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 La fiancée de l'Aigle [Cornélia]

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Roderik de Wenden
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MessageSujet: La fiancée de l'Aigle [Cornélia]   La fiancée de l'Aigle [Cornélia] I_icon_minitimeSam 28 Mai 2016 - 22:37


L'an Neuf du onzième cycle
Première ennéade de Karfias
Le quatrième jour...


Le murmure apaisant des oiseaux berçait d'une douce quiétude les jardins du palais Séraphin. C'était une matinée de ciel bleu, quoique strié de quelques nuages épars, et le soleil encore bas répandait sa douce chaleur à l'ombre d'un grand cèdre. Avec l'affluence que connaissait la vieille demeure serramiroise, il était difficile de se trouver un espace de calme ; les jardins étaient envahis nuit et jour par les grands et leur suite, et il y régnait à toute heure le brouhaha constant des promeneurs, des serviteurs, des amuseurs et, à peine plus discrets, des espions de toute sorte.
Ayant renoncé à profiter d'un moment de silence, Roderik prenait son mal en patience. Assis sur un banc de pierre à l'ombre du grand cèdre, il demeurait immobile et apathique ; assise à ses côtés, son épouse Iselda écoutait avec une attention, joliment feinte sinon bien réelle, un poète en pleine récitation.

De tels amis m'ont bien trahi
Lorsque les dieux m'ont assailli
N'en vit un seul en mon logis
Le vent je crois, me les a pris,
Ce sont amis que vent emporte,
Et il ventait devant ma porte


Le gamin déclamait ses vers avec cette espèce de nonchalance feinte qu'ont les jeunes éphèbes. C'était le genre de fanfaron dont la beauté impertinente faisait tourner la tête des fillettes ; elles se laissaient bercer de cette sensibilité niaise dont vibraient leurs cordes vocales, puis se réveillaient un beau matin en se demandant où donc était passé leur pucelage. Celui-là était de cet âge intermédiaire où l'on hésite encore entre l'enfant et l'homme, et le petit duvet de moustache qu'il s'était laissé pousser au milieu de sa face glabre ne trompait personne. Mais enfin, cela semblait complaire à la comtesse, dont le mariage, s'il ne l'avait pas unie à un vieillard grabataire, n'en était pas moins malheureux ; d'un sourire amical et chaste, elle encourageait le jeune homme à poursuivre.
Roderik, on s'en doute, n'était pas aussi réceptif au charme de cette espèce de castrat. Après un "hmpf" agacé, il se leva, l'esprit visiblement occupé ; et il s'éloigna d'un pas lent tandis que les questions d'Iselda se heurtaient à un profond silence. Quelques hommes portant la livrée du comte se précipitèrent à sa suite, mais il les congédia d'un geste.

Il n'était pas familier de ces grandes demeures aristocratiques conçues par des architectes à l'imagination féconde. Les bâtisseurs arétans avaient toujours privilégié le solide et le durable plutôt que le beau, à défaut de savoir les concilier. Aussi, chaque fois qu'il quittait les jardins pour regagner une quelconque aile du palais Séraphin, Roderik avait l'impression de mettre les pieds dans un labyrinthe. C'était un sentiment qui le confortait dans l'idée que les bâtisseurs qui concevaient de tels palais n'étaient qu'un ramassis de fous suivant une mode stupide qu'il assimilait à une espèce de masturbation architecturale. Par bonheur, après s'être perdu à plusieurs reprises au cours des derniers jours, il avait fini par aiguiser son sens de l'orientation ; et bientôt, au détour d'un couloir, il parvint à trouver celui qu'il cherchait : le jeune Athaulf, son brave écuyer, qu'il avait investi d'une mission toute particulière.

- Mon seigneur, dit Athaulf avec respect.
- As-tu du nouveau concernant ce que je t'ai demandé ? lança prestement Roderik.

L'écuyer s'apprêtait à répondre, mais le couloir résonna bientôt de bruits de pas ; on venait. D'un signe de tête, Roderik fit signe à Athaulf de se taire ; ils remettraient leur conversation à plus tard.


Dernière édition par Roderik de Wenden le Mer 8 Juin 2016 - 14:06, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: La fiancée de l'Aigle [Cornélia]   La fiancée de l'Aigle [Cornélia] I_icon_minitimeVen 3 Juin 2016 - 20:40

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La journée s'était pourtant annoncé parfaite avec un magnifique ciel bleu, majoritairement dépourvu de nuages. Le soleil n'était pas encore très haut, jetant une chaleur acceptable sur les nombreux individus qui frôlaient les beaux pavés de la demeure serraminoise. Normalement, ou peut-être à une autre époque, la fille aînée d'Arichis Anoszia se serait émerveillé d'un tel spectable pour les yeux, mais les faits étaient tout autre. Au courant de la dernière année sa solitude l'avait beaucoup marqué. La jeune femme s'était irrémédiablement compte qu'elle vieillissait et qu'elle n'avait toujours pas trouver un compagnon pour vivre ces vieux jours. La fièvre de la jeunesse s'était tranquillement évaporait et la jeune femme n'inspirait plus qu'à une chose, prendre sa place auprès d'un partenaire d'un rang acceptable. Sa solitude languissante s'était rapidement transformée en amertume, voir même en rancoeur envers son père qui semblait avoir trouvé plus pressant de s'arranger un deuxième mariage - avec une femme plus jeune qu'elle de surcroit! - que glisser bague à son doigt. Il y avait eu une courte période où elle en avait sincèrement voulu à l'ancien comte d'Aretria pour être mort au courant de la guerre, puis elle s'était calmée, elle ne pouvait en vouloir irrationnellement à une personne décédée. De toute façon, elle ne l'avait pas si bien connu que cela.

- Peut-être devrais-je me trouver une autre activité pour me distraire? se questionna la dame Anoszia en tournant au détour d'un chemin, une énorme fleur d'un rouge éclatant entre les doigts. Son expression était mélancolique, son petit sourire, quant à lui, était euphorique, probablement le résultat d'un verre de vin descendu trop vite. L'ivresse colorait pernicieusement ses joues et elle s'amusait à arracher cruellement les doux pétales un par un, à la recherche d'un quelconque soulagement à sa frustration. Je dois trouver une nouvelle occupation afin de survivre les vieux jours.

Sa loyale servante, Annabelle, tenait une ombrelle au-dessus de la tête fiévreuse de sa dame d'une main hésitante et un verre de vin dans l'autre. Elle avait du mal à suivre la jeune femme qui se déplaçait constamment sans lui donner un moment de répit. Cornélia n'était pas d'humeur à joindre les conversations, aussi étonnant que cela fut. Elle peinait à rester concentrer sur un discussion, aucun sujet n'avait bon goût. Même les rumeurs n'étaient plus aussi délectable qu'auparavant. La nourriture était fade, les sourires embêtants. La dame préférait déprimer en solitide, loin des rires, loins des visages à deux faces. C'était mieux ainsi, ou alors elle craignait créer un scandal et malgré son amertume, elle ne serait pas celle qui apporterait la honte sur sa famille, ses frères pouvaient très bien s'en charger sans son grain de sel.

- Ne dites pas de telles choses, ma dame, porte malheur! l'implora sa compagne qui tenait fébrilement l'ombrelle au-dessus de la noble afin de la protéger le plus possible des rayons qui martelaient farouchement le teint de sa peau. L'Anoszia s'était à peine maquillée aujourd'hui, n'ayant eu recourt qu'à l'essentiel, un peu de poudre et de quoi souligné l'existence de ses paupières et de ses jolies lèvres. Sa robe était très sobre, pour une Anoszia et le seul accessoire extravaguant pour compléter le tout était surtout l'ombrelle qui la dissimulait timidement du regard brûlant du soleil. S'il-vous-plaît, laissez cette pauvre fleur en paix!

Cornélia poussa un long soupir, sa silhouette apparut derrière un mur et elle jeta furieusement le cadavre rougêatre dans le pavé, puis l'écrasa avec le bout de son talon, sans pitié. Brièvement, elle eu l'impression de se venger sur sa jeunesse qui se dégradait et le temps qui lui manquait pour lui trouver un mari convenable. L'option qui semblait lui restait, maintenant, était d'épouser un aussi aussi vieux que son père, ou pire encore. Qu'avait-elle fait pour mériter un pareil destin alors que ses frères étaient parer de gloire? Pourquoi était-elle née femme et non homme?

