qui se passe à l'extérieur de cet endroit l'indiffère totalement. Il n'y a que lui et elle… Le monde peut bien s'écrouler, pourrait flamber ou exploser…

Ils n'y a qu'eux… Ensemble… Le bleu, le vert et le marron…

Les ongles se plantent sans ménagement dans son dos, perçant la peau, le faisant gronder de contentement.  Les cris, les rugissements qu'elle a, il les ressent jusqu'à la moëlle de ses os. Elle tremble et se tord sous lui… Dans un ultime effort, il devient encore plus brusque, plus violent. Souffrant et satisfait de cette étreinte. Il n'est plus… Ou Dante arrête d'exister et ou Cecilie commence à vivre est flou… Mais il est insatisfait. Il ne se sent pas encore assez en elle… Il ne la ressent pas assez en lui. Il en devient encore plus brusque, plus désordonné.  

Mords moi.

L'éclair qui passe dans les yeux de l'assassin aurait fait fléchir n'importe qui, mais pas elle… Elle…

Et il ne quitte jamais ces prunelles. Se mordant la lèvre il fond sur elle, lui mordant durement la lèvre inférieure et ne la lâchant plus, mêlant leur sang, mêlant leur vies… mêlant leur sang de façon solennelle et définitive. …. A la vie et en Enfer… Ensemble…

Aspirant le fluide, il gronde sauvagement, possédant le corp et se donnant à lui. Le regard fou, l'explosion au creux de ses reins le fait rugir entre ses dents tout en ne lâchant pas Cécilie qu'il tient solidement dans ses dents, la retenant solidement et délicatement à la fois.

D'un dernier coup de butoir, il s'arrête et tremble… Le marron et le vert flous, fous… Ou est il? Qui est il? Il n'est qu'un… Le temps s'arrête… Il n'y pas plus ni vie ni mort… Ni création ni destruction… Il n'y a qu'un moment d'éternité infinie qui se résument à deux lacs de glaces fracassées sur des profondeurs aussi insondables que la sienne…

Après combien de temps? Difficile à dire, mais il tremble…. Puis se détend. Il ne la lâche pas des dents… Reste en elle… Reste là, à la protéger, aussi léger qu'une plume, aussi solide qu'un mur. .

Leurs sang mêlé. Leurs corps entremêlées. Leurs Souffles sur un même rythme. Des larmes débordent sous le traitement infligé à leur corps, sans que les regards n'en soient troublés. Les quelques gouttes du liquide qui coule dans la gorge tendue manque de l'étouffer. Ils les absorbent. Ses muscles tendus et tremblants se tétanisent. Sa voix déraille. Il continue. Réduite en cendre de l'intérieur. Muette. Sans souffle. Seulement une paire d'iris disparate. Seulement le mouvement.

Un dernier coup.

...

La plénitude.

Deux tâches de couleur. Différentes. Sauvages. Démentes. Sombres. Chaudes. Floues.

La plénitude.

...

Rassasiés.

Un corps tremblant aux muscles raides.

Deux corps tremblants aux muscles raides.

Il est encore en elle.

Des dents.

Elle aurait pu frissonné ou gémir, mais elle parvint à peine à prendre une infime inspiration. Des étincelles noires dansaient devant ses yeux manquant d'oxygène. Son corps s'effondre. Ses muscles sont incapables de rester contracter une seconde de plus. Il la retient. Solide. Même ses bras glissent. Seule la main sur la nuque noueuse ne tombe pas. Elle ne veut pas le lâcher. Même si son bras devait en tomber. Elle ne veut pas qu'il s'éloigne.

Elle reste là, tremblante. Baignant dans son regard. Elle chérie les remouds de son esprits fractionné.

Jamais elle n'aurait cru remercier un jour celles qui lui avaient donné la vue. Tant d'horreur. Tant de laideur. Et ça... Une forêt dense. Un sol solide.

Sa lèvre pulse. La douleur revient peu à peu, mais elle n'est rien.

Longtemps.

Leurs respirations et leurs cœurs ralentissent sans que leurs yeux ne se quittent.

Et le temps reprend son cours, semblant vouloir rattraper en une course folle ces moments qui ont su le tenir à l'écart. Une fluctuation de couleur dans les yeux asymétriques. Une couche de givre infime sur les lacs bleus. Le Nous qu'ils ont appris existe toujours. Mais il n'est plus un Je.

Un regret d'une profondeur abyssale creuse leurs prunelles en un effet miroir surprenant.

Ils grappillent quelques instants, mais il se retire, laissant le vide se créer entre eux. Encore l'un de ses mouvements précis et puissants. Le corps de la jeune femme n'est toujours pas en capacité d'en frisonner. Encore un instant et il lâche sa lèvre. Elle use de ses rares forces pour embrasser la large bouche.

Il se décolle de sa peau. Il ne s'était pas laissé peser sur elle jusque là. Pas un instant il n'avait frôlé ses blessure. Il va s'étendre à côté d'elle... Si loin.

C'est trop rapide. Trop froid. Trop loin.

La petite main encore agrippée aux cheveux sombres, et à la nuque en-dessous, se raidit d'une façon infime. Elle ne peut pas faire mieux. Ses lèvres sans voix trace un refus clair. Elle tente de l'attirer. Lit-il dans ses yeux ou comprend-il d'instinct ? Elle s'en moque.

Il est resté.

Au lieu de s'allonger près d'elle, il pose tout juste sa hanche sur le matelas au contact de la peau sur laquelle les tatouages s'effacent. Elle le tire encore, l'implorant de rester à moitié sur elle, partageant le même oreiller. Le poids de son corps la clou au matelas, ses blessures se réveillent vaguement et sa respiration est plus difficile, mais la chaleur contre elle en vaut le coup. Elle inspire à fond pour s'emplir de son odeur. Celle qu'elle porte désormais partout sur elle. Même la lavande et le sapin ne pouvait la masquer. Elle voudrait bouger pour le serrer, mais ses membres reste inertes, éparts. Elle ne peut pas plus réfléchir que bouger. Un brouillard de cheveu d'encre repose sur les draps. Elle n'a jamais été aussi fatiguée de sa vie. Même pendant les deux longues années passées à affamer les Lamentations. Jamais elle n'a été à la fois aussi vide, et aussi comblée.

