La conjonction des abberations - Ranadath

3ème jours de la 1ère ennéade de Verimios d'Hiver, an 21 du XIème cycle
Fosses de Gilgamek, Thaar

Dire quel les Fosses dégueulaient, était un euphémisme.
En cette rude et roide soirée d’hiver, aucunes des personnes présentes ne pouvaient sentir la morsure du froid ; tous agglutinés les uns sur les autres, chacun des participants à cette pittoresque soirée de liesse populaire, transpiraient et poquaient à des lieux à la ronde. Dans l’arène troglodyte, l’air ne circulait pas et une moiteur ambiante s’était répandue, s’échappant des milliers de souffles qui composaient cette foule hétéroclite. Certains s’empiffraient, d’autres buvaient, quelques uns devaient même être entrain de se fourrer les uns dans les autres avec bonne joie, en d’autres mots : une bien belle sauterie. Un observateur extérieur aurait put ressentir le pouls de cette immonde masse et la comparer à celle d’une bête sauvage s’apprêtant à la curée. Mais l’hallali n’avait pas encore sonné, car tous patientaient dans l’attente de l’unique combat qui viendrait déchainer les passions.
Dans les tribunes et les loges caverneuses qui accueillaient le gratin souhaitant se démarquer de la plèbe, on attendait aussi. Perché dans son nid d’aigle, le maître des lieux posait un regard torve et déformé sur cet amas de chair qui lui servait de public.


Il ressentait une grande haine envers chacun de ces êtres, comme si tous étaient responsable de son état ; son souffle rauque trahissait son irrépressible besoin d’écraser le moindre crâne qui passerait à sa portée, hors, aujourd’hui, il disposait à peine de la force nécessaire pour pousser son étron en dehors de sa cavité. Ayant longtemps souhaité la mort, il l’attendait maintenant comme une vieille amie, se contentant de se délecter du sang qu’on répandait en son honneur sur la lice. A l’occasion, quelques suces queutards lui rendaient visite et l’aguichaient avec la force de celles se sachant payées pour effectuer un sale boulot ; jamais les mêmes, car peux nombreuses étaient les élues à souhaiter retenter l’expérience. Son existence était devenue morne, sans grande valeur et il se savait intimement être le pantin de gens plus riche et valide qu’il ne l’était. Réduit à l’état d’épouvantail qu’on agitait sans vergogne pour augmenter le prestige et les positions de quelques sombres nobliaux qui n’avaient jamais gouter le sable avec les dents. Non, Gilgamek n’aimait personne, ou presque. Le seul durgazdawi qui trouvait un peu de valeur à ses yeux n’avait plus donné signe de vie depuis des lustres. Depuis que Salfaryl Sang d’Argent avait rejoint les abîmes de ce monde, lui, n’y trouvait plus aucuns réconforts.

Hors, il accomplissait son devoir, et son devoir du jour était de faire monter la pression, afin que les paris se déchainent et que les côtes croissent. Au milieu de l’arène, se trouvait un être hybride, efféminé et pour qui il ressentait plus que de l’aversion. De son perchoir, il lui fit un signe difficilement compréhensible mais qui ressemblait à un salut. Il saluait la un mort en devenir, car ce rejeton aux esgourdes effilées, affronterait bientôt, la terreur des Fosses, Grobadum.

Le jour j était enfin arrivé. Ce jour qu’attendait avec impatience la foule qui s’était agglutinée dans les tribunes de l’arène troglodyte. Ce fameux jour où, encore une fois, le sang et la sueur viendront s’écouler sur le sable de la scène pour leur plus grand plaisir.

Ranadath s’était rendu au rendez-vous comme si pour lui, ce n’était qu’un jour ordinaire. Il avait parcouru les ruelles du quartier désigné et avait même entendu quelques badauds parler de ce combat à venir. Rien ne semblait le perturber en cet instant, ou du moins, rien qu’une vermine vaanie ne pouvait déceler. Pour les habitués des guerriers eldéens, le jeune esclave pouvait paraître perturber derrière son masque froid et angélique. Ses paupières clignaient par intermittence et ses doigts s’ouvraient et se fermer comme pour refreiner des envies passagères. Quelque chose semblait déranger le combattant, il n’était pas dans un état normal, irrité, colérique et fatigué et bien qu’il s’efforce de le dissimuler derrière un visage impassible, l’arme qu’il est se sait dans un état étrange.

C’est dans ce drôle d’état d’esprit que l’hybride rejoint alors l’arène. Après s’être préparé, en ayant pris soin de retirer les quelques vêtements non nécessaires à son combat pour ne garder qu’un pantalon de cuir renforcé de quelques plaques de métal.
Il s’éloigne ensuite un instant de la cohue et y trouve une place à l’écart. Là, l’eldéen entame son habituel rituel, s’installant sur les genoux, le torse meurtri de cicatrices et autres marques bien droit, les yeux clos. Sa main droite parcourt lentement son avant-bras gauche et le bout de ses doigts pianotent sur des tatouages sous forme de scarifications. Il en appel au Père des Batailles, à celui pour qui sa Flamme consume son corps. En silence, il le convie à porter son regard sur lui en cet instant, à contempler le spectacle à venir et à se contenter du sang prochainement versé en son nom et sa gloire.