Elle donna un coup de pied à ce qu'il restait de la plante et celle-ci prit son envol avant d'atterrir devant deux hommes qu'elle n'avait pas encore aperçu à son arrivée. Son regard se leva vers ce qui semblait être visiblement un noble quelconque et un serviteur encore plus quelconque que l'autre. Aucun mot ne sorti de sa bouche et elle se contenta de regard les deux individus d'une tête haute. La dame les considéra longuement avant de sourire niaisement, le vin lui montait à la tête et s'est avec une nonchalance arrogante qu'elle salua le plus important des deux d'une courte et rapide révérence. Cornélia observa les alentours en silence, ne cherchant pas réellement à cacher sa mauvaise humeur.

- Qu'avons-nous là? dit-elle soudainement. Deux sombres individus, loin des festivités, murmurant à voix basses? Qu'est-ce qui se passe, on prépare un mauvais coup? La question insolente fit tresseillir sa compagne qui toucha doucement son épaule pour la ramener sur terre, mais Coco se contenta de la repousser sèchement d'un bref coup d'épaule. Alors, qui va se retrouver égorger aujourd'hui, Votre Seigneurie?

Elle contempla l'individu mâle, son apparence lui faisant aussitôt penser aux hommes du nord. C'est qu'elle avait un excellent sens de l'observation! Et elle savait exactement où et comment flairer les étrangers.

- Ce n'est pas très important, en fait, vous devriez dépensez votre énergie à me passer une corde au cou et me jeter du sommet d'une tour! souffla ensuite la dame avant de saisir la coupe de vin et de la vider d'un trait sous le regard horrifié de sa compagne qui ne pu s'empêcher un soupir d'exaspération. Cornélia, quant à elle, vint prendre place sur un muret et reprit la parole, se présentant bien trop en retard selon la bienséance. Cornélia d'Anoszia, fille aînée de Sa Grandeur Arichis d'Anoszia, et vous êtes, seigneur? Selon votre physique, j'aurais tendance à dire que vous êtes du nord, mais je peux bien me tromper, mes sens ne sont plus aussi aiguisés qu'avant, ha! Je ne suis qu'une vieille, vieille fille...

Les derniers mots avaient été crachés avec dédain et ce fut sa servante qui se tourna en direction du seigneur pour s'incliner très bas et implorer d'excuser le comportement de sa maîtresse.


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MessageSujet: Re: La fiancée de l'Aigle [Cornélia]   La fiancée de l'Aigle [Cornélia] I_icon_minitimeSam 4 Juin 2016 - 10:35

Roderik considéra longuement la damoiselle. Arrogante, impolie, fouineuse ; elle cumulait visiblement toutes les qualités. Roderik s'apprêtait à répliquer vertement, se fichant bien de savoir à qui il avait affaire, mais retint son élan lorsqu'il entendit le nom de la jeune fille. Cornélia d'Anoszia. Voilà longtemps qu'il n'avait plus entendu ce nom, et pourtant, il en gardait une trace bien nette dans un coin de sa mémoire. Un nom qui semblait ressurgir d'un placard poussiéreux, entraînant dans son sillage le cadavre du comte Wenceslas.

- Cornélia d'Anoszia... murmura-t-il.

Il ne semblait pas difficile, à partir de là, de deviner quel tourment habitait la jeune fille ; elle en donnait elle-même tous les indices. Une vieille fille, visiblement, qui attendait de se trouver un parti acceptable sans rien voir arriver à l'horizon. Une vieille fille qui avait pourtant été très près de devenir comtesse ; Roderik en gardait même un souvenir amer. A l'époque où le comte Wenceslas était en vie, il avait jeté son dévolu sur cette sudienne, faisant la sourde oreille à toutes les autres propositions ; Roderik avait même proposé au comte la main de sa soeur Aliénor, sans succès. Un an plus tard, le destin faisait preuve d'un curieux sens de l'humour : Wenceslas, mort avant d'avoir pu convoler, laissait une pauvre fiancée sans avenir ; tandis que Roderik, lui, par un mariage avantageux, s'était finalement octroyé le comté.
Il la dévisagea sans gêne - allait-il s'embarrasser de politesse pour une fille qui en était totalement dépourvue ? Elle avait la grâce de ces dames du sud, et il devinait que Wenceslas, cet homme si froid en apparence, s'était laissé fondre devant cette beauté enflammée - comme cela était touchant !

Roderik eut un geste amical envers la servante de l'Anoszia, comme pour lui signifier qu'il n'y avait aucun malaise. Il esquissa un sourire et avança de quelques pas.

- Allons, allons, je sais qui vous êtes. Pendant une courte période, vous avez été fiancée à feu mon suzerain et cousin. J'ai accompagné le comte Wenceslas jusqu'en ses derniers instants. Un homme avare de sentiments, qui respectait trop les femmes pour parler d'elles en permanence, mais... votre nom fait partie des derniers mots qu'il a prononcés.

Il serait malheureusement bien en peine de restituer une interprétation fidèle des derniers mots de Wenceslas ; Roderik ne savait pas très bien imiter les gargouillis.

- Je suis Roderik de Wenden, comte d'Arétria.
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MessageSujet: Re: La fiancée de l'Aigle [Cornélia]   La fiancée de l'Aigle [Cornélia] I_icon_minitimeMer 8 Juin 2016 - 1:13

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Cornélia ne pouvait pas se souvenir du moment où elle avait commencé à perdre la tête. Elle n'en avait pas conscience, certes, mais s'il devait y avoir un élément déclencheur, son mental avait profondément chuté lorsqu'elle s'était terriblement blessée le genou. La douleur l'avait empêché de sortir et elle s'était mise à penser. Quand on était seule, piégée avec sa déprime pour seule amie, il était normal de perdre le moral, mais elle ne l'avait toujours pas retrouvé. Il y avait des matins où elle ne voulait pas se lever, des journées où elle manquait tellement d'appétit qu'elle gardait son estomac vide jusqu'au lendemain sous le regard inquiet de Annabelle, toujours fidèle au poste malgré son humeur maussade. L'été était arrivé, les journées s'allongeaient et les nuits devenaient trop courtes. Elle broyait du noir dès que la nuit osait pointer le bout de son nez et elle paressait au courant de la journée. Elle ne faisait même plus l'effort de se rendre séduisante pour les regards mâles.

Malgré l'ivresse qui teintait ses joues d'un rose embarrassant et son air euphorique, l'expression de Cornélia changea violemment quand l'étranger mentionna le comte Wenceslas. Voilà un souvenir qu'elle n'avait pas besoin de revoir en tête! Un homme suffisamment important qui aurait pu lui offrir une place convenable dans la noble société, même s'il ne l'avait pas réellement impressionné au cour de leur première rencontre. L'homme était en effet plus petit qu'elle, de quelques centimètres, mais quand même! Toutefois, malgré les moqueries et les messes basses de ses compagnes, elle était restée optimiste, prêtant peu d'attention à l'air malade qu'affichait le comte. Il s'était avéré avoir une bien bonne intelligence et il était très courtois malgré sa froideur. Elle se souvenait de la façon dont elle s'était gentiment - avec un brin d'arrogance - amusé de sa personne devant la cour.

Elle s'étouffa presque avec sa propre salive lorsque l'étranger révéla ensuite son identité. Silencieuse, elle resta bouche bée un moment, repensant à ce qu'il avait dit juste avant. Honnêtement, elle ne croyait pas un de ses mots. Le comte était apparu dans sa vie aussi rapidement qu'il avait disparu. C'était à peine s'il avait laissé une trâce de son existence, qu'un simple souvenir déjà loin. Ils avaient à peine partagé une conversation complète, comment aurait-elle pu faire partie de ses dernières paroles? Et pourtant, elle sentait que les larmes allaient se pointer.

- Comte d'Arétria, répéta-t-elle, un peu hagarde alors qu'elle clignait plusieurs fois des paupières pour faire fuir les émotions qui affluaient alors qu'elle repensait au passé inutilement. Amère, elle n'avait pas réellement chercher à connaître l'état politique d'Arétia et de la personne qui avait prise la position de son ancien fiancé. Par tout les dieux, Wenceslas avait été le seul homme auquel elle avait été promise jusqu'à maintenant! Quelle honte! L'ironie de cette rencontre... la vie a un intéressant sens de l'humour, ajouta la jeune femme ensuite alors que ses doigts se crispaient sur sa jupe. Même si je n'ai pas très bien connu votre prédécesseur, je dois admettre qu'il avait un talent pour conserver un visage de marbre et il n'était pas très bavard. Peut-être était-il timide, qui sait? Moi, je ne le saurai jamais, parce que Sa Grandeur a préféré aller mourir pour une guerre qui, franchement, en valait-elle réellement la peine?

