Un peu de temps libre ... [PV Etheldred et Nakor]

L'automne était bien implanté au-dessus de Diantra, offrant au ciel un manteau de nuages grisâtres. Keshem quittait le Fort de la Vaillance pour pouvoir profiter d'une permanence bien méritée. Voilà déjà un mois qu'il s'entrainait sans relâche, aux cotés de ses pairs, et la permanence que lui avait accordé le Seigneur Portelame, ne pouvait que lui faire du bien. Le colosse resta un bref instant immobile juste devant la porte du fort, les yeux rivés sur la grisaille, qui lui rappelait le ciel qui avait trôné au-dessus de la bataille d'Alonna. Un bref soupir plus tard, qui l'aida à chasser les sombres images qui vagabondaient dans sa tête, il reprit sa route et se dirigea vers les artères bruyantes de la capitale.

Il marchait d'un pas décidé, vétu d'une tunique frappée de la croix blanche, son emblème de chevalier, les cheveux légèrement plus long que lorsque nous l'avions quittés et les joues rasées par le barbier du fort. Un long manteau en laine tombait depuis ses épaules jusqu'à ses chevilles. Il gagna la rue des Taverniers, devant son nom au nombre abusif d'auberges qu'elle comptait. Un petit attroupement s'était formé autour d'un jeune musicien jouant du luth, accompagné d'un petit chien blanc faisant de petites cabrioles, au plus grand bonheur des quelques enfants qui observaient. Le chevalier s'amusa des tours du duo avec le même engouement, son regard devenant le même que le petit garçon qui se trouvait juste devant lui. Keshem se saisit de la petite bourse qui pendait à son gros ceinturon en cuir et en sorti un pièce de cuivre qu'il lança dans la petite écuelle en bois, qui se trouvait devant le jeune barde. Alors que la piècette tintait en touchant le fond de l'assiette, Lerr se dirigea vers l'entrée toute proche d'une auberge. Il leva les yeux vers l'enseigne, tentant d'appliquer les leçons de lecture qu'il prenait depuis son adoubement.

Le ... san ... gli ... er ... prou ... proupe! ...

Il fronça les sourcils et reprit la lecture, haussant légèrement la voix.

Le sanglier proupre! ... Pour...

Pourpre ...

La voix venait de sa gauche et fit légèrement sursauter l'ancien bûcheron qui se tourna pour tomber sur un visage qui ne lui était pas étranger.

La journée avait commencé tranquillement pour Etheldred. Un seul patient, un habitué qui venait renouveler un remède, quelques préparations de potions qu'elle savait utiliser assez souvent pour en préparer à l'avance... Puis un gamin était arrivé en courant pour demander qu'elle vienne voir son père. Ce dernier s'était écroulé subitement et personne n'arrivait à le réveiller, du moins c'était ce qu'avait dit le garçon, à moitié en larmes. La jeune femme avait donc attrapé sa sacoche et courut jusqu'à l'auberge qui se trouvait non loin de là, guidée par le petit. Une heure plus tard, l'aubergiste était à nouveau sur pied, du moins, dans son lit et bien vivant. Etheldred prit le temps de vérifier qu'il se reposerait le temps nécessaire, se fit payer, et promit de repasser le lendemain car l'état du patient la préoccupait malgré tout.

Elle s'apprêtait à sortir de l'auberge lorsqu'en passant près de la porte, elle entendit des efforts de déchiffrage.

" Pourpre... " corrigea-t-elle machinalement, s'apprêtant à passer son chemin.

Sauf qu'en croisant le regard de la personne en question, elle s'arrêta, surprise. Elle connaissait cet homme... ou du moins, elle pensait le connaitre, car celui qu'elle avait soigné, quelques mois plus tôt, n'était pas un chevalier. Celui-ci arborait une cotte d'arme, elle devait faire erreur.

" Keshem Lerr ? "

Hum... Elle aurait peut-être mieux fait de passer son chemin. D'abord parce que si elle se trompait elle préférait en général éviter d'avoir affaire aux nobles, ensuite parce que même si elle avait raison, il ne devait plus se rappeler d'elle. Elle, elle se souvenait de chacun de ses patients. Enfin, pas tous ceux d'Alonna, là, elle avait été bien trop débordée et de toutes façons elle n'avait pas connu le nom de la plupart d'entre eux. Mais les autres, elle s'en rappelait, à plus forte raison si elle les avait soignés à peine quelques mois plus tôt. Bref, elle n'avait pu tenir sa langue et passer simplement son chemin. Trop tard, maintenant, elle se retrouvait face à un chevalier qui non seulement risquait de ne pas avoir la moindre idée de qui elle était, mais qui en plus pouvait aussi bien se vexer d'avoir été repris de la sorte ! Non pas qu'elle ait pensé à mal, mais bien souvent les nobles n'appréciaient pas d'être pris en faute, encore moins par les petites gens !

Nakor revenait de son orphelinat, il avait passé un peu de temps avec les enfants. Ces derniers jours ils avaient enfin atteins l'étape finale de la remise à niveau de la confiance des enfants envers les adultes! Quelle grâce que la candeur et l'amour absolu des enfants. À force de terroriser les adultes qui travaillaient avec lui et à force de passer du temps avec les enfants à surveiller les autres adultes puis en y passant de moins en moins de temps, les petits orphelins avaient pu redonner leur confiance à ceux qui s'occupaient d'eux. Ainsi, heureux de son avancée, le mage avait décidé de quitter le bâtiment, en prévenant ouvertement les enfants de son départ momentané, pour que les jeunes puissent se faire à l'idée, que même sans le vieux barbu dans la place, il ne leur arriverait rien. Le mage, son bâton dans la main, sa barbe en place et son chapeau sur la tête alla donc se mêler à la foule dans Diantra. Certains reconnaissaient le mage qui avait tué en place public le monstre qui avait orchestré les viols collectifs des orphelins. Beaucoup s'inclinaient devant Nakor et le saluait, respectant là un homme de foi et de conviction qui s'était battu pour ses idéaux et qui, au nom du roi, faisait régner l'ordre. Certains au contraire s'écarter de son chemin, le craignant, lui et sa puissance magique. Après tout, c'était le magicien personnel du roi disait on. Nakor avait toujours envie de furieusement corriger cela, en disant qu'il n'était pas le mage du roi, mais le conseiller en magie du roi. Mais cela lui aurait donné plus de peine qu'autre chose, il laissait donc dire qu'il était le mage du roi. Se promenant donc, le sourire aux lèvres, à la pensée de tout ceci, qu'il arriva proche d'une auberge où il cru reconnaitre un visage, penché sur un écriteau. S'acharnant à déchiffrer ce qui était écrit, Nakor cherchait où il avait vu cet homme. Il savait qu'il ne lui avait jamais parlé, mais qu'il l'avait vu ... Le vieux mage cherchait dans sa vieille mémoire pleine de choses, quand il tapa dans son poing en disant simplement à voix haute

"Mais oui, en Alonna!"

Au même moment il vit sortir de la taverne une femme qu'il ne connaissait que trop bien, une femme douce et parfaitement serviable, qui avait décidé de donner sa vie pour sauver celle des autres. Etheldred la guérisseuse d'Alonna. Nakor s'approcha un peu plus et allait parler pour saluer son amie quand il l'entendit demander à l'homme s'il s'appelait bien Keshem Lerr. Un très grand sourire sur les lèvres, Nakor continua

"Et bien mes enfants, je ne sais pas si vous êtes bien Keshem Lerr, en ce qui vous concerne. Mais je sais que tu es Etheldred, la douce guérisseuse d'Alonna!"

Un petit rire cristallin prit place entre les deux autres protagonistes de cette histoire puis Nakor continua

"Que je suis content de te revoir en pleine santé mon enfant!"

Nakor lui prit de force la main droite et y déposa un baiser, comme s'il avait à faire à une grande dame. Ce qui était le cas, pas socialement peut être, mais une grande dame de cœur. Il se tourna alors vers le chevalier et continua, en poussant les deux vers l'intérieur de la taverne

"Allons allons, jeune homme vous allez bien tenir compagnie à un vieux fou qui a lutté en Alonna et une femme qui, à un moment ou à un autre, vous aurez guéri de je ne sais quoi hein?"

Nakor poussa donc les deux jeunes gens à l'aide d'une force bien grande pour un homme aussi vieux et desséché que lui. Mais qui pouvait résister au sourire ravageur et à la bonne humeur de Nakor le vieux fou de Nisetia. Maintenant il espérait simplement que le fier guerrier ne résisterait pas trop et qu'il accepterait de bon cœur d'accompagnait Nakor et Etheldred.

Alors qu’il observait la petite dame qui venait de le reprendre, il reconnut la guérisseuse qui avait soigné sa main, il y a de cela des mois. Elle le reconnut également puisqu’elle l’appela par son nom, même si son air dubitatif amusa légèrement le chevalier. Avait-il changer à ce point ? Ou était-ce dû à ses habits qui n’avaient plus grand-chose à voir avec ceux qu’ils portaient lors de leur première rencontre ? Il s’apprêta à répondre lorsqu’une voix inconnue les interrompit. Un vieux bonhomme, empêtré dans une large robe et soutenu par un long bâton, s’immisca entre les deux jeunes gens, un large sourire se dessinant sous sa barbe fournie. Il salua avec respect la guérisseuse, Etheldred ; au moins Lerr n’aurait pas l’impolitesse de demander le nom de la jeune femme, qui lui avait échappé depuis le temps, surtout vu le nombre de rencontres qu’il avait fait depuis leur mésaventure à Diantra.