Après de longue minute en silence, l’eldéen réouvre les yeux. Son regard fatigué cherche dans les environs un instant, puis il se relève enfin. Décrochant la broche qui était à son poignet sous la forme d’un bracelet, il vient finalement nouer sa chevelure bicolore dans un catogan soigné. Puis il avance, le pas lent et assuré, traversant les couloirs sous les directions données par les habitués des lieux.

A mesure qu’il avance, il entend la foule crier, les couloirs fait de pierres résonnent et tremblent sous le poids des conviés et leurs acclamations. Ce même résonnement tape aux tempes du guerrier et vient lui saisir le cœur. Sa Flamme crépite au son des tambourinages comme le feraient une marche martiale accompagné des sons de la guerre. Sa flamme s’embrase de plus en plus jusqu’à atteindre son paroxysme à l’instant où il pénètre sur le sable froid.

Là, au centre de l’arène. Il pivote sur lui-même. Ses yeux hétérochromes observent. Une foule difforme se dresse tout autour de lui. Les cris ne sont plus que de lointains murmurent en cet instant où il semble être lui-même loin de tout. Il ne remarque pas le salut du Maître des Lieux et ne le rend pas. Non. Il pivote, observe, puis finalement son regard se porte vers une ouverture de laquelle il présume sortira le monstre qu’on lui a décrit.

L’immortel reste ainsi figé, laissant ses yeux s’habituer aisément à l’obscurité des lieux grâce à son gêne eldéen. Il patiente, mais sa posture est déjà prise, sa garde déjà montée et ses appuis parés à agir instinctivement.

« Le Destructeur pas regarder ici. Toi, seul.»

Les borborygmes qui traversèrent les lippes de l’infirme ne furent entendus que de lui seul ; de son privilégié perchoir, il avait put observer les simagrées protocolaires propres aux combattants du Vatna. Par le passé, il fut témoin de se spectacle à de nombreuses reprises , lui qui avait affronté, combattu et vaincu des dizaines de ses spécimens dans les divers et sanguinolents corrals qui pullulaient en Ithri’Vaan. Ce genre de requête divine n’avait jamais reçu de répons, point même quand transpercé par l’acier et le fer, les noirelfes rendaient derniers soupirs se vouant toujours à la même entité païenne. Gilgamek savourait déjà le spectacle à venir et voir ce freluquet périr sous les coups de l’abomination qu’il hébergeait dans sa ménagerie lui procurait un grand bonheur ; depuis son triste dernier combat qui l’avait laissé à jamais amoindri, il détenait une dent et une sacré, envers toutes les engeances des terres sombres.

En contrebas, le paroxysme du délire fut bientôt atteint. Quand le combattant du moment avait pénétré dans l’enclos guerrier, il récolta autant de jurons que d’ovations, le public se déchaînant sans demander son reste en fonction des différents paris pris. Les relents émanant de la foule avait de quoi vous retourner l’estomac, mais chacun des êtres présents dans cet enfer de peau, de poils et de sueurs n’avaient plus qu’une idée en tête : faire fructifier son pécule en espérant devenir assez riche pour se sortir de la misère qui leur collait aux chausses. Cette idée n’avait rien de très pragmatique, rare était les élus chanceux à se dresser dans cette position à force de mise ; on se retrouvait plus souvent sans le sous et plus proche des caniveaux encore. Sous cette fausse banderole, se cachait en réalité, la soif de sang et de spectacle, une appétence non dissimulé pour le meurtre légale et les effusions en tout genre. En somme, le quidam cherchait à défouler ses propres frustrations par le biais de plus valeureux prêt à risque leurs vies.
Mais ces considérations, n’étaient sûrement plus la principale source d’ennuis de Ranadath en cet instant, lui qui s’attendait d’un moment à l’autre, à être confronté à la bête.

Ceux ayant déjà put assister à un de ses combats, ne furent pas surpris d’entendre les premiers hurlements. Ils jaillirent du tréfonds de la terre, résonnant dans quelques mystérieux couloirs souterrains, véritable écho guttural et lugubre se réverbérant sur les parois. Lointain dans un premier temps, ils se firent de plus en plus menaçants, viscéraux et profonds. A mesure qu’ils augmentaient, les clameurs résonnaient de concert, la foule entamant un puissant chant polyglottique, répétant un machinal mantra.

« Grobadum ! Grobadum ! Grobadum ! Grobadum ! Grobadum ! Grobadum ! Grobadum ! »

Il arrivait, terrifiant et monstrueux et son cri pouvait se faire entendre de partout. Par un habile système de boyaux conçu à l’occasion, le son était transporté partout et à différentes intensité. L’hybride devait pouvoir le ressentir dans sa chaire et devant toutes les portes qui s’offraient à lui, il du comprendre que l’une d’elle, renfermait le terrible cadeau.

Mais il se trompait.