La dame soupira longuement, elle paraissait presque désespérée. Elle avait fait de son mieux pour accepté la mort du comte, croyant que plusieurs opportunités de mariages se présenteraient à elle. L'Anoszia s'était cru suffisamment désirable pour attirer de nombreux soupirants, mais cela n'avait pas été le cas. La vérité est que tous étaient plutôt attirés vers ses soeurs. Elle s'était longuement regardé dans le miroir, voulant savoir où avait-elle échoué pour mériter un tel destin. Devrait-elle être plus pieuse qu'un moine? Devrait-il se briser le deuxième genou? La belle Cornélia ne désirait même pas se comporter dignement devant cet homme qui avait un rang pourtant plus élevé que le sien. À quoi bon essayer? Elle n'avait plus la force de présenter le bon exemple.

- Vous devez être heureux d'avoir reçu une telle position, souffla-t-elle ensuite. Ah, j'aurais pu devenir comtesse, mais la tâche n'aurait pas été facile. Je sais fort bien que ma présence aurait attisé des regards curieux d'un bord et de l'indignation de l'autre. C'est le prix pour être différente, n'est-ce pas, mais en toute franchise et ce n'est pas le vin qui parle, j'aurais pu aimé la malelande, j'aurais pu faire de sa culture la mienne et représenter fièrement ce vilain territoire. Si une affection sincère était impossible avec le comte, nous aurions toujours pu garder une relation harmonieuse. Mes amies, si on peut les appeler ainsi, se faisaient une joie de se moquer gentiment de mon sort, mais je ne ressentais aucune tristesse quant à ce qui m'attendait. Ah oui, j'aurais pu aimer la malelande et elle aurait pu m'aimer aussi, mais je n'ai pas eu cet honneur.

Parce que l'ancien comte d'Arétria était mort comme une merde pour une guerre de merde, voilà.

Sa compagne bougea, s'inclinant doucement dans sa direction. Elle lui murmura qu'il ne s'agissait pas de paroles appropriées face à un étranger. Peut-être était-ce le vin qui parlait, finalement? Ah, c'était mieux ainsi. Elle n'avait plus de vie sociale depuis bien longtemps, évitant la compagnie de la noblesse comme la peste. Elle n'avait pas voulu venir ici, mais Annabelle l'avait imploré de sortir un peu et de prendre du soleil afin de remettre un peu de couleur sur son visage pâle. La belle du Sud se fânait comme une fleur en Automne. Son hiver arrivait à grands pas.

Cornélia hoqueta, la chaleur et le vin ne faisaient pas bon ménage et elle sentit soudainement sa tête tourner avec violence. Elle avait trop chaud, sa gorge était aussi sèche que les grains de sable miroitant sur une plage. Elle essuya la sueur qui perlait sur son front avec le dos de sa main, prise d'une soudaine fièvre. Sa servante sembla remarquer son malaise et lui demanda si elle voulait partir, mais la dame n'avait pas envie de bouger, qu'on la laisse crever sous le soleil de plomb.

- J'ai soif, dit-elle finalement. Va me chercher à boire, Annabelle.

La femme d'âge mûre la considéra longuement en silence, prête à protester, car elle savait que sa maîtresse ne parlait pas d'eau ou de jus frais, mais le regard noir que lui lança Cornélia lui ferma rapidement la bouche. Annabelle lorgna le comte brièvement avant de reporter son attention vers Coco qui balançait lentement sa tête de gauche à droite, les yeux maintemant fermés.

- Je, elle hésita, je ne peux pas vous laissez seule avec un homme, ma dame, admit sa compagne. Ce n'est pas... convenable.

La dame en question rouvrit les yeux, un brin de colère se lisait dans ses prunelles verdâtres.

- Au point où j'en suis, Annabelle, tu crois que j'en ai à foutre de ma réputation! cracha l'Anoszia en élevant furieusement le ton. Que veux-tu qu'il se passe en plein jour? Hein! Je suis une femme, j'ai appris à crier comme une cinglée depuis le jour où je suis venu au monde! C'est pas un homme du nord qui va me faire peur, tu m'entends! Je poignarde le premier qui me touche de manière innapropriée.

Ce n'était pas dans ses habitudes d'être vulgaire de la sorte. En fait, elle n'avait jamais tenu un tel langage auparavant. C'était sa faute, elle avait tendu l'oreille vers les conversation des serviteurs bien trop souvent. Il était temps de se trouver une nouvelle préoccupation. Quelques minutes d'hésitation plus tard, Annabelle s'était retirée après voir longuement considéré le comte et sa maîtresse en silence. C'était une mauvaise idée, elle le savait, mais elle ne pouvait combattre seule la mauvaise humeur de la noble dame. C'était tout de même sa faute si Cornélia était là aujourd'hui à se pavaner indignement devant le comte d'Arétria. Si elle avait su qu'elles feraient une telle rencontre aujourd'hui, elle ne l'aurait pas tant prier de mettre le bout de son nez dehors. Maintenant, elle n'avait plus qu'à aller chercher traîtreusement la carafe d'eau fraîche pour le bien être de la fille aînée d'Arichis d'Anoszia.


Cornélia quant à elle, le regard brûlant, toisait insolemment le comte d'Arétria. Autrefois, elle aurait illuminer l'endroit de son arrogance du Sud qu'elle utilisait toujours avec élégance, aujourd'hui, elle n'était plus que l'ombre d'elle-même, un fantôme parmi les vivants. Pendant que ses frères et soeurs se pavanaient avec leurs mérites dans leur sillage, elle restait là, toujours au même point, délaissée, humiliée et faible.

- Dites-moi, Votre Grandeur, une maîtresse du Sud, cela ne vous intéresse pas? s'enquit-elle sans l'ombre d'une honte dans ses yeux d'émeraude. Visiblement, elle avait perdue toute notion des tabous et de la bienséance.

Était-elle désespérée à avoir un amant? Non, pas nécessairement. Elle aimait simplement se torturer sans but précis, miroiter ce que la sombre voix lui murmurait continuellement dans les oreilles.

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MessageSujet: Re: La fiancée de l'Aigle [Cornélia]   La fiancée de l'Aigle [Cornélia] I_icon_minitimeMer 8 Juin 2016 - 11:11


Oui, cette guerre en valait la peine, songeait Roderik en son for intérieur sans pour autant l'exprimer à voix haute ; il pouvait concevoir ce ressentiment, égoïste mais humain, qui poussait Cornélia à haïr la cause pour-laquelle son soupirant était mort sans chercher à la comprendre. Deux comtes s'étaient succédés sur le trône de pierre, et les deux avaient trouvé leur destin en Oësgardie. Ironiquement, ces deux disparitions tragiques avaient permis à la maison de Wenden de s'élever au plus haut sommet qu'elle ait jamais atteint. Mais le prestige n'était pas seul en lice ; Roderik avait vu l'Oësgardie dévastée par les drows, il avait vu Amblère et Nebelheim. La guerre était moche, mais il avait bien fallu la faire.

Il ne prit pas davantage la parole lorsqu'elle jura qu'elle aurait su aimer la malelande, un pays parfois moqué par ceux qui n'y étaient pas nés. Un grand pays vide soumis aux caprices du temps, où les sabots des chevaux s'enfonçaient dans la boue lorsqu'il pleuvait ; un pays aux nuages gris, aussi gris que la pierre qui formait les murs et les bâtiments dans le nord rocailleux, où étaient sises les principales cités arétanes. Il était difficile de se représenter l'architecture primaire, grossière de la citadelle d'Arétria lorsque l'on flânait dans les entrailles du luxueux palais Séraphin, ou dans l'une de ces demeures du sud ; mais Roderik avait toujours aimé les forteresses arétanes pour ce sentiment de puissance et de solidité qu'elles dégageaient. Il était né là-bas, ce pays était le sien, et jamais il n'en aimerait d'autre. Alors, Cornélia aurait-elle pu s'y faire ? Il voulait bien lui accorder le bénéfice du doute, mais il peinait à y croire. Elle était une Anoszia. Il ne savait pas grand-chose d'elle, mais avait déjà entendu parler de cette famille. C'étaient des gens fortunés, rompus à un art de vivre confortable qu'Arétria ne saurait jamais offrir. Des gens du sud, avec leurs traditions cucul et leur protocole de coincés ; à côté d'eux, les arétans les mieux éduqués passaient volontiers pour des sauvages.

