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 Après la pluie, la tempête [ Adonia ]

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Heracle Ypsilantis
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MessageSujet: Après la pluie, la tempête [ Adonia ]   Après la pluie, la tempête [ Adonia ] I_icon_minitimeMar 12 Mar 2024 - 15:07




Après la pluie, la tempête [ Adonia ] Eekz





Premier jour de la seconde ennéade de Bàrkios, second mois de l'Automne
An 21 du XIe Cycle



Dressé en bordure de la Mer, à l’extrême ouest de la citée libre, le Phare Céladon dominait les eaux de par sa stature et son imposante architecture. En qualité de véritable castel parmi les autres bâtiments des Soieries, ce dernier offrait en guise de présent les vues les plus stupéfiantes de Thaar.  À l’occident, se trouvait une mer à perte de vue, sur laquelle pouvait-on se laisser hypnotiser par la houle tantôt mielleuse, tantôt impétueuse. Avant que les lieux n’en viennent à être embaumer de trop par les mets des maîtres queux, un air salin y rôdait et régnait en maître, issu d’une flotte qui cherchait sans relâche à se fracasser contre le roc sur lequel reposait l’assise du castel. À l’orient, du côté levant, une tourelle était annexée à la maçonnerie du palais, dans laquelle il était possible d’y conquérir les maintes marches. Là-haut, juché à pareille hauteur que certains oiselets, on pouvait y admirer la toute suprématie de Thaar. Ses bâtiments démesurés, cherchant toujours et encore plus à atteindre les cumulus de par leur grandiloquente opulence. Cette population hétéroclite, grouillante, vive et bouillonnante de vie. Cette terre de possibilité, capable de donner autant le meilleur que le pire d’elle-même à qui le voulait bien. Non, à avoir souventefois contemplé cet époustouflant tableau, Heracle en était sûr ; il ne pouvait subsister en ce monde d’âme capable de contester pareille merveille.

--

Les minutes, puis les heures, se massèrent et s’écoulèrent, jusqu’à en faire s’égrainer dans le sablier du temps la durée d’une ennéade. Un sablier d’ailleurs, duquel on pouvait imaginer l’étranglement étrangement évasé. La temporalité sembla avoir été pour le nouveau monarque Ypsilantis étrangement altérée, car d’un claquement de doigt, d’un battement de paupière, d’une solennelle respiration, il se retrouva là, neuf jour après le décès de son éminente parentèle. Endeuillé, tourmenté, empressé, tempêteur, terrifié même ; voilà bien de quoi était faite cette exécrable bouillabaisse dans laquelle pataugeait l’Ypsilantis. Il aurait volontiers passé sous table afin de s’esquiver à sédition émotionnelle. La vilaine vérité la voilà ; il se noyait dans cet amalgame d’émotion et ne trouvait pour air que seul le réconfort éphémère de la bouteille et de la chaleur des femmes.

De maints démons prirent pour refuge l’esprit d’Heracle, monopolisant l’entièreté de ses songes les plus profonds. Il s’imaginât prodiguer les pires ignominies aux débiteurs du meurtre de ses parents, qui d’ailleurs étaient toujours engoncés dans un anonymat dès plus total. Il songeât à tout ce qu’il pouvait mettre en branle afin d’enrayer la précarité de sa position nouvelle. Il gambergeât à propos de sa sœur, sur laquelle il devait désormais choir plus de responsabilités qu’elle n’en aurait jamais imaginé. Tout cela l’empêchait nuitamment de trouver la caresse de Morphée, se rabattant sur celles des plus luxueuses coureuses de remparts.

Cette vêprée eut tout en commun avec les dernières, à l’exception faite qu’elle s’était transcendée dans le stupre. Dans les tous nouveaux appartements du monarque Ypsilantis primait ce que l’on pourrait qualifier de foutoir de tous les diables. Accrochées ci et là étaient autant de défroques que pourraient en revêtir une dizaine de personnes. Des couverts dont l’épaisseur douteuse de la crasse laissait dans les airs des relents de boustifaille de la veille couvraient le mobilier. Et que dire des boutanches, dont le contenu fût évidemment ponctionné ? Elles servaient désormais de décoration, reposées sagement en tout endroits et même sur le sol, dont la vue rubéfiée de ce dernier laissait présager le gaspille notoire de tout ce vin. Du reste, il ne semblait plus guère vivre âme qui vaille en ces lieux de bacchanale, à l’exception faite de celles qui sommeillaient encore dans la vaste couche de l’Espadon de nacre. Deux femmes, en l’occurrence, y semblaient pioncer à poings fermés en compagnie de l’Ypsilantis. L’une d’elle avait passé son allonge autour de son poitrail et lui servait à demi de couverture, la jambe entrelacée entre par-dessus la sienne. L’autre, quant à elle, lui faisait dos et s’était enquise d’un brin de chaleur en arrimant autant son grand dorsal contre son amant que sa croupe.

Sa concupiscence maintenant assouvie, il viendrait tôt, le retour indésirable de ses maux les plus illustres.




Dernière édition par Heracle Ypsilantis le Jeu 21 Mar 2024 - 3:54, édité 5 fois
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MessageSujet: Re: Après la pluie, la tempête [ Adonia ]   Après la pluie, la tempête [ Adonia ] I_icon_minitimeMar 12 Mar 2024 - 18:48


