Les yeux plus gros que le ventre | Na'ri

9e ennéade de Karfias
18e année du XIe Cycle

La noire-elfe souriait en chantonnant à voix basse. Une expression attendrit lui monta peu à peu aux yeux tandis que les gémissements du petit être sur la table se faisaient de moins en moins convaincus. Les paroles des prières consacrées emplissaient son cœur. Son être tout entier invoquait les puissances supérieurs pour apaiser les souffrances de l'enfant.

Le flux magique se tarit mais elle garda la main sur le ventre du petit bonhomme le temps de reprendre pleinement conscience du reste du monde. Le sol. La table sur laquelle était installé une épaisse couverture. La salle dont la fenêtre avait été obstruée par de lourdes tentures pendant toute la durée de l'hiver. Une odeur de sauge, d'amande et d’eucalyptus y régnait, mêlés à la fumée des torchères. Les plantes qui servaient d'éclairage n'avaient pas survécu dans les pièces les plus exposées à l'extérieur. Ils attendaient un redoux un peu plus prononcé pour les replanter le long des murs de pierre. Elle souffla doucement et caressa affectueusement le bambin avant de l'emmitoufler à nouveau dans ses lainages.

- Voilà. Tu as été courageux. " murmura-t-elle à l'enfant en l'amenant contre elle. Puis se tournant vers la novice qui était resté près d'elle pendant le traitement " Tu as bien fait de me l'amener. Ce ne sont pas de simples coliques. Il devrait pouvoir manger normalement à présent, mais continue à surveiller ses pleurs, son poids et si rien n'a changé d'ici la fin du mois, emmène le à Velkya. Elle est bien plus doué que moi en ce qui concerne les enfants. Elle te diras s'il est nécessaire de consulter les Kiranites.
- Bien, Mère Ekmir. "

Le petit changea de bras, calé contre la poitrine nue de la jeune femme qui tourna les talons. Ekmir en profita pour remettre quelques objets en place et s'étira, exposant son ventre marqué du cercle rouge de sa déesse tutélaire. Sa tenue sacerdotale n'était pas exactement semblable à celles qu'elle portait au Puy. Le mélange de culture et le climat poussaient à mettre un peu d'eau dans son vin et l'austère robe de bure remontant jusqu'au cou avait fait place à une robe plus légère. Bien que longue jusqu'aux chevilles et remontant dans le dos jusqu'au ras du cou, les longues manches avaient été remplacées par une successions de symboles sacrés tatoués de la même couleur que tout le reste de sa tenue. Aux bretelles pendaient de longs pan de tissus léger pouvant être ajustés pour couvrir ou soutenir la poitrine selon la convenance de la porteuse, mais la tradition de ne cacher d'office ni les seins, ni le ventre des servantes de Natha était parfaitement respecté par le reste de la coupe.

Le plus étonnant pour une prêtresse représentant sensément la pureté du sang eldéen, étaient les courts cheveux sombres qui encadraient son visage noir. Sans prendre plus de temps que nécessaire, elle retourna à ses affaires du jour. Beaucoup de missives dont certaines des plus hautes instances.

Depuis que la Grande Prêtresse de Thaar avait accepté de venir aider à Sol'Dorn, elle avait l'impression d'être un membre de la Doth'ka plus qu'une prêtresse à force de devoir envoyer des rapports à la Haute-Prêtresse et à la Voix d'Elda. Heureusement, personne ne venait se plaindre lorsque toute cette paperasse était remplit par d'autres du moment qu'elles soient paraphés de sa main. Sa réputation de femme de terrain la protégeait peut-être un peu. A moins que ce ne soient les années passées récemment à Elda dans le temple principal. Dans tous les cas, elle avait le plaisir de passer plus de temps avec les mères passées présentes et futures que derrière un bureau.

Malheureusement, il n'y avait qu'elle pour lire son courrier. De trop précieuses informations pouvaient s'y trouver concernant ses intérêts personnels. Ce jour là, elle avait eu la surprise de recevoir un plis de la Haute-Prêtresse en personne et le nom qui y était couché lui permettrait peut-être de jouer quelques coups sur son propre échiquier.

Une fois le papier brûlé, la grande prêtresse s'accorda quelques minutes pour réfléchir et décida qu'il serait plus productif de quitter le temple. Après tout, celle qu'elle avait à voir était suffisamment importante et le sujet suffisamment sensible pour faire preuve d'un minimum de tact.

De son pas habituel, rapide sans être brusque, elle passa prévenir la responsable qu'elle prenait aujourd'hui en charge sa protégée et vérifier son programme habituel. Une jeune prêtresse lui emboîta le pas peu avant qu'elle ne se lance dans la foule qui déambulait dehors sans revêtir. Leurs atours dénudés leurs valaient nombres de regards et chacun d'eux était suivit d'une salutation respectueuse ou d'un signe de tête docile. Sol'Dorn avait cela de bon. Dans le quartier des temples, même ceux et celles qui portaient les signes de la Grande-Prêtrise n'étaient pas assaillis par une foule désireuse de recevoir des bénédictions, bien que quelques téméraires s'y risquent parfois.