Il allait dire quelque chose de gentil quand la jeune femme se mit à invectiver sa suivante. Roderik comprit seulement à ce moment précis que la jeune Anoszia avait un peu forcé sur la bouteille. Il réalisa que tout n'était peut-être pas si rose dans les jardins ydrilotes... il esquissa un rictus, amusé, devant le caractère bien trempé de Cornélia qui savait parvenir à ses fins. Avec son verbe aiguisé et son air autoritaire qui inclinait au despotisme, peut-être, finalement, aurait-elle réussi à se faire sa place au pays arétan.
Puis le sourire de Roderik disparut, et il ouvrit grand la bouche, les yeux écarquillés, lorsqu'elle lui demanda s'il cherchait une maîtresse.

- Euuuuuh... l'interjection résonna dans le couloir pendant un temps qui lui sembla infiniment long ; pris au dépourvu, il ne savait quoi répondre, alors que la chose aurait dû être évidente. Non, non, non. Il était marié, et de maîtresse, il n'en avait pas besoin. Son épouse était jeune et fraîche, et il comptait qu'elle lui donne un héritier sans tarder. Certes il ne l'aimait pas, et elle ne l'aimait pas non plus, mais Roderik ne se jetait pas dans le stupre avec la première venue ; cela n'était pas dans ses habitudes. Du moins cherchait-il à s'en convaincre, alors que le souvenir amer de Maélyne de Lourmel flottait encore autour de lui ; et quoique ce n'ait pas été à proprement parler de la luxure - car il avait aimé cette femme - ils n'en avaient pas moins consommé leur amour sans être unis devant Néera.

- Damoiselle Cornélia, dit-il lorsqu'il se fut ressaisi, je ne voudrais pas vous donner un prétexte pour me poignarder. Il sourit, comme s'il était fier d'avoir esquivé le problème avec un trait d'humour. Puis son sourire se figea, et disparut peu à peu, car il se rendait bien compte que son trait d'humour n'était pas drôle. Ecoutez, reprit-il, je... il se rapprocha d'elle, et soutint son regard, se noyant presque dans ses beaux yeux verts. Ses narines frémirent en percevant l'odeur entêtante de son parfum. Vous êtes une jeune femme charmante. Hum. Que voulait-il dire déjà ? Il essaya de regagner une certaine contenance, et imagina subitement ce bon Wenceslas, avec son corps maigre et sa face glable luisante de sueur, étendu sur le corps nu de la jeune Anoszia, à pousser des gémissements aigus ressemblant plutôt à des grincements stridents. L'image avait de quoi vous donner envie de vomir, mais Roderik s'en amusa. Reprenant ses esprits, il poursuivit, sur un ton plus posé : allons, vous me faites marcher, Cornélia, je sais que vous cherchez seulement à me mettre dans l'embarras. Et il lui adressa un sourire entendu, comme le feraient deux amis partageant une bonne plaisanterie. Vous êtes belle, et un homme d'honneur se doit de préserver votre pureté. Et tandis que Roderik témoignait de sa sagesse et de sa droiture, son regard glissait sur le visage légèrement maquillé de l'Anoszia, sur ses lèvres rehaussées de rouge, et l'arrondi de ses courbes que laissait deviner sa robe. Wenceslas s'est à peine occupé de son comté, et encore moins de sa fiancée, songeait-il distraitement. Qui sait ? Arcam comptait peut-être sur lui pour faire les deux.
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MessageSujet: Re: La fiancée de l'Aigle [Cornélia]   La fiancée de l'Aigle [Cornélia] I_icon_minitimeLun 13 Juin 2016 - 20:01

La fiancée de l'Aigle
Roderik de Wenden & Cornélia



Cornélia n’était pas avare de ses petits sourires insolents, se servant de son arrogance d’Anosiza telle une armure et parfois une arme.  La boisson ennivrante lui donnait certes moins de charme dans ses manières et de créativité dans ses paroles, mais également beaucoup plus de courage pour affronter les malheureux qui croisaient sa route. Quoique, le comte Roderik ne semblait pas attristé de s’être retrouvé sur son chemin. Elle soupira, espérant que Annabelle reviendrait rapidement pour étancher sa soif.

Un vent chaud innatendu agita les mèches qui encadraient son joli minois et elle considéra longuement l’expression adorable du comte. La disparition de son sourire de gentilhomme l’amusa grandement et elle pencha lentement sa tête sur le côté, l’air adorable.  Elle haussa un sourcil intéressé quand l’unique bruit sortant de la bouche du monsieur fut un terrible ‘’euh’’.  Brièvement, elle cru voir le déroulement de ses pensées confuses, ou salaces, derrière ses beaux sourcils bruns.

Pendant que son interlocuteur semblait chercher de quoi répondre à sa scandaleuse question, Cornélia glissa une main dans la large poche dissimulée dans sa jupe et en ressorti nonchalamment un éventail qu’elle ouvrit d’un coup sec du poignet avec toute l’expertise féminine qu’elle possédait. Elle s’éventa paresseusement, essayant de gagner un brin de fraîcheur dans cette chaleur infernale, mais son soulagement était des plus minimes. Je ne voudrais pas vous donnez un prétexte pour me poignarder. La dame sourit bêtement, un peu trop même pour un propos aussi sérieux. Si lui arrêta poliment de sourire, elle, son expression ne changea pas d’un millimètre.

Elle accepta qu’il se rapproche d’elle, l’observation de son point d’appui, relevant la tête juste assez pour croiser son regard à nouveau, s’éventant toujours aussi lassement. Il n’était pas laid, le nouveau comte d’Arétria avec ses habits convenables. Il dégageait de lui une meilleure santé que celle de Sa Seigneurie Wenceslas. L’Anoszia tenta de déceler un air de famille, ils étaient cousins après tout, mais arriva difficilement à ses fins. Probablement que la ressemblance se faisait plus dans l’esprit que sur son agréable physique.

- Ah, Votre Grandeur, vous arrivez très bien à vous embarrassez seul, sans mon aide, à hésiter à me parler de cette façon, soupira la jeune femme en faisant rouler ses yeux verts non sans les raccrocher à ceux du gentilhomme. Quelle pureté ? C’est un concept sans importance, créé pour attacher indignement les filles à leur père ou à leur frère, si ce n’est pas un mari. Pour faire de moi une vulgaire chose qui un jour, ne sera plus qu'une dernière mode.

La noble dame laissa le regard intéressé du comte rouler sur elle, se servant de cette petite attention comme une distraction. Même si elle se plaignait du manque d’opportunité de mariage qui s’offrait à elle, elle avait également délaisser la compagnie des hommes célibataires, et ceux qui ne le sont pas. Les nerfs à vif, elle s’était éloignée des activités sociales, mais ce n’était pas une grande perte, n’est-ce pas ? Personne ne se souciait vraiment de Cornélia, elle le savait depuis trop longtemps maintenant.

- Je suis belle, dites-vous ? répéta-t-elle avec un brin d’amertume. Est-ce vraiment le seul trait intéressant chez moi ? Je serais moins offensée d’entendre que le titre de mon père ou ses richesses soient se qui encouragent réellement les sots à venir m’addresser la parole ! La franchise était une lame qui pouvait facilement se retourner contre soi, mais Cornélia n’avait plus confiance en l’avenir, vous voulez être agréable en compagnie d’une dame, complimentez autre chose que son beau visage ou sa nouvelle robe, parlez lui de son intelligence, de son humour ou d’un talent qu’elle doit bien possédez, la beauté, ça ne vaut plus rien à mes oreilles.

Elle laissa s’échapper un long soupir. L’Anoszia n’avait même pas remarquer qu’elle s’était mise à s’éventer plus rapidement ou que la chaleur lui était monté aux joues en force. Elle réprima un hoquet et toisa Roderik pendant quelques secondes qui lui semblaient interminables. Ce comte pensait-il réellement qu’il pouvait clamer les faveurs d’une dame avec des compliments aussi faibles ? Ah, c’est vrai, la majorité des dames étaient de pauvres sottes qui se pavanaient sans un brin d’intelligence et qui croyaient avoir tout dans la vie avec de simples mots concernant leurs beaux atours. Mais qu’est-ce que la beauté ? C’était bien connu, les femmes n’étaient que des belles fleurs se fânant un peu plus à chaque année.