Elle l'observe toujours, sans savoir vraiment ce qu'elle voit. Elle ne cherche pas à dire. Elle ne cherche pas à comprendre. Elle le garde. Elle le grave dans sa mémoire en lambeau. Ses paupières dansent malgré elle. Lourdes.

Jamais elle ne su combien de temps elle avait réussit à lutter.

Pour la deuxième fois, elle lui laisse son corps en pâture, elle qui est à la fois si fragile et si dangereuse une fois que son esprit lâche prise.

Après l'apothéose dans la chambre s'abat un calme plat. Dans le corridor, les filles pouffent et murmurent tandis que La Marquise regarde la porte d'un air satisfait. Et murmure pour elle-même.

Ainsi il y a bien un homme là dedans…

Elle claque des mains d'un air autoritaire, rappelant les filles à l'ordre.

Le spectacle est fini! Mesdemoiselles, je suis aussi aise que vous de voir qu'il y a de l'espoir, mais il y a du boulot! Et si quelqu'un veut bien leur laisser de quoi à la porte, je ne pense pas que notre Dante ait envie de sortir aujourd'hui. On lui doit bien ça… Il ne demande jamais rien.

*******************************

D'abord de hanche à hanche, Dante reste là… Sa psychée se divise à nouveau et La Bête retourne tranquillement dans son antre, accompagné des ombres de Cecilie… Il la sent en lui. Sent son odeur d'épices et de muscade. La jeune femme le tire vers elle et il répond à cet appel. Se tournant vers elle, frissonnant sous l'air frais de la pièce, l'assassin lui donne sa chaleur.

Pour encaisser, il faut des réserves… et, manifestement, elle n'en a plus du tout. Déjà qu'elle n'en avait pas. Avec un soupir, il tire le drap sur elle, sur eux. La tête sur le bras, les prunelles dichotomiques la regarde longuement, attentif à chaque expression, chaque respiration. Il attend qu'elle sombre tout a fait dans les ténèbres du sommeil avant d'abdiquer à son tour.

La lueur des prunelles s'éteignent, il est temps de la tombée du rideau.  Sa respiration se fait plus profonde… Pour une fois, il dort DANS un lit… Mais il veille quand même d'une oreille.

*****************************

Quand il se réveille, Dante s'aperçoit que le soir est déjà bien entamé. La musique et les rires proviennent du rez de chaussé. Il commence par écouter… Il y a une respiration près de lui. Il n'ose pas ouvrir les yeux. Mais son coeur bat fort… Son nez lui indique que non, il n'a pas rêvé… Et il a la dalle… Il répugne à la quitter, même momentanément, mais ils doivent manger toujours… Des âmes c'est bien joli, mais ca se digère mal.

Avec un soupir, il se glisse hors du lit, et se met en frais de se rhabiller. Méthodiquement, il remet tout dans la pénombre de la pièce… cherche bien un de ses bracelet de force un peu, mais rien de catastrophique. Il pense rattacher ses cheveux de prime abord, mais décide qu'aujourd'hui, il n'est pas d'humeur à se brider plus que nécessaire. Une fois rhabillé de pied en cap, il se dirige vers la porte qu'il ouvre pour aller chercher à bouffer…

Devant lui, de l'autre côté du corridor, une desserte l'attend. Chaque fille y a mis un petit quelque chose, fruit, légume, verrine… viande fumée… Vin… Avec une petite note de La Marquise…

Perplexe, il se gratte la tête.

Putain… Ils ont été si bruyant que ça?

Une fille d'ailleur tourne le coin, avec un client au bras. Elle voit Dante et lui offre un resplendissant sourire tandis qu'il la regarde passer, l'air aussi neutre que d'habitude.

Wais, semble t'il que la planète est au courant.

Un léger sourire effleure sa sale gueule.

Tant mieux. Comme ca personne touchera à Irulan… Ca lui fait une protection de plus. La Marquise étant très protectrice, la savoir avec lui va simplifier les choses… Elle aura pas à tapiner.

La simple idée qu'elle touche à un autre homme que lui fait dresser les poils sur la nuque de Dante. Une lueur mauvaise traverse les étranges yeux.    

Le Néant.

La destruction de la plus fine étincelle de vie, de mémoire, de pensée.

L’inexistence à son état le plus pur.

La négation de tout accomplissement.

Ce qu'elle a vu la hante toujours. La seule présence qui existe, le seul fil qui la tient au dessus de ce néant prêt à se refermer sur elle, est fait d'encre, de murmure et d'une faim terrible. Le filin ténue se balance, tenu par une grande main forte, caleuse et couturée. Alors elle observe, terrifiée à l'idée de tomber entre les crocs de cette bouche vorace qu'est Tyra.

Au début, le cauchemar qui reprenait chaque nuit la laissait couverte de sueur et haletante, recroquevillée sur elle-même. Mais c'est un souvenir dont elle a accepté l'absurdité à présent. Le rêve en était devenu plus insidieux. Ce genre de vision qui vous happe, vous enferme dans votre propre corps et vous garde parfois même quelques minutes après votre réveil.

Cette fois ne fut pas différente sur ce point. Lorsque l’existence remplaça le néant, elle resta immobile sans trop savoir ou elle se trouvait. Yeux clos, l'odeur qui l'entourait et la lourdeur de son corps lui apprirent que ce qui s'était déroulé dans sa mémoire était bien réel. Une respiration lointaine. des pas furtifs qui s'éloignaient. Le claquement de la clenche d'une porte. Il partait ?

Étrangement, elle le constatait simplement. Sans peine. Aucune angoisse, aucune peur ne vinrent l'aiguillonner.

Elle ouvrit plutôt les yeux en se tournant pesamment sur l'autre côté. Une douleur sourde envahit non seulement ses blessures mais son corps dans son intégralité. La sensation était proche d'une engueulade en règle, préférée en même temps par chaque muscle et chaque plaise. Si elle pouvait dormir encore tout une année et baffrer tout un village, elle le ferait sans hésiter. Son visage se froisse de souffrance, mais au moins, elle est face à la porte... ouverte.

Lorsque ses yeux s'ouvrent, elle fronce les sourcils, mettant un petit temps à s'acclimater à la lumière, aux à la profondeur. La mise au point se fait peu à peu bien qu'elle garde les yeux plissés. La silhouette de Dante entre d'un pas. Habillé comme la veille... ou était-ce le matin même ? Elle est en mal de repère, mais pour le peu que ça change. Tout est remis en tout cas, jusqu'aux bracelets de force. Tout... Sauf la tresse. Un détail qu'elle apprécie. Pourtant, elle croise son regard sans savoir quoi exprimer. Alors plutôt que de jouer la comédie, elle penche légèrement la tête, curieuse et détendue.

