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| Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] | |
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L'Renor Crysto
Drow
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| Sujet: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Dim 12 Mai 2019 - 22:43 | |
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La gorge nouée, son souffle était court et ses draps humides. Le regard perdu dans la pénombre de sa chambre, seul perçait dans le silence le bruit de sa respiration saccadée. Immobile, assise et frissonnante, elle tentait de reprendre ses esprits. Au dehors tout semblait calme et pourtant une étrange inquiétude venait nouer ses entrailles. Elle avait honte, si honte. Lentement, ses mains vinrent enfouir son visage déformé par la culpabilité. Autour d’elle tout semblait parfaitement en ordre, comme elle l’avait toujours connu. Et même si cela avait quelque chose de réconfortant, elle ne parvenait à détacher ses pensées du terrible rêve qui l’avait tiré de son sommeil. Et si tout cela était vrai ?. Les minutes s’égrenèrent sans qu’elle ne parvienne à apaiser son cœur. C’était trop, bien trop pour le supporter. L’air se froissa lorsqu’elle quitta sa couche, trouvant sans mal ses affaires dans les ténèbres. Son esprit fusait si vite, oui si vite qu’elle ne parvenait pas à réfléchir tout à fait. Tout se bousculait, tout vacillait. Ce qui un jour lui avait paru emplit de certitudes n’était plus. Avançant parmi les décombres de sa propre et misérable vie, la Rose Noire se dirigeait vers le seul endroit qui aurait les réponses qu’elle cherchait en vain.
Et lorsqu’elle s’y glissa de longues minutes plus tard, le même calme régnait en maître. Quelques champignons éclairaient faiblement les statues divines, alors qu’une prenante odeur mêlait sang et encens. Il y avait dans cette espace quelque chose de différent. Ce n’était pas la quiétude qu’apportait les choses simples de son quotidien. Ce n’était pas non plus une tension terrifiante. Il s’agissait en réalité d’une atmosphère toute particulière qui mêlait à la perfection ces sentiments d’habitude et de nouveauté, d’angoisse et de réconfort. Comme si chaque pas qui résonnait dans l’édifice faisait vibrer le fil tissé d’une araignée, là tapie dans l’ombre et prête à surgir. Cela avait quelque chose d’excitant même ; pénétrer dans le lieu désert au beau milieu de la nuit donnait à l’endroit une notion presque d’interdit. Et les statues, figées à jamais, jetaient un œil furibond à celle qui osait défier leur repos de pierre. Et si la Ditrown Da’re avançait avec prudence, de peur de déranger, elle continua sa route jusqu’à trouver celle qu’elle cherchait en venant ici.
La Maîtresse des lieux portait sa bure blanche d’ivoire dont les détails dépassaient l’entendement des eldéens. Pourtant, sous l’épais habit l’on devinait le corps de ce qui avait été un jour une femme. De son visage on ne distinguait qu’une gueule ouverte, les doigts crispés sur une peau de marbre. Là, face à la Mère de la Souffrance, Aertsab s’agenouilla, déposant les deux dagues qu’elle avait pris le soin d’emporter avec elle. Là, seule face à la déesse, elle ferma les yeux. Ses suppliques silencieuses la firent grimacer. Et à mesure qu’elles se formulaient dans son esprit, elles lui parvenaient comme des cris, des complaintes hurlantes que la barrière de ses lèvres ne put tenir. Dans le silence ecclésiaste, la voix fluette tonna d’une colère tourmentée : « Pourquoi Mère ?! POURQUOI M’INFLIGER CELA ? NE VOUS AI-JE PAS ASSEZ FIDELEMENT SERVIE ?! ». Ses mirettes se plantèrent sur le visage stoïque de l’effigie. Elle l’aimait autant qu’elle la haïssait.
Dernière édition par L'Renor Crysto le Lun 10 Juin 2019 - 22:59, édité 1 fois |
| | | Naukhel
Ancien
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| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Dim 12 Mai 2019 - 23:35 | |
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Il est des oiseaux nocturnes qui veillent jusqu'à des heures indues. Ce prêtre-ci est de ceux-la : sa robe sanglante glisse sur le sol du temple de la Dame des tourments, ses pieds sont chaussés du sang des tourmentés... Son oeuvre n'a pas d'heure, chacun de ses souffles, de ses gestes, sont à son service. Du moins, telle est sa pensée présente. Un temps pour adorer, un temps pour remettre en question, un temps pour s'égarer... Mais pour l'heure, il était tout à la Dame... Et à l'ouïe, il lui semblait ne pas être le seul. Dans un murmure de tissu et de pas nu sur la pierre froide, la grande silhouette rouge, à la ceinture cloutée, avance jusqu'au lieu d'où vint le cri. Ah, les cris ! Si familier qu'il lui était possible de savoir où en situer l'origine dans Sa Maison de Douleur. Ses pas le rapprochent, mais déjà, il imagine : la voix avait la nacre d'une femme, le timbre soyeux celui d'une délicate... Et son colère, annonciatrice d'un abysse de perdition, où elle semblait prête à se jeter. Car qui viendrait hurler au visage de la mère, si ce n'est une désespérée ? Qu'as-tu fait, douce enfant ? songeait-il avec un tendre sourire. La Dame veillait sur ses enfants en leur apprenant à ne pas redouter la douleur, en leur en faisant connaître a moindre couleur... Ce goût, il l'avait, cette douceur aussi. Ainsi, c'est avec une exquise attention qu'il la découvrit, agenouillée face à son image. "Voilà une enfant qui ne dort pas... susurre-t-il en s'approchant avec manière, s'annonçant sans se précipiter. ... Une enfant qui, sans même avoir sentit sa caresse, crie déjà... Est-elle impatiente ?" s'interroge-t-il seul.Qui est-elle ? Il ne le sait, l'aura croisé sans doute, mais les enfants de la Dame sont si nombreux... Naturellement, il la découvre, sans redouter. Qui, servant un Dieu et oeuvrant en sa Maison, irait redouter celle qui est à genou devant la figure divine ? Il est à sa place, debout, elle est à sa place, ses jambes rivées au sol froid. Un faciès si délicat, que déforme son émoi... Face à la figure solennelle, dont l'ombre d'un sourire est encadré par des mèches de sang coagulé. "Sans doute pas... Il y a une raison, n'est-ce pas ? Pour que vous l'appeliez ainsi... Il faut croire qu'Elle souhaitait que je sois là pour entendre. Que puis-je ?" souffle-t-il en s'approchant, accueillant, cueillant dans ses mains fines le menton fin.Il ne craint rien ce prêtre, il est en Sa Maison, il La sert... Et accueille tout rébellion pour ce qu'elle est : un appel au rappel de ses enseignements, qu'il est toujours heureux de dispenser. Les doigts tiennent doucement, les ongles-griffes piquent s'en percer, si ce n'est l'un qui ne touche pas, car il est cassé. Ce servant de Kiel est, pour l'heure, fort présentable. Pourtant, dans son sourire, dans son ton, il y a la promesse que ce n'est qu'une façade, qu'un plaisir... Il y a plus, qui attend son heure, telle la figure de l'Hurlante qui se devine seulement en voyant les contours de son cri. "Pourquoi cet appel, enfant de la Souffrance ?" dit-il bas, avec la douceur d'un amant, et la familiarité d'un ami taquin.
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| | | L'Renor Crysto
Drow
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| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Lun 13 Mai 2019 - 0:07 | |
| Elle n’avait qu’à peine entendu les pas étouffés. Le glissement de la peau et du tissu sur la dalle froide avait annoncé en douceur l’arrivée impromptu de l’Inconnu, qu’elle ne prit même pas la peine de regarder avant que, de sa main chaude, il ne lui relève la tête. Perdue, seule avec ses questions voraces qui lui labouraient le crâne. Seule ? Non, plus maintenant. L’avait-Elle mené à la Rose dont les épines étaient tombées ? La voix mielleuse, enchanteresse, s’immiscer comme le venin dans des veines trop ouvertes au secours de quiconque viendrait lui tendre l’oreille. Elle n’était qu’une enfant dont la Foi vacillait, dont elle refusait le chemin annoncé. Elle qui toute sa vie avait souffert, offert chaque goutte de son sang, chaque corps sans vie, chaque cri de douleur à la Maîtresse se mettait à douter d’Elle. Presque égoïstement, oubliant un temps sa condition, enviant la Toute-puissance ; était-ce là le prix de sa propre douleur ?