Cornélia se redressa, délaissant le muret et prit négligemment appui sur l’homme qui se tenait à proximité, car elle s’était relevée trop rapidement pour sa tête embrumée par le vin du Sud. La vitesse de sa respiration augmenta légèrement au contact du torse du seigneur et elle emprunta un peu de sa personne pour se ressaisir avant de le repousser sèchement, présentant ses deux paumes en l’air avec un faux air dédaigneux.

La dame redressa soudainement la tête, toisant le seigneur de nouveau avant de fermer sèchement son éventail dans la paume de sa main gauche. Un air presque menaçant sur son doux visage rosi, elle tapa à quelques reprises son accessoire fermé dans sa paume avant de faire un peu vers le comte. Elle dirigea ensuite la surface rigide de l’éventail vers le visage de l’homme et appuya fermement mais sans violence sur sa joue droite pour le forcer à tourner la tête vers le côté. Elle répéta le même manège avec sa joue gauche avant de finalement le forcer à lever le menton, se délectant de se qu’elle voyait.  

Coco ouvrit ensuite à nouveau l’éventail d’un simplement mouvement du poignet et pressa la douce surface sur les lèvres du comte avant d’approcher dangereusement son visage du sien. Ses lèvres frôlaient de façon taquines celles du comte, séparer que par le simple tissu.

- Les femmes sont sottes, parce qu’ont les élèvent ainsi, marmonna Cornélia, un air dégoûté déformant ses beaux sourcils, mais cela n’est pas vraiment un souci pour vous, n’est-ce pas ? Les hommes n’ont besoin que de porteuses d’enfants, et si elle meurt  en enfantant, ce n’est pas un gros problème, on peut la remplacer.

Nouveau soupir, nouvelle migraine, elle recula prestement et se détourna de son interlocuteur.

- Comment vous sentirez-vous si votre entière existence n’était à propos que de votre apparence physique et votre faculté à produire des enfants, hein ? cracha-t-elle sans retenu. Elle se rendait à peine compte qu’elle déversait ses frustrations sur le pauvre seigneur et toutes les nuits précédentes sans sommeil réparateur n’arrangeaient en rien son comportement scandaleux.

La dame se retourna soudainement et fit couler ses yeux verts sur le comte, faisant mine de l’examiner intensément. Elle se mit à lui tourner autour tel un vautour près à se lancer sur sa carcasse et à se repaître de ses entrailles et de son sang.

- Tenez-vous droit, ne montrez pas trop vos dents quand vous riez, comment pouvez-vous vous raser de cette façon ? Qu’est-ce que les gens vont penser de vous ? Arrêtez de sourire en sa compagnie, vous attirez trop l’attention, c’est votre femme qui devait être le centre du monde ! commença-t-elle, se plaisant à changer les rôles. Ces quoi ces habits ? Elle pinça un bout du tissu qui couvriat le bras de Roderik en feignant le dédain. C’est tellement passer de mode ! Comment pouvez-vous vous vêtir ainsi, qu’êtes-vous, un homme de mauvaise vie ? Personne ne veut d’une vulgaire catin ! Sous ses derniers mots, elle donna une petite claque appréciative sur le postérieur du comte avec le dos de son éventail.

Puis, elle ri, car elle savait que ces paroles ne faisaient aucun sens. Quelle quantité avait-elle bu déjà ? Elle ne se souvenait pas avoir été aussi ivre auparavant. En fait, elle ne se remémorait point une fois où elle s’était réellement enivrée tout simplement. Son tempérament avait toujours été prudent et mature, ne faisant que se tremper les lèvres dans la même coupe de vin pendant des heures, sirotant que lorsqu’elle devait trinquer au bonheur d’un autre, mais jamais du sien.

Sa passion troublée, elle s’arrêta et leva les yeux vers le ciel qui était pourtant si beau. Qu’est-ce qu’elle était devenue ? Elle qui était pourtant si fière et si jolie sous le soleil. La fille du dragon n’était plus que l’ombre d’elle-même et la tristesse qui brisait toute sa motivation et ses ambitions la transformaient en une personne qui la dégoûtait.

Ses paupières se fermèrent subitement et elle se pinça l’arête du nez, en proie à un terrible malaise. Elle allait être malade, à coup sûr, mais même si son esprit n’était plus entièrement là, elle savait pertinemment ne point désirer démontrer en plus son mal devant un étranger. Diantra, elle n’aurait jamais dévoilé un tel état aux membres de sa propre famille.

Le soleil dardait ses rayons sur sa peau de porcelaine avec une telle violence ! Pourquoi était-elle sorti alors que l’air était difficile à respirer et que son humeur était aussi exécrable ? Ses épaules s’affaissaient brusquement.

- Excusez-moi, Votre Grandeur, au moins elle était toujours capable de s’adresser à lui en prenant conscience de son honorable titre, je ne me sens pas très bien, je crois que je vais rentrer me reposer. Elle se détourna et se déplaça dans la direction opposée à celle qu’avait empruntée sa servante. D’ailleurs, elle avait complètement oubliée celle-ci. Ah, c’était à sa compagne de revenir plus vite. Pourquoi est-ce que le soleil est aussi chaud, souffla-t-elle péniblement avant de s’accrocher soudainement au mur au détour du chemin. Ses doigts se crispèrent sur la surface rigide et elle jura contre le soleil et elle-même.


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MessageSujet: Re: La fiancée de l'Aigle [Cornélia]   La fiancée de l'Aigle [Cornélia] I_icon_minitimeLun 13 Juin 2016 - 22:46


Le sourire de Roderik avait disparu. Il s'était d'abord laissé prendre au petit manège de la jeune Anoszia, sans s'émouvoir de son caractère espiègle et effronté ; il avait fait montre de sympathie et de bienveillance en voulant croire que l'inconvenance de la donzelle n'était qu'un badinage innocent, typique des gens du sud, et que cela n'irait pas plus loin. Sans doute le charme de la jeune fille avait-il contribué lui aussi à lui faire baisser sa garde ; mais la logorrhée qui s'ensuivit rompit le sort. Alors il quitta son air débonnaire pour adopter la mine sévère du comte, celle de l'homme qui rend la justice. Il allait la remettre à sa place.

Il n'en eut pas le temps, puisque la donzelle se rendit compte elle-même qu'elle était allée trop loin - elle s'en rendit compte juste à temps, semblait-il, mais ce juste à temps sonnait plutôt comme un trop tard. Roderik leva la main comme pour réclamer qu'elle le laissât prendre la parole, mais déjà elle se détournait. Il ne lui laissa pas le loisir de filer, car il éleva la voix, dans un ton empreint d'une grande fermeté qui, bien que dépourvu de toute menace, ne laissait guère de doute quant à son sérieux.

- Ne me tournez pas le dos, mademoiselle.

Il s'avança dans sa direction, reconquérant la distance qu'elle avait mise entre eux, puis planta son regard dans le sien. Dans ses yeux, l'hésitation qui l'habitait quelques instants auparavant n'était plus ; il était dans cet état d'esprit où, sûr de lui, chaque mot résonnait avec justesse sans que sa voix n'en tremble.

- Je ne connais rien des habitudes de la cour d'Ydril, et je me moque bien du protocole alambiqué des gens du sud. Mais ne croyez pas que je n'accorde aucune importance au respect et à la décence. Vous m'avez trouvé embarrassé, mais je ne vous ai point complimentée pour vous faire la cour, mademoiselle. Je n'ai pas cherché à vous charmer. Son visage sévère se fendit quelques instants d'une espèce d'hésitation ; puis il reprit, d'un ton toujours assuré : pour être tout à fait honnête, je me suis défilé sous de faux prétextes. Préserver votre honneur et votre pureté m'importe peu, car je n'ai guère de sympathie pour votre famille. Croyez-moi, je vous mettrais volontiers dans mon lit. Non seulement parce que vous êtes une peste arrogante et imbue d'elle-même, et qu'en m'offrant votre corps, vous apaiseriez en partie le ressentiment que j'ai à votre égard... une lueur mesquine traversa son regard, alors que ses lèvres s'étiraient en un début de sourire à moitié malsain. Mais aussi parce que cela causerait du tort à votre père et votre frère, et que cela ne manquerait pas de m'amuser. Le rictus s'effaça aussi vite qu'il était apparu, faisant à nouveau place à un masque de gravité. Cela étant, aussi agréable puisse être la chose, ce serait donner prétexte à Ydril et au Langecin de s'en prendre à mes gens. Mais peut-être estime-t-elle valoir la peine de déclencher une guerre, songea-t-il. Après tout, l'honneur d'une femme défendu par les armes était une inépuisable source d'inspiration pour les trouvères.
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MessageSujet: Re: La fiancée de l'Aigle [Cornélia]   La fiancée de l'Aigle [Cornélia] I_icon_minitimeMar 14 Juin 2016 - 0:49

La fiancée de l'Aigle
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La déshydratation asséchait sa bouche, craquelait ses lèvres pourtant si rieuses autrefois. Son état euphorique avait disparu pour laisser place à une colère sourde et de noires pensées qui tapaient sur elle comme le soleil au-dessus de leurs têtes. Elle repensa à la tour aux faucons qu’elle avait grimpé pour rejoindre ses amis ailés et à ses fiançailles échouées, puis à nouveau au sommet de la tour où elle avait jeté un coup d’œil par la fenêtre. Son regard avait plongé vers le bas et elle s’était dis que la mort serait peut-être instantanée si elle se jetait en bas, mais elle préférait la tranquillité des bois et l’idée de se laisser couler au fond de la rivière qui la longeait.

