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 La Complainte du Flagellant [Louis]

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Ernest de Missède
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MessageSujet: La Complainte du Flagellant [Louis]   La Complainte du Flagellant [Louis] I_icon_minitimeSam 15 Fév 2020 - 0:44




Tariho de la cinquième ennéade du mois de Bàrkios
– An 17:XI

Les neuf étaient arrivés à la Salamandre à potron-minet. Là, dans la résidence diantraise fraîchement reconstruite des suzerains missèdois, sise au faîte du quartier des Mille-Soleils, ils avaient passé la matinée à se remettre du voyage. Pour tel déplacement, Ernest s'était entouré de huit Vertueux en les personnes d'Alden de Béjarry, Roland de Valmu, Elmure de Champant – icelui nouvellement élevé à ce rang en sus de son office de capitaine de la garde personnelle du baron, Octave de Bayard, Ulric d'Havreval, Maévic de Graves, Adélard de Grateloup, et Olivier de Baden. Les raisons de ce séjour à la capitale du royaume étaient multiples. Ernest devait rencontrer le nouveau Régent dès le lendemain. Une première rencontre qui s'en suivrait, dans la foulée, d'une deuxième, toute aussi première en essence, avec Maël de Missède, son « fils », qu'il relèverait de la cour du Marquis de Langehack. Assurément, le baron se savait bon gré d'une rencontre plutôt que de l'autre.



Les missèdois passèrent le plus clair du reste de cette journée à déambuler aux quatre coins de la ville. Ernest avait voulu voir de ces yeux ce qu'il en était devenu de la reconstruction de Diantra. La dernière fois qu'il s'y était trouvé, sept ans plus tôt, il y avait conduit les forces langecines pour reprendre la capitale au Médian au nom du Roy. Vers la brune, les missèdois se tenaient dans les jardins de la Salamandre. Adélard et Ulric s'étaient attachés à tenter de convaincre le reste du groupe d'aller visiter le bordel de Bourre-la-Reine. Elmure se plaignait de s'être fait arquepincer sa bourse dans le quartier des Galantes. Roland faisait tourner une tourie de vin myrrhé tandis que le jeune Olivier avait sorti sa diaule et filait à l'aigu des sons délicieux en cette soirée clémente de fin d'automne. Une atmosphère paisible régnait parmi les hommes.



Le jour tombé, Ernest se retira dans ses appartements. Il avait encouragé ses hommes à profiter de ce que la capitale avait à leur offrir. Ces derniers tergiversèrent sur les réticences de leur suzerain à aller visiter une maison de joie, mais la plus honnête des réponses se révéla plus tard dans la nuit. En songes, le Griffon revit les épisodes les plus scabreux des années passées captif de Daeba, la sorcière estreventine qui l'avait soumis à ses désirs génésiques les plus fous. Sur cet îlet perdu en pleine mer, elle lui avait insufflé les plaisirs conjugués de la souffrance et de la chair. Après s'être démenée dans ses draps des heures durant, le baron se réveilla haletant et en sueur sur le minuit. Honteux de ce cauchemar aussi tangible que ses souvenirs, il ne put retrouver sommeil. Renonçant à son lit, il s'habilla, s'encapuchonna, et quitta la Salamandre. Il savait ce qu'il lui restait à faire. Son pas décidé s'envola sans ambages vers Sainte-Deina.



À cette heure-là, la cathédrale était vide ; ou tout du moins elle le paraissait, l'immensité des lieux ne pouvant garantir telle certitude. Ernest traversa la nef comme une ombre et prit à gauche avant d'arriver au chœur. À la croisée du transept nord, il poussa enfin la porte de la chapelle Sainte Aliénor. Là, il laissa tomber son capuchon et ôta sa chemise. La lumière des quelques chandeliers encore allumés chatoyait sur le galbe de son torse découvert. Des plis de sa cape de voyage, il sortit un chat à neuf queues, en agrippa fermement le manche de bois, tomba à genou face à l'autel, et commença. Le bruit des lanières de cuir lacérant son dos nu vibrait entre les murs de la petite chapelle. Le sang ne tarda pas à exsuder de déchirements à peine cicatrisés. Les yeux clos, les traits du visage saisis d'une immobilité hiératique, les lèvres agités par de curieux mots étranglés et incognoscibles.

