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 [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE]

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Térébantine
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MessageSujet: [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE]   [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE] I_icon_minitimeJeu 29 Mai 2008 - 12:01

Bon sang !

Elle marchait d'un pas précipité et nerveux, battant la ruelle de ses bottines à hauts talons, sa robe de velour rouge ondoyant dans un bruissement de tissus feutré.
Elle ressemblait en tout point à une sorcière extravagante sortie d'un livre d'enfants qu'un bon parent attentionné aurait choisi de lire à sa marmaille avant d'aller se coucher, pour avoir la paix une bonne fois pour toute!


Bon sang de bon sang !

Elle n'avait pas prévue de rester une nuit de plus surtout depuis sa mésaventure dans l'auberge de la jolie demi-drow. Mieux vallait partir sans tarder pour Diantra la pestiférée ! Elle avait donc laissé Moignon s'occuper de ranger leurs affaires, tandis qu'elle préféra errer dans les rues sordides de ce bouge qui quoi qu'on en dise, récelait de nombreux chats aux vicères tendres auquels elle avait fait un sort étant gamine.

C'était le bon vieux temps...

Elle se remémora son boucher de père : ses pattes énormes, son ventre bedonnant au tablier amoureusement badigeonné de sang, son regard bovin et affectueux...Aaah papa! Que le monde avait perdu un grand homme le jour où tu t'étais malencontreusement empallé sur ce crochet à viande...Une vraie hémoragie pour Miradelphia.

Elle marchait à l'aveuglette au milieu des odeurs de latrines poiscailleuses, d'alcool de mauvaise qualité et du parfum de silence morne et besogneux des pêcheurs de la région. Crétins de mangeurs de poissons...

Malgré elle, ses pas la menèrent devant la boucherie, où du moins ce qui avait pu en rester. Elle se dit que ce devait être juste un réflexe conditionné par une once de souvenir sirupeux affectant sa brave mémoire dégoulinante d'émotions. Elle soupira et releva la tête.

Rien n'avait bougé depuis son départ. Personne n'avait rien construit par dessus. il s'était contenté de bruler la maison de son enfance sans autre forme de procès, comme si l'hérésie et la souillure se nettoyait à coup de bûcher.
Elle resta un moment à contempler les décombres maintenant froids de ce qui fut certainement un des lieux les plus heureux de sa vie, son vrai chez elle...

Elle sentit les prémices de la crise arriver trés vite. Trop vite.

Plantée au milieu de la rue, sa main se mit soudain à trembler. Elle la regarda comme une chose extérieur à son corps, les nerfs palpitants de contractions incontrôlables sous la peau, ses yeux rubis s'aggrandissant d'un effroi rare.


Pas maintenant !

Elle vacilla.

Elle s'avança au milieu de la maison brulée en titubant et trébucha contre une pierre calcinée en voulant s'asseoire derrière une poutrelle à l'abris des regards. Elle savait ce qui allait se passer, et durant le peu de moment de conscience qu'il lui restait, il fallait qu'elle puisse s'injecter sa médecine.

Les convultions se firent plus intenses, la pliant en deux. Fébrilement elle chercha quelque chose dans son corset...


Dernière édition par Térébantine le Mer 11 Juin 2008 - 11:43, édité 1 fois
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Lann Al'Thorkren
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MessageSujet: Re: [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE]   [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE] I_icon_minitimeJeu 29 Mai 2008 - 14:10

Post N° 7

Post précédent : ici

Gwendal marchait la tête basse dans les ruelles étroites de la forteresse portuaire. L’air empestait, même les jours de grand vent. Sur le pavé disjoint, les déjections de toutes sortes rivalisaient avec les jus putrides, relents de pauvre humanité.

Thorkren gardait une main sur le manche d’une de ses deux haches de guerre : dans ces dédales poisseux, les coupe-jarrets pouvaient jaillir de toute part à chaque instant. Et l’exiguïté des rues rendait délicate la moindre manœuvre à cheval.

Mais le Chasseur répugnait à mettre pied à terre et de souiller ses bottes : le cuir restait imprégné pendant des lunes des effluves douçâtres de l’urine rance.

Minuit trottait en avant, la queue haute, et l’œil vif. Un message bien clair à l’observateur éclairé que le Loup s’imposait comme le Maître des lieux, semblable au Chef de meute qu’il aurait pu devenir. Thorkren contemplait avec fierté cette silhouette puissante onduler dans la pénombre. Dans les plaines et les forêts, les Loups rôdaient efflanqués et le poil terne comme les pauvres hères des bas quartiers de Ydril l’Infecte, mais Minuit, lui, bien nourri et entraîné à la course derrière un cheval, paradait dans toute la force de muscles faits et de tendons solides qui tendaient son pelage luisant.

Le Chasseur tapota machinalement l’une des deux fontes de cuir à l’avant de selle, et sentit la peau se convulser rapidement sous la pression amicale de sa main gantée : Azazel, surpris dans son sommeil par cette caresse singulière, rampait en sifflant vers le fond du sac pour reprendre sa sieste. Thorkren pensa que le Serpent n’avait rien mangé depuis au moins trois jours, et qu’il faudrait penser à le laisser libre d’aller étouffer quelques rats. Azazel revenait toujours, même déformé par un repas trop riche et anesthésié par une digestion toujours lente et difficile.

Thorkren connaissait bien Ydril pour y être passer maintes et maintes fois. Il avait coutume de s’arrêter à l’Auberge du Trou Puant, qui, somme toute, faisait honneur à son nom. Mais à force de se laisser envahir par pensées et souvenirs aigres, il avait laissé Gwendal s’écarter de la rue principale. Et il se l’avoua vite : il s’était égaré. Il lança un regard vers le ciel pour observer les étoiles, mais les nuages filant bouchaient son point de vue. Il décida de s’enkyster dans l’erreur et laissa sa monture aller droit devant.

A portée des décombres d’une vieille échoppe, Minuit stoppa net et se tendit. Il flairait les alentours, l’œil mi clos. Thorkren dégaina ses deux haches, et les fit pivoter pour mieux assurer sa prise. Puis, passant une jambe par-dessus l’encolure de Gwendal, il se laissa glisser à terre, amortissant son saut en pliant les genoux pour progresser sans le moindre bruit.

Le Loup rampait maintenant vers la ruine, l’échine dressée, les babines retroussées sur quelques poignards d’os, les griffes de ses pattes agrippant les pierres éparses. Dressé, Gwendal demeurait en place, mais tapait des antérieurs, nerveux. Thorkren avançait pas à pas, contrôlant ses appuis à chaque mouvement, prêt à frapper des deux mains si nécessaire. Minuit contournait par la droite un enchevêtrement de poutrelles calcinées, ralentissant sa progression, comme le prédateur qui se rapproche inexorablement de sa proie. Il avait une encolure d’avance sur Thorkren et quoi qui se cache dans les décombres apercevrait le Loup avant même d’avoir perçu la présence de l’homme. Alors le Chasseur se glissa à gauche de l’obstacle, haches en avant, ramassé sur lui-même et les jambes fléchies pour frapper fort.

Le Loup gronda, mais derrière la poutrelle la plus imposante, rien ne répondit à sa provocation.

Thorkren allongea le pas, et une hache dressée bondit en avant.

Elle était là, assise parmi les gravats, frêle dans sa robe rouge qui semblait une flaque sanguinolente baignant les pierres. Inoffensive au premier regard. Même Minuit parut surpris de sa découverte. Dans les rayons de la lune, Thorkren sursauta en contemplant une chevelure bouclée résolument verte enveloppant des épaules rondes et blafardes. La femme tremblait, courbée en avant comme pliée par la douleur, et une main longue et fine agitée de soubresauts courait sur son corset comme un insecte traqué.