Ce fut donc sans trop de problèmes qu'Ekmir arriva au seuil du temple d'Isten. Sans doute aurait-elle a attendre un peu mais cela ne la gênait pas. Les prêtres de la Sulfureuse furent d'une rare efficacité lorsqu'elle leur confia le nom de celle qu'elle était venu trouvée.

Une main passa sur sa hanche et d'une pression, ajusta la position de la sombre. Celle-ci se laissa faire. Les balancements reprirent, comme le cours de ses pensées.

Les travaux engagés dans sa future maison avancés plutôt bien. C'était à la base les dépendances des esclaves. Les pièces et l'aménagement intérieure étaient à revoir bien évidement pour qu'elle puisse y vivre avec Kel'zo… et peut être d'autres, qui sait. Seulement le plus long à faire n'était pas dans les étages mais en dessous. Na'ri avait demandé à faire creuser deux étages en sous sol. C'était peut être idiot mais elle savait d'expérience grâce à ses campagne que ce sentiment de confort de se savoir entourer par la terre pouvait la prendre de nostalgie.
Les ouvriers étaient vraiment professionnels : efficaces, contentieux et respectueux. De plus, ils paraissaient même heureux de la voir quand, en fin de journée, la prêtresse leur apportait des biscuits. Alors qu'elle faisait le tour des travaux, les journaliers avaient droit à leur pause sous l'œil d'ambre de Varg. Le chien les avaient tout de suite adopter. Le matin, il allait les voir, se faisait papouiller en leur bavant sur les chaussures, et c'était plutôt triste et contraint par sa maitresse qu'il les laissait partir. Il était tellement heureux d'avoir de la compagnie que même enfermer dans le jardin, il trouvait un moyen de les retrouver.

Enfin, elle entendit les halètements. Juste pour l'encourager, Na'ri mêla sa voix à celle du prêtre. Bien entendu, celle qui observait les épreuves ne se laissera pas avoir. Ce n'était pas non plus pour flatter l'égo du mâle. C'est juste qu'elle en avait tout simplement marre.

Les prêtres d'Isten étaient de ses personnes qui aimaient joindre l'utile à l'agréable alors, grâce à son stoïcisme, elle était devenu un défis. Au novice qui réussirait à lui donner du plaisir, il se verrait ordonner prêtre. Elle ne manquait donc jamais de prétendants. Ce n'était pas à son goût mais qu'y pouvait elle… Elle avait dit qu'elle ambitionnait une grossesse, pas un amant. C'était comme si elle devait faire des cessions de rattrapage pour toute ces occasions où elle s'était esquivée pour… faire autre chose que ça.

Que ferait elle après ? Le mâle s'était affaissé et de par son poids, la maintenait contre le drap du matelas. Irait elle au temple ou irait elle s'entrainer ? Elle sentait son souffle dans son cou. Mais avant, elle prendrait un bon bain chaud. Doucement, elle dégagea ses jambes, puis elle pivota. Le novice se laissa glisser, il savait qu'il ne fallait pas la forcer à rester, il y en a qui a eut des problèmes. Na'ri s'étira en baillant. Un bain puis une séance d'entrainement. Elle se sentait frustrée. De sa pile d'affaire, elle sortit un très vieux châle aux couleurs passées. Il l'avait tant de fois accompagné lors de ses après combat, lui et une bonne tasse de tisane. La prêtresse d'Isten avait commencé sa longue liste de critiques, les même que d'habitude. Na'ri ne l'écoutait déjà plus. Elle souriait au mélange d'herbes qui dansait dans l'eau chaude. Avant l'entrainement, avant le bain, après les suggestions d'améliorations, il y aurait l'inspection par la prêtresse de Natha.

Des pas s'approchaient dans le couloir. La Mère arrivait toujours à temps. Seulement quand la porte s'ouvrit, ce n'était pas la prêtresse habituelle. Qu'importe. Na'ri l'accueillit d'un grand sourire jusqu'à ce que la prêtresse de la Sulfureuse s'inclina respectueusement.

- Bel'la Ekmir… "

A son tour, la Grande Prêtresse de l'Infectieuse s'inclina. Des mèches de sa chevelure libre s'échappèrent et quand elle se redressa, elles voilèrent légèrement ses yeux de grenat. Pour seul tissus, elle portait sur ses épaules son châle élimé qui ne pouvait cacher ni la rondeur de sa poitrine, ni les zébrures des blessures de tout genre de son expérience sur le front. Comme seuls ornements, elle avait autour de ses hanches des rangées de perles et d'encens et des symboles divins : le soleil sous le sein gauche, le serpent et ombre enlacés sur le plexus solaire, le point entouré sur le ventre. Sous le sein droite, il ne restait qu'un vestige qu'une cicatrice brillante avait effacé.

- C'est un plaisir de faire votre rencontre Mère. Je vous en prie." D'un geste Na'ri indiqua un fauteuil à son homologue. " Puis-je vous offrir une tasse de tisane ? "

A présent les feuilles et autres végétaux avaient libéré leurs effets. Na'ri servit une première tasse qu'elle sortit avec sa sœur de ses affaires ainsi qu'une boite de biscuits. Dans son dos, la prêtresse d'Isten, qui ne s'était toujours pas assise, faisait des gros yeux tout en secouant énergiquement la tête.

