Un p'tit bout d'Méca en Anaëh [SOLO]

L’aube pointait ses premières lueurs sur l’extrême est de Miradelphia. A l’autre bout du monde connu s’étaient perdus des hommes et des femmes qui n’auraient jamais pensé s’y aventurer un jour. Comme frappaient d’un étrange rêve commun, les marins se levaient les uns après les autres, encore groggy de leur soirée de la veille. Et comme pour s’assurer que tout ceci n’était pas une illusion, tous se retrouvaient à tour de rôle sur le pont afin d’admirer le paysage devant eux. Un sourire aux lèvres, ils voyaient alors la cité d’Holimion peu à peu prendre vie, voyant des êtres aussi bien majestueux que mystérieux déambuler devant eux.

A son tour, le Rokvenha rejoignit le bastingage et s’y accouda. Le visage encore marqué par le manque de sommeil et la gueule de bois. Ses iris coulèrent sur le port et ses oreilles se laissèrent bercer par l’ambiance locale. Une langue incompréhensible, mais ô combien douce à l’écoute et des chants d’oiseaux dont il ne pouvait que supposer l’apparence en laissant son imagination divaguer. Puis, les premiers mots des siens, avec leur accent si significatif et leur désagréable manière de mâcher les mots. “Ahoy Cap’taine.” A son tour, il rendit le salut et se redressa finalement.

Avant de quitter le traducteur la veille au soir, ce dernier avait donné son autorisation pour que les mécans puissent quitter leur boutre et visiter Holimion. L’annonce d’une telle nouvelle avait été accueillie avec joie et c’était une des rares fois où Rokvenha voyait les siens se lever aussi tôt après une soirée bien arrosée.
Tous les marins s’étaient préparés et finissaient de se regrouper sur le pont dans l’attente enfin de poser leurs pieds sur la terre ferme et surtout, dans cette cité inconnue et étrangère. Quand ils furent tous présents, le capitaine les fit se regrouper et donna alors les dernières directives. “Bon… L’gars. Les Elfes nous donnent l’droit d’aller dans leur cité.” Quelques démonstrations de joie se firent entendre parmi la foule de corsaires. Caleb leva les mains pour calmer les ardeurs. “Pas sans surveillance, sont pas fous héhé. Puis j’les comprends… Du coup. Ca va êt’ dit qu’une fois, pas deux pas trois, j’m’attend à c’que chacun d’ent’ vous ait bien compris car j’risque d’pas vous louper.” Son regard passa de l’un à l’autre, sévère et froid dans ses propos. “J’veux aucun souci avec eux, pas d’vagues, pas d’insultes, pas d’coups, pas d’vol… rien. On est pas là pour ça… Et même si vous n’pigez pas leur langue et qu’eux non plus, s’monter la tête servira pas à grand chose dans tous l’cas. Bien clair ?” A l'unisson, les marins répondirent au Capitaine leur accord. “Bien en c’cas…” Il se retourna et aperçut sur le pont, les miliciens qui attendaient patiemment la descente des marins. “Vous pouvez y aller.”

Ce fut une vague mécane, semblable à la houle de l’Eris, qui déferla sur Holimion. Les marins descendirent sur le pont, dans le calme, chacun racontant à l’autre ce qu’il ferait de sa journée et ce qu’il espérait découvrir ou dénicher. Un à un, les soldats elfes se détachèrent aussi pour suivre les différents groupes dans les ruelles de la cité portuaire. La population locale n’apprécierait pas de voir autant d’étrangers dans les rues, mais aucun soldat ne chercha à les empêcher de le faire, préférant peut-être éviter d’envenimer une situation qui ne le nécessitait pas encore.

Caleb, accompagné de Croqueuse et Rocaille descendit en dernier pour rejoindre le soldat traducteur qu’il avait côtoyé la veille. L’Elfe avait les sourcils froncés devant cette démonstration et sa remarque ne se fit pas attendre. “Rokvenha. Pour aujourd’hui, je ne dirai rien, mais dès demain, vous éviterez de tous partir dans la cité, vous le ferez par groupes. ” La réplique cinglante surprit le Capitaine, qui hocha simplement la tête avant de prendre une direction au hasard dans les rues. Ses yeux brillaient d’une lueur enfantine et curieuse, se posant sur chaque bâtiment, chaque individu et chaque objet inconnu comme avec l’envie d’en découvrir davantage.