|
| Pour quelques barriques de plus [Terminé] | |
| | Auteur | Message |
---|
Cosimo Tête Pelée
Humain
Nombre de messages : 121 Âge : 107 Date d'inscription : 01/09/2016
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 35 ans Taille : Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Pour quelques barriques de plus [Terminé] Lun 12 Fév 2018 - 19:28 | |
| Un bon crachin printanier les fouettait. Le vieux se tourna vers le jeune :
«Tu veux un secret pour la pêche ? Il faut pêcher quand il pleut. Les gens te disent que la pluie fait fuir le poisson. Fadaises ! Le poisson est dans son lac, dans sa rivière. - Et donc ? - Et donc il est déjà mouillé ! Il s’en fout.»
Ils parvinrent au sommet de la colline. La route serpentait en bas le long d’une rivière.
« J’ai de mauvais yeux, tu les vois ? -Je les vois ! »
La charrette bâchée arrivait du nord, ses deux chevaux affrontant vaillamment la route boueuse. Le cocher, chapeau de cuir dégoulinant d’eau, les fouettait avec enthousiasme. Une tête familière déboucha de la bâche, agitant les bras.
«C’est Odon ! »
Les deux marcheurs dévalèrent la colline en hurlant. Le cocher arrêta son attelage et les regarda en riant :
«Si ce n’est pas mes deux compagnons de jeu ! Votre camarade Odon est déjà avec moi. »
Le vieux agita la main.
«Le bonjour brave cocher ! »
Le jeune restait silencieux derrière lui. Le cocher désigna les perches qu’ils portaient sur le dos : « Vous pêchiez ? Par ce temps ? - C’est le meilleur temps pour la pêche. Et vous, bonne route ? - Oui-da, nous avons chargé les barriques de bière avec l’aide d’Odon. Il a de bons bras. Pas vrai Odon ? »
Il se retourna. Odon tenait un long coutelas. Le jeune était déjà sur lui avant qu’il ne reprenne ses esprits. Le vieux commanda :
«Voilà ce qui va se passer : nous allons te voler. Garde les mains sur tes rênes surtout cocher. Bien serrées comme ça. Lie-lui les mains Odon. Petit, plante-le s’il bouge. Voilà. Lâche les rênes. Descend de la charrette. »
Le cocher s’étala de tout son long dans la boue du chemin.
«Relève-toi. Ferme les yeux, et garde-les fermés jusqu’à ce que je te dise de les ouvrir. Je t'éventre si tu les ouvre. Je vais te surveiller.»
Les trois compères sautèrent sur l’attelage et lancèrent les bêtes à fond sur un chemin de traverse. A la tombée de la nuit, ils devraient parvenir au campement des compaings avec les barriques. Le cocher resta sur la route les yeux fermés jusqu’à ce qu’une patrouille le récupère tard dans la nuit.
Dernière édition par Cosimo Tête Pelée le Mar 13 Mar 2018 - 13:16, édité 3 fois |
| | | Louis de Saint-Aimé
Humain
Nombre de messages : 668 Âge : 36 Date d'inscription : 01/08/2016
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 26 ans Taille : 1m93 Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Pour quelques barriques de plus [Terminé] Mar 13 Fév 2018 - 16:35 | |
|
« En tout cas, c’est pas une putain de sinécure tout ça … Et puis merde, pourquoi est-ce que c’est à nous de faire le sale ouvrage ? On est pas qu’de simples grivetons, fais chier! J’commence à voir des cloches sur les mains, tantôt ça va empester le pue c’t’affaire. » « Rahhh … Arrête de râler. Y’a des gens qui se crèvent à besogner l’bois pour le siège jour et nuit, tu les entends chouiner, peut-être? Alors fais pas ta donzelle, on croirait entendre ma bobonne quand c’est sa saignée. » « J’croyais qu’on devait occire du Tatzelworm, pas bûcher tous les foutus arbres de cette damnée forêt. » « Faut bien aider, tudieux! Y’en a pas de ces vers, du coup, on va pas se prendre à deux mains les grelots en attendant, si ? » « Bah, je croyais, un peu, ouais … » « J’te jure toi… »
Ainsi troquèrent-ils leurs haches pour leurs épées respectives. Adieu le couvre-chef de bûcheron du dimanche, bon retour à vous, preux et vaillants membres de l’armée Berthildoise! D’un coup de main mutuel, ils se nippèrent de leur harnois, couvrant leur corps endolori par les efforts. Ganses fixées, cordelettes rattachées, c’est en convoyant d’un pas engourdi sous la pesanteur de leur équipement, qu’ils tâchèrent de retrouver le confort de leur campement.