Toujours est-il que le vieux grigou abordait cette rencontre avec une jovialité non-dissimulée, entraînant le colosse et l’herboriste à l’intérieur de l’auberge. Keshem fut surpris par la force que ce vieillard pouvait développer pour pouvoir le pousser gentillement près d’une table. Le colosse s’assit sur un tabouret, face à Etheldred et le vieilard excité pris place en bout de table, entre ses deux compagnons du jour. Le chevalier, encore stupéfait de la verve et l’aisance du vieux bonhomme au chapeau pointu, prit enfin la parole.

Eh bien … Euh … Visiblement vous me connaissez tous les deux … Ravi de vous revoir Etheldred, j’ai suivi vos conseils et elle va beaucoup mieux…

Il montra sa main droite à la guérisseuse en bougeant ses doigts rapidement, un petit sourire au coin des lèvres. Puis il se tourna vers le vieillard

… Je … Je ne vous connais pas Monsieur, je l’avoue … Je suis bien Keshem Lerr, Chevalier de Wine … A qui ai-je l’honneur ?

Une jeune fille s’approcha alors du trio pour prendre les commandes et machinalement, Keshem répondit avant de se tourner vers ses compagnons.

Un gobelet de vin de Hautval … Et vous ?

"Et bien mes enfants, je ne sais pas si vous êtes bien Keshem Lerr, en ce qui vous concerne. Mais je sais que tu es Etheldred, la douce guérisseuse d'Alonna !"

Etheldred sursauta en voyant surgir et en reconnaissant Nakor. décidément, c'était l'instant des retrouvailles impromptues ! Elle lui sourit, sincèrement contente de le revoir, tandis qu'il enchainait, toujours aussi enthousiaste que dans son souvenir. Heureusement qu'elle, elle n'était plus dans l'état d'épuisement où elel se trouvait à Alonna. C'est d'ailleurs avec entrain qu'elle lui répondit :

" Je suis heureuse de voir que vous êtes également en pleine forme. "

C'était le moins que l'on puisse dire vu la vivacité du vieillard. Elle ouvrit de grands yeux quand Nakor lui fit un baise main, ne s'y attendant pas du tout. Dans la foulée elle était entrainée en même temps que Keshem - car c'était bien lui, à n'en pas douter - à l'intérieur. Elle se retrouva donc assise face au chevalier, ne sachant pas trop quoi dire... Après tout, elle connaissait fort mal ses deux interlocuteurs, elle se souvenait de l'un comme d'un géant un peu bizarre et de l'autre comme d'un magicien... ben un peu bizarre aussi quoique très sympathique. Ou alors c'était elle qui était étrange à trouver tout le monde bizarre ? Hem...

Heureusement, Keshem se décida à briser le silence que de toutes façons Nakor n'aurait probablement pas laissé s'installer. Ah oui, Etheldred se rappelait lui avoir posé une attelle, quelques mois plus tôt. Elle hocha la tête, regardant avec attention la main, contente de voir que ses soins avaient été efficaces. Gardant le silence, elle laissa Nakor répondre et se contenta de demander un verre de bochet, une boisson à base de miel alors qu'elle déposait sa sacoche à côté d'elle. Au moins, si l'aubergiste avait un nouvel accès de vertiges, elle serait sur place... D'ailleurs le gamin qui était venu la chercher traversa la salle en lui lançant un coup d'œil vaguement intrigué, se demandant probablement pourquoi elle était encore là. Sûr que ce n'était pas dans ses habitudes de trainer dans les tavernes autour d'un verre...

Et voilà qu'elle se retrouvait attablée avec un chevalier et le magicien du roi ! De quoi la rendre encore plus muette qu'elle ne l'était habituellement. Vivement qu'on leur apporte leur commande, qu'elle puisse au moins s'occuper les mains avec son verre pour se donner une contenance ! Autant elle pouvait se montrer très sure d'elle lorsqu'il s'agissait de soigner, autant, en temps normal, la jeune femme se montrait plutôt timide.

Nakor riait doucement en poussant ses deux nouveaux mais du moment! Une fois à table le chevalier balbutia quelques mots ce qui fit rire Nakor un peu plus fortement. Une fois calmé il réfléchi un peu en plantant son regard dans la serveuse, il se mit à caresser longuement sa barbe dans un silence de marbre puis avec ses deux mains, prit deux gros morceaux de sa barbe, en laissant une gros morceau tranquille, leva un peu les mains et se donna par là même l'air d'un vieux nain, qui avait deux belles tresses dans sa barbe et dit en roulant le r sur un ton bourru

"Et bien ce serrrra une pinte de bierrrrrrrrrrrrre pourrrrrrr moi, une bierrrrrrre naine sacrrrrré nondidiou!"

Puis Nakor explosa de rire en se tapant la cuisse. Pauvre vieux fou, il riait toujours autant de ses blagues minables. La commande étant partie, Nakor se tourna vers les deux autres membres de cette compagnie puis resta un brin silencieux, regardant les deux autres. L'une silencieuse, avait la tête presque baissé par la timidité et l'autre se demandait qui était ce vieillard qui semblait le connaitre. Nakor décida de venir au secours de ces deux là, qui semblaient incapable de tenir une conversation avec des étranges.

"Bien, jeune homme, si j'ai précédemment prononcé votre nom c'est parce que je suis arrivé quand Etheldred le disait, sinon je vous avoue que je ne le connaitrai pas. Bien que votre visage m'est familier ... oui j'ai du vous croiser sur le champ de bataille en Alonna! Et oui j'y étais mon ami ... rhoo mais si souvenez vous voyons, le ciel noir d'encre, devenant subitement bleu et ensoleillé ... c'était moi!"

Nakor disait cela comme si c'était une évidence absolue! Le vieux fou continua

"Mais si, les boules de feux et les éclairs contre le camp adversaire, sur la fin du combat, c'était moi aussi mon cher! Je suis le conseiller en magie personnel du roi Trystan, Nakor!"

Puis le vieux fou fit une petite grimace, tira la langue et ajouta

"Pas le sorcier du roi hein? Le conseiller en magie du roi, n'allait pas croire comme le peuple le fait depuis que j'ai pendu en place public l'ancien directeur de l'orphelinat après mettre rendu compte qu'il violait les enfants dont il avait la charge, que je suis le sorcier du roi ... le roi est un ami, mais je ne suis le pantin de personne!"

Nakor glissa un petit clin d'œil aux deux humains et rit un peu. Il continua encore, puisque les autres semblaient ne rien dire

"Etheldred vous à donc soigné une main! Une main bon sang, n'est ce pas là formidable ce don qu'elle a de permettre à un chevalier de continuer sa noble tache : défendre le peuple! Quelle magnificence vous ne trouvez pas Keshem ... ho vous permettez que je vous appel Keshem, Keshem?"

Puis Nakor explosa de rire et vint donner une grande claque amicale dans le dos de l'homme! Une claque qui avait la force de faire plier le chevalier. Nakor riait à plein poumons, puisqu'il venait de demander la permission de faire ce qu'il n'avait de cesse de faire : appeler le chevalier par son prénom. Une fois calmé, Nakor reçut enfin sa pinte, et les deux autres ce qu'ils avaient demandé. Nakor leva donc son verre et dit simplement

"À notre victoire en Alonna, et au souvenir de tout ceux qui sont tombé pour le monde des hommes!"

Nakor attendit que les autres acceptent de trinquer puis descendit d'une traite son énorme pinte. Vieux poivrot qu'il était. C'est donc la barbe pleine de mousse qu'il posa violement la pinte sur la table, en riant comme un soulard, puis il agita la main au dessus de son menton et subitement la mousse fut comme absorbé dans les airs. La barbe fut donc instantanément propre, lavé de cette mousse épaisse qui se rassembla en une grosse boule. Nakor ferma l'œil gauche, puis l'œil droit et ainsi de suite à plusieurs reprises. Il était en train de jeter un sort : la mousse se transforma en un chevalier humain se battant à l'épée contre un drow. Nakor se mit à bouger la tête dans tout les sens, comme s'il encourageait sa petite création à lui donner un beau spectacle! Il disait comme un enfant

"Oui allez, vas y! Non, attention ... voila, allez, hop là non oui oui vas y ... rhooo non fais attention ... hoooooo!"

Le drow en mousse de quatre centimètre de haut venait de couper le bras du guerrier humain de la même taille! Mais rapidement la tête du drow en mousse de bière fut arrachée par le guerrier humain, qui avait sacrifié son petit bras pour couper la petite tête de son petit adversaire. Nakor claqua des doigts et la mousse retourna dans son verre. Le vieil homme hocha la tête à plusieurs reprises, comme pour donner son approbation à ce petit échange d'épées, puis ajouta enfin, devant deux humains qui devaient être un brin éberlué

"Alors et vous, que faites vous donc dans cette bonne vieille cité?"

Puis Nakor attendit de voir si son petit spectacle avait amusé suffisamment la galerie pour délier les langues.

