La porte s'ouvrit sur un vieil homme courbé par le poids des années, serviteur des Sainte-Berthilde depuis son plus jeune âge. Il regarda l'arrivant avec un oeil critique. Même s'il disait ne pas être un mendiant, il en avait tout à fait l'air, si l'on omettait la longue épée qui battait son flanc. Ergan, puisque c'était là le nom du domestique, entrouvrit seulement la porte pour ne pas faire entrer le froid dans la grande bâtisse de pierres. Deux gardes se tenaient près de lui. Il observa un long moment le jeune homme qui lui faisait face avant de répondre :
"Madame la Marquise ne reçoit personne..."
Des bruits de pas derrière lui, puis une voix féminine, douce et légèrement grave, profonde.
"Laisse-le entrer, Ergan."
Le vieillard se courba un peu plus et ouvrit la porte en soupirant. Décidément, sa maîtresse recevait vraiment n'importe qui, c'était mauvais pour son image...
Il fit signe à l'inconnu de rentrer au chaud et ce dernier put voir face à lui, devant la porte, une jeune femme vêtue d'une longue robe vert sombre, simple et pourtant sophistiquée. Elle n'attendait pas de visiteur, mais le feu crépitait dans la cheminée de la pièce d'à côté, et la Marquise, puisque c'était bien elle, précéda l'homme dans cette pièce.
Ergan grogna en voyant les traces que laissait l'inconnu sur le sol et appela une jeune domestique pour qu'elle vienne nettoyer tout ça. Alors qu'il s'apprêtait à se rendre dans une autre pièce, Ivy l'appela et lui demanda de leur servir à boire. Il se dirigea vers les cuisines, en quête d'hydromel.
La Marquise, pendant ce temps-là, s'était installée dans un grand fauteuil et avait enjoint le jeune homme à en faire de même. Sur son visage, nulle expresison ne transparaissait. Elle croisa les mains sur ses genoux, droite sur son siège, et entama le dialogue.
"Vous vouliez voir le maître des lieux, vous l'avez devant vous. Maintenant parlez. Que puis-je faire pour vous ?"