Car dans un éclatement sonore, le sol se déroba sous ses pieds, faisant voler sable et galets. Ce fut comme si le monde venait de chanceler sous le coup d’une ésotérique mécanique. L’elfe qui n’en était un qu’à moitié, chuta. Si sa condition lui fit sans douter retomber sur ses pattes comme le fumeux félidé qu’il était, il fut surprit par la première avoinade qui frappa sans prévenir. Il venait d’atteindre l’antre du monstrueux gobelin et Grobadum était à l’accueille pour le cueillir.
Après se coup de poing vicieux, le colosse de trois mètres de hauts, tout en muscle et en effroi, hurla sa rage et sa haine à la foule éloigné. On avait spécifiquement créé cette arène, pour l’empêcher de s’en extirper quand il combattait. Mais le monstre continuait de hurler, oubliant un instant l’hybride qu’il avait envoyé dans le décor. Était ce la tout ce qu’on pouvait lui servir en repas ?

En position de garde, laissant la foule acclamer le nom de la créature qui lui ferait bientôt face, Ranadath patiente, toute son attention tournée vers les tunnels autour de l’arène centrale.

Les cris de la bête résonnent et font battre son cœur au même rythme que les hourras des spectateurs. Un son pareil aux appels à la guerre, au sang et à la violence. La bête sera bientôt là et bientôt, l’Hybride la défiera.

Subitement, alors qu’il s’attend à apercevoir l’imposante silhouette sortir, le sable s’agite sous ses pieds nus, mais il n’a pas le temps de réagir. Le sol se dérobe et un immense fossé se creuse, le faisant chuter à la renverse. Agile, il parvient à se retourner durant sa chute, comme le font les félins, pour retomber dans une bonne position à l’étage inférieur, s’évitant ainsi de se briser le dos aussi bêtement.

Son visage se relève et il quitte les environs un bref instant, un instant de trop. Alors qu’il regarde la foule qui le domine, une lourde frappe vient le ramener à la réalité de la situation. L’imposant poing s’écrase contre son visage et la force du coup le fait s’envoler sur quelques mètres, le faisant heurter les limites de cette nouvelle arène, aux dimensions plus petites.

Par chance, ou peut-être par ennui, la créature se désintéresse de lui un moment. Grobadum hurle sa rage envers ceux qui sont venus se délecter du spectacle et ignore celui qui doit lui servir de repas. Ranadath, d’abord sonné par la violence du choc se ressaisit rapidement, se redressant instantanément. Par chance, sa nature d’Ilythiiri lui permet de voir au fond de cette fosse, encore plus sombre que la précédente et sa vision se pose alors sur ce qui lui fait face.

La bête, Grobadum, est une sorte de gobelin aux proportions surnaturelles. Une imposante musculature déforme une silhouette qui s’élève à plus de trois mètres de hauteur. Des crocs de la taille de lame-courtes sont à la place de ses dents et ses mains sont semblables à des roches en provenance même du Zagazorn. C’est une machine à tuer, un dévoreur de combattant.

Ranadath reste en retrait un instant, se laissant le temps d’analyser la bestiole sanguinaire. Ses mains se lèvent dans une garde propre aux guerriers du Vatna. Il semble appeler à la lutte au corps à corps, bien que la différence de gabarit et de force semble disproportionnée. L’eldéen s’avance dans cette garde et finalement se rue sur Grobadum, cherchant d’abord à tester les limites du corps puissant en frappant à quelques endroits connus pour être habituellement fragiles ou tendres.

Ainsi les frappes se dirigent vers les flancs, cherchant à atteindre surement un quelconque organe, mais à cause de la taille, elles se concentrent sur les membres inférieurs, leurs muscles et leurs tendons. Il frappe en cherchant d’abord à briser une rotule qui s’avère bien trop solide, puis en tentant d’épuiser le membre et ses muscles en cherchant les tendons et les nerfs. Sa petite taille et sa vitesse lui permettent d’enchainer et son agilité lui permet par instant d’être relativement insaisissable pour l’imposante chose. Il vaut mieux d’ailleurs qu’il mise sur ces atouts là et non la force brute.

A vaincre sans péril on triomphe sans gloire. Ainsi, voilà que Ranadath s’élance d’abord dans un duel à mains nues contre Grobadum, pour la plus grande joie des spectateurs du jour.

Difficile de dire, dans cet enchaînement de coups et d’uppercuts, si le bas blessé réellement. Grobadum était un être de chair, de sang, de muscles et de muscles. Il avait par le passé, occis autant de gardiens que de combattants dans le périmètre de son arène. Pour lui, l’existence se résumait à un déferlement de haine continue, ses entrailles perpétuellement noués par la folie destructrice distillée durant le traumatique Voile qui plongea le Zagazorn et ses habitants, dans les ténèbres. Il avait vu le jour dans une tribu gobeline oubliée des bords du Monde. Peut être avait-il profité de quelques joies dans les cavernes lugubres et humides de sa terre natale, entre les relents immondes et les bêtes rampantes qui constituaient son quotidien. Peut être avait-il ressentit la chaleur de quelques beaux jours, dans la course éphémère d’une vie ou le danger et présent à chaque instants. Mais quoi qu’il soit advenu durant son existence passé, plus rien ne substituait aujourd’hui du fouilleur de vase ; il s’était évaporé dans la tourmente et le bruit, dans la hargne et crasse alors que le monde plongeait dans une obscurité chimérique qui l’avait forcé à muter, affreusement, pour survivre.

