Ithe
Humain
Nombre de messages : 47 Âge : 31 Date d'inscription : 22/02/2013
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 20 ans (987 du 10ième cycle) Taille : Niveau Magique : Apprenti.
| Sujet: Hérésie, tourner le dos à sa Mère... [solo] Sam 16 Mar 2013 - 19:21 | |
|
Le soleil était couché depuis longtemps quand Ithe rentra au couvent de Sainte Berthe. Elle s'empressa d'aller faire une rapide toilette et de changer ses vêtements de la journée pour une tenue propre. Elle n'avait qu'une envie: dormir. Enfin reposer ses pieds endoloris par sa course effrénée de cette journée qui avait pourtant si bien commencé. Et comme si ça ne suffisait pas, son ventre grogna de mécontentement, lui rappelant qu'elle n'avait rien avalé depuis le matin avant l'aube. Mais elle ne pouvait se permettre de répondre à ses envies, parce que bientôt, elle n'en doutait pas, la Mère Supérieure la ferait quérir et quémanderait des explications.
Elle avait toujours redouté cette petite femme sèche et sévère qui semblait pouvoir faire geler le feu d'un froncement de sourcils. Ithe n'avait jamais compris comment une femme comme cela pouvait servir la douce Néera. Mais elle se disait aussi que les voies de la Dame-Dieu était impénétrable. Et puis, elle ne s'estimait pas apte à pouvoir jugé Mère Cunégonde sur sa foi ou sur quoique ce soit d'autre d'ailleurs. Elle s'assit religieusement sur son lit et commença à réciter son chapelet en attendant le moment fatidique.
Et il ne tarda pas à arriver, après seulement trois perles, un petit gattement sortit Ithe de sa demi transe. La soeur se leva et alla ouvrir à Soeur Elisabeth, une grande fille au teint cireux avec qui elle avait fait son noviciat. Malgré ses défaut, Ithe pouvait la considérer comme une de ses amies proches au sein du couvent. Pour l'heure, elle avait l'air catastrophée et angoissée.
"Ithe, où étais tu passée? nous nous faisions beaucoup de soucis pour toi, tu sais. Le silence à même faillit être brisé lors du repas du soir devant ton absence."
"Je sais, Elisabeth, désolé de vous avoir inquiété. Il m'est arrivé beaucoup de choses aujourd'hui. Il se passe des choses en ville..."
"Oui, il parait que la Pélerine et ses agitateurs font des leurs. C'est pour ça que nous craignions pour toi."
"C'est justement eux qui m'ont retenue toute l'après midi. Mais peut-être que j'ai réussi à la raisonner... Enfin, je te raconterai plus tard. C'est la Mère Supérieure qui t'envoie je suppose?"
La soeur pâlit légèrement lorsque Ithe posa la question, donnant sans le vouloir la réponse avant même qu'elle ne passe ses lèvres ternes. Elle répondit dans un souffle à peine audible.
"Oui... Je pense que je ne l'ai jamais vue aussi furieuse, Ithe..."
"Alors ne la faisons pas trop attendre, veux-tu? Je ne voudrais pas que tu aies des problèmes parce que j'ai traîné en route."
Ithe fit un sourire rassurant à son amie, qui lui répondit faiblement. En réalité, elle n'était pas du tout sereine, elle commençait déjà à transpirer et son estomac était noué par la peur. Au moins, elle se dit qu'il ne grognerait pas à cause de la faim. Pendant tout le trajet de la petite cellule de la none jusqu'aux appartement de la Mère Supérieure, Ithe ne cessa de se demander ce qu'elle pourrait bien dire pour s'excuser, ce qu'elle pouvait ou non raconter. Mais elle savait qu'il était vain de vouloir préparer quoi que ce soit avec Mère Cunégonde.
Soeur Elisabeth frappa, résignée à la porte du bureau et fut accueilli par un ordre d'entrer à vous glacer le sang. Elle eut un faible sourire pour Ithe qui jugea plus sur l'intention que sur le résultat final et le lui rendit avant de revêtir son masque de soignante. La porte en chêne grinça légèrement quand elles entrèrent. La pièce était très sobre, une bibliothèque sur tout le mur de droite, un bureau en hêtre des plus simple, deux chaises en osier pour des invités et un fauteuil à peine plus confortable pour la Mère Supérieure qui la foudroya du regard. Le reste était en pierre nue, excepté le sol qui était couvert d'un parquet patiné par le temps.