 



Dernière édition par Ernest de Missède le Mer 11 Mar 2020 - 20:38, édité 1 fois
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Louis de Saint-Aimé
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MessageSujet: Re: La Complainte du Flagellant [Louis]   La Complainte du Flagellant [Louis] I_icon_minitimeMer 19 Fév 2020 - 19:21






Au détour d’une paire d’ennéade, le Saint-Aimé s’était approprié le tirage de sa nouvelle fonction. Tricotant avec un emploi du temps tarabiscoté, il perdit le compte des concessions qu’il dût céder afin de préserver à peu près l’intégrité de ses habitudes. Son recueillement quotidien et itératif n’avait guère pâti de l’indigence de son temps à contrario de ses entraînements. Avant cette vie nouvelle, à la manière des plus honorables chevaliers, son acier ne le quittait jamais. Devenu l’extension de son bras, elle vibrait et chantait journellement, s’assurant que son porteur, malgré la vieillesse qui le narguait,  n’en vienne à le déparer de tout talent. Or voilà l’un de ses plus accablants renoncements : d’être en mesure de faire la rixe à son mestre d’arme à sa guise.

Trois journées s’étaient cumulées depuis sa dernière passe d’arme et, depuis, on lui reconnaissait un caractère bien indocile. Ses nerfs étaient au vif et l’on voyait sa patience s’écouler en un battement de cils. Tant il vrai qu’on attribua au franc parlé du Régent moult fougue, elle relevait ces jours-ci d’avantage de l’emportement. À plus d’une occasion on l’avait pincé à congédier de manière bien salée quelques asservis confondus dans leurs bêtises, de même que des hérauts qui vinrent à l’interpeller à d’inopportuns moments.

Enfin, l’ogre Berthildois eût de la vaine : il ne vit à son après-midi rien qui pourrait poindre à l’horizon. Il s’empara de sa grandlame, puis chemina tout de go en direction de l’illustre salle d’entraînement. À son arrivée, la douce sérénade de l’acier lui donna le frisson, lui placardant sans respit un sourire fendu jusqu’aux esgourdes. Abordant la rambarde qui séparait l’air de repos des affrontements, Louis patienta, la pointe de son acier trouvant encrage contre le sol et ses deux pattes, le confort de son pommeau. Au détour de quelques passes, sa simple présence vint à interloquer les hardis, qui s’octroyèrent une soudaine pause afin de le saluer avec diligence.

« - Continuez à vous bretailler, je vous en prie ; je saurai patienter la fin de vos échauffourées avant de trouver partenaire, soutint le Marquis humblement, le faciès avenant.
- Nous en avions terminé en ce qui nous concerne, votre Excellence, rajouta un combattant qu’il devina à la musculature sèche et raide, vu l’étroitesse de ses épaules sous sa cotte de maille. Et ce serait le plus grand des honneurs que de toiser l’épée avec vous.
- Eh bien! Qui suis-je pour refuser pareil présent ?, rajouta l’auguste Régent, tout en entrant en piste sans autres ambages. La messe sera vite dite! »

Pour la cause, l’entraînement qui n’avait rien d’une gavotte pour les doux, attira l’œil de tous et chacuns. Les gens s’éloignèrent et leur donnèrent de l’air de sorte à laisser libre cours à leurs jeux de pied. Et de prime abord, il eut été judicieux d’allonger fortunes et richesses sur le cervidé : des deux il était le plus grand, le mieux taillé et le plus émérite. Mais à mesure que se donnait le sport, par deux fois on vit le colosse se retrancher, malmené par les vives passes d’arme de son adversaire. Et plus l’algarade se prolongeait dans le temps, plus il semblait qu’au goûté, on y servira de la viande de cerf. Intérieurement, la rage bouillait, était en ébullition totale et maudissait son impuissance face à ce jouvenceau.

