Ophan Leänn
Elfe
Nombre de messages : 17 Âge : 378 Date d'inscription : 14/11/2009
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : Taille : Niveau Magique : Non-Initié
| Sujet: Ophan Leänn [Aventurière] Sam 14 Nov 2009 - 12:45 | |
| PRENOM : OphanNOM : LeännAGE : 363 ansSEXE : féminin RACE : ELFEPARTICULARITES :
Une opulente chevelure bleue de nuit qu’Ophan Leänn tresse généralement en une longue et épaisse natte. Ses cheveux sont sa fierté. Lorsqu’elle les lâche, ils cascadent jusque derrière ses genoux, fins et brillants, chatoyant comme la plus raffinée des soieries. Sa crinière est si abondante que nue, Ophan peut s’en draper comme elle le ferait dans une étole lisse et lumineuse. L’Elfe a choisi de teindre sa chevelure dans une nuance subtile de bleu sombre pour rehausser la pâleur de son teint et l’eau de ses yeux. Coquetterie, certes, mais avant tout, volonté farouche de se démarquer de ses semblables.
ALIGNEMENT : neutre mauvais
METIER : Femme d’affaires, commerçante, aventurière, mercenaire, voleuse… Dans sa très longue vie, Ophan Leänn a tout fait, privilégiant les hasards de la bonne fortune. Car Ophan déteste autant la pauvreté que le travail. Le plus important pour elle : que l’or coule à flots, dans les meilleurs délais possible, et idéalement, sans qu’elle n’ait à payer de sa personne. Précisons toutefois qu’elle n’hésitera jamais à tuer pour parvenir à ses fins. C’est dans l’écrin de La Dross qu’elle exerce maintenant ses talents, se livrant aux trafics les plus divers.
CLASSE D’ARME : corps à corps
EQUIPEMENT :
Raffinée jusque dans la fureur du combat, Ophan Leänn porte une cotte du plus fin mithril, réalisée d’une seule pièce, qui la protège des chevilles jusqu’au ras de son long cou. Une merveille, unique en son genre, assemblée maille par maille par le meilleur artisan d’Aleandir. Les anneaux entrelacés sont si fins que la cotte semble une seconde peau qui épouse parfaitement le corps de l’Elfe, ne dissimulant rien de la perfection de sa silhouette. Le décor agrémentant la cotte, - mailles plus foncées tressées en légères arabesques -, se veut minimaliste et n’a été conçu que pour servir la splendeur des proportions d’une pure beauté elfique. Comble de l’excellence, l’artisan (l’appeler « l’artiste » ne serait pas galvauder le terme !) a traité l’alliage dans la masse pour qu’il prenne la teinte dominante de la carnation de l’Elfe. Ne serait-ce les renforts, à peine plus foncés que le reste, qui mettent en valeur la finesse du cou et des poignets, le léger renflement des seins, la longueur interminable des jambes et l’étroitesse du bassin, on pourrait croire que Dame Leänn se promène sans le moindre vêtement…
Ophan Leänn porte des bottes qui montent haut sur le genou. Des bottes de cavalier resserrées à la cheville par une mince chaîne qui rappelle le mithril de sa cotte de mailles.
Il n’est pas rare qu’elle se dissimule aux regards dans une lourde cape sombre, aux couleurs de sa luxuriante chevelure. Lorsque Leänn porte ses gants, c’est le signe qu’elle a pris la décision d’agir. Et donc de se salir les mains.
L’armement de l’Elfe est simplissime. Une épée à la manière elfique, entre Katana et Cimeterre, - longue et fine poignée drapée de cuir, lame effilée à simple fil tranchante comme un rasoir -, et une dague, robuste et sans ostentation. Dans la chaleur de l’affrontement, Ophan Leänn ne répugne pas à utiliser ses deux lames simultanément. C’est alors de la dague qu’elle frappe toujours le coup de grâce.
Dans le privé, Ophan Leänn préfère la soie au mithril. Elle possède une incroyable collection de robes, jubans, gakurans, obis et kimonos, d’une valeur inestimable. Mais jamais elle ne s’affublera du moindre bijou. Ses oreilles ne sont pas percées, et ses longs doigts aux ongles courts et soignés n’ont jamais connu le contact des métaux, même les plus précieux.