Et là, les doigts griffés et le corps délicat. Tout lui insufflait à s’abandonner aux bras de Ceux qui Savent, entre l’avis et l’envie de cet intriguant en robe écarlate. Il dégageait une odeur de sang, bien plus forte que celle qui emplissait la pièce. Et, comme une vieille étreinte, cela lui réchauffa un peu le cœur, comme ces choses qui nous rappellent délicieusement un temps meilleur. Alors, peut-être à tort, elle se détendit. Ses muscles se relâchèrent et ses doigts orphelins ne cherchèrent pas même le contact du tissu qui pendait à sa taille. Plutôt, elle allait là, agenouillée face à l’homme, les bras ballant et l’espoir muet qu’il lui soit utile. Qu’il lui montre une voie meilleure, qui la ramène sur la route de certitude qui avait pavé sa vie jusqu’à présent.
« J’ai… Je… », pourtant, elle hésitait. Sa voix fluette n’était plus qu’un souffle quand elle avait pu être tempête quelques instants plus tôt. Et la culpabilité l’envahissait à nouveau, maintenant que la colère s’était tût. Maintenant qu’il l’écoutait et qu’elle devait avouer ses pêchés. Accepte ton Destin, Aertsab, laisse-toi aller à moi . Elle frissonna. « Je me suis égarée Ilharn. Je… ».
Elle déglutit, fuyant le regard perçant. Il lisait en elle. Et cela faisait des siècles qu’elle n’avait plus été aussi vulnérable. Aussi meurtrie et tiraillée. Car voilà où l’avait mené ses fautes ; et la Mère s’en rappelait à elle, lui dévoilant Sa grandeur et Sa puissance. L’Renor se sentait bien incapable à présent, fautive et pourtant si incrédule. Elle l’avait mérité pourtant. Elle aurait dû le savoir qu’un jour elle en payerait le prix. « Elle s’est montrée à moi cette nuit et je… ».
Une lueur de terreur dansa derrière les prunelles de l’eldéenne. Une lueur qui jamais n’aurait dû arriver. « J’y ai vu le chemin qu’Elle m’avait réservé ». Point plus bavarde, trop honteuse, elle se tût.
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| | | Naukhel
Ancien
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| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Lun 13 Mai 2019 - 18:17 | |
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Avec patience, le prêtre prettait l'oreille, ses mires écarlates contemplant le faciès torturé sans afficher de jugement, seulement le calme attentif d'un servant des dieux, écoutant, recueillant... Apaisant. Etait-ce cela que cette enfant était venue chercher ? L'apaisement dans la douleur... Ou le pardon ? La repentance ? L'être drappé de rouge attendait qu'elle se livre. Il ne reçut que des balbutiements indistincts, de l'hésitation et... De la peur. Qu'as-tu fait, douce enfant, pour la craindre ainsi ? L'enseignement de Kiel était douleur, douleur pour ne plus craindre celle-ci... Et voilà que l'une de ses enfants redoutait l'une de ses visions. Pourquoi redouter plutôt qu'accueillir ? Quelle vision ? "Tut tut, dalhar*... Pour comprendre, il me faut entendre... Et ce ne sont pas tes silences qui te libèreront." susurre-t-il, se penchant légèrement vers la drow en souffrance, la surplombant de son faciès tranquille, nullement perturbé par sa détresse.Qu'elle tente de fuir son regard comme sa main, et les ongles avaient délicatement forcé la peau tendre derrière son menton. En bonne enfant de Kiel, elle devait faire face... La fuite serait une ignominie. Son Servant était la pour le lui rappeler... Humblement. Avec satisfaction. Quelle âge ? Quel rang ? Là n'était pas la question. Dans sa vulnérabilité, la drow s'était délestée de tout cela. Son physique délicat, évoquant la douceur de jeunes années, renforçait cette aspect. Une enfant craignant le jugement d'un parent divin... Venue à genoux,sans oser se révéler... Déesse, donnez-moi la patience..."Dahlar*... Met des mots sur ce que tu redoutes. Fais-y face car, c'est ainsi que la Dame te libérera de ta peur. En t'en rappelant le prix. conseille-t-il à voix basse, intime, comme ayant quelque tendresse pour cette délicate chose, cette eldéenne tremblante au cœur de la nuit. Par sa grâce, nous ne redoutons par la souffrance. Par sa grâce, nous ne fuyons pas l'adversité. La lâcheté... C'est là une terrible infamie. Face à tes ennemis, comme en ton cœur."Il n'a pas d'autre geste pour elle, il n'y a que sa dextre, dont le bout des doigts caressent la peau douce que les ongles-griffes oppressent. Il n'hésitera pas à faire couler le sang, ce serait là le moindre des cadeaux à l'attention de celle dont la figure hurlante veille. Mais il attend... L'implorante hésite encore. Il doit savoir quelle est la vigueur de sa flamme. Vacille-t-elle seulement ? A-t-elle besoin de plus d'attention pour être ravivée ? Y a-t-il là... Une aberration de la Traîtresse ? Les paupières mi-closes, le prêtre ne laisse rien paraître. Il n'est qu'attention, oreille pour une repentante volontaire. En franchissant le seuil du temple de la Dame des Souffrances, l'eldéenne a fait un pas dans la bonne direction... Qui sait si elle sera capable d'en faire un autre ?
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| | | L'Renor Crysto
Drow
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| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Lun 13 Mai 2019 - 18:17 | |
| Le visage égaré entre deux tentations, le calme était revenue dans la grande salle. Les cris avaient cessé – ses cris -, laissant un assourdissant silence s’étreindre de leurs corps tendus. Elle s’offrait sans revers ni détours, sans ses artifices, sans ses démons et ses pulsions intestines. Elle était seulement l’eldéenne, seulement l’impie, la rejetée. Les yeux suppliant se perdaient à présent dans le faciès élancé du prêtre. Elle le voulait, oui, ce contact, ces mots réconfortant. La Rose Noire voulait abolir le doute et la peur. Alors, dans un élan de courage, elle inspira. L’air qui gonfla son torse était brûlant, affreusement tangible. Avait-elle oublié de respirer jusqu’alors ? Non, bien sûr que non, elle était simplement trop préoccupée pour s’en soucier tout à fait.
« Ilharn je me suis perdue, éloignée de sa Voie ». Elle baissa derechef son minois, chaque mot pavant sa pénitence terrible. « J’ai obtenu de la Maîtresse force et bienveillance. Elle a veillé sur moi alors que la bouche de Voilée s’apprêtait à m’avaler ». Elle fit une pause, comme si le poids des ans venait soudainement rattraper son visage porcelain. « Grâce à Elle j’ai survécu aux autres et à moi-même. Pourtant, je me suis détournée de Son amour. Je me suis détournée de la mission qu’Elle avait fait mienne. J’ai failli, me baignant dans la complaisance comme si cela était assez pour assouvir Sa soif. Comme si c’était assez pour remercier Ses sacrifices ». Les doigts de la repentantes vinrent s’enrouler en douceur sur le poignet du serviteur, une caresse douce et chaude. A ses bras chétifs, presque nus, il pouvait voir les cicatrices. Celles d’une vie entière, celles qui lui rappelaient qu’il fallait se battre, toujours.
Elle devait poursuivre.
« La prochaine bataille sera la dernière. Je l’ai déçue. Je me dégoûte, Ilharn, je me hais. Et j’ai si peur… ». La Ditrown Da’re avait soufflé ces derniers mots, aveu de faiblesse qu’elle n’osait prononcer. Etait-ce les larmes qui noyaient ses yeux ?