Peut être était ce là, la raison de ses terribles cris qu’il lançait aussi bien à la foule, qu’à l’arène, aux sables, au soleil, à la lune et au vent. Rien ne pouvait réellement éteindre cette incendie de malice et de vice qui le consumait jours après jours. Parmi ses gardiens, on murmurait que même quand venait l’heure de la curée, il continuait à grogner en dévorant le repas sanguinolent que lui servaient ses oppresseurs. Pour certaine matrone, il était devenu le monstre qu’on murmurait à ses bambins afin de les faires obéir, pour d’autres, il incarnait la finalité d’une existence d’opposant idéologique d’on on avait souhaité se débarrasser sans laisser de trace. Autant dire, que d’utilité, il en possédait aux yeux de ses Maîtres, mais lui, n’en avait cure. Seul comptait la violence et l’épanchement d’une soif sans fin pour le sang et la chair.

Autour, la foule hurlait toujours plus, vrombissante. Comme si elle partageait l’espace d’un temps, la rage qui habitait le goblinoïde. On pouvait entendre dans les hourras, quelques acclamations senties et s’orientant autour de «  la bouillie » et du comment pourrait finir l’hybride.

Grobadum lui, n’y attachait aucunes valeurs et se mit à riposter sous l’assaut répété de la mouche qui cherchait à lui piquer le cuir. Sa tactique était simple : le frapper et l’écraser, jusqu’à qu’il meurt. Mais d’abord, fallait-il encore l’attraper. Se déplaçant d’une façon simiesque, entre les hurlements et les crocs, le gobelin monstrueux frappa moult fois le sol, déplaçant d’intense colonne de silice. A chaque fois qu’il ratait sa cible, sa colère ne faisait qu’augmenter. Surtout qu’en retour, les coups continuaient de pleuvoir contre ses flancs. Il lui fallut alors de nombreuses minutes avant de changer de stratégie. Ralentissant, il choisit cette fois ci de bloquer un coup de pied, mais fut assez prompt pour saisir la jambe. Quand ce fut fait, il envoya un terrible coup de poing dans le torse de l’hybride puis jeta au loin sa carcasse comme s’il s’agissait d’un morceau de viande. Content de son coup, il continua d’hurler, la tête en l’air, croyant simplement avoir réussit à le tuer. Il irait sous peu, se rendre au rendez vous de son prochain repas en festoyant de sa chair au yeux de tous.

Chaque frappe trouve sa cible, chaque coup porté aurait suffit à terrasser un humain de constitution ordinaire, si son opposant en était un… Ranadath est à peine sûr que ses attaques ont un réel impact sur le colosse gobelinoïde, peu de recul, aucun signe de faiblesse, rien, absolument rien…

Insaisissable et infatigable, il poursuit ses tentatives de sapes, continuant d’harceler les jointures de la bête sanguinaire en espérant y trouver une faille. Sa vitesse et son agilité lui donnent un avantage, du moins durant un temps. Grobadum qui jusque-là ne parvenait pas à l’atteindre réussit finalement à le saisir par la jambe. Tout d’abord surprit, “Ghadish” tente de se défaire de la forte poigne, mais n’y arrive pas à temps, se faisant lourdement percuter par la pogne massive de la créature des terres du Nord.
Le souffle court, les côtes douloureuses, le guerrier se retrouve à nouveau projeté quelques mètres plus loin, s’écrasant cette fois-ci encore contre le sol de l’arène souterraine. Peinant à se redresser, profitant des quelques secondes de répit gracieusement offertes par le prédateur, il rampe sur le côté, s’efforçant de se relever.

Voilà tout ce qu’il est ? Une larve rampante aux pieds d’une créature primitive tout juste capable de réfléchir ? Ses pensées ne se tournent pas vers sa propre survie, non, elles se dirigent vers la honte éprouvée, le regard de son paternel et celui du Père des Batailles qui se rit de lui et de sa Flamme qui peu à peu s’affaiblit en cet instant. L’esclave se pensant digne des véritables guerriers du Vatna, l’égal même -sans réellement l’être- de ces combattants Ilythiiris, se retrouve finalement à terre contre un ogre. Il enrage, peinant à retrouver son souffle sûrement blessé de quelques côtes fracturées, il se redresse péniblement sur ses genoux, restant ainsi les yeux clos et les bras écartés.

La ville continue d’hurler à la gloire de la Bête, elle, rugit à la Vie et son état de simple amusement. Ne pouvant finalement pas atteindre les gradins, son attention se reporte finalement sur le frêle repas qui lui a été servi aujourd’hui. Grobadum remarque alors que son encas n’est pas encore totalement mort et prêt à être dévoré, au contraire, il semble même en redemander, s’étant relevé.
De son côté, le “Bizarre” comme le nomment les Thaaris, reste prosterné, sur les genoux, les paumes grandes ouvertes vers le ciel. Si en apparence il paraît être étrangement calme et détendu, bien que du sang lui coule des lèvres et quelques larmes sur ses joues. Au fond de son cœur, sa Flamme cherche à se raviver, à s’embraser plus vivement et pour cela appel à son propre Créateur, Uriz.
Le temps semble se figer un instant pour lui et même lorsqu’il entend les lourds pas de son ennemi mortel se rapprocher, tout lui paraît lointain, sans danger. Ce n’est vrai que pour lui, car pour la foule qui s’impatiente de la mise à mort prochaine de cet énergumène, tout s'enchaîne bien trop rapidement et bon nombre d’entre eux ne voient rien se passer.