DESCRIPTION PHYSIQUE :
Ophan Leänn pourrait servir d’icône à la pure beauté elfique dans tout son somptueux dépouillement. Avec cinq pieds et huit pouces, elle est grande comparée aux femmes de sa race. Comme elles, elle est longiligne. Epaules étroites, bras fins presque graciles, taille prise et jambes interminables. Rien ne laisse deviner la puissance qui peut se dégager de ce corps presque fragile. La démarche est souple et altière, le port de tête, royal. Les gestes sont déliés, empreints de grâce et de distinction. Ophan Leänn ne se meut pas : elle danse et ondule, précieuse et envoûtante comme une flamme. En se mêlant à la diversité des Peuples, elle a appris à aimer sa poitrine, peut être trop formée pour ses Semblables, et sait la mettre en valeur, quelle que soit sa vêture :elle a bien vite compris l’attrait de ses seins pommés chez les mâles des autres races, et combien cette particularité, chez eux, la rendait plus désirable que toutes les autres sylves. Ophan s’enorgueillit du galbe de ses cuisses, du fuselage de ses mollets, de la petitesse de son pied, et sait trouver tous les artifices vestimentaires pour laisser apprécier la beauté de ses jambes. Ses mains sont d’une extrême finesse et s’animent avec grâce lorsqu’elle parle avec passion d’une voix chaude et flûtée.
Même si sa beauté et sa distinction sont rarement disputées, c’est surtout son visage qui marque les esprits. Il intrigue et séduit par l’absence d’angle vif ou de caractère saillant, ses traits à peine marqués se fondant dans une totale harmonie. Ses hautes pommettes et son menton étroit accentuent l’ovale de ce visage en amande. Son nez est petit, court, et légèrement retroussé. De face, son arête est si fine qu’elle marque à peine une ombre. Ce qui frappe au premier regard, c’est sa bouche aux lèvres délicatement ourlées fermées sur une moue délicieuse, et surtout, ses yeux immenses. Des yeux de chat qui s’envolent vers les tempes dans une magistrale diagonale. Des yeux d’un bleu changeant, tantôt si clairs qu’on les croirait miroiter les reflets du mercure, tantôt si foncés qu’ils rappellent les riches nuances des crépuscules d’été. Ils donnent à Ophan Leänn une lumière unique, que nul ne peut oublier. Un regard aussi changeant que la mer et le ciel, qui capture sans pitié toute la clarté pour l’éclater en mille et une nuances fugaces. Un regard fascinant et apaisant. Car si l’œil bleu irradie souvent une mortelle froideur, les yeux de l’Elfe se réchauffent d’une clarté inattendue, comme si un soleil avait été dissimulé sous la glace.
La perfection effraie. C’est l’impression générale qui se dégage lorsqu’on se confronte à Ophan Leänn. Trop de superlatifs s’entrechoquent. Tout en elle paraît trop lisse. Derrière l’apparence d’une éternelle jeunesse, l’intuition d’une intelligence plusieurs fois séculaire laisse pantelant d’inquiétude. Et on se prend à rechercher le petit défaut, la faute de goût de la Nature qui rendrait l’Elfe plus réelle, plus tangible. Toute la séduction de Ophan Leänn réside alors dans sa faculté à se rendre soudain accessible. Lorsque la reine vierge, distante et intouchable, se rapproche soudain, s’ouvrant sans réserve à l’autre comme un cadeau des dieux, les cœurs fondent et les corps s’enflamment. Ophan en joue. Après plus de trois siècles d’existence, elle en joue même comme une virtuose.
DESCRIPTION MENTALE :
Si elle avait choisi de demeurer auprès des Siens et d’assumer son Rang, Ophan Leänn occuperait sans doute d’importantes fonctions. Elle serait ministre ou conseiller. Car elle jouit depuis toujours d’une intelligence aiguë, froide et calculatrice. Son principal atout réside dans son empathie, dans cette capacité sans limite à s’insinuer dans les méandres de l’esprit de l’autre jusqu’à devenir l’autre lui-même. Il lui suffit de connaître sa cible pour être capable de raisonner comme elle, à sa place. Sans jamais rien laisser paraître que distance et détachement. On finirait même par la croire désintéressée. Et c’est là la plus dangereuse des erreurs que l’on puisse commettre s’agissant de Ophan Leänn. Car l’agilité de son esprit, qu’elle semble mettre à l’entière disposition d’autrui sans la moindre contrepartie, ne recherche de fait que la satisfaction immédiate de ses propres intérêts.