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| | | Naukhel
Ancien
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| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Mar 14 Mai 2019 - 16:20 | |
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Si hésitante... Oh Déesse, elle ne se livre pas tout à fait... Le prêtre contemple son émoi sans montrer d'émotion. Il y a bien ce murmure qui se veut rassurant, celui que l'on chuchote aux enfants effrayés. Mais dans ses yeux rouges, ne pointent que des élans d'ennuis, devant tant de faux détours. Qu'elle chouine ne change en rien qu'elle fuit encore, avouant sa faute sans en assumer la cause. Qui, portant les traces de ces offrandes, craindrait un quelconque trépas, tant qu'il sert les desseins des Dieux ? Le prêtre n'est pas sans geste, cependant, malgré son agacement, il connait son devoir. Ainsi, il se penche un peu, sa seconde main venant caresser les cheveux blancs de l'échevelée, telle une figure paternelle, protectrice. Sa résistance ne durera pas, pas alors qu'elle a franchi le seuil du temple de la Dame des Tourments. En s'agenouillant, elle s'est rendue... Repartir le coeur fermé sur le secret motivant sa peur de la mort - une faute abjecte, aux yeux de celle qui souffrit pour couvrir la fuite de leurs ancêtres êlus - serait un affront... Pour l'Hurlante, comme son servant.
"Et te voilà, dahlar*, redoutant ce qui n'est pas encore advenu, prenant peur de ce qu'Elle nous apprend à ne pas redouter. dit-il avec une triste déception, théâtrale à souhait. Et te voilà, regrettant ta faute... Ta Flamme n'est pas encore perdue pour Elle, car tu as su trouvé le chemin de Son Temple... Là où la vérité, encore, souffre des détours de ton esprit."
Disant cela, la grande silhouette rouge se pencha encore, ses mains relâchant la tête de la larmoyante - Déesse... Voilà qu'elle pleure... - pour mieux se saisir de l'une des lames qu'elle avait amené. Avec une lenteur maîtrisée, calculée, la tenant comme une servante de Natha manipule un nouveau-né, le drow se relevant, dénudant à son tour l'un de ses avant-bras, tout en parlant sans heurt ni hésitation. Maître de ses gestes, de sa psyché... Il était là où il devait être, servait comme il le devait... Il ne tenait qu'à la drow agenouillée de se rappeler ce que cela signifiait.
"Pourquoi fuis-tu ce destin qui nous attend tous, pour leur plaire ? Raconte-moi, dahlar*... Comment, après tant de tourments, de bénédictions, te voilà de nouveau tremblante face à ce dont sont faites nos existences ? La mort des faibles, la mort des hérétiques... décrit-il avec patience et manière, alors qu'il appose la lame sur la peau nue et intacte de son avant-bras. Demande-toi ceci, dahlar*... La Dame des Tourments t'as-t-elle révélé une certitude... Ou une possibilité, si tu t'entêtes dans ton égarement ?"
Dans un silence suitant, le tranchant s'enfonça dans la peau avec facilité, une ligne vermeille se dessinant bientôt tandis que le prêtre poursuivait. Là où tout être vivant eut frémis, geint, se serait débattu... Il n'eut qu'un sourire pour cette souffrance bienvenue, l'accueillant en son sein comme une vieille amie, lui rappelant le goût de l'existence... Et le plaisir qu'il a à La servir. Les gouttes rouges perlent, puis grossissent et finissent en coulis sur la peau sombre. Délicat, le prêtre suspendit la percée, retirant le lame pour mieux en tendre la poignée vers la drow agenouillée devant lui.
"Te rappelles-tu au moins comment l'honorer ? sussura-t-il alors que le rouge de son bras se mêlait à celui du tissu dont il était vêtu. Ou cette peur t'a-t-elle atteint jusque dans les plus simples expressions de ton adoration pour notre Dame ?"
Son sourire était doux et prédateur. Vulnérable, si vulnérable dans ses aveux, cette enfant égarée... Il ne la laisserait pas fuir. Pas sans qu'elle ne soit allée au bout de sa perdition... Ou de sa rédemption.
"Toi qui a jouï de sa bénédiction jusque sous le regard de la Voilée... Honoreras-tu Kiel en lui offrant ta souffrance... Comme en avouant ce qui t'a détournée d'elle ?" murmura-t-il encore, son timbre frémissant d'encouragement... Comme d'impatience.
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| | | L'Renor Crysto
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| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Mar 14 Mai 2019 - 19:39 | |
| Le pommeau était tendu alors que l’odeur âcre chatouillait son nez. Les larmes s’arrêtèrent peu à peu alors que derrière le miel s’entendait le dédain. Perfide, vicieux et étrangement réconfortant, le prêtre se tenait là, stoïque aux tourments, roc solide auquel s’accrochait ses maigres bras. Et si d’aventure elle ne l’aurait trouvé en rien impressionnant, en ces lieux elle respectait son titre et son devoir. C’était le seul qui pourrait la tirer de son désarroi, sauver son âme, la ramener dans le chemin qui était le sien. Il n’avait que faire de se trouver devant la Ditrown Da’re, que faire de qui elle pouvait bien être. Car là était la chose la plus essentielle, celle qu’elle avait perdu il y a maintes années déjà.
D’un geste avisé, de celle qui sait, ses doigts s’enroulèrent sur la poignée. L’arme légère tourna un bref instant entre ses doigts adroits avant de venir se planter avec force dans sa cuisse. La Rose Noire étouffa un petit cri alors que l’acier plongeait dans sa chair, mutilait son muscle. Elle avait l’habitude de cela, mais cette nuit-là, la portée était toute autre. Elle trembla, retirant l’objet dégoulinant. Son expression se mua en une chose plus violente, cruelle, assassine. Et la dague retrouva la chaleur de sa cuisse dans un soubresaut incontrôlé. Les dents serrés dans une mâchoire tendue à l’extrême, elle se rappelait. Elle se rappelait que ce corps n’était qu’un prêt. Que tout cela n’était qu’illusoire, et qu’importait les siècles : les Dieux la rappelleraient à eux tôt ou tard. Puis, quand elle eut réalisé le geste une fois de plus, elle laissa la lame en place, lâchant l’outils pour venir cueillir du bout des doigts la rivière carmine. Elle s’écoulait là tranquillement, coulant sur le sol dans un ploc régulier, presque chantant. Il lit en toi Aertsab, il va le voir. Non. Elle portait ses vêtements. Jamais il ne pourrait deviner pareille ignominie. Pareil blasphème.
« J’ai vécu plus qu’une vie ne devrait vivre Ilharn. Mais ce qu’elle m’a montré… Cette fin… Je n’en veux pas. Par pitié, aidez-moi, aidez-moi ». Un quart de tour dans sa cuisse, lui arrachant un râle rauque et bestial, de l’animal acculé. Il va comprendre, tais-toi ! La voix dans son corps, dans sa tête se faisait pressante, irrévocable. Et le Monstre se jeta contre les parois de son esprit une première fois. La secousse lui ferma la bouche nette, et laissa s’installer un pesant silence.
Il fallut bien une minute avant que ses lèvres ne bougent à nouveau. « La Maîtresse a-t-Elle des desseins pour nous tous ? Suis-je encore Son enfant, malgré mes fautes ? Doit-on renoncer à la chair pour lui plaire ?! ». Et sans s’en rendre compte, elle s’était remise à hurler, la colère se noyant dans ses veines, aveuglant ses jugements. Elle avait besoin de sa clairvoyance. Elle avait besoin d’être guidée.