Après que chacun eu passé commande, le vieux bonhomme se mis à parler avec une jovialité qui faisait plaisir à voir. Il était, certes, excentrique et bien excité pour un homme à l’âge aussi avancé, mais le grand enfant qu’était Keshem ne pouvait se détacher des facéties et des tics qui pullulaient sous la barbe fournie. Il évoqua Alonna et ses sombres souvenirs mélant sang, boue, cris et mort. Keshem tenta bien de prendre la parole, mais le vieux magicien qui s’était présenté, désormais, sous le nom de Nakor, conseiller du roi Trystan, se mit à narrer ses exploits sur le champ de batailles, les nuages qui s’étaient écartés pour laisser place au soleil, les boules de feu qui fusaient au-dessus de sa tête lorsqu’il chargeait au côté du baron de Hautval, c’était donc lui !

Un sourire enchanté naquit sur les lèvres charnues du colosse, soit il avait affaire au plus grand magicien de ce monde, soit au plus grand menteur de ce monde … Keshem réussit finalement à intercaler une phrase hésitante dans le flot de paroles.

Bah moi, à part un paladin tiré par son cheval, qui s’appelait … Marcus je crois, ou un truc dans l’genre, j’ai croisé que des drows …

Il tourna la tête vers Ehteldred, souriant un peu bêtement, lorsqu’il se souvint soudain des mots de Nakor lorsqu’il salua la guérisseuse. Il avait beau avoir meilleur allure, il était toujours un peu long à la détente, et puis ce fichu musicien, à l’entrée, qui avait attiré son attention … « La guérisseuse d’Alonna » … Ses traits se resserèrent et prirent un aspect plus sérieux, mais le vieux magicien repartait dans ses élucubrations, parlant de magicien du Roi et de directeur d’orphelinat, bien trop rapidement pour que le grand bêta ne capte toutes les informations lâchées par seconde. Par politesse, il tenta de l’écouter avant de se prendre une grande claque dans le dos qui le fit se courber. Mais d’où venait cette force ?! Le colosse se redressa, les yeux ronds, ne lachant plus le vieux fou du regard. Il sourit légèrement en reprenant la parole

Euh oui, Keshem c’est très bien

Nakor leva son verre et trinqua avec ses deux compagnons, puis il ingurgita sa chope, laissant un temps suffisant au chevalier pour s’adresser à la guérisseuse.

Mais … Vous étiez à Alonna ? … Mais qu’est ce que … Mais … Cette petite fille … que … j’ai …

Le colosse se souvint de cette petite blonde qui voulait l’aider et qu’il avait presque agressé. Il regrettait vraiment, une mauvaise période de sa vie, la fatigue … Il se tourna de nouveau vers Nakor, après avoir adressé un petit sourire désolé à la jeune femme. Alors qu’elle répondait, le magicien avait créer des marionnettes de mousse qui guerroyer au milieu de la table. Le colosse se détacha de la jeune femme pour observer la scène, sans vraiment se soucier de ce que disait Etheldred, en arquant un sourcil tout d’abord puis il entra dans le jeu et encouragea silencieusement l’humain, au contraire de Nakor qui ne cachait pas son engouement. Un sourire satisfait naquit sur le visage du chevalier lorsque le guerrier de mousse humain décapité son adversaire, comme il l’avait fait sur le champ de bataille. Le vieux magicien questionna finalement ses deux jeunes compères sur leurs activités dans la capitale et le géant prit la parole.

Je suis ici en permanence … Je vis dans le fort de la Vaillance, donc pas grand-chose à dire en fait, héhé … J’étais qu’un pauvre bûcheron quand Etheldred m’a soigné la main, héhé … Et vous Etheldred, racontez nous ! Vous étiez à Alonna ?!!

La bonne humeur de Nakor était contagieuse et Etheldred ne put retenir un petit rire en le voyant imiter un nain... rire qui s'étrangla assez vite quand elle associa "Belegar" à "nain". Elle préféra faire comme si de rien n'était et écouter la conversation qui dérivait sur Alonna. Comment le magicien arrivait-il à en parler avec autant de détachement ? Pour elle, c'était sans doute ses pires souvenirs... Des morts, des morts, encore des morts et autant de blessés... Ce qui l'avait vraiment marquée c'était que lorsque les soldats, au dehors, criaient victoire, elle, à l'intérieur ne voyait pas diminuer le nombre de blessés qu'on lui apportait. Savoir que c'était terminé sans pour autant pouvoir s'arrêter en remerciant les dieux avait finalement été plus dur que travailler dans l'urgence durant la bataille. Une impression de tâche sans fin... En ce qui la concernait, la jeune femme n'avait pas vu les fameuses boules de feu et autres joyeusetés mais elle en avait assez entendu parler par ses patients pour avoir une idée de ce dont il parlait. Elle haussa les sourcils quand elle entendit le prénom de Marcus qui lui disait quelque chose... Le protégé du magicien portait le même si elle se souvenait bien. Pour être honnête, elle n'en était plus très sure, les événements de ces jours là s'embrouillaient pas mal dans son esprit, l'état de fatigue dans lequel elle s'était trouvé n'avait aidé en rien.

Parler de la bataille la plongea dans des souvenirs morbides qu'elle s'efforçait d'oublier depuis qu'elle était rentrée. Elle n'était pas sure que tout refouler soit une bonne idée pour son état mental à long terme, mais si elle s'était occupée d'elle-même comme d'un patiente, elle se serait conseillé de se confier à un proche. Et c'était bien l'ennui... Elle ne releva la tête que lorsqu'elle entendit prononcer son prénom. Un don formidable ? Heu... Elle haussa vaguement les épaules, un peu gênée, avec un petit sourire en coin à l'adresse de Keshem de l'air de dire "c'est rien, il en rajoute".

Le bochet qu'elle avait commandé arriva à ce moment et elle leva son verre, reperdant aussi vite le sourire quand Nakor mentionna à nouveau Alonna. Si seulement il pouvait cesser de parler de la bataille ! Victorieuse, oui, mais à quel prix ? Elle trinqua néanmoins avant de prendre une gorgée. Lorsque Keshem lui demanda si elle était à Alonna, Etheldred hocha simplement la tête, puis se demanda de quelle petite fille il parlait : une gamine d'Alonna qui aidait pour les soins ? Ou, plus tôt, la petite... comment déjà ? Kalimë ? lorsqu'ils s'étaient rencontrés pour la première fois ? Il avait l'air désolé et Etheldred n'avait pas la rancune tenace, de toutes façons. En même temps, elle jeta un coup d'œil perplexe au magicien. Que fabriquait-il à présent ? La suite lui fit écarquiller les yeux... C'était tout simplement ben... magique ! Un petit chevalier humain et un petit drow. Elle se demanda un instant si pour le magicien ce qui s'était passé à Alonna avait aussi peu d'importance que ce petit théâtre, avant de se morigéner : elle était injuste, il fallait qu'elle se reprenne !

La conversation se poursuivit et elle s'efforça de chasser ses idées noires, ne voulant pas se complaire dedans, elle détestait quand elle était dans cet état là. Ils avaient tous les trois survécus, donc il n'y avait pas de quoi pleurnicher ! Secoue toi un peu, Etheldred, s'intima-t-elle intérieurement. Ainsi, Keshem avait eu une promotion. Et quelle promotion ! Passer de bucheron à chevalier, ce n'était sans doute pas à la portée du premier venu. Qu'avait-il bien pu faire pour en arriver là ? Elle finit par hocher la tête lorsqu'il lui posa quelques questions.

" Oui, j'étais à Alonna. Je suis arrivée avec les éclaireurs nains et j'y suis resté toute la saison, après la bataille, pour achever de soigner les blessés. Après, je suis revenue ici et j'ai repris l'herboristerie de ma grand-mère. "

Visiblement, ça ne l'enthousiasmait pas vraiment. Elle se rendit compte qu'elle devait faire une drôle de tête et eut un petit sourire navré :

" Désolée si je ne suis pas de très bonne compagnie... Alonna m'est restée en travers de la gorge et j'ai l'impression d'être retournée au point de départ. "

Elle avait quitté Diantra pour s'installer en forêt, elle se sentait enfin libre et chez elle, et voilà que les drows la forçaient à retourner en ville par sécurité. Elle haussa les épaules en souriant, un peu plus gaiement, bien décidée à ne pas se laisser abattre, du moins pas devant eux :

" Peu importe, je n'ai pas grand chose à dire non plus. "

C'était vrai, elle n'allait pas leur raconter sa vie en long en large et en travers, ça n'avait vraiment rien d'intéressant. Par contre, sa curiosité la fit ajouter :

" Vous, en revanche, je me demande bien comment un bucheron a pu devenir chevalier... c'est assez impressionnant ! "

Pour une fois qu'elle n'était pas face à un patient avec lequel elle se forçait à garder ses questions par discrétion ! Et puis, elle se disait que plus ils parleraient d'eux, moins elle parlerait d'elle et ça lui convenait très bien !

Nakor prit note des petites remarques que Keshem avait fait durant son long discours puis écouta à son tour Etheldred. Une fois qu'elle eut elle même finit de balbutier, Nakor explosa de rire, il mit même la tête sur son bras, attablé et pleura de rire dans sa manche. Cela dura bien quelques dizaines de secondes et une fois redressé Nakor reprit la parole tout en se séchant une larme de son index droit

"Ho par tout les dieux tout les deux vous êtes exquis vraiment! Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas autant ri! Merci à vous vraiment, car le rire est le meilleur des remèdes contre ... contre tout!"