Une odeur de nourriture lui arrive au nez. Ses narines s'agitent. L'eau lui vient à la bouche... Et son estomac gargouille de la façon la plus sonore possible, dévoilant une faim des plus physiques. La faim de nourriture solide était tellement minime par rapport à celle que que creusait la magie, qu'elle avait tendance à l'oublier... Mais en l’occurrence, elle se rappelait très bien à son souvenir. Elle tente d'identifier plus précisément l'origine du fumet, mais les mélanges d'odeur dans la pièce sont trop fortes.

- C'est quoi ? "

Elle se soulève sur un coude avec toute la bonne volonté du monde et repousse sa courte crinière noire l'arrière de sa tête.

En rentrant, il la voit… Elle n'a plus ses tatouages, la peau pâle est quasi luminescente dans la pénombre du soir… La pièce sent la luxure, le sang… La douleur, la dépravation. Ce qui lui plait infiniement.

Mais ce sont ces yeux qui l'interpellent toujours. Ces lacs de glace qui le transpercent. Il pousse le chariot jusqu'à côté de Cecilie et se met en frais d'enlever ces pièces de vêtements qui l'insupportent soudainement. Ses scarifications le brûle, brûlent d'être étouffés sous le tissus. Ca lui arrive parfois.

- C'est quoi ?

Je sais pas trop… assied toi et regarde. j'en ai pour pas long. J'nous installe.

Il fouille dans le petit meuble sous le broc, en sort quelques bougies qu'il pose sur le meuble.

Couvre toi.

Ordonne t'il avant d'ouvrir la fenêtre pour jeter le contenu du plat dehors, l'eau qu'il a utilisé pour nettoyer Cécilie. Refermant le battant, il pose les bougies dedans et allume tranquillement les flammes en minimisant le risque d'incendie au maximum et nimbant la pièce d'une lueur chaude et mouvante.

Puis, il retourne à la porte qu'il vérifie et verrouille soigneusement. Avant de reculer de deux pas, tournant le dos à la femme, sa tête penchant d'un côté et de l'autre, attentif à quelque chose. Dante grogne une insanité avant que ses doigts ne s'agitent sur son plastron qui retourne choir sans délicatesse dans un coin. Les bracelets de force et sa chemise suivent le même chemin. Il enlève ses bottes… Mais garde ses pantalons et ses armes… Il ne sait pas pourquoi, mais sa peau, ce soir, ne tolère pas grand chose. Une fois débarrassé de ses inconfortables bouts de tissus, il revient vers sa Ténébreuse qu'il effleure du nez, de la joue, se crispant au contact mais le recherchant tout de même. Il évite la lèvre mordue, la joue bleutée.

Dante s'assied sur le lit, et regarde ce qu'elles leur ont offert comme bouffe. Dante dédaigne la note de la Marquise et regarde ce qu'il y a … Pain, fromage… De quoi becqueter bien, de remettre un peu de gras sur la frêle silhouette de Cécilie. Si cette dernière veut lire, le texte est comme suit.

Note de La Marquise:

Sur la seule chaise de la chambre, dans le coin, la jeune femme peut voir ses affaires proprement pliées.

Ca l'air bon et mangeable… Prends la viande… J'irai voir si je peux pas chasser pour toi cette nuit. Ya surement de quoi faire, avec les jeux, y'a plein de trou de culs qui se promènent et qui s'esquintent à mort.

Les yeux étranges de Dante se posent de nouveau sur elle. La parcourent d'un œil expert, critique. Puis s'assombrissent…

Je t'ai blessée… Je vais te soigner… après…  

Il constate simplement, avant de faire rouler ses épaules raides, son cou où elle a planté ses doigts.

Avec une lenteur et une raideur épouvantable, elle parvient à s'asseoir sur le bord du matelas. Ses reins et ses hanches et ses jambes sont lourdement ankylosés et ça n'avait rien à voir avec la douleur d'une plaie ouverte. Elle a à peine le temps de se stabiliser que Dante traversait la pièce dans l'autre sens pour ouvrir la fenêtre. A son ordre, elle le regarde simplement, blasée. " Non. " Et puis quoi encore ? Le printemps était déjà bien avancé et même en soirée, la température Vaanie n'était pas suffisamment basse pour qu'elle s'en préoccupe, bien au contraire. En plus si elle se cachait sous le drap, son dos allait lui faire encore plus mal. Si les autres étaient gênés par la vue de son corps, c'était leur problème, pas le sien.

Le mot court lui rappelle qu'elle a la lèvre en piteux état. Éclatée et mordue au sang, elle allait douillé à chaque fois qu'elle parlerait ou mâcherait... Ça fait mal. Depuis que la porte de la cave s'était refermée sur elle, c'est visiblement devenu une constante. Tout fait mal. Mais elle ne s'en plein pas. Au moins, c'est Vrai. Après avoir été tuée à petit feu par des manières courtoises et des faux semblant, elle peut bien supporter ça.

Son estomac gronde à nouveau, lui rappelant quelle devait être sa préoccupation première : la profusion de nourriture qu'elle a sous le nez. Une bouteille de vin, du pain sans levain, fromage frais, plusieurs sortes d'olives, des boulettes de lentille épicées, des abats marinés, une viande séchée qu'elle serait bien en peine d'identifier, des dates énormes, des prunes séchée et des amandes émondées. Que du froid. Elle en a l'eau à la bouche... Depuis quand n'a-t-elle pas eu un tel repas à porté de main ? Objectivement ce n'était pas grandiose, un repas assez familial pour les gens d'ici, mais son quotidien n'avait rien de familial. Et un bout de papier grossier... " Il dit quoi le message ? " interrogea-t-elle, éternellement curieuse. Rompant tout semblant de politesse - ce qui lui met toujours du baume au cœur - elle pique une date sans attendre et soupire de satisfaction. Bon sang ce que c'est bon !

Pendant ce temps, Dante avait finit ses préparatifs. La porte est verrouillée dans un cliquetis métallique. Elle en frémis vaguement. Ce n'est pas un bruit qu'elle apprécie même si elle en comprends l'utilité. Il ne revient pas tout de suite, pestant en tournant de droit et de gauche. Elle récupère le noyaux de date entre deux doigts pour le poser sur le rebord du plateau avec des manières distinguées avant de se tourner pour voir ce qui le met dans cet état... Et mis à part ses vêtements, il ne semble pas être en colère contre grand chose.