Paradoxalement, alors que l’intelligence planifie sur le long terme, capitalise sur la durée, celle de Ophan Leänn privilégie l’instant présent. Peu lui importe de quadrupler ses gains dans le long terme si elle empoche immédiatement. Ce trait de caractère la porte inévitablement à la facilité, alors qu’elle disposerait de tous les atouts pour se projeter dans des stratégies plus complexes et plus juteuses. Néanmoins, l’Elfe reste d’une prudence serpentine et ne pose jamais le pied sur un sol qu’elle n’a mainte fois sondé de la pointe des orteils. Elle commet donc peu d’erreurs, et dans une longue vie d’aventures, elle a toujours su se retirer avant de courir de véritables dangers.
Ophan Leänn est charmeuse parce qu’elle a besoin d’être aimée et reconnue. Elle n’apprécie rien de plus que de se sentir unique, et pour se faire remarquer, elle n’hésitera pas un instant à choisir la marginalité pour émerger du lot.
Apparemment inaccessible, elle sait se lier et s’offrir sans retenue à ses interlocuteurs. Pour cela, et parce que sa compagnie est presque toujours vécue comme un privilège, elle devient vite précieuse, incontournable. Son absence peut être vécue comme un manque, comme une amputation, et elle joue avec finesse de ses engagements et de ses retraits.
Ophan Leänn n’aime rien plus que le plaisir sous toutes ses formes. Alors que d’autres, voués à l’éternité, sombrent dans l’ennui et se blasent, la vie est pour Ophan un miracle sans cesse renouvelé, et elle puise à deux mains dans le quotidien la source de sa joie d’être au monde. Elle ignore le spleen et vomit l’insatisfaction. Parce qu’elle est volontaire en diable, parce qu’elle aime entreprendre, et parce qu’elle choisit toujours l’action, rien ne lui semble jamais hors de portée. Elle adore les expériences nouvelles, et par-dessus tout, elle se plaît à recommencer.
Fondamentalement, il n’y a pas de vice chez Ophan Leänn. Pas de perversité ni de déviance. Elle est une force qui va, le feu ardent qui brûle, la tempête qui bouleverse les paysages. Car tout ce qu’elle touche doit prendre sa couleur. C’est le prix à payer pour lui complaire.
Enthousiaste, elle n’a jamais hésité à se remettre en cause, à recommencer à zéro, du moment que le changement et les surprises l’attendaient sur la route. Si les Elfes ont perdu depuis longtemps leur capacité à s’adapter, se vautrant dans la décadence, Ophan Leänn, elle, saisit la réalité à bras le corps et la transforme selon sa volonté.
Point noir sur la toile de ce portrait plein de vigueur et empreint d’une force vitale sans beaucoup d’équivalent : Ophan ne porte pas de réel intérêt à la vie des autres. Si elle se conçoit éternelle, les autres, éphémères, sont nés pour passer. Alors, les aider à passer plus vite encore ne lui pèse pas plus sur la conscience que de cueillir ces roses qu’elle adore.
Née du côté de la Lumière, elle a choisi d’explorer d’autres voies. S’ennuyant parmi ses semblables, parce que leur ressemblant trop et ne voyant pas très bien comment elle se distinguerait des autres femmes de sa Race, elle a opté pour l’exil. Sa curiosité des autres l’a portée au devant des Peuples de Miradelphia, et il n’est pas une ville dans le monde où elle ne compte pas au moins un ami ou une conquête. Sinon le Puy d’Elda… Encore que certains racontent qu’elle entretient avec des dignitaires de la Dothka les meilleures relations du monde.
Imaginative, Ophan Leänn a décidé de refonder les limites entre le Bien et le Mal. Et pour départager les deux univers, elle a inventé une balance qui lui est toute personnelle. Ce qui lui va est bel et bon. Ce qui ne lui convient pas est par essence mauvais. Inutile de préciser que la pesée varie en fonction du temps qu’il fait et de ses caprices. Ce qui l’a tout naturellement poussée à reconsidérer à maintes reprises la portée morale du vol, de l’extorsion, du rapt et du meurtre. Objective, elle s’étonne elle-même de voir chaque jour reculer les frontières de sa conscience et de son éthique. Pragmatique, elle s’accommode de tout, y compris de ses propres contradictions.