Thorkren rengaina une de ses deux haches, et passa l’autre dans sa ceinture, - on n’est jamais trop prudent -, avant d’ordonner à Minuit de rejoindre Gwendal. Gardant ses distances pendant que le Loup, à regret, laissait derrière lui sa trouvaille nocturne, le Chasseur mit un genou en terre pour contempler la femme. Il eut un mouvement de recul lorsqu’elle darda vers lui ses yeux grenat. Sa stupéfaction fut si prégnante qu’il porta instinctivement la main à son arme la plus disponible. Mais la femme n’allait pas bien. Elle dodelinait de la tête, et ses yeux rubis roulaient dans leur orbite. Comme si elle passait…

Thorkren surmonta vite son étonnement, et posant sa main gantée sur celle de la femme, il lui parla à voix basse, comme pour l’assurer de ses bienveillantes intentions.

- Femme ? Femme ?

La Fille à la chevelure d’émeraude n’avait pas la force de répondre. A moins que…

- Ma Dame ? Puis-je te venir en aide ? Tu sembles bien mal en point ?

Thorkren ne put se retenir de songer à la peste qui assaillait Diantra. Et si le Haut Mal avait souillé la créature. Il eut un nouveau mouvement de recul, se reprochant de lui avoir touché la peau, même ganté.

- Veux-tu que je prévienne le Guet ?


Dernière édition par Lann Al'Thorkren le Sam 31 Mai 2008 - 9:07, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE]   [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE] I_icon_minitimeJeu 29 Mai 2008 - 15:18

Damnation !

Elle détestait cet état de faiblesse qui la rendait hérmétique à tout raisonnement logique. Bientôt son cerveau la lacherait et elle sombrerait dans un néant chaotique.
La première crise, elle l'avait eu à la mort de son père. Elle disséquait un cadavre dans le laboratoire de l'Académie Royale de Diantra, juste après l'annonce de son décès, quand elle s'était brusquement écroulée au sol, pris de spasmes violents. Lorsqu'elle avait repris conscience sur le carrelage froid de la pièce, sonc corps entier semblait être passé sous un cheval de guerre drow. Elle avait le gôut du sang dans la bouche et avait découvert par la suite qu'elle avait faillit se sectionner la langue avec ses claquements de dents répétés.
Aucun témoins à la scène et c'était mieux ainsi. Déjà qu'elle frôlait le bûcher à cause de ses cheveux verts et de ses yeux rubis, alors si quelqu'un l'avait vu en proie au "Grand Mal"...

Pour l'heure, elle grapillait ces dernières bribes de consciences, en essayant frénétiquement d'atteindre l'étuis doré, poinsonné d'une rose, contre sa poitrine, le précieux objet contenant sa médecine.

A l'orée de sa vision se dessina une forme animal sombre et ténébreuse. Elle crut un instant que la mort était venue la chercher. Si elle avait eu la force elle aurait rit avec saracasme de cette pensée stupide et irrationelle. C'était elle, la Dernière Epousée ! Et il en serait toujours ainsi...
La forme disparu et ce fut autre chose qui se pencha sur elle. Un visage humain. Un homme.

Que lui voulait-elle bon sang! Elle tremblait à en crever, elle faisait une proie bien peu distrayante pour un viol. M'enfin avec les bouseux du coin, il fallait s'attendre à tout.


- Ma Dame ? Puis-je te venir en aide ? Tu sembles bien mal en point ?

Diantre ! Il fallait qu'elle soit prise en pitié odieuse par un observateur dégoulinant d'altruisme. Elle lui aurait craché au visage si elle n'était pas occupée à griffer frénétiquement son corset à la recherche de l'étuis précieux. Elle avait besoin d'aide. Cette simple pensée faillit la faire décoller pour de bon.

Mais elle s'y résigna.


-Veux-tu que je prévienne le guet ?

Elle secoua la tête comme elle put et articula péniblement :

- Nan...Ma médecine...corset....vite....

Déjà les tremblements s'accéléraient et ça n'était que parcequ'elle se bourrait de drogues diverses qu'elle arrivait à en rallentire la venue.

Qui que ce soit, elle allait bientôt sombrer dans ses bras.
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MessageSujet: Re: [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE]   [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE] I_icon_minitimeJeu 29 Mai 2008 - 17:09

Post N° 8

Elle convulsait, ses mâchoires claquaient, et une écume blanchâtre perlait de ses lèvres purpurines. Thorkren la saisit par les épaules, craignant qu’elle ne défaille. Il avait déjà assisté à ce genre de crises. Mais à la vérité, jamais chez un Humain. Certains chiens de race, entraînés pour la guerre ou pour la chasse, à force de consanguinité mourraient en avalant leur langue ou l’échine brisée par les tremblements…

- Nan… Ma médecine… corset… vite…

La fille trouvait encore la force de parler, alors que ses yeux s’affolaient.

Mais à vrai dire, ce qu’elle demandait inquiétait davantage Thorkren que son état lamentable lui-même : fouiller son corset ? Le Chasseur en avait vu d’autres, certes, et l’urgence justifiait quelques écarts à la bienséance. Mais tout de même ! Ce genre de prière lui paraissait réservé aux jeux d’alcôve ! Quelle idée de dissimuler quelque chose dans un corset ?

Il se déganta néanmoins. Et l’œil sec, s’en tenant strictement à la poursuite sans faille de sa mission, contempla le terrain de ses investigations. La Fille était sérieusement corsetée pour tout avouer. Le tissu renforcé et lacé lui dessinait une jolie taille, et mettait ses hanches à leur avantage. Quant à sa poitrine, elle pigeonnait assez pour que le vieux soldat, surpris de sa gaillardise, - un homme comme il faut ne se repaît pas de ce genre de spectacle ! -, détourne rapidement le regard, le visage légèrement empourpré.

Par tous les Dieux, il aurait préféré avoir affaire à un Rogue mal léché, à qui il aurait fendu le crâne d’un coup de hache bien placé, plutôt que d’avoir à tripatouiller une jeune femme, - qui plus est une jeune femme aux yeux rouges et aux cheveux verts, quelle bizarrerie ! -, même avec son consentement.

Il chercha une poche, une fente, un étui sur le tissu tendu à craquer. Mais rien ne semblait dissimuler une potion quelconque. Le flacon devait être très petit. Où donc une Femme corsetée pouvait-elle cacher un flacon précieux, sans risque de le détruire au moindre mouvement ? Non ! L’idée d’une fiole au chaud entre… Thorkren se racla la gorge bruyamment. Si la médecine en question était là, le Fille l’aurait déjà attrapée et elle n’en serait pas à presque se rouler par terre sous le regard scrutateur d’un inconnu.

Il ferma les yeux et laissa sa main se promener sur le corset de la Dame, à la recherche du remède miracle.

Quelle aventure ! Il y avait quelque chose de cocasse qui le rendait goguenard.

Quand soudain…

- Lann ! Lann ! Promets moi que tu prendras soin de Gen, Lann ! Promets moi que jamais il n’arrivera rien à notre Fils ! Que tu seras là pour lui, Lann, toujours, toujours…

Nàwen convulsait. Elle était trempée de sueur et sa voix se fêlait, brisée par la fièvre et par la toux qui lui déchirait les entrailles depuis une semaine. Baldrim secouait la tête, les yeux rougis et baignés de larmes. Le Druide avait lâché prise : ni potions, ni magies, ni prières ne pouvaient plus rien changer. Nàwen passerait cette nuit. Elle claquait des dents. Thorkren la serrait contre lui, rassemblant les couvertures contre elle, la berçant comme un petit enfant. Ses lèvres se promenaient dans la chevelure trempée de son épouse, effleurant son front brûlant. Il lui caressait les épaules et les joues. Il suffoquait à force de contenir ses larmes.

- Lann ! Promets…

Et il avait promis. Futile, vile, présomptueuse promesse…

- Je te le promets, Nàwen, je te le promets…

Thorkren reprit ses esprits.

