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| Marche vers la mort | |
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Grayle Gardair
Humain
Nombre de messages : 287 Âge : 33 Date d'inscription : 04/06/2018
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 22 ans Taille : 1m83 Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Marche vers la mort Sam 1 Déc 2018 - 1:06 | |
| 4 eme jour de la 6 eme enneade de favrius
Pour la première fois de sa vie, Grayle était seul.
Au sens le plus littéral du terme.
Il n'y avait plus personne autour de lui. Même lors de ses premiers jours d'exil, ou d'emprisonnement, ou lorsqu'il dormait dans les champs, le fait de savoir qu'il y avait des personnes à quelques dizaines, centaines de kilomètres de lui, le rassurait.
Je ne suis pas seul se répétait-il. Il y avait toujours quelqu'un à qui demander de l'aide.
Mais là...
Il s'arrêta un instant. En haut d'une dune de sable, il avait une vue superbe sur l'horizon et les étoiles.
Personne. Ni devant, ni derrière, ni sur les côtés. Il leva les yeux au ciel, un ciel noir, pur et parsemé de plus d'étoiles qu'il ne pouvait l'imaginer. Pas un seul oiseau.
Pas un seul bruit.
L'absence totale de vie... ou d'humanité. Pour le paysan, hériter d'une lignée travaillant la terre, domptant la nature et exploitant ses fruits, se tenir au milieu d'une si grande contrée, indomptable et intouchable, avait quelque chose de vertigineux.
Il était allé si loin. Plus loin que tous les habitants de son village réuni sur des dizaines de générations. Plus loin que la quasi totalité de l'humanité. Devait-il en être fier, ou dépité ? Auparavant, il aurait regardé avec révérence et admiration quelqu'un lui disant ayant été dans le désert Zurthan. Mais devant le fait accompli...
* Ais-je fais quoi que ce soit de spécial ? *
Il reprit sa route, marchant avec prudence sur le sable froid. Il avait froid. Le monde entier était un glaçon. Un froid lunaire la nuit, une chaleur solaire le jour. Il n'y avait pas de juste milieu. Juste deux enfers différents.
Et pourtant, il avancait, une main sur le manche de sa faux, l'autre reposant tranquillement sur l'urne familiale. C'était pour eux qu'il était là.
Je suis là pour eux.
Il se le répétait chaque heure, chaque minute, dans une mantra d'auto-persuasion. C'était le seul moyen de se pousser à avancer. Chaque heure, ou à chaque fois qu'il estimait qu'une heure était passée, Grayle répétait une prière. Pour Néera, Kyria, Othar, Tyra... et Arcam. Oui, même Arcam. Mieux valait mettre toutes ses chances de son côté. Si Grayle n'avait jamais vénéré Arcam, il craignait de s'attirer son courroux en priant les autres dieux et en l'ignorant.
L'esprit entièrement tourné vers les dieux et sa famille, il avance.
Courageux ou fou, Grayle était encore confiant. Il avait de quoi manger pour 4 jours. Plusieurs litres d'eau. Quinze jours de marche, à un rythme raisonnable. Il savait où il devait aller. Suivre l'est, sans jamais dévier de sa route, guidé par les étoiles et le lever du soleil. Tout droit, encore et encore, jusqu'à ce qu'il distinguerait le Duy d'Elda. Il ouvrit sa boussole. l'aiguille y indiquait le nord, sur sa gauche. Parfait.
Il n'avait pas dévié de sa trajectoire d'un seul mètre.
Sa gorge était sèche.
J'ai soif.
Il s'immobilisa, déboucha une gourde et bu une simple gorgée, humidifiant longuement sa bouche, avant d'avaler l'eau, de refermer la gourde et de la ranger avec la précision d'un automate. Ses lèvres, invariablement fermées, craquelaient.
Voilà un jour que Grayle s'est avancé dans le désert.
Il reprit sa route.
Dernière édition par Grayle Gardair le Sam 5 Jan 2019 - 12:25, édité 1 fois |
| | | Grayle Gardair
Humain
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| Sujet: Re: Marche vers la mort Dim 2 Déc 2018 - 1:42 | |
| Il dort.
Contre toute attente - en particulier la sienne -, il a trouvé un abri. Ou du moins, un point de repère. Un rocher. Une sorte de stalagmite rocheuse, ocre, à peine plus grande que lui, pointant vers le ciel au milieu de nulle part. Une ombre bienvenue, et un point d'attache apprécié pour la toile blanche surplombant le paysan endormi. Protégé du soleil ravageur, roulé en boule, il rêve.
Il se souvient des récoltes.
Le jeune homme pousse la charrue droit devant lui, les lames de fer s'enfoncant dans l'ombre limoneuse du champ. Au milieu de l'écrasante chaleur de l'été, il était entièrement concentré sur l'autre extrémité du champ étendue au loin. Il y avait planté un bâton, qui se tenait fièrement au milieu de la terre encore non cultivée.
C'était sa cible, son marqueur, la voie à suivre pour l'aider à garder un sillon droit et parfait. Le sol - que Grayle avait lui même béni de plusieurs prières adressé à Tyra - ne méritait rien de mieux qu'une belle récolte pour cette saison, après un an de jachère. La terre était fertile et riche au toucher. Grâce à elle, Grayle avait pu planter assez de semences pour espérer une récolte abondante du blé fort, mûr et doré de Donzenac.
Le Labour n'était pas un métier adapté à ceux s'ennuyant aisément. Il demandait patience, précision, et détermination. Depuis que son père était parti à la guerre, après l'épisode du Voile, Grayle était le seul assez âgé et suffisamment fort pour ce genre de travail. Les finances et la survie de sa mère ainsi que ses frères et soeurs en dépendaient.
Les autres familles utilisaient des animaux pour pousser la charrue, mais Grayle n'aimait pas prendre ce risque. Un boeuf pouvait tirer trop fort et tracer un sillon inégal, un cheval pouvait ruer et frapper la charrue du pied.
Grayle préférait faire les choses à l'ancienne. Se fier à son dos épais et ses épaules puissantes.
Ce genre de dur labeur lui permettait de rester honnête. Fidèle à lui-même. Son esprit dériva un peu, alors que chaque pas se faisait plus dur et plus long. Il pensa à son frère, Callagh. Lui, ressemblait à leur mère. Doux, agile, l'esprit vif et malin. Le héros du village lors des derniers jeux de Soule avec leurs voisins. Grayle se mit à sourire. Il était fier de son petit frère.
