[bal]Que les masques tombent

Harnyll de Hetalia passait entre les convives, vérifiant que tout se déroulait bien pour ce grand bal masqué qu’organisait Ysari. Un détour par le coin des musiciens pour donner quelques consignes, un arrêt auprès de l’un de ses espions qu’il avait mêlé aux invités afin d’entendre les derniers rapports, un regard inquiet vers son épouse dont le comportement devenait chaque jour plus inexplicable, puis il recommencait…

Bon, après quatre ou cinq « rondes », force lui fut d’admettre que tout semblait se dérouler correctement. Les goinfres se bâfraient, les ivrognes picolaient, les barbons déblatéraient avec morgue et hauteur, les dames envoyaient des œillades assassines aux jeunes mâles en rut. Pas de problème donc… alors pourquoi ne se détendrait-il pas un peu lui aussi ? L’espace d’une soirée, il pouvait oublier ses responsabilités et ses problèmes, ce bal servait aussi à cela.

Vêtu d’une tenue bleue turquoise réhaussée d’or, bien loin des ses habits anthracites habituels, le baron portait un masque argenté dont les traits taillés à la serpe affinaient encore sa silhouette déjà mince, lui donnant presque un faux air elfique. En tout cas bien futé qui devinerait que l’austère maître des lieux se cachait là-dessous… et le baron comptait bien en profiter.

Son regard se porta sur les damoiselles, et s’arrêta brusquement sur… ouaouh ! Mes mains tremblent sur mon clavier fasse à cette beauté insoumise qui venait d’apparaître devant Harnyll. Un décolleté frisant l’indécence, une robe qui dévoilait ses charmes plutôt qu’elle ne les cachait, de longs cheveux qui glissaient sur des épaules parfaites, une bouche qui appelait les baisers… mais qui était donc cette amazone égarée à Ysari ?

Enfin amazone… pas au point de se occuper un sein pour mieux tirer à l’arc, ce qui d’ailleurs eut dépareillé une paire admirable.

Fusse un reste du sort lancé par Aerandir lorsque le baron l’avait rencontré à Odélian ? Sort qui devait le faire tomber comme un perdreau truffé dans les bras d’Ulmégonde ? Sort auquel il n’avait résisté qu’à grande peine ? Toujours est-il que le cerveau du baron passa en pilotage automatique et donna l’ordre au deuxième cerveau qu’ont tous les hommes entre leurs cuisses de commencer à travailler.

Comment lui déclarer sa flamme ? « T’es top bonne toi, tu sais ? » Non ? Trop… direct ? « Mon cœur se tirebouchonne sur mes chevilles comme un vieux slip moite » ? Non plus ? Pas assez… raffiné ? Bon, revenons à du classique alors. Il fallait en profiter, son premier cavalier venait de s’éloigner, elle se retrouvait (momentanément) seule. S’approchant, le baron effectua un galant baisemain à la mystérieuse déesse et lui demanda :

Belle dame, vous faîtes chavirer les cœurs de tous les hommes présents. Oserais-je vous demander de m’accorder la prochaine danse ?

L’orchestre venait d’entamer un nouvel air lorsqu’ils entrèrent sur la piste de danse pour se mêler au autres couples. Fasciné et par la belle qu’il tenait au creux de ses bras, le baron ne se préoccupait absolument plus de Lucrèce à cet instant, ni de son comportement inhabituel qui quelques instants plus tôt lui donnait tant à réflexion. Désormais il s’en fichait… ni plus ni moins. Après tout, ses espions la surveillerait de près et il serait le lendemain mit au courant de tous ses faits et gestes, alors pourquoi s’en soucier ?

Au rythme de la musique, le couple virevoltait au milieu de la grande salle. Un observateur attentif aurait sans trop de mal pu remarquer par moment entre les deux danseurs une discrète caresse, un effleurement un peu trop appuyé, toutes sortes de petits gestes qui constituaient le délicieux jeu des corps et de la séduction. Force était d’admettre que ces petits jeux ne leur était pas exclusivement réservés, d’autres couples s’y laissaient également entrainer.