Dernier aspect de cette personnalité façonnée par le temps et l’expérience. Et non des moindres. Acculer Ophan Leänn, c’est se jeter dans les bras de la Mort. La belle élimine sans regret les gêneurs et les briseurs de rêve. Maniant l’épée avec virtuosité, son courage physique la porte à exécuter elle-même ses secrètes sentences. C’est de face qu’elle attaque, toujours par surprise, et avec la rapidité du cobra. Même si elle ne crache pas sur un bon duel, en bonne et due forme. Sa peau parfaite l’atteste, elle n’a jamais livré un combat qu’elle pensait pouvoir perdre…
HISTOIRE :
Ophan connut une enfance dorée dans les jardins éternels de la belle Aleandir. Que redouter lorsque le hasard vous a transporté au sein d’une famille richement dotée depuis des générations ? Que craindre lorsqu’on vient au monde au cœur d’une tribu qui considère ses fils et ses filles comme ses plus précieux trésors ? Il ne fut pas une heure de ses jeunes années que l’Elfe passa seule. Nourrices, précepteurs, maîtres d’armes, maître d’équitation, maître de musique se succédèrent sans relâche à son service. Fille modèle de parents exigeants au-delà du raisonnable, l’enfant vécut longtemps dans la crainte de décevoir. Au point de se donner cœur et âme à ses apprentissages, souvent jusqu’à l’épuisement, pour toucher du doigt cette excellence que tous attendaient d’elle. Cultivée à l’extrême, férue d’histoire, joueuse de flûte et de luth, Ophan avoue avoir particulièrement apprécié ses cours d’escrime. Le maniement d’une lame épuisait son intarissable énergie et comblait son inextinguible appétit de mouvement. Pour satisfaire sa fille unique, son père n’avait pas hésité à faire rechercher les meilleurs bretteurs de Miradelphia, et à les couvrir d’or pour qu’ils enseignent sa progéniture. Mais Ophan, rendant grâce au Beau Peuple, avait choisi l’épée elfique comme arme de prédilection. A l’adolescence, elle développa un goût immodéré pour les arts équestres, et elle s’y adonna avec passion. Les écuries paternelles accueillirent bien vite la crème des crèmes des équidés. La jeune femme adorait le changement, et chevauchait de préférence la monture répondant en tous points à ses aspirations du moment. Le temps passant plus vite pour les chevaux que pour les Elfes, Ophan pleurait la disparition de ses étalons comme celle d’un tout proche et ne trouvait de consolation qu’en caracolant sur des bêtes au caractère de plus en plus trempé, vives comme la foudre.
Et puis, il fut l’heure de choisir sa voie. Le commerce paternel lui ouvrait grand les bras. L’Elfe aurait pu y exalter sa connaissance aiguisée des arts. Les entrepôts de son père drainaient les peintures les plus fines, les meubles les plus raffinés, les tissus les plus précieux que l’on puisse trouver en terres elfiques. Des œuvres d’importations bien sûr, mais on répugnait alors à reconnaître que les Elfes perdaient leur génie et tous fermaient les yeux sur la provenance des marchandises. Le patriarche, lui, était né les yeux grands ouverts, et il avait préparé l’avenir des siens en anticipant l’incroyable tarissement de l’inspiration elfique. Grand voyageur, il avait financé ça et là dans les contrées humaines des ateliers où des artisans reproduisaient à l’identique les meubles fabuleux conçus par ceux de sa Race, à partir de plans et de matériaux qu’il fournissait lui-même. Mais Ophan n’avait alors pas le cœur aux affaires. Elle rêvait d’amour, mais désespérait de rencontrer l’âme sœur à Aleandir. Bien sûr, la fortune de sa famille l’établissait comme le plus convoitable des partis. Mais les sangs purs et les antédiluviennes dynasties de la capitale, toutes plus riches les unes que les autres, répugnaient à unir leurs fruits à des commerçants fussent-ils encore plus aisés qu’eux-mêmes. Et sa mère, éternelle ambitieuse, préservait son enfant des amourettes sordides nouées avec des garçons issus des classes subalternes. Pire, bien qu’admirable, tant sur le plan physique que sur le plan spirituelle, Ophan avait compris qu’elle n’avait rien de plus à offrir que toutes les autres jeunes femmes de son âge, aussi somptueuses et raffinées qu’elle. Et cette certitude affectait son moral au point de la rendre mélancolique et solitaire. Elle rêvassait donc, et les années s’enfuyaient inexorablement, la laissant toujours plus seule et plus neurasthénique. En parcourant, languide, le monde de la pensée qui s’était ouvert à elle, Ophan Leänn développa la conscience aigue de la décadence de sa Race. Et très vite, elle prit en grippe ses semblables. Au point de se sentir étrangère parmi les siens.