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| | | Naukhel
Ancien
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| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Mer 15 Mai 2019 - 22:08 | |
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Qu'était-ce là ? Une enfant venue pleurer, capable encore de se frapper, refusant pourtant de parler. Oh, bien sûr qu'elle ouvrait la bouche... Mais le prêtre les entendait toujours. Les détours, les questions. Qu'elle réaffirme sa crainte ancrait en lui cette certitude : l'eldéenne ne disait pas tout. En bonne servante de Tesso... Ou en Indigne de faire face au blasphème que semblait protéger sa Flamme. La chair... Quelle chair, dahlar* ? La tienne... Ou celle d'un autre être ? D'agacement, le prêtre leva la main sur l'implorante. Rien, en vérité, en comparaison de ce qu'elle venait de s'infliger, presque une caresse, qui claqua sur la joue déformée par son désarroi. "Oh, dahlar*, dahlar*... se lamenta-t-il avec fausseté, ses mires écarlates la veillant avec avidité, alors que son visage se voulait l'expression de la sagesse de la Dame des Tourments. T'écoutes-tu, dahlar* ? Craignant ses visions, refusant sa bénédiction... Dans quelle obscurité t'es-tu égarée ?"Le coup l'ayant déséquilibrée, il avait fait un pas, saisissant avec dureté sa crinière folle, pour mieux la tenir, la tourner à nouveau vers lui. La fuite n'était pas permise, dans les mots comme les gestes. Implacables, il lui tordit la nuque pour mieux la contempler, elle en souffrance, une lame plantée dans sa chair, et son visage si beau de part la pureté de son sang, et si laid par ce qu'elle se laissait aller à exprimer. Tant de choses que notre Dame t'a enseignée, sur quoi tu craches en cet instant... Enfant de peu de Foi. Enfin... Il se connaissait, lui et sa tendance à précipiter le jugement. Pourtant, il sut se maîtriser, cherchant encore les mots pour tenter de la ramener, avant de laisser une bonne fois ses mains parler. L'une geôlière, l'autre vint caresser le visage, lui voler une larme... Avant de loger un ongle-griffe juste sous un oeil, là où, d'une simple pression, il pouvait l'enfoncer cruellement dans l'orbite. "Nous vivons tant, dahlar*... Nous sommes des plus fragiles, et nos Dieux en ont conscience. C'est pourquoi ils nous font connaître les pires des feux, afin de faire de nous des armes infaillibles. Car nul ne saurait détruire une Flamme attisée par et pour les Dieux Sombres. Nul... S ce n'est elle-même. Et les faiblesses, qui se cachent, traîtresses, en son coeur... susurra-t-il, miséricordieux. Refusez d'aider une digne enfant de la Dame m'est intolérable... Mais que dois-je penser de tes simagrées, dahlar* ? Tu te plais à lui offrir ton sang et ta douleur, et pourtant tu te détournes encore, appelant la rédemption sans être allée au bout de tes aveux."D'une brusque torsion, il força sa tête et son regard à se porter sur la figure de Kiel, qui veillait sur les lieux et les Flammes venues y faire offrande... Comme repentance. L'eldéenne se voulait sa fille, pour cela elle devait en être digne... Était-ce là une intention pure, qui la pousserait à venir à bout de ses peurs ? Ou une vulgaire comédie, appelant un geste non mérité ? Ce geste que le prêtre ne délivrerait en aucun cas tant qu'il conserverait un doute quant à son honnêteté à l'égard de l'Hurlante. La griffe piqua la chair tendre, écrin de l’œil rouge larmoyant. "Pourquoi questionnes-tu, au lieu de te donner toute entière ? tonna-t-il soudain, relevant la tête en la regardant de haut, le timbre orageux et sentencieux. Comment peux-tu douter à ce point, remettre en question ses plans, croire qu'en vile Mère elle t'oublierait à la moindre faute ? Tu te présentes en son Temple afin d'être délivrée de tes peurs... Ais la décense d'y faire face et de les avouer toute entière, au lieu de cracher sur ses enseignements en feignant d'aspirer à sa bénédiction. Aussi soudainement, il se fit à nouveau doucereux, figure appelant au repentir et à l'humilité. Quelle chair, quelle faute, douce dahlar* ? Il n'y a par de peur sans origine... La Dame des Tourmentes souffrit pour nous, et le fait encore... Il ne tient qu'à toi de t'en souvenir et de revenir auprès d'elle..."- Traduction:
dahlar : enfant
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| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Ven 24 Mai 2019 - 19:25 | |
| Tout changea à l’instant où la main rencontra son visage. Ses larmes cessèrent et son visage se ferma. N’avait-elle point honte d’avoir été si faible ? Ne l’avait-elle pas suffisamment été toute sa vie durant ? Et lui, et lui qui la regardait avec pitié. Son cœur se déchirait, irradiant bien plus que sa propre chair meurtrie. Elle n’avait cure du sang qui s’écoulait sur le sol. L’air se tendit, les fils magiques répondirent à son appel muet. Bientôt, la tension était à son paroxysme. Lui, si doux-amer, Elle toujours hurlante et finalement la Rose Noire ayant perdu chacune de ses épines. Souviens-toi ! Souviens-toi de ce que tu es !. Les boyaux se tordirent dans son ventre, brisée. La mâchoire close, elle écoutait ses paroles comme s’il le psalmodiait, comme s’il n’y avait rien d’autre en ce monde que ces embarcations bancales auditives ; ces barques naufragées de son âme dont les écueils ne trouvèrent plus que la sourde colère intestine. Et chaque caresse revenait comme un assaut terrible, une défaite cuisante sur sa peau quémandeuse. Elle l’aurait volontiers supplié d’arrêter, de ne point la regarder, de ne point la voir. Mais là Dula ! Il nous voyait telles que nous étions à Ses yeux. Il nous jugeait au même titre qu’Elle le faisait. Nous, qui n’étions pas même digne de son intérêt, de son mépris.
Et si eusseulée qu’elle pouvait être, ses yeux s’asséchèrent peu à peu. Lui dire, tout. Non non ! Lui mentir, éhontées. Mais la silhouette d’albâtre pesait en juge. Elle sentait Son immense poids, là, juste sur son corps fébrile et livide. Il lui était pourtant tout offert. Il l’avait toujours été. Toujours ?. Sa main vacilla un peu, une fraction de seconde. Elle ne pouvait pas lui dire, pas même sous la torture. C’était cela Sa souffrance : le silence forcé d’une vie misérable, la muselière terrible qui s’était nouée autour de ses lèvres et de sa langue le jour où elle avait accepté son destin. Pantin sans voix, elle n’avait plus la force de garder cela en elle. Se doutât-il un instant que l’enfant agenouillé avait honte ? Honte de chérir cette mortalité et d’oublier – parfois trop souvent – que sa vie ne lui appartenait plus. Elle n’a jamais été tienne, Dula. Et la rage s’éclata encore sur les murs de sa psyché.
Ses lèvres s’entrouvrirent, prête à tout déballée mais presque aussitôt, comme pour se faire taire, sa paume appuya lentement sur le doigt griffu. Presque aussitôt le rouge brouilla sa vision alors qu’un hoquet humide lui échappa tant la douleur était ténue. Chienne ! Tu ne diras rien . Un flot chaud et réconfortant s’écoula le long de sa joue alors que le liquide épais rejoignait celui déjà présent au sol dans un ploc immonde. Mais son expression avait changé. Stoïque, terrifiante dans cette beauté où se mêlait le blanc et le vermeille, elle avait planté son seul œil encore valide dans les mirettes de l’Inconnu. Glaciale, elle savait ce qui lui restât à faire. Kiel qui un jour avait scindé son cœur, vois Ton enfant ! Regarde le bien souffrir de sa propre existence, martyr comme Tu l’as été pour Votre peuple. Regarde et juge-la !
« Par-delà nos conditions, j’ai vu Son royaume où m’attendait la Mère des Souffrances. A son trône battit de nos doutes, je n’ai vu qu’Amour et Résilience. Car là était la nature profonde de la Mère ; sacrifiée pour l’amour, elle aimât encore ses Enfants ». Elle récitait parfaitement, sa voix ne vacillant même pas. « Dans Sa mansuétude, Elle voulait que jamais ils ne connaissent la peur, que jamais ils ne tombent car le jour où ils tomberaient, Elle viendrait se pencher au-dessus du linceul de Teiweon et offrirait à chacun d’eux un baiser ». Elle poursuivait, dans le calme. « Alors enfant, tu ne devras craindre ton dernier jour car enfin tu recevras l’Ultime récompense, et tu ne devras avoir mal ; car ta Mère l’a fait avant toi, et à ta fin te recueillera ». « Mais qu’advient-il si l’on se détourne de Son amour au profit d’autres ? ». Elle attendait, fébrile et pourtant si forte. Déterminée.
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| | | Naukhel
Ancien
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| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Dim 26 Mai 2019 - 15:22 | |
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Des mots qui lui furent fort doux, au prêtre. Des mots qui clamèrent la dévotion de l'enfant. Des mots qui, couplés au regard larmoyant du sang, soutenaient sa volonté. La vérité, elle ne l'avouerait pas. Seulement qu'elle avait fauté, seulement qu'elle s'était détournée, seulement qu'elle souhaitait expier... Son ongle toujours enfoui sous l'oeil, dans la tendre chair sanglante, le prêtre relâcha son autre emprise, celle de sa main dans la chevelure folle. Sombre et élégante, elle vint recueillir la joue tremblotante de l'eldéenne, dont les mots étaient si forts et sa chair, si faible. Lentement, le prêtre se pencha vers elle, la regardant oh ! La regardant avec une plainte dans les yeux, celle des souffrances à venir, de celle qu'elle devrait endurer. Oh ! Pauvre enfant... Son obscure satisfaction, il la gardait sagement en retrait, affichant seulement le regard d'un père déçu, qui connaissait son devoir et dénouait sa ceinture, en demandant à son enfant de présenter son dos.