Elle le regarde défaire le plastron de quelques gestes précis. Alors c'est comme ça qu'on défaisait la courroie dorsale... Il faudrait qu'elle s'en souvienne. Ses bracelets. Ses bottes. Il retirait chaque morceau de cuir comme si ce dernier l'avait personnellement insulté, avec un empressement rageur. La peau détruite de son torse réapparaît. Les dessins semblent encore différente dans ce nouvel éclairage. Certaines marques sont plus visibles, d'autres moins, le tout ne racontant plus exactement la même histoire. Elle le détail, de l'oreille et des yeux, jusqu'à ce qu'il revienne enfin, torse nu, portant quatre fourreaux dont un vide à la ceinture.

Sa peau rugueuse frôle la joue de la demoiselle qui lui répond du geste, sa petite main aux longs doigts effleurant son torse dans le même temps. Elle le sent se crisper encore. Son corps est toujours aussi révulsé par leur contact... Mais c'est lui qui est venu chercher le satin de sa joue indemne avant même de s'asseoir près d'elle.

Pendant qu'il regarde à son tour leur repas, au lieu d'attaquer directement, ses yeux s'attardent sur deux choses qu'elle n'avait pas su identifier, même la figure à quelques centimètres. Même en tentant de faire mieux la mise au point en plissant ses yeux en court d'apprentissage. Les mains très poliment posées sur ses genoux, penchée sur la desserte, elle avait l'air d'un chaton curieux qui ne sait pas par quel bout prendre l'objet de ses interrogations. Le premier point d'interrogation était un petit plat rond, presque une assiette, dans lequel était couché une bonne épaisseur d'une sorte de mousse grumeleuse brun grise, suppurant d'huile et saupoudré de grains rouges. On aurait dit de la pourriture au point qu'elle en tordit le nez... Mais l'odeur en était alléchante et si elle osait en goûter, elle découvrirait un caviar d'aubergine assez bien réussi. L'autre, par contre, alluma tout de suite un brin d'enthousiasme dans son maintien et elle déglutit pour éviter de se mettre littéralement à baver. Sur une soucoupe, deux cylindres faits d'un mille-feuille de patte plus fine que du papier entourait un cœur de graines vertes concassées, le tout luisant d'un miel épais. Il puait le sucre et la fleur d'orangé à plein nez. Elle avait vu des pâtisseries similaire sur le bazar, mais elle n'en avait jamais goûté et aucun n'avait cette forme là. Elle se demandait bien ce que ça pouvait être, et s'il y avait une façon particulière de le manger...

Elle fronce à nouveau le nez, tournant l'oreille du côté du Chasseur.

- T'y tiens à ta viande... " la perspective d'ingurgité une viande 'pas trop regardante' ne lui disait toujours pas grand chose. Alors elle la dédaigna pour refermer les doigts sur le gâteau qui lui faisait de l’œil et l'amener à son nez.
- J'irai voir si je peux pas chasser pour toi cette nuit. Ya surement de quoi faire, avec les jeux, y'a plein de trou de culs qui se promènent et qui s'esquintent à mort.

Tien... Elle ne se serait pas attendu à une telle proposition.

Ca ne lui coupa pas l'appétit pour autant puisqu'elle croqua la pâtisserie sans remord. Épais. Dense. Collant. Si ce genre de dessert pouvait être raffiné, elle n'avait certainement pas affaire à une version de luxe. Ce qui ne l'empêchait pas d'être bon à se damner. Les quenottes blanches de s'agitaient avec entrain lorsque ses yeux se décidèrent à se poser à nouveau sur Dante, toujours aussi directe qu'à son habitude. Il la jaugeait d'une curieuse façon... Et elle ne cacha pas sa surprise lorsqu'il lui promit de la soigner. " Si tu y tiens. Mais ça partira en mangeant, tu sais... " Elle ne s'y attendait pas. D'une certaine façon, il était... doux. Non. Ce n'était pas le bon mot. Attentionné plutôt. Comme pour la chasse. Elle se demanda un moment s'il fallait qu'elle lui rende la pareille... Non. En fait elle manquait plutôt d'occasion. Si les situations avaient été inversées et que c'était lui qui était blessé, elle n'aurait pas réagit à peu près de la même façon en agissant pour lui? Aussi étonnant et improbable que ça lui paraisse... Peut-être. Mais il avait un temps d'avance, maintenant comme plus tôt. Elle ne savait même pas s'ils avaient le même genre de problème d'ailleurs... Piquant une nouvelle date, elle articula tout en manchonnant le noyau.

- Toi aussi tu t'affaiblis quand tu ne chasses pas, ou le pacte que tu as avec la Bête se suffit à lui-même ? "

[justify]Marquant encore une fois l'oppositions de leurs mœurs, Dante dédaigne la majorité de ce qui lui est présenté pour se concentrer sur les protéines… Si la viande rebute Cécilie, il la renifle précautionneusement avant de proprement commencer à manger sa viande… Au goût, il reconnait du canasson. Eh bien, elles se sont donné du mal dis donc!

Cecilie l'interromp dans sa dégustation. Le regard de Dante se tourne vers elle… Sauvage, circonspect. 

Si tu y tiens. Mais ça partira en mangeant, tu sais... 

Il sait qu'elle n'aimera pas sa réponse… Mais il s'en fout. Instinctivement, il comprend que ca ne sera jamais ca entre eux. Ils ne se connaissent pas du tout et se connaissent à la fois sur le bout des ongles. 

Dak, mais elles sont gourmandes les vaches et pas trop efficaces... Va falloir brider tes compagnes… Qui mène, toi ou elle?  

Toi aussi tu t'affaiblis quand tu ne chasses pas, ou le pacte que tu as avec la Bête se suffit à lui-même ?

Il mastique un long moment… Sans répondre, ne faisant que la regarder, indéchiffrable. Couvrant son côté gauche, ses longs cheveux lui cache son œil vert. 