Une interjection le fit presque sursauter. Les sourcils froncés de Grayle reprirent leur place lorsqu'il vit Callagh arriver, le sourire aux lèvres, gambadant d'un air aérien vers lui. Grayle failli lui dire de faire attention à ne pas marcher sur le champ, avant de se rendre compte qu'il en avait atteint le bout. Son corps quasiment nu en sueur, il essuya son visage humide.
- Salut petit frère, t'es venu m'apporter à manger ?
Callagh le regarda d'un air étonnamment vide et sans émotion, bien loin de ses yeux gris et rieurs de d'habitude. En un instant, le coeur de Grayle devint lourd comme une ancre jetée à l'eau.
- Je suis venu te réveiller. - Hein ?
- Hein ?
Grayle ouvrit ses yeux pleins de larmes. Il renifla et regarda autour de lui d'un air perdu. La toile. Le sable devenu bleu sous la lueur pâle de la lune. Le froid. Le désert. Il frissonna et poussa un gémissement étouffé qui se transforma en une douloureuse plainte lancinante. Prostré contre l'urne familiale qu'il serrait contre lui, il se balancait doucement d'avant en arrière. Puis, évacuant la tristesse, il sécha ses larmes, but dans une de ses gourdes, dévora une ration, et se leva, défaisant sa toile de protection.
Une nouvelle nuit, une nouvelle étape.
Un jour de plus passé avec succès. Il embrassa le désert du regard. Toujours aussi silencieux. La vision du champ labouré se superposa aux dunes de sable, avant de se transformer en un magnifique champ de blé. Il se mit à sourire, caressant du pouce l'urne. Il pouvait voir Callagh lui faire un grand signe du bras. A travers le souffle du vent, un écho de sa voix parvint même à ses oreilles.
C'était une belle époque...
Voilà deux jours que Grayle s'est avancé dans le désert
Il reprit sa route. |
| | | Grayle Gardair
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| Sujet: Re: Marche vers la mort Mer 5 Déc 2018 - 1:04 | |
| Plus que deux jours de ration.
C'était cruel et inutile de se le rappeler, mais ce délai envahissait son esprit.
Dans deux jours, il n'aurait plus rien à manger. Allez, trois, s'il se rationnait encore. S'il n'avait pas encore faim, il sentait que son corps avait remarqué que la régularité des repas s'était amoindrie. Ça, et le décalage complet. Tel un hibou, Grayle dormait toute la journée, à l'abri du soleil sous sa toile de lin blanche, et marchait la nuit, seul sous les étoiles, dans le froid et la solitude.
On lui avait recommandé de ne pas se tuer à force d'économies. "Plus tu saute de repas, plus tu aura faim, et pire ça sera. Même chose pour l'eau. Bois quand tu a soif. Sinon, ta soif sera exponentielle. "
Il n'avait aucune idée de ce qu'exponentielle voulait dire, mais ça n'avait pas l'air bien génial.
Bientôt, il n'aurait ni à manger, ni à boire. Il allait devoir se contenter de ses réserves, et de sa volonté.
Vais-je y arriver ? En suis-je ne serait-ce que capable ? Est ce que je le mérite seulement ?
Heureux hasard, il marcha sur quelque chose de solide.
Un squelette. Étendu face contre terre, dans la direction inverse de Grayle. Mort d'épuisement ?
Cet homme (ou cette femme ?) était probablement mort en voulant fuir le désert.
* Et moi, je m'enfonce dedans. *
Et pourquoi ? Par culpabilité ? Pour prouver quelque chose ? Pour...
Sa main toucha doucement l'urne familiale et tout doute s'enleva.
Il le faisait pour eux.
Il oublia le squelette. En d'autres temps, il serait resté près du squelette, choqué, méditant avec son intellect limité sur la vie et la mort. Mais il n'avait pas le temps de se prélasser à quelques réflexions philosophiques. Et puis... est-ce vraiment important ? Par acquis de conscience, il murmura une prière à Néera pour l'âme de cet homme, probablement mort depuis des éons.
Les yeux aciers de Grayle parcoururent l'horizon, toujours similaire, une suite sans fin de dunes. Ça ne servait plus à rien de douter. Il ne pouvait plus revenir. Comme aux champs. Tout droit ! Toujours tout droit, sans se départir de sa route !
Une de ses lèvres craquela alors qu'il se mit à sourire, encore.
Voilà trois jours que Grayle s'avance dans le désert.
Il reprit sa route. |
| | | Grayle Gardair
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| Sujet: Re: Marche vers la mort Jeu 13 Déc 2018 - 2:52 | |
| Le froid est devenu plus fort.
Grayle continue d’avancer, encore. Ses gestes sont devenus machinaux. Un pas en avant, un autre, un autre, encore et encore. Jambe droite, jambe gauche, jambe droite, jambe gauche. Le sable est traître. Assez dur pour, pas après pas, lui faire mal aux pieds. Assez mou pour être traître et le forcer à se concentrer pour ne pas glisser.
Il glisse souvent.
Il n’a plus à manger. Ni à boire. On ne peut se lancer dans une épopée de 15 jours en transportant de quoi se nourrir et boire pendant tout ce temps. Sauf si l’on veut s’épuiser à cause d’un chargement trop lourd. Sans nourriture et sans eau, Grayle est désormais seul face au désert, avec ses réserves et sa détermination.
Il glisse encore et tombe, roulant le long de la dune, avant de s’immobiliser en bas de cette dernière. Les yeux vers le ciel, il reste immobile un long moment, les bras en croix. Il respire et pousse un grognement.
Il pue. Plus que d’habitude. 5 jours sans le laver. 5 jours à marcher toute la nuit et à dormir à l’ombre d’un soleil sans pitié, suant comme un porc. Même lui, habitué aux fortes odeurs de la campagne, commence à se dégoûter. Et il sait que ce sera de pire en pire. Il se remet à penser au parfum de Cécilie. Elle sentait bon, elle. Il n'aurait pas été contre humer une dernière fois son odeur.
Les yeux perdus dans la voute céleste, il pense aux autres.
Cécilie, Suri, Grimeldha, Kurt, T’sisra et les autres… que deviennent-ils ?
Ont-ils sauvés le monde ou sont-ils tous morts ?