Le silence est aussi contagieux qu’une sournoise peste débarquant d’un port. Il se répand, se faufile et se glisse dans les moindres interstices. Et lorsqu’il touche sa cible, qu’il la pénètre telle une dague transperçant un cœur, il est déjà trop tard. Ce silence est d’or lorsqu’il repose sur la peur et la peine. Il laisse pousser, en lui, les germes d’une haine, mais il est encore trop tôt. Beaucoup trop tôt. Il faut encore l’affronter et faire corps avec lui. Il faut l’épouser, l’accepter. Il est si assourdissant que les pensées, sombres et tempêtueuses, s’amoncellent. Il n’y a déjà presque plus de lumière, et maintenant c’est le bruit. Le bruit de la vie. Il n’y en a plus. Celle-ci n’est plus dans cette demeure répondant au doux nom de Phare Céladon ; un titre trouvé par un maître, un capitaine, un homme, un père, dont le corps n’est désormais qu’un tas de poussières. La vie s’est éclipsée en préférant laisser la place à la mort, donnant ainsi à Tyra la permission de marquer cette fastueuse bâtisse de son sceau. Elle s’est invitée et n’a presque rien laissé, hormis deux enfants que le destin a privé de parents. Adonia tend l’oreille. Elle attend, patiemment, espérant que la voix de sa mère résonne à nouveau ou que le rire de son père réchauffe encore son cœur. Elle l’aimerait, mais l’odieux silence recouvre toujours ses droits. Chaque pièce résonne désormais de leur absence et chaque coin rappelle leur présence. Les odeurs n’ont pas encore disparues, elle y a veillé en interdisant aux serviteurs d’allumer les encens. Elle s’est jetée contre eux, comme une lionne, prête à mordre. Il lui a fallu crier, hurler, menacer pour être écoutée, obéie.
   « Sayyida, s’il vous plaît », entend-elle, à ses côtés.
   Il s’agit d’une servante, Sapideh, fidèle des plus fidèles, liée à sa famille depuis bien avant sa naissance. Il est impossible de distinguer les rides devant recouvrir son visage, mais elle n’en a pas besoin pour deviner le but recherché par ces quelques mots. Elle l’a entendu. La voix de la vieille dame a réussi à transpercer le silence. Elle n’ignore pas qu’elle doit être parmi les dernières à accomplir un tel exploit, mais c’est à son tour désormais de répondre et d’oser mettre un terme à sa catalepsie.
   «  Inutile, Sapideh, je n’ai pas faim, je ne mangerai pas.
   — Mais, Sayyida, vous n’allez bientôt plus pouvoir vous lever et même… marcher. Voulez-vous que je fasse appeler le magistère, Kaelthar ? Peut-être qu’il vous…
   — Ne te donne pas cette peine, Sapideh et laisse-moi seule. Tu as sans-doute bien mieux à faire que de me tenir la cuillère comme lorsque j’étais encore enfant ».
   Sans même avoir besoin de le voir, elle devine le sourire crispé de la servante. Mais... il n’y a pas que ça, réalise-t-elle. Non, il y a toujours quelque chose en plus. Une chose devant être amenée avec précaution et parcimonie pour ne pas risquer d’alourdir l’incurable peine d’une jeune femme déjà touchée par la déveine. Faut-il craindre pis ? Ou doit-elle sortir les griffes, faire mal avant que celui-ci ne touche et détruise tout ?
   « Qu’y a-t-il de plus, Sapideh ? lui réclame-t-elle. Ta nervosité a trahi le ton de ta voix, alors qu’escomptes-tu repousser ainsi, si ce n’est les mots dont tu sembles tant chercher à me préserver ? Ne suis-je encore que cette fille à qui tu laissais croire que la vie était comme Les cents et une nuit ?
   — Sayyida, parvient-elle enfin à répondre. Vous n’êtes plus une enfant, quand bien même vous considérerai-je toujours avec la même affection que celle donnée durant ce temps. Mais non, sayyida, ravissante fleur aux yeux de perle. J’aimais vos parents et continuerai de vous aimer, vous, ainsi que votre frère Heracle. J’ai juré de prendre soin de vous et cela fut sans nul doute la plus belle raison de vivre ; mais, sayyida, je me dois, aujourd’hui, de vous parler comme la maîtresse que vous êtes. Et cela, comprenez, revient aussi à vous faire part des choses dont vos parents avaient à s’occuper.
   — Mais mon frère…
   — Votre frère, l’arrête-t-elle. Lui aussi semble touché par la même douleur, quand bien même cette dernière se dévoilerait sous une autre forme, plus bruyante et odorante, je jure…
   — Que veux-tu dire, par-là ?
   — Eh bien, sayyida, souffle-t-elle. Les affaires pressantes s’accumulent ; celles-là même, comprenez, qui nécessitent d’être réglées au plus preste…
   — J’ai toujours été tenue écartée des affaires familiales, Sapideh. Je… pensais que mon frère assurerait la continuité. Est-ce aussi grave que le timbre de ta voix paraît l’indiquer ?
   — Il serait peut-être utile de vous entretenir avec votre aîné. Il semble passer le plus clair de son temps à boire et… s’entretenir avec des femmes, murmure-t-elle en pesant ses prochains mots. Vos parents partis… Il n’y a désormais plus que vous, je crains, qui soyez capable de lui parler et dire les choses. Mais avant, sayyida, il vous serait sans-doute fort utile de recouvrer quelques forces en mangeant ce qu’il y a devant vous.
   — J’ai à faire avant, je crois, termine-t-elle, fermement. Non, je ne crois pas, j’en suis sûre ».
   Les martellements de sa canne s’abattant sur les pavés, ainsi que les bruits sporadiques de ses pas légers sont les seuls tintements parvenant à tromper le silence. L’allure est véloce, agile. Elle est encore ici chez elle, nouvelle maîtresse d’un phare prit par la tempête. Elle pourrait entendre les vagues s’abattre sur son passage. Elle sentirait presque le vent fouetter son visage couvert d’un voile aussi noir que les plumes d’un corbeau. Il est à l’image des autres habits qu’elle porte, de circonstance assurément. Mais cette voilure obscure, laissant à peine entrevoir les deux billes blanches dessous, n’est pas seulement là pour répondre à la convenance. Il est vrai, aussi, que depuis l’annonce de la nouvelle tragique, ses yeux l’ont à nouveau malmené, au point d’accentuer toutes les sources de lumière. Ignorant s’il s’agit d’une aggravation de son état ou d’une simple phase, l’obscurité s’est ostensiblement épaissit, à l’image de celle s’étant déjà emparée de son cœur.
   La porte menant aux appartements de son frère s’ouvre soudainement. Les fragrances de saleté se mêlent à celles de l’alcool et de toutes les autres caractérisant son aîné depuis qu’elle le connaît et vit à ses côtés.
   « Heracle ! l'apostrophe-t-elle en devinant seulement deux ou trois silhouettes reposant sur le lit. Heracle, m’entends-tu où dois-je encore répéter ton nom pour que ce dernier se fraie un chemin jusqu’à ton esprit encore engourdi ? Eh… dis à ces femmes partageant ta couche de quitter cette demeure, céans ! »

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MessageSujet: Re: Après la pluie, la tempête [ Adonia ]   Après la pluie, la tempête [ Adonia ] I_icon_minitimeVen 15 Mar 2024 - 3:48





« Quartier-maître! QUARTIER-MAÎTRE! Dût hurler le capitaine de sorte à ce que sa voix prenne le pas sur le barouf qui régnait à bord du navire. On vit dès lors sortir en toute hâte, d’entre tous les membres de l’équipage, un homme aux allures malcommodes ; pis encore que le capitaine qui venait tout juste de s’égosiller hargneusement.

« Capitaine? »

« La houle, quartier-maître! Je la sens gagner en amplitude et cela d'un fort empressement. Je vois certaines vagues assez matures pour qu’elles gagnent tôt le franc-bord. Faites matosser le pont dare-dare. Je veux deux hommes à l’inspection de la cambuse, puis deux autres aux dortoirs : veillez à ce que tout objet soit correctement arrimé. Il est à prévoir que le navire tosse à outrance dans les heures qui viendront. Que vos hommes soient parés, quartier-maître! » Et abrégeant aussi tôt la messe, le quartier-maître dégageât le pont et commença, à son tour maintenant, à vociférer chacune des directions qu’on lui avait adjurées.

Aux côtés du Capitaine, Heracle veillait et écoutait d’une oreille attentive. Ces directives, il aurait été à même de les prodiguer, mais se gardait bien de ne jamais revêtir les bottes du capitaine. Et puis, il se plaisait à avoir le beau rôle ; il pouvait observer, apprécier, sans jamais voir ses épaules appesanties par la moindre charge. Aujourd’hui, ils bourlinguaient contre les flots dans l’espoir de livrer en péninsule l’un des chargements les plus lucratifs de sa carrière. Le manifeste de leur embarcation en attestait le faste: des pleines malles de perles et nacres dont les charnières peinaient à se cadenasser, des bacs dont le renfoncement accueillait les plus rarissimes spécimens marins, puis, pour en terminer, une cassone dont le rutilant contenu en or suffisait d’une œillade à vous en ôter don de la vue.