Il sourit à ses deux acolytes puis corrigea un peu tout ce qui avait été dit

"Mais non, pas Marcus enfin ... Marius, mais oui ce brave Marius, il m'est presque tombé dessus sur la bataille ... la malchance chanceuse court auprès de ce garçon savez vous? Il est tellement maladroit qu'il lui arrive des choses folles ... et on le croit poursuivis par la malchance, mais à chaque fois cette soit disant malchance lui à porter bonheur. Un drôle de type ce jeune homme."

Nakor ne put se retenir de rire en pensant à lui et en disant

"Ho ça oui un drôle de type!"

Le petit rire passé, Nakor continua

"Je vois donc que c'est par le biais de Marius que nous sommes relié ... vraiment étonnant comme le monde est petit, petit et vaste à la fois, pour qu'il permette à des gens venu d'horizons aussi différentes, de vivre en un même lieu, un même moment de joie!"

Puis il tourna un peu plus son attention sur celle qui restait silencieuse, pas parce qu'elle ne savait pas quoi dire, mais parce qu'elle était perturbé, au contraire du gros balourd de chevalier, qui semblait savoir tenir une conversation comme une chèvre le ferait avec un serpent!

"Oui, des moments de joies ma fille, que l'on ne peut pas refuser ... j'ai était comme toi il y a longtemps, quand j'ai vu mes fils mourir, quand j'ai prit part à mon premier combat, quand j'ai pleuré toutes les larmes de mon corps pour des êtres perdu! Mais j'ai vécu longtemps Etheldred, assez longtemps pour savoir que, c'est justement parce que des morts nous entourent, que nous devons vivre une vie pleine, et en profiter ... c'est dur, mais c'est ainsi, pense à ce que les gens qui sont mort aimeraient faire à ta place ... ho oui, ils passeraient chaque seconde à profiter un peu plus de là vie, à sourire, à profiter de l'instant présent, tout en sachant que du jour au lendemain tout cela peut finir! Je ne me moque pas de ce qui s'est passé, je n'en fait nullement fis, je ne l'oublie pas et ne prend pas ça à la légère, c'est justement parce que je prends ça très très au sérieux, que je ne cesse de m'amuser de la vie, pour faire honneur à tous les autres!"

Voila, il fallait que se soit dit pour que la jeune femme percute, qu'elle surpasse son état de léthargie, un état qu'elle devait s'interdire si elle avait du respect pour les hommes et les femmes tombé à la guerre. En tout cas une petite douche froide ne devait pas lui faire de mal, c'est pourquoi Nakor s'était permit ce commentaire. En effet il détestait voir la jeune femme abattu. Il reprit par contre la discussion là où ils en étaient restés parce que cette partie là l'intéressait aussi et parce que cela permettrait de mettre un peu de joie dans la table de trois

"Oui c'est vrai ça ... comment diable un bucheron peut être devenir chevalier ... et je vous en supplie, tentez mon cher Keshem de dire plus de trois mots à la suite sinon votre histoire finira trop vite et je serai encore obligé de parler de moi!"

Nakor explosa de nouveau de rire, il envoya une fois de plus une claque monumentale dans le dos de Keshem, à presque l'en décoller les poumons puis glissa un clin d'œil moqueur et complice à Etheldred, comme si tout les deux se moquaient très gentiment du chevalier et de son incapacité à dire plus de trois mots à l'affilé. C'est devant un Nakor calmé que Keshem eu enfin du silence pour parler.

Le vieux fou explosa de rire, se pliant sur la table, les larmes coulant sur ses vieilles joues ridées. Il fit noter à Lerr que le paladin en question, s’appelait Marius … Peut-être, il n’avait pas vraiment la mémoire des prénoms. Et Nakor reprit un discours rapide sur la chance d’être malchanceux, ou la malchance d’avoir de la chance, enfin, de ce qu’il avait compris. Il se tut enfin, laissant Etheldred répondre aux interrogations de Keshem.

La jeune femme avait donc assisté à toute la bataille … Keshem collectionnait les images morbides alors qu’il n’avait connu que les derniers chapitres de ce terrible siège, ce qu’elle avait vu devait être terrible. Il l’écouta, compatissant devant l’amertume qui suintaient de ses mots. Mais, le vieux Nakor prit de nouveau la parole, mais cette fois, le ton était bien plus calme et rassurant, de l’image de vieux fou excentrique, il passait à celle du grand-père sage et rassurant, donnant une leçon de vie à ses jeunes compagnons. Keshem hocha de la tête en se tournant vers la jeune femme, comme pour appuyer le discours du magicien. Il fallait savourer la chance qu’ils avaient et honorer ceux qui étaient tombés en défendant la cité. Mais Etheldred et Nakor se tournèrent tous deux vers le géant, le questionnant sur son étonnante ascenscion. Il fallait l’avouer, même lui avait encore un peu de mal à réaliser son parcours et se mit à conter toute l’histoire.

Eh bien … Vous vous souvenez, Etheldred … Vous m’avez indiqué la direction de Hautval … J’y ai effectivement trouvé des sombres, et j’ai combattu auprès du baron de Hautval. Il m’a accusé de braconnage, alors que cette perdrix franchement, elle était pas très grosse ! Et donc, il m’a donnait le choix entre la corde et l’armée … J’avais pas vraiment le choix, donc … et c’est là qu’il me sort, dans l’armée, certes, mais dans le Lys d’or … Héhéhé, carrément !

Il but une gorgée de vin avant de poursuivre.

Et donc, je me suis retrouvé dans la garde du Roi Trystan, et on est partis vers Alonna. Avec le seigneur Portelame, on a sauvé le Roi et le Baron de Hautval d’un tir de catapulte, alors qu’on venait à peine de prendre place sur le flanc des Drows. Le Roi m’a adoubé officiellement lorsque nous sommes rentrés à Diantra, y a quelques mois … Et voilà quoi !

Il ne voulait pas se vanter de ses faits d’armes, mais il ne pouvait une certaine fierté lorsqu’il évoquait son adoubement devant une grande partie de la noblesse, même si l’assemblée était plutôt hostile à la consécration d’un paysan. Il ne pouvait s’empêcher de sourire et il poursuivit, mais cette fois c’était lui qui poserait la question.

Mais, dites-moi … Vous le savez certainement, Charles de Hautval est porté disparu depuis la bataille. Je l’ai vu quitter le camp au lendemain de notre victoire, mais l’auriez vous aperçu ? Dans la ville ou peut-être vous, Nakor ?

Le fou rire de Nakor tira un sourire à Etheldred. La bonne humeur du magicien était contagieuse, encore une fois, et elle devait reconnaitre que ça lui faisait le plus grand bien. Ah oui, Marius et non pas Marcus, maintenant qu'elle y pensait. Elle se demandait bien comment le fait d'avoir atterri sur une paillasse d'hôpital avait pu se révéler être une chance. Elle l'avait soigné, certes, mais de là à trouver ça chouette... Qu'est ce que le paladin était devenu finalement ? Elle n'en avait pas la moindre idée. Comme tous ses patients d'Alonna, il avait été effacé par les blessés suivants qui demandaient plus de soins.

Vint ensuite tout un monologue à l'adresse de la jeune femme qu'elle écouta sagement, sachant très bien qu'elle l'avait amplement mérité :

"Oui, des moments de joies ma fille, que l'on ne peut pas refuser... j'ai été comme toi il y a longtemps, quand j'ai vu mes fils mourir, quand j'ai pris part à mon premier combat, quand j'ai pleuré toutes les larmes de mon corps pour des êtres perdus ! "

Le magicien s'était dit plus vieux que l'elfe, à Alonna... Quelle vie avait il donc eu ? Il semblait savoir de quoi il parlait, en tous cas, et elle se garda bien de l'interrompre, méditant ce qu'il disait.

" Mais j'ai vécu longtemps Etheldred, assez longtemps pour savoir que, c'est justement parce que des morts nous entourent, que nous devons vivre une vie pleine, et en profiter... c'est dur, mais c'est ainsi, pense à ce que les gens qui sont mort aimeraient faire à ta place... ho oui, ils passeraient chaque seconde à profiter un peu plus de la vie, à sourire, à profiter de l'instant présent, tout en sachant que du jour au lendemain tout cela peut finir ! "

Drôle de façon de voir les choses... Enfin, pas si drôle que ça et plutôt judicieuse. Oui, se lamenter n'amenait rien de bon, il avait raison. Seulement, c'était plus facile à dire qu'à faire, surtout quand on avait la désagréable impression qu'on tournait en rond. Le magicien continua, comme s'il avait lu dans ses pensées :

" Je ne me moque pas de ce qui s'est passé, je n'en fait nullement fis, je ne l'oublie pas et ne prends pas ça à la légère, c'est justement parce que je prends ça très très au sérieux, que je ne cesse de m'amuser de la vie, pour faire honneur à tous les autres ! "

Ça paraissait tellement évident, dit comme ça... Clair comme de l'eau de roche, parfaitement logique, et tellement simple ! Etheldred hocha la tête en croisant le regard de Keshem. Oui, il fallait continuer à vivre... Et de toutes façons quel autre choix avait-elle ? Il fallait aller de l'avant, il avait raison. A peu près rassérénée, elle écouta la réponse de Keshem car la question qu'elle avait posée avait été reprise par le magicien.

