Les dernières volontés d'un vieil ami. [PV Castielle]

Le trjet entre la tente de Castielle et la rivière fut rapide. Les deux types avaient beau être à peu près de la même grandeur, Rhys devait probablement allonger le pas ou trottiner derrière Sickert pour le rattraper. L'ex-pirate est furieux et ça parait. De quel droit Barbaque s'est permit de jouer comme ça sur leur vie ? D'accord, c'était un bon prétexte pour sortir de cette guerre, mais il aurait du le dire qu'il n'était pas si à l'article de la mort. Certes, ils auraient mit un peu plus de temps pour venir, mais tout aurait été moins risqué. D'accord, il était crevé et il était vexé. Demain peut-être qu'il penserait autrement.

- Quel salopard, grommelle-t-il avant d'arriver à la rivière.

Une fois à la rivière, il jette les serviettes et, sans gêne et sans la moindre hésitation, il fait nuit de toute manière, il se déshabille et se jette à l'eau. La rivière n'est pas très profonde, du moins pas à cet endroit. Il a de l'eau à la taille. Il émet le grognement caractéristique de l'eau glaciale dans laquelle on vient de se jeter, puis agite les bras pour qu'ils ne se pétrifient pas par le froid. Il plie les genoux et s'immerge jusqu'au cou.

- Hmpffff, bon sang, se plaint-il, mais il constate les bienfaits revigorants de l'exercice. J'ai pas vraiment comprit ce qu'a dit Murmure, c'quoi ton nom ? Alors comme ça, tu dois mettre Castielle à l'abri ? À l'abri de qui ? interroge-t-il, toute animosité ayant quitté le ton se sa voix. Il prend ses vêtements sales et les plonges dans l'eau et les frotte. Évidemment, ce sera sommaire, juste pour que la boue ne tache pas... pas trop... enfin, si, ça restera taché, mais bon. C'est pas comme si tout ce qu'il portait depuis quelques ennéades n'était pas sale, déchiré ou pire encore. Le hic, c'est qu'on a besoin d'elle. Pour Barbaque. Puisqu'il allait le tabasser à mort une fois qu'il irait mieux et qu'il ne serait plus moralement discutable d'y prendre plaisir.

.....Rhys fixait la rivière, hésitant, en proie à un dilemme. D’un côté, il avait furieusement besoin de se décrotter, dégueulasse et couvert de boue qu’il était, mais de l’autre, l’idée de le faire dans un torrent froid poussait la petite voix dans sa tête à lui dire qu’il valait mieux attendre d’avoir de l’eau chaude. Après tout, il n’était pas si sale que ça, ça ne valait pas vraiment la peine d’affronter le froid de la rivière juste pour un peu de boue. Mais en même temps, il était à plus d’une ennéade de son prochain bain… Il entendit Sickert se jeter à l’eau à côté de lui, l’homme n’ayant manifestement pas hésité une seconde. Peu désireux de passer pour une petite nature, le jeune homme se décida. Il retira ses vêtements et plongea à son tour…

.....… Déchainant un flot de jurons à voix basse lorsqu’il se retrouva à moitié plongé dans l’eau glaciale. L’espace d’un instant, il détesta Sickert pour une telle idée, se disant que s’il mourrait de froid avant de revoir Thaar, il trouverait moyen de revenir d’entre les défunts et de lui faire payer au centuple. Il fit un effort pour maîtriser ses tremblements, se répétant intérieurement que le froid n’était qu’une sensation, se focalisant sur Thaar, sa chaleur, son vin et la peau sucrée de ses filles. Une fois cela fait, il s’immergea jusqu’au coup, frottant énergiquement sa peau avec ses mains. La voix de Sickert s’éleva :

.....- J'ai pas vraiment comprit ce qu'a dit Murmure, c'quoi ton nom ?

.....Murmure. Poétique, comme surnom pour un muet. Curieuse coïncidence, la dague que lui avait offerte Fleur portait le même nom. Il sourit, sans vraiment savoir si c’était à cause de la coïncidence ou du simple fait de repenser à Fleur.

.....- Rhys, répondit-il. Rhys Dora’an. Enchanté, j’imagine.

.....- Alors comme ça, tu dois mettre Castielle à l'abri ? À l'abri de qui ?

.....Il hésita. Il n’avait pas vraiment envie de se justifier, encore moins à un inconnu. Mais d’un autre côté, Sickert n’était plus vraiment un inconnu : ils s’étaient battus. Et il n’avait pas vraiment de raison de ne pas lui expliquer.
.....L’autre sembla prendre son silence comme une réponse, et ajouta :

.....- C'est qu'on a besoin d'elle. Pour Barbaque.