« Les ondes n’ont rien de satinées, vous dîtes fort bien vrai, Capitaine. La mer ne se montre pas tendre, mais plutôt revêche à l’idée que l’on y navigue sereinement. Au moins avons-nous pour chance d’avoir à nos côtés un grand frais, capable de nous porter au-delà de ces imposantes lames. »

« Certes … » répondit le capitaine, dont l’esprit semblait voguer ailleurs, taraudé par quelques soucis dont il ne pouvait manifestement taire l’existence.

« Parlez franc et parlez promptement, capitaine. Vos lèvres closes jacassent plus encore que vos mandements de tantôt envers votre quartier-maître. »

« Cet itinéraire imposé que vous me fîtes emprunter … Pourquoi tant de risques, alors que nous pouvons passer plus au large de Nelen ? Vous n'êtes point ignare du danger que relève de l'approche de cette île. Le détour en vaudrait largement la peine. »


« Le temps, capitaine. Voilà ce qui nous manque. Les contraintes du temps me soumettent à plus de témérité. Et, qui plus est … Vous êtes tout comme moi, fort de connaissances à son sujet ; il n’osera pas s’approcher tant que nous ferons profil bas. »


« Peut-être …», affirma le capitaine, le visage vitriolé par l’agacement. Du reste, il ravala ses rebuffades en s’astreignant un mutisme dès plus total.

Le soleil avait déclin et s’était masqué derrière les lointains monts du Zagazorn, ne laissant pour lumière seule que celle des torchères du navire ainsi que le timide éclat de la lune. Les cumulus, épais et denses, s’étaient massés de sorte à rendre la navigation plus ingrate encore. Quant aux vagues et à l’état général de l’équipage qui commençait à souffrir d’éreintement, plus rien n’allait. À bâbord comme à tribord, de même qu’à l’horizon, les ténèbres commençaient à peindre le cœur des matelots d’une crainte saillante ; de celles dont l’expérience même ne saurait la chasser. Ils naviguaient à l’aveugle, seul contre une mer qui cherchait, à chacune des vagues, à engloutir le navire sous ses torrents enragés. Alors, les sens engourdis par la flotte glaciale, détrempant autant pont que défroques des matelots, la frayeur de l’équipage se cristallisa pour de bon. Tous, à l’unisson, se cramponnèrent contre le cordage du navire et balaya d’une main l’eau contre leur visage afin de contempler les cieux. Un vrombissement déchira le ciel aussi abruptement que l’aurait fait le tonnerre. Lent, mais continuel, le battement de l’air gronda crescendo. Tous savaient, désormais, sans vouloir l’avouer à voix haute, de peur de rendre la chose plus véritable qu’elle ne l’était déjà. Tandis que certains essayaient encore de se convaincre, qu’il persistait encore espoir que cela n’eût été qu’une chimère, produit de leur imagination, les autres, plus réalistes, se conchiaient carrément les braies. Heracle détourna le regard du ciel, jetant un regard en contre-bas vers le pont, où il vit étrangement ses deux parents, côte-à-côte, lui rendant ce même regard. Et avant même qu’il n’eût le temps de leur adresser le moindre son, ce qui dût se passer arriva : la voûte céleste se fendit net au passage du tristement célèbre dragon bleu, qui dévalait le ciel dans une vitesse effarante. Sa gueule, allongée, béante et munie de trois rangées de dents acérées s’ouvrit puis chassa toute obscurité qui vaille, faisant naître dans les profondeurs de sa gorge la plus étincelante des braises.

Un souffle, tonitruant, d’une force inégalée, à la mesure même des Dieux, s’abattit directement sur la parentèle d’Heracle, éventrant le navire comme on pouvait le faire d’une simple brindille, faisant virevolter dans les airs une multitude de débris enflammés. S’en était fait du navire, de l’équipage, de ses parents, de cette vie dénudée de responsabilités réelles …  




-----




« Heracle! » dut-elle cracher par trois fois pour venir à bout d’obtenir un simple signe de vie de son frère. Heracle poussa un grognement, tout simple, puis leva l’une de ses pattes afin de la faire s’abattre douloureusement contre son chef. À cet instant, tandis qu’il sentit les battements de son cœur tambouriner entre ses tempes, il eût préféré que le dragon fût réel et qu’il l’emporte dans toute sa hargne. Sans même daigner ouvrir les yeux et affronter les rayons qui devaient à cette heure chasser la noirceur des lieux, il tapota ci et là les deux rombières qui semblaient, elles aussi, victime d’une condition assez comateuse.

« Oui je t’entends ma sœur … Je … t’entends. » Toujours sans ouvrir les yeux, il secoua vivement la puterelle de dextre, puis fit de même d’un coup de pied à la cuisse de l’autre.

« Allez, vous avez entendu la Voilée ? On se bouge un peu et on fait du vent … » Le ton toujours un peu plaignard, se permettant, contrairement aux femmes de joie, de patienter plus longuement dans son plumard. Notre duo de longues jambes se redressa, évidemment accablé par tout le luxe de la veille, couvèrent à peine leur pudeur de quelques soieries, puis déguerpirent de la chambre en baisant le sol de leur regard lorsqu’elles passèrent à proximité d’Adonia. Au moins n’avaient-elles pas omis que la femme dont se moquait leur amant n’était autre que la maîtresse des lieux.

« Je te suis gré de ce réveil de si bon matin, ma sœur adorée … » Héracle se redressa finalement de sous ses draperies, puis prit à son tour équilibre sur ses guiboles, dans sa nudité la plus totale. Ah, pour le moment, le bougre avait bien mauvaise mine : son cheveu était gras, ses cernes pendaient jusqu’à ses burnes et il arborait parfum même que celui de la vinasse vinaigrée. Enfin, il se servit un gobelet de flotte dans la lenteur la plus marquée. Il en avala le contenu dans un déglutissement tout aussi criant d'évidence, puis souleva ci et là nombres d’affublements qui lui étaient inconnus. Il couvrit finalement sa pudeur en passant sur ses épaules un mantel tout fin qu’il noua au niveau de la ceinture, cela même s’il n’en vit guère réel intérêt, compte tenu de la cécité de sa frangine.