Un soir qu’elle chevauchait Ninniach, un étalon gris pommelé rapide comme le vent, elle poussa hors de la ville, et s’enfonça dans la Forêt d’Anaeh. Cette nuit là, elle dormit à la belle étoile et elle se promit à elle-même de ne jamais revenir en arrière. Le lendemain et les jours suivants, elle galopa vers le sud-ouest. Touchant Wyslena, elle consentit à donner de ses nouvelles à ses parents. Contre toute attente, son Père, bien que mort d’inquiétude, salua sa fugue et l’encouragea. Naïf, il n’y vit que foucades de jeunesse. Mécène, il finança la fuite de sa fille. Soudain, le réseau paternel se transforma en bailleur de fonds. Et il suffisait à Ophan de s’arrêter dans une ville de taille respectable pour trouver tout ce dont elle avait besoin : équipements, vivres, argent frais… Elle put même louer les services d’escortes armées pour lui faire traverser des territoires plus hostiles, et des guides pour lui ouvrir la route. A chaque étape de son voyage, elle daignait donner quelques nouvelles. Et en retour, au bout de l’étape suivante, elle n’avait qu’à se servir et à se vautrer dans le fleuve intarissable des largesses paternelles. La vie, pure et violente, l’habitait à nouveau. Sa curiosité sans fin se baignait dans les eaux changeantes de la nouveauté. Aleandir avait été son tombeau. Un monde neuf et inconnu lui avait offert sa renaissance. Ainsi, dans un périple qui dura plus de trois années, elle décrivit une diagonale parfaite jusque sous les murs d’Ydril.
Aussitôt, les voiliers d’Ydril la fascinèrent. Ils devinrent pour elle la promesse d’un voyage infini. Comme si l’horizon, soudain, n’était plus une frontière, mais la porte d’un ailleurs qui l’obsédait. Elle échoua à convaincre son père d’acquérir un navire pour ses affaires. Mais elle jouissait d’assez d’or pour prendre des parts dans une aventure de mer. Elle se chercha alors des associés. Et c’est Ederson Blaz qu’elle trouva. Blaz avait alors trente ans à peine, mais il avait bourlingué sur les deux océans et la Mer Olienne n’avait pour lui plus aucun secret. Ce marin courageux, qui s’était découvert une vocation maritime après avoir été enrôlé de force comme mousse à l’age de sept ans, s’était endetté jusqu’à la mort pour s’acheter une vieille caraque qu’il avait fait baptiser « Le Scintillant ». Grand, mince, délié, le cheveu noir comme les ailes d’un corbeau mais les yeux aussi bleu que la mer, Ederson Blaz avait tout pour plaire. Il promenait sa belle carcasse dans les tavernes de la ville portuaire à la recherche de généreux donateurs, s’arrêtant souvent aux bords de la jetée pour écouter, les yeux mi clos, le chant du ressac. Ophan Leänn fut présentée à Blaz par un banquier, ami de son Père. Ce fut un choc pour l’homme comme pour l’elfe. Blaz n’avait jamais rencontré femelle aussi sophistiquée et profonde que Leänn. Ophan n’avait jamais réalisé qu’il puisse exister une créature aussi passionnée et enthousiaste qu’Ederson. Ils partirent à la découverte l’un de l’autre, avec défiance d’abord, puis avec une avidité qui leur était à tous deux naturelle. Et à la surprise générale, ils approfondirent leur connaissance réciproque en se jetant dans un lit. Leänn était la première elfe