[Complot] On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs... surtout en Elda !

La confiance ne se décrète pas, elle s'obtient. Pour être franc, dans le cadre d'une tentative de coup d'état, la confiance n'est nullement nécessaire et pose même parfois de dramatiques problèmes moraux lorsqu'arrive le moment de partager le butin. De par le fait, Haldren ne faisait absolument pas confiance à Krish ou à Valsrik'Hrae, qui devaient tous les deux ressentir exactement la même chose envers lui. Seul un drow fort mal éduqué aurait pris le risque de baisser sa garde face à ses congénères lorsque le course au pouvoir s'ouvrait. Rien que de très normal après tout car l'ancien Triumvir n'avait pas non plus eu confiance dans ses deux collègues à l'époque de leur putsch, Elva' comme Malag' jouant leur propre partition en ne partageant avec lui que certains intérêts communs.

Intérêts communs, le mot était jeté.

Malgré son grand sourire de façade, l'archimage fulminait intérieurement. Il espérait trouver des alliés (de circonstances, certes), il ne trouvait que des rivaux potentiels dont les plans s'avéraient fort éloignés des siens. Enfermés dans leurs croyances envers le panthéon drow, aucun des deux ne lui permettrait de faire prévaloir la place du Chaos en Elda. Le sorcier n'espérait que lui voler ses secrets et la princesse marchande mener à bien une sainte croisade dont il serait bien évidemment exclu. Allait-il laisser ces hérétiques se placer sur sa route alors que l'aboutissement de son grand projet approchait enfin du terme ? Pouvait-il prendre un tel risque ? Son échec à Eraison lui avait appris l'importance de ne sous-estimer aucun acteur lorsque l'enjeu en valait réellement la peine.

Tue-les ! Tue-les ! Tue-les ! lui ordonnait une petite voix intérieure.
Non, pas encore, répondit une seconde voix. Sois patient, oui sois patient, ils te seront plus utiles vivants que morts.

Fondamentalement exact, car après tout l'un comme l'autre pouvait encore constituer un atout précieux dans ses plans si l'archimage arrivait à les placer dans la position qu'il souhaitait, ce qui relevait de l'impossible tant qu'ils se trouvaient tous les trois ensemble à s'observer avec méfiance. Diviser pour régner, prêcher le faux pour savoir le vrai, ces petits jeux constituaient le quotidien des drows depuis plusieurs cycles et Haldren décida à contrecœur de brider son impatience en acceptant de continuer à y participer. Avec l'âge, ses réserves de patience diminuaient drastiquement au point qu'il devait faire un violent effort sur lui-même pour ne pas laisser éclater sa frustration.

Je suis ravi de voir que nous nous comprenons. Réunissez vos forces, vos amis, vos réseaux, et préparez-vous à frapper lorsque les troubles éclateront. Restera à trouver un candidat pour remplacer Malag'eyl, mais je suis certain que nous trouverons quelqu'un apte à nous servir de marionnette, non ? Vous savez désormais comment venir me trouver... ou me laisser un message.

Tout en parlant, l'archimage avait laissé son art millénaire s'insinuer à travers le sortilège de Valsrik'Hrae pour réaliser exactement la même astuce que le sorcier un peu plus tôt, à savoir différencier ses paroles selon l'interlocuteur. Oh que c'est vilain d'afficher une vertueuse indignation lorsqu'un autre agit ainsi, pour ensuite agir de même en lui volant sans vergogne sa brillante idée.

Mais Haldren est vilain. Très vilain, même.

Ce qu'entends Krish : KRISH, MA BELLE PANTHÈRE, IL FAUDRA QUE NOUS PARLIONS EN PRIVE SANS LA PRESENCE DE... CE SOUS-FIFRE SANS ENVERGURE. REJOINS-MOI A LA TROISIÈME HEURE DEMAIN SUR LE FLANC SUD DE LA FAILLE, AU-DELÀ DE LA PORTE D'URIZ.
Ce qu'entends Valsrik'Hrae : VALS, MON VIEIL AMI, CERTAINS DES SUJETS ARCANIQUES DONT NOUS DEVONS NOUS ENTRETENIR NE CONCERNENT PAS CETTE DONZELLE INAPTE A MANIER LA MAGIE. REJOINS-MOI A LA CINQUIÈME HEURE DEMAIN PRES DE LA CRYPTE DE VALAS.

Tandis que les messages mentaux atteignaient leurs cibles respectives, Haldren s'approcha de la porte du salon et jeta un regard discret au dehors. Un petit sourire sarcastique tordit ses traits alors qu'il avait le dos tourné aux deux autres drows, comme si les sentiments parfois contraires mais toujours extrêmes qui bouillonnaient en lui cherchaient à s'échapper. Se contrôlant, il referma la porte et revint vers ses comparses.

Personne en vue, mais vous ne devriez pas rester trop longtemps. Les esclaves vont s'interroger sur votre présence prolongée en l'absence d'Yindis et cela risque de faire jaser.

'HRP':

Bien. Aucun des deux ne semblait ravi par sa petite révélation, mais chacun d'une façon qui lui était propre. Valsrik la regardait comme si elle venait de proposer la paix universelle entre les peuples et Haldren, loin de s’enthousiasmer faisait comme si cela n'avait aucune importance. En d'autres termes, l'un était trop croyant pour être emballé par l'idée, l'autre n'y trouvait pas son compte. Super.