« Il me peine de te voir si riche de retard. Te serais-tu égarée en chemin hier au soir en venant aux festivités pour finalement, n’arriver qu’aux matines? Heracle s’approcha d’elle d’un pas lent, un sourire narquois trouvant moyen de venir dépeindre sa vieille trogne, malgré les maux qui lui pesaient toujours. La prochaine fois, je te ferai chaperonner, que tu puisses toi aussi, profiter un peu. »




Dernière édition par Heracle Ypsilantis le Ven 15 Mar 2024 - 15:16, édité 1 fois
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Adonia Ypsilantis
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MessageSujet: Re: Après la pluie, la tempête [ Adonia ]   Après la pluie, la tempête [ Adonia ] I_icon_minitimeVen 15 Mar 2024 - 11:56


Malgré la fragilité de son corps, Adonia se tient droite devant la porte des appartements de son frère, son visage voilé d'une défiance que l'homme en face ne connaît que trop bien. Les mots de ce dernier résonnent dans le corridor, frappant son honneur comme des griffes acérées, tandis que les asphalteuses des rues la frôlent et l’honorent de leur suintement de la dernière nuit. Sur ses lèvres, façonnées d'une indignation contenue, elle frémit tandis qu'elle rassemble ses forces pour riposter à l'énième diatribe fraternelle. C’est ainsi avec lui, se souvient-elle. C’est toujours ainsi... Serait-il pris dans une culpabilité avérée, qu’il oserait se targuer d’un sourire narquois, feignant d'ignorer les conséquences de ses actes. Qu'il endure le mal qu'il a semé, fulmine-t-elle en silence. Ses pensées reviennent à la nuit précédente, passée allongée, impuissante. Aurait-il eu vent de son état, peut-être ? Le connaissant, elle nourrit de sérieux doutes.
   « Que d'insolence dans tes paroles, Heracle, soupire-t-elle. Comme si ma douleur devait se justifier devant toi ! En guise de réponse à ton sarcasme, sache seulement que j’étais alitée dans mon lit lorsque résonnaient les échos enfiévrés de cette soirée. Là, seule, je pleurais d’être incapable d’honorer notre parentèle, trahie par un corps refusant d’obéir à mes ordres. Alors, crois-tu donc que je choisirais délibérément de manquer à mes devoirs familiaux ? Non, frère, mon absence était le reflet de ma faiblesse, non de mon manque de respect. Aurais-tu été moins abêti par les effluves d’alcool que tu te serais peut-être enquis de mon état auprès de Sapideh. En l’écoutant, pour la première fois depuis des années, tu aurais su.
   La gorge nouée et les jambes de plus en plus lourdes, elle observe la silhouette dépourvue de détails se mouvoir à ses côtés.
   « Au moins pouvons-nous nous targuer d’avoir tous deux brillé par nos respectives absences. N’est-il pas, mon frère ? assène-t-elle. J’ignore en fait si je puis t’alléguer encore le titre de frère à tel point l’ombre qu’est devenu ton visage m’est aujourd’hui si étrangère. À moins, peut-être, que tu n’y trouves une autre de tes réfutations habituelles, pour t’en dédouaner ?  
   Le poids de l'héritage familial, jadis glorieux, désormais souillé par le délabrement de son frère bien-aimé, oppresse son esprit. Les rêves de grandeur s'évanouissent comme des ombres dans la nuit, laissant place à l'angoisse de l'avenir incertain. Son cœur, déchiré entre la loyauté fraternelle et la crainte de la ruine imminente, saigne en silence. Elle contemple l’ombre d’Heracle, une figure tant de fois adulée, désormais presque inconnue. La confiance qui fut jadis leur roc solide se fissure lentement, consumée par le feu de la perte et de l’abandon de leurs parents. Son chagrin, tel un torrent impétueux, est retenu par les digues fragiles de sa volonté, mais combien de temps encore avant qu'elles ne cèdent sous le poids de sa douleur indicible ?
   « Ô noble frère, serais-tu donc si aveuglé par les ombres de ta propre décadence, si sourd aux lamentations qui ébranlent les pierres de notre citadelle céladonne ? Honte à toi, fils indigne, qui échange la noblesse de notre lignée pour les plaisirs fugaces de la luxure ! Tel un faible, tu te complais dans les ornières de tes vices, alors que l'héritage saint de nos parents se désagrège sous le poids de tes péchés ! Ô malheureux, tu profanes la fierté de notre nom, le laissant souillé par les turpitudes que tu cultives comme des herbes venimeuses dans notre jardin de vertu ! Je t'adjure, par l'honneur des ancêtres et par le destin de notre maison, de te lever de ce lit de débauche et de te montrer enfin digne de ton sang ! Si tu ne perçois pas l'urgence qui étreint notre demeure, alors pars, et que le vent et la houle emportent ta honte loin des murs qui pleurent la gloire perdue ! Par les étoiles immuables, je te maudis, Heracle, si tu continues à souiller davantage l'héritage sacré qui nous est confié. Reprends-toi, je t’en supplie, et redeviens le frère que j'ai connu, naguère, quand ma vue n'avait pas encore décliné. C’est à lui que je veux m’adresser, et à personne d'autre. Entends-tu à présent ? Ai-je maintenant toute ton attention ? Il est l'heure, oui, Heracle. Il est grand temps que nous abordions nos tourments et ce qui est advenu ; car sache que je n’étais pas plus impatiente que toi de devenir orpheline, murmure-t-elle. Nous voguons désormais sur cette même mer déchaînée, mais je crains que nos bras n’épousent ces flots tumultueux au même rythme…
   C’est ainsi avec lui, se répète-t-elle à nouveau. C’est toujours ainsi… Il faut asséner les coups, dompter le fiévreux animal faisant fi des lois. Eut-elle été un homme, un jeune frère, que l’aîné se serait sans-doute empressé de lui talocher une prodigieuse rossée pour lui faire ravaler son outrecuidance. Il n’en est rien, puisque devant lui gît toujours, plus svelte et fragile, une sœur qui pourrait s’écrouler au moindre vent.

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MessageSujet: Re: Après la pluie, la tempête [ Adonia ]   Après la pluie, la tempête [ Adonia ] I_icon_minitimeVen 15 Mar 2024 - 18:48




Le bel oiseau avait chanté et s’en voyait désormais le bec aussi cloué que l’était un cercueil d’un macchabé.  Par tous les Dieux! Comme il eût désirer l’interrompre, réfuter le moindre mot de son interminable, mais ô combien exacte locution. Les occasions fusèrent et toquèrent perpétuellement tout le long durant contre la porte de son orgueil aviné. Ah, il chercha bien tant que mal à s’introduire dans le moindre interstice de ce discours moralisateur, question d’y placer une égrillarde saillie, mais en vain. Car encore aujourd’hui il goûtait à la médecine de sa sœur, elle qui à défaut d’être dotée d’acuité visuelle, fût frappée jeune par la foudre de l’éloquence et de la justesse. La mesure de sa verve avait chez le jeune Ypsilantis toujours sût l’amadouer, si ce n’est de le désarçonner à coup sûr. Donnait-il crédit à tel talent l’amour profond qu’il entretenait à son égard, ou la chose relevait tout bonnement d’un don réel ? Là! Ce n'est certes pas en ce jour de veisalgie qu’il pourrait en élucider le mystère. Pour l’heure, il avait bien plus concret à s’occuper ; déjà, retenir ses entrailles qui cherchaient subrepticement à renvoyer tout ce qu’il avait ripaillé la veille. Ses lèvres se soudèrent par quelques fois, retenant autant rapports odorants qu’envies de rajouter texture au sol par quelques dégobillages. Aux tréfonds de son subconscient, peut-être, oui peut-être, avait-il embrassé le désir qu’elle lui assène une baffe. L’une de ces giroflées qui pourrait sortir de l’agonie le plus souffreteux des moribonds.