Il serrait tout contre lui la femme aux cheveux verts, rassemblant autour d’elle le velours de sa robe couleur de sang et ses amples jupons pour la réchauffer, lui embrassant le front et lui caressant les épaules

- Je te le promets…

Le Chasseur fut saisi par le ridicule de la situation, au point qu’il manqua de lâcher la fille.

Mais il se rendit compte que dans sa main libre, il tenait un petit étui. Il l’ouvrit et, perplexe, contempla un instant une fiole cylindrique qui semblait de cristal, bouchée à l’une de ses extrémités par un tampon de cire et de liège, comme un piston, et arborant à l’autre bout un bec plus fin et plus long, ouvert à tous vents celui là. A côté de cette drôle d’éprouvette, une aiguille effilée terminée par un embout mou.

Thorkren n’avait jamais vu ce genre de choses !

Fallait-il percer la fiole avec l’aiguille et donner la mixture à boire à la fille ? Pousser le piston et compter les gouttes qui perleraient à l’autre extrémité ? Mais alors, quelle posologie ? Et à quoi servirait donc cette fichue aiguille ?

Lann Al’Thorkren affermit ses prises sur la jeune femme, et la secoua vigoureusement.

- Femme ! Parle ! Qu’est-ce donc que cette machine ?
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MessageSujet: Re: [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE]   [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE] I_icon_minitimeJeu 29 Mai 2008 - 18:01

Par les têtons lubriques de sa gueuse de mère ! Elle était tombée sur un lambin !

Il pérorait comme un jambon trop sec à fouiller son corset pour récupérer sa seringue. Elle aurait voulu lui hurler que la biénséance allait faire d'elle un cadavre baveux, mais il s'obstinait à rester planté là, le regard vide, comme plongé profondément à l'intérieur de sa carcasse. En lui répétant des "Je te promets.. je te promets..."

Il ne prometait pas de se presser en tous cas.

Enfin, il se décida à bouger et partit en éxploration de ses seins. Pas trop tôt !

Il ressorti finalement victorieux de cette expérience délicate , le précieux étuis en main. Il l'ouvrit. L'étuis contenait toujours sa seringue , son médicament et une lanière de cuir. Elle essaya d'attrapper l'ensemble mais ses mouvements sacadés firent chuter le contenu de la boite dans les plis de sa robe.

Ses tremblement s'emplifiaient. Elle allait s'évanouire et s'abandonner dans les bras éléctriques de sa crise.

Non ! Pas tout de suite ! pas encore...

Elle s'aggrippa au col de l'inconnu et essaya de se redresser pour atteindre son oreille.


-Planter.. Aiguille ..dans.. Flacon... Tirer...embout de seringue...et planter..artère....dans la cuisse...'près garot...et injecter...médecine...

Elle accompagna ses paroles du geste tirant convulsivement sur sa jupe pour la remonter sur son entre-cuisse. L'homme pu noter qu'elle avait de déicieuse jambe fuselée , garnie par des bas de résille noire et une jarretière avec lequelle elle se débattait pour lui montrer un point sur sa chaire laiteuse avec son doigt, l'endroit où il devrait piquer sans nul doute.

- Garot..là...piquer...médecine....

Sa voix était presque inaudible, ses dents claquant si sévèrement qu'elle faillit s'empaller la langue sur ses incisives. Par La Faucheuse, faites qu'elle ne soit pas tomber sur un ivrogne crétin, ou bien elle risquait de se retrouver aussi muette et dérangée que ce brave Moignon !
Une seconde perte pour Miradelphia.

Elle Le regarda de ces yeux rubis avec un désépoir non feint, puis elle sombra dans le chaos de son épilepsie.
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MessageSujet: Re: [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE]   [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE] I_icon_minitimeJeu 29 Mai 2008 - 21:40

Post N° 9

- Othar me brûle ! Suis-je donc tomber sur une Sorcière !

La Fille aux yeux d’albinos se tortillait maintenant sur le sol, les robes relevées dévoilant des bas d’un genre complètement inconnu de Thorkren soulignant le galbe de cuisses parfaites. Certaines des femmes que le Chasseur avaient connues, jadis, lors des excursions torrides de la troupe dans les tripots des bas fonds, lui en avaient montré moins que celle là en quelques minutes. Mais au moins avaient-elles éteint les incendies qu’elles avaient su faire naître. Celle là serait bientôt juste assez bonne pour les bûchers de Diantra, à rôtir au milieu des cadavres noirs des pesteux ! A moins qu’elle ne survive et qu’elle ne reste muette à tout jamais, la langue tranchée par ses dents, - très jolies aussi d’ailleurs. Par précaution, il lui glissa entre les mâchoires un morceau de bois glané dans l’enchevêtrement des poutrelles.

- Garrot… Artère… Injection…

Rescapé de son naufrage dans les fonds dévastés de ses souvenirs, Thorkren avait résolument repris le contrôle de lui-même. Le sourcil froncé et la mine grave, il observait la Fille qui se contorsionnait comme la dernière des gueuses, désignant d’un doigt impérieux un carré de peau blanche sur ses cuisses ouvertes. Certainement l’endroit où elle souhaitait que le Chasseur enfonce cette satanée aiguille qui, comme le reste du contenu de l’étui, avait disparu dans le tissu de ses jupons.

Thorkren maudit en silence son Loup qui l’avait attiré dans ces ruines de malheur, et entreprit de sauver la Fille. Dans d’autres circonstances, son détachement pour l’existence l’aurait certainement conduit à passer son chemin, et laisser à d’autres l’immense satisfaction de porter secours à autrui. Sa pitié et son altruisme avaient vu le jour dans les bras de Nàwen et étaient morts avec Gen et Baldrim. D’ailleurs, Thorkren songea que Baldrim était bien silencieux dans cette histoire. Retenait-il son souffle, subjugué par l’étrangeté de la Malade ? Car le Chasseur reconnaissait maintenant, après s’être reproché son mouvement instinctif de recul de toute à l’heure, que la Fille, malgré cette chevelure étrange et ces yeux écarlates, - ou peut-être justement à cause de ces cheveux verts et de ce regard à l’éclat sanglant-, lui plaisait bigrement. Elle était belle. A sa manière, et sans comparaison, sa beauté, et aussi cet état de total abandon dans lequel la crise l’enfermait, la rendaient digne d’un intérêt absolu. Et puis, il était temps de la tirer de là. Si le Guet venait à passer, Thorkren finissait sur le gibet. Elle mourrait certainement, privée de soins. Quant à lui… Que penser du sort d’un homme surpris dans une ruine, à genou devant une femme inconsciente, les robes relevées jusqu’à la taille ? A Ydril comme ailleurs, le viol valait mille fois la roue et la corde…

Il s’affaira donc. Vif et rapide. Ses mains retrouvant les réflexes du soldat habitué à secourir ses camarades grièvement blessés avec les maigres moyens du bord.

Le garrot d’abord. Il fit glisser le bas vers le genou pour dégager complètement la cuisse. Il passa le garrot le plus haut possible sur la jambe, et tira d’un coup sec. Puis, ramassant un clou dans les décombres, il le passa entre la lanière et la peau et commença à serrer en tournant la tige métallique. Avec un point d’appui de ce genre, - pas très académique mais bigrement efficace -, le garrot jouerait son office à merveille. Un réseau de veines bleutées apparut rapidement sous la peau d’albâtre, et Thorkren raffermit la pression sur le muscle jusqu’à ce que l’artère se dessine, palpitante.

L’instrument maintenant. Il n’en avait jamais vu. Mais l’engin ressemblait à un petit clystère. Après avoir fouillé les jupes de la fille, il enfila l’embout mou de l’aiguille sur la minuscule fiole en cristal. Il vérifia instinctivement le jeu du piston de liège et de cire et il nota avec satisfaction que des gouttes de la mixture perlaient à la pointe de l’aiguille.

