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 Adonia Ypsilantis

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Adonia Ypsilantis
Humain
Adonia Ypsilantis


Nombre de messages : 52
Âge : 19
Date d'inscription : 26/02/2024

Personnage
:.: MANUSCRIT :.:
Âge : 28 ans
Taille
: 1m60
Niveau Magique : Arcaniste.
Adonia Ypsilantis Empty
MessageSujet: Adonia Ypsilantis   Adonia Ypsilantis I_icon_minitimeMer 28 Fév 2024 - 18:17


Identité
Nom/Prénom : Adonia Ypsilantis
Âge/Date de naissance : 28 ans / 4e jour de la 2e ennéade de Karfias, de l'an 993 du Xième cycle
Sexe : Féminin
Race : Humaine
Faction : Ithri'Vaan
Langue parlée : Péninsulaire, Oliyan et des notions d’Elfique.
Alignement : Neutre Bon
Liens notables : Heracle Yspilantis (frère)

Particularité :

C’est en s'approchant suffisamment d’elle qu’il est possible de discerner le léger voile qui recouvre ses yeux, leur conférant une teinte blanchâtre. En observant son regard, qui semble toujours chercher à se fixer sur un point précis, il devient évident pour quiconque lui fait face qu'elle souffre d'une cécité altérant sa perception de l'environnement. C'est de cette particularité qu'elle tire son surnom d'Adonia la Voilée ; sous entendant par ailleurs la soi-disant cause à effet de sa cécité survenue durant l'année du Voile.  

Métier : Mage de l'esprit
Classe d'arme : Aucune


Possessions & Equipements :

Dans les fastes du palais thaari familial, Adonia a peu à peu accumulé une multitude d'objets précieux, chacun pourvu d’une valeur plus ou moins grande. De beaux bijoux faits d’or, d’argent et surtout de nacres issues de l’affaire familiale agrémentent ainsi son coffre, qu’elle n’ouvre que lorsque le devoir l’impose. D’autres cadeaux parsèment ses malles où se blottissent quelques somptueuses soieries et vêtements, s’entassant les uns sur les autres. Robes, foulards et tout ce qui peut parfaire la tenue d’une jeune femme de son rang lui permettent ainsi de paraître, en toute circonstance, correctement et richement vêtue. Sa canne de bronze sculptée, à ses yeux l’objet le plus précieux de toutes ses possessions, est à la fois son plus fidèle allié pour l’aider à marcher, mais également son focaliseur, l’aidant à canaliser les flux d’énergie magique lorsqu'il lui faut pratiquer son art occulte auprès du maître Kaelthar l’illusionniste. Enfin, autre objet lui étant indispensable, sa pierre de vue qui n’est autre qu’une demi-sphère en verre lui permettant ainsi d’agrandir les lettres d’un manuscrit. Elle est obligée d’en changer tous les ans, pour obtenir une résolution toujours plus élevée.

Concernant les possessions immobilières, sa famille détient un palais à Thaar jouissant d'une belle vue sur le port et l'Olienne. Ce dernier est pourvu d'une quantité de pièces équivalentes en superficie et en faste aux autres résidences princières thaaris se trouvant dans la cité. Par ailleurs, la famille possède du côté maternel, un vaste domaine sur les hauteurs de Faldorn, surplombant également l'Olienne et les multiples champs de perlicultures en contrebas, faisant la renommée et la richesse de la famille. C'est sans nul doute pour cette raison que ces derniers font l'office d'une protection accrue par l'entremise d'une compagnie d'hommes d'armes acquis à la famille Ypsilantis-Rahmani depuis plusieurs générations.

Apparence :