Je ne m'affaiblit pas quand je chasse pas… Je… c'est dur à dire… Je tombe en manque c'est le cas de le dire et je deviens imbuvable. La Bête m'oblige alors, elle réclame son dû…. On a eu un accord et elle a été 

Il  penche la tête de côté, écoutant un truc. Une grimace de déplaisir tandis qu'il dit à son dieu qu'il fait quand même ce qu'il veut. En gros, va chier, je tue pour toi, je suis pas obligé de t'être soumis. Non, il devient incontrolable quand il ne chasse pas, quand il ne tue pas. La Bête finit par prendre complètement le dessus. Et ca ne donne pas du joli. Comme en Aduram.  

Oui il était trop affamé. Et il a mis ma vie en danger, contrairement à notre pacte. Ya fallu qu'on s'affronte voilà quelques années. En gros, je lui offre mes proies… Parfois il en exige… J'accepte, ou pas.. et ca donne des surprises, bonnes ou mauvaises. Tu l'a à la bonne. Il en a rien a foutre des âmes, ca tombe bien. Ca été long qu'il comprennent qu'on chassais pas au même niveau, mais ça lui va.  

Il lui dit ca, elle peut deviner que cet affrontement l'a presque tué. C'est quand il est retourné dans l'antre de Zhak'Bar à Thaar. Il devrait lui raconter? Non, pas maintenant. Ses cauchemars n'appartiennent qu'à lui seul. Il enfourne sa bouchée, sachant pertinemment qu'il ne sera pas capable de rien lui cacher si elle exige quoi que ce soit. Elle est au plus profond de son corp, de son âme. Pourquoi cacher quoique ce soit à l'autre part de soi-même? 

Ton tour. 

Encore cette foutue demande de brider les Lamentations et cette foutue question. Non, elle n'aime pas ça. Ni l'idée ni que ça vienne de lui. L'orgueil de son regard glacé revient à la charge et son avidité absolue rugit... quoi qu'assez mollement. Même pour elle, il est difficile de sentir le manque alors qu'elle est encore entre les draps qu'ils ont défait le jour même, qu'elle sent le pantalon de toile contre sa cuisse, sa voix dans son oreille et que son propre corps est encore las d'avoir trop reçu. Alors, pour faire bonne mesure, elle lui renvoie une question... A laquelle il répond de son mieux, apaisant de beaucoup la curiosité de la jeune femme. Oh les réponses ne sont pas particulièrement exhaustives, mais il répond... Et ça lui permet en bonus de grignoter peu à peu un énorme morceau de pain couvert fromage et de prune séchées, l'oreille braquée sur lui, ne lui jetant des coup d’œil que comme à point.

Alors il a des difficultés avec la Bête... Même en communiquant avec elle et en acceptant de l'écouter... Et de sérieuses difficultés vu le ton qu'il emploie en parlant de l'affrontement. Ce n'est pas une bonne nouvelle, mais une fois énoncé, cela semble évident. Deux-cent-huit questions supplémentaires lui viennent en tête, mais il la coupe dans son élan d'une simple phrase.

Elle finit de mâcher... Beaucoup plus longtemps qu'elle aurait pu. Puis elle regarde avec obstination les dernières bouchées de sa tartine, passant la langue sur sa lèvre gonflée et bleuie.

- Je ne sais pas. Je n'ai pas l'impression qu'elles soient si gourmande. J'ai fait quelques essaies l'année passée. Si je ne suis pas blessée, l'équivalent d'une vie par ennéade suffit à les satisfaire.

Elle goba le dernier morceau de pain, l'avala rapidement, se lécha les doigts et se tourna, toujours raide, vers son Chasseur. Ce qu'elle guettait n'était pas une information sur lui, mais sur elle-même.

- Cela fait des années qu'elles sont en moi, mais seulement une que j'essaie de les comprendre. Demain, cela fera vingt jours que j'ai pleinement accepté de lier ma vie à la leur... " Sa main s'accrocha à son propre bras, comme pour se retenir de faire quelque chose. " Avant, mes marques étaient constamment visible et je me défiais de leur pouvoir. Cela ne m'a apporter que plus de problèmes. Depuis qu'elles se sont fondues en moi, je me sens... mieux. " C'était difficile a décrire... Tout était plus vif, plus précis, plus extrême. " Alors je ne sais pas... J'étais affamée et brisée avant qu'on me les offre. Elles m'ont révélé ce que je pouvais être, exacerbent ma volonté, et je viens enfin de saisir l'occasion qu'elles me tendaient depuis si longtemps. Pourquoi faudrait-il que je les domine ? "

Il hausse les épaules. Stoïque. Pourtant, elle est à côté de lui et chaque parcelle du corp de l'assassin se tend vers elle… Sa ténébreuse… Il a juste le goût de la retoucher… Il inspire profondément, à plein poumons.

J'ai pas de réponse toute faite… Nous les connaissons pas tes copines. Mais objectivement, les tueurs de masses vivent pas longtemps, Les moutons prennent peur et ont des piques et des fourches…

Il se penche de nouveau vers elle… Le regard inhumain la toisant.

Je viens de te trouver. Ca me... nous ferais royalement chier de vous perdre, tes copines et toi. Tout prendre et rien laisser, ok… Mais on peut pas faire ca n'importe comment… Faut pas être le plus fort pour gagner... il faut être plus malin…

Il avale sa bouchée de viande, se penche vers Cecilie qu'il dévore littéralement d'un regard possessif. Il souffle.

Wais… ca me ferais royalement chier... Ma Ténébreuse...  

Il l'embrasse une autre fois... Puis frotte sa joue contre celle de la jeune femme... Manifestement c'est un signe de reconnaissance... Un soupir. Puis il se recule à regret.

Je fais pas de miracle. Je suis qu'un mec qui a un foutu dieu dans la tête... J'ai pas tes réponses... Jpeux juste te dire les miennes... Peut-être que je me plante. Mais je pense que non...  plonge... et je plongerai avec toi... Fait trembler le monde et je serai l'âme damnée qui baignera dans el sang en ton nom, l'Ombre Des Lamentations... Déciderais tu de crever de faim que je t'obligerai à me bouffer pour vivre.

Zhak'Bar marque sa désapprobation en cet instant précis, amenant une fugace grimace de Dante.

Bon, on aimerait mieux pas... Mais JE le ferais... Je chasse, je tue... Une vie simple. Quels sont vos buts?