« J’ai vu c’matin que le gros Gibol s’est fait refilé une dizaine de lapin. Ça sent la brochette à plein nez pour c’soir, c’moi qui te le dit! Et demain, la souplette. »
« Tu veux pas fermer ton mange-merde un peu, oui? » Avant même qu’ils n’eurent temps d’engager l’engueulade en franche camaraderie, au loin ils entendirent le hennissement sourd d’un duo d’équidé franchement éprouvé par leurs maîtres. Et le char roulait à vive allure, c’était là peu dire! Tellement, qu’à son passage se soulevait les flaques boueuses échouées le long du sentier en terre battue. Électrisés par cet étrange spectacle, nos deux gus s’en virent enhardis de plus belle, ancrant leurs bottines ferrées sur le chemin de la carriole, se dressant en obstacles immuables. Mains toutes deux posées sur le pommeau de leur épée, c’est sous la bruine incessante qu’ils attendirent que l’embarcation soit à bonne distance avant d’hurler :
« HALTE-LÀ! »
|
| | | Cosimo Tête Pelée
Humain
Nombre de messages : 121 Âge : 107 Date d'inscription : 01/09/2016
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 35 ans Taille : Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Pour quelques barriques de plus [Terminé] Ven 23 Fév 2018 - 16:05 | |
|
Plus tôt, ils avaient fallu dégager les épaisses roues du chariot d’une gangue de boue. L’opération avait été longue et salissante. Ils faisaient route à fond pour rattraper ce retard.
« Chiabrena », jura le vieux en arrêtant les bêtes. Il ne pensait pas croiser de gardes sur cette petite route, de surcroît par un temps aussi pourri. Interloqué par cet arrêt, Odon et le jeunot passèrent leurs têtes à travers la bâche.
« Visez moi ces deux caves, manquait plus que ça. »
Le vieux mercenaire agita amicalement la main en direction des deux factionnaires qui leur barrait la route. Il grommela en même temps dans sa barbe à destination de ses deux compères :
« On a rien à se reprocher, laissez-moi faire la causerie. »
L’attelage repartit vers les deux berthildois à petite allure, avant de marquer l’arrêt tout juste devant eux. Le vieux descendit en souffletant, affectant le comportement d’un brave cocher :
« Le bonjour mes braves. Nous faisons convoi pour le camp avec mes gars.»
Il cligna de l’œil :
« Un peu de boisson pour la Veillée d’Othar. »
Le vieux fixa le ciel, et jaugea les deux soldats d’une mine désolée :
« Mais montez donc vous mettre à l’abri, faut pas rester sous cette flotte par la Damedieu, vos armes vont rouiller ! »
|
| | | Louis de Saint-Aimé
Humain
Nombre de messages : 668 Âge : 36 Date d'inscription : 01/08/2016
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 26 ans Taille : 1m93 Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Pour quelques barriques de plus [Terminé] Lun 26 Fév 2018 - 14:49 | |
|
Encabanés de leurs pesants armements, les deux reîtres soutenaient d’un air dubitatif le vieux croulant qui venait à leur rencontre. Le cocher bien aux abords avenants, n’en resta pas moins celui qui incita ses braves bêtes à parcourir la lande à grandes foulées. Lorsque le croulant leur offrit un peu d’eau de vie, après la sale journée qu’ils eurent, l'un des deux soldats vit sa suspicion pour l'aîné disparaître, tandis que la tentation atteignit prestement son climax, simplement à l'évocation d'une possible cuite.