Enfin, un coup franc et sec s’abattit contre la lame de Louis, coulant contre le fil et jusqu’à la garde, où enfin, sa force put être utilisée à bon escient. Enhardi par la crainte de se voir vaincu, ses traits s’étiolèrent, carminant ses joues sous l’effort et, s’en suivant une horrible grimace il trouva bon moyen de s’extirper de sa mauvaise condition. Son coude voltigeât et se fracassa contre le pif du belligérant, laissant valdinguer haut dans les airs une volée sanguine. À la vue de sa victoire prochaine, alors que tous les astres annonçaient sa bossée, il perdit la carte et se rua contre lui afin de l’échiner carrément. Il délaissa sa lame au profit de ses poings nus et le molesta comme si le bougre eut été un vulgaire sac de grain. Plus tôt que tard, une flopée de gaillards vinrent à son secours et conjurèrent de leurs muscles que se rétracte le Régent. Lorsqu’il reprit contenance, touchant derechef cette réalité qu’il avait quittée à l’instant, il vit le pauvre hère, là, au sol, gisant dans son sang.



***



Incapable de boustifailler à l’heure du manger, pas plus que de fermer l’œil une fois les lunes abordant le pinacle des cieux, Louis quitta le confort de son hôtel et déambulant dans les venelles de la haute-citée. Profitant de l’air humide et frais de cette nuitée d’automne, il mira cette moultitude de marches qui menaient à la demeure de la Sainte-Mère. Les gravissant sans avoir mot à dire à quiconque viendrait à l’interpeller si tardivement, Louis gagna la Cathédrale dans le plus pieux des respects. Il admira les lieux, jouit de son absolu silence, puis chemina le long de la nef jusqu’au chœur, où il voulut mettre genoux en terre avant d’entendre l’écho d’un claquement. Suspicieux, il se laissa guider par les ondes qui vrombissaient contre les vitraux du lieu Saint jusqu’à ce que ses mires tombent contre un homme dont le rachis crachait l’hémoglobine. En l’apercevant, son battant se resserra aussitôt, se remémorant pareille scène alors qu’il battait la campagne. Une âme ordinaire se serait jetée contre lui dans l’espoir vain d’empêcher l’avènement de cette divine pénitence, mais Louis n’en fit rien. S’il s’admonestait pareil châtiment c’est qu’il le méritait et, de le voir compléter sa sentence jusqu’au bout en dirait long sur l’identité de celui qui se trouvait en face de lui.

Coi, mais fin paré à intervenir s’il venait à calancher, Louis patientait dans le portail qui menait à la chapelle et ne laissait entrevoir sa présence que par son ombre projetée par les multiples candélabres.


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MessageSujet: Re: La Complainte du Flagellant [Louis]   La Complainte du Flagellant [Louis] I_icon_minitimeDim 23 Fév 2020 - 2:24




Un courant d'air s'immisça par des croisées mal fermées. Les fustigations se faisaient de plus en plus rapides ; de plus en plus mesurées aussi, comme si elles appelaient le marquage d'une consonance intime. Une symphonie infernale composée de l'esclandre des lanières qui fendaient l'air, de leur claquement subséquent contre la peau, et des crépitations de la chair qui se déchire. Le vent s'engouffrait maintenant par bourrasques tandis que le sang fusait sur le dallage de la chapelle dans un langage de clapotis. Les murmures du Griffon s'intensifiaient en friselis. Ce concert de coups culmina en une cadence plagale et le Souffle s'empara de toutes les flammes des candélabres ; toutes, sauf une. Le grand chandelier de l'autel déversait alors toute sa lumière sur le Flagellant de la DameDieu qui expirait un dernier râle sibilant.

 

Ernest rouvrit les yeux, ahanant, suant, les muscles contracturés et les veines saillantes. Et puis, progressivement, une nouvelle quiétude le gagna ; celle qu'il avait cherchée à la sortie du lit. Elle se répandait à présent comme un souffle chaud sous sa peau. Il se releva et se tint immobile face à l'autel le temps de reprendre son souffle. Lorsqu'il se sentit soudainement observé, ses yeux dardèrent vers quelques vitraux et miroirs afin de s'en assurer, toujours sans bouger. Une silhouette se dessinait bien derrière lui, en reflet, sans qu'il eût pu sitôt l'identifier. Si c'était un prédicant, il s'en sortirait avec quelques flétrissures d'embarras. Si c'était un brigand, il n'irait guère loin avec le chat à neuf queues qu'il tenait pour seule arme, mais il était assez galvanisé pour vouloir en découdre. Si c'était un... Régent ?! s'exclama Ernest intérieurement lorsque son regard trouva dans son champ de vision un miroir assez bien orienté pour en affiner l'aspect du quidam.
Je prie pour que vous trouviez sommeil par des truchements moins salissants, Votre Excellence, dit finalement le baron, un sourire dans la voix. Sans quoi, je vous presterais bien mon outil, mais on dit que tel échange est inconvenant et qu'il favorise les miasmes contagieux.

   

Le sang continuait de suinter de son dos. Ernest se retourna enfin et ramassa sa chemise. Du cœur de la chapelle, il détailla le Régent du regard, cherchant dans les traits de son apparence la confirmation de son identité supposée.
Vous ne me reconnaissez sans doute pas, pourtant notre rencontre était déjà prévue. Aux aurores, au palais. J'avoue ne pas savoir à quel dessein les Cinq nous ont joints en ces lieux, à cette heure, et en... ces circonstances, s'interrogea Ernest en jetant un coup d'œil à la nappe de sang qui jonchait le sol. Mais je suppose qu'il n'est pas du ressort des hommes de découvrir les intentions des dieux. Souhaitez-vous que je libère la place, Votre Excellence ? Loin de moi le désir d'obstruer vos prières.
Le missèdois enfila sa chemise qui s'imbiba aussitôt de l'humeur sanguine qui dégorgeait des morsures du fouet. La douleur ? Ce n'était qu'une des nombreuses choses qu'il avait perdu aux mains de Daeba. Il faudra donc qu'il pense à faire nettoyer ses plaies avant qu'elles n'empestent. Pour l'heure, il se contenta de couvrir le tout en passant sa cape de voyage.

 

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Louis de Saint-Aimé
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MessageSujet: Re: La Complainte du Flagellant [Louis]   La Complainte du Flagellant [Louis] I_icon_minitimeMer 26 Fév 2020 - 16:26






« J’eus à faire plus souvent qu’autrement aux coups d’étrivière ; ainsi vous me savez riche du même instrument. Gardez le vôtre mon ami et prenez en grand soin, car ce dernier bien plus que de votre sang, est embrené de votre vergogne. Pis encore, de vos plus répugnantes coulpes!, répondit le Régent, la voix ponctuée d’empathie même s’il n’avait connaissance de l’identité du gaillard. »

Au vrai, peu lui chaut qu’il fût de noble naissance ou de basse extraction ; sa foi à elle seule était gage de son appréciation. Deux marches séparaient la chapelle du couloir qui menait au chœur de la Cathédrale, sur lesquelles Louis était en équilibre, à épier cette ouaille moignée de la Sainte-Mère. À l’écho des quelques clapotis sanguins qui venait nourrir le dallage du lieu Saint, suintant de ce dorsal éraillé, Louis s’astreint à l’écoute tacite d’une mémoire lointaine. À son olympienne traversée du Médian, de ses pourparlers avec le Boucher de Kelbourg, des horribles concessions morales qu’il dût essuyer afin d’assurer la vie de ses hommes et de sa domination … De ces sessions de pénitence, où au travers le baraquement de fortune on odit nuitamment la schlage du Saint-Aimé claquer au travers le silence des troupes. Face à pareille mortification, abattu mêmement qu’il le fit jadis, Louis éprouva face à ce lugubre spectacle peine et compréhension. Et le respect vint à la suite.