Maline oui, elle l'était. Elle avait ordonné, manipulé, négocié et administré. Elle avait même menacé. Mais encore trop jeune, trop avide, trop insouciante d'une liberté nouvellement acquise. Tout ça était trop récent pour qu'elle en mesure les conséquences et les risques, elle qui avait grandit comme un oiseau chanteur dans une cage faite d'or et d'hymnes Néerites. Son nouveau terrain de jeu ne répondait pas aux même règles. Elles étaient même à l'opposer... ou peut-être pas tant que ça, mais elle n'en avait pas encore conscience.

Si les tueurs étaient recherchés, chez elle ceux qui s'en prenaient à des petites gens n'étaient presque jamais retrouvé et on ne se mettait pas en frais pour les mettre aux fers.

- C'est pour ça que je voyage. " laissa-t-elle tombé du haut de son inconsciente splendeur glacée, faisant une fois de plus exprès de chasser la raison sensé qui essaie de tempérer ses envies... mais l'homme ne se retenait pas de la toiser, se penchant vers elle. Il déglutit, plantant une nouvelle fois les griffes de son regard en elle. Il l'embrasse. Elle lui rend son baiser. Posa la main sur la joue libre piquée d'une barbe inégale lorsqu'il se frotte contre elle en frissonnant de bien être.

Il répète ces mots qu'elle n'avait pas vraiment noté la première fois qu'il les avait prononcé, mais qu'elle entend très distinctement à présent. Il ne veut pas la perdre... Elle ouvre de grands yeux étonnés. L'abime en elle en ferma la bouche de stupeur. Puis commencèrent les promesses et son regard se durcit. Elle n'aimait pas ça. Oui. Non. Il lui jurait de la laisser libre... Mais la conclusion qu'il en tirait... Après un éclair de peur, c'est une montagne de colère qui passe dans ses iris étrécies.

Elle ne prête pas attention à la grimace, pas plus qu'au fait qu'il s'oppose à la Bête pour réassurer sa promesse. Il a à peine posé sa question que la main resté sur sa joue se crispe pour amener leurs visages tout proche l'un de l'autre. Il est de nouveau face aux tatouages, les pupilles de la jeune femme plus étrécies que jamais. Le corps de l'Enchanteresse avait largement protesté à son mouvement brusque, mais elle s'en foutait.

Une main était à deux doigts de se refermer sur l'âme du Chasseur qui se prenait pour une ombre, menaçante et rapide comme lors de leur première rencontre. La seule différence est qu'elle ne se referme pas, comme pendant leurs ébats. Mais la menace est réelle. Le danger également. L'avidité dans le regard bleu est lourdement teinté d'un courroux orgueilleux, mais surtout, d'une pointe étrange... fêlée... empreinte de folie.

- Si tu comptes te laisser mourir, pour qui que ce soit, autant en finir maintenant. Plutôt moi que le Néant. " Ô elle en avait envie. Elle n'attend que ça. Elle s'en délecterait. Pourtant, la perspective lui répugne et ça se sent dans chaque mot de ses lèvres méprisantes. Elle avait déjà été agacé, curieuse, docile ou hautaine, mais il découvrait là quelque chose que peu avait vu. Mais la rage gronde. La folie brûle. Elle le ferait sans hésiter. Si ça devait finir comme ça, alors autant en finir maintenant.

Brusquement, la colère disparait. Ne reste que la folie étrange de son regard intense. Elle ne pensait pas pouvoir être plus avide qu'elle ne l'était déjà, et pourtant... Elle voulait quelque chose de nouveau... De gigantesque... Ce qu'elle voulait déjà venait de se multiplier par deux.

Si proche de Souffle et de corps, elle murmura à ses yeux disparates.

- Si ta mort est inévitable, je te dévorerai. Pacte ou non, je dévorerai la Bête aussi plutôt que de lui en laisser la moindre miette. " gronda-t-elle envers le soit-disant dieu. Un mouvement. Une seule tentative et elle refermait la mains au cœur de l'être qu'elle avait sous les yeux. Dante... Son Chasseur. Sur le point de lui ôter la vie pour la dernière fois, elle vint poser un baiser sur ses lèvres, puis... relâcha doucement son emprise. Juste de quoi ressentir ce rythme en elle... Elle se lova dans ces pupilles qu'elle ne tenait plus en son pouvoir. Avec une douceur féroce, dévoilant sans retenu le cœur de sa démence. " Je ne veux pas que tu sois prêt à mourir pour moi. Vis pour moi, Dante. Survis pour moi. Quoi qu'il arrive. Quoi qu'il en coute. Et jusqu'à la mort de la mort elle-même si nous y parvenons. " Une demande. Une supplique. Un ordre.

Tel était la source et la finalité de son avidité sans borne. De sa folie sans borne. De son orgueil sans borne. Elle voulait vivre. Éternellement. Jamais elle ne rencontrerait à nouveau ce Néant indicible. Quoi qu'elle doive faire pour ça. Trahisons, meurtre, fuite, torture. Elle vivrait. Elle trouverait un moyen de s'approprier l'éternité des elfes et plus encore. Elle vivrait à tout jamais.

Et comme si ce n'était pas suffisant, elle voulait qu'il vive aussi...

Pourquoi ?

Qu'est-ce qu'elle pouvait en avoir a foutre ?

Il feule, prêt au combat. Prêt à la tuer. Pourtant ce n'est un grognement. Pas même un geste qui répondit à la jeune femme. La Bête ne bouge pas. Un sourire acéré ponctue la voix grave.

Comme tant d'autres, ils devait croire qu'être dévorer par un dieu était encore quelque chose. En tout cas, il n'avait pas peur de mourir. Elle pouvait lire en lui comme dans un livre ouvert sur ce point. Mais Il n'acceptait pas son sort si facilement.

- Je suis bon à ça. On joue à qui crèvera en dernier? Et t'a intérêt à gagner parce que j'irai te rechercher…

La menace qu'il proféra, elle l'accepta sans broncher. Il acceptait... Les yeux bleus se calmèrent, reprenant leur contenance. La main se détendit tandis qu'elle se lovait plus profondément dans son regard et plus près de son âme. Sans prononcer un mot.