Il avait tout recousu dans sa vie. De ses bas de laine à ses cuirasses, des chevaux empalés sur les pieux des fortins jusqu’aux guerriers entaillés jusqu’à l’os. Alors, piquer une peau si fine lui parut simpliste. Il pointa l’artère maintenant presque noueuse, et enfonça l’aiguille méticuleusement. Puis, lâchant la pression sur le garrot, il appuya sur le piston, prenant le temps de faire pénétrer le liquide un peu gras dans la veine.

Lorsqu’il eut terminé, il retira la lanière de cuir, et jeta la fiole et l’aiguille dans les décombres. Il prit le soin de couvrir les cuisses de la Fille avec sa robe de velours, et la saisissant par la taille, il l’attira contre lui pour contrecarrer les convulsions, et éviter qu’elle ne continue à se cogner la tête contre le reste du mur.

- Puisse Néera te donne la force de lutter maintenant… J’ai fait tout ce que j’ai pu ! A toi te battre !
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MessageSujet: Re: [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE]   [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE] I_icon_minitimeJeu 29 Mai 2008 - 23:45

L'effet fut immédiat.

Les mouvements de Térébantine se firent moins frénétiques. Son Coeur palpita moins vite laissant place à une certaine langueur. Ses yeux se fermèrent et sa tête dodelina pour s'écraser mollement sur l'épaule du guerrier.

***



Quand elle reprit conscience, elle avait un vieux gôut ferailleux de sang et de brulé dans la bouche. Elle avait le visage enfoui contre un torse musculeux drapé de cuir et de plaques d'acier odorant la sueur virile d'homme fait. D'ailleurs des bras puissants encerraient sa taille et ses épaules. Elle releva doucement la tête sonnée, recrachant les morceaux de bois calciné de sa bouche en éspérant ne pas se retrouver avec une écharde sur la langue.

Elle se sentait proprement vaseuse, mais visiblement, on lui avait injecté sa précieuse médecine, réduisant l'effet de perdition de moitié pendant qu'elle se cognait la tête comme une demeurée, balayant le sol avec son corp. Elle marmonna juste :


Nom d' une pute uni-jambiste... J'me damn'rais pour une cigarette mécanienne...

Signe qu'au final elle n'allait pas si mal que ça.

Elle s'écarta sans ménagement de l'inconnu , observant un peu hagarde l'environnement : son ancienne maison brulée, la seringue vide et la fiole à moitié examptée de son contenu, un cheval...Un loup -Mais que faisais ce loup ici bon sang ?-
Elle posa enfin ses yeux écarlates sur l'empaffé qui avait finalement réussit à lui administrer ce foutu remède. Un instant, à cause de son état de faiblesse, elle avait eu la berlue, elle avait cru voir Papa...

Elle se frotta les yeux et vit un homme trapu, à genoux près d'elle, large d'épaule et carée de silhouette, la machoire puissante et bien déssinée, le cheveux court, rat et gris-acier, il dardait ses yeux bleus clairs mi-inquiet, mi-surpris sur elle.
Elle souleva le velour de sa robe et écarta la jarretière. La piqûre avait laissé une simple petite trace de poinçon. Elle fit une petite moue admirative : c'était loin d'être parfait mais pour un novice inculte il ne s'y était pas trop mal employé.


Pas mal... , souffla-t-elle.

Elle rabattit ses jupons et le regarda, continuant sur le même ton badin, de sa voix grave légerement cassée.

...Mais je vais devoir vous faire taire pour avoir été témoin de ce que vous avez vu. C'est dommage , vous me rappellez Papa et vous êtes plutôt un beau spécimen, ça m'ennuirait de vous supprimer. Papa me disait toujours de ne pas gâcher la nourriture...

Elle farfouilla dans son aumonière et retira une tabatière et elle entreprit de se rouler une cigarette. Une fois fait, elle la ficha dans sa bouche, cherchant de quoi allumer la chose. Ne trouvant rien , elle se tourna vers l'homme et continua avec le même timbre atone, ses pupilles sanglantes sur lui.

Vous auriez du feu ?
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MessageSujet: Re: [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE]   [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE] I_icon_minitimeVen 30 Mai 2008 - 0:51

Post N° 10

- Vous auriez du feu ?

Thorkren se releva.

La Fille avait repris du poil de la Bête à la vitesse de l’éclair. En mouvement, elle restait aussi gracieuse qu’affalée comme une loque au milieu des décombres. Le Chasseur pensa qu’il aurait été dommage de la laisser pourrir dans les ruines ; surtout que les rats n’auraient certainement pas attendu qu’elle soit raide pour commencer à la boulotter. Elle parlait une langue étrange et s’affairait à rouler du tabac Nain dans du papier. Drôle de façon de fumer la pipe.

Le Chasseur brossa ses chausses et sa pèlerine, blanchies par la poussière de la baraque en ruine. Depuis que la Fille s’était redressée, son Loup faisait les cent pas, tournant sur lui-même, dans la ruelle puante. Comme à l’approche de l’orage.

**Mauvais présage** pensa Thorkren en lui-même. Il arrangea sa ceinture et profita pour s’assurer que sa hache était toujours bien à sa place. C’est alors qu’il réalisa qu’il avait laissé ses gants sur le sol. Il se jeta par terre plus qu’il ne se baissa pour les ramasser. Il les tapa sur ses jambières. Et, lentement, les enfila.

- Je ne fume pas, ma belle ! Désolé !

Les paroles de la Fille résonnaient dans sa tête.

- … je vais devoir vous faire taire pour avoir été témoin de ce que vous avez vu… ça m’ennuierait de vous supprimer…

**Elle ne manque pas de cran la gueuse ! Ni de culot ! Je lui sauve la couenne et elle me menace !**

Aussi fou que cela puisse paraître, Thorkren goûtait fort cette aventure iconoclaste. Il y avait peu d’événements remarquables dans la vie d’un Homme. Bien sûr, tout est toujours question d’échelle et de proportions. Celui qui vit s’adapte. Dans l’univers de Thorkren, où les images de la guerre se disputaient chaque jour avec une dépression chronique qui ne se purgeait que dans le combat, un moment comme celui là valait son pesant d’or.

**Je lui ai sauvé la vie, et je vais devoir lui faire exploser la tête** songea-t-il en souriant étrangement. Minuit devait avoir compris les intentions de son Maître puisqu’il cessa instantanément son manège. Il se contenta de se raidir, le corps tendu vers la Fille, prêt à bondir au moindre signe.

- Je me nomme Lann Al’Thorkren… Et aussi insignifiant que cela puisse te paraître, je viens de te sauver la vie.

Il s’adossa sur l’enchevêtrement de poutre qui toute à l’heure masquait la scène du sauvetage. Juste pour sentir son arbalète calée entre ses épaules. Simplement pour se rassurer à son contact : aucun carreau n’était engagé, et si par malheur la Fille était un Mage, ou autre arcaniste patenté, il n’aurait pas le temps de bander son arme. Non. La hache suffirait. La première pour la lancer. Et s’il ne lui partageait pas la tête en deux, il lui restait l’autre pour s’amuser un peu.

- Qu’ai-je donc vu qui te gêne au point de ressentir le besoin de me supprimer ? Continua-t-il sur le même ton badin qu'elle. Tes jambes et ton décolleté mis à part, bien sûr… Et tout cela n’est pas si moche que tu puisses craindre de ma part une quelconque indélicatesse !

Ces yeux rubis dansaient sur lui, le jaugeant. Il s’était accoutumé à ce drôle de regard. Et même, il commençait à l’apprécier.

- Quant à ton… Mal ! Je n’en ai cure. Si j’ai passé 40 ans, c’est que j’ai comme religion de ne pas fourrer mon nez dans les affaires des autres. Mon Loup t’a flairée, je t’ai trouvée, et j’ai fait ce qui devait être fait. Je ne te demande pas de me remercier. Mais pour le moins, de ne pas me faire perdre mon temps.

Il abandonna sa position et se dirigea à pas comptés, mais avec une certaine nonchalance, en direction de son cheval. Il avait posé sa main sur la boucle de sa ceinture, prêt à saisir sa Hache. L’autre bras pendait le long de son corps, paré à dégainer l’autre fer. Mais rien dans son attitude ne respirait la menace.