Il n’en fût rien. Mais la correction fût à la mesure de ce qu’aurait pu être l’empreinte cinglante de sa main contre sa joue. Alors il se tût, taisant dans la prison de ses dents le moindre des commentaires qui lui venait à l’esprit. Il avait besoin de ce genre de secousse. Même, il était à croire que la bombance, certainement, avait été organisée en qualité de feu d’alerte, pour attirer l’attention de sa frangine. Elle continua, encore et encore, à jeter huile sur ce feu vif de vérité toute crue et lui, tandis qu’il en retint les prémices du regret, fit s’amenuir la distance qui les séparaient. Il posa une patte doucereuse cette fois, contre l’avant-bras de sa sœur, puis la fit s’écarter de devant le portail métallique de ses appartements. Il en fit grincer les gonds en refermant cette dernière, de sorte à ce que leur entretient en devienne un à huis-clos.

« Pardonne-moi Adonia. », assura-t-il dans une forme de sincérité toute solennelle. Revêche cette fois, il ne le fût que fort bien peu longuement, car le deuil le tenaillait fermement et avait fracturé sa psyché en de bien menus morceaux. À l’instar de sa sœur, il chancelait, tout juste capable de se tenir sur ses béquilles, prompt à chuter à la moindre anicroche. De toutes ces remontrances, il retint l’essentiel ; ils étaient dans ce drame, deux à en souffrir mêmement. Or l’amour qu’il entretenait pour elle chassa comme un éclaircit dans une tempête les griefs qu’il entretenait à son propos. Et c’est sur cette base, seul bastion encore sauf de tout ce désarroi, qu’il chercha à redresser la pente glissante sur laquelle leur causerie semblait vouloir découler. Sa patte chercha à trouver la sienne, en toute douceur, puis la guida contre son bras, duquel il chercha à lui faire prendre appui.

« Je me surprend à rêver qu’un jour, tes mots ne parviennent à m’oblitérer aussi aisément, souffla-t-il, dans l’espoir de détendre la tension de l’atmosphère. J’ai … Je suis rongé par la peur, Adonia. Toute ma vie, j’ai œuvré corps et âme pour le bien de notre maison ; de cela, je suis certain que tu ne trouveras à redire. Il continua de la tracter en toute lenteur, chassant du pied les étoffes qui tapissaient le sol et parfois même, quelques bouteilles asséchées de leur contenu. Mais en chaque instant, à chaque moment où je me rendais utile pour nos parents, je savais, au plus profond de moi, qu’elle importait peu la réussite de mes entreprises. J’avais sous mes pieds un filet de sureté, qui savait me rattraper au bond et me dire, à postériori, comment veiller à ce que cela n’en vienne à se reproduire. Mais aujourd’hui … Il termina sa course de tortue près de la fenestration, où l’air salin pouvait enfin chasser de sous le pif de sa sœur les relents de sa luxure passée. J’ai peur de tomber et cette fois, que personne ne m’attrape. »


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MessageSujet: Re: Après la pluie, la tempête [ Adonia ]   Après la pluie, la tempête [ Adonia ] I_icon_minitimeSam 16 Mar 2024 - 11:28


Aux sinistres accords funèbres entendus il y a de ça quelques jours, s'ajoute désormais la confession solennelle de l'aîné. Les mots de ce dernier, répliques à ses propres paroles âpres et véridiques, pénètrent son être et désemparent ses pensées. Un constat accablant, glacial, s'impose à elle. Jamais encore n'avait-elle vu son frère ainsi, avouant sa propre impuissance et sa crainte. Impossible de le contempler dans ses moindres détails, mais l'image d'un lionceau égaré dans la tempête hante son esprit, et elle peine à s'en défaire. Doit-elle se laisser émouvoir par ces dernières paroles ? Cet être, tant aimé, lui a maintes fois prouvé que ses vieux démons n'étaient jamais loin, à l’image de ces relents alcoolisés durcissant son jugement. La vitalité l'abandonne peu à peu, ses pensées sont à la peine, elle qui s'était pourtant vouée à la clarté. Le poids du deuil et de la tristesse l'affaiblit au point de douter, en cet instant crucial, de sa propre valeur. N'est-elle pas l’infirme, l’impotente, celle que l’on appelle la Voilée justement parce qu’elle ne peut voir le monde comme les autres ? Que valent réellement ses mots et ses réprimandes, elle qui ne quitte ces murs par peur d’affronter les abîmes attendant derrière les portes de cette tour céladonne ?
   « Heracle l'enfant, le fils, n'est plus, déclare-t-elle en le voyant se mouvoir jusqu’à la fenêtre. Le titre de Prince t'échoit, que tu le veuilles ou non. Et à cette charge s'ajoutent les lourdes responsabilités, ainsi que l'honneur de notre famille. Nous sommes les derniers remparts, Heracle... Et sache que je suis tout autant effrayée par cette amère vérité. Oui, mon frère, tu es désormais Prince, et non plus héritier. Le filet sous tes pieds se nomme désormais maturité. Et cette sœur te faisant face, autrefois compagne de jeux, n'est plus qu'un lointain souvenir. Garde-la dans un coin de ton esprit, et écoute désormais ses conseils, comme tu écoutais ceux de nos parents. Je n'ai nulle prétention à les égaler, mais je te promets, Heracle, ici même, de t'apporter mon soutien dans cette épreuve. »
   Point de larmes ne fléchissent son échine, point de faiblesse n'adoucit ses mots acérés. Elle sait que l'heure n'est guère à l'apitoiement, mais à l'éveil des consciences et à l'ascension vers la grandeur qui fut jadis la leur. Oui, le moment n'est pas venu de succomber aux appels de la détresse et d'afficher une tendresse maternelle. Bientôt, certes, quand le lionceau regagnera son rang de roi. Mais avant que les larmes ne maculent les sols souillés de cette chambre, d'autres paroles se doivent d'être énoncées, fussent-elles de nature à transpercer à nouveau cet homme déjà ô combien accablé.
   « Est-ce à moi seule qu'échut le devoir d'entendre les sages paroles d'Ephyilias, notre vieux précepteur érudit, lorsqu'il narrait les judicieux enseignements des Trois Princes ? l'interroge-t-elle, les yeux balayant les lieux en quête d’un repère moins éblouissant que la lumière du jour s'extirpant de la fenêtre. Il me semble que les leçons de cet ouvrage pourraient t'être d'une utilité bien plus précieuse que les breuvages amers que tu ingères, mon frère. Tes yeux découvriraient alors que le temps du deuil n'est pas une escale où tu peux te complaire à loisir, mais une forge où se tempère l'acier de notre lignée. Il te faudra user de ces instants pour révéler au monde que le nom des Ypsilantis résonne toujours avec la même ardeur dans les palais de Thaar, de Feldorn, et jusqu'aux ruines nisétiennes, s'il le faut ; qu’ils se souviennent, tous, que les deux orphelins n’ont pas encore touché les abysses et qu’ils s’enquerront plus tôt que tard d’apprendre comment leur parentèle fut tombée. Car derrière cette mort et ce chagrin obstruant nos yeux, tout comme nos pensées, se mure le spectre d’un acte n’ayant de divin que la volonté  d’un ou de plusieurs êtres fait, tout autant que nous, de chair et de sang. Alors je jure, cher frère, ami de ma vie, confident de mes tourments, qu’il serait grand temps d’établir la vérité ; puisque nul règne -entends-moi bien -, ne pourrait reposer sur d’aussi fragiles fondations.
    La voix est chevrotante, affaiblie, tout autant que le sont ses pieds, ses jambes et ses bras alourdis par le poids du jeun qu'elle s'est infligée depuis la funeste annonce. Là, prise d'un énième frisson, Adonia cherche le soutien de son aîné qu'elle sait si bien haïr autant qu'aimer.