Les impénétrables voies des Dieux ont sculpté sa beauté sans lui octroyer la capacité de pouvoir elle même s'en persuader. Condamnée depuis sa tendre enfance par une cécité s’épaississant d’année en année, Adonia serait bien en peine de se décrire. Quiconque croiserait en revanche son regard dans l'ombre d'une ruelle ou dans le faste d’un palais découvrirait une jeune femme, empreinte d'un charme incontestable. Sa silhouette svelte lui donne parfois l’air de se mouvoir avec grâce lorsqu’elle est chez elle, un endroit qu’elle connaît sur le bout des doigts. La donne est néanmoins tout autre s'il lui faut se rendre dans un lieu inconnu qu’elle doit appréhender à l’aide de sa canne. Sa poitrine, modeste, dessine une féminité douce que rehaussent des hanches aux courbes délicates.  Son visage, bien que pourvu d’une asymétrie comme tous les autres, parvient néanmoins à constituer un joli minois avec ses pommettes saillantes, ses lèvres fines et son petit menton. Parmi tous les aspects de son anatomie, il en est un qui se distingue particulièrement : son regard, tantôt semblant se rattacher à la moindre forme, tantôt s’affairant à sonder l’âme de son interlocuteur dès qu’il se fixe sur lui, lui confère toute sa singularité. Une chevelure longue, où les reflets dorés dansent avec des nuances plus sombres, évoluant vers une teinte châtaigne, achève de la distinguer au milieu de la population thaarie, dont la plupart ont la peau tannée et des crinières sombres. Issue d'ancêtres lointains originaires des contrées situées de l'autre côté de l'Olienne, elle affiche un léger hâle sur sa peau, mais conserve toutefois une certaine pâleur, résultat de ses nombreuses journées passées à l'abri des murs du palais familial.

  • Taille : un mètre soixante
  • Couleur des yeux : blanc
  • Couleur des cheveux/pilosité : Dorés et Châtaignes


Personnalité :

Enfant désiré et choyé par des parents et des nourrices aimantes, cet entourage protecteur lui a assuré une constitution psychique saine et solide. Dès lors est il vrai que de tous les traits de caractère nécessitant d’être mentionnés, la curiosité et l’appétence pour le savoir les dominent de très loin. D’aucuns, parmi ses proches, ne sauraient ainsi contredire l’idée que leur protégée préférerait assurément passer une vie de réclusion au sein d’un lieu d’érudition plutôt que dans n’importe quel autre palais thaari. La trahison de ses yeux n’a pas gâché son gout à l’apprentissage – notamment en lien avec la magie qu’elle tente d’appréhender –, bien qu’elle soit obligée d’utiliser une pierre de verre agrandissant les calligraphies présentes sur les manuscrits. Sachant éperdument que le temps lui est compté avant que la lecture devienne définitivement impossible, elle est une véritable boulimique de travail.  Particulièrement discrète, Adonia n’a pas l’aisance orale et l’aplomb de son frère qu’elle vénère plus que de raison, au point de souvent vouloir s’immiscer dans sa vie, pour le conseiller ou se confier ; si tant est que l’esprit de ce dernier ne soit pas trop embrumé par une trop forte consommation d’alcool. L’amour réciproque éprouvé pour ses deux parents ne l’empêche néanmoins pas de ressentir la déception et le désarroi de ceux-ci depuis que sa vision s’est altérée. Culpabilisant de ne pas être l’héritière capable de servir la famille comme une non infirme le ferait, elle recherche leur approbation au gré de ses séances d’apprentissage avec le maître Kaelthar, dans l’espoir d’obtenir d’eux une quelconque fierté et reconnaissance (ce qui est pourtant le cas). Percevoir un monde dont tous les contours sont flous, donnant ainsi la sensation de voguer au sein d’un brouillard permanent, n’est pourtant pas sans avantage. Ainsi perçoit-elle les choses différemment, et ses sens comme l’ouïe, le toucher, le gout et l’odorat, sont ostensiblement décuplés depuis les premières années où l’ombre s’est immiscée. Peu consciente de sa force, de sa résilience, ainsi que de sa détermination à s’affranchir de son infirmité, Adonia ne cesse d’impressionner ses proches par son besoin irrépressible de leur prouver qu’elle est tout aussi capable qu’une personne voyante. Cela peut se confirmer si on lui manque de respect ou remet en question ses capacités. Si Adonia est naturellement bienveillante et empathique, il n’est pas conseillé de se moquer d’elle, sous peine de faire éclore une tout autre jeune femme aux envolées ardentes.  