.....C’est alors que lui vint une idée.
.....Le blessé avait parlé de compagnie. Lui-même semblait savoir se battre, au vu de son escarmouche contre Finnegan, et Rhys savait d’expérience que Sickert était également compétent dans le domaine. Relier les points était facile : ils étaient, selon toute vraisemblance, mercenaires.
.....Or il lui était impossible de protéger Castielle du type qui s’en était pris à elle plus tôt dans la soirée si il était seul : cela impliquerait, entre autres, de monter constamment la garde pendant la nuit et, par conséquent, de ne jamais dormir. Ce qui était infaisable entre Alonna et Thaar. Il allait donc avoir besoin de partenaires...

.....- On m’a effectivement demandé de la protéger. J’ai aucune foutre idée de contre qui, mais le fait est qu’elle en a besoin. Le type qui s’est barré juste avant que vous arriviez était pas là pour lui chanter une sérénade, et je suis persuadé qu’il reviendra finir ce qu’il avait commencé avant que je l’interrompe.

.....Il s’immergea entièrement un instant. Il faudrait plus que ça pour débarasser ses cheveux de la crasse, mais au moins étaient-ils débarrassés de la boue.

.....- En tout cas, pour protéger Castielle j’ai besoin de l’emmener loin de cette guerre, et là ou je sais qu’elle sera en sécurité.

.....Il sourit à nouveau.

.....- Mais c’est un long voyage, et je serai incapable de la protéger seul d’ici à Thaar. Et il se trouve que vous avez besoin d’elle pour s’occuper de votre copain… Il semblerait que nous ayons des intérêts communs.

L'eau était glaciale. Lui même devait l'avouer. Mais L'eau, le froid, la douleur des deux premiers, c'était revigorant. Ça donnait un sacré coup de fouet pour autant qu'on n'y traîne pas trop. C'est pour cette raison qu'il ne reste pas immobile. Tant qu'il bouge, tout ira bien. Il se frotte et frotte ses vêtements. Il en a d'autres, dans son sac. Il pourra se retrouver au sec. Mais ça donne un coup de fouet, mais il ne sait pas pour combien de temps. .

Alors il s'appelle Rhys. Ah, c'est ça qu'il n'avait pas trop comprit. C'est certain que sans voix, c'était plus difficile à communiquer les subtilités. Les mots courants, c'était facile. Rhys, c'était pas courant. Mais au moins, une fois tout nu et dans l'eau, le dénommé Rhys se met à parler. Ah, ça c'est bien quelqu'un qui parle. Il n'avait pas tort, elle avait été attaquée, mais il n'avait absolument aucune idée par qui. Allait-il vraiment revenir ? Il n'en savait absolument rien. Évidemment, il restait une possibilité que ce soit ce type qui en ait voulu à la vie de Castielle. Et ce serait facile de le noyer, maintenant qu'il a la tête dans l'eau. Mais Sickert laisse Rhys émerger, pensif.

Qui était donc Castielle pour qu'on en veuille à sa vie ? Et qui était donc Castielle pour qu'on veuille la protéger ? Et qui était la personne qui voulait la protéger.

- Oui, je suppose que ce sera plus facile de la protéger si tu ne risques pas une attaque de la vielle ou tu te  trouve, confirme-t-il, l'air tout de même un peu absent. Est-ce le froid ? Nan, pas du tout. Ouais, peu-être que nous avons des intérêts communs, à savoir garder Castielle en vie, toi, pour être payé, moi pour garder Barb' en vie... Il semble prendre un moment de réflexion, une seconde, à peine, avant de secouer la tête. Non, il est hors de question de quitter Alonna, pas dans l'état ou se trouve Barb' peut-être qu'il ne survivra pas au voyage, ajoute-t-il d'un ton dont il est impossible de déterminer si c'est possibilité tentante ou un refus catégorique. Il s'immobilise. À Thaar t'as dit ? Encore une seconde de réflexion, puis il marche jusqu'au bord et se hisse hors de la rivière. Bordel, elle est glaciale, lance-t-il, comme si tout ça avait été une mauvaise idée et il jette une des couvertures autour de ses épaules avant de l'enrouler autour de ses reins. Il se plante devant Rhys et croise les bras, avant de se gratter la barbe. Ok, on va à Thaar, informe-t-il, mais avant, faut que je dorme. J'ai trimbalé ce salopard de Barb' depuis Haurse-porc en trop peu de temps. De toute manière, ce serait stupide de sortir d'Alonna en pleine nuit, on aurait l'air de déserteurs. On a été viré, mais je crois pas que ce soit préférable à la désertion, note-t-il d'un ton plaisant en jetant une couverture à Rhys.