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MessageSujet: Re: Après la pluie, la tempête [ Adonia ]   Après la pluie, la tempête [ Adonia ] I_icon_minitimeSam 16 Mar 2024 - 20:48




Un souvenir récent, que la bistouille et la débauche n’avait encore émoussé, émergeât soudainement, chassant d’un revers tout simple de la main les bourrèlements du chagrin. Ce jour-là, lorsqu’il avait odit le couperet de la guillotine, en lieu et place de la peine, une étincelle mit feu à la brousse emportant dans ce braséro ardent ce qu’il lui restait de tempérance. Il se souvînt de morsure de la hargne, de la colère et de l’impuissance, celle-ci entraînant à la fois démesure irrationnelle et une soif inextinguible de vengeance. Il préservait encore aujourd’hui l’estampille de ses dents contre l’intérieur de ses joues, lorsqu’il avait tenté -en vain- de contenir sa fièvre carabinée. Aux devants de ses mires se transposaient également le goût ferreux du sang, duquel il goûta involontairement l’âpreté après avoir poignardé par dix-sept fois l’encorné de forban qui s’était payé la tête de sa sœur, quelques minutes avant l’exécution. La gratuité du geste eût au moins la qualité d’accoiser ses humeurs, mais de s’enliser davantage auprès de la situation dans laquelle ses parents l’avaient laissé. Plus aisé que de se soustraire de sa propre mortification, le cadavre, ainsi que toute la scène du crime n’avait aujourd’hui pour ainsi dire, jamais existé. Du reste, l’énnéade passée avait prouvé qu’il préservait toujours les deux jambes bien fixées dans le béton de ses tourments.

Ses épaules se secouèrent, puis raffermit le bras qui servait d’appuis à sa sœur. Il l’écouta, sans jamais cette fois être soumit à l’envie de l’interrompre ou de réfuter quoi que ce soit. Non, il lui prêta son oreille comme il l’aurait fait à précepteur, dont les enseignements recelaient autant sinon plus de valeur que le pur éclat du diamant. Et sans le vouloir, c’était elle, qui cherchait à brasser du tisonnier les braises presqu’éteintes de cet auguste incendie du passé.


« Est-il à propos de croire que nous devrions nous pencher sur cette affaire en premier lieu ? » Ses mires se détachèrent de l’horizon, duquel il se complaisait tant à admirer les reliefs. La bouche malheureusement toujours aussi pâteuse, les lèvres craquelées par la déshydratation, sa migraine semblait s’être estompée, laissant à ses esprits un semblant d’accalmi. « Nous avons tant à faire, que je me demande par quoi commencer … J’ai revendiqué la royauté du titre de notre mère, mais après … » Le suspend de sa dernière tirade laissait entrevoir les prémices de ce que pouvait être le remord par rapport à ses récentes menées. « Avant même de considérer l’idée de consolider la précarité de ma place au conseil, il faut assurer nos rentrées monétaires. Le port de Thaar, les chantiers navals, la perliculture de feldorn et l’ensemble de nos plus illustres partenaires se doivent d'être certifiées. » Acculé contre le mur, le visage vrai d’Heracle sembla s’être manifesté dans un élan de lucidité et de pragmatisme.

« Nous ne sommes que deux, et tu n’as jamais eu la fibre des affaires … Évidemment, il n’avait guère cherché à l’incendier, mais seulement marquer l’évidence de ce fait. Il nous faut nous entourer de gens de confiance, car le temps manque et ne nous pardonnera aucun retard. Adonia je te le demande, que devons-nous faire ? » Il la questionna cette fois non pas comme d’un avis consultatif, mais plutôt comme il l’aurait fait à un parent. Il se positionnait à la croisée des chemins et se montrait incapable de choisir la voie à prendre. Quelqu’un devait l’aiguiller, devait le relâcher dans la bonne direction, pour qu’enfin, il puisse reprendre plein contrôle de son avenir.






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MessageSujet: Re: Après la pluie, la tempête [ Adonia ]   Après la pluie, la tempête [ Adonia ] I_icon_minitimeDim 17 Mar 2024 - 3:25


Il ne subsiste plus que la voix de son aîné. Le reste disparaît..., les ténèbres semblant vouloir tout emporter en cet intime moment fraternel. La lumière s’éteint, certes, mais les mots demeurent et parviennent toujours à se frayer un chemin jusqu’à l’esprit. Exténuée, lasse, la lutte est immense et ses yeux pâles sont en souffrance. La canne qu'elle tient fermement est son unique repère dans ce chaos funeste, telle une béquille fragile dans la nuit oppressante de plus en plus proche. Dans ses souvenirs, les lugubres vêpres résonnent encore, leur chant mélancolique semblant emplir la pièce de la même tristesse que celle ressentie quelques jours plus tôt. Les pensées tourbillonnent dans sa tête, lourdes et lancinantes, alors que son aîné continue de se confier. En cet instant, le destin semble se jouer d'eux ; car les flammes des bûchers funéraires de leurs parents vacillent encore, mais déjà, ils se parlent comme si leur mort était un vestige du passé. Sa tête s'ébranle lorsque les questions paraissent. Les réponses sont si évidentes à ses yeux ; ceux-là même sur le point de la trahir à jamais.  
    « M'as-tu bien entendu, mon frère, lorsque j’ai parlé ? susurre-t-elle en ne pouvant s'éloigner de l'ombre se tenant tout près.  Cette affaire, ainsi nommée, est la plus capitale de toutes. Ceux qui ont commis cet acte ne te jugent point capable d'accomplir ce que certains nomment justice, et d'autres, vengeance. Mais ils attendent sans doute que tu te débâtes, que tu grondes et fasses grand tapage ; que tu t'épuises dans une quête où nul ne viendra t'offrir de réponses. Ceux-là, oui, agissent avec insouciance, croyant être à l'abri des conséquences. Ne les entends-tu pas, se raillant de toi, de nous et de notre nom ? »
    Le cœur battant dans sa poitrine, Adonia sent l'angoisse se mêler à l’envie de faire entendre sa voix, seule arme encore en état.  
    « Oui, il y a tant à faire, noble frère, et les prochaines nuits seront de sûrs assaillies d'insomnie tant est si vaste la tâche qui t’incombe. Mais je persiste à soutenir qu'il est nécessaire d'éclaircir le sort funeste de notre parentèle. Et quand je dis «nous», Heracle, je te fais part de mon engagement à tes côtés, comme je t’en ai fait la promesse. À cette fin, Prince, agis non selon les désirs de nos opposants, mais selon les exigences du titre que tu portes. Parais et consolide les liens avec les membres du conseil, apaise leurs craintes et satisfais leurs désirs. Mais n'oublie pas, mon frère, une fois au sein de leur cercle, tu n'auras point d'ami, et ceux qui te souriront seront les plus prompts à te trahir. Ainsi, deviens l'allié de tes adversaires, de ceux qui te méprisent et te jugent faible. Forge avec eux des alliances solides, jusqu'à ce que ta connaissance de leurs faiblesses soit si profonde qu'un simple murmure à leur oreille suffise à te protéger. As-tu saisi mes mots, Heracle ? T’entourer de gens de confiance sera aussi vain que naviguer sans voiles. Car, mon frère, tu te prépares à pénétrer un repaire de vipères où les plus grands ont jadis succombé. N'as-tu point en mémoire le destin tragique du Prince Vossula, allié de notre aïeul ? l’interpelle-t-elle. Le conseil des Princes est un échiquier où tu seras un simple pion, luttant non pour régner, mais pour survivre. N’oublie jamais ceci… »
    Elle sait que les jours à venir seront marqués par l'incertitude et le danger, que les épreuves à affronter seront nombreuses et cruelles. Cela ne fait aucun doute, mais la chose est tout aussi nécessaire que salutaire.
    « Concernant l’enquête, je m’y emploierai, Heracle. Oui, je m'y consacrerai afin de soulager le poids qui pèse sur tes épaules, mais aussi parce que je ne saurais demeurer en ces lieux, où chaque parfum et chaque recoin me les rappellent inlassablement. Nul ne s’attendra à ce que l’infirme Ypsilantis cherche à connaître la vérité. Quant à toi, Prince aimé, tu attireras la lumière et la conservera le temps nécessaire, entendant mes confidences au gré des avancées, et brillant par ta présence aux banquets, évoque-t-elle en s’appuyant un peu plus sur le bras de son aîné. Heracle, je…
   Elle chancelle et se retient désormais contre lui.
   « Je crois que ma longue nuit tombera peut-être plus prestement qu'escompté, avoue-t-elle d'une voix vacillante. Je dois te confesser que ton ombre disparaît et que je ne discernerai bientôt plus tes contours... Je m'y suis préparée, depuis des années, mais... l'obscurité m'effraie toujours autant que lorsque, petite, mes pieds me conduisaient jusqu'à ton lit pour y trouver quelque réconfort. J'ai... peur, Heracle, plus que jamais... »
   Calmes sont les murmures de la mer. Tristes sont les chants de l'hiver. Avec lui vient la nuit, longue, terrible et infinie. L'obscurité s'insinue, dévorant la lumière, et dans ce crépuscule, la peur prospère, perfide compagnie...