* Est ce qu'ils pensent à moi ? *
Est ce que quelqu'un pensait à lui ?
La sihouette fantomatique de sa soeur jumelle apparue brièvement. Graïnne lui fit un pâle sourire, avant de s'évanouir aussitôt.
* A par toi, bien sûr...*
Il regarda son urne dans laquelle reposait les cendres de sa famille. Cécilie disait que les souffles des morts ne rejoignaient pas les dieux. Cela devait les inclure...
Ils sont là. Il le sait. Ils sont tout prêt. Invisibles, indétectables. Mais il les sent. Il sent leurs joies et leurs peines autour de lui, pesant sur son esprit tout comme son coeur.
Ses pensées vagabondes alors que son corps fatigué récupère un petit peu. Les yeux gris fixent l'astre lunaire. Au fur et à mesure que le temps passe, il peut voir d'autres étoiles apparaître petit à petit. C'était un spectacle magnifique, froid, glacial, mais qui remplissait le coeur du paysan d'émotion.
Sa petite soeur Andréa adorait les étoiles, et avait apprise les constellations par coeur. Elle passait son temps à essayer d'instruire Grayle dans ce domaine, mais le paysan n'avait jamais eu l'intellect ni la vivacité d'esprit de sa cadette.
Elle n'avait jamais renoncé ceci dit.
Elle voulait partir. Le village était trop petit pour elle. Il convenait à Grayle, mais pour Andréa, il n'était qu'une cage. Une limite bien trop contraignante pour son imagination et sa liberté. Elle voulait être exploratrice. Arpenter les forêts, les montagnes et les ruines. En apprendre plus. Toujours émerveillée par les cartes du continent, du haut de ses 13 ans.
- Je l'aime tellement fort ! disait-elle en désignant les plaines en contrebas, mais parlant de ce qui était au delà de l'horizon, au delà de l'imagination de Grayle. Les plaines, les animaux, les plantes... les gens ! L'église ! Même la vielle Naressa !
Comment un si petit corps pouvait renfermer autant d'énergie et d'amour ? Même lui, qui était quelqu'un d'amical, se sentait aussi aimable qu'une porte de prison à côté de sa soeur.
- Et toi aussi je t'aime grand frère ! finissait-elle souvent en le prenant dans ses petits bras et en se lovant contre lui. Signal muet signifiant qu'il devait la porter sur ses épaules. Il n'avait jamais su lui résister.
Grayle trouvait le monde effrayant Elle avait sans cesse essayé de lui montrer sa beauté, espérant que son grand frère casanier le comprenne un jour.
Les étoiles plein les yeux, il le comprenait enfin.
Il se souvint du corps massacré de sa petite soeur. Eviscérée, allongée sur les escaliers, face contre le sol. Essayant de s'échapper, sans succès. Morte vidée de son sang.
Quel gâchis.
Il se releva lentement, regardant autour de lui.
Elle aurait du être ici.
- Tu aurais adoré.
Voilà cinq jours que Grayle s'avance dans le désert.
Il reprit sa route. |
| | | Grayle Gardair
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| Sujet: Re: Marche vers la mort Ven 21 Déc 2018 - 16:38 | |
| La faim le dévore.
Même lorsqu’on est déjà passé par la famine, à en être réduit à chasser le hérisson ou se nourrir de terre, la faim est toujours une sensation aussi atroce. C’est comme un immense trou au fond de votre ventre, qui semble se replier sur lui-même. Encore et encore et encore. On se sent vide, on desespère. Des gargouillements secouent parfois son corps.
Et l’eau… elle se fait de plus en plus rare. Il en est à sa dernière bouteille, devenue tiède et poisseuse à cause de la chaleur et de la poussière. Elle est infecte. Mais il la boit, quand bien même elle lui donne envie de vomir et lui fait mal lorsqu’il se soulage.
Ses besoins sont de plus en plus durs. Et son hygiène pitoyable n’arrange pas.
Le dernier tiers du voyage se fera sur ses réserves. Une marche vers la mort, clairement. Ses chances de survie ? Une sur deux ? Sur dix ? Sur cent ?
Pourtant, le paysan n’a pas surestimé ses capacités, ni sous-estimé le désert. « Tu as fait exprès, n’est-ce pas ? »
Il tourne la tête. Fatigué, Grayle est courbé vers l’avant, s’aidant de plus en plus de sa faux pour avancer. Ses jambes lui font mal, la tête tambourine sans cesse. Devant ses yeux se trouve son père. Toujours aussi grand, aussi massif, statue de chair et de muscles aux proportions improbables, à la barbe drue et au sourire moqueur.
Le fils fixe le vide pendant un long moment avant de l’ignorer et de continuer sa route, inarrêtable perturbé. Son père autrefois tant haï marchait à ses côtés, mais ne laissait pas de traces dans le sable.
« Tu aurais pu prendre plus de provisions. »
*Je sais*
Grayle n’avait pas répondu. Il continuait de marcher. Graïnne était apparue elle aussi, silhouette translucide et fantomatique, s’interposant entre son frère jumeau et son père. Qui de mieux qu’un être inventé pour parler à votre place.
« Pourquoi ? »
Grayle aurait menti, ou répondu à côté. Mais son esprit franc, généreux, naïf, ouvert, était incapable de mentir à lui-même.
[color=#ff9900]* Ce n’est pas grave si je meurs.* [/color] Eclat de rire inaudible venant du paternel. Cruel et méprisant. Il continue de l’ignorer, ses yeux gris fixés droit devant vers l’horizon. Toujours le même depuis une semaine maintenant. Les paroles du père se confondirent avec les prières qu’il répétait mentalement, encore et encore, pour occuper son esprit sur autre chose que la faim.
« Tu veux mourir Grayle ? »
Il hausse les épaules. Lui-même ne sait pas encore. A vrai dire…
*Je m’en fiche. Je le mérite.*
« Et tes beaux discours alors ? A cécilie et la drow ? »
*Je ne voulais pas les inquiéter*
« Tu ne veux inquiéter personne Grayle. Tu ne veux jamais les confronter. C’est à cause de ca que… »
*Que vous êtes tous morts. Je sais.*
Il soupira. Il se sentait… fatigué d’un seul coup. Déprimé. La tête baissée, il comptait les grains de sable.
