Sous veut nain - Magnus de Terresang

« A L'Ancien de Külmazad et Grand Maistre de L'Alliance Nanienne Arétane Ortheimoise du Creuset d'Acier, reçois mes dignes et humbles salutations...»

Voici comment il commença les premières lignes d'une missive qui se voulut, bien, bien plus longue. Trois jours, maintenant, que lui et ses frères avaient quitté la clairière où c'était déroulé un petit massacre en huis clos à la sauce locale. La pluie avait cessé et l'humeur générale était nettement remontée en flèche, conséquence directe des futures récompenses qui annonçaient bourses pleines et panses tendues. Néanmoins, même si la route était praticable, elle restait boueuse et traîtresse en certains endroits. Nimir n'avait point cessé de pester à l'instar des maçons humains qui avaient réalisé un tel mauvais-œuvre. Était-ce donc si difficile d'alignée quelques pavés ensembles et de les consolider afin qu'ils tiennent droit ?! Sans douter que non, même les naniots de son peuple pouvaient s'en sortir si on leur donnait les bonnes directives.

Alors qu'à l'horizon pointait la cité d'Arétria-Ville, chef-lieu du Comté, le Rouge avait ordonné une dernière escale afin de coordonner ses troupes. Son premier acte fut de mander du parchemin et du charbon ainsi qu'un étui étanche. C'est Portedeuil qui effectua l'action et qui prit même le soin de lui dresser un abri éphémère avec quelques bâches et un pupitre de fortune. Ainsi, il put décrire dans un khuzdul en patte de mouche, les raisons de sa présence et des siens en cette belle et bonne terre d'Arétria. Ajoutant une bonne dose de vernis à ses tournures de phrase, il savait d'expérience que le Bourgmestre de la Ville-Forge n'était pas avare de compliment, au contraire. Puis, c'est plus sérieusement qu'il s'épancha sur sa prochaine mission qui le conduirait à servir le Comte d'Arétria. Afin de mander quelques garantis, Nimir pria l'Ancien à bien vouloir prendre note de ce détail, et même plus, de bien vouloir leur accorder asile, si par futur incertain, devaient arriver à quelques problèmes. Puis, il clôtura son message, par la promesse de bientôt se rendre à sa Grand Loge et de prendre ses quartiers - du moins pour quelque temps, en cette belle ville qu'était Kulm.
Une fois terminé, Nimir confia la message à son plus efficace coureur, une naine, parmi les plus jeunes que comptait la Fraternité. Elle se rendit droite, filant en direction du Nord et des montagnes.

« Bien, allons y. »

Des cris s'élevèrent des gorges des lieutenants qui aboyèrent leurs ordres à la troupaille. L'acier des marteaux avait été poli, le cuir des rondaches et des armures proprement graissé et reprisé. Les armures nettoyées de la boue affichaient l'éclat terne de celles qu'on a trop utilisé, mais d'ont on prend moult soins. Chacun portant son maillet, Nimir répartit les useurs de manche long à l'arrière pour préférer les porteurs de boucliers à l'avant. La colonne se forma, par rang de trois sur une dizaine de longs et ainsi fièrement avança.
Quand ils arrivèrent aux portes de la cité, c'est Nimir qui prit la parole, d'une voix forte, haranguant les gardes alors que des dizaines et dizaines de paires de mirettes curieuses se tournaient vers eux.

« Ohla bonnes gens. La Flatelnité du Malteau se plésente à vos poltes. Nous nous lendons en ces lieux sous les oldles de votle Comte. Veuillez nous menel à lui, plèstement. »

L'or n'attendait pas.

Disposant d'une patience relative, Nimir n'était pas le genre de nain à apprécier attendre une centaine d'année afin de contempler le résultat de quelques expériences caverneuses d'on seul les nains avaient le secret. Depuis le Voile et la Jugement du Père, il avait perdu toute substance pour l'attente et comment pouvait t'il en aller autrement ? Mogar lui même avait manifesté sa fougue en intervenant directement dans le royaume mortel, quittant la gangue divine pour fendre le roc de l'existence. En fervent croyant, il ne faisait que suivre les préceptes du Créateur et regrettait que la majorité des siens s'en soient détournés. Mais les considérations pour les braises les plus faibles devraient attendre, car pour une fois, il fut presque surpris par la vitesse avec laquelle on répondit à sa requête.

Le bruit typique du martèlement des sabots résonna contre les murailles ; une troupe montée arrivait à sa rencontre et par le sainte balloche, c'était le Comte lui même qui chevauchait à sa tête. Un sourire carnassier naquit sous les moustaches épaisses du Rouge, qui, sans bouger d'un poil, resta de marbre face à la procession qui s'ébrouait sous ses yeux.
Le spectacle sanglant ne lui arracha pas une moue, car comme tout guerrier qui se respectait, il était coutumier du sang et des mouches ; à dire vrai, des compagnes presque aussi quotidienne que la merde et la crasse.