que Blaz étreignait, et le marin tout bonnement le premier mâle auquel Ophan ne s’était jamais donnée. Il faut croire que l’expérience fut à la hauteur de leurs espérances, puisque les deux amants s’associèrent et prirent ensemble la mer. Ederson Blaz apprit à sa maîtresse tout ce qu’il savait de la marche d’un navire, et comme Leänn avait pour apprendre des dispositions exceptionnelles, elle devint très vite un capitaine des plus acceptables. Quant à l’Elfe, elle entreprit de polir un peu les aspérités de son amant et de lui donner quelque consistance. Comme l’homme ne voulait pas être en reste avec celle qu’il serrait chaque nuit dans ses bras, Blaz devint assez vite un commerçant chevronné. Pendant les quinze années que dura leur association, les associés ne s’enrichirent pas, - les voies maritimes ne rapportant rien à Miradelphia -, mais ne s’appauvrirent pas non plus. Et Leänn vivait sur un petit nuage. Bien sûr, Ederson vieillissait. Mais à quarante et quelques années, avec ses cheveux qui grisonnaient, il conservait intact ce charme sauvage qui faisait frémir l’Elfe chaque fois qu’elle le voyait. Quant à Blaz, l’immuable beauté de Leänn le terrifiait, et il se détachait d’elle imperceptiblement. Il commença par simplement découcher, préférant les tavernes à sa cabine, jouant son argent aux dés et buvant plus que de raison. Et cela, l’Elfe lui pardonna sans peine. Mais lorsqu’elle le surprit au lit avec une jolie rousse de vingt ans sa cadette, Ophan Leänn en eut littéralement le cœur brisé. Elle en perdit jusqu’à la faculté d’aimer, et elle se détesta elle-même de n’avoir pas été capable de satisfaire un être aussi primaire qu’un Humain. Elle en voulut tellement à son amant qu’elle le tua. Elle le fit en pleine mer, au vu et au su de tout l’équipage, au cours d’un duel rondement mené, après qu’Ederson Blaz eut échoué à se faire pardonner par sa belle pour son incartade. L’Elfe fit jeter le cadavre par-dessus bord, et s’attacha le silence des marins en leur offrant « le Scintillant ».
Ce coup d’épée la libéra toute à la fois de son amour pour Blaz et de son amour pour la mer. Ophan Leänn s’établit à Ydril où elle ouvrit ateliers et entrepôts dans le cadre de l’entreprise familiale. Elle devint vite une personnalité incontournable de cette ville facile ouverte sur le monde. Et amassa en quelques décennies une fortune personnelle rondelette. Elle habitait alors une maison à colombages dont les fenêtres donnaient sur les embarcadères. Elle n’aimait rien de plus que regarder les navires sortir en mer, leur voilure claquant dans le vent. Mais comme elle avait tourné le dos à Aleandir pour oublier une jeunesse bercée par l’ennui, elle ne monta plus jamais sur un bateau. Avisée, elle s’associa avec quelques prêteurs sur gages, et assura quelques fortunes de mer. Nul ne lui connaissait de vie amoureuse. Pourtant, quelques mâles partagèrent sa couche. Mais aucun ne voulut s’attacher cette assoiffée d’absolu. Et bien vite, Leänn se forgea une philosophie selon laquelle il n’est guère utile de se donner si ce n’est pour satisfaire un intérêt tangible. Son lit devint pour elle un de ses nombreux instruments pour manipuler les autres et parvenir à ses fins.