« Je ne saurais farder mon ignorance de galéjades avilies, mon ami. Vous dites vrai : votre visage ne me revient guère. Et vous soutenez qu’au demain nous avons audience de concert ?, questionna le Régent, pensif et bien con à la fois de n’avoir souvenance de son agenda. De toute évidence, il ne s’était à ce jour pas encore imbibé de toutes les qualités du Régent idéal, ci-mentionné la rigueur de son emploi du temps. Aussi trouva-t-il adéquat pour que son incompétence en la matière ne soit soulevée, de poursuivre d’un ton plus engageant. Non pas, mon ami, soutint le grand Berthildois en dévalant les deux marches qui les séparaient. La Cathédrale de notre très bonne et Sainte-Mère à tous m’apparaît forte adéquate pour les amitiés nouvelles ; marchez un peu à ma dextre, voulez-vous ? » Il invita le Baron à le rejoindre, afin d’évaluer son pas et la grièveté de ses lésions. De prime abord il lui sembla robuste sur ses béquilles, mais peut-être se fourvoyait-il.

Convoyant avec son nouveau compaing, Louis s’assura du bon port de son voisin : c’est que le bougre était bien abîmé et il douta que sa santé s’étiole au fil du temps. « Jouons, un peu ; vous en avez largement mérité le droit. Vous êtes au jus de mon identité, mais je ne le suis de vous et vous défend de prononcer céans votre prénom. Parlez-moi un peu de vous, de l’homme que vous êtes, fils fier de la Damedieu. Vous m’apparaissez comme un homme de bien et il m’apparaît plus doux de converser en votre compagnie que de trouver le réconfort de ma couche. » Ils arrivèrent, peu de temps après avoir entâmé le pas, au-devant d’une panetière quelconque. Bras tendu, il en ouvrit la porte toute menue et en déroba son contenu : une outre bien avenante, potelée comme jamais de liquide abondant. Il en fit sauter le bouchon, puis s’octroya une goulée qui ne manquait de générosité. « Buvez, buvez : cette eau de vie fera office de baume, le temps que vous trouviez soins adéquats. » Et après lui avoir offert la gourde, il se laissa choir contre l’une des cathèdres qui meublait l’antichambre dans laquelle il les avait engouffrés.


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Ernest de Missède
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MessageSujet: Re: La Complainte du Flagellant [Louis]   La Complainte du Flagellant [Louis] I_icon_minitimeLun 2 Mar 2020 - 21:15




Les premiers mots du régent roulèrent dans la nef centrale de la chapelle. Une voix claire et fraîche laissait à Ernest le loisir de remarquer que son interlocuteur était encore jeune. Chose qui, de prime abord, ne manqua pas de le surprendre avant d'être bien vite éclipsée par l'étonnement survenant de la confession du berthildois : lui aussi était donc un amateur de fouaillage. Ainsi, ils avaient déjà quelque chose en commun. Quelque chose de profondément intime de surcroît. Si bien qu'Ernest décida de ne point corriger l'homme quand celui-ci présupposa un peu trop vite que le missèdois se laissait aller à telle pratique en guise d'expiatoire châtiment de quelque crime avilissant. Il en était tout autre. Toute sensation de douleur lui avait été dérobée dans d'affreuses circonstances plusieurs années auparavant. La souffrance de corps lui était désormais un lointain souvenir et cette peine ne saurait être ce qu'Ernest cherchait à conjurer par le fouet. Point de punition, mais un appel.