Ainsi donc, il s'agissait de ça ? Bizarre, ce baron de proposer une place dans sa garde à un braconnier... même pour une perdrix soit disant pas bien grosse ce qui tira un sourire amusé à Etheldred. Ben voyons ! Et tout ça pour en venir à sauver le roi. Eh bien ! Elle eut un petit rire en commentant :

" Impressionnant... Nakor, vous qui parliez de malchance chanceuse ! "

Si ça ce n'était pas un bel exemple ! Elle secoua la tête à la question suivante, retrouvant son sérieux :

" Non, je n'en sais rien. J'ai passé trop de temps enfermée à ce moment là, je n'ai pas suivi grand chose... A moins qu'il ne soit passé par mes soins, mais je serais incapable de le reconnaitre et je pense qu'on me l'aurait indiqué s'il s'était s'agit de quelqu'un d'aussi important. "

Non, elle avait beau repasser en mémoire les plus grandes personnalités qu'elle avait soigné, elle ne se souvenait de personne qui puisse avoir un rapport. Cela dit, il se pouvait que sa mémoire lui joue des tours, elle n'avait évidemment pas pu se rappeler chacun de ses patients.

" Je suis désolée, mais j'étais absorbée par mon travail... D'ailleurs, je me demande également ce qu'est devenu le général Belegar... Il est porté disparu. L'auriez vous vu ? "

Elle se contenait, parce qu'elle ne voulait pas que Nakor lui refasse un second sermon, mais difficile de ne rien demander quand Keshem posait une question aussi similaire à celle qu'elle se posait. Elle se doutait qu'elle aurait une réponse négative, probablement comme lui d'ailleurs, mais ça ne coutait rien de demander, non ?

Nakor écouta donc la fabuleuse quoi que trop courte histoire de Keshem. Il pointa Etheldred à l'aide de son index droit dans un silence entendu, à plusieurs reprises lorsqu'elle nota l'exemple de malchance chanceuse dont Nakor parlait précédemment. Comme un vieux professeur qui confirmerait d'un hochement de tête que son élève avait compris la leçon! Il laissa donc Keshem finir et lorsqu'il entendit la dernière question du récent chevalier, Nakor eu un léger tic avec l'œil droite, celui ci se ferma légèrement, en vibrant un peu. Puis le vieux mage vint se caler fortement contre le fond de son siège et finit d'écouter Etheldred en faisant la moue dans un silence trop inhabituel pour le vieux fou. Et voila que la guérisseuse posait une autre question du même genre. Nakor eut subitement un regard encore plus noir en direction des deux compagnons. Un silence pensant s'abattit sur la table et dans une énième mou, forçant sur ses lèvres comme pour se donner du courage et prendre une décision, Nakor se mit à parler.

"Dommage, nous étions si bien partit pour rire jusqu'à la fin de la soirée mes amis!"

Nakor s'avança un peu, et profita du brouhaha ambiant pour parler à voix basse, de sortes que les deux humains soient les seuls à l'entendre.

"Vous savez, avoir fêté son six cents vingt troisième anniversaire il y a peu donne certains ... avantage! L'un deux est de pouvoir entretenir des relations avec beaucoup de monde, voir même avec les têtes couronnées de notre monde mes enfants ... Le général Belegar est considéré par Garmin lui même, le roi des nains, comme disparu et donc tombé lors de la bataille."

Nakor parlait directement, durement et simplement, plantant son vieux regard plein d'une subite très vieille sagesse et d'une puissance presque trop grande

"C'est une lourde perte, j'ai moi même accomplis quelques petites aventures avec Belegar, avant qu'il ne devienne général, c'était une personne extraordinaire et mon cœur est lourd de savoir que je ne le verrai plus dans ce monde!"

Nakor fit silence, ses yeux se perdant dans les limbes d'anciens souvenirs heureux. Puis il se tourna un peu plus vers Keshem Lerr

"Quand à Charles ... je ne peux qu'émettre des hypothèses, des hypotheses que je garderai pour moi, car elles sont très noires et elles ne doivent pas être nommé en présence de tant de gens ... mais une chose est sur mon ami, Charles, tel que vous l'avez connu n'est plus!"

Nakor était encore plus noir et avait les traits tiré. Il refusait de dire, qu'il s'était rendu aux abords de la baronnie pour savoir ce qu'il s'était passé et où était passé Charles. Et il refusait de dire la terrible magie noir et chaotique qu'il y avait senti, auprès des cadavres qu'il y avait trouvé, autant de domestiques que de prêtres! Le vieux mage avait alors fait des suppositions au vue de ses connaissances magiques et était à peu prés persuadé d'avoir raison. Mais jamais il ne nommerait les enfants du chaos au milieu même de Diantra! Pas même en plein jours. Nakor se radossa à son dossier, paraissant subitement très fatigué, comme le serait un homme qui avait lutté de toutes ces forces, toutes sa vie, pour une chose dont il ne voyait jamais l'aboutissement.

"Oui mes enfants, la guerre ne fait pas de mal qu'au moment où elle survient! Même bien des années après, elle peut encore faire souffrir, lorsque les souvenirs se mêlent à ce que le temps apporte comme lot de vérité et de connaissance!"

Puis Nakor retrouva son sourire, un sourire qui illumina presque la pièce tant il était vrai et intense, tant il cachait malice et force de vie renouvelé

"Mais cela ne doit pas tenir notre esprit : la plus grande force du mal est de gagner un combat sans avoir eu à mener de soldat sur le champ de bataille! Oui, car la peur, la crainte et la folie sont les armes du mal! Le mal les distille en nous comme des petites graines, qui poussent lentement et surement ... sauf si nous n'oublions pas, de temps à autre, de rallumer la lumière, et de rire et de chanter!"

Nakor avait dit tout cela parce qu'il savait que les deux jeunes humains risquaient d'etre accablés par les nouvelles qu'il amenait, et ils ne devaient pas sombrer dans la folie pour autant! Au contraire, ils devaient resister au mal. Nakor mêla ses propos à ses actes il se mit à chantonner un petit riant en riant et leva subitement son verre

"Holà tavernierrrrrrrrr, une nouvelle tournée pour mes amis et moi! Et que ça saute!"

Nakor glissa un clin d'œil à ses camarades et les trois verres, posés devant les trois personnes à la table, se mirent à sautiller sur place, comme s'ils dansaient tous les trois. Nakor ria doucement devant ce petit spectacle et se tourna de nouveau vers Etheldred, comme s'il venait de se souvenir de quelque chose

"Et dites moi un peu ma chère, avez vous pensé à ma proposition de la dernière fois?"

Nakor, un regard plein de malice attendit de voir si la guérisseuse se souviendrait de l'histoire d'école d'herboristerie dont il lui avait parlé en Alonna et qui manquait tant, selon Nakor à une ville comme Diantra. Bien sur il se doutait que les deux jeunes humains voudraient poser d'autres questions sur ce que Nakor avait dit. Mais peut être avait il était assez noir et clair pour qu'ils n'en posent pas! Peu importait Nakor répondrait autant que possible. Et il n'irait pas là où il ne voulait pas aller, comme il avait toujours fait, depuis six siècles.

La jeune herboriste répondait par la négative, rien de vraiment étonnant, à vrai dire. Aucun membre du Lys d’Or n’avait pénétré dans la ville, mais il fallait en être sur. Elle aussi, cherchait quelqu’un ; Belegar, un nain. Le colosse réfléchit rapidement et soupira un

Non, ça me dit rien …

Il tourna la tête vers le vieux fou qui s’était affalé au fond de sa chaise, l’œil se faisant bien plus sombre qu’au début de leur entrevue. Il marmonna dans sa barbe, avant de se pencher vers ses deux compagnons, pour répondre à leurs interrogations. Le nain était donc porté disparu, mais le colosse ticqua sur le terme « tombé ». Nakor confia qu’il avait partagé quelques aventures avec le général nain, compatissant à la tristesse qui devait envahir Etheldred. Le chevalier s’adressa à la jeune femme dès que le magicien eu terminé

Il est considéré comme disparu … Jusqu’à preuve du contraire, il est vivant … Gardez confiance

La même confiance qu’il avait en Charles de Hautval … Il savait que le Baron était en vie, il fallait juste savoir où chercher. Après tout, il avait bien trouvé des drows en plein milieu des terres humaines, alors un homme aussi chauve que caractériel, au milieu de la populace qu’il méprise … De la rigolade !

Le magicien évoqua justement la destinée du Baron, il avait changé, disait-il ! Chez Keshem, cela résonna en « il est vivant » … Enfin la preuve ! Enfin l’indice ! Le colosse se redressa sur sa chaise en fixant le vieux fou qui philosophait sur la guerre. Il reprit un sourire jovial et un ton plus guilleret, puis divagua sur le mal, la crainte, avec une histoire de graines aussi … Bref ! Lerr n’écoutait plus vraiment, il repensa au Seigneur Portelame et à Johann, à cette mission qui tardait à partir de Diantra par manque d’éléments. Alors que Nakor passait une nouvelle commande bruyamment, les verres sur la table se mirent à danser. Ce nouveau tour fit écarquiller, encore une fois, les yeux du grand enfant mais il se ressaisit et interrompit Nakor alors qu’il interrogeait Etheldred.

Attendez … Euh … Excusez-moi, mais c’est vraiment important … Charles est bien en vie. Il est le chef de mon ordre, c’est lui qui a fait de moi un chevalier … Une expédition doit être mené … Avez-vous trouvé des traces ? Où mènent-elles ? … Je vous demande justement une direction, je vous en prie, Messire Nakor !

Des réponses du vieux magicien pouvait dépendre beaucoup. Un petit indice, et il pouvait partir avec Johann. Il attendait la réponse avec une impatience non dissimulée.