Ayant reprit son linge mouillé, il refait le trajet inverse, de la rivière vers la tente, avant d'y entrer aussi naturellement que s'il n'avait pas du tout été mouillé et presque flambant nu.

- Dame Castielle, il a raison, dit-il en pointant du pouce Rhys qui le suit, il faut que vous partiez d'ici parce que c'est dangereux. Mais il a besoin de vous pour rester en vie et peut-être guérir, avoue-t-il en pointant ensuite Barbaque. Alors on y va aussi, dit-il tout sourire et dégoulinant sur le sol.

C'est un regard vitreux et peu avenant qu'elle leva vers le pirate lorsque celui-ci pénétra nonchalamment sous sa tente. Au début, elle ne compris pas immédiatement ce qui se déroulait, mais lorsque son cerveau l'informa finalement qu'un homme à moitié nu et dégoulinant se trouvait à quelques pas d'elle, ses joues s'enflammèrent violemment alors que son bol de tisane tombait sèchement à ses pieds, son contenu se déversant sur la tête gelée. Embarrassée, elle se leva et se retourna brusquement sur elle-même, les mains posées pudiquement devant ses yeux. Il y avait une différence entre s'occuper un homme à moitié nu dans un état comateux et un homme parfaitement en santé et debout devant elle.

-Dame Castielle, il a raison l'informa le prénommé Sickert qui était entrer comme si de rien n'était.

La jeune femme s'était tournée très vite, elle ne savait pas de qui ou de quoi il parlait. Qui avait raison, pourquoi et pour quel sujet? L'herboriste se retourna à nouveau sur elle-même, ses doigts entrouverts pour voir ce qui se déroulait à l'entrée. Bon sang, les deux faisaient ruisseler de l'eau glacée sous son tente. Elle n'avait pas besoin de plus de boue. Il était déjà assez difficile de balayer de la terre froide, si elle était boueuse...

-Il faut que vous partiez d'ici parce que c'est dangereux. Mais il a besoin de vous pour rester en vie et peut-être guérir, admit l'individu en pointant son patient qui n'était pas du tout en état de parler ou émettre une opinion quelconque. Alors on y va aussi.

Elle inspira calmement, jugeant les deux hommes à l'entrée, les regardant de la tête aux pieds. Castielle avait reçu un coup à la tête, de la main d'un homme agissant de son plein gré. Quelqu'un avait tenter de lui faire du mal, de briser le sentiment de sécurité qu'elle ressentait depuis qu'elle avait quitté Diantra. Ses pensées étaient confuses, mais les marques sur son corps ne mentaient pas sur ce qui s'était passé plus tôt dans la journée.

-Visiblement, j'ai reçu un coup à la tête d'une personne qui, étrangement, me souhaitait du mal, souffla-t-elle sérieusement. Les raisons derrière cet acte m'échappent, mais je suppose que rester ici ne ferait... qu'attirer ce vilain à nouveau, peu importe ses raisons, peu importe ses rancunes envers moi.

Un malaise la pris et elle retourna s'asseoir sur sa chaise qui grinça sous son poids. Elle se massa les tempes, se demandant où une enfant bâtarde comme elle pourrait être en sécurité dans cet univers où elle appartenait entre deux mondes. Deux groupes qui ne souhaitait pas d'elle dans le leur.

-Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai cette impression que je peux faire confiance à chacun de vous et vos visages me sont de plus en plus familiers quand je vous regarde attentivement, remarqua l'apprentie en examinant les deux hommes et le blondinet qui ressemblait plus à un jeune adolescent qu'à un homme. Où... comptez-vous aller, alors?

La demi-elfe avait ce sentiment étrange qui lui donnait l'impression que si elle devait mourir demain, cela ne la dérangerait pas. Cette sombre pensée la laissa perplexe, mais elle n'en fit pas part à ses nouveaux amis.

L’adolescent se sent meurtri et cherche son frère du regard. Il suivi Sickert des yeux alors qu’il s’éloignait avec l’autre gus. Il passa la porte, le laissant là. Finn soupira. Un soupir haché par une émotion incertaine. Sickert était un salaud lui aussi, mais la présence de son frère était un certain réconfort.

C’était justifié. C’était légitime. Il le méritait et il l’avait admis lui-même.

Finnegan baissa les yeux et ramena ses mains dans son champ de vision. Elles étaient poisseuses de sang. Le sang de Barbaque qui avait commencé à sécher et tirait sur sa peau pâle comme une laque sombre. L’énormité de ce qu’il avait fait le frappa avec un instant de retard, balayant tout sa colère et laissant son esprit exposé.

