Une coupe de vin pour messire

Miria était arrivée à Diantra voici quelques jours et avait effectuée plusieurs petits boulots, guère plus intéressant les uns que les autres, pour gagner sa maigre pitence.
Elle avait trouvée à séjourner dans cette auberge, qu'elle avait choisi car le nom, Le Miroir Aux Alouettes, l'avait d'abord attiré et aussi parce que l'état de ses finances ne lui permettait pas de s'offrir le luxe.

Ashnar lui avait toujours dit que Diantra était une ville magnifique que tout être humain se devait de connaitre un jour ou l'autre. Aussi la jeune femme avait-elle prise la décision de s'y rendre sans tarder.

Son mentor avait dit vrai, Diantra était effectivement une ville superbe, si on exceptait le quartier qui fut rasé pour endiguer la Peste.
Miria n'avait d'ailleurs pas jugée nécessaire de s'approcher de l'endroit en question, préférant le secteur des marchands, bien plus idéal pour trouver du travail.

Elle entra comme chaque soir à l'auberge, faisant un détour par la taverne pour se restaurer, exténuée par une journée de labeur arraçante et déprimante.
La jeune femme se posa au bar, s'isolant dans un coin devant une chope de bière bien moussante.
Avec sa tenue d'un blanc sale mais bien entretenue, ses plaques d'armure et son épée accrochée à son dos, on pouvait dire que Miria détonnait particulièrement au milieu de la bande de boit sans soif qui composait 90% de la clientèle de la taverne.
Elle avait drôle d'allure l'ex-mercenaire devenue voyageuse, avec son regard glacial et ses cernes sous les yeux et semblait épuisée.
Ses pensées paraissaient perdus dans la bière et personne ne prétait attention à une femme qui tenait plus du dragon guerrier que de la frèle gazelle se cherchant un compagnon. Cela arrangeait Miria car c'était exactement ce qu'elle désirait, qu'on lui fiche la paix !

"Une bonne journée aujourd'hui ?" questionna l'aubergiste tout en posant l'assiette de ragoût qu'avait commandé un instant plus tôt la jeune cliente.

"Pas vraiment..." se contenta de répondre Miria d'un ton lasse.

L'aubergiste, un gros bonhomme barbu arborant fièrement la cinquantaine grisonnante, se contenta de ricaner gentiment en guise de commentaire, puis tourna des talons pour retourner à ses occupations, laissant Miria déguster seule son ragoût au contenu pas vraiment identifiable.

Miria ne s'était pas occupée de l'homme qui était venu se poser à ses côtés. Elle ne s'était pas non plus intéressée à ses faits et gestes lorsqu'il avait mit sa bouteille sur le comptoir et installé une coupe devant la jeune femme.
Elle n'avait pas réagit le moins du monde à ses discours sur la beauté des elfes, ni lorsqu'il s'était saisi de sa main pour la baiser.

Miria se contenta de l'ignorer et de continuer son repas tranquillement.
Elle était habituée depuis longtemps à ces charlatans de la parlote, ces mâles en chasse perpétuelle de la gente féminine dans le seul soucis de leur propre satisfaction.

Miria savait que sa grande taille et son corps longiligne attiraient les hommes autant qu'ils les effrayaient, et en avait fait son partis au fil du temps.

La jeune voyageuse acheva son ragoût, engloutie sa bière puis fixa la bouteille de vin de l'homme. Elle s'en saisit, en versa son contenu dans sa chope et l'avala d'un trait, suite à quoi elle tourna des talons et sorti de la taverne sans dire un mot.
Elle resta dehors, sous le péron, fixant le soleil qui était en train de se coucher doucement.

Miria se retourna lorsqu'elle entendit arriver quelqu'un derrière elle.
C'était un vrai réflexe chez elle de réagir au moindre bruit, à la moindre activité se déroulant dans son dos. Ce réflexe, elle l'avait acquis tout le long de son éducation de mercenaire et il était devenu comme un seconde nature pour la jeune femme.

Miria fut rassurée en voyant la mine patibulaire de l'homme qui avait tenté de l'amadouer dans la taverne. Visiblement, il n'avait guère l'intention d'en rester là et avait l'air de se montrer insistant.

Est-ce un effort si difficile d'adresser la parole à un étranger ? avait demandé l'homme. Ou alors est-ce que Miria était sourde ? avait-il cru bon de rajouter.

"Ni l'un, ni l'autre." se contenta de répondre l'ex-mercenaire sur un ton qui ne laissait transparaitre aucune émotion de quelques sortes.

"Je suis juste las, j'ai eut une journée de travaille éreintente. Votre vin était bon, mais votre compagnie ne m'intéresse pas, sauf si vous avez un emploi bien payé pour moi !"

Sur quoi, Miria reprit sa contemplation du couché de soleil et se laissa bercer doucement par la chaleur dégagée par les doux rayons lumineux de l'étoile.