"Une enfant si assidue... Quelle tristesse. fit-il, son timbre se chargeant de peine sur ce dernier mot. Il advient que l'Hurlante a une nouvelle raison de hurler, hurler à la trahison, hurler à la perte d'un enfant..."
Qu'il est aisé pour lui que de verser une larme à son tour, lui qui a tant souffert, tant fait souffrir... Comme s'il avait volé une larme à celle qui se lamente devant lui, pour mieux la mettre dans son oeil, et dire 'Voit ! Voit comme je pleure pour toi !'. Vérité ou mensonge ? Jeu ou rôle ? Difficile à dire, car l'eldéenne se tourmente avec trop de sincérité, et lui... Est empli de son devoir jusqu'à la lie.
"Mais... Te voilà. En son Temple, appelant son pardon, souhaitant savoir s'il y a une chance... Des mots, dahlar*. Les mots ne sont pas des prières suffisantes, tu le sais."
Disant cela, il se relève, libérant la libérant de sa griffe, la dominant, lui si obscur, vêtu de rouge, elle si pâle, vêtue de larmes. De quelques mots, il la prie de la suivre, et la douce enfant s'exécute, boitant, tendue, comme craintive de s'enfoncer, à la suite du prêtre à la marche solennelle, dans la maison de cette mère dont elle redoute l'amour et l'appelle de ses vœux. De nom, il n'est pas question, de grade non plus, seulement une enfant égarée et un guide spirituel.
Parmi toutes les pièces obscures du temple de Kiel, le prêtre en choisit une, pas la plus démunie, pas la plus froide... Mais celle où la présence de Kiel est là, juge, de toutes les faces blanches, hurlantes, sculptées dans les murs. Une pièce si appréciée... Le prêtre était heureux car, à cette heure, dans e calme, personne ne la revendiquait, si ce n'est lui et sa repentante. Ses pieds foulèrent la pierre froide, noire, obscurcie par le sang, qui avait éclaboussé les multiples visages sculptés. Une vision de cauchemar, que ces visages, cernant les outils, les structures servant l’œuvre de la Mère des Tourments. Le seul frisson du prêtre fut de plaisir à cette vue, d'une jouissance anticipée. Oui, l'enfant payerait le prix, oui, il se ferait l'outil de la volonté de Kiel, de ses enseignements... Et, peut-être, l'enfant saurait-elle se racheter. Figure de sang entourée de mur d'un blanc d'os, s'avançant sur un sol d'obscure noirceur aux subtilités sanguines, le prêtre eut un geste du bras pour une lourde table, dont les rouages comme les attaches clamaient l'usage.
"L'étreinte de Kiel t'attend, dahlar*..." souffla-t-il.
Des lamentations, quelques coups, voilà son seule tribut pour une faute qui l'avait rendue vulnérable à la peur de périr, faute qu'elle préservait en son cœur tourmentée... Le prix à payer serait lourd. Et la chose pulsant dans le torse du prêtre battait avec joie, d'avance... Paie le prix, ou soit reniée... Fuir ou livrer son être... Un dilemme si commun en ces murs et pourtant, toujours si... Vivifiant.
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| | | L'Renor Crysto
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| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Jeu 6 Juin 2019 - 19:58 | |
| L’odeur âpre du sang lui emplissait les poumons. Une senteur fort familière à laquelle se mêlait volontiers la chaleur latente du liquide qui s’écoulait çà et là. Clopinant derrière la silhouette gracile, elle se laissa aller à une sourire vague à la vue de la salle. Elle n’était guère différente de celle qu’elle occupait dans les profondeurs, et chaque outil lui semblait d’une intimité folle ; bien mieux à l’aise entre ces quatre murs glauques, elle se détendit un peu. Elle savait ce qui allait arriver, et acceptait son sort sans mal : elle en avait besoin, elle avait besoin qu’il lui montre le chemin, Son chemin. Peut-être que Kahveka lui en voudrait – sûrement même -, mais il ne pouvait en aller autrement. Trop tourmentée pour s’en aller, elle ne pouvait pas non plus se confier à son ami. Il est la source de tes tourments.
La voix lui serra les entrailles une fois de plus, et ses mâchoires ne surent s’ouvrir. Plutôt, elle boita encore un peu pour prendre place au centre de la pièce. Elle devait laver ses pêchés, ses doutes. Je ne serais plus jamais faible, Dula, jamais !. Et le sourire délicieux du prêtre la conforta dans son choix ; s’il respirait le vice, il saurait probablement la mener sur la voie du purgatoire. Alors, se dégageant de son linceul funeste, elle laissa choir sur le sol esseulé ses quelques fripes. A nue, elle laissait alors voir toute la tension de son corps. Constellée de cicatrices, de plaies, il marquait là une vie d’existence et de combats menés. Et à son flanc et à sa nuque l’on distinguait la marque profonde et immuable d’un « K », gravé avec la passion d’une histoire terrible. Cache ça, pauvre folle !. Alors ses longs doigts le camouflèrent un moment, quelques secondes à peine, avant d’abdiquer. Elle ne voulait pas de ça. Elle ne voulait plus de cette culpabilité qui l’accablait. Et au loin, dans son crâne, résonnait le rire sourd du Monstre tapis dans l’ombre.
« Faites votre œuvre, prêtre ».
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| | | Naukhel
Ancien
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| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Lun 10 Juin 2019 - 22:52 | |
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Comment la décrire ? La fragilité d'une enfant, pourtant prête à endurer. La beauté d'une eldéenne, la laideur d'une blasphématrice venue se repentir. La nudité d'un corps, l'opacité d'un esprit retors... Quelque chose auquel il fallait remédier. Ses pulsations sombres portaient le prêtre, qui notait tout : le détail des cicatrices, le frémissement de sa vulnérabilité... Le geste sur une marque. Quelle chair t'a fait fauter ? Une question parmi d'autres... Obtenir la réponse était-il important ? Cette autre réponse se présenterait à lui. A présent... Il lui fallait officier.
Sans un mot, il pris la main de la repentante, sans jamais refermer ses doigts, la tenant avec légèreté, pour la guider jusqu'à son lit de douleur. Là, il la fit s'étendre, puis lui accrocha les membres, étendant ces longues choses fébriles, sans plus de protections à présent... Les lanières de cuir furent serrer. Coupant presque la circulation. Et lui, lui, le servant de Kiel... Naturellement, ses lèvres se rappelèrent les paroles de l'Hurlante, de son histoire, de ses lamentations, de ses avertissements, coeur de sa foi et de son être, imprégnés dans sa chair comme son esprit. La douceur de cette préparation... Presque galant, à vrai dire. Soigné. Une grande main sombre se posa sur le galbe d'une hanche. Quelle chair, dahlar ? Lentement, formant les mots, ses lèvres s'étirèrent pour révéler ses dents.
"Et Elle souffrit, encore et encore, sous les coups ennemis..." susurrait-il.
Comme sorties de nul part, une lame avait trouver le creux de sa paume. Tout aussi naturellement, la pointe fut diriger vers la chair... Et, sans hésitation, le prêtre l'y planta, au niveau du bassin. Rien qu'un peu, dans cette peau couvrant l'os... Un point de départ. Avec régularité, la pointe de métal remonta, doucement, lentement, tendrement, laissant un sillon de sang derrière elle, sur le flanc, sur les côtes, jusqu'au bras. Nulle hésitation, nulle ralentissement, nulle compassion, seulement le devoir d'avancer, de marquer le corps offert, contenant l'esprit fautif. Tendue, accrochée, l'eldéenne pouvait bien se trémousser comme vocaliser... Quel importance ? La lame œuvrerait encore, sous l'oeil attentif, maladivement vigilant du prêtre. Prêtre avant d'être eldéen à présent. Vecteur de la parole de la Suppliciée.
"Ses hurlements étaient le fruit de ses tourments, la douleur, la naissance d'une nouvelle œuvre..." disait-il encore.
Avec facilité, l'arme on ne peut plus aiguisée tailla ainsi la chair, sans s’enfoncer profondément, d'un côté, puis sagement de l'autre. Tant de marques, tant de cicatrices, celle récente à sa cuisse... Une nouvelle. Revenant à la cuisse, le prêtre entreprit, fort simplement, d'écorcher celle-ci. Lacérations sanglantes, le métal se frayant un chemins dans le creux de celles-ci, cherchant à couper des lambeaux malgré les sanglots sanglants de la chair suppliciée... Quelles différences avec un froid boucher ? La solennité de ses gens, de ses paroles, et une application bien trop maîtrisée pour être le résultat de pulsions. Non, il était là question d'une vocation, louée et appréciée au sein de cette société. Tranquillement, le prêtre de Kiel se sentait particulièrement vivant alors que sa lame fourrageait dans celle de l'eldéenne.
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| | | L'Renor Crysto
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| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Mar 11 Juin 2019 - 21:06 | |
| Sous son dos, elle ne sentait que le froid de la pierre sépulcrale. A ses mains et ses chevilles ne brûlait plus que la tendre morsure des lanières de cuir. Leurs caresses tourmenteuses se faisaient bien irrégulières, allant pourlécher la peau nue aux seules tensions d’un corps. Sa poitrine se levait dans un chaos parfait. Elle tremblait, là, de son échine à son âme, comme un seul écho. Et la chaleur obsédante qui s’écoulait des parois écartées de son être lui donnait des frissons. Et la lame qui bougeait avec parcimonie retournait ses entrailles. Elle expiait le corps et pourtant, oui pourtant c’était son esprit qui pleurait et qui implorait. Dans la salle silencieuse, seuls se mêlaient aux psaumes son souffle erratique. Parfois haletante, parfois apnéiste, il n’y avait plus de constance que sa propre existence. Une existence mortelle et vulnérable quand, offerte nue, il ne lui suffisait que d’un geste. Quand, dans le mutisme absolu, les Dieux ne disaient rien. La mélodie semblait parfaite, inhumaine, assemblage morcelé de chair et d’os. Une dissonance lugubre que personne n’osait interrompre, pas même elle.
Et soudain, l’air se déchira dans un gémissement douloureux. La sueur perlait çà et là sur ce corps décharné que sa Mère n’aimait plus. Seule, terriblement seule, abandonnée de toute force de Grâce dans un Néant absolu. Et l’acier glacé lui rappelait morsure après morsure sa désolation. Anéantie au fond d’elle-même, la pièce lui parut de plus en plus ombre comme son plongeon dans l’abime. Là, il ne restait plus aucune forme de mouvement, plus de résistance. Il n’y demeurait dans cet univers noir qu’une lueur feutrée dont le halo instable suçait les parois du Vide. Et lorsque son âme la frôla, elle cria. La prison de ses lèvres ne suffit plus à contenir la douleur et la peine. Mais ses yeux ouverts qui ne voyaient rien restèrent immuablement sec. Décontenancés. Soufflés de toute vitalité. Dans un effort qui parut surhumain, dans l’atrocité de cet éther fracassant, elle détailla le visage de son bourreau. De son rédempteur. Au bord du vide, elle dessina de ses rétines l’air satisfait, l’effort et l’affairement de celui qui œuvrait à compléter son corps, à recoller son âme.
Comme autant de précision incertaine, de certitudes réfutées, sa bouche laissa encore passer un toussotement. Les plaies n’étaient pas toutes profondes, et le saignement, vivace laissait au passage de l’air agité un léger picotement. Elle était vivante. Elle l’était encore, par la Volonté de la Maitresse. Et les visages hurlants l’inquiétèrent, et l’odeur de son corps la pétrifia. La plaie intérieure était bien plus coriace, et ses chaînes bien fragiles. Elle s’était détournée de la vérité, de la voie qu’Elle lui avait offerte. Aujourd’hui n’était qu’un pas salvateur vers l’auge du Sacrifice ultime, comme si les lèvres qui n’existaient plus voulaient l’embrasser. Cependant la Mère avait renié son amour, et après, lorsque le fleuve Mort l’emporterait plus rien ne l’attendrait. Ces yeux percés, morbides, se détourneraient d’elle. Ne l’avait-elle pas déjà fait ? La terreur l’envahit et son souffle se saccada encore un peu. Mère, Douce Mère, pardonne moi d’avoir douté de toi.
« Car... La Souffrance… nous protège… ». Elle psalmodiait, le corps tressautant, l’articulation difficile. « De la peur…et… du doute ». Son minois impassible, incapable d’émettre la moindre émotion aurait aimé se muer en supplique, mais ses muscles ne répondaient plus – ou trop bien. « Pourquoi… est-ce que… je doute et… pourquoi est-ce que j’ai… peur ? ».
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| | | Naukhel
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| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Mar 11 Juin 2019 - 22:19 | |
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Que percevait le prêtre de cette agonie, de cette errance, de cette souffrance que chaque glissement de sa lame ancrait davantage dans cette chair enchaînée ? La symphonie. La symphonie des muscles qui tressautaient, appelant à la fuite, retenus par les chaînes du corps comme de l'esprit. A ce jeu de corde s'ajoutait celui du souffle de la daedhel, contenu ou emporté, luttant comme succombant. L'orfèvre de la chair ne se lassait pas de percevoir ces signes du supplice, que faisaient naître ses gestes... Toujours, sa voix accompagnait cette oeuvre sanglante, toujours, son timbre velouté et grave rappelait le sacrifice de l'Hurlante, l'amour qu'elle portait à ses enfants, la Voie tracée à même sa chair... Et pourtant. La litanie de la daedhel fut brisée. La lame logée dans son fourreau de sang, le prêtre suspendit son geste sans la dégager, se détournant de la toile sur laquelle il œuvrait, pour chercher le regard de l'éplorée. Encore, elle trouvait à questionner. Encore, elle évoquait ce mot : douter. Où était l'abandon ? Où était... La dévotion ? Elle s'avance en lui tournant le dos... Pauvre dahlar.
Voile rouge sur corps tremblant, le prêtre se pencha vers elle, le métal quittant la chair. Les mots, toujours, s'écoulaient de sa bouche cruellement dévote, écho de la volonté de la Mère des Tourments. Sa main libre, elle, vint trouver le visage tremblant de l'égarée, le caressant, un bref instant, alors qu'il songeait à comment lui faire avouer. Quelle chair, dahlar ? Tes mots n'étaient pas vides. Cette marque, là ? Quelle chair t'a détournée de Kiel ? Ce n'est pas Elle qui t'a ainsi marquée, n'est-ce pas ? Sinon, pourquoi le cacher en son Temple ? Les longs doigts noires s'écoulèrent le long de ses joues, ses griffes y traçant des sillons légers et éphémères. Caresses, détournant son attention, au même titre que son regard sanglant, lui transperçant le crâne... Alors que sa lame se portait, avec la lenteur d'une inspiration profonde, en un lieu de délices et, aujourd'hui, d'ignominies.
"De Souffrance, elle étouffa ses enfants... susurra le prêtre Afin qu'à ce nouveau souffle, ils s'éveillent..."
Tant de mots pour les conforter, tant de mots pour les guider, tant de mots pour, dans leur esprit, faire taire cette chose qui rongeait les faibles et les détournait de Sa voie. Quelle chair, dahlar ? Le prix serait lourd, le prix serait juste... Mais, par son honnêteté dans sa dévotion, la daedhel avait choisi un chemin qu'elle ferait vivre de ses cris. La dextre du prêtre se fit brutalement carcan sur la gorge frémissante. Et la lame froide se posa sur la chair vulnérable d'une intimité qu'il soupçonnait fautive. Par la grâce de Kiran, l'oeuvre d'Isten ne serait pas gênée trop longtemps, mais cette plaie, il la lui infligerait. Insoutenable. Intolérable. Oh, comme il le savait !... Mais nécessaire. Kiel ne ménageait pas ses enfants. Jamais. Le sang des yeux du prêtre creusaient les mires coupables de la repentante.
"A la chair, nous sommes enchaînés... souffla-t-il, la lame forçant lentement le tendre écrin. A la chair, nous nous croyons soumis... La fil de la lame glissa, fendant... A la chair, il nous faut nous rappeler... Elle n'est que le Vaisseau de notre Flamme. Pour elle, nous n'avons pas à redouter."