Capacités magiques :

Sa fascination pour la magie de l’esprit, frôlant l’obsession depuis le jour où elle assista à la démonstration d’un illusionniste, l’a amené à s’orienter dans cette voie. Au contact du maître Kaelthar, devenu à la fois précepteur, ami et guide, elle fit très tôt montre d’une certaine inclination à ce monde empreint de mysticismes et d’une rigueur répondant à son insatiable soif de savoir. Est-ce dû à sa cécité précoce ? Ses autres sens, bien plus usités, l’aident à ressentir peut-être mieux les choses et son environnement, tout comme ils lui permettent de canaliser les flux d’énergie de plus en plus forts au fil de son apprentissage. Afin de remédier aux inconvénients pouvant survenir lors de ses leçons, Adonia s’est vue offrir, par son père, une canne en bronze légère et sombre portant quelques indéchiffrables inscriptions sculptées. L’attachement à cet objet l’aidant à la fois pour marcher et pour pratiquer son art l’empêche de s’en séparer un seul instant. Au sortir de son apprentissage, elle a fini par acquérir un niveau correct lui permettant de pratiquer seule. Consciente des dangers que représentent une telle magie - celle de l'esprit - elle ne cherche à l'utiliser que pour faire le bien en aidant les personnes dans le besoin. Pour autant, elle a parfaitement conscience que tous ses pairs n'ont pas la même éthique bienfaitrice et souhaiterait par conséquent améliorer ses connaissances dans le but se protéger d'eux, ainsi que les autres.
Son rituel d'invocation consiste à remuer les lèvres, tout en murmurant des mots qu'elle se met à répéter afin d'obtenir la concentration nécessaire. Par ailleurs, elle tient fermement sa canne et érafle avec ses doigts, les quelques formes et symboles sculptés dessus.

Histoire

   An 1 - 6 ans…

   Une odeur iodée imprègne les lieux comme si les douces brises venant de l’ouest s’étaient parées des mille fragrances de l’Olienne. Ce parfum, l’accompagnant depuis qu’elle est en âge de ressentir les moindres effluves invisibles voletant dans l’air, est une source d’apaisement ; peut-être même la dernière. Il y a si peu de choses, autres que les livres, capables de lui fournir le réconfort escompté. Même les cris des goélands survolant le palais thaari des Ypsilantis ne sauraient la dépêtrer des mots prononcés par l’homme lui faisant face, à quelques pas ou peut-être plus, d’elle et ses parents. Elle préférerait assurément se perdre dans la lecture du dernier ouvrage rapporté par son père – provenant de son voyage en péninsule –, ou même rejoindre son frère Heracle s’exerçant à la voile à quelques encablures de là. Mais le souvenir de sa dernière virée dans la baie de la cité lui fait à nouveau ressentir la peur éprouvée lorsque l’eau salée s’est engouffrée dans sa bouche, puis sa gorge, puis ses poumons. La faute à quoi ? Au mât qu’elle n’a su voir et… esquiver.  
   — Chère enfant ? l’interpelle une énième fois l’homme venu les visiter depuis l’aube. « Saurais-tu me dire combien tu vois de navires amarrés sur le quai, juste derrière l’enceinte du palais ?
   L’hésitation est longue, peut-être même trop d’après les gestes nerveux de ses parents pour qui la réponse semble évidente à souhait.
   — Euh… trois ?
   Le silence recouvre à nouveau la pièce et Adonia réalise qu’elle a, une fois de plus, mal répondu. Après s’être râclé la gorge, le visiteur se disant à la fois guérisseur, érudit et sage, se lève de sa chaise avant de reculer de quelques pas, accaparant même de ce fait l’attention des serviteurs observant la curieuse scène à l’autre bout de la pièce.  
   — Combien ai-je de doigts levés, chère enfant ?
   Cette fois-ci, elle prend plus de temps pour distinguer les contours flous de sa main, presque confondus avec le mur couvert d'un voilage de soie sombre
   — Deux ?
   Le soigneur s’approche, la main pointant toujours en direction du ciel.
   — Et maintenant ?
   — Quatre, corrige-t-elle en devinant cette fois-ci les fameux doigts boudinés.
   La petite toux exprimée par l’homme vient interrompre les dernières secondes de silence. Si elle aimerait comprendre la raison pour laquelle cet illustre inconnu l’a mis autant de fois en difficulté, par ses questions, elle est aussitôt priée de quitter les lieux. Pourtant, une fois franchie la porte de cette salle où résonnent habituellement les harmonieuses mélopées des duduks, Adonia s’adosse à l’un des battants, et tente d’y plaquer son oreille pour percevoir ce que ses yeux ne semblent plus en mesure de discerner. « La vue de votre fille est déclinante, leur explique-t-il. Elle continue de voir les formes et les couleurs, mais il est fort probable qu’avec le temps, les ténèbres finissent par devenir son lot quotidien. Je crains de ne point pouvoir me rendre plus utile, hélas, et je ne peux que vous convier à prier pour elle ». Le mécontentement s’ensuivant est celui de son père, Demetor, hardi navigateur et brillant commerçant. Sa gronde s’envenime, malgré les tentatives d’apaisement prononcées par sa mère, Elvira. « Notre fille ne sera pas infirme ! », clame-t-il haut et fort. « Vous m’entendez ? Sa vie ne sera pas celle d’une impotente ! Comment pourra-t-elle songer à se marier et devenir mère ? Cela n’arrivera pas, j’irai jusqu’en Anaëh s’il le faut ! ». Sur cette ultime promesse faite par son géniteur, sa mère, plus douce et consciente de la réalité, réclame le silence, « Existe-t-il un lien avec cette pénible nuit ayant duré près d'un mois ? demande-t-elle. Il s'est passé tant de choses étranges durant cette période que je redoute désormais que notre enfant ait elle même reçu un châtiment divin. Qu'en dites-vous, mestre Alpharius ? ». Ce dernier, après une dernière toux grasse, répond enfin, « Peut-être, je ne saurai vous répondre. Si tel était réellement le cas, je ne pourrais seulement vous affirmer qu'il serait bien vain d'essayer d'interpréter les véritables desseins des Dieux. Peut-être, alors, qu'avec le temps, votre fille comprendra pourquoi ce fut elle et non un autre...»