Son corps ne se déplaça pas très loin, car Cornélia se retrouva à nouveau face au comte, affaiblie et vulnérable comme la petite femme qu’elle avait toujours été. Son expression était lasse, mais elle eu immédiatement un mouvement de recul, levant un bras devant elle et plaçant son poing fermé sur son cœur affolé, une façon inconsciente et inutile de former un mur entre l’homme devenu dangereux et elle-même. Ses joues s’empourpèrent violemment sous l’assaut de son interlocuteur et malgré son regard devenu vitreux, elle resta insolemment de marbre. Elle pouvait contrôler la peur sournoise qui se manifestait au creux de sa poitrine et créait une boule dure à avaler au fond de sa gorge.

Puis, elle déglutit et un sourire presque dément apparut sur ses lèvres avant qu’un rire ne s’échappe nerveusement de sa bouche. Pourquoi cherchait-elle autant à se faire du mal et à se mettre dans une situation aussi périlleuse ? Si elle se sentait en danger, elle avait bien dit qu’elle ne craindrait pas à poignarder quiconque voudrait s’en prendre à elle. Le poids de la lame qui traînait dans sa poche devint soudainement très lourd. Elle s’était toujours montrée exemplaire, elle avait était une mère pour ses plus jeunes frères et sœurs. La dame avait fait tout en son pouvoir pour la bonne grand sœur sur laquelle on pouvait toujours compter, et qu’avait-elle reçu en échange ? L’ignorance et la négligence. Qu’avait-elle à perdre aujourd’hui ? Si cet homme tombait sur elle et retroussait ses jupes, qu’allait-il réellement arrivé  par la suite ?

- Vous abhrorrez l’existence de mon père et mon frère ? dit-elle un peu trop calmement, une lueur haineuse brillant au fond de ses yeux vitreux. Les insultes à son encontre la bousculaient un peu et la façon dont elle se mordilla la lèvre inférieure était l’unique signe de son désarroi. C’est drôle, moi aussi, siffla-t-elle soudainement. Son visage s’éveilla, elle semblait étrangement soulagé d’avoir finalement évoqué ses terribles mots à voix haute. Mes dames de compagnie avaient raison, les hommes du nord sont des rustres, mais je préfère cela qu’aux manipulateurs et aux ingrats de mon côté du pays, ajouta ensuite l’Anoszia.

Il n’y avait rien de plus fort que la famille ? Balivernes. Son frère aîné était parti avec ses ambitions, Oscario donnait à peine de quoi considérer comme des nouvelles alors qu’elle avait sauvé ses enfants, Azénor, elle ne voulait même pas pensé à elle et les jumeaux ? Les jumeaux avaient trop à faire pour donner la moindre considération à celle qui les avait élever comme une mère.

- Parlez moi comme vous le souhaitez, faites moi mal, vengez-vous, Votre Grandeur, je l’ai bien mérité, faites de moi votre coup insignifiant contre les Anoszia, je n’en ai cure, car j’ai abandonné toute envie de poursuivre cette masquerade qu’est ma vie ! cracha ensuite Cornélia. Ma réputation est déjà tarie depuis bien longtemps.

Et sa solitude ne la préserverait pas pour plus longtemps.

- Brisez-moi, anéantissez moi avec franchise, parlez de mon comportement scandaleux, dites que je suis démente ou une catin, cela ne peut être que mon unique vengence envers une famille au père et aux frères menteurs et manipulateurs qui n’appelent que lorsqu’ils ont une requête à faire.

Elle se détourna à nouveau, les joues rougies par les émotions qui l’habitaient et qu’elle trimbalait depuis trop longtemps maintenant. Les vestiges de la rage subsistaient toujours aujourd’hui, mais aucun honte ne venait hanter ses songes. Ses mots avaient été dit avec une terrible franchise. Sa famille qu’elle chérissait et avait tant aimé par le passé, maintenant, elle ne voulait plus entendre parler d’eux. Elle s’arrangeait pour vivre dans l’une de leurs demeures, loin de son père si possible, mais surtout, de sa nouvelle femme. Elle n’accepterait jamais de considérer une femme plus jeune qu’elle comme étant sa belle-mère. L’offense était trop vive et profonde pour qu’elle puisse tolérer cet affront.

Les traits de son visage se calmèrent et une partie d’elle-même se détentit malgré l’urgence de la situation dans laquelle elle s’était mise. Son estime personnelle était ramolie depuis un moment, peu importe si cet homme la violentait ou non, elle le méritait, elle l’avait cherché et elle l’avait trouvé. Son ton autoritaire était parfait pour un comte et la façon dont il avait parler de ces gens démontrait une certaine gentillesse et un sens du devoir. Si elle méritait de se faire du mal de plein gré, lui n’avait rien fait pour occasionner un comportement si inacceptable de sa part. Elle soupira et baissa humblement les yeux. Elle n’allait pas s’excuser, car ça servait à rien, l’affront avait déjà été fait et ils se détesteraient probablement pour le restant de leur jours. Lui, parlerait de cette gueuse qu’il avait rencontré aux courants des festivités, elle, retournait dans ses appartements et gardant pour seule compagnie sa bouteille de vin et le songe des profondeurs d’une rivière qui lui faisait la cour.

- Je ne vaus pas la peine que vous me donniez plus d’attention qu’il ne le faut, Votre Grandeur, il est déjà trop tard pour dire cela, mais je ne souhaite pas causer davantage de conflits, votre énergie est trop précieuse pour la perde sur la gueuse que je suis, elle jeta un coup d’œil derrière elle, remarquant que le serviteur du comte avait reculé un peu plus loin, il devait être profondément embarrassé de la scène. Elle sourit. Vous êtes trop fort pour moi, elle frotta un tempe douloureuse, faites ce que vous voulez.

Oui, elle était une peste arrogante, surtout en ce moment où elle avait perdu tout charme, toute élégance, mais elle n’était pas imbue d’elle-même, un trait impressionnant pour une noble, certains diraient, mais les gens disaient n’importe quoi.




Dernière édition par Cornélia d'Anoszia le Mar 28 Juin 2016 - 1:25, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: La fiancée de l'Aigle [Cornélia]   La fiancée de l'Aigle [Cornélia] I_icon_minitimeMar 14 Juin 2016 - 18:05


Roderik la considéra un long moment. Les revirements de la jeune femme la rendaient difficile à cerner ; était-ce l'alcool qui parlait, était-ce le sentiment de solitude et d'abandon qui la tenaillait, ou n'agissait-elle ainsi qu'en raison d'un tempérament pernicieux ? Quelle qu'en soit la raison, son comportement ne laissait pas de surprendre Roderik. Entendre une femme s'affubler de tant de qualifications abjectes lui donnait la nausée : il lui était plus désagréable de la voir se rabaisser elle-même plutôt que de la voir s'en prendre à lui.
Tout n'est pas rose au pays des Anoszia, songeait-t-il alors qu'il se demandait d'où provenait cet étrange contentieux qui opposait la jeune fille non seulement à son père, mais aussi à toute sa famille. Sans doute une broutille, qui la verra se réconcilier avec eux en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. En réalité, cela lui importait peu ; il n'avait pas à connaître les secrets de famille d'une fratrie vivant à l'autre bout du royaume. Il aurait pu tirer profit d'elle, glaner de précieux renseignements s'il s'en était fait son amante ; mais cela n'était pas pour lui, cela n'était pas lui.