PAR LES JUGENT! IL AVAIT TUÉ BARBAQUE!!!

…

ENCORE UNE FOIS!!!!

Oh! Qu’avait-il fait!!! Il y avait tellement de sang! Toute sa chemise en était imprégnée. Rouge. Rouge rouge rouge… Bourrelé de remords, Finn veut prêter assistance à l’elfe mais elle se rebiffe. Oui, il y a de quoi. Cette plaie béante! Toute la couture qui sera nécessaire… Et l’infection… Finnegan se tordait les mains, tremblantes, indécis…

Il avait attaqué Barbaque! Ce salopard l’y avait poussé. Cet ignoble vicieux l’avait harcelé, malmené, acculé jusqu’à cette réaction qui lui ressemblait si peu. Il l’avait attaqué. Il ne s’était pas défendu, il l’avait attaqué! Ça faisait toute la différence. Il avait raté son coup mais il n’en avait pas eu l’intention. Le salopard!!!!! Finn enrageait de voir qu’on avait fait violence à sa nature profonde. Mais au-delà de ce qu’il lui avait fait, il y avait le doute.

Qu’était-il devenu depuis les Wandres?

Depuis cette nuit dans la pinèdre, Barbaque s’était souvent moqué de son aptitude à se défendre. La seule personne de qui il s’était vraiment défendu, dans toute son existence, hormis Daoine Ingrid, c’était de lui : Il l’avait entrainé dans une mer d’incertitude où toute son assurance s’étiolait, disparaissait hors de portée, entrainée par les courants tourbillonnant d’un grand maelstrom.

Les insinuations du lieutenant n’étaient jamais loin de la réalité. Combien de temps lui faudrait-il pour comprendre la nécessité de prendre les armes et jouer à fond ce rôle improbable? Finn le sanguinaire? L’adolescent avait l’impression de s’éveiller d’un cauchemar qui l’aurait emmené bien trop près de cette frontière qu’il n’avait jamais franchi. Avait-il oublié qui il était? Est-ce que Barbaque l'avait provoqué tant que ça?

Est-ce que Barbaque l’aurait laissé faire? Était-il assez dingue pour payer de sa chair une pareille démonstration? Pour lui prouver que tout le monde finissait par se salir les mains. Il avait admis qu’il le méritait. Barbaque? Benedicte de Nils Klemens admettre qu’il méritait son sort??? Non! Difficile à croire. Si? Il n’aurait pas fait ça. Il n’était pas vicieux à ce point. On ne pouvait pas l’être…. Lui? Peut-être bien…

Et avec ardeur, Finnegan souhaita qu’il survivre. Pas pour se faire pardonner ce qu’il avait fait. Mais pour tirer la situation au clair. Pour savoir… Savoir si cet enfant de pute de nobliard à la mors moi le nœud est assez vicieux pour avoir encaisser un coup qui le tuerait presque juste pour prouver à une gamine que tout le monde est capable de trouver de la férocité en soi et d’en éprouver du plaisir.

Finn avait déjà rentré les affaires de Sick ainsi que les siennes. Il tira quelques caisses de l’amoncellement que stockait l’elfe, et se jucha dessus.

Lorsque Sick et Rhys rentrèrent, Finnegan tâtonnait distraitement un objet au travers de la toile de son sac. Il veillait le lieutenant avec dans le regard une lueur inquiétante.

L’adolescent écoutait la conversation sans y participer lorsqu’il se mit à claquer des doigts, pour attirer l’attention de Sickert.

« …… .. ….. …. …… ……… . .. …… ……. .. … …….. .. …………! .. ….. …… . »

.....- Ok, on va à Thaar, mais avant, faut que je dorme. J'ai trimbalé ce salopard de Barb' depuis Haurse-porc en trop peu de temps. De toute manière, ce serait stupide de sortir d'Alonna en pleine nuit, on aurait l'air de déserteurs. On a été viré, mais je crois pas que ce soit préférable à la désertion.

.....Parfait. Tout le monde était gagnant : Castielle allait être mise en sécurité, Sickert et Finnegan avaient du travail, Barbaque allait pouvoir continuer à être soigné, et Rhys pouvait ainsi accomplir les dernières volontés d’Oschide. Et revoir Thaar. Une ennéade à peine, et sa ville lui manquait comme s’il l’avait quittée des années plus tôt.

.....Il restait cependant un problème de taille à régler : l’accord de Castielle.