- Il est inutile de rajouter du protocole au protocole. Si tu tiens à m'attendre propose soins et bénédictions à toutes les prêtresses qui le souhaite. Je te fais confiance. " La jeune prêtresse qui avait d'office suivit sa supérieur pour ne pas la laisser se promener seule en ville s'inclina profondément avec un sourire sincère, quoi que tendu. Elle sembla hésité un instant avant de se rappeler qu'il ne lui revenait pas de reprendre une Grande-Prêtresse sur son interprétation des usages et disparue dans le couloir au bras de ceux qui avaient conduit la dame en rouge à destination.

Rapidement introduite, elle salua d'un mouvement de tête et d'un sourire badin la prêtresse qui se trouvait dans la chambre ainsi que le jeune homme et la... patiente ? collaboratrice ? fervente ? Elle n'était trop sûre de la façon dont il fallait voir tout cela et c'était une partie de ce qui l'avait poussée à venir en personne d'ailleurs.

- Bel'la Na'ri. Pardonnez cette intrusion, j'espère que je n'arrive pas trop tôt. " sous les couvert d'une demande polie, la phrase paisible n'avait pourtant pas les accents d'une question. Puis, répondant à l'invitation, elle entra franchement dans la chambre sans autre cérémonie. " Avec plaisir. A quoi est-elle ? Je ne reconnais pas l'odeur. "

Une main sur l'accoudoir, elle s'installa dans le fauteuil sans s'y laisser tomber, ses jambes la portant doucement jusqu'à l'assise.

- Pouvez-vous nous laisser, jeune homme ? Je suis certaine que vous n'aurez nul mal à trouver une couche ou retrouver votre souffle dans les salles voisines. " La suite ne concernait en rien le reproducteur putatif... Quoi que la prêtresse de Natha note en passant que certains de ses traits n'étaient pas optimums. Certes, il était bel homme mais trop jeune pour être prêtre. Un novice, donc. Et ses yeux étaient pâlots, tirant sur un orange rosé assez peu canonique. " Dites-moi, ma Soeur. " Continua-t-elle en s'adressant cette fois à la prêtresse qui faisait les gros yeux à la grande prêtresse qu'on lui avait confié. Depuis combien de temps était-elle entre leurs pattes pour que les sulfureux aient pris de telles habitudes ? " Pourriez-vous prévenir votre supérieur que je l'invite personnellement à une soirée pour fêter son retour lorsqu'elle sera revenue d'Elda ? Et tant que j'y pense, je suis venue avec une consœur. N'hésitez pas à la consulter ou à lui faire part de tout ce que vous pourriez trouver utile, elle me fera un compte rendu exhaustif. Pour l'heure, j'aimerais m'entretenir à huis clos avec ma consœur fidèle à Kiran. "

Se renfonçant dans son siège, elle échangea encore quelques mots de circonstance avec les deux personnages qu'elle venait de congédier et posa ses mains autour de la tasse si gentiment offerte pour y réchauffer ses doigts. La porte se referma dans un chuintement feutré.

- J'espère que vous me pardonnerez d'avoir mis si longtemps à venir me présenter, Bel'la. Une rencontre officielle aurait du avoir lieu beaucoup plus tôt, j'en ai conscience et je vous présente toutes mes excuses. N'y voyez pas un manque de respect de ma part, mes travaux ont simplement été aussi chronophages que ceux qui vous tenaient loin des sphères publiques en début de mois. " Un profond hochement de tête vint ponctuer son préambule. Beaucoup de rumeurs courraient sur la kiranite, mais démêler le vrai du faux était un sport particulièrement ardu. " Avec tous les changements en cours, je n'ai appris qu'aujourd'hui l'existence de votre accord avec la Haute-Mère. Croyez bien que si je l'avais su plus tôt, je me serais personnellement occupée de votre affaire. A partir d'aujourd'hui, je suis à votre entière disposition sur ce sujet. " Elle passa une main dans ses courts cheveux noirs souriant à la femme plus qu'à moitié nue. " Par contre, je n'ai pas eu le temps de recueillir toutes les informations de votre suivi. Il va falloir m'aider un peu... Mais peut-être seriez-vous plus à votre aise pour discuter une fois baignée ? A moins que vous n'attendiez d'autres prétendants ? "

Si elle ne savait pas tout, les rumeurs sur les difficultés que donnait l'ancienne militaire à la gente d'Isten n'étaient un secret ni ici, ni au temple de la Mère. Dieux qu'il y allait avoir du changement dans l'air.

Deux grandes prêtresses dans la même pièce. Deux et une prêtresse avec son novice étaient de trop. Seulement à force de voir, tenter de conseiller l'une, elle ne l'avait plus vue comme une grande prêtresse. Tandis que la Keranithe expliquait les simples de sa tisane, choisis sciemment pour leur effet tonifiant et non pour leur goût, l'Istanithe ramassa son novice. Il n'eut pas le temps de récupérer ses affaires que déjà, ils passèrent le pas de la porte avec, en guise d'aurevoir le souhait d'avoir bien du plaisir. Surtout pour Ekmir, parce que l'autre, c'était peine perdue.