L’Eldéen dans sa posture de prosternation à en réalité invoqué la Trame pour la manipuler, cherchant des liens sur lesquels se lier et se rattacher. La courte pause offerte par Grobadum a été suffisante pour que le Sombrelfe se saisissent des flux environnants et les modèle habilement. Ses main tournent lentement d’abord, puis prennent peu à peu de vitesse, ses doigts longs et fins aussi s’étendent et laissent les fils de la Trame les parcourir et s’enrouler. C’est maintenant ses deux bras qui se retrouvent comme prisonniers de ces toiles invisibles, du moins… Jusqu’à ce qu’elles prennent finalement leurs véritables formes.

Grobadum n’était qu’à quelques mètres de sa proie, son avant-bras tendu pour s’en saisir quand un feu tel une éruption volcanique jaillit devant lui. Tout d’abord aveuglé, comme les premiers rangs du dessus, la bête ne s’aperçoit que trop tard que son bras est pris au piège, agrippé dans un fouet de lave qui lui remonte presque jusqu’à l’épaule.
Le guerrier drow se tient debout, droit et fier, son arme élémentaire est dans sa main droite et dans sa gauche, une seconde, identique à la première qui serpente à ses pieds, calcinant le sol rocailleux de cette fosse, patientant son tour pour venir mordre la chair de la Bête.

Dans cet état de transe abjecte, le goblinoïde n’avait que faire des suppliques et hourras de la chaire virevoltante et hurlante qui s’agitait en hauteur. Pour lui, tous ces êtres inférieurs n’étaient qu’un amas sans visage et sans réel forme, formant une entité sans nom qu’il prenait pour un être piaillard et à peine bon à lui servir de repas. Quand il hurlait à poumon déployé, sa grogne s’adressait à l’existence entière, à la création et aux dieux. Dans sa folie, il pouvait apercevoir le regard inquisiteur du Père des Batailles qui, en l’ayant élu, l’avait aussi transformé en une monstruosité sans nom et sans avenir. Des restes de sa vertitude humanité, il ne subsistait rien, seul comptait le carnage et le sang versé à la gloire du Père. Si un nain avait put s’immiscer dans son esprit, il en aurait totalement perdu la raison ; car les visions de Grobadum remontait au temps sombre du Voile et des effets terribles de ces plus sombres instants. Le spirite y revivrait alors les tourments sans fin de son propre peuple et l’agonie destructrice qu’avait subit tout les êtres de cette partie du monde. Depuis, le gobelin aberrant évoluait dans cette réalité, véritable avatar de non sens et de chaos.

Continuant sa harangue sans but, il s’imaginait s’échapper d’un unique bond et réduire en bouillit molle les hurleurs qui s’amoncelaient au dessus. Il en avait presque oublié le combattant qu’il avait réduit au néant en l’envoyant mangé le sable de sa cage de pierre.  Mais ce ne fut pas le cas de tous les observateurs de l’instant. Depuis son promontoire, le laniste défiguré n’avait point perdu une seule goutte de cet affrontement brutal. De son œil torve expert, il savait pertinemment que le gobelin n’avait pas tué sa cible et qu’il commettait la une erreur, mais impossible de lui faire passer ce genre d’explication : ce combattant n’était pas comme les autres. Hors, Gilgamek lui, comprenait que quelque chose se tramait, en réalité il était le mieux informé parmi les participants de cette liesse grotesque. Un sourire lui fendit la trogne, étira ses lèvres craquelées et le rendit bien moins attirant qu’il ne l’était vraiment.

«  Spectacle enfin. Erreur le pointu. »

Le grommellement inaudible qu’il s’adressa à lui-même se transforma en un rire rauque et gras, qui lui-même finit par se métamorphoser en une quinte de toux véloce et foudroyante. Il faillit chuter de son fauteuil à roue et se rattrapa de justesse  à un guéridon chancelant. Mais dans sa gorge déformée, les braises d’une bonne poilade, continuaient à s’agiter.
Grobadum lui, sentit d’abord la curieuse odeur de viande grillé. Son odorat surdéveloppé lui dictait que l’heure de la mangeaille avait sonné, aussi tourna t-il de la caboche en tout sens avant de se rendre à l’évidence : il était la carne qui grillait. Dans un férocement hurlement, il se rendit compte du fouet de lave l’encerclant et la douleur fulgurante le piqua comme une nuée de frelon. S’il avait donné de la voix jusqu’ici, ce ne fut rien face au grondement qui s’extirpa de son glissoir, couvrant même les bruits de la foule. Réagissant à l’instinct, il tenta de se saisir de sa main valide, du trait de flamme liquide qui lui encerclait le bras. L’hybride avait dut s’attendre à cela, mais avait-il prévu la suite ?