Tout était de sa faute. Lorsque son père était revenu de la guerre, violent et alcoolique, Grayle n'avait rien fait. Il s'était contenté de le détester. Il s'était remis à battre sa femme, à tous les traiter comme des étrangers, et à s'enfermer dans son monde, le regard hagard, remplaçant sa faux par une bouteille d'alcool.
C'était évident qu'il allait craquer à un moment. Il avait vu et fait des choses qu'aucun homme ne devrait.
Pire, il avait fait la guerre pour que Grayle n'y aille pas. Grayle ne l'avait jamais remercié.
Son père avait besoin d'aide et il n'avait rien fait. Il aurait pu. Il aurait du. Venir vers lui. Lui demander comment ca allait. Essayer de l'aider, faire quelque chose, n'importe quoi... et il n'avait rien fait.
Et maintenant, ils étaient tous morts, car il n'avait jamais essayé d'aider son père à sortir de ses infernaux cauchemars.
Tout était de sa faute. Il ne méritait pas de survivre. Ou... peut-être ?
Néera, envoie moi un signe. S’il te plaît. Que je suis dans la bonne direction. Dans la bonne décision. Env…
Il fronça les sourcils. L’horizon… était sombre, d’un seul coup.
Le vent se leva.
Une tempête. Une tempête de sable approchait. A toute vitesse, droit sur lui, prête à le dévorer, le lacérer et ne laisser que son cadavre brillant au soleil.
Pour la première fois depuis des jours, Grayle se mit à sourire. Un défi, évidemment. Une épreuve des Dieux. Quelle autre explication pouvait-être possible ? Il allait enfin avoir sa rédemption. L'épreuve du feu. Il allait probablement mourir... mais aux yeux du paysan, s'il devait survivre à l'apocalypse hurlante s'approchant de lui, ce serait évidemment qu'il le méritait.
*Allez, amène toi.* |
| | | Grayle Gardair
Humain
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| Sujet: Re: Marche vers la mort Mer 26 Déc 2018 - 19:06 | |
| Les pieds bien enfoncés dans le sol, fermement campé sur ses jambes, il ne se mettait même pas à l'abri. Ca n'aurait eu aucun sens ! Les dieux avait répondu à sa demande et le mettaient à l'épreuve. Mourir face aux éléments était bien mieux qu'expirer de faim et de soif. Et s'il triomphait ? C'était la preuve éclatante qu'il méritait d'aller au bout.
Il avait pardonné à son père. Mais pas à lui-même. Et, dans cette tempête, il y voyait là une réelle opportunité d'absolution.
La tempête le balaya.
Hurlante, vociférante, elle le souleva du sol et l'envoya au loin comme un fêtu de paille. Il s'écrasa sur le dos, avant de finir face contre sable après maintes roulades. Il cracha du sable, avant de recouvrir sa bouche par son écharpe de tissu, vérifiant qu'il n'avait rien perdu.
Sa faux.
Ou est elle ?
Elle était au loin, le narguant, plantée dans le sol, à quelques dizaines de mètres. Il aurait pu rester ici, se rouler en boule, et laisser passer la tempête. Mais non. Grisé, fanatique, Grayle voulait lutter contre les éléments. Il se redressa, courbé vers l'avant, la tête rentré entre ses larges épaules, comme un boeuf tirant une charrue. Le sable épais, projeté à toute vitesse, fouettait son visage, faisant voler ses vêtements dans tous les sens. Il sentait les millions de grains fouetter sa peau, devenant peu à peu rouge et sanguine au fur et à mesure.
Il faisait nuit. Il ne voyait plus rien. Le hurlement constant de la tempête le rendait sourd. Le sable passant à travers ses vêtements fouettaient tout son corps et s'infiltrait dans sa bouche et ses poumons. Balancé dans tous les sens, son corps se tordait. Il avait mal. Dans son esprit, d'incessantes mantras dédiées aux dieux s'enchaînaient sans cesse. Derrière son masque, un sourire maniaque commençait à grandir.
Chaque geste, chaque mouvement le faisait souffrir.
Car il bougeait.
Face à la divine tempête, il ne reculait pas. Il avançait. Contre le vent qui soufflait dans tous les sens, l'homme continuait irrésistiblement sa progression, penché vers l'avant. Une dune de sable, soufflée d'un seul coup, s'effondra sur lui. Il en émergea de l'autre côté, recouvert de sable, sans ralentir sa marche, son regard trouble fixé sur sa faux, au loin, dont la lame brillait encore dans la nuit.
Son corps était une cartographie de la douleur. Le vent le gifflait, fouettant violemment ses muscles. Le moindre pas était une épreuve.
Mais il continuait d'avancer.
10, 20, 50, 100 mètres. Il ne tombait plus, toujours debout, tenant en équilibre sur un seul pied parfois, objet inamovible sur lequel s'écrasait l'instopable tempête. Puis, il arriva enfin à sa faux. |
| | | Grayle Gardair
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| Sujet: Re: Marche vers la mort Sam 29 Déc 2018 - 2:09 | |
| La tempête soufflait depuis des heures. Crachante, vomissant du sable et de l'air glacial sur le fragile humain qui lui faisait fièrement face. Le sable volait dans tous les sens. Des cris épars, ceux d'animaux diurnes réveillés en plein cauchemar et soulevés dans les airs, explosaient avant de s'évanouir dans le vent.
Grayle continuait d'avancer.
Pourquoi aller dans le désert ? Pourquoi affronter la tempête ? Le désir de mort avait toujours été présent chez Grayle. Il s'était évanoui en présent du groupe mené par Cécilie de Missède, avant de le frapper de plein fouet dans la solitude du désert nocturne. Mais bien que Grayle soit incapable de se pardonner son échec, qu'il soit en tant qu'humain, en tant que fils ou frère, braver la tempête envoyée par les Dieux n'avait aucun interêt concret, à par vouloir prouver quelque chose. Il devait simplement survivre.
Mais voilà, Grayle, aussi gentil et doux soit-il, reste un homme. Tout le monde sait que même au sein du plus couard des hommes, une flamme persiste. Flammèche ou brasier, elle brûle sans cesse. La flamme de la fierté et l'arrogance.
Il affrontait la tempête comme un alpiniste va escalader une dangereuse montagne. Car elle se trouve là. Car il s'agit d'un exploit. Car il est dans la nature profonde de l'homme de vouloir triompher et d'atteindre la grandeur contre toute attente. De laisser un héritage de courage et de défi, peu importe qu'il prenne la forme d'un squelette tenant une faux.