L’ennui s’installait à nouveau comme une maladie chronique. Ophan Leänn sella son nouveau cheval et repartit à la conquête du monde. S’enrichir et faire la fierté de son père furent les alibis de ses incessants voyages. Elle s’attaqua à une montagne : lier des relations avec les Nains. Rien que trouver des intermédiaires solides lui prit quelques cinq années. Et il lui fallut encore deux ans pour convaincre ces derniers de l’accompagner jusque dans la ville troglodyte de Kirgan. Dans une civilisation habitée par le goût du lucre, son talent à exacerber les tentations fit merveille. Bientôt, elle s’établit dans les murs de la capitale Naine. Elle tourna toute sa science à s’attacher des associés solides. Et comme les Nains n’ont pas pour les Elfes une passion dévorante, Ophan Leänn se trouva un faux nez. Azdal Belgen, vénal et corrompu joaillier de Kirgan, lui prêta sa barbe rouge drue comme de la paille de fer et la devanture de sa boutique, pour lancer ses affaires sur les Territoires du Grand Nord Ouest. Belgen touchait sa commission, et même s’il était gourmand, savait pertinemment que la manne céleste que faisait pleuvoir la belle Leänn se tarirait le jour où l’on apprendrait que c’était elle et non pas lui qui tirait les ficelles. Deux fois par saison, une caravane partait de Kirgan pour les entrepôts d’Aleandir. Des mercenaires Nains fournissaient une escorte jusqu’à la sortie de Lante, et les marchandises étaient ensuite convoyées jusqu’à Aleandir à travers les Terres Elfes sous protection de quelques Eternels triés sur le volet.
Azdal Belgen avait de tout un appétit féroce. Il toléra trente ans que Leänn se contente de l’arroser d’un pourcentage honorable. Puis, l’arrangement lui devint insupportable. D’autres que lui auraient mis le sujet à l’ordre du jour d’une des quelques visites annuelles que lui rendait l’Elfe, et tenter de renégocier les termes d’un accord donné à la va vite. Seulement voilà, Belgen n’avait pas plus de courage qu’il avait des scrupules à mentir à ses frères. Et plutôt que de risquer de voir disparaître, du fait d’un désaccord, les inestimables revenus de cette succulente affaire, il décréta qu’il aurait la vache et la laitière. Il avait rencontré le paternel de Leänn une paire de fois, le prenant d’ailleurs pour le frère de son associé, tant la beauté et la jeunesse du père valaient celles de la fille. Et il avait décelé chez l’Elfe un sens mercantile aussi impitoyable que le sien. Il en avait conclu que rien ni personne ne pourrait freiner le commerce organisé entre Kirgan et Aleandir. Aussi Belgen convoqua-t-il un joyeux luron à la gueule cassée par la guerre, - un certain Brammli Lorbrem -, qui frayait avec des brigands d’Aduram et lui confia-t-il une mission à hauts risques : enlever Ophan Leänn et la tuer discrètement.
Lorbrem ne s’embarrassait pas de plan compliqué. Il convoqua quelques malfrats et attendit les informations que lui avait promises Belgen. Et il décida de frapper à l’occasion d’un voyage de Leänn en Serramire. Graissant la patte d’un aubergiste, il drogua la nourriture de l’Elfe et son vin, et la cueillit sans encombre alors qu’elle dormait. Comme il ne pouvait pas l’occire sur place au risque de compromettre sa complicité avec le tavernier, il l’emporta au cœur de la forêt. Le hasard voulut qu’Ophan Leänn se réveille avant que le Nain et ses compagnons ne lui fassent la peau. Et la plus fatale erreur que commit Lorbrem fut alors de lui ôter son bâillon. Convaincre est un art. S’il n’y avait eu que Brammli Lorbrem, qu’une blessure à la tête avait rendu plus primaire qu’un chimpanzé, le verbiage de l’Elfe n’aurait servi à rien et elle aurait péri fracassée par un beau coup de hache. Mais parmi les malfrats comptait un certain Gelase Vigile, colosse brun aussi vain qu’imbécile, qui se laissa posséder par le chant de la sirène. Pourquoi la tuer ? Il suffisait de faire croire au commanditaire de son meurtre qu’elle était morte pour toucher la récompense. Puis d’informer son Père qu’elle était vivante pour toucher une copieuse rançon. L’Elfe promettait de mettre au pot pour intéresser la partie si son option était levée. La joute verbale qui s’ensuivit, dominée par le duel entre Lorbrem à cheval sur l’exécution de ses contrats, et Vigile possédé par l’appât de l’argent facile, dura jusqu’à la tombée de la nuit. Les belligérants se retirèrent, abandonnant le champ de bataille, remettant leur discussion au lendemain. Lorsqu’au petit matin, Lorbrem aperçut Ophan Leänn sous la couverture de Vigile, il comprit qu’il avait perdu le combat.