    Faut-il réellement voir l'oeuvre des Dieux ? Un châtiment divin venant punir l'innocence même ? Dès ce jour, lorsque l'évocation de ce dernier Voile fut évoquée par sa mère, Adonia n'eut de cesse de percevoir un lien entre son tourment et la folie qui plongea le monde dans une fièvre incroyable. Est-ce pour cette raison qu'on lui attribua le surnom de "voilée" comme le fin linceul semblant recouvrir ses yeux ? Oui, la petite Adonia privée de ses yeux se fit appeler Adonia la Voilée par son frère, puis, discrètement par les serviteurs du Palais jusqu'à ce que ce sobriquet franchisse les murs... Ainsi fut elle perçue comme une relique mystérieuse de cette époque et une trace d'un passé que nul ne souhaiterait voir se réitérer. Aux soupirs et murmures contribuant à son lot quotidien, d'autres allusions ne manquèrent pas de l'accompagner. Car il est vrai, que certains parmi les plus marqués par cet épisode, la prirent presque pour une envoyée de la déesse Tyra en personne, revenue d'un monde souterrain ou d'un océan si obscur que voir n'est plus d'aucune utilité...

*
**

   11 ans…

   La grande salle du palais Ypsilantis est aussi pleine que les panses bien dodues des convives. Ces derniers, venus de toute la cité et même d’au-delà pour célébrer la dernière fructueuse affaire familiale, n’ont pourtant d’yeux que pour une seule chose n’ayant rien à voir avec les propriétaires des lieux. Car un homme, au centre de la pièce, accapare toutes les attentions où le silence est d’or et les regards d’enfants, plein d’admiration, se mêlent à ceux de leurs parents, curieux et craintifs. C’est que l’enchanteur à la barbe fournie et aux yeux aussi vifs que semblant capable de sonder l’âme, maintient son public en haleine grâce à des illusions produites par quelques artifices. Assise au plus près, parmi ceux de son âge, Adonia semble pourtant faire partie de ses plus récalcitrants spectateurs. Car si elle perçoit les couleurs et les formes, elle ne pousse jamais de cris ni n'applaudit lorsque ses incrédules voisins le font. Est-ce parce qu’elle ne réagit jamais comme les autres et que son visage paraît être éternellement figé dans la glace qu’il se fait presque un devoir de remédier en s’efforçant d’illuminer cet agréable minois ? L’illusionniste nommé Kaelthar paraît dès lors se concentrer uniquement sur elle, espérant sans-doute, obtenir la réaction tant attendue. Le silence recouvre l'assemblée et le mage pénètre dans son seul esprit. Le sorcier fait alors éclore une créature aux cris terrifiants et dont les couleurs sont si nombreuses qu’une vie entière serait sans nul doute insuffisante pour toutes les dénombrer.  
   Mais lorsque la fillette esquisse enfin un premier sourire, le magicien sait qu’il a réussi là ou peu de monde parvient encore à triompher. Il ignore ce qu’il vient réellement de provoquer chez elle et saurait assurément dire à quel point il vient de changer la vie de cet enfant resté impassible presque tout du long. Lorsque cette dernière s’avance, une fois la prouesse et la fête terminée, et qu’elle cherche à obtenir son attention, Kaelthar lui sourit et accepte même de serrer la main tendue dans sa direction.
   — Est-ce que cela vous a plu, belle demoiselle ? la questionne-t-il aussitôt.
   — Je savais que toutes ces choses n’étaient pas réelles contrairement aux autres, avoue-t-elle. Sauf ce que vous m'avez fait voir, à l'intérieur de ma tête. Cela, oui, je l'ai bien vu.
   — Votre esprit n’est point facile à tromper, je vois.
   — Allez voir mon grand frère Heracle pour cela, n’hésite-t-elle pas à dire. J’y parviens déjà et me joue de lui presque constamment.  
   — Il faut être prudent, jeune demoiselle, avec l’utilisation que l’on peut faire de l’illusion, si c’est là bien ce que vous faites avec votre aîné.
   — Il n’y a pourtant rien de magique dans ce que je lui fais croire, mais… maintenant que je vous ai vu, je crois que j’aimerais réussir à faire comme vous. Pourriez-vous m’apprendre à créer de si jolies formes et couleurs ? finit-elle par lui demander, les yeux cherchant à transpercer l’obscurité régnant désormais dans la pièce. Elles étaient les premières que je voyais depuis longtemps et…  
   — …La magie de l’esprit est un art, demoiselle. Et comme tout art, il faut bien une vie entière pour espérer, ne serait-ce que le maîtriser un tant soit peu.  
   — Enseignez-moi, s’il vous plaît. Je suis bonne élève, assure-t-elle. Bien meilleure que mon frère qui préfère la mer.
   — Qui sont vos parents ?
   — Ceux-là même qui vont ont fait venir ce soir. Demetor et Elvira Ypsilantis, précise-t-elle. Voudriez-vous m’apprendre, alors ?
   — S’ils acceptent…
   — Ils seront heureux de savoir que pour une fois, ça soit leur fille et non leur fils qui leur demande quelque chose.


*
**

   20 ans...