Minuit gronda, affolant Gwendal qui fit un petit écart, tapant du sabot sur le pavé.

La distance qui le séparait de la Fille n’était guère plus importante que la longueur de son bras. Il s’arrêta net, et plongea son regard dans le sien.

- Restons en là, ma Belle ! Je passe mon chemin…

Il fit trois pas, lui tournant le dos et se retourna. Il lui suffisait maintenant de siffler Gwendal et le cheval bondissait. Une bonne façon de conclure cette drôle d’histoire. Sans effusion de sang. Il ne l’avait pas soignée pour risquer de la fracasser parce qu’elle nourrissait une nette propension à l’arrogance. Bien qu’il percevait que la fleur était vénéneuse.

- A moins que tu ais décidé de me chercher querelle bien sûr…

Il lui souriait, mâchoires crispées. Elle l’avait un tantinet contrarié.

- Et si c'est ton choix, j'ai une requête : j'aimerais au moins savoir à qui j'ai affaire !
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MessageSujet: Re: [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE]   [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE] I_icon_minitimeVen 30 Mai 2008 - 2:11

Elle afficha une moue déçue lorsqu'il lui dit qu'il lui annonça qu'il n'avait pas de feu. Mince! Elle s'en serrait bien grillé une petite à s'en calciner le poumon, juste pour oublier qu'elle venait d'avoir une crise devant un parfait inconnu, un peu comme après une cuite , lorsque vous vous reveilliez, la bouche pâteux et nue au coté d'un marsoin parfaitement étranger. Deirdre avait du ressentire quelque chose de cet ordre en se faisant lutiner par Papa...


Elle rangea sa cigarette à regret dans son aumonière en haussant les épaules. Puis elle ramassa l'étuis rangeant méthodiquement sa seringue et la fiole dans leur alcôves. Elle se leva et s'étira ensuite comme un chat.


- Je me nomme Lann Al’Thorkren… Et aussi insignifiant que cela puisse te paraître, je viens de te sauver la vie.

- Ouais... t'as été un peu long à la comprenette, mais tu ne t'es pas trop mal débrouillé.

Elle eut un demi-sourire exubérant de mauvaise foi tout en rangeant l'étuis dans son corset qu'elle ressera par la même occasion. Certes, elle devait bien se l'avouer, elle ne pouvait pas nier l'évidence, il avait été "secourable". Le simple mot en échos dans sa cervelle lui fit horreur.

-Qu’ai-je donc vu qui te gêne au point de ressentir le besoin de me supprimer ? Tes jambes et ton décolleté mis à part, bien sûr… Et tout cela n’est pas si moche que tu puisses craindre de ma part une quelconque indélicatesse ! Quant à ton… Mal ! Je n’en ai cure. Si j’ai passé 40 ans, c’est que j’ai comme religion de ne pas fourrer mon nez dans les affaires des autres. Mon Loup t’a flairée, je t’ai trouvée, et j’ai fait ce qui devait être fait. Je ne te demande pas de me remercier. Mais pour le moins, de ne pas me faire perdre mon temps.

Elle fit un pas et sut d'emblée que c'était une mauvaisse idée quand elle vacilla sur ses gibolles encore ramollies par sa crise. Elle se rattrappa malgré elle au bras "secourable" du dit Lann Al’Thorkren, qui eût le réflexe malencontreux de la retenir. Elle contempla alors les muscles saillants du guerrier -car s'en était un pour sûr! - et s'absorba soudain dans les vieilles traces de cicatrices, dépliant ses bras de tout leur longs, soulevant sa capeline avec un sans-gêne absolu, défaisant même parfois les sangles en cuir maintenant ses plaques, remontant jusqu'à son torse.

-Oh ! épéé... épée.. hum.. dague... Ah! Carreau... épée...Fichtre mais ils ont recousu ça comme des sagouins !

Il eut un geste de rejet et s'écarta de Térébantine. La distance qui le séparait d'elle n’était guère plus importante que la longueur de son bras.

- Restons en là, ma Belle ! Je passe mon chemin…

Il fit trois pas.

- A moins que tu ais décidé de me chercher querelle bien sûr… Et si c'est ton choix, j'ai une requête : j'aimerais au moins savoir à qui j'ai affaire ?

Elle eût un rire un peu froid et mécanique. Péremptoire.

-Tu pues la peur. C'est moi qui te fais cet effet ?

Elle posa ses mains sur ses hanches puis brisa la distance qui les séparait et souleva la tête vers lui. Elle faisait bien une tête de moins que lui et pesait sans nul doute la moitié de son poids toute mouillée. Elle pointa son regarde écarlate sur Lann à quelques centimètre de son menton.
Son sourire carnassier s'éffaça soudain
.

-Je m'apelle Térébantine et je suis chirurgien. Je ne veux pas que "ça" se sache. c'est mauvais pour la clientèle, et j'ai déjà largement mangé sur ma réputation de sorcière. le seul moyen d'etre sûr que tu caftes pas se serait de te tuer, là, maintenant. Mais Papa disais toujours qu'on devait jamais gâcher la bonne viande. alors je te propose une alternative... Du travail. Et de ce que j'en vois, je doute que t'ais mieux à faire que mon offre.
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MessageSujet: Re: [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE]   [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE] I_icon_minitimeVen 30 Mai 2008 - 9:59

Post N° 11

Le souffle de la fille lui caressait le menton. Ses deux yeux, comme deux braises incandescentes, lui chauffaient le visage. Un regard dur, irréel, mélange d’arrogance innée et de défi. Victime des séquelles de sa crise, elle titubait légèrement. Thorkren s’attendait à chaque instant à ce qu’elle se vautre au milieu de la ruelle, dans le purin. Et malgré son état, elle persistait à pérorer et à lui crachouiller ses menaces à la figure ! Quel caractère ! De plus, elle avait les mains baladeuses. Avant de s’entêter à lui régler son sort, elle l’avait presque dévêtu, et telle le chef de la meute remontant la piste d’un cerf, elle avait flairé toutes ses cicatrices. Flairer était le mot : elle avait le nez à ras de sa peau tannée, et pour tout dire, les frissons que son étude avaient déclenchés lui avaient semblé… délicieux. Pendant qu’elle lui parlait, il avait rajusté sa cuirasse.

Térébantine ! C’est comme ça qu’on la nommait.

Chirurgien avait elle lâché ! Autant dire bouchère ! Les souvenirs de quelques camarades hurlant et vomissant de douleur pendant que le chirurgien les désossait au couteau après avoir scié leur membre pour les amputer remontèrent dans son esprit comme la vase puante du fond d’une mare lorsqu’on y jette un caillou. Ca et l’odeur si particulière des chairs que l’on grille à l’aide d’un tison rougi dans la braise.

Sorcière avait elle dit ! Il aurait pu s’en douter. L’attirance magnétique qu’elle provoquait chez lui n’était pas de mise. Depuis des lunes, il avait banni de ses fantasmes les délices de l’amour charnel. Ou pour être plus exact, tout désir s’était évaporé. Et là, maintenant, cette garce lui titillait les sens avec ses cheveux verts, ses yeux rouges et sa peau laiteuse. Si elle avait eu plus de flair, elle se serait rendue compte que l’odeur de l’adrénaline qu’il exhalait n’était pas à placer sur le compte de la peur. Depuis la mort de Gen, il n’avait plus peur. Comment ressentir la peur lorsque l’on a perdu l’essentiel. S’il marchait dans les rues de Ydril, s’il se colletait avec une créature bizarre, c’est juste parce qu’il avait promis de continuer à vivre. Non ! Cette adrénaline là était chargée des relents de la testostérone. En fait, il hésitait entre l’étrangler une bonne fois pour toute, et s’enfuir. Surtout que les aveux de la Fille lui avaient fourni les explications qu’il attendait : si elle le mettait dans cet état, c’est parce qu’elle était maléfique. Et certainement pas parce qu’elle était désirable ! Elle pouvait bien le tuer maintenant qu’elle l’avait rassuré sans s’en rendre compte…

Il ne releva donc pas cette sotte allégation selon laquelle il suintait la peur.