Quitter la salle ne lui serait pas demander deux fois. Déjà qu'elle ne voulait pas attirer l'attention des deux personnes présentes à l'origine, elle n'allait certainement pas risquer plus que nécessaire sa vie tranquille de drow anonyme. Elle laissa donc aux deux hommes le loisir d'échanger quelques mots en aparte et se plia en deux pour ramasser sa capeline. Elle défit également d'une main agile la petite broche accrochée à la hanse de son gros sac. La petite main d'argent stylisée dont la paume était piqué d'un rubis était d'une finesse toute alléchante, mais elle la traitait comme d'autres s'amusent a faire rebondir leurs clefs du bout des doigts.

Avec le naturel qui la caractérisait, elle laissa son gros sac échoué sur le sol et engloutit la distance qui la séparait d'Haldren d'une démarche chaloupée. " Tu diras à Yindis que l'Al'Serat lui passera commande. " indiqua-t-elle avec une œillade en direction de son colis abandonné. Ses doigts, eux, glissèrent à la lisière du pagne du mage tirant un instant sur son côté droit. Sa voix se fit plus suave, plus basse, son regard plus malicieux. " Quant au reste, tu en fais toujours beaucoup trop. " Le tissus, brusquement relâché, cola de nouveau à sa hanche. La bordure roula légèrement, comme alourdit par un petit objet. " J'adore ça. " murmura-t-elle en passant près de son oreille avant de saisir Valsrik par les épaules pour le pousser devant elle vers la sortie. Elle les aimaient beaucoup tous les deux, mais leur laisser le champ libre pour discuter immédiatement après son départ n'était pas dans ses plans pour l'heure.

Laissant Haldren et son pagne sur le bord duquel était maintenant piqué une broche d'argent et de rubis en forme de main, elle rabattit sa capuche d'une main et continua dans les couloirs sur les talons de l'élu de la Chimère. Lorsqu'il furent suffisamment loin du vieux mage et de toute oreille d'esclave, elle tira sur le bras de son guide malgré lui. En une seconde, l'homme s'était retrouvé plaqué contre le mur, un sourire de chat particulièrement mutin flottant à un souffle de son visage.

- A nous deux, cher et dévoué serviteur, " chuchota-t-elle, son corps gainé de cuir pressé contre le torse nu du jeune mage. " Puisque tout le monde veut te voir mort, tu dois avoir le temps pour un verre, non ? "

D’intérêts communs, il ne fallait pas se leurrer, vous n’en aviez que très peu. Dans le plus grands des paradoxes, vous ne seriez rien de plus que des compétiteurs alliés. Vous vous toléreriez le temps que les choses se décantent en Elda, ou que l’un d’entre vous pense en avoir obtenu assez pour s’arracher à ce contrat imparfait. Qu’Haldren se soit décidé à échanger avec toi quant à l’art et aux arcanes après que tu te sois à travers ton échange avec Krish, ouvertement montré comme portant l’espérance de la récompense ultime d’Uriz et Teiweion, et par extension fondamentalement opposé à la théologie du Chaos qu’il souhaitait ramener était un mauvais signe comme il n’y en avait pas de plus évidents. Tu prendrais certainement le risque pourtant. Car si tu n’as pas encore accompli tout ce que ton potentiel te promet, tu as toujours tout fait pour y arriver. Que Valas te protège ou que dans la mort, tu gagnes ta place auprès des grands.

Et tu n’obtiendrais pas plus de la part de l’archimage. Pas aujourd’hui en tout cas, parce que Krish semblait y être fermement opposée. Qu’elle ait compris ou pas l’existence d’une dualité dans vos messages à Haldren et toi, il ne serait pas en son intérêt en tant que partenaire concurrente de vous savoir tous les deux déjà seul à seul dans son dos. S’il était un seul d’entre vous qui pouvait se permettre de peu craindre des débuts en solitaire, c’était Haldren, et Haldren seul. Alors tu te laisserais par la présence de la sulfureuse femelle dans ton dos, n’appliquant d’opposition aux directions que ses attitudes indiquaient être celles de son choix que le minimum prouvant que tu n’étais pas qu’une simple poupée de chiffon.  
Son soudain élan d’affection cependant te fit tout bonnement manquer un battement. Ton souffle s’alourdit dangereusement lorsque sa poitrine écrasa la tienne, et l’espace d’un instant, ni l’ancien ni le nouveau visage de Krish ne te faisaient face. L’espace d’un instant ce n’est plus une femme, mais un homme, un Noirelfe immense au regard écrasant qui t’emprisonne contre ce mur. L’espace d’un instant, tu es face à Ran’Lyn, et tu as peur.

Tu clignes des yeux. Déglutis. La femme est de retour, et ton assurance avec. Tu réponds à son sourire de chat par un rictus du même acabit, dévoilant légèrement des crocs lustrés par une langue gourmande. Ta main droite vient fermement prendre appui  juste à la naissance de la croupe de la veuve, la gauche s’insinuant sous la capuche à la recherche d’une pommette à frôler du bout des doigts. Mage que tu es, physicien que tu es, tu joues de minuscules points de pression pour créer le frisson, et tu en profites, pour d’un coup d’épaule, échanger vos positions. Certes, tu n’as pas la carrure d’Haldren, et encore moins celle du bourreau de tes cauchemars, mais tu n’en es pas moins plein de ressources.
Tes dents claquent, tout près de la lèvre inférieure de Krish, emmenant à peine ta propre lippe à effleurer la sienne.

- Il semblerait que j’aie autant de temps devant moi que ne le décideront les lames tu t’appuies encore un peu plus, terminant de presser ton bassin contre le sien mais sache qu’il n’y a que les Dieux pour m’appeler leur serviteur, Shaar.