Tout plutôt que s'éteindre lentement dans les ténèbres.
Le visage de Grayle saignait, le sang séché et devenant crasseux à cause du vent et du sable. Serrant ses dents solides et sa mâchoire carrée, il avancait envers contre tout. A l'épreuve des Dieux, il répondait par un acte de défi. La proclamation qu'il est possible, même pour un homme de rien comme lui, de se battre et de gagner, peu importe la difficulté du voyage.
Il voulait y croire. Il y croyait.
Après des heures d'une lutte muette et épuisante, le vent se dissipa en même temps que le soleil se levait, illuminant un désert aussi dévasté et intouché des affres de la tempête. Les yeux du jeune homme se plissèrent, peu habitué à revoir le soleil, après une semaine de marche nocturne.
Grayle, méconnaissable, écarta les bras en grand et hurla au ciel. Longtemps.
Etait-ce son second souffle, ou un râle d'agonie ?
Ce cri, c'était l'appel d’un homme à se lever et faire face. A refuser de s'éteindre doucement et silencieusement dans l'obscurité.
Peut-être qu'un jour, quelque part, dans cette même obscurité, la lumière de Grayle s'éteindra. Peut-être par quelque entité maléfique. Peut-être par simple malchance. Ou, très probablement, par quelque chose qui ne comprendra tout simplement pas la beauté de sa petite existence fragile de paysan.
Grayle ne s'en formalisait pas. Comme il l'avait déjà dit, tout le monde finit par mourir.
Mais, victorieux de la tempête, il était désormais bien décidé à profiter du reste de son existence à briller et à vivre aussi intensément que possible.
Son cri prit fin lorsqu'il rouvrit ses yeux.
Devant lui, la silhouette colossale du Puy D'Elda se détachait à l'horizon, déformée par les brumes de chaleur.
Il poussa un rire fou, et s'effondra au sol.
Le sourire aux lèvres, et la barbe au menton.
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| | | Grayle Gardair
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| Sujet: Re: Marche vers la mort Sam 29 Déc 2018 - 2:48 | |
| En franchissant le rideau de la tempête, Grayle s'était retrouvé en terrain presque familier. Plus rocailleux, plus solide, loin de cette mer de sable. Plus peuplé aussi.
Plusieurs oiseaux volaient en cercle autour du cadavre du paysan. Une de ses mains tenait faiblement sa faux, alors que son visage était contre le sol.
Un des condors, un peu plus courageux que les autres, atterrit près du corps du paysan. Il sautilla un peu maladroitement. Malgré les privations, le paysan était encore un beau morceau. Il y avait de quoi se gaver pour au moins plusieurs jours avant que la pourriture ne frappe.
Il pencha la tête sur le côté, regardant toujours l'humain, qui ne bougeait pas. Il s'approcha encore, touchant la main du bec.
Cette dernière s'ouvrit d'un seul coup et, avant que l'oiseau ne put s'envoler et s'échapper, elle se referma sur son coup. L'humain qui semblait mort il y a quelques instants se releva à la vitesse de l'éclair et se jeta sur l'oiseau, qui se débattait dans un ouragan de plumes. Grayle s'était saisi de son cou et leva les bras, frappant le sol avec le condor, le fracassant contre un rocher, le frappa de ses poings, l'écrasa sous ses pieds, puis brisa son cou.
Poussant des grognements sauvages, il mordit à même la chair de l'animal encore chaud, et en dévora la chair, se fichant bien des plumes venant gâcher son repas. Il se délecta du sang de l'animal, continuant de dévorer l'oiseau cru. Puis, à la fois satisfait et dégoûté, il jeta au sol le cadavre à moitié dévoré de l'oiseau, se saisit de sa faux, et reprit son chemin, ignorant l'arrivée des autres rapaces venant dévorer le cadavre de leurs congénères.
Il fouilla dans ses affaires. Il lui restait encore de l'eau. Il crevait de soif. Il se saisit de la grande gourde et, l'oeil sur le Puy, en vida la moitié, buvant de longues gorgées au gout de sang. Il s'essuya le menton d'un air satisfait, puis repris sa marche.
Le sol solide, concret, la vision directe de son but le remotivaient, et sa marche était rapide, presque surnaturelle compte tenu de son état déplorable. Il était en sous nutrition, les traits creux, le visage et le corps perclus de coups de soleil, le visage abîmé par la tempête, du sang coulant de son menton. Mais ses yeux brûlaient d'une détermination froide.
Il allait atteindre cette montagne.
Et personne n'allait l'arrêter !
Mais, l'esprit fatigué et le corps affaibli, en proie aux hallucinations sensorielles de sa famille décédée, et se répétant sans cesse des prières aux Dieux pour divertir son esprit de la faim et de la soif, Grayle ne se doutait pas que l'approche d'un voyageur solitaire venant de l'Ouest n'était pas passée inapercue... |
| | | L'Renor Crysto
Drow
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| Sujet: Re: Marche vers la mort Sam 29 Déc 2018 - 19:12 | |
| « Il a quoi ?! ». Les cheveux de la Rose Noire volèrent tandis qu’elle arrêta net son affaire pour faire face à son interlocuteur. Le pauvre petit aurait volontiers rebroussé chemin mais déjà le corps félin s’était approché de son dos, frôlant sa silhouette stoïque. Les mirettes andrinoples de l’eldéenne s’étaient figés sur sa nuque largement découverte. Et alors que le silence se faisait dans la pièce, elle passa une langue envieuse ses ses babines déjà toutes prêtes. Il n’était pas bon d’énerver le Phor’dur, et par-dessus tout elle exécrait l’incompétence de ses semblables. Par ailleurs, ses directives avaient été claires faisant bouillir lentement mais sûrement le sang dans son petit corps chétif. « Nos hommes sont tombés dessus non loin des premiers quartiers Doeb ». « Et que faisait les Kyorls chargés de la défense ? » « Ils patrouillaient, Jallil ». « Et pensez-vous, mal’ai qu’il est du ressort du C’nros de s’occuper des intrus ? Par le Feu Sacré, ne vous a-t-on rien appris durant vos classes ? ». Elle murmura à son oreille, comme s’il avait s’agit d’un secret d’état. Mais quiconque connaissait Aertsab savait que cela n’avait rien de bon ; la mage était profondément exaspérée. Elle marcha un instant, tentant vainement de calmer ses nerfs alors que naissait sur sa bouille immaculée un sourire torve. Pauvre pauvre pigeon qui se trouvât là, victime de la colère de la petite. Elle eût – un instant seulement – un peu de peine pour l’homme qui se tenait là. Il regardait au loin, de peur de croiser le regard terrible de l’Exécutrice. Et sans crier gare, la main se leva pour s’exploser dans sa trogne. La Rose Noire n’était guère forte, mais seule l’humiliation du geste comptait alors. Apaisée, tandis que l’autre ne broncha pas, elle attrapa sa capeline carmine et l’attacha à ses épaules. Dans son dos luisaient à présent les armes de sa congrégation, symbole de son rang. « Allez prévenir le Ditrown Da’re que je m’occupe personnellement de cette… situation ». Il la salua brièvement alors qu’elle quittait déjà la pièce d’un pas pressé.