« C’est vrai qu’on est pas au pays d’la soif, fichtre. Un peu à boire, après tout c’sale ouvrage, ce s’rait pas de trop! Et Othar ne nous tiendra pas rigueur d’nous incendier les boyaux un peu en prévision d’la soirée! » Lança le premier, alors qu’il claqua l’épaule de son homologue qui lui, ne déridait en rien de son air incertain. Ses yeux, bien que plissés par le crachin qui tombait droit du ciel, sur sa caboche détrempée, se dirigeaient non pas sur le vieux raisin, mais sur la carriole. Vainement, il tenta d’y repérer quelques indices sur sa cargaison.
« Dites-donc, vous talonniez rudement vos palefrois, pour qu’ils labourent la terre de leurs sabots de la sorte. Le temps manque, vous êtes pressés ? Ou quelqu’un est à vos trousses ? » Sa deuxième question manquait toutefois de sérieux, comme s’il se doutait bien que ce n’était pas le cas, vu qu’à l’horizon, rien ne semblait se manifester. Du reste, l’un comme l’autre ne montraient d’intentions malsaines ni de doutes outre-mesure, or leurs aciers restèrent orphelins de mains pour les saisir, mais il était à parier que dans peu de temps, la donne pourrait changer. Avenant, le vieillard l’était bel et bien, sauf que quelque chose puait et au nez de l’une des deux bleusailles, il y avait anguille sous roche.
|
| | | Cosimo Tête Pelée
Humain
Nombre de messages : 121 Âge : 107 Date d'inscription : 01/09/2016
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 35 ans Taille : Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Pour quelques barriques de plus [Terminé] Mar 27 Fév 2018 - 12:44 | |
|
« Petit, donne nous donc à boire ! »
La civilisation péninsulaire se dissolvait dans la boisson, un langage que tous comprenaient. Et cette petite troupe ne manquait pas de répondant. Le jeune compaing souleva un des tonnelets de la cargaison pour le placer sur le banc du cocher. On dégaina quelques gobelets de cuir, et Odon fit sauter le bouchon du tonneau d’un coup de maillet. La belle bière brune et épaisse se mit à couler victorieusement dans les godets, qu’on tendit respectueusement aux soldats. Le vieux laissa échapper un rire :
« Buvez, buvez, ce n’est pas ce qui manque. On est chargé ras-la-gueule de ce jus ! »
Autant jouer la transparence, d’autant plus quand on commençait à poser des questions fâcheuses. Les voleurs ne souhaitaient pas une confrontation avec ces deux types armés de pied en cap. Après avoir vidé sa boisson d’un long trait, le vieux s’attacha à calmer les inquiétudes :
« On a été embourbé à quelques lieues d’ici, et je voulais arriver au campement avant la tombée du jour. Ces routes sont peu sûres en temps de guerre, les rôdeurs et les pillards pullulent depuis que les hameaux et villages de la région se sont vidés pour rejoindre Christabel. »
Il insista pour resservir les gaillards :
« Je suis pas mécontent d’être tombés sur vous à vrai dire. Vous avez bien trop fière allure pour être des brigands. »
|
| | | Louis de Saint-Aimé
Humain
Nombre de messages : 668 Âge : 36 Date d'inscription : 01/08/2016
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 26 ans Taille : 1m93 Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Pour quelques barriques de plus [Terminé] Mar 6 Mar 2018 - 20:26 | |
|
« À quoi bon être si lourdement harnaché, alors qu'on se torche d'aussi basses besognes! Non, moi, la seule arme qui m’importe, c’est le tire-bouchon. » Lança le plus mou des deux, levant le coude sans gêne ni scrupules. Il avait bien trop travaillé pour qu’il ne se paie lui-même sans se soucier des râles de son confrère, dont il savait le tempérament moins souple.
« Bon … Pourquoi pas. » Ainsi les compaings venaient de s’acheter la paix et ça, au bon prix de quelques louches d’alcool! Pour l’homme suspicieux qu’il était, le voilà qui se retrouvait la moustache trempée de jus et les babines légèrement redressées d’un sourire satisfait.