Na'ri était restée debout, sa tasse chaude dans les mains à côté du brasero. Elle avait noté les précautions de la Mère pour s'assoir. Était-ce le temps ? Les articulations ? Un soucis plus ponctuel ? Maintenant qu'elle avait rejoint la vie civile, Na'ri se dit qu'elle allait devoir réétudier les maux moins sanglants et moins urgents de ses compatriotes.

Le silence n'eut pas le temps de s'installer que déjà la Mère avait renouvelé ses présentations. Na'ri ne savait plus trop. Était-ce un reproche ? Une réprimande ? Ou un simple fait ? Indisposée par la différence de taille, Na'ri s'assit sur le côté sur les coussins moelleux, les jambes repliées.

" C'est moi qui m'excuse. J'ai oublié mes obligations envers les autres cultes. Merci de ce rappel Bel'la."

Il n'y avait aucune animosité dans sa voix. Pour la première fois depuis fort longtemps, elle se sentit très jeune et complètement inexpérimentée. Il y avait aussi de la culpabilité. En effet, encore une fois, elle avait était égocentrique. Qu'avait elle cherché à faire ? A impressionner un Karliik ? Elle-même ?

Dans le nouveau discourt de la Mère, une information sortit la sombre de son introspection. Elle ne pu chasser à temps l'ombre qui traversa son visage. A présent, son sourire était moins franc, mais par contre ses oreilles étaient en alerte. Si Ekmir avait souhaité obtenir toute l'attention de Na'ri, elle avait réussi. La main froide de l'angoisse s'était saisit de son cœur. Que pouvait bien t'il se passer dans le ventre du Vatna pour qu'une Grande Prêtresse s'enquière personnellement de l'état de son ventre ?

D'une traite, la sombre bu sa tasse. Pour une fois, l'acidité du breuvage lui paraissait plus douce.

" Je suis à votre disposition. A moins que vous ne préférez vous éloigner des oreilles des Ambitieux. "

Na'ri ne se faisait pas d'illusions. Elle connaissait déjà les rumeurs qui circulaient à son sujet. Put'Xinel avait pris un malin plaisir à les lui dire. La visite de la Grande Prêtresse de Natha était une excellente occasion pour grapiller des informations à offrir à Tesso.

Na'ri se repositionna sur ses coussins. Elle donnait l'impression d'être prête à bondir.

" Cependant, il n'y a pas grand-chose à dire. Je n'ai jamais été gestante. Il y a deux cents ans, j'ai bien essayé mais sans résultats. Une de vos consœurs m'avait dit à l'époque que j'avais pu froisser Natha en étant trop exigeante. Des enfants, je n'ai qu'une connaissance théorique et encore pas ceux en bas âge. Concernant les accouchements, j'ai un savoir suffisant pour maintenir en vie une mère en plein travail, de l'aider malgré un environnement peu propice."

Le souvenir de l'accouchement de Viconia revient à sa mémoire. Contrairement à Patience, cet accouchement avait été pour le moins effectué dans des conditions exceptionnelles, même pour des Eldéens.

Laissant la la question des obligations de politesse cultuelle, Ekmir clôtura le chapitre d'un simple mouvement de tête au remerciement de l'ancienne médecin de guerre et - de ce que disaient certains chapelains - amante du Karliik Glenn actuel. Elle trempa ses lèvres dans la tisane et ses oreilles vibrèrent sous l'effet du goût acide. Tout cela n'était réellement pas grave et la voir dans de bonnes dispositions suffisait amplement à la femme en rouge.

- Inutile de vous faire faire l'aller-retours jusqu'à mon temple. Les membres du clergé de la Sulfureuse et ceux de la Mère sont presque aussi liés que ceux des Jumelles. " sourit-elle en reposant mine de rien la tasse chaude. Autant dire que les uns en savaient aussi long que les autres. Elle nota bien le soudain empressement de cette future mère. Tout son langage corporel sous-entendait qu'elle accordait toute son attention et plus encore à son interlocutrice. Elle semblait plus impliquée que ce qu'on lui avait rapporter.

... Mais le résultat du compte rendu lapidaire fit un peu retomber les folles espérances d'Ekmir. Mentalement, elle calcula rapidement l'âge minimum de son vis à vis en se basant sur les campagnes auxquelles elle était réputée avoir participé. Quatre ou Cinq siècles ? Aucun enfant... La Haute-Mère devait être au courant, elle n'aurait pas accepter un accord dans d'autres cas, ce qui expliquait la longueur de la lettre et le flou laissé sur certains points. Aucun enfant et pourtant, elle avait fait une tentative suffisamment sérieuse pour demander conseil. Ekmir porta la main à sa hanche, mais ses doigts se refermèrent sur du vide. Où était son cher journal de suivi lorsqu'elle en avait besoin ?!

Tout en se promettant de tout retranscrire dès son retour, elle observa son vis à vis avec sérieux.

-Je préfère vous parler franchement. Pour certaines femmes revenues du front, les cicatrices ne sont pas seulement externes. Si vous le voulez-bien, j'aimerai que vous me laissiez vérifier l'état de votre corps à travers l'Art que nous dévouons à la Mère, mais avant ça, j'ai besoin que vous répondiez avec franchise à quelques questions. " La femme en rouge s'adoucit de nouveau et s'avança tout au bord de son fauteuil pour que sa voix soit facilement audible sans porter loin d'elles.

- Oui bien sûr. " Les blessures, c'était son domaine. La prêtresse se mouva vers la Mère sans se relever.  Toujours assise sur des coussins au sol, Na'ri, au pied de la Mère, posa le bras sur les genoux pour qu'elle puisse exercer son Art. Peut être que c'était inutile, mais la soignante ne s'était pas posée la question. Une main couvrit son bras d'un geste fraternel, mais aucun flux magique ne se fit sentir, même vaguement.

" N'ayez crainte, tout ceci restera strictement entre nous, mais j'ai besoin de la vérité pour que nous puissions avancer. Bien. Pour commencer, avez-vous déjà été blessée à l'abdomen ? Qu'il s'agisse de coups violents ou de plaies ouvertes. "

- Oui. Comment en tant de temps sur les fronts éviter d'être blessée là. D'un geste, elle remonta de sa main de libre sa poitrine pour regarder les cicatrices visibles. Bien qu'elle soit de profil pour celle assise, Ekmir pu également les voir.
" Une ou deux perforations, peut être un écrasement, des brulures légères, mais majoritairement c'est des coupures. Je suis désolée, ce n'est pas mes cicatrices les plus résentes. Mais..." Hésitente, la sombre soigante baissa encore plus la voix. A quel point cela se savait-il ici ? Mais pouvait elle vraiment le cacher ? Et... était-ce important de le dire ? " Pour ce qui concerne les blessures, non physique, je vous invite a échangé avec le Grand Prêtre Reibe Gre'as'anto, mon medecin. " Au moins, si c'était vraiment important, la Grande Pretresse pourra le demander. Après, elle n'était pas certaine que Reibe lui réponde. Ekmir acquiesça, répétat le nom pour être certaine de l'avoir bien compris avant de ressituer quelques birdes caractéristiques de sa carrière pour s'assurer qu'elle voyait bien de qui il s'agissait. Elle n'y manquerait pas.
- Etes-vous plus attirée par les femmes que par les hommes ? " continua-t-elle dans un registre plus personnel.
Na'ri ne répondit pas tout de suite. C'était une question qu'elle ne s'était jamais posée.
Je ne me sens pas plus attirrée par un genre que par un autre. Mais c'est surtout les personnes. La Grande Prêtresse acquiesça sans un mot, la laissant développer comme elle l'entendait. Elle avait surement entendu les conclusions des prêtres d'Isten. Pour eux, elle était frigide. Alors, autant mettre les deux pieds dans le plats.

"En ce qui concerne le plaisir, je préfère le donner. Le mien c'est souvent, une question subsidière, pas parce que je ne peux pas l'avoir, ce qui est faux. Mais c'est juste parce que... Comment dire... " Les lèvres noire se tordirent. " Actuellement, le premier est douloureux, et à partir du troisième je ne sens plus rien. Il y a des échauffements, parce que je suis sèche. Les novices ne sont pas méchants, certains sont même doux, mais... je ne les connais pas. Alors, oui, je ne les désire pas. Par contre l'enfant, oui. Même s'il est impossible de le connaitre avant." Elle étouffa un soupire. C'était bien paradoxale, ce qu'elle disait. Mais on ne désirait pas un enfant comme on désirait un amant. C'était bien plus profond, plus fort. Peut être qu'elle le désirait trop cet enfant, au point de ne plus désirer grand monde. Mais elle savait que ce qui lui était le plus important pour elle, ce n'était pas tant porter un enfant, mais c'était de faire, voir, vivre avec son enfant. Le ventre qui lui avait donné naissance n'était pas important.

- Je comprends. " Assura la Mère toujours aussi paisible.

Bien que l'aveux de sa consœur ne soit pas des plus ordinaires, elle avait vu toutes sortes de femme désirer une grossesse pour toutes sortes de raison et toutes avaient leurs propres perceptions des choses. Des plus traditionnelles aux plus excentriques. Ce qu'elle ne s'attendait pas à entendre par contre, étant donné le contenu de la lettre de sa supérieur, c'était le désir d'un enfant. Elle en parlait déjà comme le sien. Comme si elle allait le connaitre et l'élever. Rien d'aberrant pour une femme de son âge qui n'avait jamais enfanté, mais compte tenu du marché… Il faudrait qu'elle y réfléchisse sérieusement.