Gelase Vigile emporta donc sa conquête dans le repère de sa bande au cœur de La Dross. Comme gage de l’exécution du contrat de Lorbrem, il fit envoyer à Belgen le crâne bouilli d’une Elfe qu’il saigna lui-même en Anaeh. Et Ophan Leänn écrivit à son Père. Le temps que le courrier soit acheminé jusqu’à Aleandir, passant de mains en mains, par des canaux complexes, Leänn, libre comme l’air, avait fait le tour de La Dross. L’univers qu’elle y avait découvert l’avait stupéfiée. Equilibre instable entre les Bandes. La main de fer de la belle Kathleen secondée par Jonathan. Les égouts de la criminalité de Miradelphia donnaient dans cette caverne miraculeusement aménagée par des mineurs nains en forteresse imprenable. Mieux, elle avait là, sous la main, de quoi satisfaire sa curiosité insatiable : la lie du monde, sous toutes ses formes, se retrouvaient dans ces tavernes vivantes et mortelles dont les feux ne s’éteignaient jamais ; les assassins se promenaient à visage découvert dans les ruelles. Et malgré ce mélange explosif des perversités et des tares de ce monde, la paix régnait sans partage dans une ville désarmée. La Dross était vibrante, palpitante et sûre, comme ses catins qui pullulaient dans l’ombre. Avec tous et toutes, l’Elfe discutait sans fin, tentant de comprendre les motifs des uns, la psychologie tordue des autres. Et, avisée encore, elle prodiguait ses conseils. Nombreux semblaient ceux qui jouissaient hors les murs de La Dross d’une couverture légale pour protéger leurs trafics. A ceux là, Ophan Leänn laissait tomber, comme les miettes d’un festin, les secrets de fabrique amassés pendant deux siècles de commerce avec toutes les villes du monde.
Et contre toute vraisemblance, l’Elfe se sentit chez elle dans ce monde hors le monde.
Elle renvoya très vite Gelase Vigile vers sa compagne qui venait de lui donner un fils (Anasthase), et lia commerce avec les chefs de bande. A son Père qui avait payé sa rançon, elle fit savoir par l’intermédiaire de Brammli Lorbrem qu’elle était morte de mauvaises fièvres. Au diable le malheur des siens ! Dans La Dross libre, Ophan Leänn faisait la découverte de l’indépendance et elle fracassait un à un tous les ponts qui pourraient la ramener vers son passé.
A un Mage de passage, elle demanda même le service d’ensorceler sa chevelure.
Et elle devint cette sylphide à la natte bleue qui restait à couvert pendant que les bandits attaquaient les convois, et rançonnaient les voyageurs. Parfois, masquée, elle se jetait dans la mêlée, jouant de l’épée. Risquer de perdre une vie vouée à l’immortalité embrasait son avenir de mille et une possibilités. Et sa bosse du commerce conjuguée à sa ruse la rendait plus dangereuse encore que son arme.
Ophan Leänn recommença de rien. Et à la force de son intelligence, elle rebâtit en quinze ans la fortune qu’elle avait perdue en déclarant sa mort aux siens. Inutile de préciser que les caravanes de son père furent soumises à sa dîme. Avec une régularité d’horloger, elle préleva un convoi pour cinq convois organisés. Et infiltrant ses anciens réseaux par la voie de l’ombre, débusqua tous les commerces pour mieux les ponctionner.
Son génie lui souffla de ne se lier avec aucune bande en particulier, mais de servir également les intérêts de toutes. En à peine dix ans, Leänn était le conseil incontournable des chefs des Bandes, oeuvrant derrière le rideau, laissant les autres se gorger de gloire pendant qu’elle croulait sous le poids de l’or.
Mais elle avait des projets d’une toute autre envergure.
Elle contemplait le sommet de la colline plantée en Aduram. Et après la disparition de Kathleen, surveillait son trop fidèle Jonathan. Car de La Dross, elle voulait prendre le pouvoir…
COMMENT TROUVES-TU LE FORUM : encore et toujours aussi inspirant !
COMMENT AS-TU CONNU LE FORUM : j’y suis née (ici)(multi accepté par Ashénie de Sephren - merci encore Ashénie)
Dernière édition par Ophan Leänn le Dim 15 Nov 2009 - 17:56, édité 2 fois |
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