- Et parlant de crever… y'avait pas quelqu'un qui t'a envoyée me tuer au fait?
- Pardon ? " Ses doigts se posèrent sur l'épaule noueuse. Ses cils papillonnèrent un peu et elle laissa la magie se dissiper à regret. Ses tatouages s'effacèrent en deux battement de cœur. La tension brusquement redescendue, il fallait encore reprendre contact avec la temporalité à l'extérieur de cette chambre... Le tuer... " Ah oui. Enfin non. Ta Krish m'a envoyé pour savoir si 'Dante Corvac' portait... Attend. " Elle s'éloigna a regret pour tracer l'étrange rune en forme de |\| dans la mousse d'aubergine avant de se lécher distraitement le doigt. " Elle voulait savoir si tu avais une marque comme ça, gravée sur le corps. Une fois que j'avais l'information, je devais aller lui faire un rapport et te transmettre un message. Elle t'attend sur la route qui mène à Baaz'Hima et si tu veux retrouver ta dague, il faut que tu la retrouves là-bas. "

Elle n'avait pas pensé une seconde à mentir. Peut-être aurait-ce été plus sage, mais elle n'en voyait pas l'intérêt.

Sanglante, la fidèle… La dague de La Mort, de La Destruction. Quand on est seul, on a tendance à s'attacher à des trucs bizarres. Elle ne lui a jamais fait faux bond et le fourreau vise à sa hanche est explicite. C'est con accorder tant d'importance à une lame, mais c'est la Sienne… Il n'en reste pas moins pragmatique. La reprendre certes, mais pas à n'importe quel prix.

Le regard dichotomique luisent comme les démons de l'enfer à la pensée qu'elle a essayé de l'appâter avec une vulgaire copie. Puis reporte son attention sur sa Ténébreuse et se teignent de malice pure.

Finis ta mission, récolte la prime et disparais de sa vue, je veux pas qu'elle sache pour nous, ca reste un putain d'avatar et elle est maligne… Laisse moi gérer le reste. Faux pas être le plus fort. Mais le plus intelligent. Laisse la croire que je veux l'arme à tout prix et que je me pointerai demain soir à Baaz'Hima tel que demandé. En attendant… J'ai mieux à faire pour le moment…

La malice se teinte d'une certaine perversité tandis qu'il se rapproche d'elle de nouveau… Il respire à fond la peau fraîche, teinté de son odeur… La faim? Il a assez mangé ce soir. Il n'est pas maigre pour rien.

Nous avons mieux à faire… Après tout, je t'ai retenue contre ton gré un jour et une nuit entière.

L'assassin lui lèche langoureusement la jugulaire. Se juchant sur le lit, il passe dans son dos, et recommence son manège, s'amusant de la réaction cutanée qu'il suscite.

Et j'ai bien l'intention que ça soit vrai. Tu dois être surveillée aussi. Alors autant leur en donner pour leur argent…

Il se redresse, tire la tignasse courte de Cécilie sans violence mais fermement, la renvoyant couchée dans le lit. Il la domine de toute sa haute taille et pourtant, ne la domine pas à la fois. La grande main se pose sur l'épaule et descend le long de la pâle peau. Elle l'a réveillé et il est gourmand. Très

Vif comme un oiseau de proie, il vient reprendre ce qui lui revient de droit. La heurte d'un baiser sauvage. Et il ne s'arrête pas.

J'ai faim… Tu veux une petite chasse? Je veux te montrer comment la peur donne bon goût… C'est vrai pour al viande… Ca doit être vrai pour tes âmes.

Les lèvres brutales descendent le long de la gorge, suivant la jugulaire, martyrisant délicatement la clavicule. La Faim la plus pressante a été assouvie et il reste l'autre… La mise en plat, la mise en bouche… Joueur, il s'arrête, un sourire moqueur sur son visage.

A moins que tu préfère que je te torture d'abord… Parce que j'ai commencé et j'ai bien l'intention de pas arrêter avant que tu me supplie de le faire...

Elle se demandait bien ce qu'était une avatar, mais elle n'eut pas franchement le temps de poser la question.

- Comme il te sied. Mais elle est vraiment si importante que ça cette dague ?
- Plus maintenant... Mais il faut faire comme si... " Elle acquiesça simplement à la demande. S'ils pouvaient être une fore l'un pour l'autre, qu'ils agissent de façon stupide et l'inverse serait aussi vrai. Et il était hors de question que ça leur coute la vie. Il connaissait mieux qu'elle la drow qui l'avait embauché et avait visiblement un contentieux de longue date. La belle était curieuse de la raison et elle aurait aimé pouvoir poser des questions. Encore plein de questions. Une montagne de questions. Mais le sourire machiavélique de Dante était une excellente raison de les garder pour plus tard. Sa voix et sa langue une excellente raison de les oublier tout court. Sa peau de hérissait à chaque contact de sa bouche.

Lorsqu'il passe dans son dos, tout être frémis frémis. Non non non ! Elle est encore trop fatiguée. Ses blessures lui font trop mal. Elle a faim. Sa lèvre est dans un état lamentable. Son intimité ne le supportera pas plus que le reste de ses muscles. Puis elle a déjà des courbatures. Elle va forcément avoir des crampes ! Malheureusement pour lui, la belle n'est pas du genre à écouter les avertissements paniqués de son corps.

Elle inspire d'un coup bref et se cambre quand il attrape ses cheveux. Elle suit son ordre ferme pour retourner s'allonger sur le matelas. Il la contemple de toute sa hauteur. Sa petite main se pose sur le tissus recouvrant sa cuisse marqué d'un dragon, glissant en faisant des détour du genoux à l'aine. Il est splendide ainsi. Vif, sauvage et bestial. Il vient l'embrasser, la toucher. Enfin elle peut poser de nouveau ses mains sur sa peau nue. Elle caresse les fourreaux qu'il porte à la ceinture avec une délicatesse et une curiosité approchant de près celle qu'elle a en suivant les cicatrices qui le marbrent.

Il a faim... Et ces quelques mots trouvent en elle un échos amplifié. Une chasse ? Avec lui ? Oh oui... " ça se tente. J'ai hâte... " Elle ne s'est jamais demandé si l'état d'une personne pouvait changer le plaisir qu'elle éprouvait à la dévorer. De nouvelles perspectives s'ouvrent... Et se ferment pour un temps tandis qu'il arrive à sa clavicule. Sa voix la met déjà dans tous ses états, mais elle commence maintenant à s’habituer et à reconnaitre le son caractéristique de son sa respiration. La sentir s'intensifier ne l'aide pas.

Les mains de la belle ne se sont pas arrêtées. Elles caressent les flancs et le dos du Chasseur. L'une d'elle vient s'entortiller dans ses cheveux noirs avant de redescendre avec sa consœur vers ses hanches. Il s'arrête. Il joue. Il la provoque, moqueur. Elle adore ça.