Le froid s'enfonça dans la chair et la transperça, dans un linceul sanglant, à la manière d'une lame glacée d'agonie. Rien n'était épargné. Aux Dieux Sombres, les noirelfes donnaient tout.
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| | | L'Renor Crysto
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| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Dim 16 Juin 2019 - 20:37 | |
| La douleur déforma son minois porcelaine mais aucun cri ne franchit ses lèvres. Incapable de produire le moindre son, elle s’était tendue, priant que la douce morsure de la lame s’estompe. Mais rien ne vint perturber le moment intense et délectable de ce corps embroché, vidé de toute dignité. Poignardé au tréfonds de son être, elle planta un regard incrédule dans les yeux du prêtre. Il avait compris. Et comme blasphématrice repentante, ses lèvres entrouvertes tentèrent de se mouvoir pour ne laisser filtrer que quelques sourcillements incongrus. Le châtiment pour ses pêchés était tombé comme un couperet, irrévocable et laissant s’enfuir sur sa peau encore épargnée quelques effluves rougis de chemins à sens unique. Elle aurait voulu savoir parler à ce moment-là, pouvoir lui dire, lui expliquer que ce n’était pas sa faute. Espérer, croire qu’il lui offrirait au travers de ses yeux calme la rédemption. Mais ses yeux n’étaient pas doux, et sa main sévère se rappelait à elle dans une lente et profonde agonie. La gravure de ses côtes frémit, l’air brûlant emplissait ses poumons avec la rage d’une tempête après la sécheresse. Pourtant, les mots eux, restaient vides. Et alors que filait avec la lenteur des grands fleuves son sang, ses yeux cessaient de voir. Son esprit divaguait, l’emportant bien plus loin que cette pièce aux visages hurlants. Tu es mienne.
Il faisait formidablement sombre. Il n’y avait aucune lumière qui filtrait. Juste cet espace aussi noir que la nuit où tout s’était tût. Le sol était lisse. Enfin, du moins ce que l’on en ressentait. Lisse et froid. Incroyablement long. Sans fin à vrai dire. Le ciel semblait aussi lointain que ce que le sol paraissait long. Le ciel semblait aussi sévère que ce que le sol paraissait dur. Le Noir. Un endroit charmant où seul le souffle d’une respiration perçait. Haletante, transit. Le souffle était entrecoupé. Serait-ce des sanglots que l’on entendait ? Y aurait-il en ces lieux une personne ? « Au secours… ». La voix d’une petite fille. Pauvre folle, elle s’était perdue au mauvais endroit. «Aidez-moi s’il vous plait… ». Les sanglots redoublaient, la voix était tellement fébrile… On sait tous comment finissent les petites filles ici, oh oui, on le sait tous. Te rappelles-tu de la dernière ? Oh oui je m’en souviens comme si c’était hier. Elle a hurlé. Elle pleurait aussi au tout début. Comme c’était drôle ! Pourtant on l’avait prévenue. On lui avait dit de partir avant qu’Elle n’arrive hein ! La petite a pas écouté et Elle s’est bien amusé, oh oui ! Elle aussi l’avait trouvé très mignonne. La Chouineuse était à son goût. Tu sais, comme Elle les aime. Et puis, elle avait commencé par les pieds. Elle avait continué avec avidité. La pauvre pauvre petite Folle ! A pas écouté, on finit toujours pas la croisée Elle, dans ces lieux ! Peut-être faudrait-il qu’on lui dise. Peut-être faudrait-il qu’on la prévienne… Pour que la Chouineuse ne nous écoute pas ? A quoi bon ? On est vraiment trop gentils avec ces Mioches. Vraiment beaucoup trop. Regarde ce qu’on en fait ! Quand les p’tites ne finissent pas dans Ses bras, elles deviennent folles ! Folles dis-tu ? Oh oui folles ! Toutes autant qu’elles sont ! Des bruits de pas… Un pas lent et mesuré. « A l’aide, je suis là ! ». Gloussement retentissants. Je crois qu’elle le fait exprès ! Elle arrive, oh oui, Elle va encore s’amuser ! Mais tu vas te taire ?! Regarde un peu, ça commence ! Et le noir laissa apparaitre une légère lueur. Une flamme au loin. Un espoir dans le noir si triste, si froid… Si seule. La petite essuya ses larmes d’un revers de sa main sale. Elle devait avoir six ans. Elle avait toujours su être forte mais sa peur du noir était bien trop grosse pour un si petit corps. Ce n’était qu’une enfant après tout. Elle se releva et entama une course effrénée vers la lumière. Rire tonitruant. La lumière s’éteignit, la petite pleura toute les larmes de son corps. Elle se sentait si seule, si vide. Le désespoir gagnait son cœur avec une facilité déconcertante. Puis la lumière se ralluma. Juste derrière elle. Alors elle tourna vivement la tête mais ce qu’elle vit lui fit écarquiller les yeux. C’était un Monstre. Alors elle se mit à courir aussi vite que ses petites jambes la portaient. Mais Elle la suivait en riant. Elle s’amusait beaucoup, Elle. Et la petite sentait son cœur battre à tout rompre. Elle ne sentait plus que ça. Si bien qu’elle chuta, arrêtée nette dans sa course folle. Elle pleurait sans discontinuer tandis que l’autre continuait à rire à gorge déployée. Le Chouineuse se retourna. La folle course l’avait essoufflée mais l’instinct de survit était plus fort. Elle essaya de se relever mais un pied s’écrasa sur sa poitrine. Un pied de petite fille. Son propre pied. Et à ses yeux d’enfants apparaissait enfin son propre reflet.
Haletante, la Rose Noire revint à elle. Les fils de la magie s’étaient tendus mais presque aussitôt elle les lâcha. Elle savait au fond d’elle que c’était la Mère qui lui avait mis cette Chose en elle. Là, au fond de son crâne, bête terrible qui attendait son heure. Combien de temps avait-elle sombré ? Elle n’en savait rien, sinon que l’homme se tenait toujours près d’elle. La bouche moins sèche, l’air était moins piquant et son corps endolori lui semblait un peu moins lourd. Elle voulait comprendre quel dessein Elle lui avait réservé, et pourquoi l’avait-elle choisi, elle ? Perdue, elle tentait vainement d’entendre des réponses qui ne viendraient jamais. « La… Mère. Elle… m’a confié… une chose ». Sa voix n’était qu’un souffle dans les ténèbres où elle semblait plonger.
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| | | Naukhel
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| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Lun 17 Juin 2019 - 20:32 | |
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Qu'avait-elle à dire à présent, cette enfant si cachotière ? Un secret, un aveu, la vérité, enfin ? Le prêtre demeura imperturbable, devant le corps nu, fendu, dont sa lame ne s'était retirée que pour blesser encore. Les mires sanglantes se posèrent avec un calme froid sur la figure pâle, si délicate dans sa souffrance. Écouter, faire goûter, encore, le baiser de Kiel ? Pourquoi pas les deux ? Montre-moi, dahlar... Montre-Lui la beauté de ton dévouement. Son office tout juste entamé, le prêtre poursuivit donc, son regard suivant les frémissements du corps écartelé sur son lit de souffrances, que raviva sans tarder la lame lovée dans sa dextre.
Le métal retrouva son fourreau de chair, à l'affleurement de la cuisse nue, et vint se glisser sans plus de manière sous la peau écorchée, pointant, s'enfonçant, se glissant dans le mince gras, s’immisçant dans le muscles, donnant naissance à des sanglots si sanglants qu'ils eurent fort sied aux figures pâles se lamentant sur les murs. La main du connaisseur n'hésita pas, tandis que sa jumelle, elle, venait griffer la chair fendue des flancs. Le liquide coulait sur la peau frémissante de la suppliciée, et celle, glacée par l'habitude, du prêtre, dont le vêtement but goulûment cette offrande. Enfin, c'était là l'oeuvre la plus naturelle qui soit pour un servant de son ordre... Pourtant, alors qu'il malmenait ainsi la repentante, le prêtre suspendit l'avancée de sa lame glacée, qui demeura en un lieu chauffé par la régularité d'un cœur tenace. Ses griffes, elles, continuèrent de s'accrocher à la chair blessée, ne lui accordant ainsi qu'un léger répit. Les lèvres obscures du servant rouge s'ourlèrent en un rictus patient.