Des cerclages de fer qui lui entourait les poignets, se dégagèrent une fine lueur, dévoilant la suite runique qui y était gravé. Le gobelin n’en eut pas conscience, mais toucher une manifestation de l’ether ainsi, activa le sortilège de mysticisme graveruné dans les ouvrages. L’art des mystes étaient un savoir complexe, n’ayant pas spécifiquement d’attrait pour la destruction ; mais le sort qu’on avait enformé à l’intérieur, bien que basique, était redoutable face à un manieur de la trame. Il consistait simplement, à isoler un bref instant le mage des courants magiques environnants, juste assez pour que le sort s’annule, comme un grain de sable dans un terrifiant rouage. Ainsi quand il saisit le fouet, le gobelin le fit simplement disparaitre. Il fut aussi surprit que dut l’être l’hybride, mais poussé par la colère, il n’attendit point plus longtemps avant de se jeter sur Ranadath, lui décrochant un uppercut qui aurait pu assommer un Païm.

Cette fois, Grobadum ne laisserai plus un seul instant à l’être chétif pour se ressaisir.

Lui qui pensait avoir contenu l’animal, au moins pour un temps, ne peut dissimuler sa surprise quand les runes gravées sur les menottes de fer s’illuminent. Ranadath n’est pas un érudit versé dans l’étude de l’éther, mais avant même que les effets de ces artefacts ne s’activent, un éclair de lucidité lui parcourt l’esprit. Ses doutes se confirment presque aussi rapidement qu’ils sont apparus, Grobadum se saisit du fouet et le lien qui unissaient l’arme et son porteur se coupe instantanément, non pas sans avoir laissé quelques marques de brûlures sur la couenne de la bête.

Un brin trop confiant avant que son arme ne disparaisse pour de bon, il ne peut être qu’encore plus surprit quand il s’aperçoit que le gobelin se rue vers lui et vient le frapper à nouveau sous le menton. Vif, il a néanmoins le temps de lever une main pour encaisser le choc qui aurait pu lui briser la mâchoire sinon. Titubant à reculons, secoué, il s’écarte de nouveau afin de regarder davantage de distance, en comprenant que la créature, elle, ne lui laisserait aucun répit à partir de maintenant.

Tenant toujours son second fouet de lave dans l’autre main, il le fait serpenter au sol, menaçant à l’encontre des chevilles de Grobadum qui n’en a que faire en continuant d’approcher. Si l’eldéen se doute que son arme magique n’aura qu’un effet temporaire, il frappe de nouveau avec son second fouet. D’un mouvement maîtrisé, le serpent de lave s’agrippe au pied gauche de Grobadum et les oscillations données remontent lentement sur le mollet jusqu’au niveau de la cuisse. La brûlure ne sert que de diversion, car quand la bête tentera de retirer l’étau magmatique, ce dernier disparaître aussitôt. Mais cette vicieuse attaque a pour effet de couper la charge et de détourner son attention, même un court instant et, si possible d’user à nouveau les tendons et muscules puissants.

Quand Grobadum se retrouve ainsi emprisonné, le gladiateur du Vatna se rue vivement vers lui, brisant cette fois-ci la distance entre eux deux à une allure fulgurante. Dan sa course, sa main droite s’ouvre tandis que la seconde se ferme dans une posture d’assassin tenant un poignard invisible. Invisible, jusqu’au dernier instant, ou dans un bond, une lame faite d’air comprimé apparaît dans sa main close. L’arme est presque invisible à l’œil nu, du moins, seuls des légers tourbillons d’éther dessinent la silhouette de cette arme où la pointe de la lame est un concentré de magie. Gadish bondit alors et, genou droit en avant pour s’en servir de point de frappe, mais aussi de garde, et tente de poignarder la bête au niveau de sa clavicule, non loin de la gorge, cherchant probablement à atteindre la jugulaire dans cet amas massif où peu d’ouvertures se trouvent.

Scruter un tel affrontement revenait à voir observer à ours combattre un serpent.

La nature profonde des deux protagonistes qui exécutaient cette mortelle danse à l’instant, à elle seule valait le déplacement. Des nombreux combats qu’avait effectué la terreur des Fosses, ce fut sûrement le premier qui dura autant de temps. Une partie de ses plus grands suiveurs auraient put vous l’affirmer d’instinct : jamais ils n’avaient vu de combattants tenir aussi longtemps fasse à Grobadum. Ces gens qui l’affirmaient, comptaient parmi les plus assidus des spectateurs, ne délaissant jamais une soirée d’évènement ou la bête allait se montrer. Ces mêmes lurons qui, pariaient sans vergognes la solde de leur dur labeur en étant sûrs, de récolter un pourcentage honnête pour une mise qu’ils jugeaient en réalité, très peu risqué. Ces mêmes personnes, qui, en cet instant, commençaient à douter, se questionnant profondément, nourrissant peut être même, quelques regrets. Avaient-ils réellement sacrifié  en si peu de temps, le salaire d’une saison ? Comment pourraient-ils expliquer cela à leurs compagnes une fois de retour au bercail ? Devraient-ils vendre un membre ou pis, un enfant pour subvenir à ce difficile hiver ainsi privé de leurs sous ? Des interrogations qui agitaient tout les parieurs et qui à contrario, faisaient la fortune des différents donneurs.