- J'ignore d'où vient la haine que vous semblez vouer à votre propre sang, mais je refuse d'en tirer avantage. Ma défiance envers votre nom n'est que politique, et je n'associerais pas une innocente jeune femme à ce genre de chose. Vous n'êtes pas une... hem, gueuse, mademoiselle, et je n'ai aucune raison de vouloir ternir votre réputation. Ni de me venger de quoi que vous ayez pu me faire. Alors, oublions cet incident, voulez-vous ? Oublions ça. Contentons-nous de faire comme si tout ceci n'avait... jamais eu lieu.

Il accentua ces derniers mots tout en jetant un regard en biais à son écuyer Athaulf, qui se tenait à l'écart. Le gamin, qui savait combien son seigneur tenait au respect de son intimité, eut un hochement de tête à peine perceptible, montrant qu'il avait compris le message. Puis il replongea son regard dans celui de Cornélia, et si son visage était toujours sérieux, il s'était quelque peu radouci. Voilà donc la fameuse Cornélia, celle que ce bon Wenceslas préférait à ma sœur Aliénor, pensa-t-il. Le destin avait décidément un drôle de sens de l'humour : bien qu'à l'époque il ait longuement tenté de faire changer d'avis son cousin, il avait souvent pensé qu'Aliénor se serait montrée trop rebelle, trop indépendante pour faire une bonne épouse - surtout avec un homme aussi rigide que Wenceslas. Mais Cornélia, à sa manière, lui en aurait elle aussi fait voir de toutes les couleurs... Wenceslas a eu de la chance dans son malheur. Il n'a pas eu le temps de s'apercevoir qu'il ne savait pas choisir les femmes. Après tout, une fille capable de haïr son père en vient aisément à haïr l'époux qu'il a choisi pour elle.
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MessageSujet: Re: La fiancée de l'Aigle [Cornélia]   La fiancée de l'Aigle [Cornélia] I_icon_minitimeMar 28 Juin 2016 - 1:57

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L a haine la tenaillait dès qu’elle ouvrait l’œil, le main. Parfois elle se demandait s’il s’agissait réellement de haine ? De l’amertume, oui, de la colère, certes, des frustrations qui lui brisaient l’âme à chaque pas, exactement. Elle avait connu la joie de vivre et maintenant se sentait couler au fond d’un gouffre. La lumière du jour lui brûlait les yeux, elle gardait les rideaux fermés la majorité du temps. Cornélia n’allait pas bien et il n’y avait personne pour se soucier de sa condition. Annabelle avait proposer de lui apporter un guérisseur, mais elle n’avait rien voulu entendre. Ce genre d’homme qui se pensait au-dessus de tout le monde après avoir soigné quelques maux aurait simplement penser à de l’hystérie féminine, un verdicte qu’elle prenait très peu au sérieux, surtout de la part du genre mâle.

La chaleur lui monta à nouveau aux joues. Elle leva péniblement les yeux vers le comte et le considéra un moment. Pouvait-il réellement faire comme si de rien n’était ? Cornélia était habituée à donner forte impression quand elle le désirait, mais jamais ne s’était-elle encore dévoilée sous un tel angle. Malgré les brumes de l’alcool qui noyaient son intelligence, la dame n’ignorait pas qu’elle avait dépassé une ligne de conduite, ou plusieurs, en fait.

Ses lèvres remuèrent et formèrent un vague sourire, une pâle copie de la joie exprimée autrefois, à une autre époque. Son regard semblait plus éveillé, mais le désir de retourner dans ses appartements pour dormir le restant de la journée subsistait. Les yeux rougies par des larmes qu’elle refusait de laisser aller pour conserver le peu de dignité qu’il lui restait, elle détourna le regard, une nausée persistant à se montrer le bout du nez.

- Pouvez-vous réellement faire cela, Votre Grandeur ? s’enquit faiblement la jeune femme, vulnérable. Je ne suis qu’une femme, qu’est-ce que je peux bien comprendre à la politique ? ajouta-t-elle ensuite en forçant son sourire davantage. Le dégoût brillait cependant dans ses yeux verdâtres. Si vous êtes réellement en mesure de taire l’existence de ma disgrâce, alors je ferai de même, pour notre confort mutuel.

Quelle dignité ? Elle n’arrivait plus à se comporter comme une dame de son éducation. Son attention se tourna vers l’écuyer du comte. Le jouveanceau semblait avoir clairement compri le message, mais les gens de la noblesse n’étaient jamais à l’abris des ragots et des mauvaises langues. Un accident était si vite arrivé. Peut-être n’étaient-ce que de possibles rumeurs, mais il n’y avait jamais fumée, sans feu.

- J’imagine que vous vous dites « Ah, voilà cette fameuse Cornélia, la vieille fiancée de feu mon cousin », souffla-t-elle subitement, un petit air vaguement amusé dans les yeux avant qu’il ne disparaisse aussitôt, non, je ne suis pas la femme qui fut autrefois promise à l’ancien comte d’Arétria, je ne suis plus que son ombre, son fantôme, cette Cornélia n’existe plus. Cette dame était heureuse et belle et débordante d’énergie et…

Elle s’arrêta, devinant qu’elle déblatérait un peu trop à son sujet. L’Anoszia possédait encore suffisamment d’amour propre pour ne pas aller plus loin que ça et recula de quelques pas avant d’offrir une révérence courtoise envers son interlocuteur. Elle n’était pas heureuse, mais elle n’allait pas empoisonner les autres avec sa petite personne, avec son existence insignifiante.

- Je remercie Sa Grandeur pour cet échange, elle hésita, cet intéressant échange, mais je crains devoir me retirer maintenant, je me suis suffisamment attarder en ces lieux, je vais rejoindre Annabelle, elle ne devrait pas être très loin.

Sur ces derniers mots, elle marcha, les pas lourds, près du comte, son coude frôlant presque le sien et se dirigea dans la direction prise par sa compagne quelques minutes plus tôt. Elle avait du mal à respirer, une boule douloureuse torturait le fond de sa gorge. Son corset lui faisait mal, elle avait simplement envie de l’arracher, de l’ouvrir d’un coup de couteau et se libérer de cette vilaine emprise. Avec un peu de chance, elle ne reverrai plus jamais le comte d’Arétria et leur histoire s’arrêtrait là, à une simple et unique rencontre hors du commun.


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MessageSujet: Re: La fiancée de l'Aigle [Cornélia]   La fiancée de l'Aigle [Cornélia] I_icon_minitimeVen 1 Juil 2016 - 21:11

Roderik n'en ajouta pas plus ; il regarda la jeune fille s'éloigner, honteuse, en se demandant ce qui pouvait conduire une jeune femme à agir de la sorte. Il lui paraissait inconcevable qu'une fille bien née puisse si facilement céder à la dépravation. La chose, évidemment, arrivait de temps à autre en Arétria comme ailleurs, et ne manquait pas de nourrir les ragots, tout en jetant le déshonneur sur toute la famille de la fautive ; mais c'était le genre de choses qu'un bon père de famille s'efforçait d'éviter. La décence aurait voulu qu'un tel homme, constatant la détresse de sa fille, prenne au moins des mesures pour s'assurer qu'elle ne reste pas seule, quitte à lui adjoindre une suivante suffisamment gaillarde pour l'empêcher de se noyer dans l'alcool ; mais la détresse de Cornélia d'Anoszia, semblait-il, était le cadet des soucis de son père et de son frère. Le régent d'Ydril et le duc de Langehack avaient d'autres préoccupations. D'une certaine manière, Roderik était désolé pour la jeune femme, et il ne la blâmait pas tant elle que les hommes qui l'entouraient et qui ne se souciaient pas de la protéger. Pourtant, il ne tarda pas à se demander s'il valait mieux : était-il un bon frère, lui qui avait à peine vu sa soeur Aliénor depuis qu'il était comte ? Et ferait-il un bon père, lorsque le temps lui accorderait à nouveau la chance de l'être ?
A défaut de réponse sur ces plans-là, peut-être pouvait-il au moins s'efforcer d'être un bon mari.