Il lui fallut bien du temps – une éternité sans doute – pour rejoindre une ferme à esclave débarrassée de ses occupants habituels. Devant la porte se tenait deux mages, et trois Sargtlins venus en renfort en apprenant la nouvelle. Il était rare qu’une personne brise les lignes de l’Elda, plus rare encore qu’il s’agisse d’un humain. Méfiante, la Rose Noire avait l’intention de tirer au clair cette étrange histoire. Et la colère qui ne l’avait encore quitté lui permit de franchir le seuil de la porte sans qu’aucun n’ose s’interposer. Et plutôt, tout fondit comme neige au soleil lorsqu’apparut enfin la forme émaciée. La Pauvre Chose était malingre et sale. Elle puait la perdition et la peur, prostrée dans un coin les yeux vides. L’eldéenne ne put retenir un rire amer, alors que ses prunelles andrinoples ne quittaient la forme dégingandée. Son rire fluet s’éleva dans la cabane de bois, alors qu’elle approchait prudemment. Il avait été désarmé, et sans sa petite faux émoussée et rouillée, il n’était rien d’autre qu’une poupée d’os dont la chair semblait fondue. Quelle pitié que ce petit humain pouvait alors lui inspirer.
Elle s’approcha encore un peu, avant de s’accroupir devant lui. Elle l’observa un instant dans le silence relatif du cabanon. Il était grand pour un homme, peut-être aussi grand qu’elle. Ses yeux gris étaient inexpressifs et le sang séché sur le menton lui donnait des allures de cadavre. A dire vrai, il semblait bien jeune pour entreprendre un voyage à travers les terres désolées qui entouraient le Puy. Et c’était presque avec certitude qu’elle le soupçonna de n’avoir pu y parvenir seul. Il lui fallait connaître son histoire, et préparer au plus vite les défenses. Aussi, le bout de ses doigts graciles se déposèrent sur sa joue, puis se fourrèrent dans sa tignasse sale avant de s’en emparer sans douceur et de le traîner sur le sol sans ménagement, le jetant au centre de la pièce. « Dos ph'ves s'gos ulu chu ghil, rivvil. Qui toi es ? » Tu es bien courageux de t’aventurer ici, humain Voilà des années qu’elle n’avait pas pratiqué la langue commune, qu’elle exécrait par-dessus tout. Son accent prononcé venait appuyer son propos, invitant le petit à se montrer docile. Le surplombant de sa taille, elle attendait.
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| | | Grayle Gardair
Humain
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| Sujet: Re: Marche vers la mort Dim 30 Déc 2018 - 12:55 | |
| Combien de temps avait-il avancé seul après cette tempête ? Une heure, deux jours, une semaine ? La faim et la soif s'étaient évanouis, devenant une douleur et un désir habituel et commun, et non plus distinct. C'est par pur instinct de survie qu'il continuait d'avancer, mû vers l'avant par une volonté de fer et un corps plus solide que nombre d'habitants de ce monde.
Lorsque la patrouille de Drow lui était tombé dessus, il s'était défendu avec acharnement. Le combat dura une poignée de secondes. Ils n'eurent même pas la gentillesse de l'assomer correctement, et le trainèrent sur le sol durant un bon bout de temps.
Epuisé, il se réveilla dans une sale vide et sombre, au sol rocailleux et sableux. Il se réfugia dans un coin.
Ils l'avait dépossédé de ses affaires. Il n'avait plus sa faux. Son urne... les salauds ! Ils avaient pris son urne ! Et il était tellement crevé qu'il n'arrivait même pas à être en colère !
Lorsque la porte s'ouvrit, il resta muet, se contentant de regarder fixement la nouvelle venue. C'était une drow à n'en pas douter, au longs cheveux blancs. Elle était... plutot belle ? Difficile de le voir dans l'obscurité. Mais il ne s'arrêta pas à ca. Contrairement à T'sisra, il pouvait sentir en elle bien plus de haine, de méchanceté que chez la Demi-Drow. Il avait l'impression qu'une louve était venue dans la pièce, et elle le regardait comme un aigle regarde un lapereau.
Ses doigts caressèrent ses joues sales.
*Ils sont do...*
Elle se saisit de ses cheveux et le traina sur le sol, avant de le jeter au milieu de la pièce.
*Aie*
Le jeune homme poussa un ronflement, un soupir presque blasé, restant étalé contre le sol. Il resta muet à sa question. Lorsqu'il sentit qu'elle était en train de perdre patience, il agita sa main faisant un "hm-hm". Il cracha, inspira.
Il avait du mal à parler. Ses lèvres étaient tellement sèches qu'elles étaient pleines de crevasses et saignaient.
- G'rftte. Merci
Il s'était exprimé en drow. La diction était lente, signe de réflexion, l'humain pesant chacun de ses mots, mais son accent était surprenamment bon, signe d'un don pour les langues inexploité. Il se félicita d'avoir insisté auprès de T'sisra pour apprendre quelques mots.
- Qualla, xuat elgg uns'aa. Ne me tuez pas
Cette fois, la diction était parfaite. Il avait évidemment répété cette phrase de nombreuses fois
- Ussta kaas zhah Grayle. Je m'appelle Grayle
Il n'aimait pas cette langue. Elle n'allait pas avec sa voix, habituellement douce et langoureuse. Il espérait que la drow ne prendrait pas mal le fait qu'il s'exprime dans sa langue.