.....Elle avait tout de même catégoriquement refusé de le suivre en début de soirée, et, de ce qu’il avait pu en juger, elle n’était pas du genre à se laisser démonter par ce qui s’était produit. Il l’imaginait déjà rétorquer « Et alors ? Qu’il revienne, le bougre, cette fois il ne m’aura pas par surprise ! » en se munissant du premier objet un tant soit peu contendant qui lui passerait sous la main, les sourcils froncés et l’air sérieux et menaçant. Cela le fit sourire. Parfois, certaines personnes sont trop courageuses pour leur propre bien. Ou stupides, pour certains. Mais dans le cas de Castielle, il s’agissait définitivement de courage. Quoi qu’il en soit, il faudrait la convaincre.

.....Il s’immergea intégralement une dernière fois avant de quitter l’eau glacée, d’attraper la couverture que lui tendait Sickert et de s’y enrouler intégralement. Ses vêtements auraient bien eu besoin d’un lavage, mais ils n’auraient pas eu le temps de sécher avant le lendemain, et il ne comptait pas rester une minute de plus que nécessaire à Alonna. Il devrait faire avec… ou en trouver d’autres. Peut-être y aurait-il des habits propres au campement, des fois que des blessés en aient besoin.

.....Ils parvinrent à la tente en un rien de temps, malgré le froid et l’obscurité, et Rhys y pénétra juste à temps pour voir Castielle se retourner vivement, apparemment gênée par la nudité partielle de Sickert. Cela le fit sourire. Il en profita même pour mettre la couverture dans laquelle il s’était jusque-là enroulé jusqu’aux épaules, histoire de combattre le froid, à sa taille et passer sa chemise, miraculeusement épargnée par la boue. Il lui fallait tout de même des chausses propres, mais il s’en occuperait plus tard.

.....- Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai cette impression que je peux faire confiance à chacun de vous et vos visages me sont de plus en plus familiers quand je vous regarde attentivement. Où... comptez-vous aller, alors?

.....Le ton de la réponse contrastait si vivement avec son attitude en début de soirée que Rhys resta silencieux de surprise. Elle acceptait ? Comme ça ? Sans sourcils froncés, sans air sérieux ni menaçant ? Il en était presque déçu. D’un autre côté, cela facilitait grandement les choses, alors il n’allait pas s’en plaindre.

.....- Thaar, répondit-il au bout d’une seconde ou deux. C’est hors de la Péninsule et loin de son influence, et je serai en mesure d’y assurer votre sécurité.

.....Il sourit à la jeune femme.

.....- Bien sûr, ce ne sera que temporaire. Je vous ramènerai lorsque cette guerre sera finie et que la situation ce sera apaisée dans le royaume.

.....Cela pouvait prendre plusieurs mois, voire plusieurs années, mais il passa se détail sous silence. Pour l’instant, la sécurité de Castielle primait sur le reste.

.....Il allait leur falloir de quoi transporter Barbaque et leurs affaires, or il se trouvait qu’il avait exactement cela.

.....- Je suis venu en chariot. Il devrait être assez grand pour contenir votre ami, fit-il en s’adressant à Sickert.

.....Il n’était pas certain que le terme « ami » soit applicable, au vu de ce qui s’était déroulé, mais rien d’autre ne lui était venu sur le moment. Une fois de plus, il omit de dire qu’il avait acquis le chariot à Alonna et comptait originellement pour enlever Castielle contre son gré…

.....- J’irai le chercher dès que j’aurai de quoi me vêtir décemment, dit-il en désignant ses vêtements maculés de boue.

.....Castielle lui indiqua qu’il devait surement y avoir des vêtements propres, gracieusement donnés par les habitants de la ville, dans la tente ou les guérisseurs gardaient tout leur matériel. Elle voulut l’y accompagner mais il insista pour qu’elle ne se dérange pas… et regretta sa décision lorsqu’il réalisa qu’il n’avait aucune idée d’où se trouvait la dite tente, et qu’il allait devoir arpenter le campement en chemise, une couverture enroulée autour de la taille. Il finit cependant par trouver, et en revint avec ce dont il avait besoin. C’étaient des vêtements usés, parfois rapiécés, mais au moins ils étaient propres. Cela conviendrait parfaitement.

.....Une fois habillé, il alla chercher Arod, puis le chariot. Il fut interpelé plusieurs fois par des gens du campement, mais ils le laissaient tranquille dès qu’il mentionnait le nom de Castielle. Son cheval avait été bien traité, et le garçon d’écuries de la Blafarde, l’auberge ou il avait loué une chambre plus tôt, n’avait pas rechigné à le seller malgré l’heure tardive, aussi Rhys lui laissa-t-il quelques pièces de cuivre, abandonnant par la même littéralement la seule monnaie qu’il lui restait. De retour au camp, il laissa le chariot près de la tente de la demi-elfe et alla attacher Arod, avant de revenir.