A Odélian, le gardien d’Arcamenel avait tenté d’envouter le baron, qui, pour ne rien simplifier, venait en plus de boire un verre d’alcool qu’il ignorait être rempli d’aphrodisiaque. Les deux effets ne s’étaient toutefois pas combinés, et Harnyll avait pu résister aux charmes de la sœur de son hôte. Cela lui avait-il laissé des séquelles ? Le sort se réactivait-il entre Arnhild et lui ? Où bien était-ce simplement la belle alchimie du désir qui s’activait entre deux êtres qui ignoraient avoir affaire à leur ennemi ?

Profitant d’un pas de danse durant le quel la belle amazone se retrouva le dos plaqué contre lui, Harnyll déposa un furtif baiser sur une épaule dénudée et murmura :

Seriez vous une enchanteresse ?

Regard intrigué de sa partenaire…

A l’instant ou je vous ai vu, j‘ai été envouté. Si vous me l‘ordonniez, je serai capable de m‘ouvrir les veines pour le simple plaisir de mourir dans vos bras.

Ni l’un ni l’autre ne pouvaient comprendre l’ironie involontaire contenue dans les paroles du baron… qui en effet avait quelques mois plus tôt failli mourir de la main même d’Arnhild. Mais ce soir là, c’était à un autre type de combat, bien plus agréable, qu’Harnyll pensait.

Ô délices de ce langoureux corps à corps au rythme de la musique, ô douces caresses de cette peau satinée, ô grandiose ode au plaisir charnel que chante le corps tout entier de la belle inconnue… une main joueuse vint taquiner le torse du baron, glissant doucement, éveillant le désir en lui. D’une simple galanterie proposée à fin de se détendre, Harnyll se retrouvait pris dans les filets de la plus jolie tentatrice qui soit.

Jamais Lucrèce ne lui avait fait cet effet là. Même lorsqu’elle ne fut plus vierge et arrêta de rechigner au devoir conjugal, le désir qu’elle savait éveiller chez son époux ne pouvait se comparer à celui qu’éveillait la mystérieuse amazone. Autant comparer une brise d’été à un ouragan.

Ne croyez pas en lisant ces phrases que Lucrèce ne soit point jolie. Cette femme-enfant avait du charme, cela était incontestable, et elle savait être adorable lorsqu’elle le désirait. Mais l’inconnue au loup blanc était entourée d’une aura de mystère et de sensualité qui vous fouettait les sangs. Encore heureux que la tenue du baron ne soit pas trop moulante, car sinon il aurait été comme les charpentes… c’est-à-dire avec une poutre apparente.

Et… et maintenant, dois-je aller plus loin ? Au milieu de la cohorte de soupirants prêts à se pâmer d’amour pour elle, crois-tu que j’ai ma chance ?
Mais bien sur, elle est conquise, elle te veut, elle te désires ! Peux s’en faut qu’elle ne t’arrache tes vêtements pour te violer ! Enfin, abuser sexuellement de toi, car une femme ne peut pas violer un homme légalement parlant.
Et Lucrèce ? C’est tout de même ma femme devant les hommes et les dieux, et je ne…
Ah non hein ! Tu vas pas nous sortir tes conneries de fidélité conjugale ! Je te rappelle que ta greluche t’a causé pas mal de problème, et côté fidélité tu l’as déjà trompé avec la maître d’arme de Diantra. Tu te souviens ? La jolie petite elfe qui défendait les couleurs de Néera au tournoi ?
C’est pas faux… et après tout, ce bal est aussi prévu pour ca non ?
Mais oui, bien sur. Vas y, mais vas y, demandes lui ! J’ai l’accord d’Arcamenel, le dieu se réjouit à cette idée, parce que lui, ben il sait bien qui est qui dans l’affaire.
Hmm, peut être que la trousser comme ca au beau milieu de la piste de danse serait faire preuve de peu de galanterie, non ?
Oh certes, si monsieur veut faire le délicat… moi je me tais… vas y, fais à ton idée…
Merci.