- Les circonstances de cette grossesses seront certes particulières, mais le fait que vous désiriez donner la vie ou connaitre la joie de transmettre, ne doit pas vous faire oublier celle que vous êtes. " Elle laissa couler une seconde de réflexion, sa respiration gonflant à intervalle régulier le cercle de sang sur son ventre. " Vous savez, même pour celles d'entre nous qui sont tout particulièrement bénies par Natha, un enfant ne vient presque jamais avant dix ou vingt ans. Moi-même, je n'ai eu qu'une fille depuis le début de ce Cycle. Je suis bien sûre heureuse de savoir quel désir sincère vous avez d'être mère, mais ce désir pourrait vous consumer encore pendant plusieurs décennies, et même plus si cette première grossesse est voué au culte. Trouver un équilibre est important. C'est en vous réalisant en tant que personne que vous donnerez le plus à l'être qui grandira en vous. Si cela peut vous aider à mieux appréhender le sujet et à vous détendre, bien des enfants demandent de l'attention au sein de notre temple. Vous pourriez venir vous occuper d'eux de temps à autre ou en prendre un à votre charge. Passez à l'occasion et nous en reparlerons. " Pour une raison mystérieuse, elle avait déjà vu des femmes avoir toutes les peines du monde à donner naissance pour la première fois, mais qui, une fois un bébé dans les bras, se retrouvaient fécondes. Les mysthères de Natha ne se questionnaient pas. " Et en attendant, souvenez-vous que lorsqu'un enfant est conçu sans plaisir pour la mère, il est bien souvent boudé par Isten, dans ses ambitions comme dans ses plaisirs. Alors faisons en sorte que tout se passe pour le mieux pour vous et pour lui, non ? "

La soigante avait écouté la sagesse de la Mère. Et même après qu'elle se soit tu. Dans l'alcôve douillette et feutrée, le calme régnait en maitre. En apparence. Les traits de la sombre s'était détendus au point de n'avoir qu'un masque. A nouveau, elle avait pivoté et c'est en plongeant son regard de grenat dans les prunelles de rubis.
" Merci pour vos encouragement Bel'la... Que ce passe t'il au Puy ? " Bien que ferme, la voix de la prêtresse trahissait son inquiétude qui n'échappe pas à son vis à vis. Pourtant, Ekmir n'avait pas l'air de comprendre de quoi il était question.
- Que voulez-vous dire ?
- Mon espérence de vie est d'un peu moins de cinquante ans. Je ne cherche plus à avoir un enfant, juste pour être mère. Et dans trente ans, ce sera trop tard. C'est pour cela que depuis trois énnéades, je suis ici tout les jours pairs. J'entends le fait qu'il faille donner le temps au temps. Mais parmis tout les enfants qui sont sous la bonne garde de Natha, il y en a un qui porte mon nom. Et je ferais donc tout ce qu'il y a en mon pouvoir pour qu'il vive, pleinement et non pas avec un marteau ou une dague au dessus de sa tête. "

L'accord qu'elle avait passé avec la Haute Prêtresse, c'était la première fois qu'elle en parlait certes à demi-mots à un autre membre du culte de Natha. Et la Grande Prêtresse n'était surement pas la première venue, pour avoir été envoyé à Sol'Dorn. Alors elle devait lui faire confiance. Au moins pour cela.

- C'est pour  cela que l'on est ici. Parce qu'il est sous la garde de Natha, protéger de la politique. Normalement. " Elle déglutit pour continuer à se montrer calme. " Que ce passe t'il au Puy que je ne sache pas, pour que je doive m'attacher à un aute enfant avec le luxe d'attendre ? " Sa voix n'était plus qu'un souffle. Elle avait peur... peur de perdre.

Le visage d'Ekmir passa par de l'incompréhension la plus totale à une illumination rapidement patinée de la plus pure sympathie. Elle se laissa glisser à bas du fauteuil pour être au même niveau que sa consœur.

- J'ai reçu ce matin une lettre de la Haute Prêtresse me demandant de vos nouvelles. Elle me disait seulement que vous aviez un accord scellé par votre promesse d'offrir une grossesse à la Mère, je n'étais pas au fait de son objet. " La prêtresse préférait revenir aux faits car elle en savait trop peu pour extrapoler sans risquer de donner de mauvaises informations. " Elle ajoutait - et je reprends ses mots - que ' les choses sont en ordre de notre côté '. Par conséquent, elle m'a expressément demandé de veiller à ce que tout se passe bien pour vous en ajoutant que votre cas demandait toute ma considération, sans me donner plus de détails. J'ai pour mission de faire en sorte que l'accord que vous avez passé nous soit profitable à tous. "

Les suivants de Tesso apprenaient aux eldéens comment jouer avec les mots et les différentes significations qu'ils pouvaient prendre, mais il apprenait aussi quand le faire et quand cela se révélait contre-productif. Ekmir avait beau avoir passé de nombreuses années à servir directement sa supérieure, elle ne pouvait pas se targuer de la comprendre. La Haute-Mère circulait discrètement dans les plus hautes sphères d'Elda et le nombre incroyablement bas de rumeur la concernant par rapport au nombre de personne qu'elle connaissait était tout bonnement inquiétant. Pourtant ses actes n'avaient jamais dérogés à un point qu'Ekmir avait toujours admiré chez elle.