.....- Et voilà, fit-il en entrant dans la tente, souriant. Nous partons demain matin.

.....Cela leur laisserait quelques heures de sommeil, de quoi se reposer un peu.

HRP:

Son entrée fit rougir Castielle et également se détourner, la main sur les yeux. Heureusement, il était à moitié caché, bien qu'il aurait tout aussi bien pu entrer flambant nu et arborer toutes ses caractéristiques. En fait, il n'y avait pas du tout songé. Mais tout de même, c'est avec un sourire à peine dissimulé qu'il informe Castielle des dispositions à son égard. Quitter Alonna et le plus tôt possibleaussitôtquilaurapritquelquesheuresdesommeil. Savoir si Castielle allait accepter relevait du pile ou face. Il pensait bien au mauvais côté, puisqu'elle ne se souvenait de rien. Sans égard pour sa presque nudité, il se rapproche de Castielle lorsqu'il la voit légèrement chanceler et s'asseoir. Soucieux de son état, il lui sourit de toutes ses dents, lorsqu'elle accepte de faire le voyage, sans même savoir la destination, mais elle demande tout de même.

- Ah, c'est bien de savoir qu'on est reconnu, surtout après avoir partagé tant de choses, dit-il, laissant sous-entendre des tas de choses.

Sickert s'efface un peu pour laisser Rhys répondre. Du même coup, il écoute ses propos, attentif. Encore une fois, son sourire est éloquent lorsque Rhys annonce que Barbaque pourra être transporté dans le chariot. Il était de toute manière hors de question de transporter encore Barbaque, pas après ce qu'il avait fait. Sickert était prêt à bien des choses pour ses amis, mais Barbaque avait perdu la moindre chance de l'être un jour. Ou du moins pas tant que Sickert n'aurait pas digéré l'affront. C'était donc une chance pour Barbaque qu'il puisse être transporté. Il s'interrogea sur l'utilité d'un chariot, mais il ne prit pas la peine de poser la question. Peut-être avait-il beaucoup de bagage ? Et Castielle ?

Rhys s'éclipse pour s'habiller et aller chercher chariot et tout ce qu,il a à faire. Sickert, lui, va s'habiller et se faisant, porte enfin attention à Finn. Il grimace. Payer ? Oh... hum... moui....

- Payer ? Demander à Alice de payer ? interroge-t-il en enfilant un pantalon usé pige dans son sac. Quelle idée ? On ne sait même pas s'il survivra, dit-il d'un ton qui laisse entendre que c'est ce qu'il souhaite. Il prend une chemise et l'enfile également. Et on lui explique comment ? Oh, on va vous faire payer pour avoir mis votre frère dans cet état ? Non, dit-il en jetant un regard noir sur Barbaque inconscient. J'ai peut-être un compromis... Castielle ? Il sourit. Vous pouvez vous retourner, je suis habillé, précise-t-il, amusé. On n'a absolument rien pour vous payer, ment-il, parce qu'ils ont eu leur prime avant de partir, mais parce que le trajet vers Thaar ne sera tout de même pas de tout repos, je vous offre mes services, peu importe lesquels, dit-il, souriant, je ne suis pas trop difficile. Et ce jusqu'à ce que Barb' soit capable de se débrouiller tout seul. Après quoi, on verra bien, propose-t-il, conciliant. Ça vous semble un troc adéquat ? interroge-t-il, souriant. Et ou est-ce que Finn et moi pouvons dormir le reste de la nuit ?

Aussitôt les deux réponses données, il sort de son sac sa couverture et s'y emmitoufle, avant de s'affaler à l'emplacement indiqué par Castielle. Il souhaite un bonne nuit enthousiaste, puis il ne bouge plus. Lorsque Rhys revient avec la bonne nouvelle, à savoir que le chariot est prêt, Sickert semble déjà dormir profondément. Pour la première fois depuis des ennéades.

Son visage rougit davantage et ses mains devinrent moites en voyant Sickert se rapprocher d'elle après qu'elle fut à nouveau sur sa chaise. La demi-elfe fut ensuite choquée par les paroles du brun, celui-ci sous-entendait beaucoup de choses étranges. Elle détourna machinalement son regard outré par autant d'hommes peu habillés sous sa tente, car en effet, Rhys faisait aussi partie de ces hommes dévergondés. Elle soupira brièvement, car elle ne pouvait leur en vouloir. Leurs vêtements étaient visiblement fichus et encore porteurs de boue. Le temps frais et le manque de soleil ne leur permettrait pas de les sécher rapidement. Il ne manquait plus que son itinéraire et sa destination finale, Rhys ne tarda pas à la lui donner cette dernière.