Alors qu’ils se retrouvaient tendrement enlacés pour les derniers pas de danse, le baron chuchota suffisamment bas pour que seule Arnhild puisse l’entendre :

Oserai-je vous demander si vous dormirez cette nuit au château, belle tentatrice ?

[Pnj : Misakith Kiltar]

Habillé de la tenue de la noblesse de Langehack, le jeune Régent terminait les derniers préparatifs devant le miroir qui se trouvait dans sa chambre. C'était la première fois qu'il participait à un bal de cette prestance et qu'il allait se heurter à un grand nombres de noble. Il finalisa l'ajustement de sa tenue puis il déposa le masque. Il se regarda un moment dans le miroir, son masque était simple mais du fait qu'il n'était pas connu, il suffirait en premier à lui même puis ce masque poursuivrait le mystère. Il décida qu'il était fin prêt puis quitta ses appartements.

Misakith Kiltar pénétra dans la salle du Bal. C'était une immense salle et les attentions étaient poussées pour convenir à n'importe quel membre du Royaume. En premier lieu, on entendait la musique puis les discussions et enfin les chaussures sur le sol. Le Régent se dirigea à proximité de la foule, il ne connaissait pas grand monde et avec ces masques, il ne connaissait personne. Néanmoins l'idée était dallé vers l'autre. Il chercha rapidement du regard une demoiselle à inviter à danser néanmoins l'activité semblait plus intense vers les buffets pour le moment. C'est alors qu'il s'avança et se retrouva nez à nez avec un verre de vin qui se retrouva sur sa tenue, cette maladresse venait de lui salir une partie de son vêtement. Surpris, Misakith recula puis fixa la dame qui très gênée ne cessait de s'excuser en révérence.

- « Ce..ce n'est pas grave Dame. J'aurais du être plus prévenant et ne pas me trouver aussi près de votre personne. »

Le Régent saisit un mouchoir en tissus pour essuyé le liquide sucré avant qu'il ne devienne trop collant, voir gênant. Après quelques efforts, il replia le mouchoir de façon à ne pas tâcher sa poche et il rangea le tissus ayant gagné légèrement en poids. Il s'inclina devant elle.

- « Je suis tout de même enchanté de faire votre connaissance. »

Il hésita un moment entre l'inviter à danser ou bien demander un autre verre.

- « Pour oublier ce léger accident, voudriez vous m'accorder cette danse, Dame? »

Ses yeux n’avaient cesse d’épier chaque masque, chaque silhouette et manie des bonnes-gens qui serpentaient là. Ses prunelles brillaient d’émerveillement devant les mille reflets d’ors et d’argents qu’une salle, assez grande pour être la scène d’une bataille respectable, renfermait. Les rires retenus s’accouplaient aux chants d’instruments effacés. L’ambiance souffrait d’une chaleur réconfortante, tandis que des parfums luxueux s’entortillaient aux dessus de leurs têtes, enivrant les sens du sieur. Ses bras se croisèrent sur un pourpoint fort bien taillé, dont le tissu carmin n’était pas sans rappeler une qualité langecine. Une ceinture au d’obsidienne mordait fermement ses hanches tandis que ses longs doigts maintenaient avec poigne le pied d’un verre cristallin. La forme accorte et les ciselures stylisées trahissaient l’œuvre d’un souffleur hors pair. Chaque tapisserie, pendues aux murs colossaux, devaient valoir plus chère que toutes les étales d’un considérable marché réunies. Les chandeliers brandissaient des flammes grandiloquentes, comme pour rappeler aux regards flagorneurs combien ce décor était démesuré.

Notre homme était de taille moyenne, mélangeant épaules de belliciste aguerri avec taille véloce. Un lacet de cuir encadrait sa large gorge, auquel une bourse cousue se balançait à l’abri des regards indiscrets, sous sa tenue. Levant le coude, il but une rasade de ce délicieux breuvage aux teintes grenat. Les saveurs se délièrent au sein même de son palais, explosant comme les artifices colorées de quelques alchimistes trop zélés. Un nez carcatéristique se tenait sous son masque, humectant les effluves du liquide rubicond.