"Laissez nous, Soeur Elisabeth."
"Oui, ma Mère."
Et le dernier soutien de Ithe quitta la pièce sans un mot de plus, la tête baissée et les mains jointes. La porte claqua comme la sentence d'un condamné à mort. Ithe resta bien droite, attendant que la Mère Supérieure achève de lire le document qui semblait l'occuper avant leur arrivé. Le temps sembla s'étirer à n'en plus finir. La Soeur savait bien que la Mère Supérieure avait fini sa lecture depuis longtemps, elle n'était pas dupe. Cette femme aimait cuisiner ses Soeurs avant un interrogatoire en règle. Finalement, elle déposa son parchemin et releva la tête pour foudroyer Ithe de plus bel. Celle-ci se raidit imperceptiblement et conserva une posture humble et impeccable. Elle refusait de laisser une seule ouverture à la Mère Supérieure, qui avait déjà largement assez pour lui faire passer un sale quart d'heure. Son ton sec déchira l'air comme la foudre.
"Asseyez vous, mon Enfant."
Ithe s'exécuta, se demandant distraitement entre deux prières silencieuses, une pour Katalina et ses fidèles, l'autre pour Elisabeth et les soeurs, comment une mère pouvait se comporter ainsi avec ses enfants en se souvenant de tout ce qu'elle avait déjà vu de la Mère Supérieure. Ithe s'assit sur le bord de la chaise, toujours le dos impeccablement droit, les mains jointes sur ses jambes, les pieds pausés bien à plat sur le sol. La Cunégonde tapota son bureau de son index, les lèvres pincées. Elle ne pouvait apparemment faire aucune remarque sur la tenue et la posture de la Soeur.
"Expliquez-moi je vous prie, pourquoi vous n'étiez ni présente au repas du soir, ni à l'orphelinat cet après-midi comme cela aurait du être. Et j'ose espérer que votre excuse sera bonne."
"Je serai sincère, ma Mère, je sais à quel point vous détester le mensonge et je ne l'aime pas plus que vous. J'étais partie apporter le pain au prisonnier comme chaque semaine. Et j'ai fait une rencontre dans la prison. La Pélerine, pour des raisons obscures, semblent avoir été mise aux arrêts. Alors que je lui donnait mon repas, elle me demanda la faveur de porter un message à ses fidèle pour les enjoindre de ne pas agir sans réfléchir..."
"Et tu as accepté? Tu as apporté ton aide à cette hérétique? Reléguant ton devoir au second plan?"
Ithe se sentit rosir à ces mots. Exactement comme elle l'avait pensé, impossible de préparer une ébauche de plan avec cette femme. Elle se reprit cependant et décida de conserver tant bien que mal son sang-froid.
"Mais ma Mère, je ne faisais qu'appliquer le dogme. 'Les conflit tu aideras à bannir', 'Conseils et possibilité de Choix, à tous tu t'efforceras d'apporter' et 'Dans la mesure de tes capacités, au respect du Bien et du Choix tu veilleras'. Je ne pensais nullement à mal, je souhaitais juste respecter ses..."
"Je connais notre dogme, Soeur Ithe. Cela ne t'excuse en rien."
Soeur Ithe sentit son sang-froid fondre comme neige au soleil. C'est sur un ton froid qu'elle répliqua. Elle ne déclencherait pas les hostilités mais si la Mère Supérieure en arrivait là, elle serait servie.
"Je me suis expliquée ma Mère, j'ai peut-être réussi à calmer les esprits des disciples de la Pélerine en renonçant à une mission qui me faisait plaisir. J'ai laissé mon ego de coté et les conséquence que cela aurait sur moi pour aider mon prochain. Je n'ai jamais dit que cela était une excuse."
Devant cette légère rebellion, la Mère Supérieure s'empourpra. Mais son ton resta malgré tout égale, même si vibrant légèrement de temps à autre. Ithe abandonna toute idée de terminer cette rencontre pacifiquement. Elle accorda une prière silencieuse pour demander pardon à la Dame-Dieu tandis que son interlocutrice répondait.