Doucement, le visage toujours face contre terre, il écrivit son nom dans la terre, tracant lentement les lettres le composant.
Il se sentait... fatigué. Distant de tout. Petit à petit, son esprit s'éloignait de la réalité, pour s'en protéger...
Dernière édition par Grayle Gardair le Lun 31 Déc 2018 - 19:25, édité 1 fois |
| | | L'Renor Crysto
Drow
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| Sujet: Re: Marche vers la mort Lun 31 Déc 2018 - 15:50 | |
| Elle regarda d’un air surpris la petite créature. La pauvre chose était à peine assez épaisse pour vivre, et pourtant, lorsque sa voix perça l’air, l’eldéenne frissonna de déplaisir. Car nul ne pouvait profaner la langue sacrée, sinon un être douteux. Sous ses airs de freluquet, le prisonnier pouvait cacher bien des secrets dont elle préférait se prémunir. Alors, sans d’autres considérations, elle l’attrapa à la gorge et enserra lentement sa trachée. Sous ses doigts elle sentait le sang passer difficilement, s’accumulant doucement pour son plus grand plaisir. Là, dehors, on l’avait privé d’un drôle d’objet dont la composition avait attisé sa curiosité. Car voilà bien ce qu’elle éprouva également : une morbide intrigue. Comment un si frêle jeune homme était parvenu jusqu’ici, déjouant les affres du désert, et les surveillances de sa mère patrie ?
Plutôt, elle se saisit de sa main libre du la poupée de chiffon. La petite icone était sale et puante et pourtant, à son contact, la magicienne s’adoucit un peu. Rassurée par cette présence inanimée, ses yeux rouges se mirent à luire de nouveau. Elle voulait des réponses à ses interrogations sur ce brave petit, et elle voulait par-dessus tout s’amuser un peu. Cela faisait déjà plusieurs mois qu’elle n’avait eu aucun jouet à disposition, sinon quelques dissidents rapidement mis au pas – ou exécutés lorsque le Ditrown Da’re l’eut jugé nécessaire. Alors elle lui laissa juste assez d’air pour respirer, gardant somme toute la dominance de la situation. Son ventre la chatouilla par l’étrange mélange de sentiments : tantôt dégoutée, tantôt excitée, elle se trouva là dans un instant de plénitude.
Posant un jugement grave sur le petit bonhomme, elle esquissa un rictus dépréciateur. « Qui toi apprendre langue Elda ? Si toi pas vouloir mourir, toi pas mentir ». Grognant presque, elle comprima sa gorge maigrelette dans sa paume, juste assez pour lui faire comprendre l’urgence d’une réponse claire et sans détour. « Toi être impur pour parler Elda… ».
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| | | Grayle Gardair
Humain
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| Sujet: Re: Marche vers la mort Mar 1 Jan 2019 - 16:17 | |
| Malgré la situation dramatique dans laquelle se trouvait le paysan, il ne semblait pas paniqué. Comme absent, il fixait la drow d'un air calme, presque paisible. Ses yeux gris acier vrillaient ceux de la drow, comme s'ils contemplaient le mur derrière elle. Sa respiration était calme, et, à en juger par le sang qui coulait entre ses veines, ses pulsations n'étaient guère élevés. Signe d'un sang-froid olympien, ou de l'absence d'une prise de conscience ?
Le fait est que menacer de mort quelqu'un près à la prendre à bras le corps et ressortant victorieux d'une confrontation avec une tempête était condamné à ne guère avoir d'effet. Mais, quoi qu'il en soit, Grayle semblait comprendre la situation. Mieux vallait éviter de vexer la dame, dont il pouvait sentir la nervosité dans sa poigne.
Que répondre ? Il pouvait mentir, mais cette drow était peut-être une magicienne. Elle pourrait fouiller dans ses souvenirs ? Ou l'hypnotiser ? Mais il ne voulait pas attirer d'ennui à T'sisra. Que faire ? Tout révéler ? Ou mentir juste un peu, au risque d'en essuyer les conséquences.
Il toussa. Le manque d'air, la fatigue, le sable en lui. Du sang s'échappa de ses narines, coulant sur ses lèvres et son menton. Au bout de sa vie, le paysan irradiait encore d'une vitalité pourtant surprenante, le corps brûlant et les yeux vifs. Il la fixa dans les yeux.
- Une drow. T'sisra.
Il ne dit pas le nom de famille. Il l'ignorait. Il espérait que ce prénom était assez commun pour qu'elle ne soit pas identifiée, mais s'il doutait qu'elle soit SI importante que l'inconnue le menacant de mort connaisse la demi-drow.
Il décida aussi de prendre les devants, afin d’accélérer la conversation. il n'aimait pas cette situation. Qu'on le laisse tranquille, qu'on le tue, qu'on lui apporte à boire et à manger, n'importe quoi, mais cette situation était mauvaise pour lui.
- Je venais ici. Alors j'ai appris un peu de drow. Pour parler avec vous. Mais... kof ! Pas doué encore.
Dernière édition par Grayle Gardair le Mar 8 Jan 2019 - 8:13, édité 1 fois |
| | | L'Renor Crysto
Drow
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| Sujet: Re: Marche vers la mort Lun 7 Jan 2019 - 20:51 | |
| Le rictus de dégoût s’accentua encore un peu, fendant son visage enfantin d’une moue immonde. L’humain l’exécrait autant qu’il la fascinait alors, non seulement pour sa résistance mais aussi pour une verve qu’elle trouvait bien trop prononcée. Si elle n’avait à lui faire avouer la raison de sa venue, elle n’aurait guère eu de remords à lui couper la langue à vif. Il pourrait bien jacasser après ça ! Imaginant son muscle se déchirer soigneusement et le sang abonder dans sa bouche, la Rose Noire se calma un brin ; il lui faudrait sûrement s’armer de patience pour ne point en finir avec ce moucheron. Car c’était bien là ce qu’il était : jouet de chair entre les mains d’une gamine impatiente.
Le revers de sa main vint à la rencontre du doux visage dont les traits ne cachaient plus la fatigue. Le corps désarticulé lui-même laissait à l’eldéenne une vision piteuse de son prisonnier. Le liquide rougeâtre coula un peu plus abondamment de ses lippes abimées. Les yeux avides roulèrent sur la course sans faiblir, alors que la touche carmine s’écrasait sur le sol froid. La respiration soudainement plus courte, la mage se saisit de la tête de son pantin et passa une langue habile et désireuse là où s’égrainaient encore les gouttes de vie. Qu’il pua la mort lui importait peu, alors que son rictus se mua peu à peu en un franc sourire satisfait.