"Dis ce qu'il te faut dire, dahlar." susurra-t-il.
Cela fut tout. Après tout, il servait l'Hurlante, mais n'en demeurait pas moins son servant, bras au service de son œuvre, malmenant les sombres pour mieux leur enseigner la résilience, cette résistance dont n'avait pas idée les ridicules éphémères de la surface. Cependant, dans son devoir, le prêtre savait faire preuve d'écoute, ce doux sire...
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| | | L'Renor Crysto
Drow
Nombre de messages : 108 Âge : 16 Date d'inscription : 18/04/2018
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 728 ans Taille : 1m75 Niveau Magique : Maître.
| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Sam 22 Juin 2019 - 21:28 | |
| La respiration était erratique, tantôt vive, d’autres fois plus lente, comme si chaque inspiration devenait une lente agonie. Elle tentait à travers le brouillard de deviner la silhouette malingre de son geôlier sans y parvenir. Elle se sentait moite, souillée par cette lame, souillée par cet être qui n’était rien. La colère brûlait encore au creux de son estomac, mais la fatigue et la peur contenaient les flammèches indisciplinées. Cet amas étrange de sentiments incompréhensible lui donnait la nausée. Elle se dégoûtait. Si chaque mouvement n’avait pas été un combat, peut-être aurait-elle affiché une moue dépréciative, mais la douleur l’avait figé, poupée de cire au visage porcelain. Les mécaniques de son propre corps lui échappaient peu à peu, filaient entre les doigts de son contrôle. Prisonnière de ses pêchés, elle n’avait plus que l’espoir vain d’une délivrance céleste qui ne viendrait pas. Plutôt, l’Hurlante se trouvait bien muette devant la chair scarifiée de sa fille. Et elle regardait l’étrange spectacle avec un œil intransigeant. Comment lui en vouloir ? Je me suis perdue sur le chemin de l’abnégation.
Et plutôt le Monstre renâcla, terrible, s’écrasant contre les barreaux qui grincèrent. Le bruit tonitruant de son esprit fût bientôt complété par le ricanement mortuaire, devinant au travers la brume de ses songes les dents aiguisées et l’haleine fétide. Va-t-en. Et puis : Non reste. Tu es bien là. Je suis bien ici. Et comme l’enfant esseulée, elle se laissait aller un pas après l’autre vers la facile tranquillité, comme si au travers de ses griffes elle trouva quelques réconforts illusoires. Au loin, la voix du prêtre la maintenait dans cette demie-conscience, au bord de l’abime dans lequel elle voulait plonger tout entière pour ne jamais s’en réveiller. Pauvre Petite Chose. Viens, approche. Tend tes bras que je te recueille. Là, oui là près de mon cœur. Viens que je goutte ton sang, que je déchire tes os. Non. Elle résistait aux pulsions violentes, elle résistait autant que son corps lui permettait. Là, perdue, elle n’avait plus d’autre choix que de tenir bon, comme si la Bête tapie dans la pénombre n’attendait qu’un mot d’elle. Qu’une faille. Elle ne lui donnerait pas. Pas ce soir. Son enveloppe lui appartenait, et jamais elle ne lui céderait plus. Un rire grinçant à nouveau l’aurait volontiers clouée au sol si elle n’avait pas été déjà pieds et poings liés. Jusqu’à la prochaine fois, Petite Chose.
Entre deux réalités, elle tentait de mettre de l’ordre dans le fil de ses pensées. Que voulait-elle dire ? Que souhaitait-elle avouer ? Qu’elle était la chose qui rongeait sa conscience au point de l’avoir fait douter ? Elle n’avait jamais craint de mourir, aujourd’hui pas moins qu’hier. Elle L’avait toujours aimé inconditionnellement, comme une fille aime sa Mère, comme un enfant chérit son Guide. Mais il y avait eut cette fois-là, où la cage s’était entrouverte, où le Monstre s’était enfuit. Depuis rien n’était pareil. Elle avait peur de perdre le contrôle une fois encore, de perdre Kahveka et finalement. J’ai peur de me perdre ?. L’interrogation muette était étranglée dans l’incompréhension. Elle qui n’avait pas fauté, elle qui avait toujours suivit les dogmes, n’écoutant que son devoir et Ses enseignements. Elle avait été la Lumière dans ses ténèbres, la Voix dans ses doutes. Et ce soir, elle l’avait abandonné à la solitude d’une vie partagée, d’une lutte interne perdue d’avance. Il faudrait trop peu de temps pour que la Chose ouvre le verrou. Bientôt, la Rose Noire cesserait d’être. Elle mourrait indubitablement, d’une mort bien différente de ce qu’elle imaginait jusque-là. Le rire. Je me suis trompée…
« Le… Monstre », une toux la fit taire un instant, tentant vaille que vaille d’assembler l’air suffisant dans ses poumons endoloris. « Le Monstre… dans ma tête. C’est… la Mère qui… l’a mis ». Elle était résignée, accrochant des yeux qu’elle ne parvenait à voir. « Je l’entends. Le sang… ». Sa voix fluette se perdait dans des halètements comblés. « Il est… gardien de… son peuple ». Et comme la Maîtresse tu périras pour sauver les tiens, car comme elle, tu ne craindras plus la mort.
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| | | Naukhel
Ancien
Nombre de messages : 759 Âge : 34 Date d'inscription : 29/10/2018
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 927 ans Taille : 2m13 Niveau Magique : Maître.
| Sujet: Re: Les Dieux qui ne disent rien [Prêtre de Kiel] Dim 23 Juin 2019 - 19:35 | |
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A ces mots, le prêtre tût son soupir. Cette enfant, qui était venue demander le pardon de la Mère des Tourments et qui, à présent, continuait de prendre des détours, taisant la vérité, protégeant sa faute. Quels étaient ces mots qu'elle préférait à la vérité ? Sa lame figée, ses doigts agrippés aux plaies ouvertes, le prêtre se pencha, légèrement, vers la petite daedhel, tel un père se penchant sur le berceau.
"Pourquoi me dire cela, dahlar ? souffla-t-il avec patience. Si tel est son cadeau, Elle seule sait sa place en son œuvre. Qu'y puis-je, moi, son humble servant ?"
Lentement, les griffes se mirent en mouvement, venant se planter, peu à peu, profondément, dans les sillons de la chair, y cherchant... Une expiation.
"L'Hurlante t'a tant offert... Et tu es venue chercher son pardon... Pourtant, ta faute, tu la tais encore. Qu'espères-tu ? Qu'elle accepte ton ignominie sans un aveu, et te laisse y retourner sans plus d'hésitation ?" susurra-t-il encore.
Calme... Arme vile, la lame reprit vie, crissant, tranchant, encore, entre la peau et le muscle de la tendre cuisse. Le prêtre savait prendre son temps, sans lacérer, déchiqueter, grossièrement, oh non ! En cet instant, il préférait la maîtrise de soi, en offrande à Kiel, en un rituel d'une patience infinie, malgré le corps à l'agonie, la chair suppliante... L'esprit, la Flamme, prévalait. Elle, souffrait, lui, se contenait. Par ses mots sibyllins, la daehdel l'avait perturbé, agacé, pour un temps. Face à tant de dévotion - malgré la retenue de la drow - il eut été impoli que de se laisser aller à des gestes plus... Grossiers. Se redressant, le prêtre eut comme un tendre sourire pour la suppliciée. Oui, malgré ses fautes... Elle demeurait une enfant dévouée à la Mère des Tourments. La lame quitta son fourreau sanglant, et sa dextre abandonna le flan tiraillé, lui offrant ainsi un instant de répit. Avec élégance, les longs doigts obscurs vinrent toucher la joue tremblotante.
"Dahlar... Sauras-tu être à nouveau digne de Son amour ? fit-il d'une voix basse, presque secrète. Pourquoi le nommer ainsi, s'il est Son Cadeau... ?"
Les yeux écarlates étaient allés à la rencontre des siens, la sauvant peut-être, ou l'emprisonnant, au contraire. Les sombres avaient tant de secrets... Venir clamer à la face des dieux pour ensuite s'en retourner semblait tellement... Impulsif. Dans quels abîmes te caches-tu, dahlar ?
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