   

Le baron emboita le pas au régent. Il le trouvait bon. Peut-être aurait-il eu de lui une impression différente à la cour, sous le poids des rôles qu'ils auraient, tous deux, eu à endosser alors. Mais là, en pleine sorgue, dans l'immensité de la cathédrale, le jeu était différent et Ernest s'y prêta volontiers. Le régent parvint même à lui faire décrocher un sourire lorsqu'il lui tendit l'outre après en avoir descendu une longue goulée. Barboter le tord-boyaux des ecclésiastiques n'était pas dans ses habitudes mais puisque le Protecteur du Royaume l'y invitait, le missèdois ne se fit pas prier. Un sacré casse-poitrine, pour sûr, qui lui dérouilla les idées alors qu'il mûrissait la demande du régent. Tandis que lui se seyait dans une des grandes chaires en noyer sculpté, Ernest tournait en rond dans l'antichambre, perdu dans ses pensées. Il finit par se figer et s'envoya une longue gorgée d'eau-de-vie avant de prendre la parole.

   


« Je suis Maître du Rocher
Griffon de la Mériale perdue

Je suis Prisonnier de Daeba
Sang meurtri et bête de stupre d'Estrevent

Je suis Comte du Bae'd de Sol'Dorn
Survivant du défi du Martingale

Je suis Flagellant de la DameDieu
Miraculé de Néera

Je suis Antrustion du Roy
Flambeau ranimé de mon Lige
»


Ayant ponctué chacune de ses stances avec une nouvelle lampée, le baron se rapprocha de son compagnon de minuit et lui rendit l'outre. Assurément, l'énigme n'était point simple et il faudrait sans doute au régent de lire entre les lignes. En sus d'indices quant à son identité, Ernest s'était également appliqué à celer dans son phrasé les marques de ce qu'il souhaitait faire comprendre à son interlocuteur. Ainsi, c'était aussi et surtout ses qualités d'esprit que le baron avait tenu à laisser transparaitre. Donnant le temps de la réflexion au berthildois, Ernest fit silence avant d'entreprendre de se défaire de sa cape de voyage, exposant derechef son torse nu. « Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, messire, auriez-vous l'obligeance de laisser couler un peu de cette eau sur les excoriations de mon échine qui vous paraissent les plus profondes, demanda-t-il en lui tournant le dos. » Le baron savait qu'en mettant son corps hors de toute douleur, Daeba la sorcière avait en réalité jeté sur lui une bien grande malédiction car sans instrument de souffrance point de bornage entre la vie et la mort.

 

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MessageSujet: Re: La Complainte du Flagellant [Louis]   La Complainte du Flagellant [Louis] I_icon_minitimeJeu 5 Mar 2020 - 6:45






Là, le séant sagement sis contre sa somptueuse cathèdre, à odir le sang-bleu proser, Louis en omit sa charge de Régent. Il n’avait plus goût au protocole, à la bienséance et l’étiquette. Non, il avait envie de se pochetronner : de vider l’outre séance tenante. Et à mesure que fila d’entre les lèvres d’Ernest son dizain, Louis se rappela pourquoi cherchât-il à s’escamoter chaque fois qu’on l’invitât au théâtre. Il trouvait ça plus chiant que la plaine. Fort heureux était-il de constater que son ami de fortune, bien que chiatique dans le ton, aimât à lever le coude aussi allègrement que lui. Et tout à coup, à épier ses gestuelles, à décrire son visage d’un regard circonspect, avant même qu’il en achève sa locution, il se souvint : au demain, à la suite des matines, dût s’entretenir avec lui le miraculé Baron de Missède.