"Ne devient pas impertinente ma fille! Tu as fait voeux d'obéissance et tu es supposée t'y tenir! Et pas courir les rues au service d'une hérétique, une catin de bas étage, reniée par sa propre déesse!"
"Une quoi?! Mère Cunégonde! Elle offre un choix aux gens, a apporté un espoir à plusieurs d'entre eux qui perdaient la foi. Elle représente une autre voie. Comment pouvez vous dire de pareilles obscénités et vous revendiquer de la Dame-Dieu? C'est une honte!"
Ithe venait de perdre le peu de calme qu'il lui restait et s'était levée, terminant sa tirade en criant presque. Mais elle n'en ressentait aucune honte. Cette femme avait été trop loin et avait, à ses yeux, cracher sur la Dame-Dieu par ses propos indigne.
"Ne me parle pas sur ce ton, Ithe, je pourrais m'énerver!"
Ithe allait se rassoir lorsqu'une idée fusa sur son esprit. Un calme parfait l'envahit soudain, prélude terrible à une décision qui marquerait un tournant dans sa vie. Elle avait fait son choix désormais. Elle savait où était sa place. Elle toisa la Mère Supérieure de toute sa hauteur et répondit d'un ton affreusement calme.
"Je m'en vais."
"Pardon?!"
Là, c'était elle qui venait de déstabiliser cette femme qui était réputée imperturbable. Et elle en était très satisfaite. Si le Culte reniait la Déesse qu'il devait servir, elle ne ferait plus partie de ce Culte. Cantharel ne la verrait pas courber l'échine devant des profanateurs. Elle espéra qu'il y avait encore de l'espoir et qu'elle pourrait encore demeurer dans la cité qui l'avait vu naître. Elle souhaita que seule la Mère Supérieure se fourvoyait et qu'elle pourrait continuer à servir Néera dans un autre couvent... ou n'importe où ailleurs en fait.
"Vous avez bien entendu, je m'en vais."
"Tu ne peux quitter le service la Dame-Dieu comme ça!"
"Je ne quitte pas la Dame-Dieu, je lui ai consacré ma vie et je ne reviendrai pas là dessus. Je quitte juste votre couvent et votre autorité. Je ne reconnait plus en vous une servante de Néera."
"Comment oses-tu?"
La question, purement rhétorique, fut exprimée dans un souffle. Doucement Ithe tourna les talons et se dirigea vers la porte, elle avait des bagages à préparer et une pénitence à faire. Elle n'aurait peut-être même pas le temps de dormir ou de faire ses adieux.
"Au revoir, Cunégonde."
Elle ouvrit le porte et la referma calmement. Elle avança d'un pas déterminer, ignorant les quelques soeur sorties de leur chambre par le bruit de la dispute. Derrière elle, elle entendit la porte s'ouvrir à la volée et elle imagina sans peine la Mère Supérieur sortir le teint rubicond de son bureau pour lui crier une dernière menace.
"Votre transfert est maintenu, Soeur Ithe. Si vous ne vous rendez pas à Serramire avant la deuxième énnéade de Barkios, vous serez radiée de l'ordre et considérée comme fugitive. Vous m'entendez, Ithe? Et vous n'ignorez pas qu'elle est la sentence pour ceux qui brise un serment divin?"
Mais Ithe était déjà loin et réfléchissait déjà à autre chose. Une nouvelle vie débutait, une vie qui serait sans doute difficile et éreintante mais tellement belle. Une vie au service de la Dame-Dieu, une vie au service des Cinq, une vie à la recherche de l'Eveil! Mais avant tout, elle devait écrire trois épîtres. Une pour son père, pour qu'il ne s'inquiète pas et pour tout lui expliquer. Une pour la Mère Supérieure, ultime tentative de lui faire comprendre la vérité des parole de la Pélerine. Et enfin, une pour les autres Soeur, pour leur faire part de cette seconde voie qui s'ouvrait désormais à elles, à eux tous en fait. Elle songea avec regret que la nuit serait bien courte, mais les intérêt de la Dame-Dieu passait avant tout, sa santé et son bien-être compris.
|
|