Ses compagnons ne manifestèrent pas plus de morgue, même si on s'agita un peu dans les rangs. En effet, chez les nains ils étaient peu nombreux à apprécier les chevaux ; carrures hautes et sabots de fer formaient une combinaison redoutable qui avait de quoi faire des dégâts. Rien ne valait un bon galioth, un bélier ou encore un fameux sanglier du Brissalion, des bêtes bien plus adapté à leur taille et leur caractère.
Ainsi, la tension retomba uniquement au moment ou le Comte et son escorte réduite transmettaient ses premiers ordres. Nimir lui, ne moufeta pas d'un broque et c'est Oda, qui se chargea de retransmettre les paroles du Comte dans un khuzdul sonore. Presque machinalement, les caporaux ou chef de groupe, se mirent en ordre, balancèrent les leurs et organisèrent déjà les premiers roulement quand à l'érection d'un campement. Ils choisirent de s'installer assez prêt des portes, sur le côtés Nord.
Manifestement, la Fraternité du Marteau n'en était pas à son premier tour d'essaie dans le domaine.

Quand il fut clair que la trentaines de guerrier seraient afférés à dresser leurs tentes et autres joyeusetés, Nimir, accompagné de Portedeuil et Oda, pénétra dans la cité et s'approche du Comte.

« Selon vos oldles votle Glandeul et comme convenu, nous voici tlois jouls aplès notle delnièle lencontle. Maintenant que nous nous letlouvons dans quelques conditions plus apte à la mise en oeuvle d'un contlact. Bien que vous souhaiteliez peut êtle vous accoldez quelques temps de comodités avant ? La chasse fut elle bonne ? »

A nouveau, le Rouge usait d'un fiel mielleux que son accent à couper au marteau réussissait à faire passer pour de la dévotion.

« Poul sûl votle Glandeul, poul sûl.» Réagit le nain, un poil trop conciliant avec le ton péremptoire du nobliau souillée qui lui faisait face. Il ne doutait pas qu'avec autant de viande, il puisse nourrir sa populace, mais en profiterait-elle vraiment ? Ou la sanglante serait consommé à l'occasion de fastueux banquet dans lesquels quelques seigneurs se rouleraient dans la boue, le ventre plus pansu qu'un tonneau de houille ? De cela, il ne pouvait rien présager. Aussi, Nimir dut se rendre à l'évidence, il appréciait peu la façon et le jugement du Comte, aurait-il dut lui conter les nombreuses batailles, le sang frais et les viscères, les routes pavées de frères qui s'étendaient dans ses souvenirs ? Non, peut être point, car comment un homme pouvait t'il comprendre ce que fusse l'existence d'un nain dans les lointaines terres inhospitalières du Septentrion ? Avait t'il, ne serait ce qu'une fois, humait l'odeur d'un nid de Kerka ? Pouvait t'il se targuer d'avoir occis un véloce Vulduman dans les entrailles du monde ? Pire encore, savait t'il l'effet produit par les fumerolles toxiques d'un Kroak en chasse ?
Rien de tout ça ne pouvait avoir atteint ces endroits du monde. En comparaison, la terre que foulait les hommes avait quelque chose de douce, presque naïve et cela, même si le sang y coulait aussi. De guerrier, ils n'avaient qu'à peine l'allure ici. Dans son pays, ce mot était inscrit à même la braise de chacun de ses habitants.

***

Le temps de la négoce s'acheva, et avec lui, rien de bon ne vint.
Des paroles qui furent échangés entres les murs de la cité, Nimir ne souhaita pas les répéter car il n'était pas toujours très bon de dispenser trop de vérité. Aussi, souhait t'il préserver ses frères et ses sœurs d'un futur peut ragoutant. Pas plus riche d'un souverain, ils leurs évitaient sûrement les cachots et la mort. Pas que cela ne les rebutent, au contraire, mais il existait bien plus belle fin que de finir dans les geôles d'un seigneur des hommes ou sur le gibet d'une place boueuse d'Arétria. Car, s'il avait dut être honnête avec les siens, c'est sans douter que les bruits des marteaux auraient résonné dans cette contrée ; os brisée et folle fumée, sang versée et mort violente, dans chacun des camps, voila ce qu'il voulut éviter.
Alors, c'est sans plus de mots, que quelques heures après son arrivée, Nimir revint au campement et proclama le départ, les nains n'avaient pu faire affaire avec les Arétans et il fallait maintenant ce hâter.
Sachant l'ire qui couvait dans les cœurs, ils leur faillaient faire vite, prendre au Nord et marcher de nuit s'il le fallait, car la Fraternité du Marteau s'en allait trouver refuge dans les Pyks d'Ortheim. Las bas, plus agréable foyé, plus confortable attention à leurs égards et plus aucunes brimades, une fois qu'ils auraient atteint Kulmazad.