Pour autant qu’il devina qui se pavanait à ses devants, Louis ne dégota d’envie de se ragaillardir. L’idée de base, de pinter à outrance, devait être maintenu. Avec du bol, peut-être s’esbignerait-il d’une barbante entrevue et que, sous les véreux augures de cette étrange nuitée, ils aborderaient tous deux les desseins de cette fameuse entrevue sous de nouveaux angles. Personne n’eut à le prier pour noyer son gosier d’une goulée qui manqua de tempérance, alors qu’Ernest lui confiât la gourde gainée de cuir.  Et, venant torcher son bec d’un revers du poignet, il put constater de plus près l’étendu des dégâts que causa le chat à neuf queues. Lui-même, fort d’une solide charpente qui n’avait jamais carencé de mortifications, dût admettre que la correction n’en fût guère des moindres. Ainsi, à sa demande, il se remit en équilibre sur ses interminables échasses, puis s’approcha du gaillard pour briser le silence ecclésiastique de la Cathédrale. « Nous serons hélas accueillis au pays de la soif, une fois que j’aurai assaini ces plaies … » Et quoi qu’il pensa de ce triste constat, Louis renversa l’encolure de l’outre afin qu’il en ruisselle à faible débit le tord-boyaux. Sur les cautères les plus creuses, l’auguste Marquis constatât que le liquide ne fût en rien gaspillé : à la vue de l’écume blanchâtre qui y suintait, point de doutances.

Le curieux traitement alla de bon train, mouillant bientôt d’une flaque d’alcool bien odorant le dallage de l’endroit sacré. Par tans, le bougre en aurait terminé de ces vilaines lésions … Mais quelque chose clochait. Quelque chose manquait. Ces plaintes, arrachées par la montée de cette vive douleur que devait provoquer usuellement l’asepsie, où étaient-elles ? Pas un gigotement, pas même un friselis, ni même la contraction d’un muscle. Ernest faisait preuve d’une sérénité effarante.

Louis s’éloigna d’une foulée de sorte à signaler la fin de ses soins de fortune, puis sous le couvert d’un timbre de voix plus cauteleux, il affirma ces quelques mots : « Auriez-vous échappé au funeste destin que vous réserva Tyra la faucheuse, afin de ne point sourciller à pareille panacée ? » Au vrai, le Régent retrouva dare-dare sa distance de tantôt, alors qu’il épiât au loin le pauvre hère se molester le rachis. S’il était pareil homme en ce monde qui réussit à se délicoter toute géhènne : c’est qu’il y avait largement à se méfier.


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MessageSujet: Re: La Complainte du Flagellant [Louis]   La Complainte du Flagellant [Louis] I_icon_minitimeMer 11 Mar 2020 - 20:36




L'eau-de-vie ruissela de ses épaules à la chute de ses reins, répandant une légère chaleur le long de son échine. Ernest put néanmoins déceler le fin grésillement de l'alcool au contact de la chair dilacérée et, s'imaginant la douleur qu'il eût dû ressentir, ferma les yeux comme pour la conjurer, en vain. « Puisse le pays de la soif nous accueillir avec toute l'hospitalité due aux soiffards, messire. » Lorsqu'il rouvrit les yeux, le baron sentit une voluptueuse griserie lui monter rondement à la tête. L'eau des ecclésiastiques ne manquait pas de corps. Il resta immobile un instant afin de laisser s'imprégner et sécher le remède de fortune mais il ne sut réprimer un revers d'épaule à la question du régent. Celui-ci, d'ailleurs, parut passablement affolé d'inquiétude. « Nenni-da, messire ! Me croyez-vous fantôme engendré d'Arcam ? Je suis vivant autant que vous l'êtes et les fils de la DameDieu doivent tous mourir. Peut-être me faudra-t-il vous narrer les détails de mes années de captivité afin de vous convaincre de ma bonne vivance. Pour l'heure, messire, sachez juste que je fus en proie aux pratiques les plus occultes de la sorcière estreventine Daeba et qu'un des reliquats de sa sorcellerie m'ôte encore et toujours toute sensation de douleur de corps. » Il allait lui falloir plus d'alcool si le régent voulait rentrer dans les détails. Ces années de captivité avaient laissé des séquelles bien plus monstrueuses que celles qui émaillaient présentement son dos.