Etheldred ne put retenir un soupir lorsque Nakor annonça qu'ils étaient partis pour rire toute la soirée. Elle aurait bien aimé pouvoir y croire, mais là... Elle n'osa pas interrompre le silence dans lequel le magicien s'était plongé. Que savait-il au juste ? Elle ne savait plus vraiment si elle avait encore de l'espoir mais elle resta là, pendue à ses lèvres. Si seulement...

" Le général Belegar est considéré par Garmin lui même, le roi des nains, comme disparu et donc tombé lors de la bataille."

Etheldred serra les dents et ferma les yeux un moment le temps de se ressaisir. Elle était devenue blême. Quoiqu'elle ait pu se dire ces derniers temps, la disparition la touchait, le nain avait bien été son seul ami depuis qu'elle avait quitté Diantra, plus d'un an plus tôt. enfin, elle n'allait pas se mettre à pleurer maintenant, c'était trop...

" Il est considéré comme disparu … Jusqu’à preuve du contraire, il est vivant … Gardez confiance. "

La jeune femme rouvrit les yeux à ces mots et remercia Keshem d'un pauvre sourire. Disparu, tombé... Si encore elle était sure qu'on ne l'ait pas retrouvé. Mais il y avait tant de cadavre impossibles à identifier, elle était bien placée pour le savoir. Elle laissa Nakor enfoncer le clou et fixa son verre pendant que la conversation dérivait sur Charles de Hautval. En fait, le magicien avait raison : il valait mieux qu'elle tourne la page, parce que de toutes façons elle n'y pouvait rien. C'était bon pour les chevaliers de rechercher leur chef à travers tout le pays, elle n'en n'avait pas les moyens. Si le roi des nains lui même n'avait pu le retrouver, alors Belegar était bel et bien perdu, qu'il ait succombé ou non. Elle n'avait plus qu'à se ressaisir.

" ...un peu ma chère, avez vous pensé à ma proposition de la dernière fois ? "

Etheldred releva enfin les yeux, l'air un peu perdue, consciente qu'il lui manquait un bout de phrase.

" Pardon ? "

La proposition ? Ah, oui... L'herboristerie... elle se revit discuter avec le magicien à Alonna. C'était fou...

" Oui et non. "

"Oui", parce que c'était un fabuleux projet et "non" parce qu'elle se devait de rester un minimum réaliste tout de même ! Enfin, peu importait car elle fut coupée par Keshem qui réclamait plus d'informations sur son baron. Etheldred n'avait pas écouté ce que Nakor avait dit - pas plus qu'elle n'avait fait attention à la seconde tournée ou aux verres magiques - et elle en conclut que ce Charles devait, lui, être encore vivant. Elle but une gorgée de son bochet qui était loin d'être vidé et se replongea dans la conversation, résolu à mettre de côté sa tristesse.

Etheldred donna une réponse plus que flou après avoir encaissé le choc de la disparition officielle de Belegar! Ce foutu nain avait du trouver la mort en cherchant à tuer trop de drows en même temps! C'était une grande perte pour le peuple nain, et Nakor aimait beaucoup celui qui était devenu général ... mais ainsi allaient les choses! Voila que Keshem cherchait à mettre en place une mission pour retrouver De Hautval. Nakor prit la parole d'un ton clair, mais qui ne souffrait aucune réponse

"Ecoutez moi bien chevalier ... vos sentiments sont très nobles et respectables! Votre ordre ... comment est ce déjà ... Le Lys d'Or ... a perdu son chef actuel! C'est une perte lourde, que nous pouvons tous pleurer! Mais croyez moi, si les choses se sont passé comme je le crois, soit Charles est mort soit il a choisi une vie qui n'en est plus une! Une vie où il aurait vendu son âme pour pouvoir assouvir une quelconque quête, une vengeance ou je ne sais quoi!"

Nakor hésita, il arqua de nouveau son œil droit en se concentrant sur le chevalier Lerr, puis reprit la parole

"Vous avez assisté à la bataille n'est ce pas! Alors vous savez de qui je parle quand j'emploi le terme les enfants du chaos! Il émane de ces créature une aura très singulière pour un mage qui a un peu plus de flair que la normal! Et croyez moi, je pourrai le jurer devant tout votre ordre au complet si vous en aviez besoin! Mais sur la scène de carnage chez Charles lui même, l'air était saturé de la magie noire des enfants du chaos! Si vous cherchez Charles de Hautval et que vous le retrouvez ... alors vous tomberez nez à nez avec la plus grande des menaces que vous pourriez croiser dans votre vie! Oubliez De Hautval, car le Charles que vous avez connu est mort et rien, pas même mes artifices ne pourrait le ramener!"

Nakor balaya l'air de sa main droite, comme s'il balayait toutes les questions que Keshem pourrait poser sur ce point! Nakor avait été clair : Charles était forcement mort, soit au sens propre du terme, soit il avait vendu son âme aux enfants du chaos en échange de pouvoirs! Dans les deux cas il était mort et aucun mage ne pourrait rien y faire. Et encore moins un soldat! Le vieux mage laissa donc la fureur du chevalier se contenir ou s'apprêter à exploser et se tourna vers Etheldred! Il commença

"Dans oui et non il y a certes non, mais il y a aussi oui!"

Nakor se mit à rire un peu, ce qui détendit l'atmosphère un brin froide que les propos dur de Nakor avait amené!

"Tu dois penser que c'est un projet fou n'est ce pas? Mais pas tant que cela ... les herboristes transmettent leurs connaissances à leurs apprenti avant de mourir ou de partir pour s'installer ailleurs! Hors, si la magie fait peur encore de nos jours, l'herboristerie non! Et je trouve qu'il serait extraordinaire de pouvoir répandre ce savoir de manière plus vaste ... un monde avec plus de médecin, est un monde mieux soigné, et notre monde est bien malade ma chère!"

Nakor attendait donc de voir ce que la jeune femme pensait de tout cela! Après tout une école d'herboristerie à la capitale du monde des hommes serait une très bonne chose, sur bien des aspects! Nakor pourrait même y prendre part.

Le regard impatient du colosse se fit de plus en plus sombre, alors que Nakor reprenait ses explications en insistant sur le fait, que Charles de Hautval était perdu. Il laissa entendre que le Baron, si droit, si fier, avait embrassé un sombre destin, celui de ceux qui se font appeler les Enfants du Chaos. Le colosse donna l’impression de s’effondrer sur lui-même, son regard se perdant dans les dernières gouttes de son verre, alors qu’il ressassait les paroles du vieux bonhomme. Le ton du magicien ne laissait aucune équivoque, pour lui, Charles était perdu, et il ne fallait plus en parler. Le colosse, dépité, lâcha un.

Oh …

Il laissa ses deux compères discutait, ressassant les paroles du vieux magicien. Il pensa à Charles, à son caractère, au peu de choses qu’il avait apprit sur le Baron, et une seule conclusion était possible. Le magicien faisait fausse route, indubitablement, de Hautval ne pouvait devenir un de ses êtres tentaculaires qu’il avait aperçut, et, de toute évidence, il ne pouvait être mort. Le chevalier releva les regard alors que le magicien s’entretenait tranquillement avec la guérisseuse. Il se leva alors que Nakor terminait son exposé sur l’utilité d’une école d’herboristes, et, laissa choir une pièce d’argent devant son gobelet vide, puis il s’adressa à ses deux compères.

J’ai bien entendu vos mots, Magicien, mais mon devoir est de chercher le Baron … Je vous demande juste une direction depuis Hautval … Nord, Sud, Est, Ouest ! … Le danger ne me fait pas peur ! Joignez-vous à moi, si vous le souhaitez ! … Mais j’irai !

Il se tenait donc là, la main droite appuyée sur la table, penché vers ses deux acolytes, attendant une ultime réponse avant de rejoindre ses quartiers. Une direction … Un point cardinal … Ses yeux dépareillés sautaient du visage ridé du magicien, à celui, plus doux et lisse, d’Etheldred, l’air déterminé.

Etheldred écouta les propos du magicien sans trop se rendre compte de ce qu'il voulait dire. Le chaos, pour elle, ce n'était que des rumeurs ou des bribes de paroles glanées ça et là auprès des blessés d'Alonna. Pour elle il y avait eu les drows, des renforts pour ces derniers et elle n'avait peu ou pas fait le lien avec le chaos. En tous cas, ça avait l'air de perturber Keshem et elle le comprenait aisément. Néanmoins Nakor semblait décidé à continuer à parler avec elle et il repartit aussi vite sur le sujet de l'herboristerie.

Elle hocha la tête, retrouvant le sourire, avant de déclarer :

" Eh bien, pour le moment j'ai mis une annonce pour prendre un apprenti avec moi. J'avais fait promesse à ma grand-mère, qui m'a formée, de transmettre mes connaissances. Une école allant dans ce sens ce serait... "

Elle laissa sa phrase en suspens, le temps de trouver ses mots.

" Disons que ça ne me parait plus si démesuré, mais... ce serait une bonne chose, certes, mais... mais moi ? Pourquoi moi ? J'ai... elle eut un petit rire légèrement désabusé en désignant Keshem et Nakor. A l'heure actuelle, vous êtes tous les deux les personnes les plus "proches" de moi, simplement parce que c'est la deuxième fois que je vous croise et vous parle ! Vous vous rendez compte ? "

Oh, elle ne se plaignait pas de son sort, après tout, il y avait plus malheureux qu'elle. Au moins, elle avait un métier qui non seulement lui permettait de gagner sa vie, mais surtout la passionnait. Mais elle ne connaissait personne, au final. Ses patients réguliers restaient des patients, elle avait appris dès son plus jeune âge à ne pas mélanger travail et vie privée.