   Ici, les odeurs ne sont pas les mêmes que celles de Thaar, de ses rues bondées, de son port et de la demeure familiale. Il y a toutes ces fragrances en provenance de l’orangeraie se confondant à celles de l’océan, puis des fleurs exotiques garnissant les jardins par milliers. Il n’est pas obligatoire de voir pour savourer. Il lui suffit de sentir ces effluves, caresser ces pétales et goûter ces raisins pour réaliser qu’elle est aussi chez elle. Dans ce Palais de Feldorn situé à l’écart de la cité, sur les hauteurs surplombant l’Olienne, tout est si différent. Celui-ci est encore habité par une partie de la famille de sa mère, les Rahmani. Le chef des lieux – son grand-père nommé Javid – administre son domaine d’une main de maître, assurant ainsi encore et toujours ce qui a fait sa fortune en allant même jusqu’à devenir une grande figure de Thaar, dans ses plus jeunes années : les perles. Bien qu’aujourd’hui sur ses vieux jours, il veille désormais à transmettre le flambeau à sa fille aînée, Elvira, et l’a mandé de venir avec sa seule fille pour l’assister dans un dernier marché auprès d’un potentiel futur partenaire. Pour cette occasion, le palais Rahmani s’est paré de ses plus beaux atours pour impressionner son visiteur d’un jour. C’est du moins ce qu’Adonia s’est imaginée lorsque les serviteurs se sont empressés, depuis l’aube, à dresser tables et décors somptueux. Ces derniers ne sont que des formes vagues et toujours un peu plus floues, mais elle n’a cessé d’arpenter la palmeraie attenante tout en ayant la sensation de participer elle-même à cette surprenante danse. Elle n’a pas pu voir, non plus, l’arrivée du prestigieux invité dont la description faite par sa servante, lui provoque une crise de rire. Ce ne sera que plus tard, au beau milieu de la soirée, que ce dernier finira pourtant par s’estomper.
   Il est inutile d’avoir besoin de le voir distinctement pour savoir de quel type d’homme il s’agit. L’odeur suffit à elle-même pour lui donner la nausée et la priver d’appétit durant le dîner. Le marchand, s’en venant d’Eofel, révèle bien des nuances qu’elle n’aurait jamais cru ressentir un jour ; celles-ci allant de l’excrément d’on ne sait quel animal, à une crasse profondément ancrée, en passant également par l’acidité rappelant celle d’une vinasse pouvant venir à bout de n’importe quel foie.  Elle pourrait en rire si seulement les paroles de cet homme ne venaient pas trahir les véritables intentions de cette entrevue savamment orchestrée. Ce Nastaran Zandi ne fait pas dans la dentelle, puisque ses manières sont aussi subtiles et délicates que ses tentatives de marchander. Et s'il ne fait aucun doute que le partenariat rapporterait gros à sa famille, elle ne peut ignorer toutes les courbettes inhabituelles de son aïeul, visant constamment à la mettre en avant. Dès lors que le dernier rot se met à retentir, toutes les attentions se portent sur elle, l’obligeant ainsi à conserver le visage tant réclamé par sa mère.
   — Peut-elle enfanter ? demande le marchand.
   — Elle est en âge, oui, répond son grand-père s’étant visiblement attendu à la question. N’est-ce pas, Elvira ?
   — Oui, confirme cette dernière, ferme. Nous vous aurions pas fait venir si elle n'aurait pas pu l'être.
   — Hmmm... Est-ce que mon fils pourrait avoir la même infirmité ?
   — Non, je ne pense pas, toussote le vieux Rahmani.