Il décida de s'y employer le soir-même, lorsqu'il rejoignit la chambre qu'il occupait avec son épouse dans une aile du palais. Elle s'était déjà couchée, mais ne dormait pas lorsque le comte entra dans la pièce, une bougie à la main. A la lueur dansante de la flamme, Roderik contempla un moment son visage ; il la trouva belle, et se demanda pourquoi il le remarquait si rarement. Iselda, sans doute loin de deviner que son époux était dans une de ses phases passagères de dévouement, soutint son regard avec un mélange de défi et d'embarras.
Il est vrai qu'il négligeait souvent de lui porter de l'attention. Tous deux parlaient peu, et l'essentiel de leur relation tenait dans une espèce de tolérance passive de la présence de l'autre. Parce qu'il savait l'importance de se doter au plus vite d'un héritier - mais aussi, et peut-être avant tout parce qu'il était un homme et qu'il ne pouvait guère se passer de ces choses - Roderik sollicitait régulièrement son épouse pour accomplir le devoir du couple. Incité par ses idéaux chevaleresques et parce qu'il était uni avec elle devant Néera, il s'efforçait d'être digne et respectueux dans ces moments-là, et se montrait soucieux de ce que la chose ne soit ni douloureuse ni inconfortable pour elle ; mais cela n'allait guère plus loin : leurs multiples étreintes n'avaient suscité entre eux ni complicité, ni passion, et ne duraient jamais bien longtemps.
Les choses auraient pu se passer différemment ce soir-là, si la comtesse, pressentant que le comte était venu réclamer son dû, ne s'était excusée en lui confiant être "indisposée". Roderik n'insista pas, et ses résolutions de bon époux s'endormirent aussi rapidement que lui.



~~ ~~



La nuit avait chassé pour de bon les quelques nuages rebelles qui avaient persisté au cours des journées précédentes, malgré un soleil rayonnant qui désormais irradiait de tous ses rayons les jardins du palais. Goûtant la quiétude d'une matinée où les lieux n'étaient pas encore envahis par une foule de nobles gens, Roderik s'était une nouvelle fois accaparé le banc de pierre qu'il avait occupé la veille avec son épouse, avant sa rencontre fortuite avec Cornélia dans les couloirs du palais. Installé à l'ombre du grand cèdre, il profitait d'un moment de calme d'autant plus agréable qu'il était seul cette fois-ci - ni épouse, ni jeune éphèbe débitant des âneries en octosyllabes à l'horizon.
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MessageSujet: Re: La fiancée de l'Aigle [Cornélia]   La fiancée de l'Aigle [Cornélia] I_icon_minitimeMar 12 Juil 2016 - 15:53

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Cornélia était d’humeur bien plus acceptable que la veille. Malgré l’effort porté à son maquillage, elle avançait calmement parmi les jardins à la recherche d’une quelconque forme d’inspiration. Elle s’éventait légèrement d’un moment gracieux du poignet, à croire qu’elle ne pouvait se détacher de ce bel accessoire. Malgré l’ombre des arbres sous lesquels elle se déplaçait paresseusement, la chaleur était toujours aussi étouffante, et ce, même si elle portait une robe d’été beaucoup moins lourde que ces cousines d’hiver. La dame soupira doucement en remarquant un oiseau d’une espèce inconnue s’envoler vers les nuages. Ce qu’elle aurait aimé être l’une de ces libres créatures et s’envoler vers l’inconnu et explorer le ciel que l’homme ne connaîtrait jamais aussi intimement.

Mélancolique, elle débarqua dans un joli endroit ouvert où les parfums de la nature trouvaient aussitôt ses narines capricieuses. Elle renifla et apprécia l’odeur détectée avant d’arpenter les lieux de son regard verdâtre. La journée d’aujourd’hui se présentait moins humide que la précédente et elle remercia les dieux quant à leur clémence pour ce temps plus tolérable que les jours plus tôt au courant de l’ennéade.  

Malgré les évènements de la veille, elle avait réussi à dénicher un sommeil plus ou moins réparateur, ce qui devait probablement se voir sur son teint plus reposé. Elle avait changé sa tenue, assurément, mais arborait toujours une couleur foncée digne d’une matriarche. À quoi bon étendre sa beauté alors qu’il n’y avait aucun célibataire potentiel dans les environs, ou plutôt, personne qui ne voudrait d’elle. Son expression changea aussitôt à cette pensée et elle échappa un nouveau soupir. Les jours heureux ne viendrait plus jamais, n’est-ce pas ?

Au bout d’une minute à broyer du noir, elle remarqua une présence masculine un peu plus loin et fronça des sourcils. Même si elle ne l’avait rencontré qu’une seule fois, elle reconnu aussitôt la chevelure du comte d’Arétria qui paressait normalement sur un banc de pierre, à l’ombre d’un cèdre. Sa moue se mua partiellement en un sourire embarrassé et elle pensa à rebrousser chemin, mais où était le plaisir dans la fuite ? Ha, une phrase digne de l’ancienne Coco.

La dame haussa des épaules et retroussa légèrement ses jupons pour marcher plus librement et à pas de loup vers le comte. Il paraissait étrangement détendu, cet homme. Une fois à proximité, elle ne lui laissa pas le temps de se tourner dans sa direction et déposa doucement le plat de son éventail fermé sur sa tête, agitant un peu les cheveux de celui-ci.

- Il n’y a qu’un rapace pour apprécier autant les coins reculés et la quiétude qu’apporte la vie en solitaire, souffla doucement l’Anoszia en forçant un sourire narquois. Votre Grandeur, le salua-t-elle ensuite en faisant une petite révérence peu formelle. Où est donc votre tendre épouse, encore en train de dormir à une heure aussi matinale ?

Cornélia pencha légèrement la tête sur le côté, observant le comte sous ce nouvel angle et sourit plus sincèrement. Quand on était seul, c’était le meilleur moment pour se laisser envahir par ces pensées, sombres ou joyeuses. La jeune femme en connaissait quelque chose après avoir si souvent tenté d’étouffer cette voix cruelle dans sa tête dans l’abus du vin.

- À quoi songez-vous ? s’enquit-elle soudainement avant de contourner gracieusement le noble seigneur pour venir s’asseoir à l’autre extrémité du banc sans même demander sa permission. Elle sorti de la poche de sa robe un petit nécessaire de couture très simple et un petit sac de soie sur lequel elle travaillait depuis quelques mois déjà, sa broderie était plus lente que jamais depuis que ses états d’âme avaient sombrés. Peut-être au mauvais coup que vous planifiez hier avant notre rencontre ?

Elle lui adressa un petit sourire narquois avant de planter une aiguille dans la pochette de soie.


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MessageSujet: Re: La fiancée de l'Aigle [Cornélia]   La fiancée de l'Aigle [Cornélia] I_icon_minitimeVen 29 Juil 2016 - 16:31


Le comte paraissait détendu, de loin. Seulement de loin.
En réalité, lorsqu'il avait reconnu la donzelle qui s'approchait de lui l'air de rien, il avait senti ses joues s'empourprer. Une gêne absurde s'était saisie de lui, d'autant plus incongrue que si quelqu'un devait avoir honte, ce n'était pas lui. Mais la jeune fille affichait une parfaite assurance, et Roderik s'efforça de donner le change pour en faire autant ; si bien qu'il se tenait à présent aussi immobile qu'une statue de pierre, ce qui, plutôt que de simuler la sérénité, lui donnait l'air de souffrir d'ankylose.

Lorsqu'elle éleva la voix, il crut tout d'abord qu'elle le traitait de rapace ; il ne comprit qu'un instant plus tard qu'elle faisait référence à ces piafs dont les fauconniers vantaient les mille et une qualités. A la question concernant son épouse, Roderik ne répondit pas ; il était malséant d'évoquer Iselda devant une femme qui avait tenté - et peut-être tentait encore - de le séduire. Il garda un moment le silence, feignant de ne pas voir qu'elle le dévisageait avec insistance. Elle s'était enhardie depuis sa fuite de la veille, et ce revirement ne manquait pas d'étonner le comte qui, décidément, avait bien du mal à cerner les femmes.

Ce ne fut que lorsqu'elle fut assise à ses côtés et qu'elle se mit à broder que Roderik daigna enfin lui faire la conversation.

- Non, mademoiselle, je ne songeais pas à cela. Du moins, pas directement. Cela n'avait, de toute façon... pas vraiment d'importance, dit-il d'un air pensif, les yeux dans le vague. Puis, se tournant vers Cornélia, lança tout à trac : j'ai cru comprendre hier que vous haïssiez votre propre famille... pourquoi ? La question était aussi soudaine que déplacée, mais au fond, il n'y avait pas de raison pour que la jeune femme se réservât le droit à l'impertinence.
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