Quelle étrange sensation que de sentir la chaleur d’un autre emplir sa bouche, alors que les yeux de ce dernier s’étaient écarquillés. Qu’y voyait-elle ? Peut-être un subtil mélange entre la peur et la résignation ; car il était avisé d’être résigné. La Puysarde n’avait guère l’intention de le laisser partir. Plutôt, elle le relâcha à regret, accroupit à quelques pouces à peine de sa face amochée. « Toi voulu mourir pour viendre ici ? ». Elle s'arrêta une seconde à peine, et écrasa d'un doigt délicat une larme énième larme andrinople. « Toi a fait erreur car ici rien avoir pour les petits hommes fragiles...»
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| | | Grayle Gardair
Humain
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| Sujet: Re: Marche vers la mort Mar 8 Jan 2019 - 18:10 | |
| Est-ce qu’elle l’avait… léché ?
Grayle n’avait jamais embrassé qui que ce soit. Le contact de la langue humide contre ses lèvres était agréable, et, pendant un bref instant, il voulu continuer de profiter de ce contact, avant d’avoir un frisson de dégoût. Elle ne le léchait pas lui. Il n’était pas l’objet de son désir. Son sang l’était. Elle avait beau être contre lui comme une chatte en chaleur, c’était une lionne prête à lui arracher la tête.
Elle lui demanda ce qu’il était venu faire ici. Il se redressa sur ses épaules, et la fixa de ses pupilles métalliques, avant de se détourner de sa vision et de se relever avec peine. Lui tournant le dos, il exposa involontairement la cicatrice qui barrait l’arrière de sa tête, de son oreille jusqu’au sommet de son crâne. Sillon encore violet dans ses cheveux, héritage du coup de faucille du pater qui l’avait presque scalpé.
Ses jambes tremblèrent un bref instant, avant de redevenir ferme. Debout, il était évident qu’il dépassait la drow de plus d’une demi-tête. Même malgré la traversée du désert et les privations, sa stature sautait aux yeux. Comme l'on peut deviner la splendeur passée d'une forteresse en arpentant ses ruines, on pouvait observer la force originelle de Grayle, son large cou, son dos puissamment charpenté, ses bras encore épais, et les troncs de chair lui servant de jambes. Même ses mains, dont la gauche qui avait perdu l'auriculaire, étaient dures, des mains d'hommes appartenant à un visage encore enfantin.
C’était, comme disaient certaines femmes du village « un beau morceau ». Même s’il était actuellement dans un état assez pitoyable, la flamme de la fierté continuait de l’animer.
-J’ai tué mon père il y a 5 mois. Toute ma famille est morte. J’ai été éxilé au Puy. J’ai traversé le désert et affronté seul la tempête.
Il avait du mal à parler. Si elle voulait l’histoire complète, elle l’aurait une autre fois. Il se mit à sourire. Même une porte de prison pouvait sentir la chaleur et la gentillesse de ce dernier, la joie de l’abandon et de savoir que rien ne comptait vraiment.
-Je ne suis pas fragile.
Il avait trimé dur toute sa vie, faisant le travail des hommes et des bêtes. S’il n’y avait qu’une chose dont il était sûr, c’était ceci.
Il soupira. Il savait ce qui l'attendait chez les drows. La mort.
-Je n’ai que 17 ans. J’ai encore toute ma vie devant moi. Est-ce que vous en êtes la conclusion ?
-… madame ? Mademoiselle ?
La mort... ou l'esclavage.
-Maîtresse ? |
| | | L'Renor Crysto
Drow
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| Sujet: Re: Marche vers la mort Ven 11 Jan 2019 - 22:03 | |
| Debout sur ses guibolles tremblantes, d’un corps trop meurtri par la fatigue et les coups, il tenta vainement de reprendre de l’assurance. La silhouette dégingandée lui arracha un bref rire. S’il comptait s’enfuir, elle le regarderait faire ; après tout il n’irait guère loin, la Rose Noire s’en assurerait. Toutefois, elle prit le temps de le détailler, comme l’on détaille du bétail. Il était clair par ses cuissots forts, son dos encore taillé et ses mains calleuses que le garçon était un travailleur. Poussant son détail, elle remarqua le manque d’un doigt. Elle aurait – à l’avenir – d’obtenir toutes les réponses qu’elle attendait.
Puis finalement, après avoir écarquiller les yeux sous les dernières paroles du jeunot, la tortionnaire éclata d’un rire plus grave encore. Une lubricité dans le regard, elle laissa un instant le silence se faire. Doucement la Maîtresse-Araignée caressa sa poupée de chiffon accrochée à sa ceinture. Il n’existait à cet instant plus d’autre chose que le petit homme et, bientôt, elle frissonna. D’un geste sec – et à bonne distance -, elle trancha la chair du jarret. Les muscles se séparèrent dans un canyon parfait, laissant un flot maigrelet tâcher son bas.
Tombant à genoux pas la force des choses, la Tisseuse valsa d’un geste souple jusqu’à lui. La mage attrapa une fois encore sa tignasse pour pointer son visage tuméfié tant par la violence que la douleur et la fatigue, lui laissa quelques secondes de répits. De si près, elle comprit que pour ce jour elle n’en tirerait guère plus ; et puis, qu’importait d’attendre un jour ou deux ? Le jeu n’en serait que meilleur. « Tu pas mourir. Pas encore ». Le rictus vicieux laissa apparaître ses quenottes aiguisées par l’odeur du sang. « Tu être moins que chien ici et je pas confiance en chien ». Elle s’approcha assez pour que leurs souffles se mêlent, plantant son regard andrinople dans ses mirettes fatiguées. « C’nros voir bien si chien mérite vie ».
A ces mots elle s’éloigna en relâchant la pression, laissant l’humain s’effondrer au sol alors qu’elle appela les eldéens qui attendaient patiemment dehors. Ils n’eurent même pas un regard pour le pauvre petit. « Plynn ukta tarthe. Usstan orn plynn kyon d'ukta gajak » Emmenez-le. Je m’occuperai de lui plus tard.
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