Aussi immobile que l’ivoire de son second visage, l’éphèbe affichait un demi-sourire. Ses iris valsant ardemment au milieu de ce spectacle mirobolant. Les femmes s’amusaient régulièrement à lui jeter quelques coups d’œil aguicheurs. Certaines s’approchaient félinement pour mieux lui susurrer promesses interdites. Se jouant de leur anonymat, elles osaient l’impensable. Cette nuit, les plus éblouissantes perles de la péninsule devenaient bijoux alliciants, délivrées des messes basses et rumeurs des cours. Les étoiles perçaient à peine des noirceurs qui se profilaient lentement derrière les vitraux. Le bel homme expira, tentant de conserver son sang-froid avec lequel il venait d’aborder ces festivités. Le bon monde s’étendait au bout de ses charbonnées bottines cirées. Un pas suffisait…

Alors là…..ALORS LA ! Ce rustre, cette brute épaisse…..il allait l’entendre une fois qu’ils seraient seuls. Heureusement qu’elle avait un minimum d’éducation, elle. Il était hors de question qu’elle fasse une scène aux yeux et aux sus de tous. Elle savait se tenir en public à la différence de son époux. Cette brute venait encore de montrer qu’il n’était pas capable de réfléchir, il fallait qu’il cogne d’abord. Comment avait-il pu diriger une armée ? Quoi que….les soldats sont de véritables brutes épaisses alors pours leur faire comprendre les choses ça devait se passer à peu près de la même façon. L’ordre qu’elle venait de recevoir la figea encore plus. Jamais il ne s’était adressé à elle de cette façon, et jamais elle n’avait eut droit à un pareil regard. Blessée et terriblement en colère, Jena tourna les talons lorsqu’il lui lança un «Obéis » des plus tranchants. Il n’y avait rien à répondre à cela. Seulement il aurait très prochainement de ses nouvelles. Lorsqu’elle passa l’arche qui la ramenait à la salle de bal, Jena se rendit compte qu’elle avait oublié son masque sur le banc en marbre. Tant pis, il n’était pas question qu’elle retourne là bas.
Le premier invité qu’elle croisa fut sûrement surpris pas l’expression qu’il pouvait lire sur le visage de la jeune femme enceinte. Colère, douleur, peine…un cocktail singulier et étonnant en ce soir de fête.

Elle n’avait plus le cœur de se mêler à la foule aussi franchit-elle les portes menant aux petits salons meublés confortablement. Certains étaient aussi bondés que la salle de bal mais elle réussit à en trouver uns où il restait encore des places assises. Elle n’était pas du genre à s’approcher d’un groupe pour réclamer un fauteuil. Ce qui en réalité lui était presque du, du fait de son état. Son regard balaya la pièce et se posa sur une jeune femme isolée. Elle portait un ravissant masque et sa robe la mettait superbement en valeur. Jena reconnut la femme masqué grâce à un petit détail. Un collier, un papillon.
C’était la fiancée du Baron que son époux était en train de démolir. Sentant à nouveau le rouge lui monter aux joues, tant à cause de sa honte que de sa colère, Jena poussa un long soupir et tenta de retrouver un visage impassible. Lentement elle s’approcha et demanda à la jeune femme si le siège près d’elle était libre. Après un hochement de tête, Jena se permit de s’asseoir. Elle ne put retenir un léger gémissement de douleur. Son ventre était douleur et le petit être en elle s’amusait à la martyriser.

- Vous devez être la fiancée du Baron de Missède. Je n’ai pas encore eut l’honneur de vous être présenter. Je me nomme Jena Kastelord et….et bien mon époux est en train de….*secouer ? frapper ?tuer ?* discuter assez violemment avec votre fiancé…

Belle entrée en matière. Elle avait néanmoins pensé aux présentations avant de lui dire que son fiancé était en train de se faire brutaliser par Hanegard. La jeune femme près d’elle, risquait probablement de sauter de son siège pour se précipiter vers son cher et tendre. Du moins c’est ce qu’elle aurait fait si on lui avait annoncé que son époux avait des problèmes. Mais là, elle était plutôt dans le cas ou elle devait présenter des excuses à sa place...

- Sachez que je suis sincèrement désolée pour ce qui est en train de se passer…je vous assure que…

Ah et bien oui, elle avait également oublié là raison première de la dispute de son époux avec le Baron. Hanegard avait cru qu’elle était en train de se faire tripoter par le premier galant qui se serait mit à tourner autour d’elle. Aussi la jeune femme assise près d’elle était concernée. Baissant les yeux sur ses mains jointes, Jena laissa cette fois la honte prendre le dessus sur sa colère. Celle-ci elle la gardait en réserve pour le moment où elle retournerait dans sa chambre avec son époux. Ses yeux lui piquaient, signe qu’elle n’allait pas tarder à pleurer…mais non ! Pas ici ! Pas au Bal d’Ysari. Elle avait tant rêvé être là, depuis des semaines elle ne pensait qu’à cela….mais la déception et la honte qu’elle ressentait était à la hauteur de son attente et son impatience.

Fergus se tenait dans le grand salon, faisant grande impression par la somptuosité de ses vêtements et l'attitude de sa suite. Il arborait une perruque poudrée du dernier cri, avec des tresses retenues à l'arrière de la nuque par un grand catogan de soie. Son habit de velours pourpre était brodé de centaines de lions d'or et s'ouvrait sur un gilet en soie beige orné de boutons en rubis, assortis à ceux des boucles en forme de lys de ses souliers. Son visage était dissimulé par un masque spécialement confectionné pour l'occasion, doré avec des pommettes argentées, sourcils dorés et noué par un ruban de satin noir.

L'événement avait été préparé à la lettre. Les invités ou leur délégation étaient arrivés la veille, immédiatement dirigés vers des appartements et chambres luxueux, tandis que leurs suites se voyaient logée dans des lieux plus modestes, voir en ville pour les plus malchanceux. Tout ce petit monde revêtait habits de bal, parures et surtout masques car n'oublions pas que ce prime bal était masqué.
La grande salle de réception était le lieu dit où la danse serait à l'honneur. Les tables avaient été dégagées et disposées sur les côtés où de longues nappes d'un rouge éclatant les recouvraient. Sur ces tables, plateaux d'amuse-gueules, verres en cristal, carafe de vin, de ligueur attendaient patiemment. Bien entendu, on n’avait pas oublié quelques mignardises pour ces dames qui raffolaient plus du sucré que du salé. Des valets de pied se tenaient à distance régulière les uns des autres, candélabre en main, illuminant la salle de mille feux tandis que d'autres zigzaguaient entres les convives munies, eux, d'un plateau d'argent sur lequel étaient disposés des rafraichissements. Les musiciens étaient installés sur une petite estrade qui surplombait que très légèrement la salle. Le baron et la baronne d'Ysari, leurs hôtes, devaient faire une apparition plus tard dans la soiré, ce qui pouvait signifier dans une heure ou deux. En attendant les invités allaient et venaient dans la grande salle de réception, bavardaient et admiraient les riches tapisseries, flirtaient derrière leurs éventails, se gavaient de fruits confits, de tartelettes et de vin et disparaissaient régulièrement dans de petites alcôves ou salons voir dans les jardins. De sorte que l'on ne se rendait compte de leur présence que lorsque l'on était suffisamment proche pour percevoir leurs cris et chuchotements.

Durant ce bref instant de relâchement les affaires du pays étaient abandonnées aux gens de la classe moyenne pendant que les nobles et la royauté poursuivaient les divertissements et le plaisir. Les nobles ne s’intéressaient qu’aux apparences, alors pour commencer, il fallait évidemment leur présenter quelque chose d’intéressant à regarder. Et dans cette dominante de pastels, de lumière, et d'une certaine liberté d’esprit, la gente féminine s’en acquittait fort bien. Chaque dame et damoiselle rivalisait de tenues les plus riches ou osées pour l'événement, dissimulant leur large décolleté derrière d’immense éventails assorti à leur tenue. Sous le couvert du masque tout était possible. En cachant son visage aux personnes que l'on rencontrait, le masque autorisait son porteur à jouer un rôle tout différent de sa propre personnalité. Courtiser telle ou telle néréides sans savoir si celle ci fut mariée, fiancée ou encore pucelle. C'était la règle du jeu et il fallait s'y plier. L'anonymat d'un masque dégelait bien souvent les passions comme les cœurs et ces aristocrates blasés étaient avides de tout ce qui pouvait les divertir. Le bal était aussi l'occasion d'élargir le cercle des relations mondaines. Les courtisans se laissant cajoler et séduire à renfort de grands crus de hautval - ou de piquette Ysaroise - de divertissements raffinés et de conversations spirituelles autant que de regards aguicheurs et de promesses voilés.

Plein de ces idées et encouragé encore par la présence de quelques beautés ingénues faisant tournoyer autour d’elles leurs immenses jupes à paniers, Fergus déployait toute sa vivacité, son imagination et son éloquence naturelle, et s'attirait les suffrages universels par le rôle qu'il joua dans la conversation qui roula peu à peu sur les sujets les plus propres à faire briller ses talents et son instruction. La gaîté de la soirée était au beau fixe et tous les esprits voyaient en beau l'avenir et jouissaient du présent. Cette disposition de l'âme était des plus favorables à l'exercice de l'imagination, à la poésie à et cette éloquence qui est alliée si intimement à la poésie. Fergus avait parfois de véritables facilités d'élocution et dans cette soirée, il émut plus d'une fois les cœurs, et excita plus d'une fois les rires. Plusieurs dames refusèrent d'aller danser et sous divers prétextes, trouvèrent le moyen de s'approcher du groupe que l'on formait autour "du charmant jeune homme" au verbe aussi fin que pittoresque. Il fut présenté à plusieurs d'entre elles, de la plus haute extraction et l'on aurait dit qu'il avait passé le plus clair de sa vie dans les salons de la Cour, à Diantra, tant il montrait d'aisance dans ses manières et pour saisir les à-propos ; tant il sut bien s'affranchir de ses origines montagnardes et faire preuve d'esprit, car celui-ci avait décidément de l'allant, et son verbe, rempli de truculence, lui assurait tant le soutient des uns que l'inimitié des autres.

Oui, ils étaient en retard. Elanore avait tellement insisté pour venir ici, traînant son Gras de mari chez ses cousins du sud. Elle s'était enjoué sur la confection des costumes, magnifiques certes, mais d'une sophistication tel qu'enfiler ces machins était long et périlleux. Gaucelm ne pouvait qu'admirer le résultat dans la glace, lorsqu'il fut paré de blanc et d'argent. Elle avait l'oeil, a n'en point douter, et les couturières avaient bien travaillé. Les regards se tourneraient vers eux, avec fascination et jalousie. Comme il allait aimer cela. Sous son masque, il gloussait en prenant des poses de héros épique, avant de prendre de vraies poses royales en jouant de son sceptre au bout duquel reposait un autre masque. Un masque qui masquait un masque, voilà qui sied bien à l'image du Gras. Elanore semblait elle, encore plus en retard, ses servantes ayant eu du mal à faire tenir les nombreux noeuds argentés qui parsemaient sa magnifique robe plissée. Le comte rejoignit son épouse, faisant fi du regard désapprobateur de la nourrice, cette vieille chouette aigrie, qu'Elanore avait voulu garder comme suivante. Bref, passons ! Enfin uni sous les masques purs et lisses et dans leurs habits finement brodés, ils se dirigèrent vers la salle de bal, d'où s'échappait éclats de rire et notes de musique.

Pressons ma mie, je suis impatient de montrer nos costumes. Toutes mes félicitations pour leur conception.

Il gloussa et prit un démarche noble et altière, loin de son habituelle, pleine de rondeurs et de bonhommie. Il fallait jouer le jeu des masques et donner le change. Ils entrèrent d'un pas sur et se noyèrent parmi la foule masquée.

Lorsque Ethan la quitta, Ilinsar ne pipa mot, concentrée sur les derniers détails de son accoutrement. Vraiment, quel était le tortionnaire qui s'était aini amusé à inventer des tenues ausis peu maniables et confortables? Un misogyne, certainement, ça ne pouvait être que cela! Elle noua son corsage aussi vite qu'elle le put, rajusta collier, masque et perruque chataîgne, dissimulant ses fières oreilles pointues et ses mèches tricolore. Dans des cas pareil, son originalité capilaire était décidément la pire des tares... Enfin. Parée de sa robe bleue, plutôt simple, mais aux broderies exquises, elle vérifia une dernière fois la couleur si pâle de sa nouvelle peau. Cela ferait l'affaire. Elle dissimula ensuite les vêtements de comis et de servante qui leur avaient permit d'entrer pour finalement quitter le cagibis, non sans avoir soigneusement vérifier que la voie était libre.

Arrivée face à la salle, la jeune femme se redressa et entra d'un pas assuré en plein coeur des festivités, en vellant à ne pas se faire remarquer. Elle salua de la tête chacun des nobles desquels elle croisait le regard, s'avançant gracieusement parmi les convives. En elle-même, elle pestait contre le poids et l'épaisseur de sa robe, qui lui donnaient déjà chaud. Vivement la fin de cette soirée!

Elle aperçut Ethan, déjà occuppé à faire tourner une de ces jouvencelles masquées. Ilinsar se sentit presque l'envie de rire... si elle n'était pas coincée dans une robe légèrement trop petite!

Frustrée, la drow observa chacun des convives et finit par repérer une haute silhouette... visiblement en pleine démonstration de force. Hanegard Kastelord... A partir de maintenant, elle ne le lâcherait plus des yeux.

Ilinsar s'avança calmement et entra dans un petit cercle où les commentaires allaient bon train. Là, elle fit de son mieux pour ressembler à l'une de ces donzelles écervelées en mal de commérages, en réponse aux remarques peu subtiles de ses compagnes de "jeux". Pendant ce temps, elle réfléchissait à un moyen de pousser le géant à la suivre dans un coin sombre pour lui sonner les cloches... Réflexion, et stratégie... Et puis, peut-être voudrait-on bien la distraire un peu par quelques pas de danse? C'était sa deuxième passion, après tout...

C'était la première fois que je me rendais à un bal en tant que Comtesse d'Odelian, fille du baron d'Etherna et Vicomte de Caerlyn. Il y a un an encore, je n'étais qu'une enfant, et désormais, j'étais une femme, l'une des plus puissantes de la Péninsule, grâce à mon époux. Son prestige était mon prestige et vice versa. Aussi avais-je mis un point d'honneur à m'occuper de la confection de nos tenues pour ces trois soirées de frivolités. La première était blanche et argent, magnifique et j'y avais passé bien des heures. Elle nous servirait pour le premier soir, il était bien sûr hors de question de nous montrer avec la même tenue durant ces trois évènements, cela serait de très mauvais goût.

Le premier soir, nous fîmes donc notre entrée, bien en retard, par ma faute. Mais je voulais que tout soit parfait et je me devais d'éblouir l'assemblée. Même masquée. Car le jeu de dupes aurait des répercussions le lendemain, quand les masques seraient tombés.

C'est donc un couple scintillant et placé sous la pureté du blanc qui fit son entrée. Pas difficile de reconnaitre mon gras époux, aucun vêtement ne pouvait dissimuler son adiposité évidente et je connaissais peu de nobles de son rang aussi ronds. En comparaison, j'étais toute petite et menue. La coiffe que je portais était lourde, ornée de plumes, mais somptueuses et nous ressemblions à des paons parmi des pigeons.

- "Votre plaisir est mon plaisir."

Mais le compliment me faisait énormément plaisir et c'est avec un sourire ravi derrière mon masque que je fis mon entrée dans la salle de balle, avec mon époux.