   — Peut-elle au moins me voir ?
   Le silence gagne soudainement la petite assemblée.
   — Je puis répondre à votre question si vous m’en faites directement la demande, mon seigneur, lui répond-elle poliment. Je vous distingue malgré la pénombre, grâce aux flammes vous permettant également de voir le contenu de votre assiette. Mais si vous m’en demandez plus, je crains de vous décevoir en vous apprenant que votre visage me semble aussi identique que tous ceux qu’il m’a été donné d’admirer du temps où je voyais encore.
   — Vous vous payez ma tête ?
   — Ce n'était qu'un compliment, messire, se retient-elle de sourire. Ma fortune personnelle ne serait assurément pas suffisante pour m'offrir votre tête semblant si pleine et bien pourvue.
   — Que sait-elle faire ? réclame-t-il auprès de ses proches.
   — Elle joue du duduk à la perfection, répond le seigneur Rahmani. Et elle chante, aussi, avec une voix pouvant rendre jaloux les dieux.
   — J’apprends aussi les sciences occultes auprès d’un puissant mage de l’esprit nommé Kaelthar. Celui-ci m’enseigne notamment à pénétrer les pensées et les manipuler à ma guise…
   — Adonia, l’arrête sa mère.
   — Je pourrais l’enseigner à votre fils, mon seigneur, poursuit-elle. S’il est vrai que je ne peux voir, je pourrais néanmoins parler, puisque les dieux n’ont apparemment pas jugé utile de me priver de la parole.
   — Vous devriez apprendre à votre fille à garder sa langue et à ne parler que lorsqu’on lui en donne l'odre ! gronde le marchand. Je refuse de l’épouser et vous assure qu’aucun autre homme ne s'y risquera. J’aurais pu faire preuve de pitié en la prenant, mais là…
   — Je m’excuse de vous avoir fait perdre votre temps. Mon frère serait sans nul doute plus disposé à épouser l’une de vos sœurs si vous le désirez.
   Trop fâché pour poursuivre, le marchand s’en va avec sa suite, ne laissant plus que la famille Rahmani et Ypsilantis, en plein de ce somptueux jardin.
   — C’était le quatrième homme, Adonia, aboie sa mère en lui assénant une puissante gifle. Ce n’est pas ta cécité qui t’empêchera d’avoir un époux, ma fille, mais ton caractère. Même ton frère ne se serait montré aussi éhonté…
   — Votre fils aurait tranché la gorge de cet homme s’il s’était trouvé autour de cette table, mère, prononce-t-elle. Ne pas être en mesure de voir distinctement un visage n’est pas une raison pour m’obliger à embrasser n’importe lequel. Je suis dévouée à la science de l’invisible et de l’esprit, c’est là tout ce qui me permet de continuer à arpenter ce monde qu’il m’est impossible de percevoir dans ses moindres détails. Je vous en supplie, ne m'en privez pas...  
   — Tôt ou tard, Adonia, tu devras assumer tes responsabilités, proteste son aïeul. La périclité de notre famille ne pourrait dépendre uniquement de ton aîné. Le sang des Rahmani coule dans tes veines, que tu le veuilles ou non ; ne l'oublie jamais...
   Elle ne put l'oublier, d'autant plus lorsque ce grand-père, tant admiré, poussa son ultime soupir quelques mois plus tard, lors d'une soirée identique ; mais en compagnie cette fois-ci de jeunes femmes bien trop vivaces pour son si vieil âge. C'est à cette occasion que sa mère, l'héritière des Rahmani prit sa suite et qu'elle fut épargnée de devoir répondre à de nouvelles sollicitations. Ne dit-on pas, après tout, que ceux que le malheur n'abat point, il les instruit...?