Cherchant à palier tout inconfort, et à étancher sa soif par la même occasion, Ernest se mit en quête de fouiller toutes les panetières de l'antichambre. Trouvant finalement une nouvelle gourde à moitié pleine, il la lança par-dessus son épaule en direction du régent et l'invita à la boire derechef. Le dernier placard ouvert révéla une bouteille de liqueur que le missèdois attrapa aussitôt par le goulot. Puis, ramassant sa cape au passage, il se dirigea vers la porte de l'antichambre. « Venez donc, régent ! Cette nuit, Sainte-Deina n'a plus rien à nous offrir. » La soûlerie s'installait durablement.



Un calme ensommeillé régnait sur les abords extérieurs de la cathédrale. Ernest entraînait le berthildois dans le dédale de rues attenantes ; en quête d'une taverne, avait-il signifié aussitôt que son compagnon lui eut emboîté le pas. Leur démarche étant rythmée de longues goulées d'eau-de-vie, les deux hommes finirent très vite par perdre tout itinéraire. « L'instinct me commande de prendre à droite, messire. . . Sommes-nous toujours dans le quartier des Mille-Soleils ? . . . Messire, où est le nord ? . . . Avez-vous terminé votre gourde, messire ? . . . Un moment, je dois lâcher de l'eau. . . À gauche ? Encore ? . . . On se rapproche de la lune, messire Louis. . . Ah non, ça c'est encore Sainte-Deina. . . Vous avez trouvé quelque chose, messire Louis ? . . . J'ai perdu ma cape. . .  LOUIS ! » Ernest se tenait à présent devant l'enseigne de ce qui lui parut être une taverne mais dont le nom, Bourre-la-Reine, lui sonnait étrangement familier sans qu'il eût pu dire pourquoi.



Il n'en fallut pas moins au baron pour pousser la porte de l'établissement et le régent à l'intérieur. C'était assurément une taverne plutôt cossue, petite de taille, et quasiment vide à cette heure de la nuit. Le tavernier manqua de s'étouffer dans son verre lorsqu'il vit Ernest faire irruption, nu jusqu'aux reins et visiblement éméché. Le Griffon entreprit alors de lui remettre la bouteille qu'il venait de vider et d'en commander une autre ; pleine, celle-là, ne manqua-t-il pas de spécifier. Puis, se tournant vers le régent, Ernest prit un air de confidence, essaya de lui murmurer quelque chose à l'oreille mais abandonna bien vite ; la taille du berthildois contrariant grandement cette tentative. Finalement, il déclara à haute voix : « La vraie question, Louis. Depuis. . . Vous m'entendez ?. . . depuis que je suis Com. . . Baron ! Merde. Parce que moi, avant. . . j’étais bien à Isssgaard. Ce trou boueux, il me convenait. Les trous boueux me posent pas de problème, Louis. Mais voilà ! Mon frère, couic ! Mon grand-père, zigouillé aussi. Et on vient me tirer la mentule de ce trou pour me poser le potron sur ce crévindiou de trône de Missède. J'avais rien demandé. Et c’est pas tout, Louis. Vous savez. . . Tu sais pas la dernière ? Sept ans plus tard, moi, je rentre au pays. Et… Pouf! Même plus de trou boueux. Odélian qui… Odélian peut me sucer le gland ! Enfin, bon, ben, bref. La vraie question, Louis, que je me pose depuis. . . depuis le début. . . depuis lors. C’est, où ?. . . Hein ? Oui, où, Louis ? Il a mis ses doigts OÙ ?
Missèdois ? interrogea le tavernier qui revenait avec une bouteille. Les missèdois sont derrière, dit-il en faisant un signe vers une porte close proche du comptoir.      
Ernest fut sitôt ramené aux discussions de l'après-midi passée avec ses hommes-liges et eut l'air de réaliser quelque chose pendant un long moment.
Bourre-la-reine ! Louis, on est dans un bordel ! »




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