- Thaar, répondit-il au bout d’une seconde ou deux. C’est hors de la Péninsule et loin de son influence, et je serai en mesure d’y assurer votre sécurité.

L'herboriste haussa un sourcil curieux. Ce nom lui était familier pour en avoir entendu parler dans les rues ou lu dans quelques livres sur les terres qui parcouraient leur monde. Cependant, elle ne connaissait pas personnellement l'endroit, mais si ces messieurs disaient qu'il s'agissait de leur destination, alors ainsi soit-il! Rhys lui déclara ensuite qu'il la ramènerait une fois le royaume plus paisible. Visiblement, si elle se retrouvait dans un campement de soldats, cela signifiait qu'il y avait une ou des guerres autour d'elle. Pourquoi s'était-elle mêlée à de pareilles activités? Qui aurait pu lui convaincre de venir ici? Peut-être son maître, il avait toujours désiré qu'elle puisse quitter la boutique et voler de ses propres ailes, seule, afin de gagner plus d'expérience. Rien de mieux que d'un campement remplit de blessés pour nourrir ses connaissances en guérison.

Il eu ensuite quelques échanges entre les deux frères et Castielle ne pu s'empêcher de les regarder avec un sourire sensiblement amusé. Ce Sickert avait cette intéressante façon de parler vite et d'être assez direct. Elle appréciait cela. L'apprentie ne sourcilla pas lorsque l'ancien pirate admit qu'il n'avait pas d'argent à lui remettre - elle flaira un mensonge -, mais ne s'en soucia pas plus que cela.

-Cela n'est pas grave, cela est adéquat, pour l'instant, elle avait appuyer sur le «instant» avec une sourire moqueur avant de poursuivre, vous pouvez vous étendre là et poser vos vêtements mouillés près du foyer, avec un peu de chance, ils sècheront un peu avant le levé du soleil.

◘

Castielle avait toujours été une jeune femme bien organisée, ce qui faisait en sorte que les préparations pour leur départ ne seraient pas plus compliquée qu'il ne le fallait. Tout ces objets personnels étaient déjà placés dans des caisses exprès et les livres qu'elle avait apporté de Diantra reposaient en sécurité dans un grand coffre prévu à cet effet. Pour plus de protection, ceux-ci étaient aussi emmitouflés dans de vieux draps, à l'abris de l'humidité.

Elle se réveilla la première, ce qui n'était pas peu commun en sachant qu'elle avait à peine fermer l'œil de sa courte nuit, sa tête était martelée d'une migraine pénible. La demi-elfe ne réveilla personne, le soleil n'étant encore qu'une fine ligne orange à l'horizon. Vêtue de sa cape doublée de laine, elle sorti de la tente sur le bout des orteilles, accompagnée de son sac à bandoulière, un panier et de Robert qui était le seul ayant été alerté par son saut hors du lit. Sickert ne bougea même pas lorsqu'elle l'avait enjambé, manquant presque de lui tomber dessus, car il l'avait surprise en se déplaçant soudainement dans son sommeil.

Une fois dehors, elle inspira une grande bouffée d'air, puis se dirigea vers une tente où l'on gardait toute les ressources réservés aux guérisseurs et aux herboristes de l'armée. Heureusement, elle se souvenait de la façon dont était placé le campement et ses divers endroits intéressants. Au moins, elle savait qu'elle était amnésique, il ne lui restait plus qu'à espérer que ses souvenirs lui revinrent rapidement. Avec un peu de chance, elle serait peut-être en mesure d'identifier son assaillant de la nuit précédente. Une fois sous la grande tente, elle salua quelques guérisseurs qui semblaient être surpris de la voir debout aussi tôt. Elle saisit quelques contenants emplit d'herbes médicinales dont elle aurait certainement besoin durant son voyage. La jeune femme enfouit le tout dans son sac, puis sorti prestement afin d'éviter les soupçons, car techniquement, elle volait des ressources de l'armée pour son bien personnel. Quoique... c'était plutôt pour soigner ce Barbaque en chemin. Castielle n'était pas certaine que cela fut du vol ou pas.