*
**

    Le 2 ième jour de la première ennéade de Bàrkios, second mois de l'Automne
An 21 du XIe Cycle - 28 ans...


   En ce lieu, l’odeur est toute particulière. Malgré les volutes d’encens censées la masquer, celle prédominante se trouve insidieusement dans chaque recoin, au moindre tournant. Elle attend sagement et recouvre les formes noires, sans visages, allongées sur ce qu’elle imagine être des lits. Ces ombres informes émettent des gémissements, sorte de complaintes renforçant la sensation que l’endroit n’est qu’une ultime demeure pour les êtres sur le point de partir. Bientôt, une fois qu’ils auront rejoint les Dieux, leurs corps entreprendront leur lente décomposition et la chair putréfiée s’ajoutera à cette odeur supplantant toutes les autres ; de la mort, oui, l’odeur de la mort…
   Tandis qu’elle avance péniblement dans le sillage de son maître Kaelthar, elle reconnait ce lieu maintes fois visités. L’Hospice de Thaar est sans-doute l'endroit le plus craint de toute la cité ; non seulement à cause de sa léproserie, mais aussi parce qu’y venir, c’est prendre le risque de se confronter à l’indicible. Ne pouvant voir toutes les horreurs, à défaut de les sentir, Adonia n’éprouve plus de craintes depuis des années à arpenter ces murs. Elle pénètre avec son maître dans une petite chambre, aux côtés de soigneurs et s’avance, à l’aide de sa canne, jusqu’au chevet d’un lit couvert d’une fine silhouette. Aux gémissements que cette dernière émet, elle discerne le petit âge ; peut-être la dizaine. A l’odeur, une nouvelle fois, elle réalise que la maladie a commencé sa vilaine besogne depuis bien des mois.
   — Laissez-nous, réclame Kaelthar à leurs guides.
   De son côté, sa seule main libre vient toucher le front brûlant de l’enfant tout en s’en approchant.
   — Ne t’en fais pas, lui chuchote-t-elle à l’oreille. Bientôt, tu ne sentiras plus rien.
   — Mais j’ai tellement mal, répond le garçon en ne parvenant pas à rester en place.
   — Es-tu prête, Adonia ? lui demande le mage s'installant de l'autre côté.
   — Bientôt,  Kaetlhar, lui répond-elle.
   — La barrière mentale de l’enfant ne sera pas difficile à franchir, l’informe-t-il.
   — Il n’en a plus, finit-elle. Il a seulement peur et voudrait arrêter de souffrir. Cela ne… durera pas longtemps.
   — Qu’est-ce qui va arriver ? murmure le garçon, s’efforçant de rester conscient.
   — Nous allons t’aider, prononce Kaelthar.
   — À quoi ?
   — À ne plus avoir mal.  
   — Comment ?
   Le temps défile et la concentration finit par atteindre son point culminant, jusqu'à lui faire ressentir le flux d’énergie transitant enfin dans sa main, puis dans son bras avant de s'emparer peu à peu de tout son être. Ses lèvres s'articulent et quelques murmures inaudibles parviennent à se frayer un chemin. Les mots, ceux qu'elle utilise pour son rituel, s'articulent sous forme de petits bruissements comme le serait un filet d'eau. L'état second est atteint, enfin. Son enveloppe corporelle n’existe plus. Elle est entrée, ça y est. Son maître n’est pas loin, non plus. Sans lui, elle n’aurait pas été certaine d’y arriver seule. Pas encore, du moins… Mais elle fait ce qu’il lui a appris à faire. Elle se met en action et parvient à trouver la source de la souffrance ; cette maladie qui gangrène l’enfant, le dévorant de l’intérieur. Elle n’est pas là pour l’enlever et le guérir. Non, elle s’évertue seulement à créer, dans l’esprit du garçon, une protection pour