[Portes bleues] Jamais deux sans toit [solo]

Hiver ~ Début quatrième ennéade de Verimios an 17:XI

Trois jours, quasiment quatre dans la poussière de la route.

Elle avait fait le voyage à cheval. Et autant de temps à tenter de faire cohabiter la monture avec Varg. Chien et cheval n'avaient pas la même endurance. Le cheval n'aimait pas vraiment que le chien puisse être sur son dos et le chien n'aimait pas vraiment courir à côté du cheval.
Cependant, il faisait froid. Loin de la ville, il était même devenu mordant pour celle qui avait vécu au cœur d'un volcan. A maintes reprise, la Grande Prêtresse eut l'impression que le froid n'était une tentacule passant insidieusement sous ses nombreuses couches de lainages et de soie. Ne la quittant quasiment plus.

Chaque combat avait laissé sa trace sur le corps de la daëdhelle. Le siège, avec ses monstres d'ombre et de froid n'y avait pas manqué.

Trois heures, bientôt quatre entre les murs qu'elle connaissait tant.

A peine arrivée qu'elle continuait d'avancer. Après avoir essuyer les reproches de son homologue pour n'avoir pas prévenu de son arrivée et par là même d'avoir rater l'occasion d'organiser un petit buffet d'accueil et de présentation. Toutes les occasions étaient bonnes à prendre pour faire la fête… Au lieu de cela, il dû réunir les pontes pour qu'elle puisse présenté son projet, en bonne rabat-joie qu'elle était.  Au sortir de la pièce, ils avaient convenu que cela pouvait être intéressant et que puisse qu'un tel pathogène était si proche d'eux, il pouvait être judicieux d'y trouver un contre.

A présent, elle était seule, avec son confident, son ancien élève, Reibe Gre'as'anto, Grand Prêtre de Kiran, mais bien avant elle.  

Il l'avait amené sur la Grande Place des Temples. Celle qui était surplombé par la cathédrale d'Uriz et celle de Teiweon. Celle qui n'avait que trois demeures. Trois magnifiques demeures, ou manoir, dont les façades étaient des démonstrateurs de la puissance et de la richesse de ses habitants. Il y en avait trois, et il a fallu qu'il en récupère une pour elle.

Cette bâtisse, elle l'avait connu. A l'intérieur, elle y avait récupéré deux corps : ceux des sœurs d'Yshahin. A la fin du siège, elle avait servi de morgue. La famille qu'elle avait abrité avait du mourir, comme beaucoup d'autres Dorniens.

Na'ri regardait les clefs que son ami avait mis dans sa main. Il n'était pas peu fier d'avoir pris cette opportunité. Il lui avait même fait le tour du propriétaire. Ici, un coin avec des coussins, là, un bureau pour être au calme. Avec le même enthousiasme, il tentait de faire partir un feu dans l'immense âtre qui réchauffer la cuisine mais pas que lui avait il promis avec de moultes clins d'œil. Mais elle n'y avait vu que des pièces vides habitée du bruit de leur pas.

" Reibe, je n'ai rien à faire ici…
- Faux, tu as tout à faire ici. C'est ta place.
- Je ne souhaites pas…
- …vivre seule dans une maison ? Je sais. Mais tu ne seras pas seule. Ce n'était pas toi qui as dit que tu voulais vivre avec ton amour ? Il vous faut de la place et, crois moi, cette maison ne sera jamais trop grande pour accueillir toute votre tribu ! Imagine toi… Combien en veux tu ? Trois ? Quatre ? Tu en as déjà un, les autres arriveront sans peine d'ici une petite dizaine d'année ! "

Bras croisés, gorge nouée, Na'ri tapait du pied. Varg s'éloigna d'elle pour aller se coucher devant le feu.

" Ne te donnes pas tant de peine, c'est inutile. Je sais que je suis ici grâce ou à cause de tes rapports. Une maison peine de TES rêves n'y changeront rien. " Le ton de la prêtresse était glacial.
" Je préfère ta colère à attendre l'annonce de ta mort.
- Comment cela ?
- Il serait temps que tu te rendes compte de ce que tu fais Na'ri.
- Je t'écoute. "

Alors elle écouta. Bien qu'elle n'avait pas le même point de vue sur ses faits depuis le siège d'Ellyrion, elle prit en considération les remarques du Grand Prêtre. Oui, bien évidement elle avait pris des risques. Mais au final, si elle avait vraiment voulu se tuer, elle n'était pas douée. Ceci dit, la dernière en date lui sembla la plus efficace… un accident ? Une erreur de manipulation ? Elle tentait les Dieux. Mais ils ne voulaient pas d'elle… Allait elle leur forcer la main ? Au fond d'elle-même, elle dû s'avouer qu'elle avait bien envie. Mais c'était les autres qui l'avait retenu. Ces autres qu'elle ne voulait pas détester. Ces autres qu'elle ne voulait pas faire de mal. Ces autres qui se faisaient chaque mois plus nombreux. Enfin presque.

Ce fut au tour du médecin d'écouter. Elle donna les nouvelles du Puy, raconta les évènements qui l'on conduit à trahir la confiance de Sagar. Elle lui raconta également les décisions qui l'on conduite à protéger son fils et à donner son utérus. Des enfants de son amour ? Il n'y en aurait pas. Pas ici. Pas issus de son sein. Elle parla aussi de la Reine, de ce qu'elle avait fait, de pourquoi elle l'avait fait, de ce qu'elle voulait faire. Il l'écouta jusqu'au bout.

Le temps avait passé. Le feu avait chauffé. Et ce fut temps, de présenter sa surprise. Dans le cliquetis de sa boucle d'oreille, Reibe la traina dehors. Le jardin était silencieux et glacial, comme elle. Ils marchèrent sous une galerie couverte. A chaque pilier, grimpait une plante différente. Mais pour le moment, il n'y avait que des bois. Dans quelque temps, elle les découvrirait. Comme elle découvrait à cet instant la présence des bains chauds et d'un hammam.