Sa prochaine destination fut le groupement de tentes qui servaient de cuisine. Il s'agissait aussi de l'endroit où l'on gardait les rations des soldats. Discrètement, elle passa sous l'une des tentes où l'on conservait divers ingrédients servant à nourrir les soldats... ou une bande de fuyards comme la sienne. Elle saisit une vieille caisse vide dans le quel elle déposa son grand panier. Dans celui-ci, elle glissa silencieusement une écuelle emplit d'œuf durs, des tranches de jambons encore frais, des miches de pains datant de la journée précédentes et du fromage à pâte dure. Elle recouvra le tout avec un bout de tissu ayant connu de meilleurs jours qui traînait sur la table, évidemment elle vérifia qu'il fut propre. Castielle pris la caisse dans ses bras, puis sorti de la tente, Robert emboîtant joyeusement son pas. À sa sortie, elle percuta une petite silhouette qui semblait être surpris de la voir sortir aussi rapidement.

-J-Je suis désolé, garçon...

Le garçon, le visage joliment encadré de boucles blondes leva les yeux vers elle. Un sourire rayonnant ourla ses lèvres minces et il se releva grâce à son aide. Robert reconnut immédiatement le jeune Thomas et sautilla joyeusement autour de lui, mordillant le bas de sa tunique pour jouer avec lui. Castielle resta muette face à ce spectacle. Elle pensait connaître ce garçon, mais elle n'était pas certaine. Toutefois, d'après la réaction de Robert, celui-ci n'était nullement un étranger.

-Mam'zelle! s'écria le gamin avec un large sourire. J'me demandais où vous étiez... j'vous ai vu sortir de vot' tente et j'pensais que vous partiez sans moi.

L'herboriste eut un mouvement de recul. Partir sans lui? De quoi parlait-il? Que savait-il?

-Vous m'reconnaissez pas, je le sais, j'ai surpris vos conversations la nuit dernière, je suis Thomas! se présenta le gamin un peu naïf. J'veux partir avec vous, mam'zelle!

Sur ces derniers mot, Castielle attrapa brusquement la main du garçon et lui intima de se taire pendant qu'elle le traînait de force derrière une tente. Celui-ci, un peu confus, se laissa faire sans rouspéter, simplement heureux d'avoir retrouver cette gentille femme qui lui avait fait assez confiance pour lui donner un peu de travail au sein du campement.

-Il ne faut jamais écouter aux portes, déclara l'herboriste avec un regard réprobateur. Je ne sais pas ce que tu sais, mais il est hors de question que je t'apporte avec moi, tu as des parents, non?

Une expression très triste s'afficha sur le visage rougis du garçon. Castielle regretta aussi ses paroles lancées un peu trop froidement, mais elle ne pouvait apporter un enfant avec elle, loin de sa famille et de plus, il était un étranger pour elle. La vérité était qu'elle ne sentait pas un quelconque attachement envers lui, même si elle adorait les enfants.

-Mes parents n'sont plus là, j'reste avec ma tante, avoua le blondinet. Ma tante n'est pas gentille, elle m'laisse à peine dormir et elle me frappe, ses yeux devinrent vitreux, j'suis resté dehors toute la nuit près de vot' tente afin que vous ne partiez pas sans moi, mam'zelle! J'manquerai pas à ma tante, j'vous jure!

En effet, d'après les grandes cernes noires sous ses yeux, elle devina immédiatement qu'il n'avait pas dormi du tout la nuit dernière. La pâleur sur son visage, ses joues un peu creuses et sa maigreur accablante lui indiqua aussi qu'il ne devait pas être bien nourri. Une image l'assaillit soudainement et elle vit Thomas qui se jetait toujours sur les restants de son propre repas pour en finir le contenu avec un appétit qu'elle n'avait jamais eu, même quand elle était enfant.

-Thomas...

Le garçon agrippa le haut de la demi-elfe avec ses mains tremblantes. Il la supplia de le laisser partir avec elle, qu'il lui serait utile comme avant, qu'il ferait de son mieux pour ne pas être un fardeau. Ce n'était qu'un enfant, mais elle voyait très bien qu'il se retenait de pleurer...

◘

Castielle avança jusqu'à sa tente, Robert et Thomas dans son sillage. Elle inspira calmement avant d'ouvrir les pans de l'entrée. Peu importe les réactions, Thomas allait les suivre, ce petit bout d'homme avait réussi à la convaincre. Il ne restait absolument rien de bon pour ce gamin à rester ici. Elle pénétra à l'intérieur avec ses vivres. Ils mangeraient sur la route... Les minutes suivantes lui servirent à préparer son coffre et la caisse contenant ses quelques bien personnels. Bientôt, ils quitteraient cet endroit...

La demi-elfe ne put s'empêcher de penser au ruban bleu qu'elle avait attaché à son poignet. Une babiole sans valeur, mais qui était doté d'une certaine importance à ses yeux.