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MessageSujet: Re: Après la pluie, la tempête [ Adonia ]   Après la pluie, la tempête [ Adonia ] I_icon_minitimeLun 18 Mar 2024 - 21:24




Souventefois, il s’était imaginé ce que pouvait bien ressembler le monde aux devants des verres défaillantes de sa sœur. La réplique d’une fenêtre poissée par la pluie ? Ou encore cette sensation de cécité, lorsque l’on immerge de l’eau ? Pis encore, une vision étroite de ce que seraient les ténèbres, à mesure que se tari la clarté du jour, engouffré par la marée et l’appétit d’une mer impitoyable … Un frisson lui secoua l’échine, comme s’il venait de réaliser, trop peu trop tard, de la pesanteur du fardeau que portait sa sœur. Ah! Il s’était bien raillé de son handicap - à plus d’une reprise même! - mais toujours à la manière d’un frère taquin, qui ne trouvait moyen autre que celui des moqueries pour avoir sur elle un ascendant. Mais aujourd’hui, alors qu’elle soulevait l’implacable fatalité de son sort, il sentit son battant se presser davantage. À l’instar d’un citron dont on aurait extrait le jus jusqu’aux pépins, une crampe, lancinante, lui assaillit le poitrail. Il inspira à plein poumons, puis soupira dans une plainte autant libératrice de douleur que lassée. Il quémandait aide à sa sœur, alors que tôt, elle n’aurait que pour bon plaisir des yeux la contemplation d’un abysse sans fin. Aveugle, affaiblie par la disette, le moral aussi pauvre que les havresacs des trimardeurs des bas-quartiers, elle n’était pas en reste de méchef. Le genoux en terre, l’Espadon de nacre devait reprendre de l’aplomb ; il le devait, autant pour le salue de sa maison, que celui de sa sœur, qui se mourrait un peu plus de jour en jour.

Il pivota légèrement le bassin et fit face à Adonia, les mains toujours disposées à être prises, fussent-elles pour source de réconfort que d’équilibre. Avant que la longue nuit ne se manifeste, que la clarté prenne définitivement sa retraite, il épousa le désir qu’elle le voit. Qu’elle décèle les reliefs de son visage, la couleur de ses yeux, le doux et le réconfort de son sourire. Qu’elle emporte avec lui non pas le souvenir d’un ivrogne au cœur sanguinolent, meurtri et endolori par la peine, mais plutôt celui d’un roc, d’un auguste phare, qui serait à même de l’éclairer dans cette anxieuse obscurité.


« Tu m’apparais bien plus forte que tu ne le laisses voir, lui assura-t-il, laissant couler une œillade sur sa chétive charpente, mendiante de calories. Je veux bien que tu te charges de cette enquête, en seulement, je te veux accompagnée par Goustan, mon premier homme de main. Il veillera à tes déplacements et fera de ta sécurité sa raison de vivre. Tu es à mes yeux ce qu’il y a de plus précieux et je ne puis te laisser œuvrer sans que l’on veille ton ombre. » Sa pondération naturelle semblait avoir reprit du souffle, tandis qu’il cherchât à sonder sa réaction avant de poursuivre. « Du reste … Je me chargerai des Princes et contacterai le premier intendant de notre demeure à Feldorn. C’est là, dans nos pénates natales, que nous célèbrerons les derniers adieux de notre parentèle. »


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MessageSujet: Re: Après la pluie, la tempête [ Adonia ]   Après la pluie, la tempête [ Adonia ] I_icon_minitimeMar 19 Mar 2024 - 9:43