- Je ne peux pas prétendre savoir pourquoi la Haute-Mère agit comme elle le fait. Peut-être craignait-elle que certaines personnes interceptent ses courriers ou les votres. Mais je la connais suffisamment pour vous dire que rien ne compte plus pour elle que le futur de notre peuple béni des dieux. Si elle a accepté de protéger votre enfant, il ne lui arrivera rien. Si vous le souhaitez je peux demander plus de détails à la Haute-Mère avec mon prochain rapport, je ne vois aucune raison de ne pas vous tenir informer.

" Je vous remercie, beaucoup. Ce ne sera pas necessaire, je passerai au temple la prochaine fois. Merci. " Les oreilles de la sombre étaient baissées mais elles étaient tournée autant que possible vers la porte. La main d'Ekmir se posa sur le vieux chale qui protégait ses épaules en une attention silencieuse. "Merci."

Na'ri baissa son visage pour regarder ses mains. Sa tête lui tournait légèrement. Bien entendu, elle était toujours un peu inquiète. Cependant, elle avait comme espoir de pouvoir se reposer sur la Grande Prêtresse en cas d'urgence.

" C'est donc cela être mère ? A chercher constament un équilibre entre ses souhaits, ses besoins et la necessité ? " Le visage d'un jeune albinos revient à ses yeux. " Et de faire face aux reproches de l'enfant... Préparer un avenir est une tâche bien ingrate, et pourtant si belle et enrichissante. "
- Et c'est aussi le pouvoir des enfants de transformer notre avenir. " En tant que personne et en tant que peuple . La prêtresse en était convaincue. Avec douceur, elle ajouta encore. " Vous n'aurez pas à faire face qu'à ses reproches. Le respect et l'affection font plus souvent leur chemin que ce que vous pensez… Bien que je vous l'accorde, ce petits monstres sont près à nous faire marcher sur la tête. " La sombre redressa son visage et dans un léger sourire poursuivit. Je viendrai vous retrouvez dans votre temple. Que puis-je faire d'autre pour vous ? " A nouveau, la Grande Prêtresse avait toute l'attention de sa consoeur.

La femme aux courts cheveux noirs regarda alentour mais l'eau était hors de vue. Seule l'inomable tisane restait à porté de main et il était hors de question qu'elle y trempe à nouveau les lèvres. La Kiranite n'avait pas l'air tout à fait dans son assiette, aussi hésita-t-elle un moment, mais puisqu'elle en avait l'occasion, autant faire les choses dans le bon ordre. Elle passa une main dans ses cheveux et repris son court intérogatoire.

- J'ai encore quelques questions. Mon but est de vous trouver des personnes qui correspondront au mieux à vos attentes pour faciliter le processus. Vous disiez tout à l'heure préférer avoir un certain lien avec vos partenaires. Dois-je comprendre que vous êtes monandre ou cela ne vous gêne pas d'avoir plusieurs partenaires du moment que vous avez un lien émotionnel avec chacun d'entre eux ?

- Je n'ai rien contre à ce que le ou la partenaire en ait d'autres que moi. Je ne suis pas exclusive. Le plus important pour moi est qu'il ait du plaisir. En regardant le visage de la Mère, la sombre se dit qu'elle avait dû oublié un paramètre dans son évalution. "Vous parlez de mon plaisir ? et bien... Oui, je crois que je préfère avec qu'un seul. "

Cette femme était décidément des plus étranges… Ou plutôt, elle avait ce petit grain d'excentricité tristounette qu'Ekmir avait du mal à cerner. Même si elle ne cachait pas l'incompréhension profonde qu'elle ressentait à certaines des réponses obtenues, elle s'abstint pourtant du moindre commentaire, tout comme elle l'avait fait plus tôt.

- Et bien puisque nous en parlons. Vous aimez utiliser des objets de plaisir ? des lotions peut-être ?
- Les cordes. Mais pas pour moi. Pour une fois c'était facile de répondre à la question.
- Oh ? Vous n'avez jamais essayé vous-même ? "
Si, mais c'était il y a longtemps. Cela demande une grande confiance en son partenaire. Certaine portée permet à des blessés de participer à des orgies après des combats. Ainsi c'est aussi festif pour eux. Pour une fois le regard de la prêtresse était malicieux.

Ekmir le lui retourna avec plaisir. Tout espoir n'était peut-être pas perdu… Même s'il fallait admettre qu'il était mince.