« C’est vrai que, hein, il est pas immonde le picrate. » Acquiesça le plus frigide des deux, tout en s’essuyant le bec du revers de sa patte gantée. Il n’en fallut pas plus pour que l’autre crétin s’approche de la cariole et qu’il y grimpe pour poser son séant sur le rebord du banc, donnant suite à l’invitation de tantôt.
« Allez zou, on y va tout de go! » Tonna l’idiot du village tout en abaissant sa garde en octroyant de sa confiance la plus absolue envers les brigands. Il en avait marre et la simple idée de boire tout son saoul le faisait écumer d'envie.
« On peut bien vous raccompagner, si vous l’désirez, ouais … »
|
| | | Cosimo Tête Pelée
Humain
Nombre de messages : 121 Âge : 107 Date d'inscription : 01/09/2016
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 35 ans Taille : Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: Pour quelques barriques de plus [Terminé] Mar 13 Mar 2018 - 13:14 | |
|
La soif vient en buvant, et l’attelage se mua en taverne pour les cinq compères. Pissant par-dessus bord, la bande mena un assaut en règle contre le tonnelet mis en perce. Bien vite, l’ivresse acheva de dissiper la méfiance et les retenues des uns comme des autres. On apprit avec joie que les deux soudards étaient de la belle armée berthildoise, compagnons de lutte à Valdrant. Et l’assaut reprit de plus belle, en versant force toasts pour les morts et pour les vivants. Oui-da, ils étaient routiers. Le vieux avoua entre deux rots qu’il avait eu peur qu’on s’empare de leur bonne cargaison, mais que les hommes de Sainte-Berthilde étaient ses amis, et qu’on donnerait un banquet une fois arrivé en leur honneur. Ils parvinrent enfin au campement des mercenaires, déjà ronds comme des targes et bons camarades. Odon poussa la chansonnette, attirant les curieux. Ou plutôt beugla avec toute la grâce d’un ivrogne :
« Buvons bien, là buvons donc A ce flacon faisons la guerre. Buvons bien, là buvons donc Ami, trinquons, gaiement chantons. En mangeant d'un gras jambon, À ce flacon faisons la guerre! »
Les compaings affluèrent en masse à ce chant bien connu. Voilà des semaines qu’ils n’avaient plus grand-chose pour se rincer le gosier, et cette ritournelle signalait à coup sûr de la boisson. Le vieux se dressa sur le banc, assura son équilibre et s’adressa à la foule assoiffée :
« Qu’on donne à manger à ces deux braves berthildois, héros de Valdrant, bons buveurs et gais compagnons ! Et qu'on pisse à foison ce soir ! »
Un rugissement d'assentiment lui répondit. Des tréteaux et des planches surgirent de terre, et les compaings s’affairèrent à décharger le chariot pendant qu’on donnait les places d’honneurs aux nouveaux venus. Crac, crac, les barriques étaient percées par ces ivrognes en manque, qui bénissaient ce chargement. On servit le fameux ragoût aux viandes diverses, avec le pain de munition dur comme du marbre qu’on laissait tremper dedans pour ne pas s’y casser les dents. Et la bière coulait à flots puissants, souvent améliorée de quelques giclées de monte-à-l’assaut, la gnôle infâme des routiers. L'assaut imminent, ils firent la fête avec la furie d’hommes dont se pourrait être la dernière. Les catins vinrent bientôt encombrer leurs genoux, et les gamins du camp se pochtronnaient avec le même enthousiasme que les adultes. Une fois les barriques vides, les plus agiles se livraient dessus à des spectacles d’équilibristes qui ravissaient la compagnie. Quand les saltimbanques du soir tombaient dans la boue, les éclats de rire accompagnaient la chute. Et on chanta gaiement :
« L'eau ne fait rien que pourrir le poumon Boute, boute, boute, boute compagnon, Vide-nous ce verre Et nous le remplirons. »
Le lendemain, il ne restait du chargement volé qu’une immense mare d’urine froide et des crânes douloureux.
|
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: Pour quelques barriques de plus [Terminé] | |
| |
| | | | Pour quelques barriques de plus [Terminé] | |
|
Sujets similaires | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |