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 Matoiseries en Tapinois, ou l'Irrévérence de l'Héritier [Terminée]

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Iarisleif Fût-de-Chêne
Nain
Iarisleif Fût-de-Chêne


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Âge : 33
Date d'inscription : 02/09/2020

Personnage
:.: MANUSCRIT :.:
Âge :  114 ans
Taille
: 1m33
Niveau Magique : Non-Initié.
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MessageSujet: Matoiseries en Tapinois, ou l'Irrévérence de l'Héritier [Terminée]   Matoiseries en Tapinois, ou l'Irrévérence de l'Héritier [Terminée] I_icon_minitimeMar 27 Aoû 2024 - 11:44


Identité
Nom/Prénom : Iarisleif 'Tournebarrique' Fût-de-Chêne
Âge/Date de naissance : 114 ans (Arcamenel de la deuxième ennéade de Favrius, an 907:X)
Sexe : Viril
Race : Nain
Faction : Ithri'Vaan
Langues parlées : Khuzdul et Oliyan
Alignement : Chaotique Neutre
Liens notables : C'est notamment par ses liens tissés au cours de sa vie avec le gratin de la société durgazdawi que ce petit bâtard s'est enrichi aussi vite. Fricoter avec les grands squales des Mille-Caves lui aura donné forces alliés pour étancher sa soif de profit et asseoir sa domination sur le commerce des spiritueux, et depuis que son ami Ozkun mène la danse, c'est encore pire... Mais ce qui le rendit si intéressant aux yeux de tous ces commerçants sournois, c'était ses connexions familiales avec les Fût-de-Chêne et les Souffle-Braise au sein du Zagazorn, véritable pilier dans sa politique d'exportation à grande échelle.

Particularité : Renonçant aux fières voies ancestrales de nos ancêtres, cette véritable honte familiale se rase la barbe et ne laisse paraître que de longues moustaches tombantes, comme pour venir encore pisser une bonne fois sur son héritage !


Métier : Commerçant, spécialisé dans l'import-export du spiritueux du Zagazorn
Classe d'arme : Aucune


Possessions & Equipements :

C'est en faisant main basse sur mes fonds, et après ses tractations louches avec ses amis les Brise-Dette et les Trois-Diamant que mon fils s'est considérablement enrichi. Il use du réseau caravanier de l'Oliya pour remonter jusqu'à Lante, d'où les Fût-de-Chêne et les Souffle-Braise embarquent leur production alcoolisée pour un export vers les terres du sud. Il faut dire qu'entre le bagout de Iarisleif et l'appétit alcoolique du puissant Marzaban, il y avait une sacrée galette à se faire de ces voyages, et beaucoup de bénéfices à en tirer sous une forme ou sous une autre. En fait, c'est ça le plus bluffant : bien qu'il ne possède ni les bateaux, ni les distilleries, ni les brasseries qui font sa richesse, Iarisleif parvient à tirer la couverture sur lui et à se faire une marge de monstre. Après tout, c'est un peu lui l'expert, une fois le navire chargé et arrivé à Thaar. Il en est devenu le commerçant incontournable en matière de bière naine et d'alcools du Zagazorn, tous estampillés du sceau de mon clan et celui de ma compagne. Ce dernier point est cependant débattable... Après tout, je sais de source sûre qu'il se livre à des numéros d'équilibriste sur le chemin entre Thaar et Lante, et manigance avec des marchands péninsulaires sur la route pour acquérir un peu de leurs productions, qu'il fait ensuite passer pour celle de Thanor à certains clients, si ceux-ci l'irritent durant les négociations de prix. Un vrai sournois, je vous dis.

Si l'on doit parler possessions véritables, je pense savoir qu'il a racheté mon matériel à mes anciens créanciers, et qu'il est devenu propriétaire de quelques bouges en ville. Il y fait produire et vendre de l'alcool de moindre qualité, qu'il vend aux Longues-Jambes et autres indélicats du palais. Cette abâtardisation de mon art ancestral me fait hérisser tous mes poils, et c'est avec une honte sans nom qu'il m'est déjà arrivé de boire une de ces productions douteuses, et dégoûtantes. Mais bon. Une bière est une bière, pour un sans-le-sou, et faute de grives, on mange les merles.

Apparence :

Chaque fois qu'il me regarde, je ne peux m'empêcher à la fois de le haïr et d'en éprouver un trouble mélancolique et glaçant, qui me transperce le coeur aussi sûrement qu'une lance. Car ces yeux gris-vert, avec leur intensité glacée tempérée par de rieuses pattes d'oie, ces globes immenses et ronds qui vous aimantent le regard, ce sont les yeux de Svetilga. Là où les siens étaient baignés d'une forte tendresse qui me réchauffait le coeur, ceux de mon fils me dardent avec un courroux à peine rentré, un regard qu'il offre à bien peu tant je reste le principal objet, le réceptacle de toute sa haine. Là où tous n'y voient que des mirettes chaleureuses et rieuses, je n'ai droit qu'au plus profond mépris, à la colère la plus sourde.

Outre les yeux, Iarisleif a malheureusement tout pris de mon père. Certains le surnommaient le Chétif, car il n'est guère grand et n'a guère la carrure d'un guerrier. Il compense son manque de coffre par une agilité accrue, qui lui donne à la fois dans sa démarche et dans ses poses, un air badin, souple et délié qui provoque souvent la curiosité chez les Nains. Iarisleif est un acteur hors-pair : poser sa voix, adopter la bonne attitude, joindre le geste à la parole... Un véritable causeur de première, un baratineur et un scélérat. Mais un commerçant redoutable et redouté. Une sale fouine qui vous met le grappin dessus par ses minauderies, ses blagues et ses coups d’esbroufe, avant de vous enchaîner à ses truculences et ses largesses, puis de vous faire casquer pour ses produits et ses services. Toute la prestance des Fût-de-Chêne, abâtardie par cette immonde vermine, voilà qui plus d'une fois fit tourner mon sang d'une traite.

Mais le pire dans l'histoire, c'est sans doute que ça fonctionne, et que ça fonctionne bien. Les gens semblent attirés par ce Nain si différent, si hors du commun, comme s'il émanait de lui un air de confiance, la promesse d'un bon moment et d'un ami sincère. Or, je sais que s'il est sincère en amitié avec qui lui est utile, pour sa famille en revanche, c'est une toute autre histoire...

  • Taille : 1m33
  • Couleur des yeux : Gris-vert
  • Couleur des cheveux/pilosité : Blond-roux, clairsemé d'argent


Personnalité :

J'aurais dû le voir venir plus tôt, mais mon aveuglement aura causé ma perte, et la sienne. Iarisleif fut toujours une jeune barbe pleine de ressource et d'intelligence, capable de se débrouiller alors même que nous étions déracinés et jetés sur des routes incertaines. N'ayant jamais pu voir de ses propres yeux les imposantes montagnes de notre peuple, comment pouvait-il en saisir la noblesse et la majesté ? C'est sans doute ce manque qui l'aura tourné vers les voies de nos infâmes cousins. Là encore, j'en éprouve bien des remords, car au lieu de me concentrer sur mes propres affaires, j'aurais surtout dû m'enquérir plus souvent de mon enfant, et mieux voir à ses fréquentations.

Car Iarisleif, s'il est petit et de moindre carrure, compense par le plus utile des atouts : celui de savoir se faire des amis. S'attacher des loyautés, faire rire et faire plaisir, tant de choses dont il aura joué pour s'arranger des alliances et retourner des ennemis. Une part de moi aurait envie d'en être fier, si ces joyeuses amitiés n'avaient pas trahi son propre sang. Au-delà du masque de bonté, de bonhomie et de badinerie se terre un immonde faciès de chafouin, de duplique, et d'abject félon. Certains vilains vendraient père et mère pour un meilleur profit... Iarisleif, lui, les offrirait carrément, si cela pouvait l'avancer à quelque chose. Je ne le sais que trop bien. Après tout, j'en ai fait les frais...

Je me demande s'il me tient autant rancoeur que je lui en tiens. Car après tout, n'ai-je pas laissé mon fils dans le dénuement ? N'est-ce pas par solitude et abandon qu'il s'est forgé ce profil de cauteleux, qu'il s'est détourné de sa famille pour embrasser ses nouveaux camarades ? Je ne le sais. Ma haine envers lui ne m'aura apporté que des ennuis. La sienne, en revanche, l'aura fait baigné dans d'immenses profits. Peut-être, à l'aune de ce que cette détestation mutuelle nous aura tous deux apportés, sa rancune envers moi paraît plus immense encore...

Capacités magiques :

Néant

Histoire

- Je suis Iarisaulf, fils de Iarisgun du clan des Fût-de-Chêne. Ne prenez donc pas ces airs tout ébaubis, et écoutez donc plutôt ce que j'ai à vous dire. Cela pourrait vous éclairer sur cet immonde personnage que naguère, j'ai appelé fils.

Mon clan n'est certes pas très grand, cela ne l'empêche pas d'être auréolé du prestige de son savoir-faire : nous brassons les bières les plus formidable d'Almis à Thanor, et quiconque clamera le contraire est un menteur ! Nos noires, nos ambrées, nos épicées, jusqu'à nos spontanées sont vendues dans tout le Royaume, et appréciées pour leur richesse, leurs qualités gustatives, et leur équilibre. Toute ma vie, j'ai tiré orgueil de nos entrepôts sitôt remplis, sitôt vidés, de ces claquements de langue satisfaits après une gorgée envolée dans les larges gosiers de la clientèle... Mon propre père, Iarisgun, m'avait enseigné toutes les subtilités de notre art brassicole, tous les secrets de nos brassins, et de nos ingrédients. J'avais également connaissance de la source où jaillissait notre eau, secret que j'emporterai dans la tombe.

Notre artisanat jouissait d'une grande renommée. Or, voyez-vous, un artisan ne peut pas vivre que d'or, car c'est dans la satisfaction apportée à l'acquéreur que nous jouissons du prix que nous lui soutirons. Qu'importe la grandeur du tarif, si l'on ressent de la déception lorsque vient l'heure de goûter ? C'est ce que recherche tout membre du clan Fût-de-Chêne : la validation de notre clientèle, l'assurance qu'à chaque gorgée suivra son lot de soupirs et de hochements de tête. Le jour où j'ai rencontré Svetilga, qui deviendra ma femme, c'est ce genre de discours que je lui ai tenu. Etant dans les mêmes dispositions elle et moi, elle pour l'eau-de-vie et moi pour la bière, nous étions faits pour nous entendre. Notre passion était d'ailleurs si vivante, nos braise-vies si chaudes, que notre pacte de fidélité ne prit que quelques années à être mis en place, ce sous l'oeil mauvais des Gromtrommi trouvant notre lien trop empressé.

Nous avions beau être des artisans doués et renommés, Svetilga et moi n'étions guère satisfaits de notre vie à Thanor. Certes, notre alliance avait apporté des collaborations fructueuses au sein de nos clans respectifs, mais ni elle ni moi ne trouvions plus autant de satisfaction dans ces mêmes sourires et ces mêmes compliments resservis, réchauffés... On pourrait dire que notre clientèle, régulière et même carrément inchangée, nous ennuyait. Nous souhaitions conquérir d'autres marchés, voir d'autres gens, des étrangers, apprécier nos breuvages et s'en extasier. Nous en rêvions la nuit, avides de comptoirs où nos marchandises, sublimant les autres en qualité et en goût, nous octroieraient or et monopole. Notre décision ne se fit pas attendre de vouloir partir, mais c'était bien là le problème : partir où ?

Ce n'était que le premier de nos problèmes. Il y en avait un autre, bien plus grand, celui de s'opposer à nos Thryng respectifs. Voir des artisans partir loin n'était pas vu d'un oeil particulièrement bienveillant, d'autant que le voyage était réputé dangereux vers les terres du sud. L'Oliya était un fleuve long, aux berges hasardeuses, parfois infestées de coupe-jarrets et pirates en tout genre. Seule notre résolution nous permit de tenir tête aux Vieilles Barbes et leur défense opiniâtre, et quand bien même, ils ne cédèrent pas. C'est donc alors qu'ils désapprouvaient entièrement notre voyage que, avec le concours d'autres colons aventureux, Svetilga et moi-même embarquions pour une odyssée dans le sud à l'aube du neuvième siècle du dixième cycle.

Nous avions entendu parler des Trois-Diamants, et avions décidé de mettre nos pas dans les leurs, dédaignant la colonie péninsulaire de Kulm et sa sinistre réputation. Faisant la route avec d'autres colons, notre quête incertaine se révéla plus compliquée que nous l'avions imaginée. Harassés par les escarmouches des Noss, forcés par un détour à traverser la Sirylla pour déboucher sur des mers inconnues, ce n'est pas par la grande porte que nous arrivâmes à Thaar-même, mais par son port à l'époque modeste, et crasseux. Au cours de la traversée, bien des Nains moururent ou rebroussèrent chemin, pestant contre leur sotte décision, si bien que nous ne fûmes qu'une poignée à poser pied à terre ce jour-là, dans un endroit que nous ne connaissions pas, et aussi hostile à notre présence que les créatures que nous avions croisées dans notre voyage.

La seule main tendue fut celle des nôtres. Les Mille-Caves nous accueillirent à bras ouverts... Du moins, c'est ce que j'avais pensé à l'époque. Trop heureux de revoir les miens, et de poser mon baluchon dans un endroit où l'on ne viendrait pas me le voler, c'était déjà plus qu'il ne me fallait pour me sentir redevable envers Mogar et mes congénères. Ainsi va la vie sur ces terres maudites et pourries : les sourires sont factices, les mains tendues cachent des contrats secrets... J'ai souvent retourné le problème dans ma tête. Aurais-je agi autrement d'entrée de jeu, les choses se seraient-elles passées autrement ? Ces sales fouines de Trois-Diamants, ils nous ont bien roulé dans la farine, Svetilga et moi. Je n'avais pas le nerf de le voir, trop occupé à établir notre brasserie locale, et bien trop accaparés par la naissance de notre fils. Il était alors la chose la plus sacrée à mes yeux. Aujourd'hui, je le maudis et le condamne à errer sans fin dans le Grand Puits... Iarisleif...

Je peinais déjà à joindre les deux bouts, entre les redevances exorbitantes de la communauté et l'établissement de mes petites affaires. Tout était si étrange ici-bas, si éloigné de tout ce que je connaissais. J'avais cru, un peu naïvement peut-être, que l'entraide suffirait, car c'était ainsi que les Nains prospéraient depuis des cycles. Je découvrais à mes dépens que la parole donnée de nos cousins n'était pas faite d'acier, mais d'étain. Malléable, piètre réplique de notre honneur spirituel, ils s'en servaient non pour s'obliger, mais pour obliger les autres. C'est dans cette atmosphère délétère que survint le drame qui changea ma vie, et celle de mon fils.

Svetilga me fut ravie. Je ne sus jamais qui fut l'immonde salaud qui me l'enleva, et ce malgré les recherches étendues de l'intendant des Pavés d'alors. Elle fut retrouvée dans une ruelle, morte et profanée. J'y ai perdu plus que ma compagne. J'y perdais le principal pilier de mon entreprise, celle avec qui je n'avais jamais rien lâché. Quant à ma correspondance régulière avec les Fût-de-Chêne et les Souffle-Braise, j'eus tant honte de cette sombre histoire que j'omis d'en parler, de peur que l'opprobre me frappe auprès des miens et du clan de ma douce-aimée. J'avais failli à mon pacte, après tout. Ils ne devaient rien en savoir... Tout s'effondrait devant moi comme un château de cartes ! La distillerie ferma, et ma brasserie était au bord de la faillite. Contractant des prêts toujours plus gros, je tentais de garder la tête hors de l'eau, me plongeant à corps perdu dans mon travail pour éviter de penser à la mort de Svetilga. De fait, c'est à partir de ce moment que je perdis pied, et que je me désintéressais de mon enfant. Je le laissais aux bons soins de la communauté, afin qu'il ne manque de rien, et que je puisse rembourser mes dettes au plus vite.

Si cette politique me permit effectivement de briser quelques dettes, je me rends compte maintenant à quel point elle était dangereuse. Je ne parvins pas à enseigner les valeurs du Zagazorn à Iarisleif, lui qui était toujours en maraude avec d'autres poulains tels que lui. Quand je lui parlais d'honneur, il en haussait les épaules. Quand je lui présentais Mogar, il lorgnait sur la vignette montrant le Gardien du Pont. Un jour, je le surpris même à tailler sa barbe ! Quelle fut mon horreur de découvrir mon propre fils, joues glabres ! Quelle humiliation ! Quelle insolence ! Une moustache tombante, imaginez mon choc ! Plusieurs fois j'ai eu à la corriger, mais cela ne faisait que le remonter plus encore, et le confirmer dans ses égarements. Alors, je tentais de lui enseigner mon art, trouver un terrain commun. Je fus surpris qu'il soit aussi demandeur à ce propos, alors que rien d'autre me concernant ne trouvait grâce à ses yeux. Je l'ai alors pris sous mon aile et, ensemble, à la brasserie, nous voguions vers une prospérité nouvelle, une collaboration père-fils qui s'avérerait fructueuse. Tseuh ! Quel petit merdaillon...

Il m'a volé tous mes secrets. Oh, je les lui ai donnés de bon coeur, accomplissant mon devoir de père et celui de maître. Mais son dessein était retors, néfaste. Alors que je préparais pour lui l'Altmenouth avec une partie des bénéfices engrangés durant son apprentissage, je le trouvais soudain bien évasif. Je n'eus guère le nerf de le lui reprocher, me doutant que ses propres fréquentations lui préparaient aussi une petite fête pour son passage à la pleine barbe, enfin, façon de parler au vu de ses caprices capillaires... Je ne saisissais pas encore la pleine portée de ce geste. Car il ne vint jamais à l'Altmenouth que je lui avais préparé. Cette petite merde moustachue s'était acoquiné avec quelques lambins de l'époque, et avait préféré passer cette étape importante de sa vie auprès de ses nouveaux amis, les Brise-Dette. J'en ai pleuré, seul, dans ma brasserie. J'y avais tout préparé : les épreuves, le franc repas suivant son entrée dans la maîtrise, et quelques derniers secrets que je devais encore lui enseigner... Autant dire que lorsqu'il revint, ivre, je ne lui offris que mon plus grand mépris. Je lui refusais d'ailleurs à devenir maître dans sa profession, ce qui ne fit que l'enrager plus encore. Nous nous battîmes, mais il était bien trop chétif, j'eus le dessus très vite. C'est l'arcade en sang et la lèvre enflée qu'il me déclara tout le feu de sa haine. Elle me frappa au visage plus sûrement encore qu'un gantelet, et j'en fus tout aussi ivre de rage. Désavouant mon propre fils, je le bannis de mon atelier, de mes cuves et de tout ce qui devait pourtant lui revenir. Il s'en alla rejoindre ses amis les Brise-Dette, et me laissa seul, dans ma honte, ma colère et ma peine. Autant dire que les jours qui suivirent ce drame, j'eus l'indélicatesse de consommer une grande partie de ma production...

Tandis que je tombais dans l'alcool et la fainéantise, j'observais d'un oeil absent les choses se dérouler devant moi. Par le Père, que n'eus-je été plus vif alors ! J'ai réagi bien trop tard, je n'ai pas vu les signes. Je n'ai pas tout de suite entrevu que mes plis envoyés au Zagazorn n'obtenaient plus de réponse. Je n'ai pas non plus observé les tractations qui se donnaient au dehors de mon antre de perdition, des tractations secrètes où mon chafouin de fils serrait des mains intéressées, et intéressantes... Et c'est en l'an 978, un an jour pour jour après sa disgrâce, que Iarisleif se rappela à mon bon souvenir.

Il vint à ma porte, flanqué de nombreux autres Nains. Je reconnus dans le tas quelques visages familiers, des clients et des usuriers, pour la plupart. Je compris aussi que ça ne rigolait plus quand le métal brillant d'une hache me confirma la présence de Barbesables. Ils entrèrent dans ma brasserie comme dans un moulin, attisant ma colère. J'eus des mots un peu vifs, et je fus instantanément recadré. Ils étaient plus nombreux, de toute manière. Poussé dans un coin, je dus observer sans pouvoir rien faire ces cancrelats s'armer de vélins et faire l'inventaire de mes cuves, de mes barrils, de mes ustensiles et de toute autre chose à l'intérieur de la boutique et de la fabrique. Oh, j'ai protesté. J'ai pris des coups, j'en ai rendu. Mais à la fin, que pouvais-je faire d'autre ? Je me souviens avoir dardé mes yeux les plus noirs sur mon fils, qui discutait à voix basse avec un Nain plus âgé que je ne voyais que de dos. Lorsque Iarisleif me rendit mon regard, j'y vis une lueur qui me fit frémir. Il en jouissait, le petit enculé ! Ma perte et ma chute, c'était tout ce qui pouvait lui apporter satisfaction, et s'il avait pu se répandre sur place, il l'aurait fait !

Je ne sus jamais qui était ce Nain plus âgé avec qui il avait échangé quelques tractations secrètes. En revanche, je fus bien vite confirmé de ma déchéance par la suite : on me rapporta par le menu les nombreux prêts impayés, les échéances oubliées alors que je sombrais dans l'alcool, et la saisie à la fois de mes biens et de mes patentes. Je n'avais plus droit de produire, ni droit de vendre. Ils eurent jusqu'au culot de me demander de remercier ma propre engeance, qui avait selon eux plaidé ma situation et adouci la sentence. Mon oeil oui ! C'était ce sale chien qui avait tout manigancé, pour sûr ! Mais le pire était encore à venir. Car alors que j'en appelais à mes liens avec des clans influents de Thanor, Iarisleif s'approcha et produisit devant moi un gros paquet de lettres. Un gros paquet de lettres que je reconnus instantanément. C'était les miennes ! Cet espèce d'étron vivant avait détourné ma correspondance, et m'avoua avoir même usurpé mon identité auprès des miens ! J'en bouillais tellement que mes yeux roulaient d'une rage incontrôlable. Il avait été raconter aux Fût-de-Chêne et aux Souffle-Braise que ses parents étaient morts, et qu'il avait besoin de leur aide pour financer ses projets commerciaux à Thaar ! Le soufflet qu'il m'infligeait me stupéfiait autant qu'il excitait mon courroux. La force me manqua, mais je faillis tout de même lui en mettre une, avant que ses gorilles ne viennent me rosser de coups...

Je me souviens du réveil, très désagréable. J'étais en pleine rue, et un gamin me pissait dessus. Je n'ai plus honte de le raconter aujourd'hui, quel honneur me reste-t-il de toute manière ? J'étais devenu un moins que rien, un paria pour les miens. J'ai voulu de nombreuses fois prendre un vaisseau pour me rendre à Thanor, réalisant des travaux harassants pour me payer la traversée. Je ne sais qui était celui qui me vendait à chaque fois, mais je fus systématiquement refoulé du navire. Je savais que Iarisleif était derrière tout ça. Je n'avais nul moyen de communiquer avec mes pairs, et nul moyen de retourner chez moi. J'étais prisonnier de Thaar, seul et désargenté. Aussi, l'alcool aidant, je devins un mendiant, et la dernière trace de fierté en moi fut éteinte d'un revers de talon.

Quand on dort dans la rue, dans les venelles sales et les cloaques, on entend beaucoup de choses. On laisse traîner l'oreille, et on apprend qu'une information importante, ça peut se monnayer. J'en apprenais également un peu plus sur Iarisleif et ce qu'il avait fait, au fil des ans passés à dormir dans l'inconfort des ruelles. J'apprenais par exemple que cet ingrat avait établi une ligne commerciale d'importation avec Thanor, et revendait les productions liquoreuses et spiritueuses de nos cousins à travers tout l'Ithri'Vaan. Son franc succès excitait autant ma jalousie que mon dégoût. Il s'acoquinait avec les pires crasses de ce monde : les Trois-Diamant y voyaient un pilier de la communauté, les Brise-Dette se félicitaient de son amitié... Tout le monde semblait le louer pour sa valeur, oubliant presque la dégoûtante duplicité dont il était capable. M'avaient-ils tous oublié ? N'étais-je pas l'exemple parfait du pourquoi il ne fallait pas se fier à ce démon ? Les gens riaient de ma déconvenue, alors qu'il auraient dû en frémir, car un être capable d'infliger cela à sa propre chair n'aura pas plus de pitié envers ses amis.

Tenez, un autre exemple. Durant la grande éclipse qui donna lieu au Voile, j'ai eu des échos de sa déchéance morale. Il fut retrouvé en pleine orgie, sodomisant des mâles elgi et des femelles umgi ! Son désir de posséder jusqu'à des êtres aussi amoraux et contrefaits que lui, cela m'en coupa le sifflet ! Autant dire que je ne voulais pas en apprendre plus à ce sujet, bien qu'il me fut rapporté qu'il possédait à présent une lignée bâtarde. Ce gâchis de bon sang nain, voilà bien une énième bavure sur son nom, qui le fera précipiter dans le Grand Puits. Lui qui ne jure que par Heidum, il en fera bien mauvaise tête quand sa duplicité révélée aux dieux lui sautera au visage et le fera choir de son piédestal !

C'est le moment que j'attends... Dans l'ombre, dans la crasse, je surveille, j'observe, j'écoute. Un jour, il fera un mauvais pas, et il chutera aussi bas que moi. Là, dans la fosse à ordures dans laquelle il m'a précipité, nous serons alors à armes égales... et je le tuerai. Oui, je le tuerai ! Aussi sûrement que je suis Iarsaulf, fils de Iarisgun, du clan des Fût-de-Chêne, je l'occirai à la première occasion !

Ce ne sera pas une mince affaire. Depuis que son vieil ami Ozkun est passé de l'intendance à la régence, Iarisleif voit tous ses alliés accéder à des postes de choix. On parle même d'une collaboration plus sibylline et secrète encore entre ces deux-là. Quelque chose comme...


Le Nain adossé au mur, en vis-à-vis de l'épave vivante qu'était Iarisaulf, acquiesça d'un bref mouvement de tête. Puis il dit, de son accent prégnant et roulant.

- Quelque chose comme... La Loge d'Onyx ?

Iarisaulf se releva légèrement de son lit de crasses et de déchets. Il était si famélique, si vieux, sa barbe filasse et couverte de fange, on avait peine à reconnaître le fier Dawi d'antan.

- Précisément.

Le mystérieux Nain croisa les bras, toisant le déchet vivant qu'il avait en face de lui, sans doute dégoûté d'y voir un de ses congénères.

- La Loge n'existe pas.

Iarisaulf voulut rétorquer, mais en un battement de cil à peine, le Nain était sur lui, un couteau sur sa gorge. La surprise écarquilla les yeux de Iarisaulf, qui ne fit plus un mouvement. Puis, le Nain armé articula à nouveau.

- J'ai dit. La Loge n'existe pas.

C'est alors que tout se fit clair dans la tête du père trahi. Une révélation aussi sournoise que grandiose, aussi puissante qu'elle était terrifiante. Aussi terrible qu'elle en était désespérante. Il souffla plus qu'il ne dit, le métal froid de la lame encore sur sa trachée.

- Il... en fait partie... n'est-ce pas ?

Son menaçant interlocuteur ne répondit pas. Il se contenta de sourire, et de retirer sa lame, faisant un pas en arrière.

- C'est vraiment dommage qu'il te veuille vivant. Tu nous fais honte à tous, à traîner ta carcasse pourrissante dans le secteur. Mais soit. J'ai un message de la part de ton fils. Il souhaiterait te redonner une chance de te racheter, et te propose une réintégration complète au sein de la communauté, en échange de tes services dans son nouveau projet brassicole.

- Va crever.

Le Nain au couteau ricana, posant une main sur sa hanche.

- Prends bien le temps de réfléchir. On dit que la nuit porte conseil. Une nuit dans une poubelle, voilà qui doit donner matière à réflexion, même si tu en as passé déjà beaucoup trop. Je reviendrai, un soir où tu ne t'y attendras pas, récolter ton allégeance.

Il leva les bras, paumes vers le ciel.

- Allons, soiffard comme tu es, ça ne te plairait pas de reprendre la bibine ?

Iarisaulf, les yeux embués et le regard mauvais, conclut par ces paroles aussi sèches que le désert zurthan.

- Plutôt mourir de soif au fond d'un cul-de-basse-fosse que d'accepter la moindre goutte de son hydromel.

- En ce cas, fais attention, Iarisaulf, fils de Iarisgun. Tes désirs, en fin de compte, pourraient être comblés bien plus vite que tu ne le penses...

HRP:


Dernière édition par Iarisleif Fût-de-Chêne le Lun 2 Sep 2024 - 17:50, édité 4 fois
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MessageSujet: Re: Matoiseries en Tapinois, ou l'Irrévérence de l'Héritier [Terminée]   Matoiseries en Tapinois, ou l'Irrévérence de l'Héritier [Terminée] I_icon_minitimeJeu 29 Aoû 2024 - 11:55

Veuillez pardonner le double post, mais fiche terminée !
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MessageSujet: Re: Matoiseries en Tapinois, ou l'Irrévérence de l'Héritier [Terminée]   Matoiseries en Tapinois, ou l'Irrévérence de l'Héritier [Terminée] I_icon_minitimeVen 6 Sep 2024 - 17:40


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Et enfin, si tu as des question, n'hésite surtout pas à demander l'aide d'un parrain, ou à tout simplement poser tes questions dans la partie créée à cet effet.

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