Dans son alcôve, Gilgamek lui éructait de la bassesse de l’hybride ; il avait toujours en en haine et horreur ceux qui déviaient du glorieux sentier de l’acier pour celui de l’ether. Il avait par le passé affronté différents mages de batailles, et il lui avait fallut quelques fameuses armures conçus dans le même style que les bracelets du gobelin, pour en venir proprement à bout. Hors, il avait construit sa renommé de Fléau en combattant presque nue, à pogne déployé. User d’artifice ainsi, le débéquetait tout bonnement. Lui aussi avait remarqué que la bête montrait quelques signes de fatigues : le sang mêlée avait réussi à trouver quelques failles exploitable dans ce déchainement de violence brut. Les fouets n’étaient maintenant plus d’une grande utilité, mais ce qui semblait être une lame faite de vent, se trouvait bien plus redoutable.

S’il n’avait réussit à percer jugulaire et autres grosses veines, on pouvait admirer néanmoins, les myriades d’entailles sanglantes et rependant un sang impur sur le sable du corral guerrier. Mais le laniste n’était pas encore sûr de la fin de cette pitoyable bataille ; le terrible gobelin recelait encore assez de force pour briser son adversaire, aussi, il était entrain d’assister à une de ces démonstrations : Alors que Grobadum avait encaissé une nouvelle coupure non loin de la gorge, il avait finit par encerclé Ranadath entre ses énormes bras. Lui hurlant au visage, la monstruosité verte en avait profité pour croquer tout simplement l’épaule gauche de l’elfe qui n’en était pas totalement un. Perçant la chair, le goblinoïde aurait bien voulut en faire directement son repas, mais il fut repoussé une nouvelle fois par la vivacité de l’hybride qui, bien que libre, saignait à grosse gouttes lui aussi maintenant.

Ce combat serait un affrontement à mort qui resterait dans les mémoires.

[justify]La terreur des Fosses n'a pas usurpé son nom. Cette créature à l'apparence effroyable a fait vaciller les cœurs de bon nombre de guerriers avant de les rendre tels des amas de chair sanguinolente desquels ils se repaît. L'ensemble de son corps est taillé pour le combat et sème la mort, des crocs aux griffes et jusqu'à chaque fibres de muscle.
Face à lui, se tient cet être bien moins imposant mais qui, dans les yeux des spectateurs n'est pas moins mortel et dangereux, Bien qu'au début du combat, les habitués des Fosse ne donnaient pas chère de la peau de l'hybride et se riait même d'imaginer la manière à laquelle il allait être mangé.

Sur le sable, le combat fait encore rage, même si les deux combattants commencent à montrer chacun des signes de fatigue et de faiblesses. Les blessures de l'un et de l'autre les ralentissent et le sang coulant des plaies imbibe le sol de l'arène le marquant de tâches sombres et poisseuses.
Par chance, juste avant, l'Eldéen venait de s'extraire de la prise de Grobadum, non sans avoir subit une morsure douloureuse à son épaule qui le prive de son bras ; Ses muscles et le plus profond de sa chair ont été touchés par les crocs puissant de la Bête.

Là, à quelques mètres de la créature, Ranadath cherche à reprendre son souffle. Sa main valide tenant son épaule pour tenter d'endiguer l'afflux sanguin. La sueur perle sur son visage qui ne cache pas sa difficulté dans la souffrance. Face à lui, Grobadum semble toujours opérationnel, mais les nombreuses coupures profondes sur son corps sont les signes qu'à son tour, son état est critique. Dans un cri de rage, voyant que sa proie continue de se débattre, la terreur de la Fosse charge à nouveau vers l'hybride qui de plusieurs pas sur le côté tente de garder ses distances, cherchant à gagner du temps.

Devant les yeux des spectateurs qui continuent d'encourager les guerriers, c'est un jeu du chat et de la souris qui se déroule devant leurs yeux. Grobdum tentant d'attraper Ranadath qui lui, s'écarte et contourne, cherchant à se tenir éloigné. S'il agit ainsi, ce n'est par peur, bien que l'on pourrait aisément le croire, mais pour conserver ses dernières forces dans ce qu'il ressent être sa dernière chance de vaincre.

Épuisé et blessé, Ranadath ne peut se permettre de gâcher ses derniers coups et de se ruer dans la gueule grande ouverte de la créature. Continuant de parcourir les contours de l'arène, toujours face à son adversaire, en réalité il agit en toute discrétion. Son corps tout entier est à l'affût de l'éther environnant, cherchant à le manipuler et le forger à sa guise une dernière fois.

Tout d'abord, retirant sa main de la blessure, cette dernière dans son mouvement de rabattement horizontale décrit une ligne droite qui, à mesure que la main passe, laisse apparaître derrière elle les toiles de flux s'entremêlant qui prennent alors vie et forment une sorte de bâton ou de manche en pierre long de presque un mètre.
Suite à ça Grobadum fonce à nouveau et balaye de sa main le sol, jetant par la même occasion une traînée de sable dans la direction de l'elfe. S'esquivant à nouveau, il se positionne plus loin, appuyé son la lance dont il manque la pointe.

Profitant de ces quelques instants de répit, la main tenant le manche de lance glisse vers son extrémité dans un geste vif et là encore les toiles d'éther prennent vie. Cette fois-ci c'est une pointe à l'aura verdoyante qui se dessine au bout de la pierre, dans un vrombissement constant rappelant alors la dague d'air compressé faite auparavant. Une fois terminé, il prend une position de garde, l'arme redressé et sur ses appuis. Le guerrier du Vatna manipule la lance de son unique main mais ne semble pas en difficulté pour le faire. Malgrès l'épaisseur de roche qui constitue le manche, elle semble légère et manipulée avec facilité par son artisan.