Au cœur battant et pensées dissonantes s’adjoignent les mains de son aîné, chaudes et réconfortantes. L'invitation est claire, la détresse entendue. Face à elle se tient une ombre, obscurcie et floue, mais derrière laquelle elle devine une infinie tendresse. Dès lors que ses doigts effleurent cette forme, les contours jusqu'alors indistincts prennent vie, complétant le tableau laissé en suspens depuis leur tendre jeunesse. La peau n'est plus celle d'un enfant ; elle a la fermeté du cuir tanné, marquée çà et là de cicatrices, témoignages silencieux de duels passés. Hésitante, elle remonte au front, là où se dessinent les lignes creusées par les soucis, empreintes des heures sombres. Avec douceur, elle les suit, sondant la tension enfouie sous cette peau, héritage des jours chargés de pensées lourdes. Ses doigts glissent vers les yeux fermés, sentant la caresse des paupières, les cils frémissant sous l'effleurement de l'air. Une vulnérabilité jusque-là inconnue, cachée derrière la voix et les actes fraternels, un aveu silencieux de peurs et d'incertitudes. Ses doigts poursuivent leur descente le long des joues, effleurant l'ossature sous la peau, reflet de leur lignée partagée. Arrivant aux lèvres, Adonia sent un léger frémissement. Dans son esprit se dessine le sourire habituel de son frère, mêlé de gaieté et d'affection, mais maintenant teinté d'une tristesse plus profonde, plus consciente. Elle ressent la chaleur de sa respiration, preuve de vie, de proximité, de la réalité palpable de son existence. De son frère, le jeune lion d'autrefois, ne subsiste que l'ombre, transformé en une image qui évoque celle de leur défunt père.
   « Je te perçois, murmure-t-elle d'une voix douce comme une brise d'été. Oui, Heracle, c'est toi que mon esprit voit. Peu importe cette senteur acre, le reflet des tourments qui ont hanté tes dernières nuits depuis la tragédie, je discerne ta présence et trouve le frère que je croyais avoir perdu. Je ne sais si ma force égale celle que tes paroles tentent de peindre, car dans ma condition, point d'autre chemin ne s'offre à moi que de braver mes incertitudes pour avancer... Ces mots échangés, toi et moi, les premiers que nous avons depuis des cycles, m’offrent de quoi vouloir me battre pour quelque temps encore. J'accepte, dès lors, d'être escortée par ton féal, et lui accorderai la confiance que j'aurais placée en toi-même. »
   Tu es à mes yeux ce qu’il y a de plus précieux et je ne puis te laisser œuvrer sans que l’on veille ton ombre, se rappelle soudainement Adonia, un sourire timide fleurissant sur ses lèvres. A-t-il jadis prononcé pareils mots d'amour ? Tant d'années ont-elles filé, leurs chemins se croisant mais sans échange de paroles, sans prêter oreille aux murmures de l'autre? Eut-il fallu porter le sombre manteau d'orphelins pour que leurs bouches s'ouvrent à de telles confidences? C'est dans l'abysse des flots que les cœurs se révèlent et que les alliances les plus indéfectibles se tissent. Comment pourrait-elle renier ce lien, cette chaîne d'or qui les unit si fermement l'un à l'autre? Sa vie, elle la donnerait pour lui. Par sa foi, elle serait prête à renoncer à tout, si cela pouvait sauver l'âme de cet homme lui faisant face.
   « Quel sort serait le mien sans toi, ô Heracle, unique être à n'avoir jamais repoussé mon amitié ? Ton affection m’est si précieuse que s’il te fallait un jour me l’ôter, je préférerais rejoindre notre funeste parentèle… susurre-t-elle, ses doigts effleurant une nouvelle fois le visage de son aîné. J’ai bien entendu tes mots et je veillerai à me tenir prête lorsqu’il nous faudra gagner la demeure de nos ancêtres. Courage à toi, si précieux frère, pour les charges qui t’attendent. Va trouver Sapideh et elle te fournira celles, les plus urgentes, n’attendant plus que ton sceau. »
   Puisant dans ses réserves, elle se sert de sa canne pour se redresser. Là, debout, dans un geste solennel, avant de pivoter sur ses talons et de laisser son frère dans la solitude, elle lui offre un ultime sourire, un aurevoir silencieux portant en lui toutes les promesses.
   « Heracle, reprend-elle avec un soupçon de gravité mêlée d'affection. Puisqu'en ces jours notre mère n'est plus de ce monde pour tenir son rôle, il me revient, ici et maintenant, de reprendre son flambeau et de te prodiguer les conseils qu'elle ne saurait plus offrir. Oui, Heracle, mon frère si noble, il serait grand temps, aussi, pour toi d'embrasser les bienfaits d'un bain. Sinon, je te le jure sur notre honneur familial, les portes du conseil des Princes te resteront à jamais infranchissables… »

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MessageSujet: Re: Après la pluie, la tempête [ Adonia ]   Après la pluie, la tempête [ Adonia ] I_icon_minitimeJeu 21 Mar 2024 - 3:53




Sa bouche pâteuse, dont la langue épaisse et déshydratée ne savait où se placer, s’était close pour couvrir le front de sa sœur d’un chaste baisé. Mieux encore que ne l’aurait fait le plus miraculeux des enterres-cuites, elle sût soulager ses maux avec l’efficacité des plus adroits mires. Dotée depuis jour de sa naissance, il était à parier qu’elle portait en elle ce don : la capacité de plier et de manipuler à ses envies les émotions et les sensations de son frère. Une furibonde colère pouvait arder au fin fond de ses tripes qu’elle pouvait, par l’entremise d’une parole simple, d’une caresse solennelle, en chasser la tempête au profit d’une sereine accalmie. Pis encore, elle pouvait à sa façon, devenir autant la clé que la cage de ses géhennes émotionnelles. Pour l’heure, sa présence avait provoqué chez le jeune Prince une embellie qui ne pouvait que lui être des plus favorables. Il délaissa sa sœur à contre-cœur et ordonna qu’on lui prépare son bain. Cette bassine serait, s’était-il convaincu, les instants derniers de sa vie d’antan.

Callé dans sa toute menue piscine, il ferma les paupières et laissa ses songes voguer à tout vent, la voilure tendue par l’inspirante sagesse de sa jeune sœur. Consolide les liens avec les membres du conseil, apaise leurs craintes et satisfais leurs désirs, soutint-elle plus tôt. Ainsi donc devait-il engager les premières tractations avec ses homologues …



Marzaban Ambreroc …

Moi qui ai toujours honni ces petits personnages, me voilà bien mal placé pour entériner mon désintérêt envers ces demis-hommes. Il me coûte tant de devoir feindre l’intérêt avec eux … Mais le jeu semble en valoir la chandelle ; les Milles-Caves sont les portes uniques que forment les digues vers le Zagazorn. Feldorn gît sous une montagne de richesses qui n’attendent qu’à être acheminées aux poches les plus creuses. Ah, foutre-dieu, je préférais encore voir ma trique pustulée que m’entourer de nains! Si seulement je pouvais m’épargner ce sacrifice …

Maralina Irohivrah …

La princesse de la chair! Comme les Dieux lui furent favorable, d’être restée aussi fraîche et désirable après avoir mit à bas tant de morveux. On dit d’elle qu’elle nage dans autant sinon plus d’opulence que le nabot des sept-monts ; aussi bien dire qu’elle doit posséder en main un jeu bien étoffé. Ses tentacules sont probablement abondants et tendus à outrance, nourris et gavés par les profits qu’elle tire de la traite de la chair. Il me faudrait forcer la rencontre, sans que la chose ne soit planifiée ou forcée … Que je tente d’établir le contact en premier me semble d’une évidence, or il me faudrait provoquer l’évènement d’une manière ou d’une autre …

Shaheem El’Angharad …

À l’instar de ma sœur, se serait-elle faite happée lors du Voile par la malédiction de la petitesse ? Si je devais me fier à tous les racontars à son propos … Alors quelles, oui quelles réflexions aurais-je à son propos ? On m’a déjà narré qu’à son approche seule l’eau cherche à nous quitter. Que le soleil brille plus ardemment à sa présence. Qu’au passage de la Princesse de Sel l’herbe ne repousse pas. Que le braquemart de ses amants se sèche instantanément à l’orée de son con! Ahh, il ne faudrait pas que je laisse son tout jeune âge m’endormir, sans quoi je pourrais me voir faire l’involontaire visite de ses marais salants et ce, avant longtemps. Au vrai, la menue Princesse semble projeter une ombre bien plus vaste qu’elle ne le devrait. C’est là je crois, qu’il me faudra commencer ; là où se croisent les ombres pour n’en former qu’une seule et parvenir, fatalement, à couvrir celle des autres.



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