Finalement, dans tout ce qu’elle racontait, Thorkren n’avait envie que de saisir ce qui l’arrangeait. Ce qui lui faisait plaisir. Et en l’occurrence, le fait qu’elle lui demande de lui fournir un travail l’avait touché droit au cœur. Ainsi, elle resterait un peu dans son environnement, le temps que le picotement qu’elle avait fait naître au fond de son âme s’estompe. Et que la chaude curiosité, - fruit d’un sort qu’elle avait du lui lancer, il n’y avait plus de doute ! -, qui le taraudait se transforme en froide indifférence.

- Du travail. Et de ce que j’en vois, je doute que t’ais mieux à faire que mon offre…

Thorkren toisa la Fille, et éclata d’un rire sonore.

- Du travail, dis-tu ?

Il secoua la tête, amusé, et perplexe tout à la fois.

- Pour tout de dire, Sorcière, tel que tu me vois, je file droit en Anaeh ce matin à l’aube.

Tout en parlant, il se rapprocha de Gwendal et le gratta entre les oreilles pour le calmer. Térébantine avait le don d’exaspérer ses animaux ! Minuit l’aurait volontiers égorgée. D’ailleurs, il faudrait veiller à surveiller ça si la Fille aux yeux rouges se joignait à eux. Le Loup n’aurait pas de vergogne à lui ouvrir la gorge pendant qu’elle dormait au coin du feu.

- J’ai entendu dire que des Drows avaient été aperçus dans le coin. Et que les Sylvains les traquaient. Je vais me joindre à eux.

Le cheval renâclait et tapait du pied en regardant la fille, comme si elle avait été un lynx.

- Je vais prendre part à la curée !

Il cracha par terre avec colère et mépris. Penser aux Drows lui soulevait le cœur. Et à la fois, lui fouettait le sang. La vengeance le consumait toujours. Comme un brasier gigantesque, fouetté par les vents.

- Si tu veux te joindre à moi, tu es libre, Sorcière ! Mais ce n’est pas un travail à proprement parler ! Disons plutôt, une quête !

D’un mouvement délié, il enfourcha Gwendal, au grand plaisir de l’étalon qui tenta de se dresser.

- Je pars à la chasse aux Drows, Sorcière ! Et c’est toute ma vie !
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MessageSujet: Re: [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE]   [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE] I_icon_minitimeVen 30 Mai 2008 - 11:02

Elle le regarda s'esclaffer et remonter à cheval. Il exhalait une odeur d'homme et de bataille autant qu'elle laissait planer un parfum capiteux de sang. Elle continua sur le même ton neutre, de sa voix grave :

- Si je ne te fais pas peur, alors j'effraie au moins ton clébard et ton cheval.

Elle posa sa main sur l'encolure du canasson qui poussa un petit hénissement craintif.

- Anaeh... La forêt c'est ça? C'est sur mon chemin. Je dois passer par Diantra afin de permettre aux malheureux pestiférés de "partir" dans un monde meilleur et la bourse vide. M'enfin, ça reste une sucrerie avant de m'attaquer à la Guerre.

Ses yeux se mirent à pétiller de convoitise comme une enfant devant l'étale d'un confiseur. Son sourire avait quelque chose de vénéneux.

Vénéneux, c'était le terme. Elle évoquait certaine fleurs sauvages carnivores qui se dotaient de coloris chatoyants et énigmatiques, à la fois pour susciter la terreur chez le prédateur que pour charmer ses proies.

Elle lui cachait bien son jeu.
En réalité, cette nouvelle attaque du "Grand Mal" sur elle l'avait éprouvée. Elle avait réussit à endiguer ça jusqu'à maintenant et une brusque remontée de souvenirs l'avait fait replonger et bien plus violemment que les autres fois. Si cela recommencait en pleine cambrousse ou en pleine opération, elle n'y survivrait pas. Elle avait besoin de quelqu'un qui saurait lui administrer son remède en toute efficacité, pas comme Moignon.
Mais elle ne laissa rien transparaitre de son raisonnement sous le masque de son visage aussi expressif qu'une poupée de cire.


-Je suis pas contre un bout de chemin ensemble....Lann...mon "sauveur".

Elle eut un rire grinçant avant de tomber à genoux visiblement épuisée, s'accrochant désespérement à la crinière du cheval pour rester dans un équilibre qu'elle ne conserva pas.

Elle ne parvint pas à se relever, même en serrant les dents.
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MessageSujet: Re: [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE]   [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE] I_icon_minitimeVen 30 Mai 2008 - 21:12

Post N° 12

Gwendal avait fait un écart lorsque Térébantine s’était désespérément agrippée à sa crinière avant de choir dans le purin de la ruelle. Quant à Minuit, il avait bondi comme si la Fille venait de lui marcher sur la queue, en jappant de surprise. Déconfit, il campait maintenant sur ses deux pattes avant prêt à lui sauter à la gorge, toutes dents dehors, et bavant de rage. Thorkren n’avait pas vu le coup venir. Mais lorsqu’il comprit qu’elle ne se relèverait pas, il maîtrisa son cheval et glissant sur le flanc de sa monture, il prit la Fille sous les bras. Puis il enfonça ses talons dans les cotes de Gwendal qui s’élança. La force de l’étalon suffit à Thorkren à arracher Térébantine à la boue et il la hissa sans aucun effort sur le devant de sa selle. Priant qu’elle ne chauffe pas trop Azazel de sa croupe. Mais il n’allait pas prendre le risque de lui apprendre qu’un serpent minute gardiennait jours et nuits ses biens terrestres.

- Fous la moi par terre, celle là ! Hurla Baldrim dans sa tête, pendant que Nàwen, crispée, se drapait dans sa dignité. C’est un sac d’embrouilles à elle toute seule ! Regarde donc la couleur de son poil : elle est déjà à moitié blette. Et si elle te ressert une crise de tremblements pendant une escarmouche, que feras-tu ? Tu te jetteras devant elle pour lui éviter une flèche ou un coup d’épée !

**Fiche moi donc la paix, Baldrim ! Où étais-tu quand je l’ai ramassée dans les décombres ? Je ne peux tout de même pas la laisser faible comme elle est au milieu de la ruelle à une heure aussi avancée de la nuit** Gronda Thorkren en pensée.

- Tu m’exaspères, Compère ! Et puis, jadis, tu avais de bien meilleurs goûts !

Le Chasseur réprima mal un sourire moqueur que Térébantine pouvait aussi bien interpréter comme un signe de profonde satisfaction. Il s’en voulu immédiatement et replongea dans sa grise mine habituelle. Belle armure en vérité que cette face dure comme le marbre. Il se promit de laisser ses Morts de côté lorsqu’il paradait en société. On le cloîtrerait à l’hospice, aux fers, si on savait qu’il conversait avec un Nain dont il ne restait plus que des cendres, et une Femme que la terre avait engloutie depuis des années. Seul Gen ne lui parlait jamais…

- Diantra ? Tu vas à Diantra, Sorcière ?

Il secoua la tête, éberlué.

- J’espère que tu as des fioles à piston pleines de mixture contre la Peste ! Ils crèvent tous là bas. Et pour avoir dans ma vie croisé quelques pesteux, je peux t’assurer que ce n’est pas beau à regarder. Surtout lorsqu’ils se prennent cette langue noire, et quelques bubons à l’aine ! Enfin ! Tant que tu ne me demandes pas de te conduire dans l’enceinte de la ville, va pour Diantra !

Gwendal avait de son initiative pris le trot. L’Etalon manifestait une certaine inquiétude, comme si un scorpion s’était glissé entre son dos et la selle et qu’il s’attendait à tout instant à être piqué cruellement. Quant à Minuit, il galopait la queue basse et la langue pendue, soumis.