" Ce que je veux dire c'est que n'ai pas les capacités... relationnelles pour gérer ce genre de chose. Faire tourner une herboristerie familiale d'accord, mais une école... "

Elle se tut, prenant conscience qu'après tout, c'était un peu ce qu'elle avait fait à Alonna. Seulement là-bas, il y avait eu urgence, elle n'avait pas pris le temps d'y réfléchir... Ses pensées furent coupées par Keshem qui s'était levé. Écoutant sa demande elle lui fit un sourire désolé et jeta un coup d'œil au magicien. Vu la façon dont ce dernier s'était exprimé, elle doutait fortement qu'il donne une direction, cela dit elle comprenait les efforts que déployait le chevalier. Elle aurait sans doute réagit de la même façon s'il s'était agit de Belegar. La moindre piste, quoi qu'il y ait au bout...

Nakor écouta les propos, d'un air amusé devant les pseudos hésitation d'Etheldred, puis ils furent tout deux coupé par Keshem, qui semblait avoir réfléchie longuement! Nakor espérait tellement que pour une fois, sa franchise lui éviterait d'envoyer encore quelqu'un à la mort. Mais après tout, on lui avait posé une question, Nakor avait répondu! Mais voila, Le chevalier Lerr, voulait une réponse plus précise! Nakor se pencha en arrière, le regard droit dans les yeux de Keshem et souffla longuement. Il hocha la tête, de gauche à droite puis parla d'une vieille voix, subitement fatigué par l'âge et les épreuves terrible qu'une longue vie lui avait fait subir

"Mon pauvre ami ... je vais répondre à votre question, mais avant cela je vais vous dire adieu, parce que si vous vous acharner à retrouver un homme mort, et bien vous savez comment cela finira : vous mourrez! Alors voila Adieu Keshem Lerr, le chevalier qui décida de se suicider pour sauver son maitre mort! Maintenant ... si j'avais envie de mourir, j'irai d'abord vers le nord ... puis arrivé aux abords de la forêt d'Aduram, je prendrai subitement vers l'Est!"

Nakor resta là, sans plus rien dire, ses yeux exprimant clairement qu'il en avait fini avec cette histoire. Si Keshem connaissait sa géographie, il saurait que cela l'envoyait droit sur les Marais, entre le Puy et ce que Nakor soupçonnait être une des entrée de la cité des enfants du chaos. Nakor hocha de nouveau la tête en pensant au gâchis que s'apprêtait à commettre un élève pour aller sauver son maitre, déjà mort! Tout cela avait rappelé à Nakor les sottises dont pouvait faire preuve les hommes et il se tourna vers Etheldred, un brin énervé que le chevalier l'ai presque obligé à lui dire comment mourir et d'un air encore bougon s'adressa à l'herboriste

"Une école nécessite de l'ordre et une maitrise totale des éléments qui y prennent part! De plus notre monde demande aussi à une école d'être économique! Une personne qui parvient à être détaché des gens qu'elle côtoie recèle en elle les qualités nécessaire pour respecter ces points là! Il faut savoir être distant, dur et ferme lorsque l'on dirige un établissement à but pédagogique ... et je vous verrez très bien dans la fonction d'enseignante directrice!"

Nakor se mit à rire un peu de nouveau, comme s'il venait d'oublier la présence du chevalier qui voulait mourir et parla sur un ton plus calme

"Il y a bien des aspects à gérer ... mais je suis certains que, en promettant aux nobles des soins gratuits en échange de leur mécénats, une grande école pourrait voir le jour ... et sur qui les apprenti pourraient s'entrainer? Hein? Hein? Et bien sur les pauvres foutu bon sang de bois! Le talent des médecins les mieux formé, presque officiellement au service de la couronne et officieusement qui dispense son savoir aux gens qui meurent parce qu'ils n'ont pas les moyens de se payer des remèdes! Remède que les riches peuvent très bien leur payer si on ne leur dit pas tout!"

Nakor explosa de rire, imaginant au fond de lui les riches nobles de Diantra qui se rendraient compte du poteau rose! Ca oui ce serait drôle, surtout une fois que l'école serait construite et que les réserves de produit médicamenteux seraient pleines ... rien ne pourrait plus être fait contre! Nakor vint un peu au secours de la jeune femme en ajoutant

"C'est une idée comme une autre ma fille, mais cela fait longtemps que cela traine dans ma vieille caboche de cinglé! Alors quand je vois passer devant moi une personne qui peut personnifier cette idée ... je m'y emploie avec un peu plus d'ardeur : deux trois mots à Trystan et Lilianna et on pourrait démarrer les choses ... deux trois mots au vieux Nakor et on peut les stopper dés maintenant autour de ... et bien d'une autre tournée! Hola foutu tavernier la même!"

Nakor frappa dans les mains attendant que de nouveaux verres pleins arrivent sur la table et restant là sans parler pour que le silence aide Etheldred et que Keshem, peut être, retrouve la raison et reste là, se rendant compte que, quand un roi meurt, personne ne va à sa recherche! Il est mort un point c'est tout! Il ne fallait pas chercher à le rejoindre, la noblesse d'âme était une chose, la folie une autre! Et il etait rare que la limite entre l'un et l'autre ne soit pas franchie.

Une nouvelle fois, le vieux Nakor s’affaissa sur son siège après l’intervention du chevalier. Il regretta l’acharnement de Keshem, lui expliquant que cette quête le ménerait à la mort, mais Lerr s’en moquait. Il avait passé sa vie à chercher et traquer, et maintenant qu’il avait achevé sa première quête, il se lancerait dans ce nouveau chapitre sans en démordre, quoiqu’on en dise. Le magicien donna pourtant à Keshem les informations qu’il cherchait, et le colosse les nota intérieurement. Nord … puis Est … Mais … Bien sûr qu’il connaissait sa géographie ; comment ne pas connaître la direction d’Anduram en étant bûcheron ? Un petit sourire illumina son visage devenu sombre et il s’adressa à ses deux compagnons.

Merci Messire Nakor … Et ne vous en faites pas pour moi, je ne mourrais pas … Peut-être nous reverrons nous un jour. Etheldred, Nakor, merci pour cet agréable moment et pour ces informations. Je dois vous quitter à présent ! Que Néera veille sur vous deux.

Il hocha la tête en guise de salut, souriant, car enfin il avait les réponses à ses questions. Il quitta alors l’auberge et se dirigea vers le Fort de la Vaillance pour informer le Seigneur de Portelame, et ainsi, la mission, qu’il attendait depuis tant de temps, pourrait débuter.

[HJ : Bonne continuation et merci ^^]

Keshem allait faire une bêtise et Etheldred en eut froid dans le dos. En même temps, elle le comprenait... Enfin, elle secoua la tête, désolée pour lui.

" Je vous souhaite bonne chance, chevalier. "

Il en aurait sans doute besoin, si Nakor disait vrai, ce dont elle ne doutait pas une seconde. Laissant partir Keshem en espérant qu'il ne lui arrive rien de fâcheux, elle reporta son attention sur ce que disait Nakor. Une école...

Elle finit par se mettre à rire de concert avec le magicien. Enseignante directrice ? Elle avait bien du mal à s'imaginer dans ce rôle mais, en soit, pourquoi pas ? L'explication sur le fonctionnement des soins la plongea dans une réflexion intéressée. Ce n'était pas stupide, loin de là. Après tout, quelles étaient ses objections ? Qu'elle n'y parviendrait pas ? Depuis quand baissait-elle les bras avant même d'essayer ? C'était le genre de comportement défaitiste qui lui aurait valu un bonne taloche de la part de son père... Et ensuite ? Ne pas vouloir avoir affaire avec les souverains ? Enfin, ce n'était pas parce que Nakor leur en touchait deux mots qu'elle risquait de devoir diner à leur table ! Alors, que craignait elle ?

" C'est un beau projet. "

En parlant, elle avait l'air de continuer à réfléchir, elle finit par ajouter :

" Je vais prendre un apprenti et voir comment ça se passe. Si je suis capable de lui enseigner à lui, alors oui, pourquoi pas, je songerai à cette école. "

Jouant un instant avec son verre - toujours le même, soit dit en passant, depuis le début - elle reprit fermement :

" Ce que j'ai fait à Alonna, ce n'est pas de l'enseignement : c'est du bourrage de crane au premier venu pour permettre au plus grand nombre de jouer au soigneur. Si c'était à refaire, je le referais mais il n'en demeure pas moins que ça n'a rien à voir avec un enseignement. "

Elle prit une gorgée avant d'ajouter, toujours avec sérieux :

" J'aimerais voir ce que je vaux comme professeur avec un unique élève et si c'est concluant, alors, oui, je suis prête à considérer ce projet. Cela dit... "

Elle eut un petit rire nerveux en concluant :

" Ça me parait totalement fou alors j'espère que vous ne comptez pas juste me lancer l'idée et disparaitre ! "

Si le projet prenait réellement forme... Elle devait reconnaitre qu'elel commençait à l'envisager sérieusement. Jamais elle n'aurait oser imaginer quelque chose d'aussi démesuré, mais maintenant... L'enthousiasme de Nakor était on ne peut plus communicatif, mais il n'y avait pas que ça : c'était réellement quelque chose qui intéresserait la jeune femme. Peut-être enfin une façon de construire quelque chose à long terme sans s'appesantir sur les fantômes du passé. Une façon de faire face au présent pour changer le futur et finalement, ça lui ferait sans doute el plus grand bien.

Nakor regarda Keshem partir un long moment avant de tourner la tête vers Etheldred, tout en disant, après avoir longuement soufflé

"Foutu immortalité ... et un jeune fou de plus que j'envoie à la mort pour une quête idiote ... combien devrais-je encore en envoyer hein!"

Nakor posait la question au ciel, et à personne d'autre, comme si une entité supérieure le poussait à agir de la sorte : à avoir les réponses aux questions que les gens lui posaient, des questions dont les réponses menaient à la mort absolue de celui qui s'engageait sur une telle voie! Le vieil homme parus soudain très très fatigué, usé par le temps et les épreuves d'une très longue vie, avec son lot infernal d'obstacle à franchir. Il parvint néanmoins à écouter la guérisseuse qui s'était enfin mise à rire, cela contrastait avec sa mauvaise humeur momentanée et le vieux fou reprit ses vieilles habitudes. Il ria de bon cœur avec la jeune femme puis eut une petite lueur qui s'alluma dans ses yeux. Lorsque Etheldred termina sa phrase sur l'éventualité de disparaitre subitement, Nakor se tourna vers elle et demanda

"Disparaitre? Comment? Comme ça?"

Et Nakor disparue pour de vrai, il venait d'activer le sortilège ancien qui était enfermé dans son bâton! Par ce sortilège, Nakor devenait invisible, inodore et surtout les bruits qu'il faisait étaient masqué par les pouvoirs du bâton qu'il avait trouvé il y avait des siècles dans les ruines de Nisetia. Etheldred se retrouvait donc devant un vieil homme qui avait disparu d'un seul coup, sans faire de bruit. Nakor désactiva son sortilège au bout de cinq seconde et explosa de rire. Une fois calmé il parvint à ajouté d'une voix enjoué

"Oui je pourrai en effet disparaitre, mais je ne suis pas du genre! Surtout quand l'idée est folle, cela me plait encore plus ma chère! En effet Alonna ce n'était pas de l'apprentissage, c'était de la médecine de guerre ma fille ... mais tu t'en es très très bien sorti, tu possède cette distance dans la pratique de ton métier, qui permet de diriger sans siller, en affrontant la tempête et en gardant la tête froide! Véritablement je mise sur toi!"

Nakor reçu enfin son troisième verre, de toutes les façons son contact continue avec sa magie intérieur lui interdisait de subir les effets de l'alcool, il pouvait donc boire des litres sans jamais être soul! Nakor appréciait donc le bon vin rouge épicé. Il prit une gorgé après glissé un clin d'œil à la guérisseuse puis reprit.

"Bien sur, tu as tout à fait raison, on ne devient pas professeur en un claquement de doigt ... j'en sais quelque chose fais moi confiance"

Un petit rire de vieillard, conspirateur et malicieux ainsi que complice vint ponctuer la phrase

"Mais nous finirons par nous revoir alors ... puisque l'idée ne te semble plus aussi stupide et impensable qu'à Alonna! Trouve toi une apprentie, ou un apprenti bien sur ... et vois ce que tu arrive à faire, si ta patience pédagogique existe ou non, et si le projet que j'ai planté en toi germe ... vient me voir au palais, demande moi aux gardes, dis leur que tu viens voir le vieux cinglé et que tu es attendu! Ils te mèneront là où je serai ma fille."

Nakor se radossa à son fauteuil et profita un peu de se délasser, son vieux dos fatigué lui faisant mal. Puis il reprit ses propos mais sans plus se rapproché d'Etheldred

"Et même si l'école ne doit pas voir le jour, n'hésite pas à venir me voir pour me faire un petit coucou et boire un thé avec le vieil homme que je suis! J'apprécie ta présence et si en plus tu semble être seule à Diantra ... il n'est pas bon de rester toujours enfermé et pratiquer pratiquer pratiquer! Il faut avoir une vie, pour se donner un sens encore plus grand et donc encore plus de force pour mener à terme la tache que l'on s'est donné envie de mener à bon port! J'espère donc que notre petite entrevue ici, ne serait pas la seule que nous aurons d'ici le prochain siècle ... est ce que c'est clair!"

Nakor prononça ses derniers mots avec une moue soupçonneuse, puis un sourire y laissa place et le vieux papy gâteau resta silencieux, espérant que la jeune femme appréciait le vieil homme et qu'elle viendrait au palais lui donner de ses nouvelles de temps en temps si elle se sentait seule!

" Foutu immortalité... et un jeune fou de plus que j'envoie à la mort pour une quête idiote... combien devrais-je encore en envoyer hein ! "

Etheldred était autant désolée pour Keshem que pour le magicien. Elle murmura à ce dernier :

" Il valait mieux qu'il sache, il aurait persévéré de toutes façons... vous n'y êtes pour rien si ce monde est fou... "

Enfin, le vieil homme se remit à rire et décida même de lui faire une démonstration de ses talents. Avoir eu affaire à une magicienne peu de temps auparavant n'empêcha pas la jeune femme de manquer tomber de sa chaise. Fixant le vide avec de grands yeux écarquillés, on pouvait voir aisément qu'elle n'était pas plus rassurée que ça. Elle eut d'ailleurs un petit sourire soulagé à l'adresse de Nakor quand il réapparut, sourire qui devint gêné sous les compliments. Il misait sur elle ? Oula ! Elle avait l'impression d'entendre sa grand-mère, là ! En fait, maintenant qu'elle y pensait, la ressemblance entre les deux personnages était frappante. Peut-être pour ça qu'elle appréciait le temps passé avec Nakor. Bon, d'accord, la vieille femme n'avait rien eu à voir avec la magie et elle ne souriait pas très souvent, mais elle avait cette espèce de force de caractère, cette énergie, qui vous poussait vers le haut coute que coute.

Etheldred hocha sagement la tête lorsque Nakor lui dit de venir le trouver au palais. Hum... il allait falloir qu'elle ose aller là-bas. Mais si c'était pour la bonne cause...

" C'est promis. Je viendrai vous voir dès que j'aurai trouvé un apprenti et que je serai parvenue à lui transmettre quelque chose. Et si je n'y arrive pas... Je viendrai quand même vous faire un petit coucou. "

Reprenant son sac qu'elle avait posé à côté d'elle, elle se leva en déposant de quoi payer sur la table.

" Veuillez m'excuser, mais il faut que je rentre, à présent. Ça m'a fait plaisir de vous revoir... vous me rappelez ma grand-mère, d'une certaine façon. "

Se rendant compte que ça pouvait être très mal pris, elle devint soudain rouge comme une pivoine et balbutia pour se reprendre :

" Heu... c'est... c'est un compliment. C'était quelqu'un de bien ! C'est elle qui m'a élevée, elle m'a tout appris ! "

Ah ben bravo ! Qu'allait-il penser franchement ? Reprenant à peu près contenance, la jeune femme finit par conclure :

" Hum... bien, à bientôt alors. "

Et sur ce, elle se dirigea vers la sortie, s'arrêtant juste au passage pour demander au gamin qui l'avait amenée là au début si son père allait mieux.

Nakor entendit les quelques mots de la jeune femme pour le réconforter, il hocha alors doucement la tête, comme s'il entendait le doux bruit d'un ancien murmure qu'il connaissait bien et qu'il n'avait même plus vraiment besoin d'entendre pour savoir ce qu'il avait à faire! Etheldred promis enfin qu'elle viendrait voir le vieillard au palais lorsqu'elle aurait fait avancer sa petite mission de premier enseignement. Puis la guérisseuse posa une pièce et répondit une chose extraordinaire. Nakor ouvrit grands les yeux et se retint de toutes ses forces, mais la jeune femme continua et le vieillard ne put s'empêcher d'exploser presque littéralement de rire. Les larmes lui vinrent aux yeux tant il riait de s'être fait comparé à une grand mère. Nakor eut même très rapidement les larmes aux yeux et eut mal au ventre tant il riait aux éclats. Ce fut l'une des rares fois où Nakor ne put pas se contenir ni se calmer avant un long moment. Reprenant juste assez de souffle il fit signe à Etheldred qu'elle pouvait partir qu'il était heureux qu'ils se revoient bientôt et qu'il ne l'avait pas mal prit, bien au contraire c'était une forme très touchante de comparaison. Une fois le souffle revenu et le rire dissipé, c'est à dire après un long moment, Nakor parla seul, regardant la pièce qu'Etheldred avait posée sur la table

"Oui, à très bientôt ma chère amie ... avec grand plaisir même!"

Puis Nakor fit un clin d'œil et la pièce s'envola pour aller rapidement retrouver sa maitresse qui avait quitté les lieux quelques secondes avant. D'ici peu de temps la guérisseuse allait voir une pièce familière flotter devant elle, jusqu'à ce qu'elle la récupère et la remette dans sa poche. Nakor se leva alors, assez rapidement pour que Etheldred n'ait pas le temps de revenir pour lui rendre la pièce de force, posa suffisamment d'or pour payer les tournées et s'en alla, disparaissant presque tant il était apte à se fondre dans la masse d'une ville qu'il connaissait depuis plus de six cents ans.

RP TERMINE

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