qu’il ne ressente plus de douleur. Elle lui fait oublier qu’il souffre, pour ses ultimes instants de vie. Kaelthar, lui, plonge l’enfant dans un rêve où il serait allongé sur une plage. Elle se met elle-même à entendre le bruit des vagues et à ressentir le souffle chaud des rayons sur la peau. Si cela ne semble durer que quelques minutes dans la vie réelle, le temps dans cet esprit, paraît quant à lui être bien plus long. Empêcher la douleur de trouver son chemin jusqu’à la conscience de l’enfant est une épreuve aussi harassante qu’indispensable. Le souffle du petit garçon devient alors plus lent et bien qu’incapable d’apercevoir distinctement son visage, elle imagine celui de son frère à sa place…
   — Adonia ?! l’interpelle le mage.
   Sa dernière pensée l’a fait dériver et l’énergie utilisée pour redresser la barre est colossale. Elle n’est même plus certaine de tenir, mais elle refuse de capituler et persiste jusqu’à ce que l’enfant pousse enfin son ultime soupir, l’esprit apaisé. Le retour dans la chambre est brutal. Son visage est recouvert de sueur et son corps tout entier semble aussi raide que la canne tenue fermement entre ses mains.
   — Ne laisse pas tes pensées te détourner de ton objectif, lui rappelle Kaelthar. Mais tu as correctement réagi.
   — Je ne suis plus votre élève.
   — Un mage le reste pourtant toute sa vie, lâche-t-il en caressant délicatement la main de l’enfant immobile et mort. Je ne serai pas toujours là pour te le dire, il te faudra…
   Une présence fait soudainement irruption dans la petite pièce. L’odeur du poisson parvient à détrôner celle de la mort, pour un bref moment. C’est suffisant pour l’informer qu’il ne peut s’agit que de Nasri, l’un des serviteurs du Palais familial.
   — Maîtresse Adonia, maîtresse… souffle-t-il en essayant de recouvrer sa respiration.
   — Parle Nasri, que se passe-t-il.
   — Une terrible nouvelle, maîtresse… Vos parents, maîtresse.
   — Qu’ont-ils ?!
   — Morts, maîtresse, avoue-t-il. Tous les deux… Ils sont… morts.
   — Heracle ?! Où est mon frère ?
   — Il est informé, maîtresse, s’époumone-t-il à nouveau. Je dois vous ramener au palais, il y a peut-être danger…
   — Allons vous mettre en sécurité, Adonia, ajoute Kaelthar. Je resterai avec vous...
   — Non, protégez Heracle, lui dit-elle. C'est sur lui que reposent tous les espoirs de notre famille...
   — Détrompez-vous, Adonia, murmure son maître en l'aidant à se remettre debout malgré la fatigue. Oui, détrompez-vous...


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Dernière édition par Adonia Ypsilantis le Mar 12 Mar 2024 - 8:26, édité 9 fois
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MessageSujet: Re: Adonia Ypsilantis   Adonia Ypsilantis I_icon_minitimeJeu 7 Mar 2024 - 18:39

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MessageSujet: Re: Adonia Ypsilantis   Adonia Ypsilantis I_icon_minitimeMar 12 Mar 2024 - 11:28

Et une gentille dame en IV, une !


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Journal de bord ~ Pour archiver tes liens de RP qui content l'histoire de ton personnage {Vivement conseillé}.
Et enfin, si tu as des question, n'hésite surtout pas à demander l'aide d'un parrain, ou à tout simplement poser tes questions dans la partie créée à cet effet.

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MessageSujet: Re: Adonia Ypsilantis   Adonia Ypsilantis I_icon_minitime

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