Enfin, le moment de vérité et arrivé. Grobadum hurle à nouveau sa rage et fait face à Ranadath. Là, dans ses yeux la colère et le meutre se lisent et il charge à nouveau. Mais cette fois-ci, l'Hybride charge aussi dans un cri tout aussi rageur, appelant au Père des Batailles.

Dans sa course mortelle, Ranadath lève sa lance à hauteur du poitrail de l'animal et alors qu'ils ne sont plus qu'à quelques enjambés l'un de l'autre, une déflagration s'échappe de l'arme tout entière, la recouvrant d'une aura à la chaleur étouffante même pour les premiers rangs de la Fosse.

L'explosion de flamme avale les deux combattants, les faisant disparaître une fraction de seconde à la vue de tous.

Un déferlement de haine solide aurait possédé l’exacte même apparence que l’affrontement qui se déroulait en cet instant dans les Fosses. Les adversaires avaient supplanté la technique, la remplaçant par le seul et unique instinct de survie lié à leurs qualités intrinsèques ; l’un poussé par une animosité primal, antique et dévastatrice, l’autre mu par des siècles d’entrainements machinal, pragmatique et mortel. Même les plus avisés des donneurs n’auraient osé se prononcer quand à la finalité de cette rencontre au moment ou ils en observaient ce qui s’apparentait à un final. Dans les gradins troglodytes, la foule retenait ses hourras eux aussi reléguaient au second plan alors que la concentration et l’excitation se mêlaient sur les centaines de trogne. Chacun priant pour son camp, suant à grosse goutte, serrant quelques quolifichet porteurs de chances ou s’arrachant les ongles sous l’intense pression.

De son perchoir haut, tel un freux déformé, le laniste en chef continuait de poser la plus sombre des œillades sur ce ballet qu’il estimait être une risible farce. Alors qu’il se permettait quelques commentaires intérieurs quand aux placements plutôt maîtrisé de l’eldéen – c’était à ses yeux, un combattant hors pairs même s’il ne l’admettrait jamais publiquement ; il s’égara en quelques pérégrination concernant l’avenir de son corral. Pour lui, les manieurs d’ether devraient être purement sanctionné, voir interdit, même si la mesure était compliqué à mettre en œuvre. Alors, s’imagina t-il un monde ou, l’entièreté de son arène serait recouvert de quelques glyphes runiques puissants et trompeurs, qui supprimeraient tout simplement la possibilité de se connecter à quelques sources chtoniennes permettant de manipuler l’Art. La dépense pour une telle œuvre, serait astronomique. De plus, il doutait que, le Maître des Caves valident un tel investissement ; ces fieffés chieurs sur coussins étaient pour l’instant, tous des adeptes magique. Gromellant, il se permit alors d’imaginer plus loin encore, le moment ou il siègerait à son tour au Conseil de Thaar et ou il pourrait allègrement pisser dans les écuelles dorées de la Dernière Cave en régentant son petit monde. Un avenir bien rutilant qui lui soulevait presque les toges, réactivant quelques zones oubliés de son bassin.

Ce fut une terrible déflagration qui le ramena à la réalité. S’ébrouant tel un vieux goret, il poussa son siège roulant jusqu’aux abords du précipice ; une simple margelle qu’un naniot aurait put enjamber, le retenait d’une chute mortelle et définitive. Quand la fumée, la cendre et le sable retombèrent enfin, l’agitation avait cessé, redevenue aussi plate et silencieuse qu’une latrine désertée par son conchieur. On n’y ourdait ni grognements, ni halètements, manifestement, le baroude d’honneur avait sonné le glas des combattants. Sur le sable, reposait sur le ventre, la carcasse inerte de la terreur des Fosses ; son poitrail tout bonnement éventré dévoilait un immense trou qui avait fait sauter une partie de sa colonne et tous les organes alloués. Quelques soubresauts liés aux nerfs lui donnait encore l’air vivant, mais aucunes créatures vivantes n’auraient put encaisser tel dommage.
Aucuns signes de l’hybride, du moins, jusqu’à qu’une main frêle et ensanglantée s’agite sous la dépouille. Le coquin était en vie.

Gilgamek s’en détourna, tandis que dans la Fosse, s’éleva la sourde et hurlante clameur du délire collectif qui venait de saisir la foule. On s’empoigna, on s’embrassa, on s’arracha les cheveux et on se perça à coup de couteau ; ainsi en allait l’existence quand on remettait entre les mains du hasard sa paie. Se soir, Ranadath avait acquis dans ce microcosme qu’était les Fosses, une grande renommé, on entendrait bientôt son nom jusqu’aux arènes de Sol’dorn pour cette exploit ; des portes s’ouvriraient à la seul évocation de ce combat. Mais il n’était pas le seul vainqueur de cette nuit de liesse, car loin des regards, Ozkun le Magnifique empochait le résultat attendu d’une mirifique suite de paris et d’obligations qui le rendait indirectement, encore plus riche qu’il ne l’était.

Et cela, sans verser une once de son sang.