**Résigné** pensa Thorkren.

- Mais je ne compte pas partir cette nuit même ! Continua le Cavalier, impérieux. Je suis fourbu et j’ai besoin de ravitailler ! Nous partirons demain à l’aube. Une jeune Elfe nous guidera. J’espère qu’elle tiendra parole et qu’elle sera aux portes de la ville à l’heure dite.

Il lâcha la bride à Gwendal qui fila comme le vent. Aucun risque de renverser et piétiner qui que ce soit dans une telle obscurité. Et au moins, les Rogues passeraient-ils leur tour en voyant un tel équipage déferler dans le fracas des sabots ferrés du Cheval.

Thorkren serra la Fille, mais bien qu’en amazone, cette dernière ne se débrouillait pas si mal.

- Dis moi où je te dépose ! Si tu as un endroit bien sûr ! Pour ma part, je couche ce soir au Trou Puant.
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MessageSujet: Re: [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE]   [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE] I_icon_minitimeSam 31 Mai 2008 - 8:51

Mais quelle Gloire, vraiment !

ça vallait bien la peine de se moquer du monde entier à coup de rire méprisant et d'oeillades dédaigneuses si c'était pour venir s'écrouler dans la fange cinq seconde trois quarts plus tard ! Mais son corps ne lui obéissait plus, érinté par la crise, engourdi par la drogue. Elle ne releva même pas la tête, persuadée qu'il allait la laisser plantée là à communier avec la terre de son père. Trop de fanfaronades tue toute pitié oiseuse.

Elle se sentit soulevée comme une plume. D'ailleurs dans des bras tels que ceux du guerrier, elle n'était manifestement qu'une plume. Elle se rappela fugitivement lorsque Papa la ramassait de terre pour la faire tournoyer dans les airs, au milieu des carcasses vides des boeufs fraichement abattus. Avait-elle rit à ce moment là ? Avait-elle était heureuse...?

Pouaaah ! Tout ce bon sentiment n'avait rien de naturel et par les cuisses huileuses de sa mère, ça n'était pas son genre de donner dans le pathos.

Il la déposa sur sa celle, intimement serrée contre lui. Malgré ses membres énormes et imposant, il fit la chose avec beaucoup de délicatesse. Elle n'aurait jamais pensé ça d'un tel colosse, du moins son esprit embrumé par la lassitude. Car épuisée, elle l'était. Elle se laissa aller un instant , la tête en repos sur son torse solide.


- Diantra ? Tu vas à Diantra, Sorcière ? J’espère que tu as des fioles à piston pleines de mixture contre la Peste ! Ils crèvent tous là bas. Et pour avoir dans ma vie croisé quelques pesteux, je peux t’assurer que ce n’est pas beau à regarder. Surtout lorsqu’ils se prennent cette langue noire, et quelques bubons à l’aine ! Enfin ! Tant que tu ne me demandes pas de te conduire dans l’enceinte de la ville, va pour Diantra !

Elle eut un petit rire faible.

-J'y vais pour ça... Je permets à ceux qui n'ont plus rien à éspérer de partir rapidement. C'est ma vocation. Ne suis-je pas une vilaine Sorcière...?

Elle garda le silence par la suite. Elle le laissa déblatérer sur la nécéssité de se reposer cette nuit. Parcequ'elle avait l'air en forme, elle ? Parcequ'il croyait qu'après ce qu'elle venait de subir elle allait battre la campagne, les guiboles alertes ? Mais sombre crétin....

La monture de Lann accéléra. Elle sentit le vent fouetter son visage, l'obligeant à se blottire d'avantage contre cet inconnu pour garder l'équilibre. Elle n'aimait pas le contact. Elle tripatouillait des corps malades ou sans vie, mais les vivants... C'était une autre affaire. Elle se sentit gagnée par un malaise juvénile tout à fait stupide et hors de propos.


- Dis moi où je te dépose ! Si tu as un endroit bien sûr ! Pour ma part, je couche ce soir au Trou Puant.

Il n'y avait pas trois milles auberges dans Ydril la gueuse pour qu'il se permette la question. Si ça n'était pas le Trou Puant, c'était l'autre.

- Celle de la grand place...

Il la conduisit à bon port et l'aida sobrement à déscendre de cheval, attendant qu'elle arrêtte de gigoter sur l'équilibre précaire de ses pieds, accrochée à son bras. Elle reprit le contrôle de son corps avec une dignité froide et tourna les talons séchement. Mais au moment de passer la porte de l'auberge , elle se retourna doucement lui offrant un visage inédit. Elle faisait rarement démonstration d'humanité et de sincérité, mais malgré ses yeux rubis, et la couleur dérangeante de ses cheveux, elle le regarda, un peu gênée presque comme une petite fille, et murmura :

- Merci...

Elle ouvrit la porte du bouge et, cette fois-ci lui présentant son dos et reprenant son timbre neutre et rigide habituel, elle poursuivit :

-...A demain.
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Lann Al'Thorkren
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MessageSujet: Re: [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE]   [Rues] La Sorcière du Boucher [TERMINE] I_icon_minitimeSam 31 Mai 2008 - 16:15

Post N° 13

- A demain…

Lann Al’Thorkren regarda la Sorcière aux Yeux de Sang tituber vers l’auberge, et ne reprit sa route que lorsqu’il fut certain qu’elle ne roulait pas sous quelques tables, en proie à ses convulsions. Gwendal s’impatientait : il foulait le pavé d’Ydril depuis le matin sans manger, et il piaffait en songeant à la chaleur d’une écurie et à un picotin d’avoine. Quant à Minuit, il tournait sur lui-même, comme un chiot jouant avec sa queue : le loup désespérait de mettre entre ses poils et cette femelle aux effluves de crimes le plus de distance qu’il pourrait parcourir au grand galop.

- Fuis ! Cria Baldrim

Et, sans davantage réfléchir, Thorkren laissa filer son Cheval.

- Te rappelles-tu la Goule des Falaises d’Arkan ? Et la Guérisseuse de Kirgan ? Tu devrais y songer avant d’escorter cette folle jusqu’aux murailles pestiférées de Diantra !

**Baldrim, mon ami, quand cesseras-tu de me persécuter ?** Marmonna le Chasseur à voix haute.

- Par la sainte barbe de ma Mère, Lann, quand tu deviendras raisonnable !

Thorkren entendit distinctement Nàwen étouffer un rire moqueur. Il soupira. Après son accès de jalousie morbide, sa Femme passait outre. Et comme toujours, elle donnait raison au Nain. Foutu Baldrim !

La Guérisseuse de Kirgan !

Cette histoire datait de plus de vingt années. Mais elle avait marquée les esprits. D'autant qu'elle allait finir dans le crépitement d’un bûcher, les hurlements arrachés par une souffrance indicible, et les relents écoeurant de la chair humaine qui grille dans les flammes.

La troupe stationnait alors entre le Mont Kirgan et sa forteresse creusée à même la roche, et les hautes falaises d’Arkan. Depuis quatre mois, les fantassins s’étaient enfoncés dans les terres, pourchassant Al’Erb et ses Rogues. Le Capitaine Butor avait parié avec Kreg Tholan, son second, que Erb, épuisé par une si longue course, ne pourrait jamais entreprendre l’ascension des Falaises sans ravitailler. Et comme les portes de toutes les villes et villages lui étaient à jamais closes, Erb ne pouvait plus compter que sur lui-même pour rassembler eau et nourriture. Lui et ses quarante lascars n’avaient plus d’autre alternative que de traquer le bouquetin et le mouflon.

Lorsque Thorkren, envoyé en éclaireur trois jours auparavant, avait regagné le bivouac et annoncé à Butor que le Pillard campait deux lieues à l’ouest, le Capitaine n’avait pu réprimer son enthousiasme. Il avait décrété que la bataille finale aurait lieu le surlendemain : il voulait des troupes fraîches, reposées, en possession de tous leurs moyens pour écraser Al'Erb et sa bande d'assassins. Pendant que sa Compagnie prendrait des forces, les fuyards auraient à s'épuiser en vaines chasses, se brisant les jambes sur le relief déchiqué.

Il renvoya Thorkren et un de ses camarades d’alors, le noueux Grimz, un vieux bidasse expérimenté que la promiscuité avec les bleus rendait particulièrement raisonnable, lui qui nourrissait depuis des lunes des tendances suicidaires. Thorkren se remémorait ce petit homme roux à la peau grise qui promenait sur le monde des yeux d'un bleu si pâle qu’ils semblaient blancs. Il se souvint aussi de l’angoisse qui l’étrangla lorsqu’il apprit qu’il devrait faire équipe avec ce demi fou qui se jetait dans la mêlée sans jamais tenir compte du rapport de force, faisant tournoyer sa masse d’arme au dessus de sa tête et criant comme une hyène.

Ils partirent donc, Thorkren forçant l’allure pour se porter en avant et prévenir toute escarmouche intempestive provoquée par la folie furieuse de son partenaire.

Ensemble, ils contournèrent le campement de Erb et s’engagèrent au pied des Falaises, sur les premiers surplombs de roche dominant la bande de fuyards. Sous le vent, nul ne décelait leur présence, et ils purent tout à loisir organiser leur surveillance, notant les mouvements des hommes, les heures de quart, les relèves des sentinelles. Erb avait servi dans l’armée de Diantra, et il avait conservé de sa vie antérieure, la rigueur qui sied à un soldat entraîné.

Aux premières heures de nuit, Grimz avait pris son quart, et Thorkren abattu par la fatigue de deux longues courses avait sombré dans un profond sommeil aussitôt que sa tête avait touché la pierre poussiéreuse du nid d’aigle.

A l’aube, il s'était réveillé en sursaut, surpris que Grimz, pourtant prompt à partager ses corvées, ne l’ait pas secoué pour lui passer la relève. Il trouva le rouquin prostré dans une flaque d’urine. Dans l’air flottait l’odeur bizarre des cendres froides mélangée aux relents sucrés de la viande et du sang. Thorkren jeta un coup d’œil sur le campement des Rogues. En contrebas, gisaient quarante cadavres. La tête de Al’Erb contemplait de ses yeux morts le carnage du haut d’une lance fichée dans son corps démembré.

Lorsque Butor fut informé, et qu’il eut ravalé la noire déception d’avoir été privé de sa victoire, il chargea Kreg Tholan et deux vétérans de faire la lumière sur l’affaire. Grimz ne put jamais témoigner de ce qu’il avait vu : seuls ses cris de bête traquée et une panique hystérique égaillèrent jamais son mutisme, jusqu’au jour où il se jeta sur une herse. Tous les Rogues avaient été égorgés, méthodiquement, avec une lame fine et superbement aiguisée. Ils gisaient exsangues comme victimes d’un lourd maléfice. Nul n’avait pu se défendre. Pas de trace de lutte, pas d’expression figée par la peur ou la fureur. La mort était descendue sur eux comme un nuage de poussière après que le vent fut tombé.

Des traces de pas humanoïdes orientèrent les recherches vers un hameau poussiéreux au nord ouest de Kirgan. Kreg Tholan fit fouiller les cahutes. Avec le temps, Thorkren admettait que les soldats chargés de la besogne s’acquittèrent de leur tâche sans la moindre précaution pour les possessions des pauvres villageois, ni la plus petite once de respect ni pour les bêtes ni pour les gens. Ils jetèrent tout le monde par portes et fenêtres, rouant hommes et femmes de coups de bottes, ne se privant pas au passage d’égorger un ou deux moutons pour améliorer leur frichti.

Lorsqu’ils enfoncèrent la porte de la dernière masure, - une bicoque de planches coiffée d’un toit improbable enduit d’un torchis de paille et d’excréments -, ils furent accueillis par une femme, jeune, frêle, à la peau laiteuse. Son apparence comptait parmi les plus singulières qu’il avait été donné à Lann Al’Thorkren de croiser sur sa route : ses cheveux étaient aussi rouges que les yeux de Térébantine, et son regard mauve n’appartenait pas à ce monde. Le Chasseur ne se rappelait plus le nom de la Fille. Tout ce dont il se souvenait, c’est qu’elle entassait dans sa baraque crasseuse plus de plantes, de poudres, et d’animaux plongés dans des bocaux que de meubles ou d’effets personnels. Kreg Tholan trouva sur sa table, au milieu des livres et des parchemins qui la jonchaient, une trousse pleine de petits couteaux. Des lames minuscules qu’il suffisait de laisser glisser sur la peau pour la trancher jusqu’à l’os. A sa mine, et si l’on considérait cette chevelure sanguine, il ne faisait pas de doute que l’on avait affaire à une fieffée Sorcière, qui, - certainement par pure cruauté ou pour conserver son éternelle jeunesse -, s’était chargée, à grand renfort de mauvais sorts, de magie noire et au final, grâce à ses merveilleuses petites lames effilées comme les plus effilés des rasoirs, des Rogues de Erb ! Tholan fit procéder à l’arrestation de la Fille.

Les vétérans racontèrent plus tard que la rencontre entre le second de Butor et la Sorcière avait été un coup de foudre réciproque. Dès qu’il l’avait vue, Kreg Tholan avait ressenti pour la Fille une attirance soudaine, violente, et il était évident, à bien observer la Sorcière, que la pulsion était réciproque ! Les vieux soldats prétendirent même que Tholan avait mis tout son zèle à faire brûler la Fille pour ne pas se consumer d’amour pour elle.

Après un simulacre de procès, durant lequelle l'accusée nia à chaque instant sa culpabilité, la Fille aux Cheveux Rouges fut conduite sur l’échafaud et brûlée vive.

Rien qu’à l’évocation de cette aventure, Thorkren sentait encore l’odeur de son corps carbonisé lui caresser les narines.

Puis la troupe se retira. Thorkren connut d'autres combats.

Un an plus tard, Butor et Kreg Tholan apprirent qu’une goule avait été terrassée à Kirgan par un héros local. Une goule à la mâchoire fracturée qui pour se gorger du sang de ses victimes leur ouvrait la gorge d’un coup de ses griffes tranchantes. Son appétit de sang était tel qu’elle n’avait pas hésité à ravager plusieurs fermes et plusieurs hameaux autour de Kirgan. Avant de périr, elle s’était vantée avoir décimé une troupe plusieurs mois auparavant. La population locale avait crié à l'injustice ! Les brutalités commises par la Compagnie du Capitaine Butor se transformèrent en exactions. Certaines allèrent jusqu'à jurer que pas une femme n'avait échappé aux derniers outrages, et que les Fantassins s'étaient livrés au massacre systématique des troupeaux et à la destruction des récoltes. Mais pire ! On accusa Kreg Tholan d'avoir brûlé la Guérisseuse locale qui, seule contre tous, s'était élevée contre la folie meurtrière de l'Armée...

Baldrim avait raison.

Cheveux verts et yeux rouges ou Cheveux rouges et yeux mauves. Aptitudes prononcées pour la cueillette des simples et l'herboristerie. Fréquentation habituelle et désinvolte de la maladie et de la mort. Magnétisme d'une personnalité hors norme. Il n’en fallait pas beaucoup plus pour être accusé de tous les maux de la terre, et poussé sur les fagôts.

A trop frayer avec ce genre de créatures, le malheur pouvait s'avérer contagieux.

Thorkren s’ébroua. Il lui fallait raison garder. Il se promit donc d’abandonner Térébantine à Diantra, quoi qu’il puisse arriver. D’ailleurs, ce qu’elle réveillait en lui relevait de la magie : il était loin d’elle et déjà, elle ne lui plaisait plus tant que cela.


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