- Je n'ai pas eu la chance de participer à des célébrations dans l'ivresse d'une victoire - à l'occasion d'une ordalie tout au plus - mais ça doit être quelque chose. Vous deviez vous y amuser.
Se savoir vivant. Défaite ou réussite, il y a toujours des moments de bravoure à raconter. Surement qu'il y en aura une, quand la guerre sera finie. Pour les vivants. " La sombre se souvint que les questions posées étaient pour l'aider, elle. Alors, elle repris. "Mais je préfère quand c'est plus au calme. J'aime plus trop ces évènements... ils finissent par ressembler à un champ de bataille. Et les coussins sont plus doux pour le repos.
- Je peux comprendre. " la femme en rouge acquiesça d'un air entendu. De la douceur, de l'attention et un unique partenaire. Cela se précisait. " Personnellement je préfère un peu de diversité, mais me confier aux mains attentives de quelqu'un qui me connait bien reste un incontournable. " Elle réfléchi un instant avant d'ajouter. " Vous aimez les massages ? "
Oui ! Beau... " A l'instant près, Ekmir sourit de toute ses dents, enchantée. Les joues de la sombres rosirent. " J'ai conscience que cela prenne plus de temps. Mais si le faire moins souvent permet plus d'efficacité, je m'en remets à votre sagesse."
- J'espère bien ! Il faut bien que mon expérience m'offre quelques avantages sur la femme de terrain que vous êtes. " osa-t-elle taquiner sa consœur qui lui offrit un large sourire. " En tout cas, vous voyez, on va bien fini par trouver l'art et la manière qui vous conviennent. " Regonflé par cette première victoire, la prêtresse rouge se redressa un peu, s'appuyant plus correctement contre le fauteuil. " Voyons, voyons… est-ce que vous appréciez les aphrodisiaques et autres drogues récréatives ? Que l'action soient physiques ou juste désinhibante. "

Voulez vous vous rasseoir ? S'inquiéta la soignante. Elle était prête à aider Ekmir à se relever si elle le désirait mais elle lui répondit par la négative. " Non, pas trop... J'ai déjà testé récemment un excès de darnab et... cela n'a pas vraiment exacerbé mes envies de ce côté là. Mais plus celle de fuir. " Ses souvenirs étaient un peu flous et elle savait qu'elle mentait. Mais c'était plus par le manque d'envie de se souvenir vraiment distinctement des évènements que de les affronter.

- Ah. " Raté. La fuite n'était pas vraiment l'effet escompté... Mais vu le novice qu'elle avait du sortir de cette pièce, rien d'étonnant. Elle retombait sur une mauvaise voie. Elle aurait pu insister mais étant donné ce qu'elle savait déjà, elle suspectait que l'expérimentation et la pratique donneraient plus de résultats à ce stade que de plus amples questions sur les habitudes intimes et les positions préférées de l'apprentie du jour.  Elle pinça les lèvres en s'accordant encore quelques instants de réflexion avant que son visage ne s'illumine à nouveau. Il y avait cette fois dans son œil un reflet de malice . " Dans ce cas, parlons de votre type d'homme. Laissez courir votre imagination. Si vous pouviez coucher avec n'importe quel mâle de notre peuple - peu importe son statut ou sa disponibilité - votre préférence irait au quel ? "
Mon fantasme ? Ce serait celui des bruits qui court. mais fantasmé. avait elle rajouté intérieurement. A quel point la Mère se tenait elle à l'écart des ragots de l'armée ? la Kiranithe était bien curieuse de le savoir et la réponse que lui servit Ekmir, sourcils froncés, avait de quoi la laisser perplexe.
- Le quel ? Le Karliik'Glenn, le joueur de flute de Leetha ou le Grand prêtre S'arg ? "

Un instant, elle fut bouche bée. S'arg ?! Mais d'où venait cette rumeur. En même temps, elle avait prévenu que ce qu'entendait les Ambitieux finissait dans l'oreille des prêtresses rouges. Mais l'idée d'imaginer S'arg était tellement saugrenue qu'elle en rit.
" Pour... Pour... Pourquoi pas un mélange des... des... des trois ! " réussit elle à articuler sous l'œil surpris quoi qu'amusé d'Ekmir. C'était finit. Elle avait un sombre dans tout ce que ces trois mâles avaient de caricatural. Le résultat était... surprenant ? Grotesque ? en tout cas, il était bien risible.
- En tout cas ça a l'air de vous inspirer.  C'est l'idée de voir notre Karliik jouer de la flute avec l'air pincé de votre homologue ?
- Par... Par Tesso. Non... Ce n'est pas possible." Petit à petit, elle reprenait enfin le contrôle de sa respiration. "Veuillez m'excuser. Oubliez le Karliik'Glenn, les yeux jaunes, les trop rapides, et les peureux. Et les trop jeunes, les sadiques. Et... je pense que c'est tout. "
- Un homme fort de son sang, sûr de son corps, expérimenté et réellement dévolu au plaisir... On peut tomber plus mal. " Un sourire plein de faucettes répondit à la sombre qui respirait toujours un peu par à-coups. " Bel'la a meilleur goût que ce que les rumeurs affirment. "

***

Les discussions continuèrent encore et encore. Quand Na'ri sortit enfin du temple, elle souriait. Aux passants, aux étoiles et aux lunes.
Dans son coeur, il y avait encore milles et unes des inquiétudes, et pourtant les pas de la Grande Prêtresse étaient légers. Pour la première fois depuis des siècles, elle ne sentait plus le poids des morts dans son dos. Pour la première fois depuis six cent ans, elle s'apprêtait à faire une chose nouvelle : vivre pour elle.

Trouver un équilibre est important. C'est en vous réalisant en tant que personne que vous donnerez le plus à l'être qui grandira Lui avait dit La Mère.

Demain.

Au milieu de la rue, ses pas s'arrêtèrent. Elle lèva la tête et sourit. Dans son croissant, la lune semblait lui rendre.