La curiosité créatrice | La Mascarade & Aaron

3ème jour de la 2ème ennéade
Automne, Barkios de l'An 17:XI

Il faisait nuit mais il était encore relativement tôt cependant. L'approche de l'hiver avait cela d'appréciable qu'il rendait les affaires nocturnes plus prolifiques. Et ce quartier de la Capitale en était l'un des plus parfaits exemples. Alors que le silence régnait partout en ville, ici, on percevait de la musique dans les tavernes, des gémissements derrière les volets clos et des ombres silencieuses sous les lampadaires encore allumés. Ici, mieux valait ne pas se promener à la tombée du jour si on avait les poches trop bien remplies ou bien fallait-il avoir une escorte ou porter les vêtements de son laquais.
Au milieu de cette agitation ténue, une silhouette progressait à grand pas tel un fantôme silencieux, œuvrant pour ne pas attirer l'attention. Cependant, aucune menace ne semblait émaner de cette forme fugace malgré son capuchon et son épée au côté. L'homme ne cherchait rien, ne regardait personne... Il avançait, voilà tout. Mais lorsqu'enfin il s'arrêta, ce fut pour observer un bâtiment où toutes les lumières du rez-de-chaussée étaient allumées et dont l'agitation qui régnait à l'intérieur courait jusqu'aux oreilles de l'étranger. Il fronça les sourcils sous sa capuche et se tourna vers les maisons alentours. Il ne s'était apparemment pas trompé mais les choses avaient pu changer depuis les dernières informations qu'il avait eu.

Après quelques secondes d'arrêt, la silhouette se remit en marche. Elle avança vers la taverne, en poussa la porte et y entra. A l'intérieur régnait une assez bonne ambiance. Musique, effluves d'alcool et chants paillards étaient au rendez-vous. Sans compter une odeur de pâtisserie salée à base de lard qui embaumait la salle. Le nouvel arrivant se dirigea vers une serveur et lui demanda quelque chose à l'oreille. La femme aux formes généreuses et au ventre trop serré par son tablier lui désigna le comptoir. Il la remercia d'un signe de tête et s'avança jusqu'à l'endroit indiqué. Là se tenait un homme aux hanches plus larges que les épaules. L'encapuchonné le héla discrètement et il s'approcha, prenant appui sur le bar tandis que son interlocuteur se penchait en avant.

-Je cherche "le moisi". Ce n'était pas son échoppe ici ?
-Si mais ça fait un bail qu'il est cané. On l'app'lait pas l'moisi pour rien.
-Je vois... Répondit l'inconnu, un peu contrarié d'apprendre la nouvelle. Vous ne connaîtriez pas quelqu'un d'autre ? Par hasard...

Le tenancier sembla hésiter. Il y avait fort à parier qu'un homme tel que lui, avec un établissement aussi passant que le sien, était au courant de tout ce qu'il se tramait dans son quartier, sa ville et même au-delà. Il lui fallait sans doute une motivation pour qu'il révèle cette information. Le nouveau venu sortit alors quelques pièces de l'intérieur de sa veste en cuir et les lui remit discrètement. Le tavernier se pencha alors pour lui parler à l'oreille puis, après quelques instants, les deux hommes s'adressèrent un hochement de tête entendu et l'encapuchonné prit la direction de la sortie.