- Alors voyons si tu es un bourreau aussi doué que tu le penses. Comme tu le dis, autant qu'ils en aient pour leur argent.

Un éclat lubrique dans ses yeux de glace ponctue un cliquetis de cuir et de métal. Défaire une ceinture, elle sait encore faire. Et c'est celle de Dante qui vient de céder. Un sourire dévoile ses quenottes blanches.

- Mais je te préviens, il n'est pas si facile de me faire supplier. "

Mensonge éhonté vu son état. Mais elle tint bon. Toujours jusqu'au bout, sans garder aucune réserve face à lui. Plus il la touchait, moins elle hésitait à le toucher en retour malgré les réactions de révolte et de tension du mâle corps. Elle savait désormais que c'était de la douleur, même si elle ne comprenait pas pourquoi. Les pourquoi étaient tous assommés dans un coin et en cours de digestion de toute façon. Elle n'avait pas besoin de ses réponses là car leurs conséquences étaient par trop évidentes. Alors elle le caressait, l'effleurait, l'accueillait et le serrait à l'envie. Fidèle à elle même, elle n'avait aucune tempérance, assouvissant ses envies et celles de Dante jusqu'à en dépasser largement ses limites.

Et bien qu'elle ne regrette rien... Il fut rapidement clair qu'elle ne pourrait pas marcher avant le lendemain matin au bas mot, jour à laquelle elle devrait faire son rapport avant que la drow ne s'impatiente. Leur première chasse en duo devrait attendre...


_________

Printemps - 6e jour de la 8e ennéade de Favrius 14:XI
Matin

Avant de partir, elle se rhabilla, grimaçant au contact du tissus rêche contre sa peau et ses cicatrices. La coupe brouillon de la robe d'Irulan rendait le trou laissé par l'arbalète difficile a distinguer. Rien que de remettre ses chaussons de cuir, le bracelet de grelots à sa cheville et la fausse dague à sa ceinture, elle était déjà fatiguée. Elle ne croisa le regard d'aucune fille de la maison, se détourna de chaque tentative de parole. La route fut laborieuse. Sa jambe droite ne parvenait pas à soutenir son poids et la faisait claudiquer à tel point sur sa tremblante jambe gauche qu'une bedonnante matrone - visiblement une artisane - lui donna deux sous en la regardant avec pitié, horrifiée par son visage tuméfié.

Volant une capeline, elle retourna jusqu'au lieu que lui avait indiqué cette Krish. Un homme marqué d'argent l'attendait. Il la fit poireauté pendant deux bonnes heures avant que la daedhel n'arrive, portant une robe des plus riches sous une cape qu'elle avait peut-être chouravée de façon aussi soudaine que son employée du jour. Oulah... Elle était vraiment puissante celle là. Ce n'était pas une simple mafieuse.

En voyant le visage de la jeune femme, sa joue, sa lèvre, la jambe à vif qu'elle avait volontairement dévoilée sous prétexte que le contact de sa robe était douloureux, ses yeux de glace défiants et son port altier tremblant de fatigue, un sourire moqueur et carnassier se dessina sur les lippes de la drow.

- Et bah ! Il t'as pas loupé. Moins douée que ce que tu pensais, gamine ?

Les gamins étaient toujours comme ça, à se croire invincible et plus fort que tout le monde. Elle avait méchamment dégusté celle là. Krish imaginait sans peine le reste des plaies qui devait couvrir le reste de cette petite personne sous ses kilomètres de vêtements. Il lui avait même coupé les cheveux en signe d'humiliation suprême. Elle pouvait la sentir fulminer intérieurement. ' Ô oui petite, venge toi, va donc te jeter dans sa gueule et mourir bêtement parce que tu te sens outragée. ça m'évitera d'avoir à le faire moi même. '

- J'ai ce que vous vouliez. " cracha l'humaine, glaciale face au visage de plus en plus goguenard de son employeuse.
- Je t'écoute.
- Il ne porte pas la marque que vous cherchiez. Nulle part.
- Oh... Et comment tu as fait pour en être si sûre ?
- Il habite dans un bordel, a votre avis ? " dédain contre... La drow paraissait à la fois déçue et agacée. Sa voix devint plus cassante, son visage plus sévère.
- Si c'était si facile, pourquoi tu es dans cet état alors ? " ricana l'eldéenne. La jeune femme la foudroya du regard. Elle avait sacrément donné de sa personne pour s'en sortir vivante la petite putain. La panthère s'en amusait follement. " Pas la peine de me regarder comme ça... Alors, tu es vraiment sûre ?
- Oui. Il porte de très nombreuses marques, mais pas celle là.
- Et la scarification sur son bras ? Elle ressemble à quoi ?
- Couteaux. Fer rouge. Des marques de torture classiques.
- Tu en es vraiment vraiment sûre ?
- Écoutez. Si vous ne me croyez pas, il était inutile de faire appel à mes services. J'ai remplit mon contrat. Il n'a pas la marque que vous cherchez. Et il sera sur la route de Baaz'Hima ce soir pour sa dague. Voir que j'en avais une fausse l'a rendu fou... " gronda-t-elle entre ses dents, imitant à la perfection la douleur contenue et la rage qu'elle aurait du éprouver pour celle qui l'avait condamnée à un tel sort sans la mettre en garde. Krish la regarda avec encore plus d'amusement.
- Parfait... Voilà ton paiement. "

Des pans de sa cape, elle sortie une nouvelle bourse et un parchemin soigneusement enroulé. Un sceau étrange en marquait le bas et des écritures déliés en couvraient le recto.

- De quoi te soigner et ton laissé passé pour la Grande Bibliothèque. Personne ne te demandera de payer quoi que ce soit à l'entrée, mais évite de t'y présenter comme ça, ils croiront que tu as volé cette note. Sur ceux, ma tendre amie, je te laisse. La chambre est payée jusqu'à demain soir. "

C'est ça... Comme si elle allait restée dans la chambre de cette tarée pour qu'elle puisse venir la tuer dans son sommeil. Une fois la drow disparue, Irulan quitta l'auberge et s'enfonça à nouveau dans les ruelles de Thaar jusqu'au bouge le plus proche. Il fallait qu'elle se repose... Et elle avait promis qu'elle ne se mêlerait pas de la confrontation du soir... Elle l'avait promis...

Elle l'avait promis...